« “L’amour, qui s’allume rapidement dans un cœur sensible et tendre, s’alluma dans le cœur de celui-ci pour le corps que j’avais alors, et qui me fut ravi par une mort dont l’horreur irrite encore ma mémoire. […] « Pendant que l’une de ces âmes parlait ainsi, l’autre âme pleurait avec de tels sanglots que je m’évanouis de pitié, comme si j’allais mourir, et je tombai à terre comme un corps mort tombe ! […] « Dans l’excès de ma douleur, je me mordis les deux mains, et eux, pensant que c’était la faim qui me faisait chercher à manger ma propre chair, se levèrent en sursaut et me dirent : “Père, ce sera moins affreux pour nous si tu te nourris de nos corps ; c’est toi qui nous as revêtus de ces misérables chairs, c’est à toi à nous en dépouiller s’il le faut.” […] Ici ce sont des damnés dans l’enfer du froid, dont les larmes se glacent en coulant des yeux ; là des âmes déjà torturées dans l’enfer pendant que les corps de ceux qui portent leur apparence et leurs noms sur la terre continuent à y vivre ; ailleurs le roi des démons broyant trois damnés à la fois dans ses mâchoires : ces trois damnés sont Judas, Brutus et Cassius. […] Puis Virgile et Dante remontent de l’abîme, en se servant, en guise d’échelle, des poils du corps de Lucifer, précipité du ciel la tête en bas !
J’aime bien ces vins qui ont corps, et condamne ceux qui ne cherchent que le coulant à boire de l’eau. » Tout en se piquant, et avec raison, de n’être point coulant de style et d’être plutôt rude et fort de choses, d’Aubigné ne s’interdisait pas d’être recherché et alambiqué au besoin en certaines de ses productions poétiques. […] Suit un discours de Mme l’Amirale (Charlotte de Laval), tenu au milieu de la nuit dans ce lit patriarcal des ancêtres, et tel que, la situation étant donnée, ne pourrait rien trouver de plus émouvant un Corneille ou mieux un Shakespeare64 : C’est à grand regret, monsieur, disait-elle, que je trouble votre repos par mes inquiétudes ; mais, étant les membres de Christ déchirés comme ils sont, et nous de ce corps, quelle partie peut demeurer insensible ? […] Nous sommes ici couchés en délices, et les corps de nos frères, chair de notre chair et os de nos os, sont les uns dans les cachots, les autres par les champs à la merci des chiens et des corbeaux : ce lit m’est un tombeau puisqu’ils n’ont point de tombeaux ; ces linceuls me reprochent qu’ils ne sont pas ensevelis… Elle finit par le presser de ne plus tarder et de se mettre en avant au nom du sang versé : « L’épée de chevalier que vous portez est-elle pour opprimer les affligés ou pour les arracher des ongles des tyrans ? […] La reine mère, « soupçonnant le vigoureux esprit et le corps laborieux de son gendre », l’avait entouré de gardes vigilantes et l’amusait d’amourettes.
On le considérait avec grande curiosité, comme un des trophées du Roi… Chacun, voyant ledit Rohan, était obligé d’avouer qu’il n’y avait plus de corps d’hérétiques en France, puisqu’il avait été décapité, et que l’on voyait le chef comme porté en triomphe par les ports d’Italie. […] L’idéal de Rohan, une fois hors des guerres civiles, aurait été de commander un corps d’armée à part, opérant avec indépendance. Dans des négociations qui eurent lieu pendant la seconde guerre (1625), il avait demandé à être envoyé en Italie sous Lesdiguières à la tête d’un petit corps d’armée de 6000 hommes et de 500 chevaux. […] Son corps fut enterré en grande pompe dans l’église de Saint-Pierre de Genève.