/ 2133
399. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Introduction. » pp. -

Il pourrait étudier, décrire, raconter tous les événements, toutes les transformations, toutes les révolutions qui se seraient accomplies dans l’intérieur de l’homme ; et quand il serait arrivé au bout, il aurait une histoire de la civilisation chez le peuple et dans le temps qu’il aurait choisi. » (Guizot, Civilisation en Europe, p. 25.) […] Là-dessus une statue comme le Méléagre ou le Thésée du Parthénon, ou bien encore la vue de cette Méditerranée lustrée et bleue comme une tunique de soie et de laquelle sortent les îles comme des corps de marbre, avec cela vingt phrases choisies dans Platon et Aristophane vous instruiront beaucoup plus que la multitude des dissertations et des commentaires. —  Pareillement encore, pour entendre un Pourana indien, commencez par vous figurer le père de famille qui, « ayant vu un fils sur les genoux de son fils », se retire selon la loi, dans la solitude, avec une hache et un vase, sous un bananier au bord d’un ruisseau, cesse de parler, multiplie ses jeûnes, se tient nu entre quatre feux, et sous le cinquième feu, c’est-à-dire le terrible soleil dévorateur et rénovateur incessant de toutes les choses vivantes ; qui, tour à tour, et pendant des semaines entières, maintient son imagination fixée sur le pied de Brahma, puis sur le genou, puis sur la cuisse, puis sur le nombril, et ainsi de suite jusqu’à ce que, sous l’effort de cette méditation intense, les hallucinations paraissent, jusqu’à ce que toutes les formes de l’être, brouillées et transformées l’une dans l’autre, oscillent à travers cette tête emportée par le vertige, jusqu’à ce que l’homme immobile, reprenant sa respiration, les yeux fixes, voie l’univers s’évanouir comme une fumée au-dessus de l’Être universel et vide, dans lequel il aspire à s’abîmer. […] J’entreprends ici d’écrire l’histoire d’une littérature et d’y chercher la psychologie d’un peuple ; si j’ai choisi celle-ci, ce n’est pas sans motif. […] J’ai choisi l’Angleterre, parce qu’étant vivante encore et soumise à l’observation directe, elle peut être mieux étudiée qu’une civilisation détruite dont nous n’avons plus que les lambeaux, et parce qu’étant différente, elle présente mieux que la France des caractères tranchés aux yeux d’un Français.

400. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

« Prosternez-vous dans la poussière devant son choisi, de peur qu’il n’entre en courroux et que vous ne périssiez tous sur son chemin ! […] Le poète s’adresse d’abord aux envahisseurs du sol sacré ; puis à Jéhovah, qu’il fait parler par sa propre bouche pour rendre confiance à Saül ; puis à Saül auquel il se substitue tout à coup pour lui faire tenir un langage royal et rassurant pour lui-même et pour son peuple ; puis aux ennemis, de nouveau, pour qu’ils se repentent, se soumettent et se résignent à la domination du choisi, de l’élu, du sacré, c’est-à-dire de Saül ! […] XXV J’aurais, moi, humble poète d’un temps de décadence et de silence, j’aurais, si j’avais vécu à Jérusalem, choisi le lieu de mon séjour et la pierre de mon repos précisément où David choisit le sien à Sion.

401. (1856) Cours familier de littérature. I « Digression » pp. 98-160

Un peintre n’aurait pas choisi pour la peindre une attitude, une expression et un jour plus conforme à sa grandiose beauté. […] Ainsi, quand je te vis, jeune et belle victime Qu’un génie éclatant choisit pour ton malheur, Je cherchai sur ton front le rayon qui t’anime,             Et je fermai mon cœur. […] Ce parti ne pouvait pas choisir une personne plus accomplie pour l’un ou l’autre de ces rôles : Diane de Poitiers n’était pas plus belle, madame de Maintenon pas plus supérieure ; mais la jeune fille à qui on destinait leur rôle avait l’innocence qui manquait à l’une, la franchise qui manquait à l’autre. […] « Guide-moi, m’écriai-je, ô toi qui m’as choisie, Protège de mon cœur la pure ambition !

/ 2133