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507. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

Il était fils d’un protestant d’un grand caractère, qui lui fit jurer, sur les cadavres suspendus aux potences d’Amboise, sous peine de sa malédiction, de ne point épargner sa tête pour venger les généreuses victimes de la plus abominable trahison. […] Ce nom, ce serment, les souvenirs de persécution religieuse attachés à ces circonstances avaient tait sur l’âme du jeune Agrippa une de ces impressions qui dans les familles se transmettent de général ton en génération, forment dans l’esprit des enfants qui se succèdent une idée fixe autour de laquelle les premières notions et les premiers sentiments de morale se rangent et s’impriment en caractères ineffaçables75. […] L’orgueil étant désintéressé, elle se laissa aller à ce que pensait et pratiquait le couvent, soit par cette disposition à sympathiser avec des opinions générales, disposition qui formait un des traits de son caractère, soit par cette ambition d’estime, d’affection, de considération qui lui était propre aussi, et qui commençait à se développer en elle. […] Ce fut alors que le désir de la conserver et de retendre devint en elle une passion qui a formé le trait saillant de son caractère. Nous verrons en plusieurs occasions qu’elle déclare cette ambition ; qu’elle s’accuse d’être une glorieuse ; que madame de Sévigné se sert de cette expression pour peindre son caractère.

508. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre VI : Règles relatives à l’administration de la preuve »

Pour le sens commun, le mot de fièvre désigne une seule et même entité morbide ; pour la science, il y a une multitude de fièvres spécifiquement différentes et la pluralité des causes se trouve en rapport avec celle des effets ; et si entre toutes ces espèces nosologiques il y a pourtant quelque chose de commun, c’est que ces causes, également, se confondent par certains de leur caractères. […] Sans doute, il n’est pas de science qui ait jamais pu instituer d’expériences où le caractère rigoureusement unique d’une concordance ou d’une différence fût établi d’une manière irréfutable. […] Par conséquent, une pareille méthode de démonstration ne peut donner naissance qu’à des conjectures qui, réduites à elles seules, sont presque dénuées de tout caractère scientifique. […] Mais, plus on s’élève dans l’échelle sociale, plus les caractères acquis par chaque peuple sont peu de chose à côté des caractères transmis.

509. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

. —  Son caractère. —  Son éducation. —  Ses débuts. —  Ses luttes. —  Sa pauvreté. —  Ses maladies. —  Sa fin. […] Ses personnages, comme les caractères de la Bruyère et Théophraste, sont fabriqués à force de solides déductions. […] C’est ce caractère saillant qu’il met en lumière, non pas avec une curiosité d’artiste, mais avec une haine de moraliste. « Je les flagellerai, ces singes, et je leur étalerai devant leurs beaux yeux un miroir aussi large que le théâtre sur lequel nous voici. […] Quand nous pensons une chose, nous autres hommes ordinaires, nous n’en pensons qu’une portion ; nous en voyons un aspect, quelque caractère isolé, parfois deux ou trois caractères ensemble ; pour ce qui est au-delà, la vue nous manque ; le réseau infini de ses propriétés infiniment entre-croisées et multipliées nous échappe ; nous sentons vaguement qu’il y a quelque chose au-delà de notre connaissance si courte, et ce vague soupçon est la seule partie de notre idée qui nous représente quelque peu le grand au-delà. […] Ce caractère tient le milieu entre ceux de Fielding et de Samuel Jonson.

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