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551. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre VI. La poésie. Tennyson. »

Et ce n’est pas trop d’un art si juste, si consommé, pour peindre les miévreries charmantes, les subites fiertés, les demi-rougeurs, les caprices imperceptibles et fuyants de la beauté féminine. […] Il y mettait trop d’ornement et de ciselures ; il avait l’air d’être épicurien en fait de style et aussi en fait de beauté. […] Il avait senti cet étrange épanouissement de puissances inconnues qui subitement tient l’homme immobile1523 les yeux fixes devant la beauté qui se révèle. […] Le poëte joue avec la beauté ; nul badinage n’est plus romanesque ni plus tendre. […] Il n’a pris que la fleur dans leurs beautés.

552. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

Mais, malgré ces traits à noter et bien d’autres, ce second sermon pour la Toussaint est pénible, je le répète, un peu obscur, et, si l’on veut retrouver Bossuet tout à fait grand orateur, il faut passer au troisième : ou plutôt, dans une lecture bien faite et bien conseillée de cette partie des œuvres de Bossuet, on devra omettre, supprimer et le premier sermon et le quatrième, qui ne sont que des canevas informes, ne pas s’arrêter à ce second, qui est difficultueux, et alors on jouira avec fraîcheur de toute la beauté morale et sereine de cet admirable troisième sermon prêché en 1669 dans la chapelle royale, et où Bossuet réfutant Montaigne, achevant et consommant Platon, démontre et rend presque sensibles aux esprits les moins préparés les conditions du seul vrai, durable et éternel bonheur. […] Il n’y a rien après de telles beautés. Prenons maintenant tout autre sermon prêché depuis à la Cour, celui Sur l’ambition (1666), Sur l’honneur (1666), Sur l’amour des plaisirs (1662), des beautés du même ordre éclatent partout. […] Il y a des beautés dans ces deux discours ; on cite souvent, de l’Oraison funèbre du père Bourgoing, un beau morceau sur l’institution de l’Oratoire.

553. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite.) »

« Mais on n’est pas seul au monde, on n’est pas le type et le modèle unique et universel ; il y a d’autres moules que celui que nous portons en nous, il y a d’autres formes de beauté en dehors de celle que nous adorons comme la plus parente de notre esprit, et elles ont le droit d’exister. […] Le canal fait un coude, et vous pénétrez dans d’autres enceintes ornées de pièces d’eau et dont les murs conservent des traces de fresques du xvie  siècle… Au milieu d’un de ces bassins s’épanouit, comme une immense corbeille, un gigantesque laurier-rose d’un éclat et d’une beauté incomparables. […] Jamais rien ne m’a fait éprouver un sentiment plus vif de la beauté que ce laurier-rose du Généralife. » Et à ce laurier-rose glorieux et triomphant, « gai comme la victoire, heureux comme l’amour », il a même adressé des vers et presque une déclaration, telle vraiment qu’Apollon eût pu la faire au laurier de Daphné. […] Lui qui avait quelquefois aimé et rêvé des monstres, il put se dire, à la vue de l’Attique, de ce pays qui a été comme créé exprès sur l’échelle humaine : « J’ai connu trop tard la beauté véritable ! 

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