Il montre ces efforts subversifs toujours renaissants et infatigables, et les oppose, pour la stimuler, à la tiédeur des honnêtes gens qui, ennemis de tout ce qui peut avoir l’air de violence, se reposant sur la bonté de leur cause, espérant trop des hommes, parce qu’ils savent que, tôt ou tard, ils reviennent à la raison ; espérant trop du temps, parce qu’ils savent que, tôt ou tard, il leur fait justice ; perdent les moments favorables, laissent dégénérer leur prudence en timidité, se découragent, composent avec l’avenir, et, enveloppés de leur conscience, finissent par s’endormir dans une bonne volonté immobile et dans une sorte d’innocence léthargique. […] … élevez donc la voix, montrez-vous… Ce moment est le seul qui nous reste : c’est le moment précis où nous allons décider de notre avenir… La perte d’un poste est peu de chose, mais l’honneur de la France a été plus compromis par de détestables actions qu’il ne l’avait été depuis des siècles. […] Enfin, pour achever de dessiner cette noble figure d’un poète honnête homme et homme de cœur qui, dans la plus horrible révolution moderne, comprit et pratiqua le courage et la vertu au sens antique des Thucydide et des Aristote, des Tacite et des Thraséas, il ne faut que transcrire cette page testamentaire trouvée dans ses papiers, et où il s’est peint lui-même à nu devant sa conscience et devant l’avenir : Il est las de partager la honte de cette foule immense qui en secret abhorre autant que lui, mais qui approuve et encourage, au moins par son silence, des hommes atroces et des actions abominables.
Si l’avenir lui décernait un jour la gloire de l’avoir fait, ce qu’il n’ose espérer, il ne voudrait pas d’autre couronne. […] En août 1830, il y avait tant de générosité et de pitié dans l’air, un tel esprit de douceur et de civilisation flottait dans les masses, on se sentait le cœur si bien épanoui par l’approche d’un bel avenir, qu’il nous sembla que la peine de mort était abolie de droit, d’emblée, d’un consentement tacite et unanime, comme le reste des choses mauvaises qui nous avaient gênés. […] Et pendant quelques semaines, confiant et crédule, nous eûmes foi pour l’avenir à l’inviolabilité de la vie comme à l’inviolabilité de la liberté.
Cette usurpation va cesser, leur heure arrive enfin, leur prédominance éclate, la civilisation, revenue à l’éblouissement vrai, les reconnaît pour ses seuls fondateurs ; leur série s’illumine et éclipse le reste ; comme le passé, l’avenir leur appartient ; et désormais ce sont eux que Dieu continuera. […] Ce reflet nouveau du passé modifiera l’avenir. — L’ancien roi de Westphalie, qui était un homme d’esprit, regardait un jour sur la table de quelqu’un que nous connaissons une écritoire. […] Pendant que, du côté de l’engloutissement, de plus en plus penchante au gouffre, la flamboyante pléiade des hommes de force descend, avec le blêmissement sinistre de la disparition prochaine, à l’autre extrémité de l’espace, là où le dernier nuage vient de se dissoudre, dans le profond ciel de l’avenir, azur désormais, se lève éblouissant le groupe sacré des vraies étoiles : Orphée, Hermès, Job, Homère, Eschyle, Isaïe, Ézéchiel, Hippocrate, Phidias, Socrate, Sophocle, Platon, Aristote, Archimède, Euclide, Pythagore, Lucrèce, Plaute, Juvénal, Tacite, saint Paul, Jean de Pathmos, Tertullien, Pelage, Dante, Gutenberg, Jeanne d’Arc, Christophe Colomb, Luther, Michel-Ange, Kopernic, Galilée, Rabelais, Calderon, Cervantes, Shakespeare, Rembrandt, Kepler, Milton, Molière, Newton, Descartes, Kant, Piranèse, Beccaria, Diderot, Voltaire, Beethoven, Fulton, Montgolfier, Washington ; et la prodigieuse constellation, à chaque instant plus lumineuse, éclatante comme une gloire de diamants célestes, resplendit dans le clair de l’horizon et monte, mêlée à cette immense aurore, Jésus-Christ !