Il l’admire dans René, et en toute justice ; mais n’est-ce pas à Rousseau qu’il doit son origine ? […] La largeur de l’esprit et du goût en littérature comme en toutes choses a sans doute ses inconvénients, car elle peut dégénérer souvent en un éclectisme banal qui admire tout, ou un scepticisme blasé qui n’admire rien : en outre, elle peut faire perdre à une nation le sentiment de ses qualités propres et l’entraîner à la poursuite de qualités qui ne sont pas les siennes.
Personne n’admire plus que moi la beauté des fresques évocatrices de Leconte de Lisle, personne autant que moi n’admire chez Banville un magnifique poète et un conteur presque unique dans toute littérature, car je ne connais qu’Edgar Poe dans une couleur d’images différente, pour avoir fait tenir dans quelques volumes de contes brefs autant de vie et autant d’idées. Personne plus que moi n’admire notre grand Léon Dierx, et n’est sensible à ses magnifiques musiques verbales.
« Ce peintre, qui d’Alceste a tracé les vertus, « Ton Molière immortel admire mon Plutus. […] Cette coutume qu’avaient les poètes grecs de se borner à des sujets nationaux, fut une des causes de la vérité de leurs peintures et de la supériorité que nous y admirons. […] Jupiter eût été moins puissant sur elle, et l’on ne saurait trop admirer Sophocle au choix de la divinité qu’il fait descendre pour unir, dans l’accomplissement de son sujet, le sentiment à la majesté. […] Si le sujet oppose des difficultés à remplir cette obligation, c’est alors que l’art éclate davantage, et n’en est que plus admiré : cause nouvelle de plaisir pour le spectateur, qui s’en étonne. […] J’aime mieux que l’auteur ne l’ait pas rejetée par un timide scrupule que d’être privé du plaisir de l’admirer.