Étudier la raison d’un succès est toujours une belle question en critique… S’il est un livre pour lequel le journalisme ait battu de tous ses tambours, — et aux champs encore, — c’est ce livre des Réfractaires 24… L’auteur en fut un, m’a-t-on dit ; ce qui prouve, Dieu merci ! […] de par Dieu ! […] Dieu a tant d’esprit !
Mais en poésie, où tout est Sentiment et Expression, ces deux purs dons de Dieu, comme la Beauté et la Naissance, le travail compte pour rien quand il est tout seul, et voilà pourquoi la Critique, qu’on croit dédaigneuse et qui ne veut pas même être sévère, laisse là, en fait de poésie, les violettes de la médiocrité, d’autant plus cachées sous le foin de leur gazon que leur parfum ne les trahit pas. […] Un livre qui a des défauts littéraires d’autant plus grands qu’il est le produit d’un système, mais qui a aussi une valeur absolue, un mérite qui ne passera pas, c’est-à-dire la vérité presque maladive d’une inspiration qui ressemble à un empoisonnement, les Poésies de Joseph Delorme, datèrent bien ce commencement d’une époque traversée par nous maintenant, mais Dieu sait à quel prix ! […] Le poète, amoureux pendant si longtemps de la couleur, de la ligne et des mille nuances de la lumière, qui voulait peindre, comme Titien, la chair d’opale de sa maîtresse et ses … cheveux dont l’or blême frisonne Et se poudre d’argent sous les rais du soleil… cesse tout à coup, dans le dernier livre de ses sonnets de jouer cette gageure enragée qu’exprimait Shakespeare quand il parlait de dorer l’or et de blanchir les lys, et le voilà qui n’a plus souci que de la seule qualité d’expression que Dieu ait permise aux poètes !
si tu pouvais exhaler et fixer sur le papier cette vie qui coule en toi avec tant d’abondance et de chaleur, en sorte que le papier devienne le miroir de ton âme, comme ton âme est le miroir d’un Dieu infini ! […] On a sa première lettre de plainte à Goethe : « La ressemblance (avec Albert) ne porte, il est vrai, disait-il en terminant, que sur le côté extérieur, et, grâce à Dieu, seulement sur l’extérieur ; mais si vous teniez à l’y introduire, était-il donc nécessaire d’en faire un être aussi apathique ? […] Grâce à Dieu, nous avons vécu et nous vivons encore ensemble heureux et contents. » Il n’est que bien modéré quand il s’échappe jusqu’à dire : « Un de mes amis m’écrivait dernièrement : Sauf le respect pour votre ami, il est dangereux d’avoir un auteur pour ami. […] Il n’est pas ici ; il est depuis trois mois à Weimar chez le duc, et Dieu sait quand il reviendra. […] Que Dieu bénisse nos relations !