J’entends par ces idées tous les rapports de l’homme avec ses semblables et avec Dieu, selon l’état des sociétés et selon les religions. […] Dans les théologiens, l’homme n’est que le néant, par rapport à Dieu, qui est l’être. […] Des explications prodigieuses font descendre Dieu de l’infinie hauteur à l’infinie bassesse, afin que le néant sente quelquefois qu’il n’est pas indifférent à l’être. Ou bien l’homme est comme le champ de combat entre Dieu et le diable ; autre mystère, non mains inaccessible, de cette autre inégalité de l’ange déchu, mais toujours puissant, et de l’homme racheté, mais toujours corrompu. […] Le doux aignel innocent et sans amertume s’en alloit à occision, combien qu’il fust celui qui est Dieu benoist en trinité.
C’est la vie divine de l’enfance, où Dieu se révèle de si près à ceux qui savent adorer. […] Dans une hypothèse que je suis loin de prendre d’une manière dogmatique, mais seulement comme une belle épopée sur le système des choses, la loi de Dieu ne serait pas autre. […] L’histoire de l’être ne sera complète qu’au moment où la multiplicité sera toute convertie en unité et où, de tout ce qui est, sortira une résultante unique qui sera Dieu, comme dans l’homme l’âme est la résultante de tous les éléments qui le composent. Dieu sera alors l’âme de l’univers, et l’univers sera le corps de Dieu, et la vie sera complète ; car toutes les parties de ce qui est auront vécu à part et seront mûres pour l’unité. […] La religion a toujours été en France une sorte de roue à part, un préambule stéréotypé, comme Louis par la grâce de Dieu, n’ayant aucun rapport avec tout le reste et qu’on ne lit pas, une formule morte.
À propos du soleil, âme de la nature, dont il trace un éclatant tableau, il en vient à parler de Dieu. Il pense « que c’est le fait de la faiblesse humaine que de chercher l’image et la forme de Dieu ». Métaphoriquement, on peut dire que le soleil est « le principal régulateur, la principale divinité de la nature » ; mais, en réalité, il ne faut pas chercher à Dieu une forme particulière, encore moins croire qu’il y en a un nombre infini. […] aux divinités païennes, mythologiques ; et quant aux divinités héroïques et aux apothéoses : « C’est être Dieu pour l’homme, dit-il, que de venir en aide à l’homme, et telle est la voie qui mène à l’éternelle gloire. » Mais, à part cette interprétation morale, le dieu Auguste et le dieu César ne lui imposent pas autrement. Pline appartient à cette classe d’esprits élevés et éclairés, tels que l’ancienne civilisation en possédait un assez grand nombre avant le christianisme, qui ne séparent point l’idée de Dieu de celle de l’univers, qui ne croient pas qu’elle en soit distincte, et qui, dans le détail de la vie et l’usage de la société, condescendent d’ailleurs aux idées reçues et aux préjugés utiles : « Il est bon, dans la société, de croire que les dieux prennent soin des choses humaines… La religion, répète-t-il en plus d’un endroit, est la base de la vie. » Mais ce n’est qu’une religion toute politique comme l’entendaient les Romains.