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1181. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « H. Forneron » pp. 149-199

L’auteur des Ducs de Guise n’a reçu le coup, on ne peut pas dire de soleil, de l’influence de Guizot, que sur le titre de son ouvrage ; Mais, par ailleurs, il a échappé à la trop vaste influence de l’homme qui a rayonné, sans rayons, sur tous les historiens de son temps ; qui a, j’en conviens, ravivé en France l’enseignement et les études historiques, mais qui, pour son compte, quand il a écrit l’Histoire, l’a roidie dans un doctrinarisme insupportablement étroit et pédant, — et Forneron, du reste, n’y a pas toujours échappé. […] Philippe II échappe de toute la profondeur de sa conscience aux petits détails biographiques, et sur un homme comme lui, et pour descendre dans ce clair-obscur, ce ne serait pas trop qu’une forte étude psychologique. […] C’est, en effet, pour cette Cause sacrée que le xvie  siècle combattit… malheureusement, avec toutes armes ; mais c’est précisément le fanatisme de cette Cause, à qui tant d’écrivains ont imputé toutes les horreurs du temps, c’est ce fanatisme religieux, dont l’indifférence d’un esprit moderne sans croyance et froidi par l’étude des faits s’est tranquillement détourné, c’est ce fanatisme, qui, lui seul, a pourtant arraché le xvie  siècle à l’outrage mérité du genre humain et qui l’a sauvé du mépris absolu de l’Histoire. […] Or, c’est justement l’étude de cette grande chose, qui plane sur toute la vie de Philippe II et qui le met à part dans l’Histoire, lui et le xvie  siècle, c’est cette grande chose qui se trouve oubliée dans le livre de Forneron, où, excepté cette grande chose, il a tout vu.

1182. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

nécessairement du pathos, ma chère maman, si j’entreprenais la description du spectacle que nous eûmes alors sous les yeux (la chute du Niagara).. » Il ne laisse pas cependant de bien raconter ce qu’il voit et de s’en tirer fort convenablement avec sa sincérité d’impressions sans enluminure ; mais il reprend plus sûrement sa supériorité dès qu’intervient l’étude morale : l’esprit sain, juste, délicat, élevé, retrouve ses avantages. […] Scherer, dans un article où il a parfaitement apprécié Tocqueville pour ses mérites, a conclu en disant : « La postérité lui érigera un buste au pied de la statue de Montesquieu. » Mais ici on est loin de Montesquieu, dont les plus grands chagrins, on le sait, ne résistèrent jamais à une heure d’étude et de lecture. […] Je retourne à mes vieilles études philosophiques et littéraires.

1183. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Cet homme d’étude, qui, dans sa jeunesse, avait été précepteur du comte Tanneguy Duchâtel (les Suisses sont volontiers précepteurs dans leur jeunesse), n’avait pas varié une minute au fond du cœur ni faibli dans sa première et vieille trempe helvétique ; et quand je pense à cet homme de bien, vétéran des universités, ancien membre de la Diète aux heures difficiles, si modeste de vie, mais intègre et grand par le caractère, je me le figure toujours sous les traits d’un soldat suisse dans les combats, inébranlable dans la mêlée comme à Sempach, la pique ou la hallebarde à la main. […] Olivier, en plus d’une page de ses Études d’histoire nationale, Monnard même dont je viens de parler dans l’Histoire (continuée) de la Confédération suisse 58, ont parfaitement défini son rôle. […] Au tome XVIII, p. 278 ; et Juste Olivier, Études d’histoire nationale (Lausanne, 1842), p. 269, 296.

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