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425. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

La coutume juive exigeait que l’homme voué aux travaux intellectuels apprît un état. […] On l’ignore, son histoire nous étant parvenue à l’état de récits épars et sans chronologie exacte. […] De même, en morale, la vérité ne prend quelque valeur que si elle passe à l’état de sentiment, et elle n’atteint tout son prix que quand elle se réalise dans le monde à l’état de fait.

426. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

Contentez-vous d’aimer les personnes qui en sont aussi reconnaissantes que je le suis, et qui ressentent aussi vivement que je fais la douleur de ne se pas voir en état de vous tirer de celui où vous êtes. […] Étant arrivé proche de son lit, elle fit retirer tout le monde, et me dit : « Vous voyez, monsieur Feuillet, en quel état je suis réduite. » — « En un très bon état, madame, lui répondis-je : vous confesserez à présent qu’il y a un Dieu que vous avez très peu connu pendant votre vie. » Il lui dit que toutes ses confessions passées ne comptaient pas, que toute sa vie n’avait été qu’un péché ; il l’aida, autant que le temps le pouvait permettre, à faire une confession générale. […] Il ne laisse éclater que sa douleur, et c’est ici que je demande à citer en entier une page qui fait honneur à celui qui l’a écrite, et qui complète bien le concert d’oraisons funèbres dont Madame a été l’objet : Je n’entreprendrai pas, dit-il, d’exprimer l’état où je me trouvai (en apprenant la nouvelle de cette mort).

427. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Le fait est que, durant les trois années d’un état précaire pour la France et presque déshonorant pour la civilisation d’un grand peuple, les mêmes hommes, après le premier étourdissement passé, ont assez pris leur parti, qu’ils ont assez bien vécu et n’ont pas trop désespéré, et que depuis qu’il y a un établissement régulier, il leur semble qu’on ne puisse plus vivre : c’est que cet établissement s’est fait sans eux, c’est que ce régime n’est plus le leur ; on supporte encore la chute, non pas le remplacement. […] Ces hommes de la Chambre de 1815 arrivèrent ou revinrent impraticables parce qu’ils étaient violents, parce qu’ils avaient accumulé en silence mille aigreurs et mille rancunes, parce qu’ils étaient restés, dix années durant, à l’état de pistolets chargés : quand on vint à vouloir s’en servir de nouveau, ils éclatèrent dans la main qui les employait. […] Mais plutôt mettez votre honneur et votre supériorité à n’avoir ni dépit ni colère, à garder de vos idées ce que vous en croyez juste et durable, sauf à les confronter perpétuellement avec l’état de la société, à les corriger sans cesse par l’observation de ce monde qui marche et qui change, et qui de nos jours tourne si vite à l’indifférence du passé. […] Si quelqu’un entre alors pour une affaire particulière, quelque subalterne surtout, on le retient, on amène la conversation sur la chute récente, sur l’ingratitude des hommes, sur l’état général des affaires publiques qui se gâte et devient tout à fait affligeant : on s’épanche, on cherche de l’écho.

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