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2771. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre II. De la métaphysique poétique » pp. 108-124

Ils devaient interroger d’abord la science qui cherche ses preuves, non pas dans le monde extérieur, mais dans l’âme de celui qui la médite, je veux dire, la métaphysique.

2772. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Il traînait dans la rue le lit de Messaline, montrait du doigt aux passants la femme impure dont il déshabillait l’âme. […] N’est-ce pas un rayon, que la beauté unie à la force de Goujet, que la noblesse d’âme de sa mère ? […] L’influence des faits, la tyrannie des choses est montrée par l’auteur avec un soin particulier ; il ne se contente pas de dessiner l’âme de son héros : il recherche et montre les parcelles empoisonnées que ce malheureux a respirées dans l’air, les poisons qu’il s’est laissé verser, les meurtrissures des obstacles qu’il a rencontrés, dont il n’a pas su faire disparaître la trace.

2773. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Cette femme, comme tant d’autres, s’était, à l’entrée de sa carrière, lancée vers le monde, qu’elle ne connaissait pas, avec le sentiment d’une grande force d’âme et de facultés vraiment puissantes. […] Je vendrai, si quelque heureuse aventure ne me fait rencontrer quelque bonne âme, ma montre et tout ce qui pourra me procurer de quoi vivre, et j’irai comme Goldsmith, avec une viole et un orgue sur mon dos, de Londres en Suisse. […] A peine arrivé à Brunswick, il lui adresse l’épître suivante, que nous donnons dans toute sa longueur, et qui ressemble à un journal, ou plutôt à un heural141, comme ils disaient ; c’est une image intéressante et fidèle, et très-curieuse pour la rareté, de ce qu’était l’âme de Benjamin Constant à ses meilleurs moments. […] Je rouvre mon âme à toutes les impressions, je veux redevenir confiant, crédule, enthousiaste, et faire succéder à ma vieillesse prématurée, qui n’a fait que tout décolorer à mes yeux, une nouvelle jeunesse qui embellisse tout et me rende le bonheur. » Ces reprises heureuses, ces secousses de printemps passent vite ; ils retombent, et la fin de cette année 1792 ne nous le livre pas dans une disposition plus vivante, plus ranimée : il continue de s’analyser en tous sens et de se dénoncer lui-même. […] C’est de son père que Benjamin Constant parle dans Adolphe, quand il dit : « Je ne demandais qu’à me livrer à ces impressions primitives et fougueuses qui jettent l’âme hors de la sphère commune… Je trouvais dans mon père, non pas un censeur, mais un observateur froid et caustique… Je ne me souviens pas, pendant mes dix-huit premières années, d’avoir eu jamais un entretien d’une heure avec lui.

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