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2034. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Savant encore inexpérimenté, il n’aura ni cette maturité d’une instruction nourrie de lecture, ni l’appréhension de la sévérité des juges rassemblés : la témérité de son naturel se fera sentir dans les exagérations de son éloquence emphatique et sonore ; un aveugle enthousiasme l’exaltera sur des choses ordinaires ; il offrira comme neuves celles qu’il aura le plus récemment découvertes, en feuilletant les livres les plus anciennement connus, et sa bonne opinion de soi-même lui inspirera une intrépide jactance qui éclatera dans ses traits et dans ses inflexions, à travers les dehors de l’humble retenue qu’il voudra feindre, et dont on sourira malignement. […] À travers la gaze dont elle couvrit leurs formes honteuses ou bizarres, ils s’aperçurent de leur ressemblance. […] Il en est autrement des pièces d’intrigue : elles ne marchent qu’à travers les obstacles imprévus et les surprises.

2035. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Peut-être ne vois-je pas entière la beauté dont je parle, peut-être n’arrive-t-elle pas entière jusqu’à nous ; je crois que celui qui l’a créée la savoure tout entière ; elle cache son essence profonde ; l’œil qui s’aventure à travers ses flots éprouve sa clairvoyance ; elle se livre selon l’ardeur du regard qui la contemple. […] Bienheureux et contemplant là-haut le livre triple et unique, où se résout toute question de temps et de lieu, où le blanc et le noir ne changent jamais, tu sais, qu’à travers les douleurs et les ruines, notre terre latine se rajeunira comme une plante, par la toute-puissance de l’amour qui met en mouvement le soleil et les autres étoiles. […] La richesse de son savoir l’entraîne trop souvent au-delà des limites naturelles de son sujet ; il oublie volontiers la biographie pour l’histoire, et, quel que soit le plaisir avec lequel nous le suivons dans ce voyage à travers le passé, il nous arrive de souhaiter un guide moins savant, qui nous conduise plus vite au but marqué.

2036. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Le rêve généreux de Fénelon et de Massillon allait être le rêve du xviiie  siècle : l’histoire de l’humanité se déroulant comme une longue pastorale à travers les siècles futurs, des rois sensibles et des peuples reconnaissants, « une aimable domination sur le trône95 », la joie partout et partout l’abondance, « des bergers et des laboureurs célébrant leurs hyménées », que sais-je encore ? […] Marivaux est obligé de contourner sa manière pour suivre ces mêmes sentiments délicats à travers les replis où ils se dissimulent. […] Dans ce siècle de la faveur, du privilège et de la tyrannie, Rousseau ne se dérange pas du fond de sa retraite ; un premier président de la cour des aides se charge maintenant des commissions du fils de l’horloger de Genève ; et l’ancien laquais des Vercellis fait courir d’imprimerie en imprimerie, à travers la rue Saint-Jacques, la femme dont le nom seul évoque le souvenir de toutes les élégances de l’ancien régime : Madeleine-Angélique de Neuville-Villeroy, duchesse de Montmorency-Luxembourg. […] C’est une promenade triomphale qu’au mois de décembre 1751 il commence à travers l’Italie.

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