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420. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre V. Des orateurs anciens et Modernes. » pp. 223-293

Ciceron connoissoit tous les styles, & il les employa tous avec le succès le plus marqué. […] Il plaida sa premiere cause au Barreau dès l’âge de dix-neuf ans, mais avec un succès si décidé, que ses rivaux & ses amis comprirent dès-lors à quelle gloire il étoit destiné. […] Massillon, partagerent les succès. […] Le Pere Elisée, Carme, a eu & a encore de grands succès, & il les mérite à certains égards ; mais dans ce qu’on a vu de lui son style paroît trop manieré. […] L’auteur de ce livre est le Pere Hyacinthe de Montargon, Augustin de la place des Victoires, Religieux considéré dans son Ordre, estimé dans le monde, Prédicateur connu, qui après avoir prêché à la Cour avec succès, n’a pas dédaigné d’écrire pour les habitans de la campagne.

421. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Ce fut lui que Bonaparte, avant de quitter Milan pour Rastadt (16 novembre 1797), chargea, avec le général Andréossy, de porter le drapeau de l’armée au Directoire, et il confirma cette mission d’honneur par un magnifique éloge qui est devenu la récompense historique suprême : Je vous envoie le drapeau dont la Convention fit présent à l’armée d’Italie, par un des généraux qui ont le plus contribué aux différents succès des différentes campagnes, et par un des officiers d’artillerie les plus instruits de deux corps savants qui jouissent d’une réputation distinguée dans l’Europe. […] Il s’est trouvé souvent dans ces circonstances où les connaissances et les talents d’un homme influent tant sur le succès. […] Nous pensons qu’il vaut mieux rentrer dans les montagnes, d’où l’on n’aurait pas dû sortir, et se préparer à s’y défendre ; car les raisons qui doivent nous porter à ne point livrer une bataille avant la jonction de l’armée des Alpes doivent décider l’ennemi à nous attaquer avant qu’elle soit effectuée ; mais les positions que nous devons occuper nous sont bien connues ; ce n’est pas une affaire de quelques heures qui pourra décider les succès de l’ennemi ; là, il ne s’agira pas d’une seule bataille, mais de vingt combats plus ou moins acharnés, sur des points difficiles, où leur nombreuse artillerie et leur cavalerie se trouveront à peu près paralysées.

422. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Il plaida dès son début quelques causes avec succès, à la satisfaction des anciens de l’Ordre. […] Louis XVI, aveuglé ici par un esprit de dévotion étroite, était de plus trompé par les informations qui lui venaient des provinces ; et Foucault sera un de ces informateurs les plus funestes, par le tableau illusoire qu’il présentera de la facilité du succès. […] Non content d’écrire à Louvois pour réclamer des mesures de rigueur, et avant même d’avoir la réponse, Foucault s’adresse au Père de La Chaise pour lui suggérer d’autre part des moyens auxiliaires plus doux ; il propose non plus ici des cavaliers et des dragons, mais d’autoriser une conférence, par exemple, où les points controversés soient agités, disant que les ministres et les principaux religionnaires de ces contrées ne cherchaient qu’une porte honnête pour rentrer dans l’Église : « Ceux, ajoute-t-il, qui sont les plus considérés et les plus accrédités dans le parti m’ont assuré que c’était la seule voie qui pût faire réussir le grand projet des conversions ; que celles de rigueur, de privation des emplois, les pensions et les grâces seraient inutiles. » Dans un voyage qu’il fait à Paris, il en parle également au chancelier Le Tellier, lequel a d’ailleurs peu de goût pour Foucault, et qui ferme l’oreille à sa proposition : « Il la rejeta absolument, disant qu’une pareille assemblée aurait le même succès que le Colloque de Poissy ; que le pape trouverait mauvais que l’on fît une pareille conférence sans sa participation, et me défendit d’en parler au roi.

423. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

Le premier instrument de ses succès est un excellent esprit. […] Chaque grade sera marqué par le développement d’un talent, et, allant ainsi de succès en succès, il réunira cet ensemble de suffrages qui appellent un homme à toutes les grandes places qui vaquent.

424. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

Le temps et l’extrême impartialité de la rédaction auraient été les seuls moyens de lui donner du succès[…] « Je sens que mes écrits auraient pu être utiles, si je les avais fait connaître davantage ; mais faire beaucoup de pas pour le succès me paraît peu digne des arts mêmes, à plus forte raison de l’art par excellence, celui d’écrire pour le bonheur des hommes. « Vitruve dit dans sa préface (du moins cela est dans le chapitre vi, du livre II, du Selectæ e profanis scriptoribus historiæ) : « Cæteri architecti rogant et ambiunt, ut architectentur, mihi autem a præceptoribus est traditum, oportere eum qui curam alicujus rei suscipit rogari, non vero rogare. » « On peut voir en dix endroits du Journal de l’Empire même et, entre autres, le 27 juillet 1812, combien l’intrigue est nécessaire aux succès dans la littérature même.

425. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Gloire, ambition, fanatisme, votre enthousiasme a des intervalles, le sentiment seul enivre chaque instant, rien ne lasse de s’aimer ; rien ne fatigue dans cette inépuisable source d’idées et d’émotions heureuses ; et tant qu’on ne voit, qu’on n’éprouve rien que par un autre, l’univers entier est lui sous des formes différentes, le printemps, la nature, le ciel, ce sont les lieux qu’il a parcourus ; les plaisirs du monde, c’est ce qu’il a dit, ce qui lui a plu, les amusements qu’il a partagés, ses propres succès à soi-même, c’est la louange qu’il a entendue, et l’impression que le suffrage de tous, a pu produire sur le jugement d’un seul. […] Les succès de l’amour-propre, le dernier degré des jouissances de la personnalité, la gloire, que vaut-elle auprès d’être aimé ? […] Si la beauté leur assure des succès, la beauté n’ayant jamais une supériorité certaine, le charme de nouveaux traits peut briser les liens les plus doux du cœur ; les avantages d’un caractère élevé, d’un esprit remarquable, attirent par leur éclat, mais détachent à la longue tout ce qui leur serait inférieur.

426. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

C’est ainsi que le vif succès des Lettres Persanes de Montesquieu détermina par dizaines des Lettres Anglaises par Voltaire, Chinoises, Portugaises, etc. […] Lorsque les célèbres romans de Grandisson pénétrèrent en France, grâce à l’adaptation de Prévost (Mémoires pour servir à l’histoire de la vertu, extrait du journal d’une jeune dame, traduit de l’anglais), ils obtinrent en très peu de temps auprès du public français un succès étourdissant. […] C’était aussi l’époque des succès du vicomte d’Arlincourt, avec ses horrifiques Écorcheurs.

427. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Un cas de pédanterie. (Se rapporte à l’article Vaugelas, page 394). »

« Pendant des années on l’a vu mener de front toutes les activités généreuses, secourir tous les malades, tous les vaincus, tous les souffrants, applaudir à tous les succès de ses amis et les propager par ses sympathies ardentes : chaque succès d’un ami était véritablement une de ses fêtes.

428. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre I. Querelle des Anciens et des Modernes »

De là le succès de Perrault. […] Or le succès de Perrault, qui affranchit la littérature moderne de l’imitation et du respect de l’antiquité, ce n’est rien moins que l’élimination de l’art, qui va être rejeté hors de la littérature moderne.

429. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 239-252

L’étude des anciens modeles, sur-tout de Virgile, avait disposé sa Muse à cette vigueur d’imagination, à cette énergie de pinceau, qui font toujours les germes assurés du succès. […] Le même Poëte qui peint les ravages des Barbares en Italie, n’a besoin que de changer de couleurs, pour tracer avec le même succès les douces & paisibles opérations de la Nature.

430. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIII. Éloges donnés aux empereurs, depuis Auguste jusqu’à Trajan. »

Cet Espagnol, qui vint de bonne heure à Rome pour y faire des vers, médire et flatter, et qui y eut tout le succès qu’un esprit fin et piquant peut avoir dans une grande ville, où il y a de l’oisiveté, des arts et des vices, nous a laissé près de quatre-vingts petites pièces ou épigrammes, faites en l’honneur de Domitien. […] On y apprend qu’il n’y eut jamais dans Rome, ni de temps si heureux, ni de succès si brillants, ni tant de liberté accordée par le prince aux citoyens, ni tant d’amour des citoyens pour le prince, que sous Domitien.

431. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

Je ne méritai guère d’être châtié ; mais, malgré ma tranquillité ordinaire, il eût été dangereux de le tenter, et j’aime à penser que, faisant en rhétorique le portrait du cheval parfait, je sacrifiai un succès au plaisir de peindre celui qui, en apercevant la verge, renversait son cavalier. » Ce ne sont pas seulement les écoliers de rhétorique, ce sont quelquefois les hommes qui sacrifient un succès, c’est-à-dire la chose possible, au plaisir de peindre ou de faire une action d’où résulte le plus grand honneur à leur rôle, la plus grande satisfaction à leurs sentiments. […] Washington répond : « Il est impossible, mon cher marquis, de désirer plus ardemment que je ne fais, de terminer cette campagne par un coup heureux ; mais nous devons plutôt consulter nos moyens que nos désirs, et ne pas essayer d’améliorer l’état de nos affaires par des tentatives dont le mauvais succès les ferait empirer. […] De retour en Europe, les années suivantes se passèrent pour lui en succès de toutes sortes, en voyages dans les diverses cours, très-amusants et qu’il raconte à ravir, en projets politiques et en applications sérieuses de son métier de républicain. […] En m’exprimant de la sorte, en toute liberté, je n’ai pas besoin de faire remarquer combien le point de vue du politique et celui du moraliste sont inverses, l’un songeant avant tout aux résultats et au succès, l’autre remontant sans cesse aux motifs et aux moyens. […] Il déploya beaucoup de talent, des vues étendues, et l’on jugea pendant quelque temps de son patriotisme par ses « Succès. »  — En ce temps de grandes phrases, je me sens de plus en plus touché de ce qui n’est que bien dit.

432. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

Delaunay sort du cabinet de Camille Doucet, qui nous dit avoir tout épuisé auprès de lui sans succès. […] Tout le théâtre croit à un immense succès, et la phrase qui court est celle-ci : « Il y a vingt ans qu’on n’a vu, aux Français, une pièce montée et jouée comme celle-ci !  […] Une sérénité absolue, la conviction que quand même le public ne trouverait pas notre pièce parfaite, elle est si remarquablement jouée, que le jeu des acteurs doit emporter le succès. […] Après ce succès, nous sollicitons, auprès de Thierry, encore une représentation ; il nous répond qu’il ne peut nous la promettre. […] Le plus grand signe du succès serait-il l’enthousiasme des gens bêtes ?

433. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Ce dont on s’étonne aujourd’hui, c’est qu’un auteur, pour faire de la réclame à son livre et lui assurer le succès, n’aille pas jusqu’au vol et à l’assassinat. […] Et voyez la justice des choses : Les Rois en exil ont obtenu un grand succès, et Le Crépuscule des dieux a été à peine lu. […] Il est sans pitié pour les imaginations aliénistes du dramaturge à la mode, et les succès de commerce ne lui disent rien qui vaille. […] Il fallait pour qu’il parlât des écrivains, que ceux-ci fussent morts depuis deux siècles ou qu’ils lui arrivassent vieillis de succès. […] Hennique, un véritable écrivain doit écrire ; il doit surtout n’attendre satisfaction et succès que de ses livres.

434. (1772) Discours sur le progrès des lettres en France pp. 2-190

Le succès de ce nouveau genre d’écrits, dont la durée fut longue, n’a rien qui doive étonner. […] Les succès du jeune Poëte, furent en peu de temps si brillans & si rapides, qu’ils excitèrent la jalousie de Corneille. […] Cependant l’Auteur de Rhadamiste règnoit encore sur la scène, & Melpomène annonçoit, par le succès brillant d’Œdipe, un nouvel Elève comblé de ses faveurs. […]   Rien n’étoit plus capable d’arrêter, dès sa source, le torrent du mauvais goût, que le succès bien mérité de la Métròmanie. […] Ce Ministre s’étant retiré seul à Ruel le soit même du mauvais succès de sa pièce, envoya chercher Desmarests qui soupoit avec Petit son ami.

435. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Alors, renonçant à toute espérance de succès en les théâtres, oubliant toute préoccupation immédiate de représentation, libre enfin, il conçut son œuvre d’art. […] Enoncer cette affirmation, c’est prophétiser à coup sûr, mais nous sommes heureux de pouvoir dire notre certitude au jeune et savant musicien qui, depuis plusieurs années déjà, n’a cessé de combattre le bon combat avec tant de zèle, de succès et de talent. […] Soulacroix n’a pas moins bien fixé le type de Beckmesser, qui comptera dans sa carrière d’artiste comme un succès vraiment sérieux. […] Verdhurdt, le nouveau directeur de la Monnaie, se persuadera-t-il que le moment est venu où les opéras de Wagner s’imposent de force au public de Bruxelles et qu’il n’est plus guère de succès durable en dehors d’eux ? […] Il y aura six représentations très soignées dont le succès est garanti.

436. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Il a enfin écrit le roman d’aventures, — à proprement parler le roman de feuilleton, quoique le feuilleton puisse en publier d’autres, mais avec moins de chances de succès que celui-là, en raison même de son infériorité. […] Peut-être est-ce le succès d’un livre dont il fut témoin à l’âge où le succès déprave ; peut-être encore quelque préjugé traditionnel comme il en reste parfois debout dans les esprits les plus puissants ? […] C’était le temps du tonitruant succès de ce grand roman d’aventures à travers un monde que jusque-là la littérature n’avait pas osé aborder. Ce succès, comme on n’en a pas revu depuis pour des livres bien supérieurs, dut être un de ces faits décisifs dont l’influence reste sur l’imagination d’un jeune homme qui débutait, comme tout jeune homme débute, par l’imitation, mais qui, dans son imitation cependant, en donnant la patte comme Eugène Sue, laissa percer à plus d’une place une griffe d’originalité. […] Paul Féval, qui, par le talent et le succès, a eu sa manière d’être Roi, Paul Féval, dont la conversion a fait éclat en ces derniers temps, a mis son cœur ici, — et je vous jure que c’est une boîte d’or, digne d’être offerte à Dieu, sur son autel !

437. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIIe entretien. Madame de Staël. Suite. »

Le succès du livre fut immense, le bruit s’accrut de toutes les critiques acharnées dont les hommes de lettres complaisants du gouvernement nouveau s’efforcèrent de dénigrer le livre et l’auteur : on l’accusa de corrompre les mœurs que le consulat voulait épurer par sa police plus que par ses exemples. […] Le succès fut immense, le nom de madame de Staël atteignit ou dépassa toutes les renommées littéraires du temps. […] L’empereur voulait de moi une bassesse, mais une bassesse inutile ; car, dans un temps où le succès est divinisé, le ridicule n’eût pas été complet, si j’avais réussi à revenir à Paris, par quelque moyen que ce pût être. […] M. de Chateaubriand célébrait, dans l’exorde d’un discours de réception à l’Institut, le nouveau Cyrus en style de prophète ; M. de Maistre lui-même, le philosophe du despotisme, converti à l’usurpation par le succès, écrivait de Pétersbourg dans sa correspondance, aujourd’hui publiée, des adorations à la fortune de Napoléon. […] Quand il s’agit de plaire au théâtre, l’art de se circonscrire dans un cadre donné, de deviner le goût des spectateurs, et de s’y plier avec adresse, fait une partie du succès ; tandis que rien ne doit tenir aux circonstances extérieures et passagères dans la composition d’un poëme épique.

438. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

. — Il est beau d’avoir un succès à la Saint-Symphorien. Il y a deux manières de devenir célèbre : par agrégation de succès annuels, et par coup de tonnerre. […] Que l’auteur songe aux clameurs qui accueillirent le Dante et Virgile, et qu’il persévère dans sa propre voie ; bien des railleries malheureuses tomberont encore sur cette œuvre, mais elle restera dans la mémoire de quiconque a de l’œil et du sentiment ; puisse son succès aller toujours croissant, car il doit y avoir succès. […] Cette œuvre aura-t-elle un succès prompt ? […] Ce jeune artiste a déjà eu de beaux salons — sa statue est évidemment destinée à un succès ; outre que son sujet est heureux, car les pucelles ont en général un public, comme tout ce qui touche aux affections publiques, cette Jeanne d’Arc que nous avions déjà vue en plâtre gagne beaucoup à des proportions plus grandes.

439. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

L’artiste, qui devait son premier succès à cet affectueux patron, aima toujours à le lui rapporter ; et à des amis de Bonstetten qui le visitaient trente ans après, il disait en les conduisant avec émotion à un endroit de son atelier, alors tout peuplé de marbres glorieux : « Voilà la place où était le Jason !  […] Il rendait pleine justice à sa merveilleuse intelligence ; « J’ai l’avantage de trouver à Coppet une critique impartiale ; c’est aussi un art de tirer parti de la critique ; souvent je persiste dans mon opinion ; mais Mme de Staël est si libre de préjugés, si claire, que je vois mes tableaux dans son âme comme dans un miroir. » Le Voyage dans le Latium, publié à la fin de 1804, eut du succès, et décida de la rentrée de Bonstetten dans la littérature française. […] Par malheur, tous ces matériaux se perdirent : « Si j’avais soupçonné le succès du Voyage dans le Latium, disait-il, je les aurais faits tous les quatre. » Personne, en effet, n’était plus que lui capable de rompre la monotonie de semblables monographies par toutes sortes de vues et de diversions agréables. […] J’ai vu le grave et chaleureux publiciste littéralement ivre de joie à l’aspect de ce qu’il appelait ce grand succès ; Bonstetten, plus modéré, parce que la grâce n’admet aucune violence, n’applaudissait pas moins de tout son cœur.

440. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « M. Boissonade. »

Boissonade dans le Journal de l’Empire, articles que, dans sa modestie, il signait de la dernière lettre de l’alphabet grec, d’un fi, n’ont pas et n’eurent jamais l’importance qu’on leur prête aujourd’hui après coup ; ils n’obtinrent jamais le succès et la vogue, plus ou moins mérités, qui s’attachaient dans le temps aux articles des Geoffroy, des Dussault, des Feletz, des Hoffman ; ils ne sont pas toute la critique littéraire du premier Empire ; que dis-je ? […] Toutes ces premières années de sa jeunesse se dérobent ; après avoir essayé sans succès de rentrer dans l’administration, il se livra décidément à l’étude, et à celle du grec en particulier, pour lequel il se sentait une vocation. […] Il avait été et était resté fort galant ; il dut être très-sensible aux pertes de l’âge et souffrir dans sa fierté de ce qui lui manquait pour avoir des succès complets en vieillissant. il l’a remarqué de Solon et des anciens sages : pourquoi ne le remarquerait-on pas de lui ? […] Boissonade cultiver si gentiment la grammaire et conter fleurette à cette servante, il semblait qu’il n’eût tenu qu’à lui de s’adresser plus haut et de faire la cour avec succès à la dame elle-même.

441. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

car enfin c’était le succès et le triomphe menaçant de l’un des deux systèmes qui faisait le désespoir et la désolation de l’autre ; entre les deux désespoirs, il fallait opter. […] Rien n’y faisait, son incurable pessimisme résistait à tout, même au succès. « Le plus beau jour de ma vie sera celui où je cesserai d’écrire » : c’est ce qu’il se plaisait à répéter, même en plein triomphe. […] « (1er mars 1818)… Je ne jouis point du succès, j’en souffre. […] Loin de m’applaudir du succès de mon livre, j’y vois la ruine du seul bien qui me restait pour me rendre la vie supportable, une profonde obscurité ; et je ne me connais pas seulement l’ombre d’une petite consolation. » Il répète le même refrain presque dans chaque lettre.

442. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre II. Les romans bretons »

Un autre la continua, et fit la chanson de Jérusalem, d’après la tradition orale qui s’était établie dans l’armée même des croisés Le succès de ces émouvantes histoires en fit le noyau d’un cycle qui se développa selon les procédés qu’on a indiqués plus haut : le récit de la croisade se prolongea à travers toute sorte d’inventions romanesques, du plus vulgaire et souvent du plus grossier caractère, tandis que le héros central de la geste, le grand Godefroy de Bouillon, était doté d’une généalogie fabuleuse où s’insérait la merveilleuse légende du chevalier au Cygne50. […] L’un fit une chanson de geste de la vie d’Alexandre, telle que le faux Callisthène l’avait racontée, et la chevauchée du roi macédonien à travers l’immense Asie et l’Inde prodigieuse, le caractère du héros, type accompli de vaillance et de largesse chevaleresques, eurent le succès le plus populaire. […] Peut-être amusèrent-ils le public plus qu’ils ne l’édifièrent, et y regarda-t-on les aventures plutôt que la morale : cette proscription de l’amour n’avait aucune chance de succès, et il faut peut-être venir à notre siècle incrédule et curieux pour que cette conception mystique soit pleinement comprise en son étrange et déraisonnable beauté. […] Succès de notre littérature narrative Telle est, en son ensemble, la littérature narrative que notre moyen âge créa pour la société aristocratique.

443. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1859 » pp. 265-300

Clermont-Tonnerre, où avait lieu une fête d’enfants, une représentation de la Barbe-Bleue ; sur un théâtre admirablement machiné par un répétiteur de l’École centrale, et dont il avait peint la toile : fête, où il avait tous les succès pour sa gaieté, pour sa camaraderie avec les moutards, pour ses imaginations drolatiques ; fête, où il s’était trouvé heureux, heureux comme tout, jusqu’au moment où M.  […] C’est le moi du succès, mais point trop lourd, point trop insupportable, et sauvé par des singeries spirituelles, par de petites caresses littéraires à l’endroit des littérateurs qui sont là, et auxquels il sert des citations de leurs livres. […] Être dans son coin, vivre seul et sur soi-même, n’avoir que les maigres satisfactions qui vous touchent de bien loin et dont vous avez si peu conscience : la conscience du succès d’un livre qui n’est jamais au présent, mais toujours dans l’avenir. […] Dans la demi-nuit de la scène, nous nous heurtons à Fournier, qui se promène comme un fantôme, en cravate blanche, en habit noir, demandant nerveusement aux gens, si c’est un succès et qu’il n’a rien vu. — Cela dit du ton d’un homme qui interroge si ça va être sa faillite.

444. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

Enfin, il a publié les Jeudis de Madame Charbonneau, qui ont fait un bruit terrible ; il a, pour la première lois, eu un succès réel, — de scandale, qu’importe ? […] Voilà un succès. […] Libre à lui de prendre son succès au sérieux et d’en jouir, en ne tenant nul compte de la nuance de mésestime qui s’y attache !

445. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Le succès, au théâtre, a justifié celui que cette pièce ou cette suite de scènes si dramatiques avait obtenu à la lecture. […] La proie est délicate et lui plaît : « On n’a pas tous les jours un poète à se mettre sous la dent. » Carnioli, qui d’abord est aux anges du succès de sa manœuvre, s’aperçoit trop tard qu’il a trop bien réussi ; et quand, au retour d’un voyage, il veut ensuite détacher, arracher la victime du lien funeste où elle est enlacée, il ne la retire qu’en lambeaux. […] Notons pourtant ce fait considérable et singulier : le Roman d’un Jeune Homme pauvre est peut-être le plus grand succès de vente de ce temps-ci ; à l’heure qu’il est, il s’en est vendu tout près de 40 000 exemplaires, et comme on le dit couramment en termes de librairie, « c’est le meilleur roman à 3 fr. » Nous reviendrons, après Sibylle, sur ce fait de la grande publicité et de l’immense faveur dont jouissent les œuvres de M. 

446. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VIII. De l’invasion des peuples du Nord, de l’établissement de la religion chrétienne, et de la renaissance des lettres » pp. 188-214

Pour dompter de tels conquérants, pour relever de tels vaincus, il fallait l’enthousiasme, noble puissance de l’âme, l’égarant quelquefois, mais pouvant seule combattre avec succès l’instinct habituel de l’amour de soi, et la personnalité toujours croissante. […] Quoique Mahomet fût un grand homme, ses prodigieux succès tinrent aux dispositions morales de son temps ; toutefois, sa religion n’étant destinée qu’aux peuples du Midi, elle eut pour unique but de relever l’esprit militaire, en offrant les plaisirs pour récompense des exploits. […] Des progrès si rapides, des succès si étonnants peuvent-ils ne se rapporter à rien d’antérieur ?

447. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Conclusion. »

Une belle cause finale dans l’ordre moral, c’est la prodigieuse influence de la pitié sur les cœurs ; il semble que l’organisation physique elle-même soit destinée à en recevoir l’impression ; une voix qui se brise, un visage altéré, agissent sur l’âme directement comme les sensations ; la pensée ne se met point entre deux, c’est un choc, c’est une blessure, cela n’est point intellectuel, et ce qu’il y a de plus sublime encore dans cette disposition de l’homme, c’est qu’elle est consacrée particulièrement à la faiblesse ; et lorsque tout concourt aux avantages de la force, ce sentiment lui seul rétablit la balance, en faisant naître la générosité ; ce sentiment ne s’émeut que pour un objet sans défense, qu’à l’aspect de l’abandon, qu’au cri de la douleur ; lui seul défend les vaincus après la victoire, lui seul arrête les effets de ce vil penchant des hommes à livrer leur attachement, leurs facultés, leur raison même à la décision du succès ; mais cette sympathie pour le malheur est une affection si puissante, réunit tellement ce qu’il y a de plus fort dans les impressions physiques et morales, qu’y résister suppose un degré de dépravation dont on ne peut éprouver trop d’horreur. […] C’est dans la crise d’une révolution qu’on entend répéter sans cesse, que la pitié est un sentiment puérile, qui s’oppose à toute action nécessaire, à l’intérêt général, et qu’il faut la reléguer avec les affections efféminées, indignes des hommes d’état ou des chefs de parti ; c’est au contraire au milieu d’une révolution que la pitié, ce mouvement involontaire dans toute autre circonstance, devrait être une règle de conduite ; tous les liens qui retenaient sont déliés, l’intérêt de parti devient pour tous les hommes le but par excellence : ce but, étant censé renfermer et la véritable vertu et le seul bonheur général, prend momentanément la place de toute autre espèce de loi : hors dans un temps où la passion s’est mise dans le raisonnement, il n’y a qu’une sensation, c’est-à-dire, quelque chose qui est un peu de la nature de la passion même, qu’il soit possible de lui opposer avec succès ; lorsque la justice est reconnue, on peut se passer de pitié ; mais une révolution, quel que soit son but, suspend l’état social, et il faut remonter à la source de toutes les lois, dans un moment où ce qu’on appelle un pouvoir légal, est un nom qui n’a plus de sens. […] La plupart des gouvernements sont vindicatifs, parce qu’ils craignent, parce qu’ils n’osent être cléments ; vous, qui n’avez rien à redouter, vous, qui devez avoir pour vous la philosophie et la victoire, soulagez toutes les infortunes véritables, toutes celles qui sont vraiment dignes de pitié ; la douleur qui accuse, est toujours écoutée ; la douleur a raison contre les vainqueurs du monde ; que veut-on, en effet, du génie, des succès, de la liberté, des républiques, qu’en veut-on, quelques peines de moins, quelques espérances de plus ?

448. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Le poète se propose d’abord quelques beautés principales sur lesquelles il fonde l’espoir de son succès : c’est de là qu’il part, et il imagine ensuite ce qui doit être dit ou fait pour parvenir à son but. […] Cette adresse a souvent fait le succès de plusieurs ouvrages assez médiocres. […] …Elle le doit du moins, Il n’était qu’un obstacle au succès de mes soins.

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