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658. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Sainte-Beuve. Les Poésies de Joseph Delorme, Les Consolations, les Pensées d’août. »

Un autre dira : René bourgeois et cloporte ; un troisième : Oberman de la plaine Montrouge ; un autre encore : Byron de faubourg, pauvre, laid et qui boite non d’un pied, mais de l’un et de l’autre côté, comme dit la Bible ; Pascal débauché qui s’en revient des lieux mauvais, le front bas, laver ses rougeurs dans le frais clair de lune d’un soir qui se lève et qui, à nous autres rêveurs, parle éloquemment de pureté. […] ……………………………………………… Je lus dans leur regard, j’écoutai leur parole, ……………………………………………… Tel qu’un enfant, au pied d’une haie et d’un mur, Entendant les passants vanter un figuier mûr, Une rose, un oiseau qu’on aperçoit derrière, Se parler de bosquets, de jets d’eau, de volière, Et de cygnes nageant dans un plein réservoir, Je leur dis : « Prenez-moi dans vos bras, je veux voir !  […] À mi-côte du romantisme d’autrefois et de la vieille tradition classique, confessée aux pieds de Boileau, jadis insulté, M. 

659. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — La rentrée dans l’ordre »

Il s’affaissait au pied du poteau. […] La lumière pénétrait Paul Allain, l’échauffait, le refaisait l’être franc et simple, aux pieds fermes dans le sol où il puise sa sève, en communion avec tout ce qui végète et fleurit et rayonne, avec tout ce qui pense et rêve, avec tout ce qui, dans le pullulant infini des mondes, vit sa divine vie naturelle. » La lumière va bientôt surgir pour le désespéré, après les tortures, les luttes et les prostrations. […] Tant qu’il y aura des voix sur la terre pour nous affirmer que le bonheur, pour l’humanité, consiste à vivre hors nature, à violer toutes les lois par lesquelles nous marchons et nous respirons, à honorer l’absurde et fouler aux pieds la raison, et que ces voix seront écoutées, l’humanité ne pourra évidemment prétendre à un sort meilleur.

660. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

La table est soulevée, les quatre pieds à environ 30 centimètres du sol, et elle reste, en l’air sept secondes. […] La table est soulevée des quatre pieds à une hauteur d’environ 25 centimètres et reste en l’air quatre secondes, M.  […] Youriévitch tient sous la table les deux pieds d’Eusapia. […] Curie, il est retourné les pieds en l’air, puis posé, plateau contre plateau, sur la table. […] Maintenant on entre de plain pied dans le verger dont il fallait, avant lui, escalader les murs.

661. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Tout d’un coup, il s’arrête : il venait d’apercevoir son maître, assis aux pieds de Diotime ; et peut-être aussi, qui sait ? […] En en cherchant l’issue, il arrive au pied d’un colline éclairée à son sommet des premiers rayons du soleil levant. […] À l’entrée du royaume de la béatitude où Virgile n’a point d’accès Béatrice réapparaîtra ; et, à sa suite, Dante montera jusqu’au pied du trône de l’Éternel. […] Une autre plus digne, c’est lui-même qui parle, va mener Dante là où le plus grand des païens ne saurait être admis, au pied du trône de l’Éternel. […] Il nous fait voir, il déploie sous nos yeux ces vastes surfaces planes, étincelantes et retentissantes, où, de leurs pieds ailés, pareils aux dieux d’Homère, passent et repassent les agiles patineurs.

662. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Arène, Paul (1843-1896) »

Anatole France « Je vins au monde au pied d’un figuier, un jour que les cigales chantaient. » C’est ce que rapporte de sa naissance Jean des Figues, dont M. 

663. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VI. Architecture. — Hôtel des Invalides. »

Les yeux du voyageur viennent d’abord s’attacher sur cette flèche religieuse, dont l’aspect réveille une foule de sentiments et de souvenirs : c’est la pyramide funèbre autour de laquelle dorment les aïeux ; c’est le monument de joie où l’airain sacré annonce la vie du fidèle ; c’est là que les époux s’unissent ; c’est là que les chrétiens se prosternent au pied des autels, le faible pour prier le Dieu de force, le coupable pour implorer le Dieu de miséricorde, l’innocent pour chanter le Dieu de bonté.

664. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Réponse à une lettre de M. Grimm » pp. 205-206

Son odorat subtil discernait les cuvettes, où le rusé Sisyphe avait lavé ses pieds.

665. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Restout le fils » pp. 284-285

Le corps d’Anacréon est bien modelé, le bras qui tient la coupe fin de touche, quoique défectueux de dessin ; les étoffes étendues sur ses genoux sont belles ; la jambe droite qui porte le pied en avant sort du tableau.

666. (1767) Salon de 1767 « Sculpture — Vassé » pp. 323-324

une Minerve appuyée sur son bouclier, et prête à donner une couronne. figure de 6 pieds de proportion.

667. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

A la première Restauration, âgé d’environ seize ans, on le fit entrer dans une des compagnies rouges de la maison du roi ; et lors de la suppression de ces compagnies, en 1816, il passa dans la garde royale à pied. […] Dans le poëme d’Éloa, cette vierge-archange est née d’une larme que Jésus a versée sur Lazare mort, larme recueillie par l’urne de diamant des séraphins et portée aux pieds de l’Éternel, dont un regard y fait éclore la forme blanche et grandissante. […] Il commence une de ses plus jolies pièces par ce vers compliqué, obscur, gracieux pourtant sans qu’on sache trop pourquoi, et qui ne s’explique qu’ensuite : Ils sont petits et seuls ces deux pieds dans la neige. […] Chatterton est un ouvrage émouvant, mais pointilleux, vaniteux, douloureux ; de la souffrance au lieu de passion ; cela sent des pieds jusqu’à la tête le rhumatisme littéraire… » J’ai aussi entendu nommer très-spirituellement cette maladie d’espèce nouvelle dont sont atteints de jeunes talents, la chlorose littéraire.

668. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (5e partie) » pp. 65-128

En quelques tours de roue, elle fut au pied de la guillotine. […] En arrivant sur l’échafaud, elle marcha par inadvertance sur le pied de l’exécuteur. […] Elle ne s’élançait pas au ciel, elle fuyait du pied la terre, et elle lui laissait en partant son indignation et le remords. […] Il parlait tout haut et frappait du pied les dalles, des mains les murs de son cachot. » Lamartine.

669. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

Cette acharnée persistance à n’user en une fois que d’un style, à ne susciter et redoubler qu’une émotion, conquiert le lecteur, l’emmène et le trouble ; perdant pied dans l’irréel, lentement dépouillé du sens de sa personnalité, il est soumis et lié, muet d’épouvante, transfixé de douleur, maniaque d’analyse, consterné de la mort d’une amante qu’il n’a pas connue, attaché par un enthousiasme froidement tendu à la démonstration d’un principe métaphysique, énorme à intégrer l’univers. […] Wilson, cette catastrophe grandiose où la maison Usher, par une nuit de tempête, se fissure et s’abîme dans l’étang stagnant à son pied, et démasque lentement le disque rouge de la pleine lune ; jamais on n’a dépensé en une série d’œuvres une richesse pareille d’inventions sans analogue. […] L’épisode du massacre des mutins, où Pym, pour terrifier ses adversaires, se farde de pustules, se ballonne et se déguise à l’imitation d’un marin mort dont la carcasse roule dans les balots, les scènes ignobles où les survivants tuent, dépècent et salent un des leurs, ayant soin d’en jeter la tête et les pieds, aboutissent à l’horrible rencontre par ces affamés, d’un brick désemparé et dépeuplé, roulant au hasard sur les lames, une cargaison empestée de cadavres en sanie que déchirent des oiseaux repus. […] À la fin l’horrible morceau tomba, avec un sinistre piaffement, juste aux pieds de Parker.

670. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

si amoureusement retorse, que nous imaginons très bien ce qu’aurait été — si l’auteur l’eût achevé — ce livre, qui tient à la fois de l’observation la plus perçante et de la fantaisie la plus inspirée, et où, comme deux lutteuses qui s’étreignent sur le pied d’une coupe antique, l’ironie s’entrelace à la Profondeur. […] Un jour, ces Contes — bijoux oubliés au pied de La Comédie humaine, qui fait ombre sur tout ce qui l’entoure, — reprendront leur place aux yeux des hommes. […] … Doré, qui est un artiste vrai, a pensé, lui, à bien autre chose qu’à daguerréotyper tout le mobilier d’une époque, armes et bagages, et il s’est mis à peindre, en pied et en esprit, les divers personnages des Contes, puis, s’inspirant des différentes scènes de ce drame multiple, à composer des tableaux. […] Un jeune homme va se mettre à genoux, les mains jointes, aux pieds de sa dame de beauté, pour la requérir d’amour, quand une foudre de fer, l’épée du mari, vu à mi-corps dans l’ombre, s’abat sur le damoiseau et le fend, du haut en bas, comme le couteau d’un enfant partage une pomme.

671. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — II. (Fin.) » pp. 330-342

Le duc de Mayenne était incommodé d’une grande masse de corps qui ne pouvait supporter ni les armes ni les corvées : l’autre, ayant mis tous les siens sur les dents, faisait chercher des chiens et des chevaux pour commencer une chasse ; et, quand ses chevaux n’en pouvaient plus, forçait une sandrille65 à pied. […] Le duc de Mayenne, interrogé un jour par des amis de d’Aubigné sur la manière dont s’était passé le combat d’Arques et sur ce qui avait précipité la victoire ; après quelques essais d’explication, et se sentant trop pressé, finit par répondre : « Qu’il dise que c’est la vertu de la vieille phalange huguenote et de gens qui de père en fils sont apprivoisés à la mort. » D’Aubigné, qui prend au pied de la lettre la réponse du duc de Mayenne, s’est donné pour tâche dans son Histoire de raconter les exploits et de produire les preuves de cette vertu guerrière, d’en retracer l’âge héroïque dans ses diverses phases : c’est sa page à lui, c’est son coin dans le tableau de son siècle ; et il l’a traité avec assez d’impartialité en général, avec assez de justice rendue au parti contraire, pour qu’on lui accorde à lui-même tous les honneurs dus finalement à un champion de la minorité et à un courageux vaincu.

672. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

D’autres fouillaient les antiques souvenirs, les ruines, les arceaux et les créneaux, et du haut de la colline, assis sur les débris du château gothique, ils voyaient la ville moderne s’étendre à leurs pieds comme une image encore propre à ces vieux temps, Comme le fer d’un preux dans la plaine oublié ! […] Il m’est arrivé d’écrire une grande folie : J’irais à Rome à pied pour un sonnet de lui, c’est-à-dire pour qu’il me fût accordé de trouver en moi un de ces beaux sonnets à la Pétrarque, de ces sonnets après la mort de Laure, diamants d’une si belle eau, à la fois sensibles et purs, qu’on redit avec un enchantement perpétuel et avec une larme.

673. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

Quand nous aurions achevé ensemble ce tour du globe, cette chronologie des choses humaines, dans ma chambre de vingt pieds carrés, parcourue lentement en une année de stations devant ces cartes, et que les volumes de l’histoire lue sur place joncheraient à nos pieds le plancher de notre école, semblable à un navire qui aurait fait la circumnavigation du globe et du temps, j’appellerais un à un mes petits géographes, compagnons de notre navigation sur place ; je leur demanderais d’être à leur tour les pilotes de notre longue et universelle expédition sur tant de mers, de côtes, de fleuves, de montagnes, de terres inconnues ; de nous dire où nous en sommes de cet itinéraire géographique entrepris ensemble et accompli en une année d’études aussi variées qu’intéressantes.

674. (1890) L’avenir de la science « IV » p. 141

Dieu n’est pas seulement au ciel, il est près de chacun de nous ; il est dans la fleur que vous foulez sous vos pieds, dans le souffle qui vous embaume, dans cette petite vie qui bourdonne et murmure de toutes parts, dans votre cœur surtout. […] Sainte Eulalie, fascinée par le charme de l’ascétisme, s’échappe de la maison paternelle ; elle prend le premier chemin qui s’offre à elle, erre à l’aventure, s’égare dans les marais, se déchire les pieds dans les ronces  Elle était folle, cette fille   Folle tant qu’il vous plaira.

675. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Montalembert orateur. » pp. 79-91

Jamais, sous prétexte d’avoir mis son humilité, une fois pour toutes, aux pieds du Saint-Siège, un jeune talent d’orateur ne s’est passé plus en sûreté de conscience ses facultés altières, piquantes, ironiques, et n’a joué plus librement de l’arme du dédain. […] Le passage du discours où le sacerdoce de la magistrature est pris et interprété au pied de la lettre, et où l’orateur le rapproche, socialement parlant, du sacerdoce du prêtre ; ce double temple qu’il importe de maintenir debout ; ce torrent des révolutions qui doit, en roulant, trouver au moins deux rives inébranlables, et se contenir entre le temple de la loi et le temple de Dieu, tout cela est à la fois de la haute éloquence et de l’éternelle politique.

676. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

On est tout stupéfait, de quelque côté et par quelque chemin qu’on y vienne, de se retrouver à son pied. […] Laide d’abord, belle ensuite, elle est l’attirante… Et c’est ainsi que Magnus, l’homme — la Beauté, la Perfection, la Vie — tombe à ses pieds, tranché par son coup de faulx, après avoir donné tous les baisers d’amour à sa vierge aimée, à Divine, pâle fleur de lis qui meurt, elle aussi, peut-être parce qu’elle ressemblait trop à l’Aurore !

677. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

Il avait le large pied des races montagnardes. […] Émile Montégut, qui lui succéda dans la critique, après être bruyamment sorti de la Revue y est rentré silencieusement et sur la pointe du pied.

678. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Caro, qu’il faut lire, si l’on veut connaître cet hérésiarque au petit pied, qui se croyait et se disait « né avec dispense », et qui peut-être, hélas ! […] Il a oublié que, pour l’homme, l’abîme le plus terrible n’est pas celui qu’il a sous les pieds, mais celui qu’il a sur la tête, et que l’âme, comme le corps, meurt aussi bien de trop monter que de trop descendre.

679. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Vie de la Révérende Mère Térèse de St-Augustin, Madame Louise de France »

Il la met à pied, comme un postillon dont on serait mécontent, cette équestre dont il dit, éperdu comme un poète, cet homme rassis : « Voyez-la courir par les bois !  […] Avant de la prendre au pied de l’autel, elle l’avait déjà soulevée à la cour.

680. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXI. De Thémiste, orateur de Constantinople, et des panégyriques qu’il composa en l’honneur de six empereurs. »

Ainsi, c’est au pied du Caucase, et dans l’ancienne patrie de Médée, que se forma l’orateur qui devait un jour étonner la Grèce. […] Quand on a remporté la victoire sur des lions, des léopards et des tigres, on compte tous ceux dont on a fait couler le sang dans les forêts : quand on a vaincu des hommes, il faut compter tous ceux qu’on a sauvés ; encore n’extermine-t-on pas entièrement les bêtes féroces, on en laisse subsister la race dans les déserts ; et une nation d’hommes, (qu’on les appelle barbares, ils n’en sont pas moins des hommes) une nation tout entière, soumise et tremblante à ses pieds ; il eût donc fallu l’exterminer et la détruire ?

681. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Nous léchons les pieds qui marchent sur nous. […] Passe ton bras au mien et lève ton pied leste, Et de l’amour épars nous nous abreuverons ! […] le pied vous manquerait peut-être ; vous avez mérité de vous reposer un an, comme Malherbe. […] C’est son genre, j’allais dire sa pose ; il a voulu se faire une originalité en cassant les vitres et en mettant ses pieds dans le plat. […] Il la prit par les tresses, la traîna parmi la chambre, la foula de ses pieds et la battit bien.

682. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Une fois qu’il a le pied dans l’étrier, il met la bride sur le cou de sa monture et ne s’inquiète guère du chemin. […] Mais il a suivi la voie où ses pieds savaient marcher d’un pas ferme et assuré ! […] Si Jocelyn, au lieu de s’abandonner sans trouble au charme tout-puissant de Laurence, avait défendu pied à pied le terrain neutre où il s’était réfugié, son inquiétude et sa résistance auraient ajouté à l’effet de sa joie désespérée lorsqu’il découvre le sexe de Laurence. […] qui regarde le ciel, et qui n’aperçoit pas l’abîme ouvert sous ses pieds ! […] Il a touché le port, il se repose et regarde paisiblement les vagues mugissantes qui viennent mourir à ses pieds.

683. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Recomposons-le d’après lui vers à vers : « Son visage, sa démarche, avaient quelque chose de surhumain ; sa taille était délicate et souple, ses yeux tendres et éblouissants à la fois, ses sourcils étaient noirs comme de l’ébène, ses cheveux colorés d’or se répandaient sur la neige de ses épaules ; l’or de cette chevelure paraissait filé et tissé par la nature ; son cou était rond, modelé et éclatant de blancheur ; son teint était animé par le coloris d’un sang rapide sous ses veines ; quand ses lèvres s’entrouvraient, on entrevoyait des perles dans des alvéoles de rose ; ses pieds étaient moulés, ses mains d’ivoire, son maintien révélait la pudeur et la convenance modeste et majestueuse de la femme qui respecte en elle les dons parfaits de Dieu ; sa voix pénétrait et ébranlait le cœur ; son regard était enjoué et attrayant, mais si pur et si honnête au fond de ses yeux, qu’il commandait la vertu. […] Il supplia son ami Pétrarque de l’accompagner dans cette résidence obscure et illettrée, au pied des Pyrénées, près des sources de la Garonne. […] Vous qui dominiez autrefois sur toutes les nations, qui voyiez les rois à vos pieds, vous avez gémi sous un joug honteux ; et (ce qui met le comble à votre honte et à ma douleur) vos maîtres étaient des étrangers, des aventuriers. […] « Quelle que soit l’origine de ces étrangers si fiers de leur noblesse, qu’ils vantent sans cesse, ils ont beau faire les maîtres dans vos places publiques, monter au Capitole entourés de satellites, fouler d’un pied superbe les cendres de vos ancêtres, ils ne seront jamais Romains. […] « “L’intelligence humaine ne peut pas comprendre ma félicité actuelle ; elle n’attend que toi pour être complète, et j’ai laissé là-bas sous mes pieds ce beau voile de mon corps que tu as tant aimé !

684. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Voilà un jeune homme et un vieillard qui se donnent la main en jouant du bout du pied avec les cailloux polis du torrent desséché de l’Aisse dans le bassin de Chambéry, et qui causent nonchalamment après dîner de choses et d’autres, comme deux voyageurs en attendant le départ sur le banc de l’hôtellerie ; et à trente-sept ans de là le vieillard sera devenu prophète, et le jeune homme, après avoir été arbitre momentané presque du monde, jugera le vieillard pour gagner sa vie, en intéressant ses lecteurs dans un entretien littéraire ! […] Ses pieds posaient à terre avec le poids et la fermeté d’une statue de bronze. […] N’avez-vous pas observé, Madame, que dans la noblesse, qui n’est, par parenthèse, qu’un prolongement de la souveraineté, il y a des familles usées au pied de la lettre ? […] Il avait trop de sens aussi pour s’imaginer que la France permettrait impunément à cette maison de Savoie de constituer contre elle, sur les Alpes et au pied des Alpes, à nos portes, une puissance équivoque de quinze ou vingt millions d’hommes, qui, en s’alliant, comme elle l’a toujours fait, avec l’Autriche, formerait une masse de soixante millions d’hommes pesant par leur réunion sur notre frontière de l’Est et du Midi d’un poids qui nous écraserait en se réunissant. […] Le jour où le roi de Piémont Charles-Albert laissa transpirer seulement l’ambition de changer la couronne de Sardaigne contre la couronne d’Italie, Milan bondit sous ses pieds contre Turin, et les peuples de la Lombardie désavouèrent leur prétendu libérateur piémontais.

685. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIIe entretien. Littérature politique. Machiavel (2e partie) » pp. 321-414

André Doria s’enfuit dans la campagne pour y rassembler ses partisans ; la flotte était déjà surprise, et Fieschi posait le pied sur une planche pour passer sur la galère de l’amiral, quand il glissa dans la mer et s’y noya sous le poids de son armure. […] Sous le règne suivant, les Génois poursuivent la conquête pied à pied de la Corse, et rendent enfin l’île à la France. […] XXIX Napoléon tombé, la maison de Savoie sort de son île et se précipite aux pieds des congrès de Paris et de Vienne pour obtenir non pas seulement sa propre restauration, mais ses annexions habituelles aux dépens des nationalités et des libertés des États voisins, convoités par sa soif insatiable de territoires. […] L’Angleterre espère dans la maison de Savoie un allié que nous avons fait redoutable, une puissance de trois cent mille hommes sous les armes pour y appuyer son levier anglais et antifrançais au pied des Alpes ; la France pourrait regretter son sang versé en faveur d’un allié pour qui un service est le prélude d’une exigence… Jamais, en six mois, une puissance n’a autant grandi par l’imprudente connivence de l’Angleterre ; sa grandeur démesurée n’est plus un service rendu à l’Italie, elle est un danger.

686. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

Parvenu à l’âge de quarante et un ans, possesseur par ses héritages personnels et par la dot de Térentia, sa femme, d’une fortune qui ne fut jamais splendide (car il ne plaida jamais que gratuitement, pour la justice ou pour la gloire, jugeant que la parole était de trop haut prix pour être vendue) ; lié d’amitié avec les plus grands, les plus lettrés et les plus vertueux citoyens de la république, Hortensius, Caton, Brutus, Atticus, Pompée ; père d’un fils dans lequel il espérait revivre, d’une fille qu’il adorait comme la divinité de son amour ; n’employant son superflu qu’à l’acquisition de livres rares, que son ami, le riche et savant Atticus, lui envoyait d’Athènes ; distribuant son temps, entre les affaires publiques de Rome et ses loisirs d’été dans ses maisons de campagne à Arpinum, dans les montagnes de ses pères ; à Cumes, sur le bord de la mer de Naples ; à Tusculum, au pied des collines d’Albe, séjour caché et délicieux ; mesurant ses heures dans ces retraites comme un avare mesure son or ; donnant les unes à l’éloquence, les autres à la poésie, celles-ci à la philosophie, celles-là à l’entretien avec ses amis ou à ses correspondances, quelques-unes à la promenade sous les arbres qu’il avait plantés et parmi les statues qu’il avait recueillies, d’autres au repas, peu au sommeil ; n’en perdant aucune pour le travail, le plaisir d’esprit, la santé ; se couchant avec le soleil, se levant avant l’aurore pour recueillir sa pensée avant le bruit du jour dans toute sa force, sa santé se rétablissait, son corps reprenait l’apparence de la vigueur, sa voix ces accents mâles et cette vibration nerveuse que Démosthène faisait lutter avec le bruit des vagues de la mer, et plus nécessaires aux hommes qui doivent lutter avec les tumultes des multitudes. […] Il se détourna prudemment de cette trace de sang qui semblait le devancer et le poursuivre, et se réfugia à Thessalonique, colonie romaine au fond de la Méditerranée, au pied des montagnes de la Macédoine. […] Il reprit à pied et en silence, le long de la plage, le chemin qui ramenait vers Rome : sa galère le suivait à quelque distance sur les flots. […] Au moment où la galère cherchait à franchir les dernières lames pour jeter l’ancre au pied du promontoire, une nuée de corbeaux, oiseaux fatidiques qui perchaient sur les corniches du temple, s’élevèrent du toit avec de grands cris, et, voltigeant au-devant de la galère, parurent vouloir repousser ses voiles et ses vergues vers la grande mer, comme pour lui signaler un danger sur le bord. […] » Animés par ces reproches mutuels, les esclaves de Cicéron se jettent à ses pieds, lui font une douce violence, le forcent à remonter dans sa litière, et le portent, par des sentiers détournés et ombragés, des jardins vers le rivage, où la galère l’attendait à l’ancre.

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