À bien y regarder, il n’y avait, au fond, dans son histoire de Galilée, que l’éternelle histoire de la nature humaine, dont madame Pernelle disait ; Je vous l’ai dit, mon fils, quand vous étiez petit : Les envieux mourront, mais non jamais l’envie !
Crésus avait deux fils : l’un, très-maltraité par la nature, était muet ; l’autre, au contraire, surpassait en tout les jeunes gens de son âge : ce dernier s’appelait Atys. […] « Quant aux Péoniens habitant les environs du mont Pangée, les Débores, les Agrianes, les Odomantes, et ceux du lac Prasias, ils ne furent point soumis par Mégabaze, et ce fut même inutilement qu’il tenta de réduire les derniers, qui se trouvaient protégés contre ses attaques par la nature de leurs demeures.
Et elle s’excite, raille le monde où elle a été élevée, ne cache pas au militaire que ce qu’elle apprécie en lui, c’est qu’il n’a pas de « vie intérieure » et qu’il doit être « loyalement païen » ; traite de mensonge et d’hypocrisie une discipline morale qu’elle a acceptée jusque-là avec foi et avec respect ; prononce enfin, ne s’appartenant plus, des mots qu’elle réprouvera demain : et c’est la revanche momentanée de la nature contre la grâce. […] … Il détesta, ou, mieux, il ignora les poésies et les littératures, car il avait horreur de toutes les exagérations, étant un homme précis et régulier… Et si les spectacles de la misère humaine ne lui inspirèrent jamais que le dégoût, en revanche, les spectacles de la nature ne lui suggérèrent jamais rien… » Je cite pour ma démonstration, mais pour mon plaisir aussi, car toute cette oraison funèbre du bourgeois est, en soi, un bon morceau de rhétorique.
Il était alors à Puteaux près de Neuilly, et obligé de perdre une partie de son temps sur les grands chemins : Malgré ma servitude privée, disait-il en finissant, je souhaite, mon cher ami, que vous soyez bientôt aussi libre que moi ; que vous puissiez aussi regarder la Seine couler comme je le fais et vais le faire plus que jamais de mes fenêtres ; enfin que nous puissions grommeler ensemble sur toute l’espèce humaine qui heureusement n’est pas toute la nature, et réaliser une bonne fois à nous deux la grande faction des insociables dont la France a été tant tourmentée depuis deux ans.
Ainsi on le voit, par degrés, se former, se civiliser et devenir l’objet d’un culte délicat, ce Cid qui dans la réalité, au xie siècle, ne guerroyait que « pour avoir de quoi donner l’orge aux siens et de quoi manger. » Il garde pourtant encore, dans ce poème du commencement du xiiie siècle, plus d’un trait de sa rude et primitive nature.
Malherbe et Voiture pensèrent le gâter, il le dit lui-même ; mais, à la fin, il vit le faux des brillants, il trouva la nature au gîte et la prit, et elle ne l’a point quitté depuis. » Du moment qu’il s’agit des Fables, il ne plaisante plus, et parlant de celles de La Motte, il devient même trop sévère et trop méprisant quand il dit : « Il vient de faire des Fables à l’envi de La Fontaine, et a montré qu’il ne peut écrire que pour les cafés, et qu’il n’est pas permis de travailler après les grands hommes qui ont emporté la palme en certain genre. » Marais ne veut pas (et c’est là sa limite) qu’on essaye de rouvrir la carrière après les maîtres.
Le détail des Bucoliques est d’une continuelle et parfaite observation rurale, d’une peinture fidèle, prise sur nature, et du rendu le plus délicat ; elles sont bien d’un poète qui a vécu aux champs et qui les aime, et chaque fois qu’on sort de les relire, on ne peut que répéter avec M. de Maistre : « l’Énéide est belle, mais les Bucoliques sont aimables. » Ayant écrit moi-même autrefois une Étude sur Virgile, il m’est resté quelque surcroît d’idées et de remarques que je demande à joindre ici comme un dernier hommage et tribut au souverain poète à qui j’aurais aimé, moi aussi, à élever mon autel.
On doit au reste en prendre son parti avec M. de Balzac, et l’accepter selon sa nature et son habitude.
Nisard n’y aurait pas aspiré, par ambition grave, quand la nature de son esprit lui eût permis le badinage.
Sarcey part de ces deux principes incontestables : 1° Le théâtre est un genre particulier, soumis à certaines règles nécessaires qui dérivent de sa nature même ; 2° Les pièces de théâtre sont faites pour être jouées, et non pas devant une poignée de délicats, mais devant de nombreuses assemblées d’hommes et de femmes.
Dieu même, si tant est qu’il est juge, ne peut le faire que selon sa nature, et préférer le bien au mal, n’est-ce pas déjà de la partialité ?
On a dit, dans le temps, que ce portrait n’était pas de nature à plaire à la maison de Bouillon.
Ou il y a eu, en effet, une liasse de papiers jaunes et inégaux sur lesquels on a trouvé, enregistrées une à une, les dernières pensées d’un misérable ; ou il s’est rencontré un homme, un rêveur occupé à observer la nature au profit de l’art, un philosophe, un poëte, que sais-je ?
Admirez la nature qui d’un peu de boue et d’oxyde fait cette charmante pierre verte. — J’admire bien plus les hommes, répondit Jérôme Bonaparte, qui font de cette pierre une écritoire.
À ceux dont la vertu n’est pas une science d’emprunt, mais à qui par nature est départie la modération en tout, il appartient de cueillir ces couronnes.
Cela se voit aussi dans les provinces les plus proches de l’Inde, où les habitants ne sont guère moins mal faits que les Guèbres, parce qu’ils ne s’allient qu’entre eux ; mais dans le reste du royaume, le sang persan est présentement devenu fort beau, par le mélange du sang géorgien et circassien, qui est assurément le peuple du monde où la nature forme les plus belles personnes, et un peuple brave et vaillant, de même que vif, galant et amoureux. […] Il lui faisait jeter des pleines tasses de vin au visage, sur la tête et sur les habits, et lui faisait dans l’ivresse mille indignités de cette nature.
Nature chaleureuse, prompte à l’espérance, plus occupée des principes que des personnes, il prit feu à l’idée d’un réveil de la France, d’une conversion de l’Empire à la liberté, et se fit fort de défendre dans le Moniteur l’efficacité des garanties accordées aux citoyens français par l’Acte additionnel.
Et encore peut-on dire aujourd’hui qu’Insidieux est entré dans la langue littéraire plutôt qu’il n’est passé dans l’usage courant : c’est qu’il est de sa nature un mot savant, dont le sens, dans toute sa force et sa beauté, n’est bien saisi que des latinistes, et qu’il n’a trouvé dans notre langue aucun mot déjà établi, approchant et de sa famille, pour « lui frayer le chemin. » Toutes ces circonstances propres et comme personnelles à chaque mot sont démêlées à merveille par Vaugelas.
Ces procès-verbaux, si parfaits et souvent plus beaux que nature, dans lesquels chaque membre s’exprime si bien, feront un jour le désespoir des érudits qui voudront retrouver le nom des acteurs et orateurs.
… Tout privilège est, de sa nature, injuste, odieux et contraire au pacte social.
Mais, soit nature, soit habileté politique, il ne se prononçait pas nettement encore avec le parti des saints de ses amis.
Mais de quelle nature serait cette arrière-pensée politique ?
Quoi de moins ressemblant au portrait du prince que Machiavel a tracé d’après nature, et dont chaque détail est pris à quelque personnage connu, que ce vain idéal, mélange de souvenirs de lecture échauffés par le travail, et de digressions où Balzac tantôt fait sa cour au roi, tantôt défend sa réputation attaquée ?
Tout ce mouvement autour du mourant, d’abord de respect et d’intérêt pour une vie de si grande importance, puis, à mesure que les chances de guérison diminuent, d’ambition et de précautions avec le règne futur ; ces appartements du duc d’Orléans encombrés, « à n’y pas mettre une épingle », quand le roi est désespéré, vides et déserts sur le bruit qu’il est mieux ; ces valets qui pleurent, les seuls vrais amis du monarque ; la froide et triste octogénaire qui assiste l’œil sec à sa longue agonie, profitant des courts répits du mal pour faire ajouter à la part des bâtards, et quand le roi n’est plus qu’un moribond qui ne peut plus ni ôter ni donner, n’attendant pas la fin et se sauvant à Saint-Cyr ; ces grandes et touchantes paroles du roi ; cette attente de la mort dans la majesté qu’il mettait à toutes ses actions, sans défaillances, sauf celles de la nature quand le combat va finir ; cette inquiétude du chrétien, qui craint que ses souffrances ne soient une trop faible expiation de ses fautes ; tout cela raconté au jour le jour, dans l’ordre où chaque chose arrive, parmi des détails sur le service intérieur, l’étiquette, les allées et les venues des courtisans et des gens de service, les messes entendues dans le lit et les derniers repas du mourant ; tout cela, dans son abandon, égale l’art le plus consommé.
Or, le but avoué de Wagner a été de donner à son pays un art national, qui soit pour l’Allemagne ce que la tragédie a été pour la Grèce ; jugeant qu’un tel but ne pouvait être atteint avec les médiocres ressources que les théâtres existants lui offraient, il a construit le théâtre-modèle de Bayreuth, et toute la hauteur et la vraie nature de son ambition se révèle dans les paroles qui lui échappèrent dans l’ivresse du triomphe qui suivit à la fin de la première représentation de la tétralogie : jetzt, meine Herren, haet Ihr eine Kunst : — À présent, messieurs, vous avez un art !
Ettlinger) ; le naturalisme en littérature et l’œuvre de Wagner (Ernst von Wolzogen) ; la nature dans l’œuvre de Wagner (H. von Stein).
Elle n’était pas, comme pour nous, l’élégie de la Nature, ce pays romanesque, cette patrie de rêverie, teinte du panthéisme d’un dimanche de bourgeois.
8 avril Il est touché presque par cela seul : les colorations de la nature et surtout les aspects du ciel.
Noir, il était plus contre nature que s’il eût été blanc. […] Saint-Marc Girardin), comme un jour ses disciples voulaient le faire peindre, s’y refusa formellement : « N’est-ce donc pas assez, disait-il, de traîner partout avec nous cette triste image dans laquelle la nature nous a enfermés, et croyez-vous qu’il faille encore transmettre aux siècles futurs une image de cette image, comme un spectacle digne de leur attention ? […] Quant aux hommes d’imagination et de loisir qui, par la nature de leurs travaux et de leurs études, ont voulu rester neutres dans ces tristes débats, ils ont perdu, en perdant Armand Carrel, un ami bienveillant, un juge éclairé de leurs travaux et de leurs efforts, un protecteur assuré contre les cruautés de ce qu’on appelle la presse avancée. […] David, et ils ont été bien étonnés l’un et l’autre, au sortir de ses mains, de se trouver la tête encore plus grande que celle que leur a donnée la nature : c’est que l’artiste avait mis en dehors ce qui était en dedans ; à force d’approcher de ces rares intelligences et d’en étudier l’enveloppe, et de voir tout à l’aise comment ces âmes d’élite se manifestent par le regard, par le sourire, par le froncement du sourcil, le sculpteur a fini par deviner plusieurs des mystères de ces rares natures ; il a fini par comprendre que de très grandes âmes peuvent, en effet, animer de petits corps ; et bientôt cette exagération a fait place à une représentation plus simple et plus naturelle. […] De cette femme, on peut dire, à bon droit, ce que disait Néoclès à la louange de son frère Épicure, que, « lors de la génération, la nature avait assemblé tous les atomes de la prudence dans le ventre de sa mère ».