En quelque lieu qu’il s’arrête, sur quelque métairie qu’il porte ses regards, il voit tout ensemble devant lui, la vigne qui, élégamment suspendue en contre-espalier autour de chaque champ, l’environne de ses festons ; les peupliers, rapprochés les uns des autres, qui lui prêtent l’appui de leur tronc, et dont les cimes s’élèvent au-dessus d’elles ; l’herbe, qui croît au pied de ces élégants contre-espaliers et qui gazonne les bords des nombreux fossés, destinés à l’écoulement des eaux ; les mûriers qui, plantés sur deux lignes au milieu des champs, et à une distance assez grande pour ne pas les offusquer de leur ombre, dominent les moissons ; les arbres fruitiers qui, çà et là, sont entremêlés aux peupliers et à la vigne ; les blés de Turquie qui, s’élevant à six ou huit pieds au-dessus de terre, entourent leurs magnifiques épis de la plus riche verdure ; les trèfles annuels dont les fleurs incarnates se penchent sur leur épais feuillage ; les lupins dont le coup d’œil noirâtre et l’abondante végétation contraste avec la souplesse, l’élégance et la légèreté des seigles non moins vigoureux qu’eux et qui s’élèvent au-dessus de la tête des moissonneurs ; enfin, les blés dont les longs épis dorés sont agités par les vents et rappellent par leurs ondulations le doux mouvement des vagues d’un beau lac. » Le second morceau consacré aux Collines est comme un pendant au tableau des plaines ; celles-ci, dans aucun pays, ne peuvent plaire aux yeux que par l’abondance et la fertilité qui les caractérise.
Dans le temps de la seconde démarche de Chimène auprès du roi, quand le monarque se décide à publier le cartel proposé par elle et annonçant qu’à celui qui lui apportera la tête de Rodrigue elle donnera, s’il est noble et son égal, tous ses biens avec sa main, sur ces entrefaites Rodrigue est allé en pèlerinage pour l’expiation de ses péchés à Saint-Jacques de Galice, accompagné de deux écuyers ; et c’est en route que lui arrive une aventure des plus touchantes, léguée de longue main par la tradition, et en apparence des plus étrangères à l’action principale.
Très-bourgeois en tout, Collé s’était pris, sur le tard, d’une vive amitié pour un petit cousin qui était surnuméraire dans les fermes, et c’est à ce jeune homme, pour le former au monde et aussi le pousser dans sa carrière, qu’il adresse, au nom de sa femme et au sien, de longs et minutieux conseils.
Un jour à Bagneux, maison de campagne de Mme Davillier, après une longue discussion sur l’opéra de Fernand Cortez, sur lequel on avait pris plaisir à le chicaner : « Vous avez beau dire, s’écria Jouy en ne plaisantant qu’à demi, il y a dans cette pièce un acte excellent que vous n’êtes pas assez forts pour découvrir. » Béranger, qui avait retenu le mot, se lève au milieu de la nuit, appelle deux des interlocuteurs qui étaient ses voisins, et ils s’en vont frapper à la porte de la chambre de Jouy qui s’éveille en sursaut.
Les hommes qui en valent la peine ne se jugent point d’un coup d’œil ni en un instant ; et, comme l’a dit le grand poète persan Sadi : « Ce n’est qu’en laissant s’écouler un long espace de temps que l’on arrive à connaître à fond la personne qu’on étudie. » Ce devrait être la devise de toute biographie sérieuse.
L’auteur de Marie pourtant a gardé chaste et noué le long vêtement de la Muse ; espèce de Bion chrétien, de Synésius artiste, en nos jours troublés ; jeune poëte alexandrin qui a maintenant rêvé sous les fresques de Raphaël, et qui mêle sur son front aux plus douces fleurs des landes natales une feuille cueillie au tombeau de Virgile.
Comme je ne me pique pas le moins du monde d’être agréable aujourd’hui, je dirai, même aux dames, toute ma pensée : « Tout le monde (c’est La Bruyère qui parle)185 connoît cette longue levée qui borne et qui resserre le lit de la Seine, du côté où elle entre à Paris avec la Marne qu’elle vient de recevoir : les hommes s’y baignent au pied pendant les chaleurs de la canicule ; on les voit de fort près se jeter dans l’eau, on les en voit sortir, c’est un amusement.
Les romans que l’on nous a donnés depuis quelque temps, dans lesquels on voulait exciter la terreur, avec de la nuit, des vieux châteaux, de longs corridors et du vent, sont au nombre des productions les plus inutiles, et par conséquent, à la longue, les plus fatigantes de l’esprit humain.
Il est frappant que ses plus longues pièces portent le titre de Discours, et ce qu’il appelle Hymne de saint Louis est un « panégyrique » en vers du saint roi, orné d’abondantes moralisations.
Il est vrai qu’il a reçu l’instruction des événements : il a vu s’achever le long et lourd règne de Louis XIV, il écrit dans le fort de la réaction qui suivit la mort du grand roi ; et il y aide, pour son compte, de tout son cœur.
Et ces dernières pages, si belles, tandis que je les parcours, je suis sans doute arrêté par des phrases éclatantes comme celle-ci, qui termine un morceau sur le rôle de l’amour dans le développement de notre être moral : «… Tout au long de nos années, il s’est donc enrichi ou appauvri, au hasard de cette passion souverainement bienfaisante ou destructive, le trésor de moralité acquise dont nous sommes les dépositaires : infidèles dépositaires si souvent, et qui préparons la banqueroute de nos successeurs parmi les caresses et les sourires. » Ou bien ce passage m’éblouit comme un magnifique éclair : «… L’amour seul est demeuré irréductible, comme la mort, aux conventions humaines.
On l’a dit une longue patience, et encore une névrose.
On l’a dit une longue patience, et encore une névrose.
Nous entendrons toujours ces sages paroles qui semblaient, par leur calme gravité, venir du fond d’un tombeau, et nous dirons pour finir par une grande pensée de lui : « Le temps, qui est beaucoup pour les individus, n’est rien pour ces longues évolutions qui s’accomplissent, dans la destinée de l’humanité.
L’Ichtiosaure, muni de cent quatre-vingts dents, qui roulait des yeux larges comme les roues d’un char ; le Plésiausaure, qui dardait d’une carapace de tortue un cou long comme un boa déroulé ; le Ptérodactyle, amalgame horrible de reptile et de chauve-souris ; le Dinothérium, éléphant géant, aux défenses recourbées en bas comme celles des lamantins et des morses ; toutes ces créatures encombrantes et incohérentes avaient disparu avec les terrains qui les supportaient et les climats qui les faisaient vivre.
Zadig, dans le conte de Voltaire, devine, sans l’avoir vu, que le cheval échappé du roi de Babylone a cinq pieds de haut, le sabot fort petit, qu’il porte une queue de trois pieds et demi de long, que les bossettes de son mors sont d’or à vingt-trois carats, et que ses fers sont d’argent à onze deniers.
» Pressé sur ses raisons, il ne fit pas difficulté de les dire, et une longue amitié s’ensuivit, durant laquelle le philosophe modeste n’épargna pas d’utiles conseils, des conseils qui se rapportaient tous à la vérité, au naturel, à la propriété de l’expression.
Détenu durant plus d’une année en Dauphiné, les nombreux écrits par lesquels il remplissait les longues heures de réflexion et de solitude sont empreints du même caractère : maturité, sagesse, élévation, aucun sentiment irrité ni haineux, rien de personnel.
Quand cette enfant de seize ans sortit de son village, déterminée à faire sa conquête de France, elle était d’une vigueur et d’une audace tant de parole que d’action, qu’elle-même avait déjà un peu perdue et oubliée dans les longs mois de sa prison de Rouen.
Aussi, quand Diderot le rencontre, il s’attache à lui, il le traduit, l’interprète, l’explique, y ajoute et ne le lâche plus : « Je suis peut-être un peu long, dit-il, mais si vous saviez comme je m’amuse en vous ennuyant !
Cette mort fut la seule douleur de sa longue vie, le seul accident qui trouva sa philosophie en défaut ; il fut homme un jour par ce côté.
Cet homme lunatique, qui commence sa matinée du dimanche par contrarier femme et domestique en tout point, par se refuser au dîner périodique de famille sous prétexte qu’on ne l’a pas invité par écrit, qui ne sait qu’imaginer pour contredire les autres et lui-même, qui n’a pas plus tôt exprimé un caprice, qu’il le regrette ; que tout vient tenter et lutiner sans le fixer à un choix ; qui passe de l’envie du trictrac à celle de dîner tout seul, puis à l’idée de se purger, et qui finit, après avoir bien grondé, et sa lune déclinant vers le soir, par se laisser coiffer par sa belle-mère d’un bonnet de coton à longue mèche, et par se coucher docilement à jeun, comme un enfant honteux qui est puni d’avoir fait le malade ; tout ce portrait est délicieux, et si La Bruyère avait fait de son Distrait une petite comédie, c’est ainsi qu’il aurait voulu s’y prendre, qu’il aurait ménagé les scènes, en y semant les jolis mots.
Arrivé à la barre de la Convention, qu’il trouva tout en désordre, puis admis aux honneurs de la séance dont il profita peu, il raconte qu’un gros et joyeux conventionnel lui dit, en le voyant sortir : « Prenez le plus long pour retourner vers vos commettants, et, toutes les fois que vous passerez devant une section, entrez ; parlez de la mission que vous venez de remplir, et de l’accueil que vous avez reçu… Vantez surtout l’assurance que vous avez vue parmi nous. » — « Sans doute, lui répondis-je ; cela me formera si je veux un jour écrire l’histoire. » M.
Frémont, épuisé d’une si longue lutte et assiégé de terreurs, sortit de l’audience en chancelant.
Dans les premiers articles qu’il donnait une fois par semaine dans les gazettes du lieu, il s’efforçait de polir les mœurs, les usages, de corriger les mauvaises et inciviles habitudes, la grosse plaisanterie, les visités trop longues et importunes, les préjugés populaires superstitieux et contraires aux bonnes pratiques.
Grimm, jeune, avait beaucoup souffert, et il n’eût tenu qu’à lui, dit-il quelque part, de se faire une longue liste de malheurs : il aimait mieux reporter sa pensée sur les secours qu’il avait trouvés dans l’intérêt et la bienveillance de quelques hommes généreux.
Par je ne sais quel prestige, dont l’illusion se perpétue de génération en génération, nous regardons le temps de notre vie comme une époque favorable au genre humain et distinguée dans les annales du monde… Il me semble que le xviiie siècle a surpassé tous les autres dans les éloges qu’il s’est prodigués à lui-même… Peu s’en faut que même les meilleurs esprits ne se persuadent que l’empire doux et paisible de la philosophie va succéder aux longs orages de la déraison, et fixer pour jamais le repos, la tranquillité et le bonheur du genre humain… Mais le vrai philosophe a malheureusement des notions moins consolantes et plus justes… Je suis donc bien éloigné d’imaginer que nous touchons au siècle de la raison, et peu s’en faut que je ne croie l’Europe menacée de quelque révolution sinistre.
Pour mettre sa sensibilité plus à son aise, par un singulier et subtil accommodement il supposait que c’était d’un autre que lui qu’il parlait : C’est d’un moi que je parle, et non pas de moi ; car, loin des hommes, au pied des hautes montagnes, au bruit d’une onde monotone qui ne présente d’autre idée que la marche égale du temps, et sans autre aspect qu’une longue solitude, une retraite silencieuse que bordent déjà les ombres d’une éternelle nuit, je n’ai plus de rapport avec ce ministre naguère emporté par les événements, agité par les passions du monde, et sans cesse aux prises avec l’injustice ; je n’ai plus de rapport avec lui que par les émotions d’une âme sensible… Il revient à chaque instant, avec des cris de David ou de Job, sur cette calamité, qui véritablement n’était pas si grande qu’il le supposait : Quelquefois seulement, au pied de ces montagnes où l’ingratitude particulière des représentants des Communes m’a relégué, et dans les moments où j’entends les vents furieux s’efforcer d’ébranler mon asile, et renverser les arbres dont il est environné, il m’arrive alors peut-être de dire comme le roi Lear : « Blow, winds, … Soufflez, vents impétueux !
La tâche dont nous venons de dire les obstacles est sans doute longue à accomplir et ne peut être faite qu’en gros.