Cela sent un reste de mauvais goût natif et de grossièreté septentrionale, et l’on a pu dire, avec une juste sévérité, des lettres de Frédéric : « Il y a de fortes et grandes pensées, mais tout à côté il se voit des taches de bière et de tabac sur ces pages de Marc Aurèle. » Frédéric, qui avait du moins le respect des héros, a dit : « Depuis le pieux Énée, depuis les croisades de saint Louis, nous ne voyons dans l’histoire aucun exemple de héros dévots. » Dévots, c’est possible, en prenant le mot dans le sens étroit ; mais religieux, on peut dire que les héros l’ont presque tous été ; et Jean Muller, l’illustre historien, qui appréciait si bien les mérites et les grandes qualités de Frédéric, a eu raison de conclure sur lui en ces mots : « Il ne manquait à Frédéric que le plus haut degré de culture, la religion, qui accomplit l’humanité et humanise toute grandeur18. » Je ne veux plus parler aujourd’hui que de Frédéric historien. […] Tout étranger qu’il est, il sait choisir ses expressions en esprit juste qui mesure ou plie la langue à sa pensée. […] En parlant des autres, même de ses plus grands ennemis, il est juste.
De nos jours, des amateurs, gens d’esprit, ont continué sous une autre forme cette religion : ils se sont consacrés à recueillir les moindres vestiges de l’auteur des Essais, à rassembler ses moindres reliques : et, en tête de ce groupe, il est juste de mettre le docteur Payen, qui prépare depuis des années un livre sur Montaigne, lequel aura pour titre : Michel de Montaigne. […] Et élevant de plus en plus sa pensée et son cœur, réduisant sa propre souffrance à ce qu’elle est dans l’immense sein de la nature, s’y voyant non plus seulement soi, mais des royaumes entiers, comme un simple point dans l’infini, il ajoute en des termes qui rappellent d’avance Pascal, et dont celui-ci n’a pas dédaigné d’emprunter le calque et le trait : Mais qui se représente comme dans un tableau cette grande image de notre mère nature en son entière majesté : qui lit en son visage une si générale et constante variété ; qui se remarque là-dedans, et non soi, mais tout un royaume, comme un trait d’une pointe très délicate, celui-là seul estime les choses selon leur juste grandeur. […] Montaigne, ainsi que ferait Horace, leur conseille, tout en s’attendant de longue main à tout, de ne pas tant se préoccuper à l’avance, de profiter jusqu’au bout, dans un esprit libre et sain, des bons moments et des intervalles lucides ; il fait là-dessus de piquantes et justes comparaisons coup sur coup, et termine par celle-ci, qui me paraît la plus jolie, et qui d’ailleurs est tout à fait de circonstance et de saison : c’est folie et fièvre, dit-il, de « prendre votre robe fourrée dès la Saint-Jean, parce que vous en aurez besoin à Noël ».
Dès l’abord elle charme la jeune reine, une gracieuse et vraiment spirituelle élève, lui devient nécessaire, et par elle arrive à l’être au jeune roi, prince d’un esprit juste, brave à la guerre, mais d’un caractère timide, d’un tempérament impérieux, et par là dépendant étroitement de sa femme (uxorius), en un mot chaste, dévot et amoureux. […] Or, la reine qui, à la date d’août 1703, avait tout juste ses quatorze ans accomplis, avait elle-même besoin d’une personne pour la gouverner, « pour lui donner de bons conseils et du courage ». […] Elle est d’avis que les chefs de ce parti ressentent les marques du mécontentement du roi avant qu’on ait eu le temps de recevoir des réponses de France, afin qu’il paraisse bien que c’est une résolution prise par le roi d’Espagne et non suggérée d’ailleurs : Ne vous épouvantez point, je vous supplie, madame, de ces résolutions : il est heureux que les grands nous aient donné une si juste occasion de les mortifier.
ajoute-t-il (ce serait plutôt à nous d’écrire ce mot-là), qu’il était bon et juste, ayant assez reçu de Dieu pour être un bon roi, et peut-être même un assez grand Roi ! […] Le roi, d’un esprit assez juste pour ne jamais revenir sur une décision, ne se démentit pas. […] Or, franchement, il faut bien en convenir, cet homme à la bile incendiée, cet ambitieux et ce glorieux Saint-Simon, qui ne fut rien quand il aspirait à être tout, et qui se retirait de la cour et de l’indifférence de Louis XIV dans la solitude de ses Mémoires, son refuge et sa consolation : — Consolationem afflictorum et refugium peccatorum , — ne se surveille pas infiniment et ne se préoccupe pas beaucoup de la grande question d’être juste.
Paysages très justes, anecdotes modestes et une atmosphère très pittoresque. […] bien, dans l’admirable guerre des muscles, si juste, — non de justice, mais de justesse, — quel est cet élément de désordre ? […] Soit un petit nombre de propositions évidentes, une juste dialectique en tire une chaîne de propositions nouvelles. […] Sa beauté ne résulte pas de sa soumission juste à une idée : il dépasse l’idée. […] L’attitude est grave et sereine, d’une intelligente et juste énergie et d’une beauté idéale en même temps que matérielle.
Sandeau, dans la Revue de Paris, a été mieux et il a dit avec bonne grâce et sagesse ce qu’il pensait : Bonnaire s’était cette fois presque insurgé contre Buloz et a voulu être juste !
Abeille, arrivant à Paris, D’abord pour vivre vous chantâtes Quelques Messes à juste prix ; Puis au Théatre vous lassâtes Les sifflets par vous renchéris ; Quelque temps après, fatigâtes De Mars l’un des grands* favoris, Chez qui pourtant vous engraissâtes : Enfin, digne Aspirant, entrâtes Chez les quarante Beaux-Esprits, Et sur eux-mêmes l’emportâtes A forger d’ennuyeux Ecrits.
in-12, lui donne de justes droits à l’estime publique, par l’art avec lequel il a su réunir ce qu’il y a de plus intéressant & de plus instructif dans l’Histoire Ecclésiastique, en évitant la fatigante prolixité de quelques-uns de ses prédécesseurs, & la sécheresse de quelques autres.
Un Panégyrique de Saint Louis, & trois Oraisons Funebres ; l’une de M. le Dauphin, l’autre de la Reine, la troisieme de Louis XV, prouvent ses talens pour l’éloquence de la Chaire, & le font blâmer d’avoir abandonné une carriere que de justes succès devoient l’engager à parcourir plus long-temps.
Quelques-uns avoient fait du bruit ; d’autres jouissoient encore d’une réputation usurpée & nuisible au soutien du bon goût : pouvoit-on se dispenser de les réduire à leur juste valeur ?
Le Public peut être dupe quelque temps du charlatanisme, mais enfin il ouvre les yeux dès que la vérité se montre ; ses erreurs ne sont qu’un sommeil, & le réveil de la raison est une juste condamnation du prestige qui l’avoit séduite.
Nous ne connoissons, de M. l’Abbé Mangenot, aucun Ouvrage en prose, à moins qu’on ne veuille regarder comme un Ouvrage son Histoire abrégée de la Poésie Françoise, plaisanterie aussi juste qu’agréable, où il seroit difficile de trouver beaucoup de fautes, car elle se réduit à une demi-page.
Il a fait également paroître de l’esprit & de la légéreté dans quelques Ecrits polémiques, traités selon les regles d’une critique aussi juste que saine.
L’épaule est prise si juste qu’on la voit toute nue à travers le vêtement, et ce vêtement est à tromper : c’est l’étoffe même pour la couleur, la lumière, les plis et le reste ; et la gorge, il est impossible de la faire mieux : c’est comme nous la voyons aux honnêtes femmes, ni trop cachée, ni trop montrée, placée à merveille, et peinte, il faut voir.
et qu’elle est juste ! […] Les honneurs de la questure sont déférés à Narcisse, et la vengeance la plus juste devient la source des plus grands maux. […] « Accusateur ou apologiste, suis-je dispensé d’être juste ? […] Qui sera assez juste appréciateur des circonstances où l’Empire se trouvait, pour oser blâmer la condescendance de Sénèque. […] Je croirais que la Consolation à Polybe est de Sénèque, que je n’en estimerais pas moins Juste Lipse.
Cette fois il a trouvé juste et il est tombé à belles dents sur sa proie.
que c’est juste !
l’amour sincère et sans nulle crainte d’être ingénu, l’expression de cet amour franc, net, chaste, — parce qu’il est sincère et pur, puisqu’il est ingénu ; l’accent juste sans plus ; le cri, en quelque sorte, de la passion, le cri non pas tout à fait, le chant vibrant, la note vraie du cœur, — et des sens aussi.
Juste la place de citer l’auteur des Parques , M.
Son verbe est sonore, précis, harmonieux, ses images rares et justes.
On fait cas de sa Grammaire Hébraïque, composée pour l’instruction de ses Eleves, aussi bien que de son Dictionnaire géographique portatif, publié sous le nom de Vosgien, où il a su réduire à de justes notions, les détails trop diffus de celui de la Martiniere.
Qu’on réunisse à la fois l’esprit, l’étendue des connoissances, la facilité pour écrire, un style guindé & précieux, un goût peu sûr, & quelquefois mauvais ; on se fera une juste idée des Productions de cet Auteur.
Sans ambitionner d’autre gloire que celle d’être utile, il a acquis des droits à une juste réputation.
On en retrouve trace et témoignage dans le présent volume ; cette âme semble tout à fait vouée à aimer sans être aimée, sans trouver de juste réponse dans l’objet de son erreur. […] Quand la belle et brillante Delphine, Mme Émile de Girardin, fut enlevée avant l’heure, Mme Desbordes-Valmore, qui l’avait vue commencer et qui s’attendait si peu à la voir finir, eut un hymne de deuil digne de son noble objet, et dans lequel cependant elle prête un peu, je le crois, de sa mélancolie à l’éblouissante muse disparue ; mais le mouvement est heureux, le ton général est juste et d’une belle largeur : La mort vient de frapper les plus beaux yeux du monde : Nous ne les verrons plus qu’en saluant les cieux.
La comparaison jusqu’ici est fort belle, mais elle n’est juste encore que si l’on suppose la critique, dans toute sa profondeur et sa continuité, s’appliquant aux grands monuments des âges anciens. […] Il n’avait point encore porté sa prose descriptive à ce degré de perfection qui tient de la merveille. — Il n’est que juste, après ces extraits d’articles un peu chagrins et un peu rogues, d’indiquer, au tome VI de mes Nouveaux Lundis, les articles que j’ai faits sur Théophile Gautier, envisagé au complet et dans son dernier développement.
Cela est sobre, juste, fort, exactement proportionne et solidement équilibré : en un mot, cela est complet. […] Mais s’il satisfaisait par tant de côtés l’esprit de son temps, il l’enrichissait aussi, et, par un juste instinct de la grande poésie, il imposait au rationalisme le respect de la forme d’art, que celui-ci n’aurait eu que trop de pente à méconnaître.
., — qui trahissent le journaliste sur la brèche qui ne tire pas toujours juste par l’expression, — c’est un écrivain du xviie siècle à faire croire qu’il en est un. […] André Chénier, le tendre Chénier, le pur et juste Chénier, qui devint l’héroïque et intrépide Chénier, ne fut pas plus chrétien que tout son siècle.
Il faut être juste : ce ton des Souvenirs de la marquise de Créqui est tellement réussi, qu’on se demande s’il est joué et si l’auteur n’est pas un délicieux artiste ? […] Quant à ses jugements sur les choses et les hommes, « le plus souvent justes en dernier résultat, — dit Sainte-Beuve, — mais si secs, ce sont moins des jugements que des exécutions », comme si tout jugement n’était pas (et cela toujours) une exécution nécessaire !
Il faut être juste, ce Cours de 1828, qui fit tant de bruit, comme la montagne à la souris, est le plus retentissant moment de la vie de Cousin, de cet homme sonore dont la plus grande qualité dans le talent fut de donner du son à des idées qui, par elles-mêmes, n’en avaient pas… Telle est sa grande qualité, en effet. […] l’incroyable aveu de son ancien maître, à la page 75 de ses amusants et terribles Philosophes salariés, comme s’il avait voulu nous donner, à nous autres critiques, une juste idée de l’homme qui, à quatorze ans de distance, caractérise de cette gaillarde manière le livre qu’il réimprime avec un si grand sérieux aujourd’hui.