/ 2143
321. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Milton, et Saumaise. » pp. 253-264

Le libraire Tompson eut de la peine à se charger de l’impression du Paradis perdu ; &, si cet ouvrage a depuis enrichi sa famille, Tompson lui-même ne trouva pas de lecteurs pour le vendre. […] Quoique tous les livres en faveur des parlementaires rebèles eussent été composés par des écrivains plus factieux encore, & que l’esprit seul qui dictoit ces ouvrages dût les rendre méprisables, ils ne laissoient pas de faire des impressions profondes dans les têtes même les mieux organisées.

322. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 24, objection contre la solidité des jugemens du public, et réponse à cette objection » pp. 354-365

Ainsi le véritable moïen de connoître le mérite d’un poëme sera toujours de consulter l’impression qu’il fait. […] Aussi ne prétens-je pas que l’ignorant puisse dire précisement en quoi le peintre ou le poëte ont manqué, et moins encore leur donner des avis sur la correction de chaque faute, mais cela n’empêche pas que l’ignorant ne puisse juger par l’impression que fait sur lui un ouvrage composé pour lui plaire et pour l’intéresser, si l’auteur a réussi dans son entreprise et jusqu’à quel point il y a réussi.

323. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

L’enseignement des Lettres anciennes les a habitués à raffiner leurs impressions. […] La page succède à la page, toute chargée d’impressions, d’observations, de théories. […] Du monde de l’impression, il est monté dans celui de la réflexion. […] Elle ne donne jamais une impression d’anarchie. […] C’est un excès d’impression qu’ils manifestent.

324. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Ces écrivains devancent et ils dominent l’impression reçue de la réalité. D’autres, au contraire, dépendent de cette impression. […] C’est de tous les coins de l’œuvre du romancier que cette impression se dégage. […] Il a eu de très bonne heure le besoin de fixer ses impressions sur le papier. […] Veut-il nous laisser cette impression que Balzac a manqué totalement d’esprit et tact ?

325. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

Si l’on s’offre passivement à l’impression du livre, la lecture n’est pas profitable. […] Les lectures ainsi faites ont cet avantage, de nous fournir en quelque sorte des idées centrales autour desquelles se grouperont et se conserveront nos impressions fugitives, nos émotions d’un moment. […] La cause de la sensation supprimée, la sensation disparaît, ne laissant qu’un vague souvenir, une obscure image, qui disparaîtra bientôt refoulée dans les profondeurs de l’être par la masse des impressions ultérieures.

326. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre II. Diderot »

Il sait aussi beaucoup sur l’antiquité, et ce ne sont pas de vagues impressions d’une lecture rapide ; il voit le détail, il cherche l’exactitude ; s’il lit llorace, il le lit en philologue, en poète, en historien ; s’il lit Pline, il le lit toujours en philologue, mais en peintre, en archéologue, en chimiste ; il prend chaque ouvrage du côté dont un homme de métier le prendrait, avant d’y appuyer ses rêveries personnelles. […] Je ne sais s’il a jamais rien fait qui ne soit à l’occasion de quelque chose, et comme une immense réaction de son être contre une impression extérieure. […] Le Neveu de Rameau est un heureux accident : ailleurs le subjectif se mêle à l’objectif ; aux impressions de la nature extérieure se superposent, s’enchevêtrent, s’accrochent, les élans, les enthousiasmes, les indignations de Denis Diderot, toute une individualité effrénée, bruyante, encombrante.

327. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre II. La critique »

Il ne voit que ce qu’il veut voir ; s’il va en Angleterre, ses impressions seront celles que comportent ses idées : Michelet est bien autrement capable d’être assailli par des sensations étrangères ou hostiles à son système intellectuel. […] Il y a des morceaux de toute la nature, et je ne sens pas la nature, la vie de la nature, comme les apportent parfois les impressions irraisonnées d’une âme. […] Les deux volumes où il a consigné ses impressions du Sahara et du Sahel contiennent des tableaux étonnants, dont la couleur intense fait pâlir les finesses charmantes de sa peinture : ces descriptions sont en un sens de la critique, la critique des sujets, si je puis dire ; car on y voit la réflexion de l’artiste analyser à l’aide des mots des sensations pittoresques dont sa main ne saurait rendre la puissance.

328. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

J’ai eu souvent cette impression gênante. […] L’impression qui se dégage de ses livres est plus forte que toutes les professions de foi de l’écrivain. « L’homme, lisons-nous dans l’Imitation, s’élève au-dessus de la terre sur deux ailes : la simplicité et la pureté. » Ces deux ailes manquent étrangement à l’auteur d’Une vieille maîtresse. […] Comprenez-vous qu’au moment même où je cherche à mettre mes impressions en ordre, il m’en reste encore quelque ahurissement ?

329. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre I : Des sens, des appétits et des instincts. »

Et maintenant si l’on remarque que les images peintes sur la rétine sont les matériaux de la vision, qu’ils servent à nous suggérer une construction mentale qui seule constitue la vision proprement dite, « qu’il se produit dans l’esprit, à la vue d’un objet extérieur, un agrégat d’impressions passées que l’impression du moment suggère et ne constitue pas » ; on comprend qu’il importe peu que ces matériaux qui servent au travail ultérieur de l’esprit soient fournis par deux images, comme dans l’homme, ou par des milliers comme dans l’insecte. […] Il en a recherché le germe dans cette activité spontanée qui a son siège dans les centres nerveux, qui agit sans aucune impression du dehors, sans aucun sentiment antérieur, quel qu’il soit.

330. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

A l’égard de l’impression que peuvent faire les maximes hasardées par les poëtes, il est aisé, disoit-on, de la prévenir, en ne laissant rien passer au théâtre & à l’impression qui soit contre les bonnes mœurs, contre les loix & le gouvernement. […] Je ne sçais pourtant s’il a lieu de se glorifier de l’impression de ses poësies.

331. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Il vous répondrait qu’il faut lui laisser le temps de la réflexion ; que sa sensibilité a pu être surprise ; que son jugement reprendra sa ferme assiette et son équilibre, lorsque ses premières impressions trompeuses seront effacées. […] Au fond, dit-elle, ce ne sont pas les événements qui importent ici ; c’est l’impression que les événements racontés produisent sur Arnolphe. […] En lisant un drame comique ou tragique, elle ne consulte pas ce qu’il devait être et l’idée d’après laquelle les philosophes le jugeront, mais ce qu’il est et l’impression qu’elle en reçoit. À cette impression libre et personnelle l’Esthétique n’ajoute, n’ôte, ni ne change rien. […] Il ne faut pas confondre l’impression causée par le silence des nuits étoilées au milieu desquelles le rossignol chante, avec celle qui est produite par le chant du rossignol lui-même.

332. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

. — Impression dernière de la lecture de nos trois grands sermonnaires. — II. […] Comme l’art de Michel-Ange, l’art de Bossuet fait naître des impressions d’humilité de ce qui semblerait si propre à enfler la nature humaine. […] Tant de pensées, soit d’étonnement, soit d’admiration ou d’amour, sur les personnes divines, semblent être, dans les Sermons de Bossuet, des impressions de leur commerce. […] Produire cette impression, tel doit être l’effet d’un sermon chrétien dans la bouche d’un prédicateur qui n’est pas au-dessous de sa matière. […] Il y a dans Vauvenargues beaucoup d’opinions honnêtes, d’impressions vertueuses qu’il convertit en maximes ; il n’y a pas de principes.

333. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Mes impressions étaient devenues si fortes qu’elles en étaient douloureuses. […] J’y avais résisté quelque temps sous l’impression des préventions et de l’antipathie que mon premier séjour dans le collège de Lyon m’avait laissées contre mes premiers maîtres ; mais la douceur, la tendresse d’âme et la persuasion insinuante d’un régime plus sain, sous mes maîtres nouveaux, ne tardèrent pas à agir avec la toute-puissance de leur enseignement sur une imagination de quinze ans. […] Ces impressions auraient rendu le rocher poète. […] Écoutez avec attention les pages que je vais vous lire ; recueillez bien vos impressions et vos jugements ; je vous interrogerai ensuite sur vos propres sentiments, et je vous donnerai pour sujet de composition demain l’analyse raisonnée de ces pages. […] Quand le livre fut fermé, nous nous interrogeâmes les uns les autres sur nos impressions réfléchies ; tout le monde s’écria que c’était le plus beau des livres qui fût jamais tombé sous nos yeux dans le cours de nos lectures. — Et toi ?

334. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

On peut, à ce compte, recueillir des impressions précises et variées sur tout ce que la réalité offre d’intéressant, et on le peut encore plus aisément si l’on a eu soin de se conserver libre et d’éviter le mariage, qui, comme dit La Bruyère, « remet chacun dans son ordre ». […] L’écrivain ou le dilettante né du peuple peut quelquefois hausser son observation jusqu’aux grands en parcourant toute la région intermédiaire : un grand ne sort point de sa classe, sauf en des occasions extraordinaires et trop rapides, et est condamné à une assez grande ignorance, à une pauvreté relative d’impressions. […] Ce n’est là qu’une impression ; mais, me souvenant quel terrible homme a été le grand Condé, je comptais voir son caractère se dégager, dès son enfance, avec un tout autre relief. […] Je ne puis avoir que des impressions dont je vous permets de ne pas tenir compte, car elles ne sont pas d’un grand homme de guerre ni même d’un curieux suffisamment renseigné.

335. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

J’ai cru d’abord que c’était une simple faute d’impression ; mais voyant ce nom de d’Arnaud revenir à deux reprises, et reparaître le même dans les différentes éditions de l’Éloge, j’ai été forcé de reconnaître, à ma grande surprise, que celui qu’on appelait, au xviie  siècle, le grand Arnauld, était bien moins connu, au xixe , en pleine Académie des sciences, et que son nom s’y confondait insensiblement, et sans qu’on s’en rendît bien compte, avec celui de d’Arnaud (Baculard). […] Turgot ne s’en tient pas, en fait de morale, à une pure impression mobile de sensibilité physique, il a des principes plus fixes : « Je suis en morale, dit-il d’une manière charmante, grand ennemi de l’indifférence et grand ami de l’indulgence, dont j’ai souvent autant besoin qu’un autre. » Condorcet, dans son besoin d’activité et de propagation extérieure, paraît croire qu’on ne peut éviter certains vices peu dangereux sans risquer de perdre de plus grandes vertus : « En général, les gens scrupuleux, pense-t-il, ne sont pas propres aux grandes choses. » Turgot ici l’arrête tout court ; il semble deviner l’homme de parti et de propagande qui perce déjà, et il lui dit : « La morale roule encore plus sur les devoirs que sur les vertus actives… Tous les devoirs sont d’accord entre eux. […] Il est utile autant que juste que les citoyens ne perdent pas l’habitude de témoigner, en présence de l’Assemblée, l’impression de joie ou d’inquiétude qu’ils reçoivent de ses lois ; et le peuple pourra dire qu’il a perdu sa liberté quand il ne jouira plus de cet avantage. […] L’impression qu’il produit sur tout lecteur d’un goût délicat et prompt est bien celle-là.

336. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Hégésippe Moreau n’avait ni l’un ni l’autre ; il avait de l’âme et du talent, mais son caractère était faible, comme c’est trop souvent le cas des organisations d’artiste, et les impressions du dehors prenaient fortement et irrésistiblement sur lui. […] Qu’il suffise de rappeler qu’Hégésippe Moreau, au moment même où il venait de trouver un éditeur pour ses vers, et où Le Myosotis publié avec luxe (1838) et déjà loué dans les journaux allait lui faire une réputation, entrait sans ressource à l’hospice de la Charité et y mourait le 20 décembre 1838, renouvelant l’exemple lamentable de Gilbert et faisant un pendant trop fidèle au drame émouvant de Chatterton, dont l’impression était encore toute vive sur la jeunesse. […] Sous cette impression intérieure, sous le rayon de cette ferveur retrouvée, le poète, agenouillé devant le tombeau de Racine (qui se trouve dans cette église), fait un vœu. […] Après la première demi-heure, il s’anime, il se déploie, il est dans la plénitude de ses moyens ; il jouit de son impression et en fait jouir les autres.

337. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame Necker. » pp. 240-263

Pour Gibbon, en racontant les impressions qu’il reçut à ce retour, il fait semblant d’être un peu piqué dans son ancien amour ou dans son amour-propre d’amant sacrifié ; mais, en y regardant bien, on voit qu’il est plutôt charmé de trouver désormais en Mme Necker, quand il viendra à Paris, une introductrice naturelle auprès de la meilleure société, auprès surtout de ce cercle de philosophes et de beaux esprits dont il était si curieux et si digne, lui qui ne vivait que de la vie de l’esprit. […] On a, dans une suite de lettres écrites par Mme Necker à une de ses amies de Lausanne, la succession de ses pensées et de ses impressions dans le nouveau monde où elle est lancée29. […] Dans une lettre où elle s’excuse de ne pouvoir leur présenter deux jeunes Zurichois, elle nous les montre ne pouvant se contraindre dans leurs propos, travaillant le matin dans leur cabinet, puis causant tout le reste du jour : Le matin est consacré à l’étude, et ils ont une si grande liberté de penser, qu’ils ne peuvent se résoudre à rencontrer un visage inconnu dans les maisons qu’ils fréquentent ; car qui dit liberté de penser, sous-entend un désir violent de parler ; j’en vois quelques-uns, et heureusement leurs mœurs, qui sont très honnêtes, corrigent l’impression de leurs principes, sans quoi il vaudrait mieux renoncer à ce genre de société. […] Ailleurs, l’impression naturelle de la comparaison qu’elle emploie va en sens inverse de sa pensée.

338. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

Il y reçut l’impression parisienne du moment, qui était très vive, non seulement celle de la banque et de la finance, mais celle de la bourgeoisie élevée et de tout ce qui avait le sentiment pacifique et civil. […] Marmont, par son esprit, par ses lumières, par cette rapidité d’impressions dont il était susceptible, s’y laissa gagner plus qu’il n’eût convenu à un homme qui n’eût voulu rester que dans sa ligne de soldat. […] Dans toute cette suite rapide de déterminations et d’actes si décisifs, on voit à chaque instant Marmont agir sous l’impression de sentiments vifs et sincères, qu’il ne croit pas avoir besoin de justifier. […] Il n’y a que quand il a dit : Moi sans la France, que je me suis détaché de lui. » Je rappellerai plus tard des paroles de lui sur Napoléon plus émues et plus semblables aux impressions de sa jeunesse.

339. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

L’impression de cela est difficile à définir peut-être, mais c’est par elle que les merveilles du plus imposant et du plus désastreux des arts arrachent l’admiration du monde jusque dans les souffrances que la guerre cause. […] Il est un point très décisif qu’il reconnut ensuite, mais dont il laissa passer alors le moment, et qui devait trancher le caractère de l’institution de Juillet, c’était de savoir si, au lendemain des journées, et après l’acceptation du pouvoir par le duc d’Orléans, on ferait, sous le coup même de l’impression de ces journées, et avec une loi électorale plus ou moins élargie, des élections nouvelles, si on donnerait à une situation, toute nouvelle en effet, une Chambre de même origine, ou bien si l’on continuerait de gouverner avec la Chambre antérieure et déjà un peu dépassée des 221. Carrel a reconnu plus tard qu’à son point de vue, le nœud de la question était là ; mais lorsqu’il était temps de le faire, et avant que l’impression des événements de Juillet se fût détournée et altérée, il ne proposa rien de tel. […] Le procès des ministres, en excitant les passions, fait dévier Carrel de sa ligne ; non pas qu’il ne déteste le désordre et que la vue des émeutes de décembre ne produise sur lui une impression pénible.

340. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Soucieux d’abord de dire son impression du moment, il se répète volontiers, variant par de faibles nuances les détails de la vie qu’il aime. […] Je tente d’expliquer une méthode ; c’est plus difficile que de dire son impression sur le résultat obtenu. […] Bataille, encore épars, ne semblent pas contrarier cette impression : il y demeure le rêveur nerveusement triste, passionnément doux et tendre, ingénieux à se souvenir, à sentir, à souffrir. […] C’est, du moins, l’impression que j’ai retirée de cette lecture, mais, comme dit M.  […] Que ces fiches soient rangées dans leur cerveau ou dans des boîtes, c’est là qu’ils puisent s’ils ont à dire, ressentie par un de leurs personnages, une impression analogue à celle qu’ils éprouvèrent.

341. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Études sur Blaise Pascal par M. A. Vinet. »

Je lui ai dû, pour mon compte, une des plus vives et des plus sérieuses impressions que j’aie éprouvées, et que ce nom de Bourdaloue réveille en moi. […] Quelle impression profonde, intime, toute chrétienne, d’un christianisme tout réel et spirituel !

342. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — II »

M. de Lamartine, le seul dont nous ayons à nous occuper, par cela même qu’il range humblement sa poésie aux vérités de la tradition, qu’il voit et juge le monde et la vie suivant qu’on nous a appris dès l’enfance à les juger et à les voir, répond merveilleusement à la pensée de tous ceux qui ont gardé ces premières impressions, ou qui, les ayant rejetées plus tard, s’en souviennent encore avec un regret mêlé d’attendrissement. […] Cette pièce grandiose, qui sera peu comprise de tous, produit sur nous une impression assez semblable à celle que nous causent beaucoup de morceaux de M. 

343. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IX. De l’esprit général de la littérature chez les modernes » pp. 215-227

Une sensibilité rêveuse et profonde est un des plus grands charmes de quelques ouvrages modernes ; et ce sont les femmes qui, ne connaissant de la vie que la faculté d’aimer, ont fait passer la douceur de leurs impressions dans le style de quelques écrivains. […] L’impression de ce genre de style pourrait se comparer à l’effet que produit la révélation d’un grand secret ; il vous semble aussi que beaucoup de pensées ont précédé la pensée qu’on vous exprime, que chaque idée se rapporte à des méditations profondes, et qu’un mot vous permet tout à coup de porter vos regards dans les régions immenses que le génie a parcourues.

344. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vielé-Griffin, Francis (1864-1937) »

Ou plutôt idées, souvenirs, émotions, impressions, ce dont il se soucie le moins, c’est de les relier ; il les laisse se relier au hasard ou peut-être au gré d’on ne sait quelles associations très subtiles et qui échappent. […] Vielé-Griffin n’a usé que discrètement de la poésie populaire — cette poésie de si peu d’art qu’elle semble incréée — mais il eût été moins discret qu’il n’en eût pas mésusé, car il en a le sentiment, et le respect… Je ne parle pas de la part très importante qu’il a eue dans la difficile conquête du vers libre ; mon impression est plus générale et plus profonde, et doit s’entendre non seulement de la forme, mais de l’essence de son art : il y a, par Francis Vielé-Griffin, quelque chose de nouveau dans la poésie française.

345. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VII. D’Isocrate et de ses éloges. »

Au reste, cet éloge, comme on s’en doute bien, porte le caractère de l’âge où il fut composé ; c’est l’abandon de l’âme dans un songe tranquille ; on voit se succéder lentement et doucement les mouvements de l’orateur ; on voit les impressions arriver jusqu’à lui par des secousses insensibles, et ses idées ressemblent à ces lumières affaiblies et pâles qui se réfléchissent de loin, et conservent de la clarté sans chaleur. […] D’abord, un des principaux mérites d’Isocrate, était l’harmonie ; on sait combien les Grecs y étaient sensibles ; nés avec une prodigieuse délicatesse d’organes, leur âme s’ouvrait par tous les sens à des impressions vives et rapides ; la mélodie des sons excitait chez eux le même enthousiasme que la vue de la beauté ; la musique faisait partie de leurs institutions politiques et morales ; le courage même et la vertu s’inspiraient par les sons.

346. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxive Entretien. Réminiscence littéraire. Œuvres de Clotilde de Surville »

Œuvres de Clotilde de Surville I Il y a une inspiration ineffaçable dans certains lieux, dans certains climats, dans certaines impressions de jeunesse et dans certaines mémoires qui nous reportent plus tard à ces premières caresses de la vie. […] Voilà le paysage à la fois rustique, féodal, gracieux par les détails, austère par l’ensemble, religieux par l’impression, amoureux par le frisson qu’il communique à l’âme. […] IX Qu’on juge de l’intérêt de curiosité que ces récits de M. de Davayé étaient de nature à inspirer à toute la famille : les âges, les lieux, les circonstances politiques ont des similitudes, des prédispositions, des impressions, des inspirations analogues. […] » XIV On doit s’imaginer l’impression que de pareils vers éclos du cœur d’une jeune femme et retrouvés sur les lèvres d’une grand’mère en cheveux blancs faisaient sur moi. […] Elles ont et elles garderont dans ma bibliothèque le rang qu’un souvenir garde dans ma mémoire et qu’une impression pathétique a dans mon cœur.

347. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

Thèses philosophiques, autobiographie sentimentale, impressions pittoresques, ces trois éléments, ajoutés parfois, et le plus souvent substitués à la description des mœurs et à la psychologie analytique, avaient à peu près détruit l’objectivité du roman, et n’y avaient laissé que comme un voile au travers duquel transparaissait l’individualité librement étalée. […] Enfin, élevée à courir par les traînes du Berry, elle a appris de toute la littérature depuis Rousseau la valeur littéraire des impressions qu’on ramasse au contact de la nature. […] Mais elle voit juste, et son œil retient fidèlement l’impression des choses. […] Il avait publié, sous le pseudonyme de Stendhal, des romans, des nouvelles, des récits de voyage, des impressions d’art : il passait pour un esprit paradoxal, ironique, froid, qui aimait à mystifier et scandaliser les gens. […] Mémoires, souvenirs, impressions, voyages (Histoire de ma vie, 1855, etc.), 8 vol. in-18.

348. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Rien n’a de substance ni de réalité ; toute chose est le rêve d’un rêve ; et la Vision de Brahma est un obscur poème qu’il faut lire sous le poids d’un grand soleil, quand la tête se vide, quand la mémoire fuit, quand la volonté se dissout, quand on reçoit des objets voisins des impressions si intenses qu’elles tuent la pensée, quand on sent sur soi de tous côtés la molle pesée de la vie universelle et que le moi y résiste à peine et voudrait s’y perdre tout entier, quand la vie arrive à n’être plus qu’une succession d’images sur lesquelles ne s’exerce plus le jugement et que l’on conserve juste assez de conscience pour souhaiter qu’elle s’évanouisse tout à fait, parce qu’alors il n’y aurait plus rien, plus même d’images, et que cela vaudrait mieux. […] Par la parole ou par les contours ils ont traduit les énergies de la Nature et celles du corps et de l’âme sous une forme qui les glorifie sans les altérer, où la plénitude et la spontanéité de l’impression produisent la grâce, qui est la marque de ces divins artistes. […] Et ces poèmes, j’ai moins cherché à les analyser et à les juger qu’à rendre l’impression qu’ils donnent. IX Cette impression est différente, sur des sujets quelquefois semblables, de celle qui se dégage de la Légende des Siècles. […] C’est qu’on subit l’impression du livre entier et qu’on est ainsi tenté de retrouver sa philosophie même dans les tableaux d’où elle est peut-être absente.

349. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Si la critique littéraire n’est plus une boussole assez sûre pour diriger nos jugements dans l’appréciation des œuvres de l’esprit, qu’avons-nous de mieux à faire que de nous mettre en état de les juger nous-mêmes, d’après nos propres lumières, d’après nos propres impressions ? […] Les événements qui se passent sous les yeux d’un poète, la nature des lieux qu’il habite, l’air même qu’il respire, ont une influence directe, une action puissante sur ses idées, sur ses impressions, sur son style, sur son génie enfin. […] Rappelons-nous combien nos impressions diffèrent devant les hautes montagnes des Alpes ou dans les prés fleuris de la Touraine, en présence des agitations populaires de la rue ou dans le calme intérieur de la famille. Le poète, moins que tout autre, peut se défendre contre l’action qu’exercent sur lui l’aspect des lieux et le spectacle des événements ; car son âme en reçoit une impression plus vive et plus profonde. […] Lorsqu’un tableau est mis tout à coup devant nos yeux, il nous est impossible d’en discerner immédiatement les défauts et les beautés ; nous en recevons une impression générale qui fait qu’au premier coup d’œil le tableau nous plaît ou nous déplaît.

/ 2143