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1824. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Sénecé ou un poète agréable. » pp. 280-297

Et ces dernières gentillesses, avec les explications qui s’y rattachent, ne sont plus, sachez-le bien, dans la bouche de Virgile ; cette fois c’est Catulle qui est censé expliquer tout cela à Clément Marot, lequel à son tour l’insère dans sa lettre à Sénecé. […] Dans une lettre à Mme de Bellocq, veuve de son ami, il a tracé un tableau assez riant de la vie tranquille, à la fois philosophique et chrétienne, qu’il menait durant les dernières années (1726-1737) : Ayant fait réflexion, disait-il, que j’étais dans un âge trop avancé pour me donner le soin d’économer (de régir) des biens de campagne, j’ai pris le parti de mettre ma terre en ferme et de me retirer entièrement à la ville.

1825. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Une vérité sévère et impitoyable est entrée jusque dans l’art comme dernier mot de l’expérience. […] Au moment même où le père Rouault, arrivé tout exprès, vient d’enterrer sa fille, au milieu de sa douleur désespérée il a un mot de paysan, grotesque et sublime de naturel : chaque année il envoyait à Charles Bovary une dinde en souvenir de sa jambe remise ; en le quittant les larmes aux yeux, il lui dit pour dernier mot de sentiment : « N’ayez peur, vous recevrez toujours votre dinde. » Tout en me rendant bien compte du parti pris qui est la méthode même et qui constitue l’art poétique de l’auteur, un reproche que je fais à son livre, c’est que le bien est trop absent ; pas un personnage ne le représente.

1826. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

Cependant, avant de considérer Bonstetten sous sa forme dernière et définitive (si tant est qu’il y ait jamais eu rien de définitif en lui), nous avons à le mener, à l’accompagner rapidement à travers ses âges intermédiaires. […] Ceux qui sont à même de comparer les ouvrages de lui qui appartiennent à chacune des deux littératures, ont cru remarquer qu’il s’était fait une espèce de compensation dans sa manière de dire ; que sa phrase allemande avait gagné à son habitude du français d’être plus rompue et plus aisée qu’elle ne l’est d’habitude chez de purs Germains ; et que, dans sa dernière période toute française, son style épistolaire, en revanche, était un peu moins court et moins alerte que d’abord.

1827. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Il avait fort souffert du premier accueil que les savants de profession avaient fait à ses idées ; et, même dans ses derniers jours, la blessure n’était pas encore guérie. […] Cousin, Villemain, Guizot, alors dans tout l’éclat de leur enseignement, il avait les jugements les mieux fondés et les plus équitables ; il reconnaissait l’éminent mérite de tous les trois, mais il accordait particulièrement au dernier.

1828. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

Ce qui est certain, c’est que ce Jean Michel, quel qu’il fût, n’avait fait qu’étendre et remanier un mystère antérieur auquel on a donné beaucoup d’éloges en ces dernières années et qui, par malheur, est resté jusqu’à présent manuscrit et inédit. […] Cette résistance, désespérée d’Œdipe, même quand toutes les preuves l’assiègent, déjà, à vouloir admettre qu’il est coupable, coupable surtout du dernier des crimes, est le comble de l’art.

1829. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Dès lors sa vie change, et n’étant, plus condamné à l’injustice, il redevient l’administrateur exact, ferme et assez aimable, qui va se faire une seconde et dernière réputation. […] Il attendit vainement, et, après avoir cédé par faveur spéciale son intendance de Caen à ce fils trop peu digne qui ne sut pas la garder, il dut se résigner à n’être finalement que conseiller d’État, et de plus chef du Conseil de Madame, mère du Régent : ce furent ses derniers honneurs.

1830. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Pour bien répondre à la question comme je l’entends, il est bon de se reporter un peu aux antécédents de l’écrivain et de parcourir le volume où il vient de recueillir quelques-uns des travaux de ces vingt ou trente dernières années. […] Michel Chevalier le rédigea presque seul pendant plus d’un an (1830-1832), on serait frappé de tout ce qu’il contient de vues grandioses qui se sont réalisées depuis ces trente dernières années ; et, dans cette sorte de prédication ou de prophétie positiviste à laquelle il vaquait chaque matin, non pas sans inspirateur, mais sans collaborateur, et d’une verve incessante, la partie dès aujourd’hui conquise paraîtrait plus considérable, j’en suis certain, que celle qui n’a pas abouti.

1831. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

Comme je ne sais si j’aurai la patience de l’attendre ou le courage de la hâter, j’explique ici mes volontés dernières. » Des idées de suicide, on le voit, n’avaient cessé de traverser ou d’obséder son esprit74. […] Adieu, mon ami, il faut vivre au jour le jour, et ne compter sur rien : il n’y a de sûr que la douleur. » Une telle lettre redouble encore de valeur après tout ce que nous savons, et adressée comme elle l’est à un homme sensible, honnête, tourmenté, qui a eu la foi, et à qui il n’est resté pas même un dernier débris de croyance ; à un disciple de Diderot ou de Lucrèce, et qui, dans le jardin, au pied du sycomore, avait eu autrefois, lui aussi, des soupirs à la saint Augustin.

1832. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis du Belloy (suite et fin.) »

Tout le temps qu’en exil vivra mon Clinias, Je veux tirer de moi quelque bonne vengeance, Amasser, travailler sans la moindre dépense, Épargner pour lui seul. » Aussitôt fait que dit : Je jette tout dehors, jusqu’à mon dernier lit ; Je ressemble en un tas meubles, outils, vaisselle ; Servantes et valets, je vends tout pêle-mêle, Y compris la maison, sauf, toutefois, les gens Dont le travail pouvait m’indemniser aux champs ; Et, des quinze talents que j’en obtins à peine, Pour bien m’y tourmenter, j’achète ce domaine, Pensant que, plus j’endure et vis en me privant, Moins j’aggrave mes torts envers mon pauvre enfant. […] Eschine, son neveu, son fils d’adoption, n’est pas rentré la nuit dernière ; et là-dessus le pauvre père se forge mille craintes : « Faut-il donc qu’un homme aille se mettre dans le cœur et se donner à plaisir des affections qui lui soient plus chères que lui-même !

1833. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Au dernier siècle, beaucoup de choses ont été dites qu’on a oubliées depuis. […] Déjà la vogue des derniers romans les plus fameux a été dépassée.

1834. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

Puis, après une pause sérieuse de quelques minutes, il se fit lire le Traité qu’il écouta d’un bouta l’autre avec uns grande attention, et il reprit assez de force pour avoir la satisfaction suprême de donner « l’approbation d’un homme d’État mourant (ce furent ses propres paroles) à la plus glorieuse guerre et à la plus honorable paix que la nation eût jamais vue. » Et c’est ainsi que se révèle dans un noble exemple le commerce familier que l’aristocratie anglaise au dernier siècle n’avait cessé d’entretenir avec l’Antiquité grecque, et aussi la générosité vivifiante de sentiments et de pensées dont Homère est la source. Cette Iliade, qui avait été le livre de chevet d’Alexandre durant ses conquêtes, et la veille ou le soir des victoires, servait encore, après deux mille ans, à redonner du ton comme dans un dernier breuvage, à remettre un éclair de vie et de flamme au cœur, déjà à demi glacé, du fier et patriotique insulaire.

1835. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

On peut trouver, d’ailleurs, en ce qui est de l’explication individuelle et de la psychologie du héros, que l’historien lui-même a hésité, a varié en plus d’un endroit ; il a introduit des divisions plus commodes sans doute que réelles dans l’analyse du génie et du caractère : il semble tout accorder d’abord au Consul, même à l’Empereur, et ensuite, dans quelques-uns des avant-derniers volumes, il paraît vouloir revenir sur ses premiers jugements ; il lui retire beaucoup, pour tout lui rendre encore une fois au dernier moment, aux heures du suprême effort et de l’adversité. […] Il a su, dans les divers morceaux écrits par lui à des temps différents, éviter l’écueil de la contradiction : entre le morceau du 15 avril 1838 et ses dernières publications de 1857, il y a une harmonie frappante, et ce n’est nullement par fatalisme ou par un excès de logique qu’il est arrivé à ce cachet d’unité, c’est par un esprit d’examen rigoureux et sévère.

1836. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

dans un débat de cet ordre, je suppose qu’un des orateurs contendants, qu’un interlocuteur, apostrophant le rapporteur du budget, lui demande sur quoi il se fonde dans telle ou telle supputation qui aboutit à un nombre de millions ou de milliards : est-ce que le rapporteur parlant du haut de la tribune ne sera pas en droit de dire dans une langue parfaitement congrue et correcte : « Mon argumentation, messieurs, vous me demandez sur quoi elle repose : je la base sur une triple colonne de chiffres, tous exacts et vérifies… etc. » Est-ce que ce mot baser, avec son emphase, sa sonorité même qui remplit la bouche et qui porte jusque sur les derniers bancs de la Chambre, ne sera pas ici le mot oratoire plutôt que le mot plus sourd ou plus faible : je la fonde ou je l’établis ?  […] J’ai le plaisir d’annoncer que les discussions de l’Académie sur les mots nouveaux ont commencé : dans la séance de jeudi dernier, le premier des mots importants qui se présentait marqué d’un astérisque, Absolutisme, a été débattu et admis.

1837. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Ce sera de même qu’aussitôt la paix signée par le général à Campo Formio, bien que cette paix ne fût pas tout à fait conforme à ce que le Directoire avait désiré et indiqué dans ses instructions dernières, Talleyrand, oubliant qu’il est l’organe direct des intentions du Directoire, et prenant sur lui le surcroît d’enthousiasme, écrira ; « Paris, le 5 brumaire an 6 (26 octobre 1797). […] J’ai dit dans mon dernier article que je regrettais qu’il n’eût point substitué le texte français original à la traduction de l’anglais, pour certains passages cités de Talleyrand.

1838. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

M. de Lamartine finit éloquemment sa préface par un appel à Dieu, comme Scipion entraînait les Romains au Capitole ; il suppose le divin Juge mettant au dernier jour dans la balance, d’une part les rimes du poëte, et de l’autre ses actions sociales : on devine ce qui l’emporte. […] Un poëte, au contraire, qui, avec les hautes facultés et le renom de M. de Lamartine, arrivant à la politique (puisqu’il faut de la politique absolument), ne donnerait que des livres plus rares, mais venus à terme, et de plus en plus mûris par le goût, ne ferait qu’apporter à tout l’ensemble de sa conduite politique, dans l’opinion, un appui véritable et solide ; il finirait, en étant de plus en plus un poëte incontestable, bien économe et jaloux de sa gloire, par triompher plus aisément sur les autres terrains, et par forcer les dernières préventions de ses collègues les plus prosaïques, même dans les questions de budget et dans le pied-à-terre des chemins vicinaux. 

1839. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre II. Du goût, de l’urbanité des mœurs, et de leur influence littéraire et politique » pp. 414-442

D’individus en individus, de classe en classe, la vanité souffrante n’était en repos que sur le trône ; dans toute autre situation, depuis les plus élevées jusqu’aux dernières, on passait sa vie à se comparer avec ses égaux ou ses supérieurs ; et loin de prendre en soi le sentiment de sa propre valeur, on cherchait dans les regards des autres l’idée qu’ils se faisaient de l’importance qu’on avait acquise parmi ses pareils. […] Cette tyrannie du ridicule qui caractérisait éminemment les dernières années de l’ancien régime, après avoir poli le goût, finissait par user la force ; et la littérature s’en serait nécessairement ressentie.

1840. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

Des molécules organiques partout répandues ou partout naissantes, des sortes de globules en voie de déperdition et de réparation perpétuelles, qui, par un développement aveugle et spontané, se transforment, se multiplient, s’associent, et qui, sans direction étrangère, sans but préconçu, par le seul effet de leur structure et de leurs alentours, s’ordonnent pour composer ces édifices savants que nous appelons des animaux et des plantes ; à l’origine, les formes les plus simples, puis l’organisation compliquée et perfectionnée lentement et par degrés ; l’organe créé par les habitudes, par le besoin, par le milieu ; l’hérédité transmettant les modifications acquises330 : voilà d’avance, à l’état de conjectures et d’approches, la théorie cellulaire de nos derniers physiologistes331 et les conclusions de Darwin. […] Condillac, passim, et notamment dans ses deux derniers ouvrages, la Logique et la Langue des calculs.

1841. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Trop heureuses ces dernières, et trop favorisées, si toute la sagesse humaine accumulée n’était pleine d’erreurs, d’imperfections et de pièges ! […] Ainsi, dans un sermon sur la Passion, il intéresse toutes les mères au redoutable mystère, en représentant les adieux de Marie à Jésus, prêt à faire « son dernier voyage en Jherusalem, le voyage en sa douloureuse mort.

1842. (1890) L’avenir de la science « XVI »

L’humanité ne sera savante que quand la science aura tout exploré jusqu’au dernier détail et reconstruit l’être vivant après l’avoir disséqué. […] Le plus curieux exemple de cela, c’est M. de Talleyrand, se convertissant en ses derniers jours.

1843. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

Au siècle dernier, en 1755, le tremblement de terre qui détruisit Lisbonne devint aussitôt l’occasion d’un tournoi fameux entre deux rois de l’opinion, Voltaire et Rousseau. […] On peut même observer que, depuis le milieu du siècle dernier, la nature, cessant d’être une ennemie et un objet de terreur, est devenue pour nos écrivains une inspiratrice et un objet d’admiration enthousiaste.

1844. (1886) De la littérature comparée

On a beaucoup discuté, ces dernières années, si la critique littéraire est un art ou une science. […] Nisard, un des derniers professeurs qui l’ait pratiquée avec éclat, le déclarait ouvertement : « Qui connaît les anciens et notre grand siècle, disait-il en 1855, en prenant possession de la chaire d’éloquence française vacante depuis la mort de Villemain, a trouvé, dans l’ordre des choses de l’esprit, son idéal, sa règle, et, s’il est professeur, son autorité. » C’était clair et simple.

1845. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

Outre sa grande Histoire naturelle, dans ses dernières années il avait écrit l’Histoire politique de son temps, en trente et un livres. […] Telle fut la préoccupation dernière de cet homme, le seul qui se soit proclamé heureux.

1846. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Ajoutez un dernier inconvénient qui affecte l’ensemble de cette éducation tout à la moderne et sans contrepoids : le sentiment de l’Antiquité, le génie moral et littéraire qui en fait l’honneur, l’idéal élevé qu’il suppose, y est tout à fait absent, et n’y semble même pas soupçonné. […] VIII (3e éd.), p. 546 :] De plus (au tome III, p. 34, même édition dernière), à l’article de « Mme de Genlis », un correcteur, croyant bien faire, a tout à fait altéré ma pensée et l’a rendue inintelligible : « En repassant les ouvrages de Mme de Genlis, il me semble (me fait-on dire) que Louis-Philippe est de son côté véritablement historique, le seul par lequel elle continuera de mériter quelque attention sérieuse. » Or, j’avais dit : « En repassant les ouvrages de Mme de Genlis, il me semble que Louis-Philippe est son côté véritablement historique, etc… » C’est ainsi qu’au xviie  siècle, Madame (mère du Régent) écrivait dans une de ses lettres : « La Montchevreuil est le bel endroit de la Maintenon, et le seul que je trouve louable en elle. » En vertu d’une locution analogue, on peut dire que Louis-Philippe est le côté véritablement historique de Mme de Genlis.

1847. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

Tel il va nous apparaître dans les événements politiques qui signalèrent la fin du dernier siècle et le commencement du nôtre. […] Portalis, en entrant dans les Conseils avec Siméon, dont il avait épousé la sœur, vit tout d’abord Thibaudeau, qui s’était honoré dans les derniers temps de la Convention par sa résistance aux mesures exceptionnelles et révolutionnaires trop prolongées : « Nous vous prenons pour chef de file, lui dirent-ils, nous voulons marcher sur votre ligne. » Cette ligne était celle aussi qui aurait fait marcher la Constitution sans violence, sans infraction aux lois, et en y faisant entrer le plus possible les idées de régularité et de justice.

1848. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Par exemple, le paragraphe sur la Terreur que j’ai cité précédemment, et qu’on lit d’abord dans sa brochure de La Révision des jugements (1795), se retrouve textuellement au dernier chapitre de son livre sur L’Usage et l’Abus de l’esprit philosophique. […] Ces simples paroles qu’il a replacées depuis dans un discours public, mais dont on a ici la clef, nous rendent au vrai la définition des deux natures, et Portalis, sans y viser, s’y peignait fidèlement dans les derniers mots aussi bien que dans les suivants : La sagesse est l’heureux résultat de nos lumières naturelles et des leçons que nous recevons de l’expérience.

1849. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

Il se mourait à Paris d’une maladie de poitrine, à l’âge de vingt-quatre ans, et semblait arrivé au dernier période, lorsque sa jeune femme, à la veille d’être veuve, se décida à embrasser la communion de son époux ; et dans cette chambre, près de ce lit tout à l’heure funéraire, on célébra une nuit — à minuit, heure de la naissance du Christ — la première communion de l’une en même temps que la dernière communion de l’autre (29 juin 1836). […] On a beaucoup disputé, tous ces temps derniers, sur la question des études et sur le degré de littérature autorisé par le clergé ; on a mis en avant bien des noms empressés et bruyants : j’ai voulu rappeler un nom aussi distingué que modeste.

1850. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Ce grand roi avait régné trop longtemps ; il en était résulté, durant les quinze ou vingt dernières années, un régime convenu et hypocrite sous lequel couvaient et levaient déjà la tête les vices et les ridicules d’un certain genre, qui n’attendaient plus que le jour et l’heure pour déborder. […] C’est dans cette retraite animée, et comme au son des violons, qu’il composa ses dernières comédies, qui ne se ressentent nullement de la mollesse et où la verve va plutôt croissant.

1851. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Dans les publications supprimées au siècle dernier par arrêt du parlement, on remarque un document imprimé par Quinet et Besogne, et mis au pilon sans doute à cause des révélations qu’il contenait et que le titre promet : L’Arétinade, ou Tarif des Libellistes et Gens de lettres Injurieux. […] Un membre célèbre de l’Académie des sciences, Napoléon Bonaparte, voyant en 1803 dans la bibliothèque de l’Institut, au centre d’une couronne de lauriers, cette inscription : Au grand Voltaire, raya de l’ongle les trois dernières lettres, ne laissant subsister que Au grand Volta.

1852. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

Ce faux classique commence avec Jean-Baptiste Rousseau, et même, il faut le dire, avec les tragédies et la Henriade de Voltaire ; il produit au xviiie  siècle les tristes tragédies de la Harpe et de Marmontel, trouve plus tard un éclat, non tout à fait immérité, dans les poésies de l’ingénieux Delille, se lance dans les témérités avec Ducis, atteint l’apogée du médiocre et de l’ennuyeux avec la littérature impériale, jette ses dernières flammes et rend le dernier soupir avec l’aimable, le spirituel, l’élégant Casimir Delavigne. […] Une si puissante action ne peut s’expliquer que par un grand génie, génie auquel ont manqué la sérénité, la pureté, le naturel, mais qui ne doit pas être classé au dernier rang des grands hommes.

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