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1394. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Darthenay bien satisfait : lequel croire ? […] — Je ne le crois pas. […] Je crois me rappeler en effet, — et de cela il y a six mois à peine, — que M.  […] Croyez-moi, M.  […] Arthur Ponroy croit à l’avenir de la tragédie et de mademoiselle Georges !

1395. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXII » pp. 286-290

Amédée Pommier sur les trafiquants littéraires ; ces vers-là, pour n’en rien dire davantage, nous semblent bien crus et d’une verve terriblement latine. […] Ce morceau même sur Descartes déclare assez l’esprit de l’ouvrage, et bien qu’on puisse craindre qu’il n’y ait dans cette façon de voir un peu de construction a posteriori et que ce soit se montrer, nous le croyons, par trop satisfait de soi-même et de sa propre littérature, on recherchera justement l’ouvrage de M. […] — La comédie sur laquelle on comptait beaucoup au Théâtre Français, Une Femme de quarante ans, a réussi, et a paru agréable, mais non pas aussi neuve qu’on aurait pu le croire d’après les promesses.

1396. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 26, que les sujets ne sont pas épuisez pour les peintres. Exemples tirez des tableaux du crucifiment » pp. 221-226

Ces artisans s’en plaignent souvent eux-mêmes, mais je crois que c’est à tort. […] On découvre derriere la croix des spectateurs qui la font avancer, et qui semblent tellement enfoncez dans le tableau, qu’à peine ose-t’on croire que toutes ces figures soient placées sur une même superficie. […] Le genie de La Fontaine lui fait rencontrer dans la composition de ses fables, une infinité de traits qui paroissent si naïfs et tellement propres à son sujet, que le premier mouvement du lecteur est de croire qu’il les eut trouver aussi bien que lui, s’il avoit eu à mettre en vers le même apologue.

1397. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Alcide Dusolier »

Nous croyons que Dusolier a la vocation qu’il faut le mieux avoir, dans ce temps, pour se classer et réussir. […] C’est particulièrement un descriptif que Dusolier, et je le crois même trop préoccupé (théoriquement) de description ; mais le sentiment le sauve des affreuses matérialités contemporaines… En ce moment encore, ce qui l’attendrit, il est vrai, c’est plus les choses que les personnes » Le salon de son père est plus tendrement traité que son père dans son livre, et pourtant c’est le charme du père qui fait le charme de ce salon. […] C’est une imagination vive et tendre, — plus tendre qu’elle ne le croit elle-même.

1398. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

Mais oui, du reste, il faut croire qu’Arina lui plaisait. […] je le crois bien ! […] — As-tu perdu l’esprit, — dit le forestier ; — je crois plutôt que tu es ivre. […] Et tu te croyais inférieur à des hommes qui n’étaient pas dignes de dénouer les cordons de tes souliers. […] Oui ; c’est moi qui le dis, tu peux m’en croire.

1399. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Cependant, autant que j’en puis juger, je crois que le plus grand nombre ne sont qu’apparentes ; et même celles qui sont réelles ne me paraissent pas absolument inconciliables avec ma théorie. […] Je dirai seulement ici que je crois ces documents beaucoup moins complets qu’on ne le suppose généralement ; et c’est la meilleure réponse qu’on puisse faire. […] L’observation géologique nous sollicite au contraire à croire que presque tous nos continents ont été brisés en îles pendant la dernière époque tertiaire. […] Mais je ne m’arrêterai pas plus longtemps à ce moyen d’échapper à la difficulté, car je crois que la formation d’espèces très distinctes est possible dans de vastes régions parfaitement continues. […] La sélection naturelle ne saurait produire la perfection absolue ; et, autant que j’en puis juger, je ne crois pas non plus qu’on puisse la rencontrer dans la nature.

1400. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Je crois que je versai quelques larmes. […] -et croyez-vous avoir entendu autre chose que des mots ? […] -et à croire. — Cela n’en est pas moins vrai. […] Veillé-je quand je crois rêver ? Rêvé-je quand je crois veiller ?

1401. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Cependant nous penchons à croire que le pensionnat ne réussit pas plus que la traduction. […] N’allez pas croire à des enjolivements après coup. […] Ne croyez donc pas un mot de ces histoires. […] Il était enchanté de son rôle et il y croyait absolument. […] Qui pourrait le croire ?

1402. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

Voilà mes sentiments pour Hugo ; je crois que les siens sont identiques pour moi. […] Ce serait donc à moi à vous demander de me déchiffrer cette énigme, et de me révéler ce que vous croyez comprendre. […] « — Eh bien, leur dis-je, je vais vous définir à mon tour le seul socialisme vrai qui vous travaille et qui vous pousse à votre insu ici, pour exiger ce que vous ne savez pas définir, et dont vous croyez que nous avons le secret et la formule. […] Quand nous penchons près d’elle une oreille inquiète, La voix du trépassé, que nous croyons muette,         A commencé l’hymne éternel. […] Le jeune homme, qui travaillait tout près de là, croit qu’on assassine sa cousine ; il saisit une carabine au râtelier de la cheminée, court au bruit, voit les meurtriers, fait feu et tue involontairement le chef des gardes entouré de sa bande.

1403. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

Il crut malséant de montrer aux Romains l’ami de Pie VII en relation avec le remplaçant temporel de son souverain emprisonné. […] Quelque désir que j’eusse d’être bien reçu par Napoléon, je n’aurais jamais osé croire qu’il en arrivât là. […] « Quoiqu’il fût bien suffisant de l’avoir contredit une fois, néanmoins, toujours animé des mêmes motifs, j’osai le faire de nouveau et lui répondre : “Que Votre Majesté croie bien que j’aurais fait mon devoir.” […] « De grâce, Monseigneur, par bonté pour vos amis, par attachement pour votre patrie, épargnez votre santé, soignez-vous, modérez votre douleur, et croyez qu’elle est dans le cœur de vos amis ; et je m’honore de ce titre. […] Je crois le voir encore et je crois le revoir à vingt ans.

1404. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

Peut-être vous croyez Par quelque amour pour moi me les avoir payés ! […] Il est tard, et chacun s’en retourne aux hameaux ; L’ombre croit en tombant de nos prochains coteaux ; Rejoignons ces bergers. […] Embrasse-moi, ma fille… Auriez-vous cru cela ? […] avec ses soins, ma mère, et ces clefs-là, La garde d’une femme est-elle si terrible, Et croyez-vous encor cette chose impossible ? […] Le théâtre d’amour proprement dit, c’est-à-dire le théâtre élégiaque, n’était pas beaucoup du goût de son temps, et le théâtre gai ne l’était pas tant qu’on l’a cru.

1405. (1891) Esquisses contemporaines

J’y ai pensé, je le crois, je le vois presque et je le dirai hardiment. […] Pour croire à quelque chose, c’est en soi qu’il faut croire tout, d’abord. […] Car le premier des devoirs est de croire au devoir. […] Je ne crus pas devoir répondre. […] Eh bien, oui, c’est tout, et cependant vous auriez tort de croire que ce n’est rien.

1406. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

Mais, s’il exerça une heureuse influence sur les individus distingués, il échoua dès qu’il voulut introduire une partie de ses idées de réforme dans l’enseignement public ; il ne put faire brèche ; l’Université en corps résista, elle tint bon pour sa grammaire traditionnelle, qui avait été un progrès, en son temps, mais qui était certainement dépassée ; on eut même, je le crois, quelque peine à pardonner à Dübner sa tentative d’amélioration et ses insistances ; car il revint plus d’une fois à la charge, la polémique fut longue, bien des considérations étaient en jeu… N’insistons pas nous-même : le souvenir de ces désaccords et de ces démêlés ne serait point à sa place ici, en présence d’une tombe. […] Je me demanderais pas mieux que d’y croire, mais j’avoue qu’à part M.  […] Anselme Petetin, a cru devoir m’écrire au sujet de ce discours : « Je suis bien persuadé que M.  […] Je crois que le fait est incontestable. […] Il poussait jusqu’à l’extrême le culte du beau dans la littérature ancienne, qui était comme son domaine particulier, et il croyait avoir des droits sur la moindre découverte qui y était faite.

1407. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Paroles d'un croyant »

Il y a un an environ, abreuvé de tous les dégoûts, renonçant par convenance et soumission au journal dont il avait cru l’action salutaire, voyant se disperser et se détacher même entièrement de lui des disciples si regrettables, il se mit, un matin d’été à la campagne, à vouloir déposer quelque part, pour lui seul, sa secrète pensée, son jugement amer sur le présent, son vœu et son coup d’œil d’apôtre touchant l’avenir. […] Il se serait cru coupable de se contenir dans un plus long silence, de laisser passer ces jours mauvais et insolents sans leur jeter à la face son accent de conscience, son mot de vérité. […] À la suite de ces chapitres sombres, il en vient un qui les corrige, tout enchanteur de mansuétude et d’amour des hommes ; on croirait lire des pages retrouvées de l’Imitation. […] Il croit au bien, et il croit au mal ; il s’indigne ingénument, et il aime avec transport ; il maudissait tout à l’heure les ennemis des hommes, et voilà qu’il tombe en pleurs entre vos bras. 

1408. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « JULES LEFÈVRE. Confidences, poésies, 1833. » pp. 249-261

En commençant on ne peut s’empêcher d’être frappé, avant tout, de cette multitude d’épigraphes dont j’ai parlé ; l’auteur a cru devoir dire à ce sujet, dans son ingénieuse préface : « Je ne pense pas qu’on m’accuse d’avoir abusé des épigraphes. […] Je croyais quelquefois sentir, étincelants, Des yeux mystérieux surveiller mes élans. […] Ausone a dit ingénieusement à propos de la métamorphose de Daphné : Laurea debetur Phœbo, si virgo negatur ; ce qui revient à dire (avec Waller, je crois) que le poëte à la fin se console toujours, pourvu que l’amante rebelle se change pour lui en laurier. […] Cet excès de timidité, qui avait sa noblesse, avait aussi ses grands inconvénients, et de là en partie le peu de retentissement qu’ont obtenu son nom et ses livres. » A le voir en ces années avec son beau et large front sillonné de pâleur, sa figure fine, sa réserve silencieuse, et un certain air de malheur répandu sur toute sa personne, on eût pu le croire envieux et malade du succès des autres. […] Il avait fait ce vers, traduit, je crois, de l’anglais, et qui exprimait bien sa propre nature : La rose a des poisons qu’on finit par trouver !

1409. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Sabbatier mettent en avant à tout propos, Cabanis, Tracy, Garat, Ginguené, Daunou, Laromiguière, et quelques autres ; mais ces hommes n’étaient pas tous aussi unanimes que de loin, en les rangeant de front sur la même ligne, on voudrait nous le faire croire ; mais surtout ils n’ont pas eu de postérité littéraire et philosophique digne d’eux, et ceux qui se sont portés comme héritiers directs de leurs traditions les ont dès longtemps compromises en les rapetissant et en les outrant avec un véritable fanatisme. […] Après de premières études, qu’il doit presque tout entières à lui-même, Victorin Fabre nous est présenté, vers la fin de 1799 (il avait quatorze ou quinze ans), comme un esprit dont le coup d’œil politique était dès lors aussi juste qu’étendu : « La manière dont s’était opérée la révolution du 18 brumaire, et surtout quelques dispositions captieuses placées dans la Constitution de l’an viii comme pierres d’attente, avaient excité son mécontentement, éveillé ses soupçons. » Voilà un Solon bien précoce qui nous arrive ; en conséquence de ses prévisions, Victorin Fabre, qui avait un moment songé, nous dit-on, à prendre la carrière des armes, s’en détourne et ne songe plus qu’aux lettres et à la philosophie ; nous concevons cette préférence ; qu’on nous permette seulement de croire, sans faire injure à tout ce puritanisme, que cela ne l’eût aucunement compromis de se trouver à Marengo. […] Victorin Fabre lui-même manqua essentiellement de l’exquis en littérature ; après ses premiers essais, qui ont du ton, du nombre, du mouvement, des passages d’éclat, de nobles pensées, mais qui ne sont que d’un disciple encore, on put croire un moment qu’il allait se dégager et prendre son essor avec aisance ; l’Éloge de La Bruyère donnait lieu de l’espérer ; mais l’Éloge de Montaigne, remarquable pourtant, ne tint pas cette promesse ; l’auteur, en cet heureux sujet, n’eut rien de libre ni de léger ; en voulant approfondir, il s’aheurta, il fut rocailleux, il commençait à se montrer pesant. […] Si, en le lisant, il verse des larmes d’admiration et de douleur, s’il rougit d’avoir été couronné, s’il jette, s’il dépose cette couronne aux pieds du vaincu, alors il donnera de hautes espérances ; s’il continue à se croire vainqueur, il restera, à peu près, aussi petit que son discours. » O Garat, Garat ! […] L’éditeur répète à chaque page de sa Notice qu’il n’y a plus ni critique, ni indépendance de jugement en France ; il aurait trop lieu de le croire, si de pareilles énormités littéraires passaient tout à fait inaperçues.

1410. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

Il y a même des moments où j’ai tant de respect pour la philosophie, que je crois qu’elle n’existe véritablement que chez celui qui la trouve, et qu’elle ne saurait ni se transmettre ni s’enseigner. Quoi qu’il en soit, la doctrine du xviiie  siècle en était à ce moment extrême et définitif où l’on se croit le plus sûr de soi et où l’on est le plus près d’être frappé. […] Ceux qui croyaient qu’il faut aux jeunes gens une philosophie quelconque comme une rhétorique, n’avaient rien de mieux à demander et devaient être contents. […] Cousin de cette philosophie première, mais on sent qu’elle a des ailes. » Elle en eut en effet dès sa naissance ; dans ce premier Discours d’ouverture du 7 décembre 1815, où Reid très-amplifié apparaît comme un grand régénérateur et comme celui qui est venu mettre fin au règne de Descartes, dans ce Discours où éclatent à tout instant une parole et un souffle plus larges que la méthode même qui y est proclamée, on croit entendre encore les applaudissements qui durent saluer cette péroraison pathétique par laquelle, au lendemain des Cent-Jours et avant l’expiration de cette brûlante année, le métaphysicien ému se laissait aller à adjurer la jeunesse d’alors : « C’est à ceux de vous dont l’âge se rapproche du mien que j’ose m’adresser en ce moment ; à vous qui formerez la génération qui s’avance ; à vous l’unique soutien, la dernière espérance de notre cher et malheureux pays. […] Par exemple, celui qui se sent poète désire que son époque soit un siècle de poésie, et il le croit aisément.

1411. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Armand Silvestre »

……… Dans le recueillement des longs soirs parfumés, A l’heure où, scintillant comme un pleur sous des voiles, La tristesse des nuits monte aux yeux des étoiles… Je crois bien que, si l’on cherchait où est décidément l’originalité de M.  […] Silvestre ressemble parfois à celle des Védas, et je suis fort tenté de croire que ses vers sont peut-être, dans notre littérature, ce qui se rapproche le plus de ce lyrisme grandiose, éblouissant, vite ennuyeux, débordant d’images toujours les mêmes, où tout l’univers vit d’une vie énorme et confuse, où chaque métaphore, démesurée, est toute prête à devenir un mythe. […] Par malheur, d’aucuns croiront que, lorsque je compare à Valmiki l’auteur des Contes grassouillets, je ne saurais parler bien sérieusement. […] On a peine à le croire : il n’aurait pas montré un goût si prolongé, si persistant, pour un rôle si peu lucratif. […] Vous vous rappelez ce que dit le dieu Crépitus dans la Tentation de saint Antoine : Quand le vinaigre militaire coulait sur les barbes non rasées, qu’on se régalait de glands, de pois et d’oignons crus et que le bouc en morceaux cuisait dans le beurre rance des pasteurs, sans souci du voisin, personne alors ne se gênait.

1412. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Il croit aimer, en 1687, le vrai de Boileau, de Bossuet, de Molière ; c’est leur succès qu’il courtise. Il croit ne plus aimer l’orné de 1671, et ce qu’il aime n’est pas d’autre sorte. […] Tout le monde croit tenir le vrai ; à quoi bon le chercher ? […] Quand on lit, dans ce même Lamotte, le « suisse d’un jardin » pour une haie, le « voyage sédentaire » pour l’étude de la géographie, « l’hôte de la flatterie » pour un prince flatté, on se croit encore au bon temps où le miroir était « le conseiller des grâces », les statues « des muets illustres » ; où Cathos veut qu’au lieu de : « Voilà un laquais qui demande si vous êtes au logis », on dise : « Voilà un nécessaire qui demande si vous êtes en commodité d’être visible. » Il semble même qu’en cet art puéril de ne rien dire comme les autres, les beaux esprits du dix-huitième siècle aient renchéri sur ceux du dix-septième. […] » Si Lamotte s’était plus mêlé de moraliser, je croirais le reconnaître dans cette image de vertus humaines, qui, « nées le plus souvent dans l’orgueil et dans l’amour de la gloire, y trouvent un moment après leur tombeau », ou qui, « formées par les regards publics, vont s’éteindre le lendemain, comme ces feux passagers, dans le secret et les ténèbres19. » Suis-je même bien sûr de ne pas faire tort à Lamotte, en le supposant capable de ces figures ?

1413. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

On croyait qu’il leur avait communiqué ses vertus merveilleuses. […] Jésus insista sur ce point 847, et annonça à ses disciples un baptême par le feu et l’esprit 848, bien préférable à celui de Jean, baptême que ceux-ci crurent un jour recevoir, après la mort de Jésus, sous la forme d’un grand vent et de mèches de feu 849. […] On se croyait à la veille de la grande catastrophe finale. […] Une fois surtout, il se laissa aller, dans la synagogue de Capharnahum, à un mouvement hardi, qui lui coûta plusieurs de ses disciples. « Oui, oui, je vous le dis, ce n’est pas Moïse, c’est mon Père qui vous a donné le pain du ciel 856. » Et il ajoutait : « C’est moi qui suis le pain de vie ; celui qui vient à moi n’aura jamais faim, et celui qui croit en moi n’aura jamais soif 857. » Ces paroles excitèrent un vif murmure : « Qu’entend-il, se disait-on, par ces mots : Je suis le pain de vie ? […] Tous ces discours portent trop fortement l’empreinte du style propre à Jean pour qu’il soit permis de les croire exacts.

1414. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXI » pp. 338-354

Je crois aussi qu’ils mettent sur votre compte la douceur qu’ils me trouvent présentement. […] Tous mes petits princes y sont établis, et je crois pour toujours : cela, comme toute autre chose, a son bon et son mauvais côté : je suis assez contente. […] On croit que je le dois à madame de Montespan ; on se trompe. […] Madame Scarron avait passé trois nuits près de ces enfants malades, et elle croyait n’avoir encore rien fait. […] Je crois qu’il en disposera et, qu’on ne vous refusera point ce qu’on pourra vous accorder.

1415. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

On crut d’abord que madame de Montespan, qui devait aller à Bourbon, n’irait pas ; ce qui persuadait que le retour du roi serait plus prompt qu’on n’avait cru. […] Je vous crois trop bon Français pour n’avoir pas été ravi de ce qui s’est passé. » (Ravi ne peut être là qu’ironiquement. […] Je meurs d’envie, il y a sept mois, de me retirer, et la même crainte m’en empêche : c’est une prudence bien timide et qui me fait consumer ma vie dans d’étranges agitations… Je sais bien que je puis faire ici mon salut ; mais je crois que je le ferais mieux ailleurs. […] « Comme je vous parle sincèrement, je ne vous dis point que c’est pour mieux servir Dieu que je voudrais quitter la cour : je crois que je puis faire ici mon salut. » (On entrevoit ici l’aveu d’un peu de dépit causé par les variations du roi.)

1416. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre III »

Beaucoup de ces barbarismes sont assez fugitifs, mais il en demeure assez pour infecter même la langue commerciale qu’on aurait pu croire à l’abri du delirium græcum. C’est que l’auteur d’une invention souvent insignifiante croit ennoblir son œuvre en la qualifiant d’un mot qu’il achète et qu’il ne comprend pas26 ; c’est aussi que les commerçants connaissent le goût du peuple pour les mots savants ; en prononçant des bribes de patois grec ou latin, la commère se rengorge et la femme du monde sourit, pleines de satisfaction. […] Peu à peu ils se mirent à divaguer dans une langue qu’ils croyaient celle d’Hippocrate et qui n’est qu’un jargon d’officine. […] Ce sont les mêmes ravageurs qui baptisèrent brutalement orthorrhynque le miraculeux oiseau-mouche, la petite chose ailée par excellence, et dont on disait jadis qu’il vole sans jamais se reposer, qu’on croyait dénué de pattes, parce que les Indiens qui le capturaient les enlevaient si adroitement que toute trace de la blessure avait disparu ! […] En astronomie, le terrible sizygie est à peu près impossible à prononcer ; on le croirait inventé pour quelque « jeu de société », comme Gros gras grain d’orge, quand te dégrogragraindorgeriseras-tu ?.

1417. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

Je crois, au contraire, qu’elle est tout au plus à son aurore. […] Inversement, toute conviction est une affection ; croire, c’est aimer. […] La critique ainsi entendue n’est plus que l’agrandissement égoïste de la personne, qui veut dominer une autre personne. « N’y a-t-il pas du plaisir, demande Candide, à tout critiquer, à sentir des défauts où les autres hommes croient voir des beautés ?  […] Après tout, si la charité est un devoir à l’égard de l’homme, pourquoi ne le serait-elle pas à l’égard de ses œuvres, où il a laissé ce qu’il a cru sentir en lui de meilleur ? […] Hennequin a donc tort, selon nous, de croire que le critique doive se borner à expliquer une œuvre, et ne doive pas la juger.

1418. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

On le croyait autrefois ; beaucoup d’esprits sont aujourd’hui tentés d’en douter. […] Il a cru que, le bâton étant courbé d’un côté, il fallait le recourber de l’autre. […] Elle croit que l’homme est appelé à se faire sa destinée à lui-même dans la vie comme dans la société, et que tous les progrès de la civilisation n’ont jamais été que les progrès de la liberté. […] Il croit pouvoir affirmer que c’est là surtout le caractère du génie en France, et c’est la raison pour laquelle il préfère notre littérature à celle de tous les autres pays, même à la littérature grecque, « qui a fait trop de part à la vaine curiosité et aux spéculations oiseuses », c’est-à-dire qui a produit Platon et Aristote, et qui a eu le tort « d’être plus favorable à la liberté qu’à la discipline ». […] Christophe Colomb croyait avoir découvert les côtes de l’Asie : il a, sans le savoir, découvert l’Amérique ; est-ce un utopiste ?

1419. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre premier. Astronomie et Mathématiques. »

Ce qui perdra toujours la foule, c’est l’orgueil : c’est qu’on ne pourra jamais lui persuader qu’elle ne sait rien au moment où elle croit tout savoir. […] Il y voyait même quelque chose de plus qu’inutile ; il croyait qu’il était dangereux de s’appliquer trop sérieusement à ces démonstrations superficielles, que l’industrie et l’expérience fournissent moins souvent que le hasard154. […] Elle a des paradoxes, des apparences de contradiction, des conclusions de système et de concession, des opinions de sectes, des conjectures même, et même des paralogismes156. » Si nous en croyons Buffon, « ce qu’on appelle vérités mathématiques se réduit à des identités d’idées, et n’a aucune réalité 157. » Enfin l’abbé de Condillac, affectant pour les géomètres le même mépris qu’Hobbes, dit, en parlant d’eux : « Quand ils sortent de leurs calculs pour entrer dans des recherches d’une nature différente, on ne leur trouve plus la même clarté, la même précision ni la même étendue d’esprit. […] Qu’on ait des charrues plus légères, des machines plus parfaites pour les métiers, c’est un avantage ; mais croire que le génie et la sagesse humaine se renferment dans un cercle d’inventions mécaniques, c’est prodigieusement errer. […] Lorsque, dans un siècle impie, l’homme vient à méconnaître l’existence de Dieu, comme c’est néanmoins la seule vérité qu’il possède à fond, et qu’il a un besoin impérieux des vérités positives, il cherche à s’en créer de nouvelles, et croit les trouver dans les abstractions des sciences.

1420. (1760) Réflexions sur la poésie

Tant qu’elle a proposé et fixé les sujets de ces pièces, si elle a eu quelque chose à se reprocher dans ses décisions, ce n’est pas d’avoir usé d’une rigueur excessive ; elle a quelquefois encouragé le germe du talent, plutôt que le talent même ; et le bas peuple des critiques, qui se plaît à déchirer lourdement les ouvrages couronnés, et qui ne remporterait pas même le prix de la satyre s’il y en avait un, doit être persuadé, sans craindre d’avoir trop bonne opinion de l’académie, qu’elle a pu donner le prix à certaines pièces, et les croire en même temps fort éloignées de la perfection. […] Il en est même de plus mécontents, qui n’attendent que le jour de leur arrêt pour lancer contre l’académie quelque épigramme qu’elle ignore ; ils se font d’ailleurs célébrer par des journalistes, car il y en a qu’on fait taire et parler comme on veut ; et si leur amour-propre n’est pas satisfait, il croit du moins être bien vengé. […] Enfin nous croyons la rime aussi indispensable à nos vers que la versification à nos tragédies : que ce soit raison ou préjugé, il n’y a qu’un moyen d’affranchir nos poètes de cet esclavage, si s’en est un ; c’est de faire des tragédies en prose, et des vers sans rimes, qui aient d’ailleurs assez de mérite pour autoriser cette licence. […] D’après ces principes, et d’après le témoignage presque général de tous les gens de lettres, j’ai bien de la peine à croire qu’Homère et Virgile aient jamais été lus sans interruption et sans ennui par leurs plus grands admirateurs. […] Mais je ne m’attendais pas, je l’avoue, à celui qu’ils prennent au latin des Psaumes : ils m’accusent d’impiété, pour avoir osé dire que ce latin est à demi barbare ; je croyais la chose incontestable, et même généralement reconnue par ceux qui avec raison respectent le plus dans ces poésies sacrées le fond des choses.

1421. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

Je crois que cette erreur est très fatale, en ce qu’elle a décrédité la majesté primitive de la loi. Le dogme de la souveraineté du peuple, enté sur le système représentatif, système ancien dans nos habitudes nationales, mais rétabli dans un autre ensemble d’idées ; le dogme de la souveraineté du peuple, disons-nous, a fait croire que le corps institué comme organe de l’opinion et des besoins actuels du peuple, était investi du droit de concourir à la formation de la loi. […] Mais ne cherchons point ici l’analogie que d’autres ont cru trouver : les rapports qui peuvent exister entre les temps où s’établit le christianisme, et les temps où nous vivons, ne sont que des rapports d’apparences grossières : nous aurons plus d’une fois occasion de remarquer les différences réelles et intimes. […] Le berceau de cette société nouvelle n’a point été, en apparence, entouré de mystères et de merveilles ; mais c’est aussi un mystère, et un mystère terrible, que cette foule d’hécatombes humaines ; mais c’est aussi une merveille, et la plus grande de toutes, que cette suite innombrable de démentis donnés chaque jour, pendant trente années, à la raison humaine, qui, chaque jour, croyait être sûre de son fait. […] Des esprits superficiels, qui se sont arrêtés à la surface des choses, ou trop ardents et trop passionnés pour ne pas vouloir devancer le temps, ont cru que la révolution française n’avait acquis de la violence qu’en raison même de la résistance qui lui avait été opposée.

1422. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Il ne croit, lui, qu’à la race. […] Avec son titre, qui n’est qu’une jonglerie, ce livre fait croire à une étude sur les civilisations en général, — ce qui serait une grande entreprise ; mais quand sous ce titre, pipé comme un dé, ce titre menteur, écrit impudemment en grosses lettres : études sur les civilisations, on passe au sous-titre, écrit en lettres frauduleusement petites, on s’aperçoit qu’il ne s’agit seulement que des civilisations de l’ancienne Amérique et pas plus ! […] Il croit — dur comme crâne, comme le sien peut-être, — à la crânioscopie. […] À travers ses compilations d’histoire et de voyages, écrites sans expression et sans couleur et où un déisme insignifiant est affirmé comme pour couvrir des marchandises suspectes, on sent le libre penseur qui, au tournant d’une phrase, salue presque respectueusement le honteux, grotesque et simiesque Darwin, — la Bête du temps, — et on croit ailleurs deviner çà et là le positiviste très peu positif qui se dissimule… Au vague de son esprit, sans conclusion comme sans vue fixe, Faliés ajoute le vague des doctrines, et si, parmi les civilisations qu’il pouvait étudier et dont il a oublié les principales, il a choisi (pour parler comme lui) les civilisations américaines, c’est qu’il a obéi — la chose n’est pas plus grosse que cela — au hasard de ses lectures et à la préférence de ses admirations. […] il faut avoir le crâne conformé comme Faliés, qui croit aux crânes et qui en est un, et qui en a un… bien différent du mien, pour suer d’ahan sur ces questions-là.

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