Quand on ne connaît que de réputation ce pamphlet célèbre et qu’on se met à le lire, on a besoin de quelque réflexion pour s’apercevoir que c’est là un retour au bon sens, aux idées de modération et de justice. […] C’était s’apercevoir bien tard que la Révolution devait avoir une borne, c’était l’apercevoir pourtant et la poser.
Car il était, ne l’oublions jamais, l’homme de son humeur : cela perce déjà dans les dernières lignes de cet article tout pacifique et d’expectative ; il prévient les questionneurs et adversaires du National qu’il ne s’agit plus désormais, dans ces critiques fort déplacées dont il est l’objet, d’attaques collectives : « Ces attaques, dit-il en terminant, ne s’adresseraient désormais qu’à une seule personne, celle qui s’est fait connaître hier pour directeur unique du National, et l’on doit s’attendre qu’elles seraient relevées. » Voilà une pointe d’épée qui s’aperçoit : et combien de fois déjà ne s’était-elle pas montrée à la fin des articles de Carrel ! […] Nous disions, il y a trois ans, quand nous commençâmes à nous apercevoir que le respect de la légalité portait aussi ses fruits : Que ne nous sommes-nous résignés plutôt nous faire gens d’affaires au lieu de conjurés ! […] Généreux envers les vaincus, envers les captifs, tenant compte à M. de Peyronnet lui-même de son maintien dans tout le cours des débats, de s’être montré habile, ferme, et « d’avoir laissé apercevoir parfois, sous les formes de l’urbanité la plus recherchée, le cœur indompté qui ne pardonne point sa défaite », il s’irrite contre les victorieux, et prenant fait et cause pour le général La Fayette destitué par la Chambre, il s’écrie, en tirant l’épée hors du fourreau (25 décembre 1830) : La Fayette était au-dessus de toute récompense, cela est vrai ; mais on le croyait aussi au-dessus des indignités d’un Parlement-croupion.
Mardi 4 janvier Cette nuit, en revenant chez moi en chemin de fer, je me suis aperçu tout à coup, que je ne roulais plus sur la terre… et qu’il y avait la Seine, sous moi. […] C’est ainsi que, pendant qu’un de mes amis était à la Bourse, elle venait coucher sur son divan, et le maître de l’appartement s’apercevait de sa visite à deux perroquets de porcelaine de Chine, qu’elle avait retournés, disant qu’ils lui rappelaient son grand-père. […] Un cabinet de travail ayant la hauteur et la grandeur, où se lit sur la cheminée, la devise : Nulla dies sine linea , et où l’on aperçoit dans un coin un orgue mélodium avec voix d’anges, dont l’auteur naturaliste tire des accords à la tombée de la nuit.
quelle variété d’aperçus ! […] Certes, ils n’apercevaient pas encore la source de leur mal ; seul peut-être, ce grand fou de Rolla y vit clair. […] Je ne sais même si l’auteur et ses premiers lecteurs aperçurent toute la puissance de cette opposition. […] Ce trait n’a été aperçu que du seul Pouchkine. […] Un jour, en se rendant de Paris à Prague, Bakounine aperçoit des paysans soulevés qui assiègent un château.
On aperçut qu’il n’y a pas lieu de tenir rigueur à un pouvoir qui nous fait concevoir les choses autres qu’elles ne sont si, à vrai dire, les choses ne comportent pas une réalité fixe, et, dans la troisième partie de cette étude on reprit avec complaisance l’examen des diverses conceptions au moyen desquelles l’esprit, par la vertu de ce pouvoir de déformation, nous ouvre sur les choses les perspectives où nous les saisissons.
Le jeune poëte servait mieux la pensée impériale par deux odes sur les campagnes de 1806 et de 1807, par une autre Au Vaisseau de l’Angleterre, qui a de l’énergie dans la menace : Il n’a pas lu clans les étoiles Les malheurs qui vont advenir ; Il n’aperçoit pas que ses voiles Ne savent plus quels airs tenir ; Que le ciel est devenu sombre… Un jour, en 1808, à Fontainebleau, l’Empereur, qui se souvenait de la méprise de Schœnbrunn et de la visite de Saint-Cyr, et pour qui l’auteur était devenu très-distinct, dit à une dame du palais, qui s’intéressait à M. […] Si de loin sa pensée entrevoyait une île Abondante en troupeaux, en oliviers fertile, Il n’apercevait plus d’autre lieu, d’autre bien, Et l’immortalité ne lui semblait plus rien. […] Talma s’en aperçut aux premières scènes : le parterre, à certains moments, hésitait et ne savait trop comment le prendre ; le grand acteur n’hésita point ; il arracha cela, selon l’expression vive d’un excellent spectateur, comme on arrache une dent. […] La princesse, en entrant, aperçoit quelque homme de lettres de sa cour et lui dit : Ah !
Plus tard, l’abbé Barthélemy ne s’aperçut pas qu’il se souvenait beaucoup trop du cercle de Chanteloup, en nous reconduisant jusque dans Athènes. […] En soumettant ces idées à ceux qui en sont juges, en ne les jetant ici que comme de simples aperçus, et parce qu’il y a disette, en ce moment, de ce genre d’études au sein de la presse périodique et, comme on disait autrefois, de la littérature vulgaire, notre dessein est surtout de stimuler de jeunes et doctes esprits tels qu’il en est encore beaucoup, de les inviter à tenter une voie qui est demeurée antique et neuve, et à ne pas tant négliger les points par où une science ingénieuse se saurait greffer sur la littérature nationale : à ce prix seul est la circulation et la vie120. […] Mais voici qui indique un sentiment plus vrai : Fanie était dans l’île de Cos, et Méléagre, absent, s’en était allé du côté de l’Hellespont ; il s’adresse ainsi aux voiles qu’il aperçoit du rivage ; « Navires bien frétés, légers sur les eaux, qui traversez le passage d’Hellé recevant au sein des voiles un Borée favorable, si quelque part vous apercevez sur le rivage dans l’île de Cos la petite Fanie regardant vers la mer bleue, annoncez-lui cette parole : « Belle épousée, ce n’est point sur un vaisseau qu’il reviendra ; il est homme à venir à pied, tant il t’aime128 !
En jetant un regard vers la mer et ses rivages, Humboldt et Bonpland s’aperçurent que leur navire, le Pizarro, était sous voiles, et cela les inquiéta fort, parce qu’ils craignaient que le bâtiment ne partît sans eux. […] Sous le seizième degré de latitude, il aperçut pour la première fois la brillante constellation de la Croix du sud, et l’apparition de ce signe d’un monde nouveau lui fit voir avec émotion l’accomplissement des rêves de son enfance. […] Il revient encore une fois à la Havane, renonce à d’autres excursions sur le continent américain, se rembarque et rentre à Bordeaux, ne rapportant de ce voyage soi-disant autour du monde que quelques calculs trigonométriques vulgaires, quelques études insignifiantes sur des phénomènes étudiés mille fois avant lui, et quelques phrases prétentieuses où la légèreté des aperçus et la brièveté des excursions étaient déguisées avec art par la sonorité grandiose des mots. […] Les vérités géométriques sont des vérités de dernier ordre, des axiomes de fait qui n’ont besoin que de l’œil matériel pour être aperçus, mais que l’œil intellectuel, la raison, ne peut reconnaître.
Il s’était hautement déclaré pour le comité de Salut public, dont, admirablement guidé cette fois par sa logique, il avait aperçu le grand rôle historique : conserver la France, indépendante et une, contre les convoitises de l’étranger et les factions de l’intérieur. […] Il avait le gallicanisme en horreur, parce que, le voyant dans son temps, il n’y apercevait qu’un instrument de règne : cette Église d’État n’était à ses yeux qu’un athéisme politique. Quand il s’aperçut que l’ultramontanisme aussi se mettait au service du pouvoir, que le pape agissait en souverain temporel et liait sa cause à celle des rois, quand il vit par toute l’Europe le clergé se faire le gardien des principes légitimistes plutôt que des principes évangéliques, Lamennais rompit d’abord avec la légitimité ; il devint libéral ; il lui sembla que le règne de Dieu par l’autorité était actuellement impossible ; il tâcha d’y revenir par la liberté680, il chercha dans le développement complet de la liberté des garanties contre le despotisme et l’anarchie, et les conditions de l’ordre et de la vie sociale. […] Il était bibliophile, amoureux de rares bouquins, fureteur de paperasses inédites ; il dut à ce goût une trouvaille précieuse : il aperçut le vrai texte des Pensées dans le manuscrit jusque-là négligé, et, le premier, il nous rendit tout Pascal.
dans mon lit, j’avais là, mais vraiment, la tentation de me relever et de filer au chemin de fer, laissant mon monde continuer son voyage… J’ai besoin de Paris, de son pavé… Les quais, le soir, avec toutes ces lumières… Vous ne croyez pas qu’il y a des jours, où je me sens tout heureuse de l’habiter… Ça été si longtemps mon désir d’y venir… Non, quand je ne suis plus en France, il y a un trouble en moi, j’ai le diable au corps d’y revenir, d’y être, de me trouver avec des Français… Et la première fois que j’ai mis le pied sur de la terre française, en août 1841, il était deux heures du matin, « le premier pantalon garance » que j’ai aperçu, ça été plus fort que moi, je suis descendue de voiture pour l’embrasser… Oui, je l’ai embrassé ! […] * * * — En travaillant à la préface du livre de Bergerat, je m’aperçois que tous les terribles paradoxes de Flaubert ne sortent pas de lui : ils sont de Gautier. […] Puis il passait à une autre, détachant un nouvel éclat… Et arrivé à la maison, il se mettait à casser frénétiquement tout le pain de sucre, pour qu’on ne s’aperçût pas du déchet. […] La première fois que je m’en suis aperçu, cela m’a profondément attristé…, cette attention m’a averti que je commençais à être un vieux. » Mardi 3 décembre Aujourd’hui, au dîner des Spartiates, Francis Magnard racontait la petite cause, qui a amené la chute de la colonne Vendôme.
Les chants et la grande poésie des choeurs relevaient l’extrême simplicité des sujets grecs, et ne laissaient apercevoir aucun vide dans la représentation : ici, pour remplir la carrière de cinq actes, il nous faut mettre en oeuvre les ressorts d’une intrigue toujours attachante, et les mouvemens d’une éloquence toujours passionnée. […] On s’aperçut que c’était là des beautés absolument neuves ; mais Corneille et Racine n’en avoient pas encore appris assez à la nation pour qu’elle pût saisir tout ce qu’un pareil ouvrage avait d’étonnant. […] Boileau, et ce petit nombre d’hommes de goût qui juge et se tait, quand la multitude crie et se trompe, aperçurent un progrès dans ce nouvel ouvrage. […] Cette seconde espèce de beautés demande plus de temps pour être aperçue et sentie, et diffère surtout de la première, en ce que celle-ci est embrassée par le sentiment, au lieu que l’autre est admirée par la réflexion.
C’est une difficulté contre laquelle sont venus échouer nécessairement tous les classificateurs, sans qu’aucun l’ait aperçue distinctement. […] On aperçoit aisément, d’après cette considération, pourquoi ces théories n’ont pu encore être formées, puisqu’elles supposent le développement préalable de toutes les différentes sciences fondamentales. […] On pourra d’abord l’apercevoir très nettement en comparant, d’une part, la physiologie générale, et d’une autre part, la zoologie et la botanique proprement dites. […] Cette considération sera, plus tard, spécialement développée ; je dois ici me borner à l’indiquer, uniquement pour faire apercevoir toute la portée de la conception encyclopédique que j’ai proposée dans cette leçon.
C’est un esprit de sécheresse supérieure parmi les Secs, une intelligence toute en surface, n’ayant ni sentiment, ni passion, ni enthousiasme, ni idéal, ni aperçu, ni réflexion, ni profondeur, et d’un talent presque physique, comme celui, par exemple, du gaufreur ou du dessinateur à l’emporte-pièce, ou encore comme celui de l’enlumineur de cartes de géographie. […] Le livre, tel que le voilà venu, est tellement incompréhensible qu’on n’en aperçoit ni l’idée première, ni même l’intention. […] Il n’a jamais eu, dans les siens, ni pensée profonde, ni aperçu brillant, — ni même d’aperçu du tout !
M. de Tocqueville me communique, sans que j’y songe, de sa méthode, et je m’aperçois que je m’arrête pour raisonner avec lui et sur lui à chaque pas. […] Dans ses lettres à M. de Kergorlay on le voit de bonne heure tracer le plan de sa vie, s’assigner un but élevé et se confirmer dans la voie dont il n’a jamais dévié : « À mesure que j’avance dans la vie, écrivait-il (6 juillet 1835) âgé de trente ans, je l’aperçois de plus en plus sous le point de vue que je croyais tenir à l’enthousiasme de la première jeunesse : une chose de médiocre valeur, qui ne vaut qu’autant qu’on l’emploie à faire son devoir, à servir les hommes et prendre rang parmi eux. » Il est déjà en plein dans l’œuvre politique, au moins comme observateur et comme écrivain, et malgré tout, en présence du monde réel, il maintient son monde idéal ; il se réserve quelque part un monde à la Platon, « où le désintéressement, le courage, la vertu, en un mot, puissent respirer à l’aise. » Il faut pour cela un effort, et on le sent dans cette suite de lettres un peu tendues, un peu solennelles.
Eschyle et à créer une Orestie française, Leconte de Lisle se promenait, en causant avec le vieux combattant de Salamine et de Platée, dans le pays idéal de la Tragédie, tout à coup il s’aperçut que son compagnon de voyage était chauve à ce point, que les tortues pouvaient prendre son crâne pour un rocher poli. […] En second lieu, il est impossible de ne pas s’apercevoir du bénéfice considérable d’effet obtenu par une science magistrale de composition.
L’acteur chargé de réciter le prologue indiquait ordinairement aux spectateurs la ville et les monuments qu’ils avaient devant leurs yeux : « Cette cité pour aujourd’hui sera Ferrare, et ce fleuve que vous apercevez sera le célèbre Pô. […] Nous allons donner un aperçu de quelques-unes de ces comédies.
Là, la nature, ici la thèse primeront, supprimeront l’art ; — le pire sera qu’« eux » ne s’en aperçoivent. […] Quand on aura fini d’en rire, un beau jour on s’apercevra que ce fut comme le réveil, un peu trouble sans doute, de l’éternel esprit classique qui accepte le vrai, mais exige le beau.
Tout en cherchant à sonder la question d’avenir qu’offre le Rhin, il ne se dissimule point, et l’on s’en apercevra d’ailleurs, que la recherche du passé l’occupait, non plus profondément, mais plus habituellement. […] Au moment où l’impression de ce livre se terminait, il s’est aperçu des événements tout récents et qui, à l’instant même où nous sommes, occupent encore Paris, semblaient donner la valeur d’une application directe à deux lignes du paragraphe XV de la Conclusion.
Nous nous apercevons alors que nous les avions subis beaucoup plus que nous ne les avions faits. […] Mais quand elle n’est qu’indirecte, comme celle qu’exerce une organisation économique, elle ne se laisse pas toujours aussi bien apercevoir.
Nul aperçu, nulle vue particulière à l’auteur n’y domine et n’y décide les conclusions de parti, qui ne s’y expriment pas, mais qui y soupirent. […] Quand on fit le procès à ce chef-d’œuvre, qu’on lira encore quand on saura la Russie par cœur, personne ne se dit que Custine était de cette famille de jugeurs dont madame de Staël se vantait d’être, — madame de Staël, qu’il rappelle d’ailleurs pour le style et pour sa manière habituelle et soudaine de faire partir l’étincelle de l’aperçu. « Je serais conduite à l’échafaud, — disait un jour madame de Staël, — qu’en chemin, je crois, je voudrais juger le bourreau. » Custine avait plus difficile à faire : il avait à juger ceux qui voulaient le séduire, et il a été plus fort que ses séducteurs.
Son Histoire de la Ligue, vraie d’aperçu, mais faible d’aperçus, n’a point les qualités perçantes auxquelles est tenu, dans notre temps, tout livre d’histoire qui doit s’élever au-dessus des routines, porter la lumière en arrière et en avant des faits qu’il raconte, et avertir le législateur.
Et c’était de l’esprit par traits, par aperçus, par monosyllabes, comme mademoiselle Mars en avait parfois à la scène. […] Or, de cette finesse de détail on ne peut séparer les aperçus, les nouveautés de vue, le piquant des observations et des rencontres.
Elle s’en aperçoit et l’en raille. […] Son style a, comme son observation, le sentiment le plus étonnant du détail, mais de ce détail menu, imperceptible, que tout le monde oublie, et qu’il aperçoit, lui, par une singulière conformation microscopique de son œil.
Par un effet de ce caractère de l’esprit humain que nous avons remarqué d’après Tacite ( mobiles ad superstitionem perculsæ semel mentes , axiome 23), dans tout ce qu’ils apercevaient, imaginaient, ou faisaient eux-mêmes, ils ne virent que Jupiter, animant ainsi l’univers dans toute l’étendue qu’ils pouvaient concevoir. […] Au milieu des nuées de ces premiers orages, à la lueur de ces éclairs, ils aperçurent cette grande vérité, que la Providence veille à la conservation du genre humain.
Plus de nuances, plus d’aperçus, plus d’échappées. […] On s’aperçoit assez que M. […] Vous avez de l’aperçu, de la finesse, du tour, de la verve ; seulement… votre, style manque de gravité. […] Il lui refuse jusqu’au plus maigre aperçu. […] Féval, n’ont émis aucun aperçu nouveau.
Mais il n’est pas obligatoire de se reporter au texte pour apercevoir des bévues dans ses citations grecques ou latines. […] Il devait s’en apercevoir : c’est élémentaire. […] Il s’aperçut que son précieux moi reposait sur des éléments héréditaires, locaux et nationaux. […] Il apercevra pour la première fois l’intérieur des surfaces planes que des lignes suffisaient à lui rendre invisibles. […] Ce qu’on aperçoit là-bas en levant le nez de dessus son papier, suffit à valoir les vingt-deux heures de voyage.
Parfois on aperçoit derrière comme une rougeur due à quelque lampe artificielle, et cette rougeur aussitôt s’évanouit.
. — Et dans le même chant, cette comparaison encore (car les comparaisons ici se succèdent et ne tarissent pas) de la jeune Écossaise, vaguement apparue au chasseur dans la nuée, au sein de l’arc-en-ciel, avec la belle forme vaporeuse de l’ange ténébreux aperçu de loin d’abord par Éloa ; — et au chant III, cette dernière image enfin, cette description si large et si fière de l’aigle blessé qui tente un moment de surmonter sa douleur, et qui ressemble plus ou moins au même archange infernal avec sa plaie immortelle : Sur la neige des monts, couronne des hameaux, L’Espagnol a blessé l’aigle des Asturies, Dont le vol menaçait ses blanches bergeries, Hérissé, l’oiseau part et fait pleuvoir le sang, Monte aussi vite au ciel que l’éclair en descend, Regarde son soleil, d’un bec ouvert l’aspire, Croit reprendre la vie au flamboyant empire ; Dans un fluide d’or il nage puissamment. […] Je vous le dis bien bas, c’est le plus aimable de tous, et malheureusement un jeune cœur qui vous aime tendrement et que vous protégez beaucoup s’est aperçu de cette amabilité parfaite. […] » M. de Vigny s’en aperçut lui-même un peu tard, mais il s’en aperçut : son poème de la Colère de Samson l’atteste. […] Droz, l’indulgent Droz, le moins épigrammatique des hommes, traduisait ainsi l’impression qu’il avait reçue de ce discours : « M. de Vigny a commencé par dire que le public était venu là pour contempler son visage, et il a fini en disant que la littérature française avait commencé avec lui. » — « On me dit que M. de Vigny a été immolé à cette séance, ajoutait un autre académicien ; pour moi, je n’ai vu en lui qu’un pontife, et rien ne ressemblait moins à un martyr. » Le récipiendaire fut quelque temps à se faire illusion et à s’apercevoir de la réalité des choses.
Il est vrai que nous pouvons découvrir des défauts dans l’un et dans l’autre ; mais il ne faut pas confondre la faculté d’apercevoir des taches au soleil, avec celle de concevoir un soleil plus beau. […] Elle découvre en un clin d’œil une foule d’aperçus, dont la piquante variété ne semble point impliquée dans la sensation simple du comique ou du beau, et l’on ne conçoit pas par quelle mystérieuse analyse elle a su tirer tant de choses, du fait d’être émue et d’admirer. […] Serait-ce qu’elle a aperçu l’idée du comique, l’idée du tragique, confusément d’abord, puis avec une netteté de plus en plus parfaite, jusqu’au point où l’idéal entièrement éclairci a brillé sans nuages dans le ciel de sa pensée ? […] Ceux qui ne voient pas l’astre du jour au firmament, ne l’aperçoivent point à travers le prisme qui le décompose en sept couleurs. […] Jamais l’œil n’eût aperçu le soleil, s’il n’en avait pris la forme ; de même, si l’âme ne fût devenue belle, jamais elle n’eût vu la beauté. » L’école dogmatique et Molière Soyez de bonne foi, monsieur Lysidas.