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1377. (1874) Premiers lundis. Tome II « H. de Balzac. Études de mœurs au xixe  siècle. — La Femme supérieure, La Maison Nucingen, La Torpille. »

Ce noble exemple, tant ridiculisé par un monde aveugle, me paraît, à lui seul, capable de racheter les erreurs de sa vie… Il y a loin de la dignité d’action du pauvre Rousseau à la pompeuse fortune littéraire des spéculateurs en philanthropie, Voltaire et son écho lointain Beaumarchais… » M. de Balzac, après avoir, non sans raison, remarqué que cette sévérité contre les auteurs qui vendent leurs livres siérait mieux peut-être sous une plume moins privilégiée à tous égards que celle de M. de Custine, se donne carrière à son tour, se jette sur les contrefaçons, agite tout ce qu’il peut trouver de souvenirs à la fois millionnaires et littéraires : la conclusion est qu’à moins de devenir riche comme un fermier général, on se maintient mal aisément un grand écrivain.

1378. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Le Comte Walewski. L’École du Monde »

Et que deviendrait la mince action de la pièce sans cela ?

1379. (1875) Premiers lundis. Tome III «  La Diana  »

Une idée utile et toute pratique, une chaleureuse et patriotique étincelle, c’est ce que nous nous sommes plu à relever dans un discours, spirituel assurément, mais qui n’aurait pas été remarqué à ce degré s’il n’avait été l’expression de convictions senties, et s’il n’était venu à la suite et en compagnie d’actions nées du cœur.

1380. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIX. De la littérature pendant le siècle de Louis XIV » pp. 379-388

Le livre de Télémaque était alors une action courageuse ; et Télémaque ne contient cependant que des vérités modifiées par l’esprit monarchique.

1381. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

À leur tête, le roi, qui a fait la France en se dévouant à elle comme à sa chose propre, finit par user d’elle comme de sa chose propre ; l’argent public est son argent de poche, et des passions, des vanités, des faiblesses personnelles, des habitudes de luxe, des préoccupations de famille, des intrigues de maîtresse, des caprices d’épouse gouvernent un État de vingt-six millions d’hommes avec un arbitraire, une incurie, une prodigalité, une maladresse, un manque de suite qu’on excuserait à peine dans la conduite d’un domaine privé  Roi et privilégiés, ils n’excellent qu’en un point, le savoir-vivre, le bon goût, le bon ton, le talent de représenter et de recevoir, le don de causer avec grâce, finesse et gaieté, l’art de transformer la vie en une fête ingénieuse et brillante, comme si le monde était un salon d’oisifs délicats où il suffit d’être spirituel et aimable, tandis qu’il est un cirque où il faut être fort pour combattre, et un laboratoire où il faut travailler pour être utile  Par cette habitude, cette perfection et cet ascendant de la conversation polie, ils ont imprimé à l’esprit français la forme classique, qui, combinée avec le nouvel acquis scientifique, produit la philosophie du dix-huitième siècle, le discrédit de la tradition, la prétention de refondre toutes les institutions humaines d’après la raison seule, l’application des méthodes mathématiques à la politique et à la morale, le catéchisme des droits de l’homme, et tous les dogmes anarchiques et despotiques du Contrat social  Une fois que la chimère est née, ils la recueillent chez eux comme un passe-temps de salon ; ils jouent avec le monstre tout petit, encore innocent, enrubanné comme un mouton d’églogue ; ils n’imaginent pas qu’il puisse jamais devenir une bête enragée et formidable ; ils le nourrissent, ils le flattent, puis, de leur hôtel, ils le laissent descendre dans la rue  Là, chez une bourgeoisie que le gouvernement indispose en compromettant sa fortune, que les privilèges heurtent en comprimant ses ambitions, que l’inégalité blesse en froissant son amour-propre, la théorie révolutionnaire prend des accroissements rapides, une âpreté soudaine, et, au bout de quelques années, se trouve la maîtresse incontestée de l’opinion  À ce moment et sur son appel, surgit un autre colosse, un monstre aux millions de têtes, une brute effarouchée et aveugle, tout un peuple pressuré, exaspéré et subitement déchaîné contre le gouvernement dont les exactions le dépouillent, contre les privilégiés dont les droits l’affament, sans que, dans ces campagnes désertées par leurs patrons naturels, il se rencontre une autorité survivante, sans que, dans ces provinces pliées à la centralisation mécanique, il reste un groupe indépendant, sans que, dans cette société désagrégée par le despotisme, il puisse se former des centres d’initiative et de résistance, sans que, dans cette haute classe désarmée par son humanité même, il se trouve un politique exempt d’illusion et capable d’action, sans que tant de bonnes volontés et de belles intelligences puissent se défendre contre les deux ennemis de toute liberté et de tout ordre, contre la contagion du rêve démocratique qui trouble les meilleures têtes et contre les irruptions de la brutalité populacière qui pervertit les meilleures lois.

1382. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Dierx, Léon (1838-1912) »

Ses actions ne sont pas moins graves que ses poèmes.

1383. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Merrill, Stuart (1863-1915) »

Albert Mockel Stuart Merrill a la science de la ligne décisive, comme il sait onduler toutes les souplesses d’une attitude ; mais, il faut le remarquer, ses formes sont presque toujours en équilibre statique, telles que les fortes et nobles créations de Constantin Meunier, par exemple ; le geste, chez lui, peut s’immobiliser indéfiniment, par cela même qu’il indique plus souvent un état qu’une action, et donne mieux l’impression de la chose qui dure.

1384. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Pol-Roux (1861-1940) »

Nos actions, seules, ne sont rien ; les pensées, seules, demeurent.

1385. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXX » pp. 330-337

Je consume les plus beaux jours de ma vie au service d’autrui… Je vis dans une action continuelle ; pas un moment à donner à mes amis ; les bontés du roi ne sauraient me dédommager de toutes ces pertes. » On pourrait trouver une nuance d’ingratitude dans ces paroles, si l’on n’y voyait la sage précaution d’une femme intacte contre des soupçons offensants.

1386. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’Empereur Néron, et les trois plus grands poëtes de son siècle, Lucain, Perse & Juvénal. » pp. 69-78

Mais cette action infâme ne le sauva point.

1387. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre quatrième. »

Peut-on mettre la morale en action d’une manière plus sensible et plus frappante ?

1388. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Lettre, à Madame la comtesse de Forbach, sur l’Éducation des enfants. » pp. 544-544

On apprécie les incertitudes ; on calcule les chances ; on fait sa part et celle du sort ; et c’est en ce sens que les mathématiques deviennent une science usuelle, une règle de la vie, une balance universelle ; et qu’Euclide, qui m’apprend à comparer les avantages et les désavantages d’une action, est encore un maître de morale.

1389. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 3, de la musique organique ou instrumentale » pp. 42-53

L’air que sonnent nos instrumens militaires, quand il faut demander quartier, ne ressemble point à celui qu’ils sonnent, quand il faut aller à la charge. " comme les anciens n’avoient point d’armes à feu dont le bruit empêchât les soldats d’entendre durant l’action le son des instrumens militaires dont on se servoit à la fois pour leur faire connoître le commandement, et pour les encourager, les anciens faisoient sur cette partie de l’art de la guerre, une attention et des recherches qu’il seroit inutile de faire aujourd’hui.

1390. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le voltairianisme contemporain »

On a beaucoup parlé, sur ce vieux thème que n’ont pas chanté les phraseurs, de l’activité imprimée par la philosophie à l’esprit humain ; mais le caractère particulier de l’action et de l’influence de Voltaire, c’est précisément d’avoir, avec de la légèreté et de l’ironie, dispensé à tout jamais l’esprit humain d’activité et de recherche.

1391. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « ??? » pp. 175-182

Tel est pourtant le personnage principal autour duquel le roman va tourner, emportant deux mondes, l’Europe et l’Asie ; car une partie de l’action se passe aux Indes.

1392. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « Introduction »

L’esprit nouveau, à mes yeux, c’est avant tout l’esprit d’action.‌

1393. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Pour tout dire, l’action se déroule sur la frontière de Suisse, en un coin de ce pays qui est la patrie classique de la vertu. […] Fuster s’est efforcé après Lamartine, après Brizeux, d’écrire un poème qui renfermât une action romanesque. […] Il nous dira où se passe l’action, à quelle époque, chez quel peuple, et si nous avons affaire à des hommes barbares ou à des civilisés. […] Peut-être nous donnera-t-il des ouvrages qui contiendront, harmonieusement mêlés, l’action et le rêve. […] Dumas, dont je ne veux pas rabaisser la merveilleuse faculté d’invention, a groupé dans un cadre pittoresque, les éléments d’une action poignante.

1394. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

* *    * Dans l’exposé des faits qui lui ont suggéré la première idée de sa théorie et qui sont, comme on sait, l’ensemble des manifestations de l’hystérie, Freud insiste avec une force particulière sur la complète ignorance où se trouvaient ses patients des causes et des fins des actes qu’ils accomplissaient : Pendant qu’elle exécutait l’action obsessionnelle, écrit-il, le « sens » en était inconnu à la malade aussi bien en ce qui concerne l’origine de l’action que son but. Des processus psychiques agissaient donc en elle, processus dont l’action obsessionnelle était le produit. […] Il n’avait jamais eu aucun soupçon des actions inconnues des êtres, de celles qui sont sans lien visible avec leurs propos , dit-il de Swann. […] Et Proust n’a même pas eu à choisir ; il s’est trouvé sinon de naissance, du moins de fatalité, si j’ose dire, et à cause de la forme même de son intelligence, tourné face à la conscience ; et il n’a pas conçu d’autre mouvement possible que de s’y enfoncer, tournant le dos à l’action. […] Stendhal, à cet égard, est très frappant : tout ce qu’il observe, si nouveau que ce soit, et si objectivement aperçu, ce n’est jamais pourtant que ce qui est parallèle à l’action : les motifs, parfois capricieux, parfois entièrement gratuits, souvent de ceux qu’on n’ose pas reconnaître, mais les motifs tout de même, les causes déterminantes de l’action.

1395. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Or une volonté malade rend l’homme impropre à l’action et en fait un être dangereux pour soi et pour autrui. […] Mais le Jésuite n’est ni un moine bouddhiste ni même un Chartreux ; le Jésuite est un homme d’action. […] Que l’on appelle cela cas de conscience ou conflit moral, peu importe ; mais une solution est nécessaire, puisque l’action est nécessaire. […] Elle tend à l’action politique. […] Sa surprise est immense que le mot n’ait aucune action sur la réalité.

1396. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Dumas par exemple, dont les compositions se ressentent uniquement de l’action d’un public assez peu lettré, il en est tel autre, comme M. de Balzac, qui, pour satisfaire à une production démesurée, gâte tout à plaisir des facultés déjà bien classées dans l’estime générale et qui, trouvant moins de lecteurs sans doute que M.  […] Brutus pour conserver sa vie ne faisait pas d’actions indignes ; il se contentait de rester mélancolique, silencieux et de soutenir une réputation de maniaque. […] Incontestablement, le théâtre classique avait eu grand tort de renoncer à cette heureuse liberté dont les tragiques grecs ne se sont pas fait faute d’user, et l’école romantique a bien fait de secouer une réserve nuisible ; cependant Lorenzaccio passe les bornes de ce qui est permis, et non seulement l’action est surchargée de personnages qui tous ne sont pas utiles, mais encore la brièveté fatigante des scènes, et le changement continuel de sujet et de lieu, aboutissent à multiplier tellement les fils de la composition, que le livre achevé, il devient très difficile de résumer ce qu’on a lu. […] Cette redoutable apparition, c’est le Fait qui doit suivre la pensée du rêveur, c’est l’action, compagne fidèle de l’idée. […] Je comprends toute la rudesse de langage et de procédés à propos d’actions et d’écrits répréhensibles ou jugés tels ; mais je n’admets pas que cette rudesse passionnée puisse descendre jusqu’à l’injure et compromettre ainsi l’insulteur plus encore que l’insulté.

1397. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

On s’entretient ensuite de Freycinet, l’homme funeste, le ministre dont Bismarck a dit un jour : « Il m’apparaît comme le ministre d’un grand désastre. » Samedi 27 juillet Un joli mot d’un petit garçon à une grande fillette, affectionnée par lui : « Je t’amoure. » Dimanche 28 juillet Il fait partie vraiment des belles actions, ce sacrifice fait par une femme à la très petite fortune, Mme Dardoize, ce sacrifice de 6 000 francs qu’elle avait de côté, pour la fondation d’une ambulance au commencement de la guerre de 1870, ambulance, où, au bout de trois jours, elle était abandonnée par les illustres infirmières qui s’étaient fait inscrire, et où elle frottait le parquet, en faisant les lits de trente-deux blessés, dont aucun n’est mort. […] Daudet est rentré, et assis, à demi couché sur une petite table, pendant qu’il prend à de lentes avalées, une tasse de café, interrompant soudain nos doléances sur la société moderne et sa veulerie, il se met à parler éloquemment sur la ressemblance de la génération actuelle avec Hamlet, de cette génération chez laquelle, selon une expression de Baudelaire, l’action ne correspond pas avec le rêve, prétendant que l’époque ne comporte pas l’action. […] Une seconde tournée à midi, suivie d’un repos, où le garde qui était un vieux soldat de la garde impériale, un grand homme sec, toujours grognonnant, mais le plus brave homme de la terre, me racontait interminablement toujours, je ne sais quelle bataille, où l’action terminée, n’ayant rien pour s’asseoir, ils avaient mangé assis sur des cadavres d’ennemis. […] Quelque chose de laiteux est resté dans l’atmosphère, et dans l’excellente lorgnette de Rattier, la guerre ne m’apparaît pas sévère, au contraire elle m’apparaît gaie, jolie, clairette, comme dans une gouache de Blarenberg… Un spectacle vraiment drôle, au moment où l’action est le plus vivement engagée, c’est la course éperdue d’un lièvre affolé, auquel ici, un coup de canon, là, une charge de cavalerie, là, la main d’un paysan qui s’est mis à sa poursuite et le touche presque, fait faire les crochets les plus cabriolants. […] Et la nuit, je ne sais comment le roi Rhompsonitos et mon cul-de-jatte devenaient contemporains, se mêlant, se brouillant dans un rêve, où je voyais le roi, sa fille, et le voleur, tous de profil, et toujours de profil, en toutes leurs actions, comme on les voit sur les obélisques, avec des apparences de têtes d’épervier, et clopinant au milieu d’eux mon cul-de-jatte, qui devenait à la fin un gigantesque scarabée de cette belle matière vert-de-grisée, qui arrête le regard dans les vitrines du Musée égyptien du Louvre.

1398. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

Elle est à la fois la philosophie et l’action de l’Etat. […] Il y a deux sortes d’obstacles pour l’homme d’action : ceux qui viennent des gens ; ceux qui viennent des choses. […] C’était un grand génie de bibliothèque, qui n’avait aucune partie d’homme d’action. […] J’ai pu saisir là, sur le fait, l’action incontestable du moral persuadant sur le physique. […] Comme si, à l’origine de toute action réelle et durable, il n’y avait pas, non seulement une pensée, mais une doctrine !

1399. (1925) Portraits et souvenirs

Ils cherchent aux actions humaines des mobiles plus particuliers, et analysent les caractères et les sentiments non plus seulement en anatomistes, mais en chimistes. […] Ainsi que toute action humaine, le vol peut donner la célébrité. […] Les magazines reproduisent leurs portraits et commentent leurs actions. […] Whibley nous trace un portrait très vivant et nous résume en quelques pages substantielles les principales actions. […] J’aurais voulu accomplir devant lui quelque action remarquable.

1400. (1885) L’Art romantique

Ils possèdent ainsi, à leur gré et dans une vaste mesure, le temps et l’argent, sans lesquels la fantaisie, réduite à l’état de rêverie passagère, ne peut guère se traduire en action. […] Passez en revue, analysez tout ce qui est naturel, toutes les actions et les désirs du pur homme naturel, vous ne trouverez rien que d’affreux. […] Le génie de l’action ne vous laisse plus de place parmi nous. […] Wagner, forçant notre méditation et notre mémoire à un si constant exercice, arrache, par cela seul, l’action de la musique au domaine des vagues attendrissements et ajoute à ses charmes quelques-uns des plaisirs de l’esprit. […] Voltaire avait trop de goût ; d’ailleurs, il était encore homme d’action, et il aimait les hommes.

1401. (1894) Études littéraires : seizième siècle

L’homme d’action se sert de son intelligence pour agir, et l’homme intelligent qui est mêlé à l’action, ne se sert guère de l’action que pour comprendre plus de choses. […] Saint-Simon, parfaitement incapable d’action, est possédé par la curiosité, et malgré toute sa pénétration, malgré tout son génie, qui n’est pas ici en cause, reste toujours extérieur aux choses dont il est témoin. […] » Et c’est ici l’homme d’action réfléchi, qui ne laisse rien au hasard, et qui se rend compte de son désir, de son intention, de ses moyens et de son but. — Ensuite : « pourquoi tel obstacle ? […] sortent naturellement de l’homme d’action, lequel ne veut agir que par l’intelligence, ou par la force intelligemment. […] Je ne dis pas qu’une action bonne soit mauvaise, je dis que devant Dieu elle est nulle.

1402. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Il fallait pour cet échange mutuel entre tout le monde et quelques-uns et pour ce second travail de la dissémination des lumières la lente action de deux siècles, une langue à l’usage de tous, non plus latine ni pédantesque, l’influence paisible et bienfaisante des chefs-d’œuvre, un frottement prolongé de société, et la coopération gracieuse d’un sexe que les Saumoise de tout temps n’ont apprécié que trop peu ; en un mot il fallait, après Scaliger, que vinssent Mme de La Fayette et Voltaire. […] Loin de là, il pose tout d’abord la différence qu’il y a entre les lettrés d’ordinaires mélancoliques et songearts, et les hommes d’action et de gouvernement auxquels sont dévolues des qualités toutes contraires : Paucis ad bonam mentem opus est litteris, répétait-il d’après Sénèque. […] Si, dans la façon dont il la présente, il se trouve historiquement quelques points de vérité incontestables, ils ne rachètent en rien l’horreur de l’action ni l’odieux du récit. […] Mais cette assez mauvaise prose poétique, cette flatterie plus que française, cette reconnaissance trop italienne, tous ces défauts du panégyrique composent, dans le cas présent, une très belle et très noble action, à savoir la défense et l’apologie, aux pieds du Saint-Siège, de la science et de la philosophie, hier encore persécutées240.

1403. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

C’est une chose étrange que mes actions et mon procédé ne les en désabusent pas. — Vous me faites souvenir, lui dis-je, de cet admirable génie51 qui laissa tant de beaux ouvrages, tant de chefs-d’œuvre d’esprit et d’invention, comme une vive lumière dont les uns furent éclairés et la plupart éblouis ; mais, parce qu’il étoit persuadé qu’on n’est heureux que par le plaisir, ni malheureux que par la douleur (ce qui me semble, à le bien examiner, plus clair que le jour), on l’a regardé comme l’auteur de la plus infâme et de la plus honteuse débauche, si bien que la pureté de ses mœurs ne le put exempter de cette horrible calomnie. — Je serais assez de son avis, me dit-il, et je crois qu’on pourroit faire une maxime que la vertu mal entendue n’est guère moins incommode que le vice bien ménagé n’est agréable52. — Ah ! […] Et parce que tout le monde veut être heureux, et que c’est le but où tendent toutes les actions de la vie, j’admire que ce qu’ils appellent vice soit ordinairement doux et commode, et que la vertu mal entendue soit âpre et pesante. […] J’ai connu Voilure : on sait assez que c’étoit un génie exquis et d’une subtile et haute intelligence ; mais je vous puis assurer que dans ses discours ni dans ses écrits, ni dans ses actions, il n’avoit pas toujours cette extrême justesse, soit que cela lui vînt de distraction ou de négligence. […] Quant à cet autre mot : faire l’esprit, il était du maréchal de Clérembaut, et le chevalier le confirme aussitôt et l’explique de la sorte : « Je me souviens de quelques bons maîtres qui montroient les exercices dans une si grande justesse qu’il n’y avoit rien de défectueux ni de superflu ; pas un temps de perdu, ni le moindre mouvement qui ne servît à l’action.

1404. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

. — Mais il ne s’agit jusqu’ici que d’idées générales : elles s’individualisent dans l’action esthétique, dans la création du poème, par l’angle spécial selon lequel chaque poète voit et conçoit la notion divine. […] Les heures où l’esprit critique triomphe seul sont les pires heures de l’histoire poétique, alors que le génie refrène toute spontanéité et laisse l’œuvre d’art s’altérer sous l’action corrosive du perpétuel examen. […] Les religions « révélées », paisiblement fondées sur leur divine certitude, s’assoupissent au cours des âges ou se dépravent sous l’action des vices humains. […] C’est le moment des grandes réformes, l’heure où se dressent les Luther, dont l’action est double.

1405. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Or, le tempérament de Dumas, c’est l’action, l’action sans trêve, sans repos, sans respiration, à jet continu. […] Par elle, nous échappons au désir, tout occupés dans l’action incessante et normale. […] Car l’Ataraxie n’est point le Bonheur, mais le Néant ; et le bonheur est dans l’Action des âmes.

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