Il avait, pour y réussir, non seulement les dons mystérieux du poète, mais encore une absolue sincérité, une inflexible douceur, une pitié sans faiblesse, et cette candeur, cette simplicité sur lesquelles son scepticisme philosophique s’élève comme sur deux ailes dans les hautes régions où jadis la foi ravissait les mystiques.
Pour trouver l’une, comme pour trouver l’autre, il faut s’efforcer d’affranchir complètement son âme du préjugé et de la passion, il faut atteindre à l’absolue sincérité.
Ayez une règle absolue : c’est de suivre la France, c’est-à-dire la légalité, malgré toutes les objections, toutes les répugnances, toutes les antipathies.
Quand le vainqueur et le vaincu sont de la même religion, ou plutôt, quand le vainqueur adopte la religion du vaincu, le système turc, la distinction absolue des hommes d’après la religion, ne peut plus se produire.
Je ne saurais pas le contraire de quoi il faut croire bon ; car il avait une infaillibilité à rebours qui donnait une idée de l’absolu.
La liberté nécessaire au gouvernement est exprimée, je l’avoue, d’une manière trop absolue, et M.
Auguste Nicolas, effrayé de l’influence d’un nom imposant, même sur les esprits les plus fermes, s’est cru le devoir de répondre à Guizot, et sa réponse, qui s’est grossie de toutes les alluvions d’une donnée féconde et d’un esprit naturellement fertilisant, a été la démonstration de l’impossibilité radicale, absolue, pour le catholicisme, de cette coalition à laquelle il est invité.
C’est le privilège du génie, — quand il est absolu, — aussi bien dans les Lettres que dans les Sciences, de faire faire un pas aux esprits de leur temps, c’est-à-dire de leur donner des exigences de plus….
Mais, d’autre part, il quitte le milieu intellectuel qu’il s’est choisi, auquel il s’est adapté, où la liberté d’esprit est absolue (du moins il le croit), où les préoccupations sont purement abstraites (du moins s’il en est de matérielles, comme il en ressent l’importance, il les excuse), et cette atmosphère, inférieure selon lui, où il se plonge, est encore faite plus médiocre par cette besogne monotone d’examiner des jeunes gens, et par la nécessité de se mettre en relations avec des fonctionnaires de toute sorte.
Il y a vingt-trois ans, Edgar Quinet, le clairvoyant philosophe de l’histoire, publiait son Esprit nouveau : et aujourd’hui ses conclusions nous apparaissent encore plus nettes, plus riches de sens, plus absolues.
Ce que je vais dire paraîtra peut-être trop tranché, trop absolu, et on m’alléguera des exemples contraires. […] Ne craignons point de passer pour un esprit grossier, absolu, ignorant des nuances. […] Il croit que les œuvres de l’esprit ont une valeur absolue et constante en dehors de ceux à qui elles sont soumises, lecteurs ou spectateurs ; et cette valeur, il prétend la fixer avec précision. […] N’y en a-t-il pas qui lui échappent en partie et sur lesquels, si je puis dire, sa juridiction n’est pas absolue ? […] Cette foi absolue, qui communique tant de vie et de mouvement à sa critique, il la justifie, comme j’ai dit, par les meilleures raisons du monde.
Il est de son pays et de sa race, lui aussi, par quelques côtés : ainsi il veut bien mentir jusqu’à un certain point, et il a le mépris absolu de la mort. […] Vacquerie a donc voulu montrer, c’est la bonté entièrement désintéressée, n’ayant d’autre récompense qu’elle-même, la bonté absolue. […] Don Jorge, c’est l’honneur absolu ; Jean Baudry, c’est la charité absolue ; Louis Berteau, c’est la probité absolue. […] Mais un homme qui ne soit que Parisien, mais le Parisien absolu, je ne l’ai jamais rencontré et je ne puis même le concevoir. […] Renan, que beaucoup considèrent comme un Protée insaisissable aux détours infinis, a toujours écrit ce qu’il pensait et sentait, avec une franchise absolue.
Ils ne posent pas, comme Beyle, ce principe absolu que l’homme n’est pas libre de ne pas céder à l’attrait du plaisir ; mais en fait ils en acceptent toutes les conséquences. […] vous êtes rentré vis-à-vis de la société dans l’indépendance absolue. […] Ce qu’il avait dit pour un cas particulier, d’autres l’ont dit dans des termes absolus ; ce qu’il avait demandé pour les poètes, d’autres l’ont exigé pour tous. […] La propriété n’est rien, ou elle est essentiellement un droit absolu, et, comme disaient les Romains, jus utendi et abutendi. […] Quand nous aurons la richesse, le bien-être, nous aurons le bien absolu : les destinées de l’homme seront accomplies.
Dans ma pensée elles ne sont point arbitraires, mais n’ont aussi rien d’absolu. […] Ses personnages lui ressemblent : ils n’arrivent point à se dégager de l’absolu. […] Zola, au triomphe absolu, définitif et sans discussion, quelle chimère ! […] Se haussant vers l’Occulte, s’élevant jusqu’au grand Inconnu, hardiment, le roman nouveau devra s’efforcer à pénétrer les abîmes réputés impénétrables, à percer les ténèbres dont l’absolu enveloppe son être…. L’absolu providentiel une fois dégagé, l’homme observé dans ses passions sera placé alors par son analyste en face des lois immuables, aux prises avec elles et sous leurs étreintes.
Quelques-unes proviennent d’écrivains catholiques qui se présentent munis, a priori, d’un Absolu, c’est-à-dire qui commencent par s’entraver les jambes avant de marcher et qui s’appuient sur une légende dont la science et notre bon sens nous démontrent l’inanité. […] Mais malgré son ferme dessein de progresser dans la mystique, Durtal n’est pas heureux ; la sécheresse de son âme le désole ; il voudrait vivre à l’état d’extase perpétuelle, conquérir l’Absolu à force d’extravagances. […] Admirable instrument de police, de despotisme absolu, religion de la mort que l’idée de charité a pu seule faire tolérer, mais que le besoin de justice emportera forcément. […] Supposons que le rêve de Nietzsche se réalise, que les plus intelligents, les plus volontaires d’entre les hommes se donnent pour but la création de quelques types où s’absorberaient toutes les énergies de l’espèce au détriment absolu du grand nombre. […] Liberté On dit : « Vous avez tort d’opposer sans cesse l’Absolu aux divers systèmes qui tentèrent et qui tentent d’appliquer, avec les tempéraments obligés, l’idée de justice à la vie sociale.
Son besoin de vérité, de vérité absolue, que les choses ont déçu, va se tourner vers leur reflet en lui-même. […] Eh bien, la formidable originalité de Proust dans son analyse de l’amour est, comme l’a remarqué très justement, le premier, Edmond Jaloux, d’avoir conçu ce sentiment comme purement subjectif : Faire entrer le relatif dans la conception de l’amour, observe Jaloux, et l’affranchir de ce mythe de l’absolu dont elle dépendait jusqu’ici aura été un des résultats essentiels obtenus par Proust 50. […] L’amour est tout naturellement producteur d’absolu ; il a besoin d’absolu ; c’est une puissance si grande qu’elle prend spontanément une sorte de vertu métaphysique et qu’elle transpose le sujet qui l’éprouve dans une autre réalité, plus grande, plus profonde et dont il lui est naturellement impossible de douter qu’elle lui soit extérieure. […] Et en effet la relativité que Proust introduit dans ce domaine jusqu’ici encombré de conceptions absolues, elle s’étend à tout ce qu’il a abordé, étudié. […] Et je ne nie pas absolument qu’il n’y ait, en effet, quelque chose de sacrilège dans le regard dont Proust nous a doués pour contempler et analyser un sentiment si proche de notre âme, si mélangé à nos aspirations vers l’absolu, si religieux, à certains égards, dans son fond.
L’un est (en philosophie) un critique acharné de sévérité absolue. […] Comme ses ancêtres il voudrait être le roi, et comme ses ancêtres un roi absolu. […] En ce sens Dieu est vraiment un absolu, un être absolu, un summum, un maximum, et un optimum métaphysique. […] Il se fixe en un point d’absolu et de perfection. […] Dans un système clos et dans un système de compression mutuelle il n’y a pas de positif absolu et il n’y a pas de négatif absolu.
En cas de nécessité absolue, ou en pays hérétique, ils allaient à l’auberge : mais Dieu sait ce qu’étaient les auberges d’Allemagne et d’Italie. […] Mais la difficulté n’est pas avec Dieu : entre le catholique et son Dieu, il y a l’Église, à qui il doit une absolue croyance et soumission. […] Il faut nous garder des affirmations absolues et téméraires, quand la vérité psychologique des caractères dessinés par un auteur ne nous apparaît pas, quand ils choquent notre conception familière. […] Mais je signalerai surtout la vérité que cet essai de roman dégage avec éclat : l’absolue impossibilité où Montesquieu se trouve de composer, c’est-à-dire au fond l’absolue impuissance à synthétiser qui est pour ce brillant esprit le revers et la rançon de sa puissance analytique. […] Les signes prennent une valeur absolue et empêchent de songer aux choses.
Si donc l’aphorisme : Toutes les modes sont charmantes, vous choque comme trop absolu, dites, et vous serez sûr de ne pas vous tromper : Toutes furent légitimement charmantes. […] Il faut rendre à Courbet cette justice, qu’il n’a pas peu contribué à rétablir le goût de la simplicité et de la franchise, et l’amour désintéressé, absolu, de la peinture. […] De la supériorité absolue de Périclès. […] Où donc le maître a-t-il puisé ce chant furieux de la chair, cette connaissance absolue de la partie diabolique de l’homme ? […] Ceci est déjà une considération importante, qui témoigne d’une connaissance absolue de tout le possible de la poésie moderne.
C’était une illusion : en réalité, cet homme grave, aux opinions arrêtées, aux allures de tyranneau du xve siècle, n’était point maître dans son ménage, et sa femme le tenait dans un état d’absolue dépendance. […] À cela on peut répondre qu’il n’y a rien de plus humble que la prétention à l’observation des faits seulement, et que l’essai de les rendre dans leur vérité. » Outre cette sincérité absolue dans l’observation et dans l’exécution, F. […] C’est parce qu’il les a acceptés tels qu’ils sont, avec leurs splendeurs et leurs mensonges, avec la foule d’erreurs qu’ils révèlent sous leur apparence d’absolue vérité, avec leur simplicité attirante et trompeuse, qu’il s’est trouvé en continuelle communion avec la foule. […] Sans entrer dans la discussion de cette théorie, il est certain que la forme tranchante et absolue qu’elle revêt sous la plume de M. […] La première vérité — et peut-être la seule — qu’il soit possible de constater, c’est qu’en aucun domaine les affirmations absolues ne sont probantes ; et en s’avançant, comme il le fait surtout, sur un terrain aussi personnel que celui de l’art, M.
Le premier résultat de la loi de continuité, c’est qu’entre les faits physiologiques et les faits psychologiques il n’y a point de ligne précise de démarcation, et que toute distinction absolue est illusoire. […] Cette distinction n’est possible qu’approximativement et n’est vraie qu’en gros ; elle n’a rien de tranché ni d’absolu ; la loi de continuité ne souffre pas d’exceptions. […] Quand bien même celle distinction absolue existerait entre la plus haute vie psychique et la vie physique (et nous verrons prochainement les raisons qu’il y a d’en douter), il n’en serait pas moins vrai que la vie psychique, dans ses hauts et bas degrés, ne se distingue pas ainsi de l’autre ; mais que cette distinction ne se produit que dans le cours de cette progression par laquelle la vie, en général, atteint ses formes les plus parfaites143. » Ainsi donc, les deux grandes divisions de la vie consistent, l’une en une correspondance à la fois simultanée et successive, l’autre en une correspondance successive seulement. […] « Les actions vitales qui sont l’objet de la psychologie, quoiqu’elles se distinguent de toutes les autres par leur tendance à prendre la forme d’une simple série, n’atteignent jamais cette forme d’une manière absolue. » Au début, les diverses manifestations de l’activité mentale sont plutôt simultanées que successives, plus physiques par conséquent que psychologiques.
Mais la nécessité me contraint : il est dangereux d’enfreindre l’ordre du Père. » — Et avec une lourde insistance qui accroît à son insu le supplice, il dénombre longuement au Titan les souffrances qu’il va endurer : — Ce seront d’abord l’isolement absolu, l’angoisse incurable ; l’insomnie sans trêve, les cris sans écho ; puis les ardeurs du soleil et les sueurs froides de la nuit qui, tour à tour, brûleront et glaceront sa chair : pour torture suprême, tout mouvement entravé, nul moyen de se retourner sur son lit sinistre ; l’immobilité dans la convulsion. — La sentence est dure, et les remontrances qu’Héphestos y mêle doivent la rendre plus odieuse encore au patient. […] Toujours présent et toujours vivant aux yeux de leurs riverains, il avait usurpé bientôt la royauté absolue des ondes. […] Ce qu’il lui prêche, c’est la soumission absolue, l’amende honorable, le recours en grâce. […] La conception de dieux absolus, éternellement parfaits et immuables, était étrangère à la race hellène.
Bergson se fait une idée mystique de cette durée pure, où il veut voir une hétérogénéité absolue d’états purement qualitatifs, sans intensité, sans rapport à l’espace, sans loi contraignante ; ce n’est plus là, sans doute, la liberté intemporelle de Kant, mais c’est une liberté temporelle, une succession imprévisible dans le temps de qualités toujours nouvelles, non contenues dans leurs antécédents. […] Bergson veut faire de l’espace l’homogénéité absolue, et de la durée vraie une hétérogénéité absolue. […] Ce serait l’hétérogénéité pure. » — Cette hétérogénéité absolue est, selon nous, inconcevable et ne serait pas plus le temps qu’autre chose.
Que l’Empereur exerce sur moi la tyrannie la plus absolue, je m’en console : il a sur moi les droits que donnent le génie et la puissance. […] Mais la volonté absolue, qui allait se briser contre la nature du Nord, n’aimait pas qu’on lui représentât ce qui en était, ni qu’on l’avertît trop de ce qui contrariait ses desseins.
Et lorsque dans leurs idées de réforme, ils ont décidé de revenir à l’antiquité grecque et romaine, toujours fidèles à cette logique incomplète du bon sens qui n’ose pousser au bout des choses, ils se tiennent aux Romains de préférence aux Grecs ; et le siècle d’Auguste leur présente au premier aspect le type absolu du beau. […] Plus d’une fois, dans la suite de ces volumes, on trouvera des modifications apportées à cette théorie trop absolue que je donnais ici de la métaphore.
Mallet voudrait donc qu’en redoublant d’habileté et d’activité militaire, et en laissant les vieilles lenteurs stratégiques qui ont été si funestes, on proclamât en même temps, par une manifestation publique éclatante, qu’on ne va pas faire la guerre indistinctement à tout ce qui a trempé dans la Révolution ; il voudrait qu’on ne la déclarât, et à titre de guerre sociale, qu’à la Convention et au jacobinisme, qu’on ne proposât à la France que le rétablissement de la royauté, en laissant à toutes les nuances de royalistes, et même aux plus constitutionnels d’entre eux, le libre accès du retour ; en un mot, qu’on fît tout pour déraciner des esprits cette idée que c’est la cause des rois absolus qu’on maintient et qu’on veut faire prévaloir. […] Dans ces citations fréquentes que je me plais à faire des plus fortes pensées de quelques publicistes d’autrefois, je n’ai point la prétention d’ailleurs de proposer des recettes directes pour nos maux et nos inquiétudes d’aujourd’hui ; il n’est point de telles recettes souveraines. — « L’art de gouverner, disait très bien l’ancien Portalis dans une lettre à Mallet, n’est point une théorie métaphysique et absolue.
Napoléon (on n’a pas tous les jours des feuilletonistes de ce calibre-là), entrant dans l’analyse de la pièce, remarque qu’en restant dans les données de l’histoire et de la tradition, l’auteur aurait pu imprimer à sa tragédie une force et une couleur dramatique qui lui manquent entièrement : Le caractère de Philippe le Bel, pense-t-il, prince violent, impétueux, emporté dans toutes ses passions, absolu dans toutes ses volontés, implacable dans ses ressentiments et jaloux jusqu’à l’excès de son autorité, pouvait être théâtral, et ce caractère eût été conforme à l’histoire. […] Trois fois et en trois rencontres, je surprends chez Raynouard la même faute de raisonnement, le même faux pli : une première fois, par rapport à la prétendue innocence absolue des Templiers ; une seconde fois, par rapport à la prétendue universalité de la langue romane primitive ; une troisième fois, par rapport à la prétendue permanence ininterrompue des institutions municipales.
« Il y a plus de douze cents ans que la France a des rois, dit Retz ; mais ces rois n’ont pas toujours été absolus au point qu’ils le sont. » Et dans un résumé rapide et brillant, il cherche à montrer que si la monarchie française n’a jamais été réglée et limitée par des lois écrites, par des chartes, comme les royautés d’Angleterre et d’Aragon, il avait toutefois existé dans les temps anciens un sage milieu « que nos pères avoient trouvé entre la licence des rois et le libertinage des peuples ». […] La domination de Richelieu avait été si forte et si absolue, la prostration qui en était résultée dans tout le corps politique avait été telle, qu’il n’avait pas fallu moins de quatre ou cinq ans pour que la réaction commençât à se faire sentir, pour que les organes publics qu’il avait opprimés reprissent leur ressort et cherchassent à se réparer ; et encore ils ne le firent, comme il arrive d’ordinaire, qu’à l’occasion de mesures toutes particulières qui les irritaient personnellement.
En un mot, Richelieu était porté à faire seul la besogne des autres plutôt qu’à laisser personne empiéter sur la sienne et sur sa direction absolue. […] Cette mission lui convenait fort ; mais les propositions de la reine qui lui vinrent par le maréchal d’Ancre l’emportèrent : « Outre qu’il ne m’était pas honnêtement permis, dit-il, de délibérer en cette occasion, où la volonté d’une puissance supérieure me paraissait absolue, j’avoue qu’il y a peu de jeunes gens qui puissent refuser l’éclat d’une charge qui promet faveur et emploi tout ensemble. » En entrant au Conseil, il y devient du premier jour le personnage important ; il a, comme nous dirions, le portefeuille de la Guerre et celui des Affaires étrangères, de plus, la préséance sur ses collègues comme évêque ; et tout cela à trente et un ans.