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210. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

« Voiture n’a pas empêché Molière. Dorat et le marquis de Bièvre sont les contemporains de Jean-Jacques. » (Mais où est le Molière qui a suivi les Voiture de la décadence de l’antiquité, quel est le Jean-Jacques, qui d’ailleurs n’était qu’un rhéteur aussi, qui ait été le contemporain des Dorat et des de Bièvre de cette vieille société païenne ?)

211. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Le langage d’Auguste dans Cinna lui paraît emphatique, et il met la prose de Molière, tout en ne la trouvant pas assez naturelle, au-dessus de ses vers, « où il a été gêné, disait-il, par la versification française168. » Mais la rime n’est pas la seule gêne pour notre poésie ; il en est une autre, plus incommode peut-être : ce sont nos habitudes de langage direct, c’est la rigueur de notre syntaxe, c’est cette place fatale que chaque mot occupe dans la phrase, « ce qui exclut toute suspension de l’esprit, toute attention, toute surprise, toute variété, et souvent toute magnifique cadence. » Pour y remédier, Fénelon propose l’inversion ; il en fait valoir fort ingénieusement les avantages. […] Ces exemples d’inversions gracieuses, tirées de Virgile, ne prouvent rien ; car que voulait Virgile par l’inversion, sinon ce que veulent, en menant leurs lecteurs droit au sens par l’ordre naturel et logique des mots, Corneille, Racine et Molière ? […] Voit-on Molière trouver notre poésie tyrannique ? […] Si, au contraire, dans le temps de Molière et de Bossuet, quelqu’un n’est pas tout à fait content de notre langue ou s’avise de regretter ce qui lui manque, c’est un écrivain excellent, il est vrai, mais qui ne l’est pas jusqu’à ce degré suprême, c’est La Bruyère169; c’est aussi Fénelon, que je consens à placer bien haut, pourvu que ce soit au-dessous de Molière et de Bossuet. […] Le génie de Molière n’a pas pu désarmer Bossuet, jugeant le comédien avec la sévérité des canons ; Fénelon, sans songer à la profession de Molière, loue l’Amphitryon et admire l’Avare.

212. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Barbier, Jules (1825-1901) »

. — L’Ombre de Molière, à-propos en un acte (1849). — Amour et Bergère, comédie en un acte, en vers (1849). — André Chénier, trois actes en vers (1849). — Jenny l’Ouvrière, drame en cinq actes, avec M. 

213. (1778) De la littérature et des littérateurs suivi d’un Nouvel examen sur la tragédie françoise pp. -158

L’homme vraiment précieux est donc Molière : c’est l’Auteur Dramatique dont les François peuvent réellement s’enorgueillir. […] Par exemple, au lieu de la peinture d’un homme avare, Molière nous a donné une peinture fantasque de la passion de l’avarice. […] En peignant cette passion primitive, & ne la mélangeant point, Molière a ôté au tableau les ombres & les lumieres dont l’accord seul produit la force & la vérité. […] Molière, au contraire, avoit arrêté ses regards sur mille petits traits distinctifs, & les fixoit sur tel ou tel individu. […] L’intention de Molière, dans cette, pièce a sûrement été pure ; mais on ne peut s’empêcher néanmoins d’avouer qu’elle paroît équivoque, à l’examen.

214. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Si estimé pour sa prose, soit dans ses nouvelles, soit dans son incomparable roman, Cervantes, moins goûté du public pour ses vers, eut toujours un faible pour la poésie pure : c’est ainsi que le grand comique Molière avait, on le sait, un penchant tout particulier et assez malheureux pour le genre noble et romanesque. […] Prenons une comparaison bien sensible pour nous : en faisant justice des Précieuses ridicules, en faisant main basse sur leur faux jargon avec sa verve la plus vigoureuse, Molière ne laissait pas à ce qu’on appelait les bonnes précieuses la ressource de se distinguer des autres et de leur survivre. Qu’aurait-on dit de Molière si, au lendemain de sa pièce comique, il avait essayé lui-même de montrer les estimables précieuses sur la scène pour les y faire goûter et applaudir ?

215. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Mais, de plus, Boileau et Racine, et La Fontaine, et Molière étaient des artistes : ce que n’étaient ni les Chapelain, ni les Scudéry, ni les Desmarets, ni les Cotin, ni tous les prétentieux rédacteurs d’emphatiques épopées, ni tous les ingénieux rimeurs de petits vers, ni tous les pédants qui estimaient que l’usage des règles, par une vertu secrète, suffit sans la matière et sans le génie à la perfection des œuvres, ni enfin tous les inspirés qui écrivaient en courant, sans réflexion et sans retouches, au hasard de leur fantaisie. Au contraire Racine, Molière, La Fontaine ont tous dans l’esprit un idéal d’art, un type formel où la nature s’exprime dans son énergie et son caractère, mais de plus se revêt d’une absolue beauté. […] Joignons-y Molière, quoiqu’il semble devoir plus à sa droiture d’instinct et de génie qu’à l’imitation des anciens : il les connaissait pourtant, il les étudiait, il les aimait, même ce robuste Plaute qui répugnait à la délicatesse de son temps.

216. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

Sur Corneille, sur Racine, sur Molière, Geoffroy a des remarques excellentes ; il marque en plein les traits vrais de leur génie. Il aime Molière, sa franchise, son naturel, sa gaieté ; à défaut d’autres, ce sont là les vertus de Geoffroy. […] Il me semble entendre un de ces personnages du troisième ordre dans Molière, un de ces bons bourgeois qui s’en donnent à gorge chaude, et à qui la gueule, comme on disait alors, ne fait pas faute.

217. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

Nous admettons, comme lui, que Corneille, Racine, Molière et La Fontaine ont écrit des chefs-d’œuvre, malgré leur rythmique, « bien qu’ils n’eussent qu’un mauvais outil à leur disposition ». […] Les objections contre le vers libre La première consiste à dire : « Le vers libre n’est pas une nouveauté dans la poésie française ; on s’étonne des étonnements accueillant une chose si ancienne ; ce fut le vers de La Fontaine, et Molière l’utilisa à merveille. » Il serait doux de pouvoir se réclamer de si glorieux patrons, mais malheureusement la chose est de tous points inexacte ; les poètes le savent trop, pour qu’on le leur développe, ils l’ont toujours pressenti d’instinct. […] Mais Molière et La Fontaine ne voyaient dans ce qu’il serait plus juste de dénommer chez eux le vers familier, qu’un choix de mètres, joliets, souples, à cadence soigneusement distincte de celle du vers héroïque, de l’alexandrin en longues traînes de périodes ; c’est par convenance, respects des opinions, et même des fantômes de préjugés de leurs délicats qu’ils furent amenés à varier leur jeu toujours sans dissonances.

218. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

Shakespeare et Molière n’ont pas chicané non plus avec le détail révoltant de l’expression quand ils ont peint, l’un, son Iago, l’autre, son Tartuffe. […] Un jour même (l’anecdote est connue), Molière le rappela à la marge de son Tartuffe, en regard d’un vers par trop odieux, et Baudelaire a eu la faiblesse… ou la précaution de Molière.

219. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

« Pour des vers faits dans la province, ces vers-là sont fort beaux », disait Molière, que Gresset devait copier outrageusement, en composant ce vers facile et célèbre : Elle a d’assez beaux yeux pour des yeux de province. On sait d’ailleurs, que M. de Pourceaugnac, la comtesse d’Escarbagnas, native d’Angoulême, George Dandin, signalé comme un « riche paysan, mari d’Angélique », et d’autres personnages de Molière, montrent bien quelle était l’opinion du comédien et mieux encore celle de son temps sur les provinciaux. […] Pour Molière, pour madame de Sévigné, pour notre xviie et notre xviiie  siècle, la grande infériorité du provincial était évidemment d’ignorer la cour, la mode, les belles manières et le bel esprit de Paris.

220. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Paté, Lucien (1845-1939) »

. — À Molière (1876). — À Corneille (1876). — Poésies (1879). — La Statue de Niepce (1885). — À François Rude (1886). — Le Centenaire de Lamartine (1890). — Poèmes de Bourgogne (1889). — Le Sol sacré (1896).

221. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Le Barillier, Berthe-Corinne (1868-1927) »

. — Aristophane et Molière (1896). — Le Double Joug (1896). — Sur la pente (1896). — Les Trois Filles de Pieter Waldorp (1897).

222. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIII » pp. 109-125

Elle fit son entrée dans le monde dans cette même année 1654, où l’abbé d’Aubignac et Molière faisaient la guerre aux précieuses, l’un à Paris, l’autre en province. […] Je remarque ces circonstances pour que le lecteur ait une idée juste de l’état de la maison de Rambouillet depuis plusieurs années, Lorsque Molière mit ses Précieuses au théâtre de la capitale.

223. (1799) Dialogue entre la Poésie et la Philosophie [posth.]

Je pense que Molière, indépendamment de ses autres qualités inestimables dont il est inutile de parler, en a une dont on ne parle pas assez, et dont on ne lui tient pas assez de compte ; c’est d’être celui de nos écrivains où l’on trouve le plus la vraie langue française, les tours et la manière qui lui sont propres ; que les ouvrages de Despréaux sont le code du bon goût ; que La Fontaine a donné à la langue un tour naïf et original ; et qu’enfin Quinault, méprisé par Despréaux si injustement, est non seulement le plus naturel et le plus tendre de nos poètes, mais le plus pur et le plus correct de tous, mérite dont on ne lui sait pas assez de gré, et qu’on n’a peut-être pas assez remarqué en lui. […] les premiers philosophes ont été poètes ; Horace est le bréviaire des philosophes ; Molière, par sa connaissance des hommes et du cœur humain, Corneille, par la force du raisonnement, étaient ou grands philosophes, ou faits pour l’être.

224. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

. —  En quoi il reste au-dessous de Molière. —  Manque de philosophie supérieure et de gaieté comique. —  Son imagination et sa fantaisie. —  L’Entrepôt de nouvelles et la Fête de Cynthia […] On n’exige pas qu’un poëte étudie de pareilles âmes ; il suffit qu’il découvre en elles trois ou quatre traits dominants ; peu importe si elles s’offrent toujours dans la même attitude ; elles font rire comme la comtesse d’Escarbagnas ou tel Fâcheux de Molière ; on ne leur demande rien de plus. […] Pour la première fois nous voyons un plan suivi, combiné, une intrigue complète qui a son commencement, son milieu et sa fin, des actions partielles bien agencées, bien rattachées, un intérêt qui croît et n’est jamais suspendu, une vérité dominante que tous les événements concourent à prouver, une idée maîtresse que tous les personnages concourent à mettre en lumière, bref, un art semblable à celui que Molière et Racine vont appliquer et enseigner. […] Aucun écrivain, non pas même Molière, n’a percé si avant par-dessous le simulacre de bon sens et de logique dont se revêt la machine humaine pour démêler les puissances brutes qui composent sa substance et son ressort. […] Comparez M. de Pourceaugnac, dans Molière.

225. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DÉSAUGIERS. » pp. 39-77

Mais il ne tint pas à l’épreuve, et dès le lendemain sa vocation l’emportait : il faisait une comédie en un acte et en vers qui réussissait au boulevard ; il arrangeait en opéra-comique le Médecin malgré lui de Molière, dont son père faisait la musique, et qu’on jouait à Feydeau en 1791. […] Molière, jeune, les avait faites aussi. […] Il y eut ces gais dîners de la jeunesse de Boileau et de Racine, où faisaient assaut La Fontaine et Molière : Chapelle n’y laissait pas dormir le refrain. […] Comme on se figure que Molière y aurait ri26 !

226. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Quels amis valent ces livres qui sont là toujours prêts à répondre à notre appel, et qui ne nous abandonnent ni dans le malheur, ni dans la prospérité Nous n’avons qu’à tendre la main, et aussitôt Homère, Virgile, Horace, Corneille, Molière, Racine, nous enivrent tour à tour des parfums de leur poésie. […] « Le grand art du débit est toujours d’être juste, « Molière était comique en déclamant Auguste ; « Et, n’étant pas Molière, il doit m’être permis « De craindre, qu’en prêtant à rire à vos amis, « Je ne rende à vos vers un dangereux service. […] « Et si, par un défi vous vouliez me confondre, « Avec Molière alors j’aurais à vous répondre « Je pourrais, par malheur, lire aussi mal que vous, « Mais je me garderais de le montrer à tous. » Matinées littéraires, Rue Duphot, 12.

227. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tiercelin, Louis (1849-1915) »

. — Le Rire de Molière, comédie en vers (1888). — La Mort de Brizeux (1888). — Le Parnasse breton contemporain (1889). — Le Grand Ferré (1891). — Les Cloches, poésies (1892)

228. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Trimouillat, Pierre (1858-1929) »

Trimouillat est un des bons poètes-chansonniers qui écrivent en français, et s’il emploie dans ses poèmes modernistes quelques formules un peu trop xviie  siècle, c’est à Molière qu’il les doit ; on ne peut donc lui en faire un crime.

229. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Boileau »

Tandis que la postérité acceptait, avec des acclamations unanimes, la gloire des Corneille, des Molière, des Racine, des La Fontaine, on discutait sans cesse, on revisait avec une singulière rigueur les titres de Boileau au génie poétique ; et il n’a guère tenu à Fontenelle, à d’Alembert, à Helvétius, à Condillac, à Marmontel, et par instants à Voltaire lui-même, que cette grande renommée classique ne fût entamée. […] Dès 1664, c’est-à-dire à l’âge de vingt-huit ans, nous le voyons intimement lié avec tout ce que la littérature du temps a de plus illustre, avec La Fontaine et Molière déjà célèbres, avec Racine dont il devient le guide et le conseiller. […] Il nous est impossible pourtant de ne pas préférer le style de Regnier ou de Molière.

230. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

La Bruyère était moins profond que Molière, Lesage moins profond que La Bruyère : Montesquieu est plus loin de Lesage que Lesage ne l’est de Molière. […] Sorel, peint la République et la Monarchie comme Molière a peint l’Avare et le Misanthrope. » Il y trouve des avantages : d’abord il utilisait ainsi l’histoire selon son goût et selon le goût de ses contemporains.

231. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon. » pp. 270-292

Et ce secret, qu’il cherche et qu’il arrache de toutes parts, jusque dans les entrailles, il nous le livre et nous l’étale, je le répète, dans un langage parlant, animé, échauffé jusqu’à la furie, palpitant de joie ou de colère, et qui n’est autre souvent que celui qu’on se figurerait d’un Molière faisant sa pâture de l’histoire. […] Demandez ce secret et cet art de déshabiller les gens et de les retourner du dedans au-dehors, bien moins encore aux historiens proprement dits qu’aux moralistes et aux peintres de la nature humaine, sous quelque forme qu’ils en aient donné le tableau, et s’appelassent-ils Molière, Cervantes ou Shakespeare, tout aussi bien que Tacite. […] Si Saint-Simon n’a pu faire rendre si tard à la noblesse française une influence politique et aristocratique qui n’était point sans doute dans les conditions de notre génie national et dans nos destinées, il a fait pour elle tout ce qu’il y a de mieux après l’action, il lui a donné, en sa propre personne, le plus grand écrivain qu’elle ait jamais porté, la plume la plus fière, la plus libre, la plus honnête, la plus vigoureusement trempée et la plus éblouissante, et ce duc et pair dont on souriait alors se trouve être aujourd’hui, entre Molière et Bossuet (un peu au-dessous, je le sais, mais entre les deux certainement), une des premières gloires de la France27.

232. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

Et je leur ai dit : Sortez de l’Italie, et passez chez mon peuple que je me suis élu dans la plénitude de ma bonté, et dans le pays que je compte d’habiter dorénavant, et à qui j’ai dit dans ma clémence : Tu seras la patrie de tous les talents… Et je les ai tous rassemblés dans un siècle, et on l’appelle le siècle de Louis XIV jusqu’à ce jour, en réminiscence de tous les grands hommes que je t’ai donnés, à commencer de Molière et de Corneille qu’on nomme grands, jusqu’à La Fare et Chaulieu qu’on nomme négligés. […]  » Une seule petite incorrection : « à commencer de Molière », au lieu de « commencer par Molière… » laissait entrevoir la trace d’une plume étrangère.

233. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

C’est ce que sont saint Paul au premier siècle, Tacite et Juvénal au deuxième, Dante au treizième, Shakespeare au seizième, Milton et Molière au dix-septième. […] Molière aussi. […] Nous ne leur demandons pas autre chose. » Remarquez l’étendue et l’envergure de ce mot : les poëtes, qui comprend Linus, Musée, Orphée, Homère, Job, Hésiode, Moïse, Daniel, Amos, Ézéchiel, Isaïe, Jérémie, Ésope, David, Salomon, Eschyle, Sophocle, Euripide, Pindare, Archiloque, Tyrtée, Stésichore, Ménandre, Platon, Asclépiade, Pythagore, Anacréon, Théocrite, Lucrèce, Plaute, Térence, Virgile, Horace, Catulle, Juvénal, Apulée, Lucain, Perse, Tibulle, Sénèque, Pétrarque, Ossian, Saadi, Ferdousi, Dante, Cervantes, Calderon, Lope de Vega, Chaucer, Shakespeare, Camoëns, Marot, Ronsard, Régnier, Agrippa d’Aubigné, Malherbe, Segrais, Racan, Milton, Pierre Corneille, Molière, Racine, Boileau, La Fontaine, Fontenelle, Regnard, Lesage, Swift, Voltaire, Diderot, Beaumarchais, Sedaine, Jean-Jacques Rousseau, André Chénier, Klopstock, Lessing, Wieland, Schiller, Goethe, Hoffmann, Alfieri, Chateaubriand, Byron, Shelley, Woodsworth, Burns, Walter Scott, Balzac, Musset, Béranger, Pellico, Vigny, Dumas, George Sand, Lamartine, déclarés par l’oracle « bons à rien », et ayant l’inutilité pour excellence.

234. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre IV. L’écrivain (suite) »

Trois ou quatre hommes tout au plus ont su se développer en restant gaulois ; ce sont ceux qui, en prenant un genre gaulois, la chanson, le pamphlet, la farce, la comédie, l’ont élargi et relevé jusqu’à le faire entrer dans la grande littérature : Rabelais, Molière, La Fontaine, Voltaire et peut-être quelquefois Béranger. […] Molière, trop pressé, forcé de se plier au ton convenable, gêné par l’alexandrin monotone, n’a pas toujours atteint le style naturel.

235. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VII. La littérature française et les étrangers »

Molière offre à Goldoni l’idéal où il essaie d’élever la comédie de son pays. […] Depuis que le marquis de Luzan a mis en castillan l’Art poétique de Boileau et le Préjugé à la mode de La Chaussée, la plupart des écrivains sont afrancesados : à la comedia nationale succèdent le drame larmoyant, la tragédie pompeuse, la comédie à la façon de Molière, ou plutôt de Destouches ou de Picard580.

236. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Guizot » pp. 201-215

Guizot a bien indiqué le mariage probablement troublé de Shakespeare, son éloignement et son abandon de sa femme, le silence qu’il a gardé sur elle, le legs presque injurieux qu’il lui fait, en interligne, dans son testament, comme s’il se la rappelait tout à coup comme on se rappelle une chose oubliée ; mais il ne va pas plus loin, il ne presse pas plus fort ce point douloureux, saignant, misérablement humain et toujours le même dans tous ces grands hommes, petits par là, qu’ils s’appellent Byron, Molière ou même Shakespeare ! […] Si l’espace dont je dispose le permettait, j’aimerais, par exemple, à citer un aperçu sur la comédie que ne pouvait écrire Shakespeare en Angleterre, et que Molière a pu écrire en France, qui me paraît une de ces pages crevant d’idées où il y a certainement plus de choses qu’il n’y a de mots.

237. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Quinet est deux fois dans Molière. […] Nous sommes donc en plein jourdanisme et en plein Molière, pour expliquer que notre fille n’est pas muette.

238. (1925) Comment on devient écrivain

— Fleurant. — Mon cher, dit Molière, que je vous embrasse. […] La célébrité que Molière lui donna, lui attira la plus grande vogue, dès qu’il devint maître apothicaire. […] Il y a encore des gens qui n’aiment pas notre grand Molière. […] On s’explique que Vacquerie ait nié Racine, que Théophile Gautier n’ait pas eu le sens de Molière. […] Molière ne lui lisait pas les vers d’Alceste ; Musset a raison de dire qu’à sa place il les lui aurait lus.‌

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