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45. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Mais il m’a pénétré le cœur comme eût fait le récit d’une vie douloureuse et puissante, dite avec des mots simples et profonds… Comme vous valez mieux que moi, mon ami ! […] Je voudrais bien mériter votre affection, mais je m’aperçois de plus en plus que vous valez mieux que moi, et cela me fâche.  […] Le reste ne vaut pas la peine qu’on se donne pour manger et dormir tous les jours.  […] Vos paroles valent bien mieux et me sont bien plus utiles que les coups d’épée de mes autres amis. […] La même raison m’empêche de changer la manière générale du conte ; pour cela, il faudrait le recommencer, et il n’en vaut d’ailleurs pas la peine.

46. (1890) L’avenir de la science « XIII »

Or, il faut le reconnaître, ce n’est point par la forme que nous valons. […] Mais, en vérité, est-ce par elles-mêmes que de telles découvertes valent quelque chose ? […] Son livre ne vaudra que pour les parties où il est spécial ; mais alors pourquoi ne pas se borner à ces parties ? […] Dans l’état actuel de la littérature sanscrite, en effet, la publication et la traduction des textes valent mieux que toutes les dissertations possibles, soit sur l’histoire de l’Inde, soit sur l’authenticité et l’intégrité des ouvrages. […] quand la vie est si courte et qu’il s’y présente tant de choses sérieuses, ne vaudrait-il pas mieux prêter l’oreille aux mille voix du cœur et de l’imagination et goûter les délices du sentiment religieux, que de gaspiller ainsi une vie qui ne repasse plus et qui, si on l’a perdue, est perdue pour l’éternité ?

47. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Arsène Houssaye » pp. 271-286

Elle a la tristesse même de son impuissance à devenir vicieuse tout à fait, et cette tristesse vaut la peine qu’on l’explique. L’autre Messaline n’a que la tristesse de son inassouvissement, ce phénomène inexplicable, et qui, ne le fût-il pas, ne vaudrait pas la peine d’être expliqué. […] Arsène Houssaye, quand il s’était incarné dans le xviiie  siècle, ne valait pas, certes ! ce qu’il vaut quand il se met à plein dans son siècle à lui.

48. (1890) L’avenir de la science « XX »

Une des raisons que l’on faisait valoir tout récemment en faveur du projet pour l’achèvement du Louvre, c’est que ce serait un moyen d’occuper les artistes. Je voudrais bien savoir si Périclès fit valoir ce motif aux Athéniens, quand il s’agit de bâtir le Parthénon. […] Remarquez, en effet, que quand un homme vit de son travail intellectuel, ce n’est pas généralement sa vraie science qu’il fait valoir, mais ses qualités inférieures.

49. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

Il vaut bien, s’il ne vaut mieux, et quoiqu’il ait le bonheur d’être moins célèbre qu’eux tous, les Saisset, les Caro, les Jules Simon de la terre. […] Il oppose l’homme au gouvernement, et la justice, qui n’est pas de ce monde dans son absolu, à l’ordre, qui peut l’être et doit l’être pour que les sociétés valent quelque chose… Certes !

50. (1932) Le clavecin de Diderot

L’année précédente, Aragon avait publié « Front rouge », un poème militant écrit à la gloire de l’URSS qui vaudra à son auteur d’être inculpé en janvier 1932. […] L’on eut donc un tam-tam qui valait bien les histoires de colliers perdus, dans les taxis, par des vedettes en mal de réclame. […] Sans doute les opinions des laïcs officiels et semi-officiels ne valaient-elles pas mieux que les balivernes du mêle-tout enjuponné. […] On ne saurait les comparer qu’aux seuls insectes dont la prudence mimétique leur vaut de s’identifier au milieu. […] Or, justement, parce que rien, en comparaison de cette minute, ne vaut, ne peut valoir, tout de suite, s’était terni l’or des âges d’or.

51. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

Par exemple… (mais il va sans dire que mes exemples n’ont aucun prix : je les improvise et ils valent exactement ce qu’ils me coûtent), on me donne pudeur et innocence. […] Cherchez l’antithèse, et vous obtiendrez cette maxime, qui vous a un air fin et qui en vaut une autre : L’amitié naît des confidences, et elle en meurt. […] La preuve qu’il faut, en effet, déjà beaucoup d’esprit pour écrire des maximes qui soient simplement agréables et piquantes, c’est que toutes celles qu’il vient d’improviser avec une prétentieuse négligence ne valent pas le diable. […] Le reste de sa dissertation revient à dire qu’un livre de maximes vaut exactement ce que vaut l’esprit de l’auteur : nous n’avions pas besoin du secours de ses lumières pour nous en aviser.

52. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Qui leur a montré, par-delà les limites et sous le voile de l’univers, un Dieu caché, mais partout présent, un Dieu qui a fait le monde avec poids et mesure, et qui ne cesse de veiller sur son ouvrage, un Dieu qui a fait l’homme parce qu’il n’a pas voulu retenir dans la solitude inaccessible de son être ses perfections les plus augustes, parce qu’il a voulu communiquer et répandre son intelligence, et, ce qui vaut mieux, sa justice, et, ce qui vaut mieux encore, sa bonté ? […] Quelques lignes auparavant, vous retrouvez encore ce mélange d’élévation et d’aisance qui, depuis le dix-septième siècle, semblait perdu : « un Dieu qui a fait l’homme, parce qu’il n’a pas voulu retenir dans la solitude inaccessible de son être ses perfections les plus augustes, parce qu’il a voulu communiquer et répandre son intelligence, et, ce qui vaut mieux, sa justice, et, ce qui vaut mieux encore, sa bonté. » La première phrase touche au sublime ; la seconde descend presque jusqu’au laisser-aller. […] Imputer est un mot de jurisprudence qui n’est pas net ; il vaut mieux dire : « Nos actions voulues sont les seules dont nous nous jugions responsables. » Responsable est une métaphore, c’est-à-dire un terme inexact et vague.

53. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Vous proclamez, tous, les Flamands sublimes, vos modèles valent les leurs : travaillez. […] Dans la réalité rien ne choque ; au soleil, les guenilles valent les vêtements impériaux. […] Vacquerie vaut le torse de M.  […] Cela ne vaut-il pas mieux que toutes les mascarades sentimentales d’à présent ? […] Vacquerie vaut le torse de M. 

54. (1897) Aspects pp. -215

Cette manière d’agir m’a valu de précieuses sympathies. Elle m’a valu aussi des inimitiés. […] Cette fréquentation des idées et des chefs-d’œuvre te valut ton culte envers la vie. […] N’y a-t-il pas des livres de vers qui valent toutes les œuvres en prose ? […] Il faut accepter l’existence qui nous vaut toutes douleurs et aussi toutes joies.

55. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Avisé, bien « emparlé », il vaut dans le conseil plus encore que pour l’action : ambassadeur et orateur des croisés, conseiller intime des grands chefs et des empereurs, c’est un diplomate, un politique. […] Il ne faut pas qu’on sache que cet abbé des Vaux de Cernay qui ne veut pas aller ailleurs qu’en Terre Sainte ou en Egypte, parle au nom du pape, et avoué par lui : il faut qu’on croie que Home n’a eu que des pardons et de la joie pour ses enfants qui lui ont rendu l’empire grec. Après tout, cet abbé des Vaux de Cernay et tous ceux qui pensaient comme lui, n’avaient pas si tort, ce nous semble : Villehardouin a trouvé le biais qui les condamne. […] J’ai déjà parlé de ses dialogues : ses tableaux ne valent pas moins. […] Nul art ne vaut mieux que ce naturel, et c’est de pareilles sensations qu’un autre Champenois, quatre siècles plus tard, fera l’étoffe de sa poésie : Joinville a ce qui manque aux auteurs de fabliaux, pour annoncer La Fontaine.

56. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

À part quelques raffinements d’énervé dont il n’eut jamais besoin, Attila vaut les Césars, comme il vaut les conquérants tartares, comme il vaut les sultans, en libertinage à outrance, en despotisme de goût, en difficulté d’assouvissement. […] le monde, qu’il ne voit plus, prend dans sa tête les couleurs furieuses de l’impossible, qui valent mieux que tous les outre-mers et tous les vermillons ! […] Or l’histoire, c’est une vision, en définitive ; et d’ici bien longtemps, étant donné l’état nécessairement vacillant des certitudes humaines, deviner les faits de l’histoire, qui serait le dernier acte de la sagacité historique, ne vaudra pas aux yeux des hommes le talent de les raconter. […] Quand ces parvenus se mésalliaient en épousant des filles d’impératrices, quand ces Barbares, qui pouvaient tout, faisaient des empereurs et n’osaient l’être, cela prouvait qu’ils n’étaient que de grands imbéciles de Barbares, mais cela ne prouvait pas qu’il y eût en ces Romains dégradés, qui ne valaient même pas le respect bête d’un Barbare, la virtualité mystérieuse et éternelle que M. 

57. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

Il n’est au pouvoir d’aucun événement de rien retrancher aux plaisirs que nous a valu la bonté. […] La bienfaisance remplit le cœur comme l’étude occupe l’esprit ; le plaisir de sa propre perfectibilité s’y trouve également, l’indépendance des autres, le constant usage de ses facultés ; mais ce qu’il y a de sensible dans tout ce qui tient à l’âme, fait de l’exercice de la bonté une jouissance qui peut seule suppléer au vide que les passions laissent après elles ; elles ne peuvent se rabattre sur des objets d’un ordre inférieur, et l’abime que ces volcans ont creusé, ne saurait être comblé que par des sentiments actifs et doux qui transportent hors de vous-même l’objet de vos pensées, et vous apprennent à considérer votre vie sous le rapport de ce qu’elle vaut aux autres et non à soi ; c’est la ressource, la consolation la plus analogue aux caractères passionnés, qui conservent toujours quelques traces des mouvements qu’ils ont domptés. […] Almont ne pense point à faire valoir sa prudence en vous conseillant ; sans vous égarer, il cherche à vous distraire ; il vous observe pour vous soulager ; il ne veut connaître les hommes, que pour étudier comment on les console.

58. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre I. La poésie »

Ne vaut-il pas mieux s’en tenir à la prose ? […] Il n’y avait plus de poètes, plus d’artistes : ne valait-il pas mieux laisser le vers et les formes d’art, et écrire en bonne, simple et franche prose ? […] Ils eurent pour eux Trublet et Terrasson ; c’est peu ; mais ils eurent Duclos, ce qui vaut mieux, et ils eurent Montesquieu ou Buffon, ce qui est considérable.

59. (1892) Boileau « Chapitre V. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » (Fin) » pp. 121-155

En autres termes, toutes les intentions que nous avons vu que l’auteur devait avoir, ne valent qu’effectivement réalisées, et la conception ne saurait se séparer de l’exécution. […] Il ne vaudrait pas la peine de le remarquer, si cette observation banale ne nous donnait la clef de l’omission de la Fable et de La Fontaine. […] Il semble même que ce sage esprit pousse un peu bien loin l’enthousiasme, quand il écrit ce vers : Un sonnet sans défauts vaut seul un long poème. […] Enfin, quand il s’autorise du Misanthrope pour condamner Scapin, c’était le cas de se rappeler Qu’un sonnet sans défauts vaut seul un long poème. […] On lit que la comédie « badine noblement » et que Molière trop grossier ne vaut pas l’exquis et fin Térence.

60. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Ensuite il se guinda de tout son effort pour composer une bonne fiction mythologique à l’éloge de Vaux ; il expliquait sa fiction dans une préface, tout au long, avec des précautions qui auraient fait honneur aux pédagogues Bossu et Rapin. […] Au reste peu importe « qui vous mange, homme ou loup ; toute panse lui paraît une à cet égard. » Il est résigné, sait ce que vaut le roi lion, quelles sont les vertus des courtisans mangeurs de gens », mais croit que les choses iront toujours de même, et qu’il faut s’y accommoder. Telle qu’elle est, la vie est « passable ». « Mieux vaut souffrir que mourir, c’est la devise des hommes. » Cette morale-là est bien gauloise ; nous plions sous l’énorme machine administrative qui nous façonne ; nous nous souvenons qu’en vain on l’a cassée, que toujours elle s’est raccommodée, et ne s’est trouvée que plus pesante ; bien plus, nous sentons que si elle se détraquait, nous ne pourrions vivre. […] Son chien fait des raisonnements fort exacts ; « mais, n’étant qu’un simple chien », on trouve, qu’ils ne valent rien, « et l’on sangle le pauvre drille. » Notre Champenois souffre très bien que les moutons soient mangés par les loups et que les sots soient dupés par les fripons ; son renard a le beau rôle.

61. (1901) La poésie et l’empirisme (L’Ermitage) pp. 245-260

. — La politique nous valut une trêve qu’on rêva bienfaisante et qui ne fit en somme, qu’aggraver la confusion. […]   Aussi bien — et c’en est comme la réciproque fatale — aussi bien, il ne vaudra qu’autant qu’il aura créé — non pas indiqué, ébauché : créé. […]   Plus complexe apparaît le cas du romancier, comme aussi le cas de l’homme de théâtre — car il vaut mieux pour l’instant les confondre, et les opposer au poète ensemble. […] Leur roman n’en sera pas moins roman, drame leur drame, — mais roman document, mais drame plaidoyer ; — et par là ils se sauveront, et par là ils vaudront encore — mais sans le moyen de l’art.

62. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Gustave Flaubert » pp. 61-75

Le livre valait mieux que les autres livres contemporains du même genre, et de plus il avait une valeur en soi. […] Elle qui, toute misérable qu’elle soit, vaut mieux que les hommes qui l’ont salie, sait se ruiner et ruiner son mari sans qu’il y paraisse à son visage, quand elle le tend aux baisers de son faible amant ! […] Madame Bovary, étudiée, scrutée, détaillée comme elle l’est, est une création supérieure, qui seule vaut à son auteur le titre conquis de romancier. […] Certes, pour peindre ainsi, il faut une main dont on soit sûr, mais la largeur vaut mieux que la finesse.

63. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Haraucourt, Edmond (1857-1941) »

Haraucourt, lui valut une place de choix parmi les nouveaux poètes. […] Le drame, pour donner d’abord mon impression d’ensemble, me paraît valoir, surtout par la facture des vers, qui sont souvent fort beaux ; la faiblesse, à mes yeux, c’est que M. 

64. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lemaître, Jules (1853-1914) »

Charles Morice J’ai dit ce que valent les vers de M. Jules Lemaître, j’ajoute qu’ils valent un peu plus que le Sully Prudhomme tendre qu’il imite, parce qu’il imite aussi Théophile Gautier.

65. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Payen, Louis (1875-1927) »

Tout coup vaille ; et la beauté de la forme vaut par elle-même.

66. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Les hommes vus de près et dans l’intérieur sont souvent pires, mais quelquefois aussi ils valent mieux que quand on ne les voit et qu’on ne les juge que d’après le monde et sur l’étiquette de la renommée. […] En m’éveillant, il vient se saisir de moi, et me serre le cœur avant que ma raison soit encore éveillée et m’ait appris la cause de ma douleur. » Tout cela est très vrai, d’un accent très senti, et vaut mieux que toutes les railleries du monde qui a commencé par en sourire, et qui a triomphé ensuite quand cette grande résolution n’a pas duré. […] Ces lettres de Lassay à la princesse sont assez jolies, mais pâles ; ce n’est point là le langage de la passion vraie : il a beau dire en dénouant et en s’éloignant : « Il vaut mieux que je meure et que vous viviez moins malheureuse. […] Il passait alors pour un homme léger, qui, avec de l’esprit, n’avait fait que des folies, qui avait obéi à des fantaisies et à des fougues, qui avait pris de grands partis sans les tenir : Impie, dévot, jaloux amant, Courtisan, héros de province, disait ou allait dire de lui la chanson ; on l’appelait le Don Quichotte moderne ; des gens qui valaient moins que lui par l’esprit et par le cœur le raillaient, et il n’y était pas insensible. […] cet homme valait un peu mieux que Saint-Simon ne nous l’a dit.

67. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 15, observations concernant la maniere dont les pieces dramatiques étoient représentées sur le théatre des anciens. De la passion que les grecs et les romains avoient pour le théatre, et de l’étude que les acteurs faisoient de leur art et des récompenses qui leur étoient données » pp. 248-264

La personne de Panurgus, ajoute Ciceron, ne vaut pas trente pistolles, mais l’éleve de Roscius vaut vingt mille écus. […] Mais le même marc d’argent qui ne valoit pas douze francs monnoïe de compte quand Budé écrivoit, vaut soixante francs marqué au coin qui avoit cours.

68. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Préface » pp. -

Et, dans ce travail qui voulait avant tout faire vivant d’après un ressouvenir encore chaud, dans ce travail jeté à la hâte sur le papier et qui n’a pas été toujours relu — vaillent que vaillent la syntaxe au petit bonheur, et le mot qui n’a pas de passeport — nous avons toujours préféré la phrase et l’expression qui émoussaient et académisaient le moins le vif de nos sensations, la fierté de nos idées.

69. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Autobiographie » pp. 169-176

Et, dans ce travail qui voulait avant tout faire vivant d’après un ressouvenir encore chaud, dans ce travail jeté à la hâte sur le papier et qui n’a pas été toujours relu — vaillent que vaillent la syntaxe au petit bonheur, et le mot qui n’a pas de passeport — nous avons toujours préféré la phrase et l’expression qui émoussaient et académisaient le moins le vif de nos sensations, la fierté de nos idées.

70. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

M. de Rohan tirait de ses abbayes, non pas 60 000 livres, mais 400 000, et M. de Brienne, le plus opulent de tous après M. de Rohan, le 24 août 1788, au moment de quitter le ministère108, envoyait prendre au « Trésor les 20 000 livres de son mois qui n’était pas encore échu, exactitude d’autant plus remarquable, que, sans compter les appointements de sa place et les 6 000 livres de pension attachées à son cordon bleu, il possédait en bénéfices 678 000 livres de rente, et que, tout récemment encore, une coupe de bois dans une de ses abbayes lui avait valu un million ». […] Mais la place est fructueuse : le gouvernement général du Berry vaut 35 000 livres de rente, celui de la Guyenne 120 000, celui du Languedoc 160 000 ; un petit gouvernement particulier, comme celui du Havre, rapporte 35 000 livres, outre les accessoires ; une médiocre lieutenance générale, comme celle du Roussillon, 13 000 à 14 000 livres ; un gouvernement particulier, de 12 000 à 18 000 livres ; et notez que, dans la seule Ile-de-France, il y en a trente-quatre, à Vervins, Senlis, Melun, Fontainebleau, Dourdan, Sens, Limours, Etampes, Dreux, Houdan et autres villes aussi médiocres que pacifiques ; c’est l’état-major des Valois qui depuis Richelieu a cessé de servir, mais que le Trésor paye toujours  Considérez ces sinécures dans une seule province, en Languedoc, pays d’États, où il semble que la bourse du contribuable doive être mieux défendue. […] Les premières femmes de chambre de la reine inscrites sur l’Almanach pour 150 livres et payées 12 000 francs, se font en réalité 50 000 francs par la revente des bougies allumées dans la journée ; Augeard, secrétaire des commandements et dont la place est marquée 900 livres par an, avoue qu’elle lui en vaut 200 000. […] C’est un de ces emplois dits gracieux : cela vaut « 18 000 livres de rente pour signer son nom deux fois par an ». […] Boiteau, État de la France en 1789, 55, 248. — Marquis d’Argenson, Considérations sur le gouvernement de la France, 177. — Duc de Luynes, Journal, XIII, 226 ; XIV, 287 ; XIII, 33, 158, 162, 218, 233, 237 ; XV, 268 ; XVI, 304. — Le gouvernement de Ham vaut 11 250 livres, celui d’Auxerre 12 000, celui de Briançon 12 000, celui des îles Sainte-Marguerite 16 000, celui de Schelestadt 15 000, celui de Brisach de 15 à 16 000, celui de Gravelines 18 000. — L’ordonnance de 1776 avait réduit ainsi ces diverses places (Waroquier, II, 467) : 18 gouvernements généraux à 60 000 livres, 21 à 30 000, 114 gouvernements particuliers, dont 25 à 12 000 livres, 25 à 10 000, 64 à 8 000, 176 lieutenants et commandants de villes, places, etc., dont 35 de 6 000 à 16 000, et 141 de 2 000 à 6 000.

71. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Ces ingénieux écrits n’eurent qu’un demi-succès, parce qu’ils ne rentraient dans aucune des écoles régnantes et qu’ils n’étaient pas de force à en fonder une ; avec du vague dans l’ensemble, ils renferment bien de précieux détails, de fines observations sur les âges, sur les passions, sur la conversation, sur l’ennui, sur le bonheur…, et ils tendent en général à faire valoir le sentiment, trop sacrifié par les idéologues. […] Une vive douleur, la perte d’un frère tué à Silistrie, affligeait cette jeune amie : Ne faites pas comme à Genève, ne vous faites pas valoir par la douleur, mais rappelez-vous que la vie est un combat, qu’il faut y vaincre ses ennemis et non les adorer. […] Rien de joli comme un peu d’amitié ; cela vaut les caisses de toilette de Paris. […] Les pensées ne valent que lorsqu’elles sont reprises par la réflexion ; c’est la réflexion qui les fixe à notre usage. […] Il y a plus : le français est, selon moi, la langue la plus ingrate, la plus sourde, la plus pauvre, la moins souple, mais de toutes la plus soignée ; semblable aux femmes françaises qui, moins belles comme race qu’aucune autre race européenne, sont de toutes les femmes les plus habiles à se faire valoir par les grâces, l’esprit et le tact si rare de toutes les convenances du lieu et du moment.

72. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Cependant ce gonflement maladroit a moins nui aux Essais qu’il n’aurait fait à un ouvrage mieux composé : comme rien ne se tient, chaque morceau vaut en soi, et ne saurait être affecté de son entourage ; peu importe où ni quand il vienne. […] Le malheur est que contre la douleur physique le détachement ne sert à rien : il n’y a que la fuite qui vaille. […] Il aurait mieux valu ne pas faire la Réforme : puisqu’elle s’est faite, qu’on lui laisse sa place au soleil. Et ne vaudrait-il pas mieux laisser les sauvages à leur idolâtrie, que de leur porter nos vices, nos maladies, les tortures et la mort, avec la vraie foi ? […] Il n’y a pas d’idée qui vaille qu’on tue un homme, ni qu’on se fasse tuer.

73. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Ce n’est plus cela du tout, car cette verve robuste vaut surtout par l’insistance, par le copieux, par l’ample jaillissement sans effort ni saccade. […] Et peut-être, plus travaillée, vaudrait-elle moins. […] Cette convention vaut, non seulement pour les faits antérieurs au drame, mais pour les moyens qui, dans le cours même du drame, amènent telle situation dramatique — toujours à condition que le public l’accepte, qu’il soit dupe, que l’auteur, comme dit M.  […] Conclusion : mieux vaut lire une pièce que de la voir jouer, et mieux vaut lire des vers, un roman, un livre d’histoire, qu’une pièce de théâtre. […] Cela vaudrait certes la peine d’être réuni en un corps, condensé, ordonné et complété ; car M. 

74. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

Or mieux vaut une société défectueuse qu’une société nulle. […] S’il ne s’agissait que de jouir, mieux vaudrait pour tous le brouet noir que pour les uns les délices, pour les autres la faim. […] Ainsi, la liberté individuelle, l’émulation, la concurrence étant la condition de toute civilisation, mieux vaut l’iniquité actuelle que les travaux forcés du socialisme. […] Mieux vaut quelque brillante personnification de l’humanité, le roi, la cour, qu’une médiocrité générale. […] Il vaudrait mieux sans doute que tous fussent grands et nobles.

75. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Eh bien, quel que soit mon peu de penchant à me croiser pour les choses du théâtre, j’apprendrai cependant aux lecteurs ce que vaut le livre d’Édelestand du Méril, et, plus et mieux encore, ce que vaut l’auteur de ce livre ! […] — qui tenons que tout un siècle d’érudition ne vaut pas une bonne heure de littérature. […] Derrière et au-dessus de tous ces textes, fauchés, empilés, amoncelés dans ces terribles notes montantes, il était évident qu’il y avait un homme qui en valait plusieurs, — qu’il y avait un philosophe, un écrivain, et peut-être un poète dramatique ; car, pour aimer tellement l’histoire de la Comédie, il faut aimer la Comédie elle-même… L’auteur la prenait, dans une introduction d’une étreignante généralité, au plus profond de ses origines, c’est-à-dire dans la nature même de l’esprit humain, se manifestant toujours esthétiquement de la même manière : par la Poésie lyrique, l’Épopée, le Conte et le Drame. […] Comme discernement et jugement littéraire, comme caractérisation des divers génies et des diverses œuvres, dans son beau chapitre sur la Comédie italique, le plus intéressant de second volume, il vaut encore le critique anglais qu’il rappelle.

76. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre II. L’homme »

On voit bien par son poëme sur Vaux qu’en poésie comme ailleurs il prenait ses aises. […] Je suppose qu’il allait se promener à Vaux, regardait les cygnes et les beaux parterres, et revenait le soir content d’avoir si bien travaillé. […] Il se prosterne devant les bâtards ; il adore Mme de Montespan ; il remarque, quand le roi révoque l’édit de Nantes, que « sa principale favorite, plus que jamais, c’est la vertu. » Encore, parmi tant de génuflexions, a-t-il peur de mal louer ; ayant dit du roi que « sa bonne mine ravit toutes les nymphes de Vaux », il se reprend comme un poëte craintif du Bas-Empire, se demandant « s’il est permis d’user de ce mot en parlant d’un si grand prince. » Il quête de l’argent humblement au monarque et à d’autres. […] C’est par ce côté et dans ce fond intime qu’il faut regarder La Fontaine, C’est par là que la vie d’un poëte vaut quelque chose.

77. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

La manière en semble faite exprès pour expliquer le mot de Voltaire : La grâce en s’exprimant vaut mieux que ce qu’on dit. […] Les envieux (et Bussy l’était), tout en reconnaissant au comte de Grammont l’esprit galant et délicat, ajoutaient que « ses mines et son accent faisaient bien souvent valoir ce qu’il disait, qui devenait rien dans la bouche d’un autre ». […] « Cet ouvrage, a dit Voisenon en parlant des Mémoires de Grammont, est à la tête de ceux qu’il faut régulièrement relire tous les ans. » C’est là un conseil qui vaut mieux qu’on ne l’attendrait de Voisenon. […] Concluons donc hardiment que sur ce point de morale nous valons mieux.

78. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Roger de Beauvoir »

Écoutez encore : Les fruits de France valent bien Les plus beaux fruits d’Andalousie ; Mais, terre entre toutes choisie, Moitié more et moitié chrétien, Ton jardin est ma fantaisie ! […] On n’est pas Scarron que jusqu’à la ceinture ; on n’est pas Scarron parce qu’on a tué quatorze médecins sous soi, ce qui vaut presque les cinq chevaux tués sous Ney à Waterloo ! […] Et ce n’est pas le front radieux devenu pensif, la lèvre rieuse devenue souriante, qui pensent et chantent tant de vers comme ceux-ci : Le cœur, lys éternel, fleurit dans tous les temps ; Le bonheur est un dieu qui vaut bien le printemps !

79. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Cela vaudra ce que cela vaudra, selon l’homme et la manière dont il le dira ; ce sera toujours un droit que l’on aura ; et il sera bien difficile que cela ne vaille pas quelque chose, aussi souvent qu’on y mettra plus de sincérité que de littérature. […] Comme si ce n’était pas une manière de la prendre, et qui peut-être en vaut bien une autre. […] Les efforts sont diversement heureux, et il arrive aux écrivains de valoir mieux que leur œuvre. […] Mais il vaut mieux appuyer sur ce que Diderot et Rousseau doivent à Marivaux. […] Il valait bien une parenthèse !

80. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 317-322

Il n’a rien inventé, il est vrai, mais il a su se rendre propres les découvertes des autres, en y ajoutant des traits de lumiere qui n’ont pas peu servi à les faire valoir. […] Ce n’est pas ainsi qu’on fait valoir les Grands Hommes ; ce n’est pas non plus d’après de tels Panégyristes qu’on doit les juger.

81. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Hallé  » pp. 127-130

Hallé Il n’y a pas un morceau de Mr le professeur Halle qui vaille. […] Mais abandonnons ce pauvre Mr Halle à son sort et passons à un homme qui en vaut bien un autre.

82. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 12, des siecles illustres et de la part que les causes morales ont au progrès des arts » pp. 128-144

Un poëte peut même pardonner de ne point aimer les vers ; mais il est outré de dépit lorsqu’il voit couronner des ouvrages qui ne valent pas les siens. […] Ils ont du moins quelque lueur de ce qu’ils peuvent valoir au juste, et ils s’apprétient eux-mêmes dans le fond de leur coeur, à peu près à la valeur qu’ils ont dans le monde. Les hommes qui ne sont ni souverains, ni ministres, ni trop proches parens des uns et des autres, ont des occasions si fréquentes de connoître ce qu’ils valent véritablement, qu’il faut bien qu’ils s’en doutent à la fin, à moins qu’ils ne soient pleinement stupides.

83. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

Son succès lui valut, après un trimestre passé au collège de Reims, d’être appelé au collège Henri IV, où le roi Louis-Philippe venait d’envoyer deux de ses fils. […] Les deux premiers volumes de sa grande Histoire des Romains paraissaient en 1843 et 1844, et lui valaient d’être décoré par M. de Salvandy. […] Et c’est pourquoi, en même temps que l’évidente solidité de son mérite lui valait, même avant qu’une volonté toute-puissante ne s’en mêlât, d’appréciables honneurs dans sa carrière professorale, sa franchise ne laissait pas de lui attirer quelques difficultés. […] Duruy, mais il vaut mieux ne pas les rappeler. » L’empereur souffrait ces franchises, et n’en pensait — ou n’en songeait pas moins ; car il me paraît avoir songé sa vie plus qu’il ne l’a vécue. […] L’empereur le laissait faire, ne le désavouait pas, mais ne l’aidait point ; et peut-être cela valait-il mieux.

84. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

Mme d’Épinay, qui a fait des traités d’éducation (et des traités couronnés par l’Académie), et qui a eu des amants, valait mieux que ces femmes dont je parle. […] Je lui réponds que j’écris tout ce qu’il dit, parce que cela vaut bien tout ce que je pense. […] Il lui fut souverainement bon et secourable ; il lui donna le premier la confiance en elle-même, le sentiment de ce qu’elle valait, il l’émancipa : Oh ! […] Mme d’Épinay, si compromise par les incidents de sa vie première, si calomniée par ses anciens amis, était en voie de devenir meilleure dans le temps même où on la noircissait le plus ; et elle put répondre un jour, d’une manière aussi spirituelle que touchante, à un homme venu de Paris qui l’allait voir à Genève, et qui s’étonnait un peu gauchement devant elle de la trouver si différente de l’idée qu’on lui en avait voulu donner : « Sachez, monsieur, que je vaux moins que ma réputation de Genève, mais mieux que ma réputation de Paris. » Grimm avait trente-trois ans quand il la connut, et, durant vingt-sept années que dura leur liaison, son attachement pour elle ne se démentit pas un seul jour. […] Nous la trouvons peinte durant les quatorze dernières années de sa vie, elle et toute sa société, dans sa correspondance avec l’abbé Galiani ; cela vaudrait la peine d’un examen à part.

85. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

Les choses ne valent que par ce qu’y voit l’humanité, par les sentiments qu’elle y a attachés, par les symboles qu’elle en a tirés. […] Je voudrais bien savoir comment les critiques absolus feraient pour prouver que ce poème est en effet supérieur à l’Iliade, ou pour mieux dire que l’Iliade vaut un monde, tandis que l’œuvre du moderne est destinée à aller moisir sur les rayons des bibliothèques, après avoir un instant amusé les curieux. […] Cousin sur Santa-Rosa valent mieux pour notre manière de sentir qu’une oraison funèbre calquée sur celles de Bossuet. […] Les sculptures du Parthénon ne valaient-elles pas mieux à leur place que plaquées par petits morceaux sur les murs d’un musée ? […] Ils valent dans l’humanité et par l’humanité.

86. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

S’agit-il d’étudier un homme supérieur ou simplement distingué par ses productions, un écrivain, dont on a lu les ouvrages et qui vaille la peine d’un examen approfondi ? […] Les académies, les chaires oratoires sont plutôt destinées à montrer la société et la littérature par les côtés spécieux et par l’endroit ; il n’est pas indispensable ni peut-être même très-utile que ceux qui ont pour fonction de déployer et de faire valoir éloquemment les belles tentures et les tapisseries, les regardent et les connaissent trop par le dessous et par l’envers : cela les gênerait. […] On a vu par exception des esprits, des talents, longtemps incomplets ou épars, paraître valoir mieux dans leur vieillesse et n’avoir jamais été plus à leur avantage : ainsi cet aimable Voltaire suisse, Bonstetten, ainsi ce quart d’hommes de génie Ducis. […] Jeune ou vieux, il n’a cessé de se peindre, et, ce qui vaut mieux, de se montrer, de se laisser voir, et, en posant solennellement d’un côté, de se livrer nonchalamment de l’autre, à son insu et avec une sorte de distraction.

87. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) »

Elle dit, à sa façon, comme son frère Lazare : « Il n’est plaisir que de jeunesse » ; et ses suivantes, la première et la seconde demoiselle, lui font écho et lui répètent à l’envi ; « Cœur ne vaut rien, s’il n’est joyeux. » Tout cela se dit en ballades assez agréables et en chansonnettes qui devaient courir ensuite et se répéter. […] C’est Rodigon, l’élégant accompli à cette date, Rodigon, comte de Hèrode, un homme de cour, un comte qui vaut un marquis pour le sémillant. […] C’est déjà le vers connu : Tous les autres plaisirs ne valent pas ses peines. […] Ils sont les premiers à reconnaître ; « Que l’imagination des auteurs, quand ils traitaient des sujets religieux dont les points fondamentaux étaient fixés par l’Ancien ou le Nouveau Testament, ne pouvait se donner carrière que dans quelques scènes épisodiques et dans le dialogue naïf, familier, souvent trivial, des personnages secondaires, tels que les bergers, les soldats, les démons ; que l’exactitude des tableaux, le langage plus ou moins vrai qu’on prêtait aux personnages, l’effet comique qui résultait des facéties de quelques-uns, constituaient le principal mérite de l’ouvrage aux yeux du public, et en faisaient tout le succès ; que toute espèce d’idée d’unité était absente de ces compositions et étrangère à la pensée des auteurs ; qu’on ne songeait nullement alors à disposer les faits de façon à les faire valoir par le contraste, à concentrer l’intérêt sur certaines scènes, à tenir en suspens l’esprit du spectateur et à l’amener de surprise en surprise, de péripétie en péripétie, jusqu’au dénouement.

88. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Mieux vaut un bon tiens que deux tu l’auras ; mieux vaut un moineau dans la main que la grue qui vole en l’air. » — Mais aussi le même Sancho (car il a deux bâts à son âne) dirait « que mieux vaut tard que jamais ; qu’il n’y avait nul péril en la demeure ; que bonne espérance, après tout, vaut mieux que chétive possession, et qu’on peut attendre patiemment quand on est déjà si bien loti d’ailleurs et si bien nanti. » Le fait est que la dernière œuvre de M. 

89. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

Alors, il n’y aura plus de critique du tout, ce qui vaudra toujours mieux que la honteuse critique d’annonces. […] Il est certain que l’homme sur la tombe duquel on pourra inscrire : « Il ne fit rien, sinon dire chaque lundi durant trente années que tel livre valait et que tel autre ne valait rien », il est certain que cet homme ne vaut même pas qu’on s’en irrite de son vivant.

90. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

Tant vaut l’homme, tant vaut la confession. […] On n’écrit pas. » III Sans doute, entre la critique de la postérité, soit des esprits assez distants pour rentoiler leurs souvenirs de lecture sur une trame historique adventice, et la critique non même du lendemain mais du matin ou de la veille, dont l’exactitude chaleureuse vaut d’abord en tant que d’intéressante information : citations heureuses presque encore inédites, découpées des « bonnes feuilles », anecdotes sur l’auteur, première impression non refroidie, adresse du libraire… sans doute entre ces deux critiques n’y a-t-il point une place nécessaire pour une tierce et intermédiaire, la nôtre, très contemporaine encore, et point toute fraîche cependant, advenant après, ai-je entendu dire, cent soixante-treize articles imprimés sur les Trophées de José-Maria de Heredia. […] Non, l’originalité de Heredia vaut mieux que d’un spécialiste du pays chaud et du poème froid.

91. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

Moins le monde vaut, plus je vaudrai. » Ainsi raisonnait-il. […] Mais il veut valoir, pour lui-même et pour jouir solitairement de son propre prix. […] Et pourtant il les traite l’un et l’autre sans dureté : le sentiment qu’il a de « valoir » plus qu’eux lui permet l’indulgence. — Il ne parle presque jamais de lui ; et, quand il en parle, il s’en excuse. « Vous avez remarqué un jour que je ne parlais jamais de moi. […] Que vaut sa conversion ? […] Mais cela nous a valu des pages d’une couleur vibrante et d’une émotion profonde.

92. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Entrez, et dites-moi si aucune gloire vaut la gloire de celui qui siège là-bas. […] Mieux vaudrait l’ancienne idolâtrie, entourant de splendeur quelques individus, que cette pâle vie où la majesté de l’humanité ne serait pas représentée. Mais il vaut mieux encore revenir à la vérité et ne reconnaître d’autre majesté que celle de la nation et de l’idéal. […] Une proposition ne vaut qu’en tant qu’elle est comprise et sentie. […] Nous nous valons.

93. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Sa traduction vaut mieux que celle de Marot, et la langue en est moins au-dessous des beautés de l’original ; mais l’ouvrage est médiocre, et, s’il doit être compté à Desportes, c’est moins comme un titre poétique que comme un acte de pénitence. […] Pesons-en chaque expression cela vaut mieux que de revendiquer quelque vaine liberté dont Malherbe et Boileau n’auraient pas eu de souci. […] De stances du même : « Toute cette pièce est si niaise et si écolière qu’elle ne vaut pas la peine de la censure. » D’une phrase du même : « Cette phrase est latine ; il faut dire, pour parler françois… » D’une autre : « Phrase excellentissime. » Le vieux tyran des syllabes fait de l’ironie. D’une autre : « Ceci est dit sans jugement. » D’une autre : « Sot et lourd. » D’un latinisme « La langue latine se sert de cette épithète mais la françoise, non. » D’un tour prétentieux : « Ceci pipe le monde, et ce n’est rien qui vaille. » D’un pétrarchisme : « Ceci est sans jugement, n’en déplaise à l’italien où il est pris. » D’un autre : « Bourre excellente, prise de l’italien, où elle ne vaut non plus qu’en françois. » D’une mauvaise rime : « Rime gasconne et provençale, mais non pas française » ; et cent autres de ce genre : Étrange oisonnerie, niaiserie, pédanterie, mal, très-mal, impertinent ; critiques peu civiles, j’en conviens, mais dont l’exactitude est d’autant plus admirable qu’il était plus difficile de voir juste à une époque où tant d’imitations pouvaient troubler le sens le plus sûr, et où la faveur publique protégeait la mauvaise poésie. […] Que prétendait Malherbe par sa réforme, sinon faire voir aux poëtes de son temps que ce qui leur était imposé par le tour d’esprit d’alors, par l’imitation de l’Italie et par le faux savoir, ne valait pas ce que leur bon sens, cultivé par les lettres anciennes, et développé par l’expérience de la vie, leur inspirait, comme à leur insu, de pensées franches et naturelles ?

94. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Et je ne prétends point qu’elles se vaillent toutes, mais pour en établir la valeur relative, et la hiérarchie, il faudra de singulières nuances et une étrange casuistique avec un sens de la relativité et de la variation des valeurs dont notre morale actuelle se garde jalousement. […] Ceux dont on est le plus fier ne valent que par leur ajustement à un côté et parfois à un côté passager ou insignifiant de la réalité. […] § 5 Naturellement l’ironie vaut ce que vaut l’esprit qui la pratique. […] Il sait que tous ces biens ne sont que des moyens, qu’ils ne valent que par des fins plus hautes, la vie sociale d’un peuple ou de l’humanité, qu’ils représentent et que, bien souvent, ils représentent mal. […] L’âme sociale lui montrera que l’homme n’existe et ne vaut que par la société, qu’il en est un produit et un élément, qu’il n’a qu’en elle sa raison d’être et qu’elle seule fait son prix.

95. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Renan avale et rend des dictionnaires… Le mot le grise comme l’opium grise le Chinois, et perpétuellement, dans ses Dialogues, — où il n’a plus la ressource des petits paysages, comme dans ses Histoires, — il se plonge en des margouillis de paroles (cela ne vaut pas un nom plus noble) dans le genre de celui-ci, par exemple : « L’idéal apparaît comme le principe de l’évolution déifique et comme le créateur par excellence. » Et cela pour ne pas dire : Dieu ! […] Un jour, — pose-t-il, — la science remplacera tout : la vertu, les arts, la poésie : « Alors, un homme vertueux » (textuel), « un grand artiste, seront choses vieillies et inutiles. » Les savants, au contraire, — les Renan et les Berthelot de ce temps-là, — vaudront davantage. […] Renan, et il a de si longues portées, que ce pourrait être une charmante et sublime malice contre le pauvre Christianisme humilié, que de lui montrer et de lui opposer un prince païen qui valait bien, certes ! […] Et, d’ailleurs, il vaut mieux qu’il en soit ainsi, pour le compte même de la vérité. […] — est, à certaines heures, de donner raison à Épicure, d’être pris de dégoût tout en travaillant avec ardeur, et, après avoir réussi, de douter si la cause qu’ils ont servie valait tant de sacrifices… » — « Il n’y a guères — ajoute-t-il plus bas — de prêtre, de religieuse, qui à cinquante ans ne pleure son vœu. — (Qu’en sait-il ?) 

96. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre IV. Unité et mouvement »

Il y a peu de gens qui aient le courage d’avouer que, bien comprises, ces règles valent encore aujourd’hui, et que les plus indépendants, s’ils ont un vrai sentiment de l’art, suivent d’instinct les lois qu’ils méprisent par théorie. […] Hugo démolit bruyamment les trois unités, mais il avoue qu’après tout un sujet concentré vaut mieux qu’un sujet dispersé, sauvant ainsi ce qu’il y avait d’essentiel dans les unités, l’unité d’action et d’intérêt. […] Au-delà, sont deux défauts, deux excès, soit qu’on se hâte trop sans laisser le temps au lecteur de remarquer suffisamment les objets qu’on lui présente, soit qu’on s’attarde à lui montrer ce qu’il a bien vu d’un coup d’œil, à lui détailler ce qui n’en vaut pas la peine, à lui expliquer ce qu’il connaît.

97. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

On a beau la haïr et la mépriser, on l’aime pourtant ; elle a, jusque dans ses pires cruautés, des saveurs qui la font désirable, et, quand on a senti la mort passer tout près, quand on a failli voir disparaître une de ces existences qui sont la vôtre même, on comprend alors que la vie, affreuse, inique, féroce, vaut encore mieux que le néant. » À la bonne heure ! […] Rod n’en existe pas moins, et il valait la peine de le décrire, ne fût-ce que pour que nous en sentissions la honte et que nous eussions le désir de le secouer d’un coup d’épaules, en rentrant des livres dans la vie. […] En voici un que je vous donne pour ce qu’il vaut et qui, d’ailleurs, n’est pas original (mais un credo ne doit pas être original).

98. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXI. Le littérateur chez les peintres » pp. 269-282

Et puis les comptes rendus contemporains valent au moins comme répertoires futurs plus commodes à feuilleter que les purs catalogues. […] Geffroy, nous ont valu, cette année encore, d’excellents articles, excellents surtout en ce qu’ils signalent des artistes indépendants, sans notoriété, déplaisants en général au public et qu’il n’est peut-être pas absurde de lui imposer quelques années, jusqu’à ce qu’il ait eu le loisir de les comprendre et de les aimer tout seul. Le plus louable critique, en ce sens, demeurera Huysmans, qui, il y a douze et quinze ans, sonnait la gloire d’artistes qu’on croit trop, ici ou là, avoir découverts hier… Ces bons écrivains pratiquent la bonne méthode ; avec le minimum de préjugés, ou avec des préjugés qui me plaisent, ils disent le sentiment qui devant tel tableau les retint ; leur dire vaut par la délicatesse de leur tact, et la grâce de leurs racontars les plus philosophes intercalent quelques théories d’ensemble, intéressantes puisqu’ils sont intelligents.

99. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIX. Progression croissante d’enthousiasme et d’exaltation. »

Il était en cela conséquent avec son principe : « Si ta main ou ton pied t’est une occasion de péché, coupe-les, et jette-les loin de toi ; car il vaut mieux que tu entres boiteux ou manchot dans la vie éternelle, que d’être jeté avec tes deux pieds et tes deux mains dans la géhenne. Si ton œil t’est une occasion de péché, arrache-le et jette-le loin de toi ; car il vaut mieux entrer borgne dans la vie éternelle que d’avoir ses deux yeux, et d’être jeté dans la géhenne 874. » La cessation de la génération fut souvent considérée comme le signe et la condition du royaume de Dieu 875. […] Ne craignez rien ; vous valez beaucoup de passereaux 882. » — « Quiconque, disait-il encore, me confessera devant les hommes, je le reconnaîtrai devant mon Père ; mais quiconque aura rougi de moi devant les hommes, je le renierai devant les anges, quand je viendrai entouré de la gloire de mon Père, qui est aux deux 883. » Dans ces accès de rigueur, il allait jusqu’à supprimer la chair.

100. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — II. La versification, et la rime. » pp. 257-274

On alla jusqu’à prétendre que la mesure eût gâté le chef-d’œuvre de Fénélon ; & que la plus grande louange qu’on pût donner à des vers, étoit de dire qu’ils valent de la prose. […] Elle peut réclamer toutes les beautés poëtiques qu’ils renferment, & faire valoir contr’eux le systême de La Mothe. […] L’exemple des Italiens & des Anglois, qui admettent des vers blancs ou non rimés, étoit l’argument qu’on faisoit le plus valoir contre le retour des mêmes sons dans les vers.

101. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 22, que le public juge bien des poëmes et des tableaux en general. Du sentiment que nous avons pour connoître le mérite de ces ouvrages » pp. 323-340

Par la même raison l’ouvrage qui ne touche point et qui n’attache pas ne vaut rien, et si la critique n’y trouve point à reprendre des fautes contre les regles, c’est qu’un ouvrage peut être mauvais sans qu’il y ait des fautes contre les regles, comme un ouvrage plein de fautes contre les regles peut être un ouvrage excellent. […] La voïe de discussion et d’analise, dont se servent ces messieurs, est bonne à la verité, lorsqu’il s’agit de trouver les causes qui font qu’un ouvrage plaît ou qu’il ne plaît pas, mais cette voïe ne vaut pas celle du sentiment lorsqu’il s’agit de décider cette question. […] Ils ne laisseroient pas de croire que la piece est mauvaise, bien qu’on expliquât mal par quelles raisons elle ne vaut rien.

102. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Antoine Campaux » pp. 301-314

À ces indignités devant lesquelles on ne reculait pas, s’ajoutait du moins la dignité d’un grand danger… Ces condamnations à mort auxquelles je suis bien aise que Villon ait échappé, puisque cela nous a valu le Grand Testament et les meilleures de ses ballades, je ne suis point fâché qu’il en ait été frappé et qu’il ait eu à en courir les chances et les transes. […] Et la suite de l’analyse qui commence ainsi, vaut le commencement. […] Il est le premier, que je sache, qui se soit donné la peine de rechercher les sources morales de l’inspiration dans cet immoral, ce ribaud, ce braguard qui s’appelait Villon, et qui, comme tant d’autres, valait mieux au fond que ce qu’il paraissait être.

103. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

« Maraud vaut Taupin », dit le proverbe. Mais ce maraud-ci, à mon sens, vaut mieux, à lui seul, que tous les Taupins de l’Académie ! […] « Assurément, — dit-il toujours, — il vaut mieux avoir de l’esprit franc et simple que de l’avoir entortillé et précieux, mais mieux l’avoir entortillé et précieux que de ne pas en avoir du tout. » (D’abord, ce n’est pas la question.)

104. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Les contemporains de Marivaux ont dit de lui à peu près tout ce qu’on en peut dire : si l’on prend la peine de recueillir ce qu’ont écrit à son sujet Voltaire, Grimm, Collé, Marmontel, La Harpe, et surtout d’Alembert dans une excellente notice, on a de quoi se former un jugement précis et d’une entière exactitude : et pourtant il vaut mieux, même au risque de quelque hasard, oublier un moment ces témoignages voisins et concordants, et se donner soi-même l’impression directe d’une lecture à travers Marivaux. […] À ses yeux il n’y a pas de grands hommes proprement dits : Il n’y a ni petit ni grand homme pour le philosophe : il y a seulement des hommes qui ont de grandes qualités mêlées de défauts ; d’autres qui ont de grands défauts mêlés de quelques qualités : il y a des hommes ordinaires, autrement dits médiocres, qui valent bien leur prix, et dont la médiocrité a ses avantages ; car on peut dire en passant que c’est presque toujours aux grands hommes en tout genre que l’on doit les grands maux et les grandes erreurs : s’ils n’abusent pas eux-mêmes de ce qu’ils peuvent faire, du moins sont-ils cause que les autres abusent pour eux de ce qu’ils ont fait. […] Par ces mots bien ou mal placés, Marivaux ne veut pas toutefois faire entendre qu’un fonds commun d’esprit manquât dans ces siècles réputés barbares : loin de là, il estime que l’humanité, par cela seul qu’elle dure et se continue, a un fonds d’esprit de plus en plus accumulé et amassé : c’est là une suite lente peut-être, mais infaillible de la durée du monde, et indépendante même de l’invention soit de l’écriture, soit de l’imprimerie, quoique celles-ci y aident beaucoup : « L’humanité en général reçoit toujours plus d’idées qu’il ne lui en échappe, et ses malheurs même lui en donnent souvent plus qu’ils ne lui en enlèvent. » Les idées, d’un autre côté, qui se dissipent ou qui s’éteignent, ne sont pas, remarque-t-il, comme si elles n’avaient jamais été ; « elles ne disparaissent pas en pure perte ; l’impression en reste dans l’humanité, qui en vaut mieux seulement de les avoir eues, et qui leur doit une infinité d’autres idées qu’elle n’aurait pas eues sans elles ». […] Il vous dira qu’en matière de critique, au lieu de se hâter et de se prononcer d’un ton d’oraclen : Cela ne vaut rien, cela est détestable, un habile homme, après avoir lu un livre, doit se contenter de dire : Il me plaît ou il ne me plaît pas ; car plus on a d’esprit, et plus on voit de choses, et plus on distingue autour de soi de sentiments et de goûts particuliers qui diffèrent du nôtre : « Ah ! […] Il est vrai que dans le monde on m’a trouvé de l’esprit ; mais, ma chère, je crois que cet esprit-là n’est bon qu’à être dit, et qu’il ne vaudra rien à être lu. » Une partie de l’art de l’auteur dans ce roman consiste à imiter le style parlé, à en reproduire les négligences, les petits mots qui reviennent souvent, et, pour ainsi dire, les gestes.

105. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

L’Angleterre, marchande comme Carthage, légale comme Sparte, vaut mieux que Sparte et Carthage. […] La statue qu’il s’est faite à lui-même vaut mieux, avec toute l’Angleterre pour piédestal. […] Aucune construction de chaux, de roche, de fer et de ciment ne vaut le souffle. […] Quelle oraison de l’évêque de Londres ou de l’archevêque de Cantorbery vaudra le cri d’une femme devant Desdemona, d’une mère devant Arthur, d’une âme devant Hamlet ? […] Les religions sont diverses, mais le bigotisme est un ; et tous ses spécimens se valent.

106. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VII »

et de l’argent »67 ; je ne saurais calculer ce que vaut — valeur marchande — la parfaite connaissance de l’anglais, de l’allemand ou de l’espagnol ; ma vocation est de défendre, par des œuvres ou par des traités, la beauté et l’intégrité de la langue française, et de signaler les écueils vers lesquels des mains maladroites dirigent la nef glorieuse. […] Il vaut mieux perdre son temps que de l’employer à des exercices de déformation intellectuelle.

107. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Taraval » pp. 282-283

De la manière dont ce sujet est composé, il ne peut guère y avoir que le mérite du technique ; la figure principale tourne le dos, et un dos n’a pas beaucoup d’expression ; voyez pourtant ce dos, car il en vaut la peine, et la manière dont cette figure est assise sur son coussin, la vérité des chairs et du coussin. […] Je ne dis pas que Taraval vaille mieux que Fragonard, ni Fragonard mieux que Taraval, mais celui-ci me paraît plus voisin de la manière et du mauvais style.

108. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Ce qui vaudrait aujourd’hui la peine d’être inventé, dans le roman, ce serait un notaire honnête homme. […] Il vaut mieux laisser le diable de côté que de lui faire ressentir de l’intérêt pour les souffrances humaines. […] En somme, ils nous ressemblent et n’en valent pas mieux. […] R. ne serait pas un polisson allemand, ce serait un polissonnius romain, et les poésies de Freiligrath vaudraient celles d’Horace. […] On lui a voulu un mal de mort de ce latin ; ce latin-là a fait naître plus de colères, certes, qu’il ne valait.

109. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

Au moment où ces réflexions lui viennent (car c’est en voyage qu’elles lui viennent, sur la route de Viège dans le Valais, alors qu’il se dirige vers la vallée de Zermatt), il rencontre une bergère : … Plus loin c’est une bergère qui tricote en suivant sa vache le long des touffes d’herbe dont la route est bordée. […] Une seule fois, lui ou du moins son Saint-Preux, il s’est aventuré dans la zone supérieure, dans les montagnes du Valais ; on peut voir dans la première partie de La Nouvelle Héloïse la xxiiie  lettre à Julie : « Tantôt d’immenses rochers pendaient en ruines au-dessus de ma tête ; tantôt de hautes et bruyantes cascades m’inondaient de leur épais brouillard ; tantôt un torrent éternel ouvrait à mes côtés un abîme, etc. » Cette peinture est bien, mais elle n’est qu’une première vue un peu générale, un peu confuse, et sans particularité bien distincte. […] Malherbe avait dit : « J’apprends tout mon français à la place Maubert. » Lui, Töpffer, il veut qu’à deux siècles de distance cette parole bien comprise signifie : Je rapprends et je retrempe mon français chez les gens simples, restés fidèles aux vieilles mœurs, comme il en est encore dans la Suisse romande, en Valais, en Savoie, en dessus de Romont, à Liddes, à Saint-Branchier, au bourg Saint-Pierre. […] le pittoresque spectacle, s’écrie-t-il à la vue de l’évêque de Sion officiant en personne et de sept cents fidèles environ accourus d’Aoste, du Valais, de Fribourg, priant debout, agenouillés, ou assis par rangées sur les degrés et refluant jusque dans l’étage supérieur !

110. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

toi que ta famille et ta patrie ont rejetée, parce que ton âme valait mieux que les âmes qui t’environnaient ; toi qui ne reçut de la gloire que le sceau d’infortune qu’elle imprime à ses favoris ; toi que n’ont pu consoler ni l’admiration stérile de ta nation, ni l’impuissante amitié de ceux qui connaissent ton cœur ; innocente victime ! […] C’est le chaos des pièces anglaises, mais il en part quelquefois les mêmes éclairs, les mêmes mouvements de sensibilité, qui valent bien l’alignement méthodique de toutes les périodes du jour. […] Jean-Jacques Rousseau n’avait fait, dans La Nouvelle Héloïse, que dessiner le Pays de Vaud et le Valais sans dépasser guère les collines ; maintenant on en était à décrire les hautes vallées, les glaciers, à gravir les pics les plus inaccessibles. […] C’est ainsi encore qu’à l’occasion des Crétins du Valais dont les hommes notables du pays semblent rougir, les regardant comme une tache pour leur nation, et dont ils n’aiment guère à parler avec les étrangers, mais que le peuple et les enfants même respectent et considèrent au contraire comme une bénédiction, « comme des innocents marqués par le ciel pour n’avoir nulle part aux crimes de la terre et pour arriver sans obstacle au séjour des récompenses », il dira sans hésiter : « Laquelle de ces deux opinions est la plus respectable ?

111. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

Oubliée en France et dans les pays catholiques, l’œuvre de Du Bartas resta populaire en pays protestant : de Milton à Byron, elle a laissé des traces dans la poésie anglaise, et Gœthe en a parlé en termes enthousiastes qui lui ont valu chez nous plus d’estime que de lecteurs. […] Mais, heureusement, il avait une éloquence de tous les jours, qui vaut mieux. […] Alors le discours d’affaires peut devenir une œuvre qui vaut et qui dure, même après que son utilité réelle et directe est épuisée. […] Même la fameuse harangue de D’Aubray vaut par le détail et les morceaux, plutôt que par l’ensemble : le misérable état de Paris, ce pathétique début, qui sonne comme une péroraison cicéronienne, introduit une longue et diffuse relation, aussi peu oratoire que possible, des intrigues de la maison de Lorraine, qui nous ramène à la désolation de la ville.

112. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Les fortes colères vaudraient encore mieux. […] Jeune encore, lorsque j’avais fait un petit poème sur l’établissement de l’École militaire, dont il avait le principal honneur, il s’était plu à faire valoir ce témoignage de mon zèle. […] Un esprit bien fait, qui saura ces choses, et qui y joindra assez de latin pour goûter seulement Virgile, Horace et Tacite (je ne prends que ces trois-là), vaudra tout autant pour la société actuelle et prochaine que des esprits qui ne sauraient rien que par les livres, par les auteurs, et qui ne communiqueraient avec les choses réelles que par de belles citations littéraires. […] Estimons-nous un peu pour valoir quelque chose… » Ainsi, dans la disgrâce de d’Argenson comme en d’autres disgrâces célèbres, ce furent encore les lettres qui restèrent le plus fidèles.

113. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IX et dernier. Conclusion » pp. 586-601

Il vaudrait mieux rendre plus profond encore l’abîme qui sépare le vice de la vertu, réunir l’amour des lumières à celui de la morale, attirer à elle tout ce qu’il y a d’élevé parmi les hommes, afin de livrer le crime à tous les genres de honte, d’ignorance et d’avilissement ; mais, quelle que soit l’opinion qu’on ait adoptée sur ces conquêtes du temps, sur cet empire indéfini de la raison, il me semble qu’il est un argument qui convient également à toutes les manières de voir. […] Tel qu’il est cependant, je le publie, cet ouvrage : alors qu’on a cessé d’être inconnue, encore vaut-il mieux donner de ce qu’on peut être une idée vraie, que de s’en remettre au perfide hasard des inventions calomnieuses. […] et ne vaut-il pas mieux se livrer à tous les défauts que peut entraîner l’irrégularité de l’abandon naturel ?

114. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

S’imaginer que les menus détails sur sa propre vie valent la peine d’être fixés, c’est donner la preuve d’une bien mesquine vanité. […] Je n’ai rien changé cependant à ma rédaction première, pensant qu’il valait mieux laisser à M.  […] Les pays à religion d’État exclusive comme l’Espagne ne valent pas beaucoup mieux.

115. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les traductions. » pp. 125-144

Il en prit occasion de faire valoir ses idées sur la liberté, & l’espèce d’audace que doit sçavoir prendre toute personne qui traduit. […] « La prose, dit-il, ne sçauroit représenter qu’imparfaitement les graces de la poësie ; c’est-à-dire qu’elle ne peut en réprésenter le rythme & la cadence : mais, à cela près, elle peut en représenter parfaitement toutes les graces, en retracer toutes les images & en rendre même toute l’harmonie, par une autre sorte d’harmonie qui lui est propre & qui vaut bien, dans son genre, celle dos vers. » Il soutient que le traducteur en vers & le traducteur en prose font sujets aux mêmes loix ; qu’ils sont aussi astreints à la fidélité l’un que l’autre ; qu’il est aussi ridicule de voir l’un se donner l’essor & perdre de vue son original, que de voir l’autre ramper servilement & ne faire de sa traduction qu’une glose ennuyeuse & littérale. […] L’abbé Desfontaines n’oublia pas de faire valoir ce sentiment.

116. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IV. Mme Émile de Girardin »

Il y eut en elle plusieurs personnes qui, toutes, — il faut bien le dire, — ne se valaient pas. […] Mme de Staël, ce Diderot-femme et qui, parce qu’elle était femme, valait mieux que Diderot, a, offert le même spectacle que Diderot, dont Mme Necker disait, sans regarder sa fille : « Il n’eût pas été si naturel, s’il n’avait pas été si exagéré. » Mlle Delphine Gay, qui a presque failli être Corinne Gay, mais que l’esprit, l’esprit grandi et trempé, comme un acier, dans la vie, a sauvé du vertige, au bord du ridicule, Mlle Delphine Gay, cette de Staël, blonde et belle, et qui faisait des vers, trois supériorités qui eussent passionné, jusqu’à la petitesse de la jalousie, la grande âme de Mme de Staël, mais qui n’en restera pas moins inférieure à Mme de Staël, malgré ces trois supériorités, Mlle Gay, née à Aix-la-Chapelle, fut baptisée, dit-on, sur le tombeau de Charlemagne et élevée à l’ombre de ce cap Misène, peint par Gérard, qui, alors, projetait sa cime lumineuse sur toutes les imaginations. […] Il vaut mieux être présomptueux et n’avoir pas le sou, que d’être modeste et d’avoir une terre en Normandie. — L’égalité, c’est l’utopie des indignes. — Être acharné sans esprit, c’est rabâcher des bêtises. — Combattre mes ennemis, non !

117. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Ch.-L. Livet »

Ce qui tua ne valait pas mieux que ce qui fut tué. […] Son travail en eût valu mieux. […] Sans elles, Voiture, oublié maintenant, d’enjouement et d’esprit aurait valu Voltaire.

118. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire de la Révolution »

Hors ce résultat, qui est la destruction, n’importe par quelles voies, du monde ancien et de ses hiérarchies, et l’érection, n’importe par quelles voies, du monde nouveau appuyé sur l’égalité politique, rien pour l’auteur de cette histoire ne vaut la peine d’être aperçu ou même regardé. […] Or, si c’est là, sans aucune exagération, sa seule philosophie, si son histoire tout entière est contenue dans de telles prémisses, il est facile d’en conclure cette terrible abréviation des soixante années qui valent peut-être deux siècles ordinaires, tant elles ont influé sur le cours des choses et du monde ! […] Il a des sensations qui valent mieux que ses idées, et l’on se trouve, comme il se trouve lui-même, toujours du côté de ses instincts contre ses raisonnements.

119. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

Cela doit être triste pour nous, car ce qu’il publie ne vaut pas ce qu’il eût publié, s’il avait écrit sur saint Bernard, et voici pourquoi. […] Mais il est visiblement embarrassé de ce qu’il deviendra et surtout de ce qu’il vaut. […] En effet, je ne sais guère, — pas plus que M. de Montalembert, — ce que deviendra son histoire ici présente, mais je crois savoir ce qu’elle vaut, et je veux même essayer, s’il veut bien me le permettre, de le lui montrer.

120. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Jules de Gères »

Le manteau du mendiant, sauf les déchirures, vaut le manteau d’un roi, et le sayon du pâtre relève de la sculpture ; mais être clerc de notaire, pour un poète, c’est de l’infortune prosaïque, et d’autant plus dure qu’elle est prosaïque. […] J’ose aller contre l’axiome de Boileau, ce janséniste en poésie, qui disait « qu’un sonnet sans défaut valait un long poème ». […] Si le poème a des défauts, ce n’est pas merveille qu’un sonnet sans défaut vaille mieux qu’un poème qui en a.

121. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre X. De la simplicité du style »

Tout ce qu’on pense est vrai ; la première pensée venue en vaut une autre ; ce que les mots se trouvent signifier n’est ni mauvais ni pire que ce que d’autres mots signifieraient : il ne reste donc de sûr, de solide, que l’apparence, la beauté même des mots, harmonie, couleur, forme, ce qui enivre ou charme les sens. Il n’y a pas d’idées, de sentiments qui vaillent la peine d’être préférés : il y a des phrases qui méritent d’être écrites, des phrases belles, des phrases bien faites.

122. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 6, des artisans sans génie » pp. 58-66

Les mêmes qualitez qui rendent une terre spécialement propre pour une certaine plante, font qu’elle ne vaut rien pour une autre plante. […] Nous avons vû des peintres sans génie, mais devenus célebres pour un temps, par l’art de se faire valoir, travailler plus mal durant l’âge viril qu’ils ne l’avoient fait durant la jeunesse.

123. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

La composition qui lui avait valu la couronne était un discours de Zénobie à Aurélien pour le toucher. […] En parlant des auteurs de cette époque intermédiaire, des morts de la veille ou des vivants qui n’en valaient guère mieux, il avait tout ce qu’il fallait pour être juste, tenir la balance, y mettre les deux parts, ne pas tout secouer et rejeter comme on a fait depuis. […] Face à face et de vive voix, il valait moins qu’avec la plume (je ne parle pas de la conversation privée, où il était fort aimable). […] Qui de nous ne se souvient de ce dernier auquel l’oubli final peut-être vaudrait mieux ? […] Magnin de les goûter et de les savourer dans des conditions particulières qui valent la peine qu’on les rappelle et qu’on les décrive.

124. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Il eût mieux valu, sans doute, que la France et que l’humanité attendissent que M.  […] Que vaut la science de tels hommes ? […] On peut dire que Flaubert a empoisonné pendant quarante ans la littérature française et des écrivains qui valaient mieux que lui. […] Il vaudrait mieux que les lecteurs allemands ne la lussent point, car ils la lisent mal. […] Que valent aussi sa théorie du surhomme et ses hymnes tristes au plaisir ?

125. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Desroncerets, le château de Valtaneuse, qui en vaut le double. […] Nous avons laissé en route le procès de madame Lecoutellier avec son neveu ; mais, pour le rattraper, il faudrait retourner en arrière, quitter la voie principale de la comédie, et prendre l’embranchement du quatrième acte ; cette petite cause ne vaut pas le voyage. […] Je voudrais en retrancher la scène, fausse et choquante, où d’Estrigaud, qui a décidément jeté sur la marquise son dévolu de vieux garçon libertin, entreprend de démontrer à son frère qu’une liaison secrète vaut mieux, pour une veuve, qu’un second mariage. […] Un chapitre défectueux vaut mieux qu’un excellent appendice ; une scène mal faite, mais sortie directement de l’idée première, est préférable à une belle scène greffée après coup. […] fait-il. — Votre nom n’ayant plus cours, à l’heure qu’il est, ne vaut plus huit cent mille francs, vous en conviendrez : j’aime autant le mien. » D’Estrigaud baisse un instant la tête sous cet outrage écrasant ; mais il la relève bientôt avec une jactance impudente : — Eh bien, à la bonne heure !

126. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Or la France, qui sait ce que vaut la presse et ce que peut un journal, a recueilli avidement ce nom ; elle a prouvé spontanément, dès la première occasion qui s’est offerte, à quel rang elle place dans son estime et dans son admiration, je ne dirai pas, l’écrivain périodique, mais, pour parler sans périphrase, le journaliste éloquent, appliqué, courageux. à trente-deux ans, sans avoir passé par ce qu’on appelle la vie publique, M.  […] Ce livre, au reste, on le sait maintenant, n’est pas même de la fabrique du soi-disant voyageur au Congo : il lui a fallu, pour entasser vaille que vaille cet amas de grossièretés et d’impudences, recourir à la plume d’un de ses confrères en hâbleries aventurières et en mystifications éventées.

127. (1895) Histoire de la littérature française « Avant-propos »

En littérature plus qu’ailleurs, les doctrines ne valent tout justement que ce que valent les esprits qui les appliquent. […] A quoi bon décrire des œuvres qui ne valent pas la peine d’être lues ?

128. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

» Le malheur est que celui qui veut rencontrer le laid le rencontrera presque toujours, et il perdra pour le plaisir de la critique celui d’être « touché », qui, selon La Bruyère, vaut mieux encore. […] Faguet et Brunetière semblent poser en principe que les beautés de l’écrivain sont visibles pour tous, que ses défauts seuls sont cachés ; comme le devoir d’un bon critique est d’apprendre quelque chose à ses lecteurs, il vaut mieux assurément leur montrer des défauts que de ne rien leur montrer du tout. […] Pour qui serait également capable de faire œuvre personnelle en éclairant une qualité ou un vice, lequel vaudrait-il mieux mettre en lumière ?

129. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface des « Burgraves » (1843) »

Il se dit, sans se dissimuler le peu qu’il est et le peu qu’il vaut, que de ce voyage il fallait tirer une œuvre, que de cette poésie il fallait extraire un poème. […] Loin de là : si une œuvre aussi incomplète valait la peine d’être discutée à ce point, on surprendrait peut-être beaucoup de personnes en leur disant que, dans la pensée de l’auteur, il y a eu tout autre chose qu’un caprice de l’imagination dans le choix de ce sujet et, qu’il lui soit permis d’ajouter, dans le choix de tous les sujets qu’il a traités jusqu’à ce jour. […] Ceci vaut la peine d’être développé.

130. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre septième. »

Ce sont de ces traits qui valent un tableau tout entier. […] Elle a d’ailleurs l’inconvénient de retomber dans la moralité de la précédente, qui vaut cent fois mieux ; aussi personne ne parle de Messire Jean Chouart, mais tout le monde sait le nom de la pauvre Perrette. […] Cela est si vrai qu’on demande sur les places les plus honorables : combien cela vaut-il ?

131. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 2, de la musique rithmique » pp. 20-41

Les enfans n’ignorent pas, dit Quintilien, que la longue vaut deux temps, et que la breve n’en vaut qu’un. […] Outre cela, on peut en faveur de celui qui fait les gestes, rallentir encore sans consequence le mouvement de la mesure, parce que nonobstant ce rallentissement chaque signe, chaque frappé, et chaque levé que fait le batteur de mesure n’en vaut pas moins un temps. " quoique le fait, comme je l’ai déja dit, soit certain, il ne m’est pas possible d’expliquer pleinement la méthode enseignée par l’art rithmique, pour faire agir d’un concert si parfait l’acteur qui parloit, et l’acteur qui faisoit les gestes.

132. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVIII. Souvenirs d’une Cosaque »

Ils ont été une raison de plus pour se jeter à cet homme, qui, à lui seul, vaut un orchestre et qui joue de la réputation des femmes, comme de ses pianos qu’il éreinte ! […] IV Il en est d’autres qui valent mieux et qui sont peut-être à sa portée… On dit qu’elle a un grand talent de musicienne, — un vrai talent d’artiste, — et comme écrivain, — écrivain en français, — cette Cosaque n’en manque pas non plus. […] pour une femme qui joue à l’Alfieri, dans la première partie de son livre ; pour une Amazone de cette force, ceci est mesquin… de stoïcisme et même de vengeance ; mais c’est que faire du bruit, pour elle, vaut beaucoup mieux que de se venger !

133. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Edgar Quinet, composé de deux impuissances, n’a pas le bonheur du latin, dans lequel deux négations valent une affirmation. […] Mais sans rhythme et sans rime, comme la voilà, que vaut-elle, en n’exprimant que ce qu’elle exprime, c’est-à-dire rien ? […] et ils se valent tous.

134. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « André Chénier »

Cette vie, d’ailleurs, valait-elle la peine d’être racontée ? […] Ce qu’on n’en sait pas vaut toujours mieux que ce qu’on en sait : Le poète est semblable aux oiseaux de passage, Qui ne bâtissent point leurs nids sur le rivage, Qui ne se posent point sur les rameaux des bois… ……………………………………………………… Ils passent en chantant loin des bords, et le monde Ne connaît rien d’eux que leur voix ! […] Et cependant, pour toute Critique virile, et qui s’attache surtout dans l’appréciation des œuvres fortes à la profondeur de l’accent qui y retentit et qui semble venir de si avant dans l’âme humaine qu’on dirait qu’il en est littéralement arraché, rien de l’exécution la plus savante, la plus pondérée, la plus précise et tout à la fois la plus pittoresque et la plus musicale, ne vaut ce rugissement de l’âme élevée à sa plus haute puissance et qui rencontre un mouvement et une expression en équation avec sa foudroyante énergie !

135. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Prosper Mérimée. » pp. 323-336

Or, le talent qu’on se fait, comme on peut aussi se faire un visage, ne vaut jamais celui qu’on a. […] Carmen elle-même ne demande pas plus d’une heure de lecture, et il y a plus : comme en condensant, il obéit à la nature d’un esprit qui peut pincer avec des doigts nerveux, mais qui ne saurait étreindre à pleins bras, c’est le plus court qui vaut le mieux chez M.  […] — ne serait plus, à son tour, qu’une petite mécanique plus ou moins ingénieusement construite, une espèce de tourniquet à émotions, qu’on serrerait d’autant plus fort qu’on voudrait en finir plus vite… Seulement, disons-le, si l’art n’est conçu que comme une opération chirurgicale, — non nécessaire, — et que plus tôt c’est terminé, mieux ça vaut, pourquoi commencer ?

136. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

À l’attrait du pittoresque, au charme d’une langue riche et forte, ils ajoutent tout l’intérêt que leur vaut l’érudition sérieuse de leur auteur. […] Pierre Louÿs, son style lucide, d’une si insaisissable fluidité lui ont valu une suite nombreuse. […] Un livre lui valut une réputation, La Marquesita. […] Toulet et nous pourrons soutenir ce vieux renom d’esprit particulier et de finesse qui nous a valu la complaisante admiration des deux mondes. […] Charles Régismanset, un roman qui vaudrait par son audace tranquille d’être rapproché du Petit Ami.

137. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

La Fontaine vint à Paris, plut à Fouquet, bon juge de l’esprit, et le voilà transporté tout d’un coup au milieu de la société la plus brillante, devenu le poète ordinaire des merveilles et des magnificences de Vaux. […] Dans ce monde de Fouquet, La Fontaine composa Le Songe de Vaux et des épîtres, ballades, sizains et dizains ; le surintendant lui avait donné une pension, sous cette clause gracieuse qu’il en acquitterait chaque quartier par une pièce de vers. […] Les Contes lui seraient aisément venus dans ce lieu-là, non pas les Fables ; les belles fables de La Fontaine, très probablement, ne seraient jamais écloses dans les jardins de Vaux et au milieu de ces molles délices : il fallut, pour qu’elles pussent naître avec toute leur morale agréable et forte, que le bonhomme eût senti élever son génie dans la compagnie de Boileau, de Racine, de Molière, et que, sans se laisser éblouir par Louis XIV, il eût pourtant subi insensiblement l’ascendant glorieux de cette grandeur. […] On sait sa touchante Élégie : Remplissez l’air de cris en vos grottes profondes, Pleurez, nymphes de Vaux, faites croître vos ondes !

138. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

Mais ma sottise m’a du moins valu un précieux renseignement sur les limites de votre pudeur. […] Ses complaisances lui avaient valu l’honneur de la spécialité des procès de presse et des condamnations politiques. […] Jamais un procès de presse, même en cour d’assises, n’avait valu à un journaliste de « passer au banc » ; il restait près de son avocat. […] Il gémit, il pleura sur notre crime, nous peignit comme de bons jeunes gens, un peu faibles d’esprit, un peu toqués, et ne trouva pas à faire valoir, pour notre défense, de circonstances atténuantes, plus atténuantes, que de déclarer que nous avions une vieille bonne qui était depuis vingt ans chez nous.

139. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Pour Byron, mentionnons ce nom une seconde fois, il en vaut la peine, lisez Glenarvon, et écoutez, sur les abominations de Byron, lady Bl***, qu’il avait aimée, et qui s’en vengeait. […] Ce Desfontaines, abbé aussi, mourut d’hydropisie, et ses goûts très connus lui valurent cette épitaphe : Periit aqua qui meruit igné. […] Les précipices de Shakespeare valent les gouffres du Chimboraço. […] Le passage de Saumaise est curieux et vaut la peine d’être transcrit : >Unus ejus Agamemnon obscuritate superat quantum est librorum sacrorum cum suis hebraismis et syrianismis et tota hellennestica supellectile velfarragine (De Hellennestica, p. 37, ep. dédic).

140. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

Cependant, il vaut mieux encore être poli. […] Pour cette raison, on est moins frappé qu’au premier jour ; mais ce n’est pas la seule raison, du reste, qui puisse expliquer la pâleur ou la lenteur du succès d’un livre dans lequel, selon moi l’auteur vaut bien ce qu’il valait quand il fit l’Oiseau, si même il ne vaut davantage !

141. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires du marquis d’Argenson, ministre sous Louis XV »

Tous deux soutinrent par leurs talents, et, ce qui vaut mieux, épurèrent par leurs vertus l’éclat d’un nom qui rappelait des souvenirs puissants, mais impopulaires, et une gloire un peu sombre. […] Il acheva ses Considérations sur le gouvernement français dont il avait lu au club les premières ébauches et qui lui valurent dans la suite une honorable mention de Rousseau.

142. (1887) Discours et conférences « Appendice à la précédente conférence »

Il est la meilleure preuve de ce grand axiome que nous avons souvent proclamé, savoir que les religions valent ce que valent les races qui les professent.

143. (1767) Salon de 1767 « Peintures — [autres peintres] » pp. 317-320

Je n’en ai jamais rien vu qui vaille. […] Nota Bene que dans la liste précédente quand je dis qu’un artiste est excellent, c’est relativement à ses contemporains, à une ou deux exceptions près, qui ne valent pas la peine d’être désignées ; et que quand je dis qu’il est mauvais, c’est relativement au titre d’académicien dont il est décoré.

144. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 25, du jugement des gens du métier » pp. 366-374

Enfin ils sont prévenus en faveur de quelque partie de l’art, et ils la comptent dans les jugemens generaux qu’ils portent pour plus qu’elle ne vaut. […] Un peintre qui de tous les talens necessaires pour former le grand artisan, n’a que celui de bien colorier, décide qu’un tableau est excellent ou qu’il ne vaut rien en general, suivant que l’ouvrier a sçû manier la couleur.

145. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

Tout voyage se passe après, en esprit, il vaut, par recherche ou comparaison, quand on est de retour. […] Style, versification s’il y a cadence et c’est pourquoi toute prose d’écrivain fastueux, soustraite à ce laisser-aller en usage, ornementale, vaut en tant qu’un vers rompu, jouant avec ses timbres et encore les rimes dissimulées ; selon un thyrse plus complexe. […] Renouer la tradition à des souhaits précurseurs, comme une hantise m’aura valu de me retrouver peu dépaysé, ici ; devant cette assemblée de maîtres illustres et d’une jeune élite. […]   Un gouvernement mirera, pour valoir, celui de l’univers ; lequel, est-il monarchique, anarchique. […] Une somnolence reposant la cuiller en la soucoupe à thé, lu un article jusqu’à la fin dans quelque revue, vaut mieux, avec le coup d’œil clos que mitre la présence aux chenêts de pantoufles pour la journée ou le minuit.

146. (1921) Enquête sur la critique (Les Marges)

Il est évident qu’un Souday vaut dix, vaut cent, vaut mille Gaston Deschamps, l’aristarque de ridicule mémoire auquel il a succédé et qu’Henri de Régnier est un autre connaisseur en Belles-Lettres que MM.  […] Il ne s’agissait pas, assurément, d’instituer un référendum dans toute la république des lettres, ou de décider au suffrage universel la question de savoir ce que vaut la critique actuelle et ce qu’elle devrait être. […] Fortunat Strowski (Tableau de la littérature française au xixe  siècle) a précisément cité ce curieux passage de Sainte-Beuve : « Loin de nous de penser que le devoir et l’office de la critique consistent uniquement à venir après les grands artistes, à suivre leurs traces lumineuses, à recueillir, à ranger, à inventorier leur héritage, à orner leur monument de tout ce qui peut le faire valoir et l’éclairer… ; il en est une autre plus alerte, plus mêlée au bruit du jour et à la question vivante, elle doit nommer ses héros, ses poètes ; elle doit s’attacher à eux de préférence, les entourer de son amour et de ses conseils, leur jeter hardiment les mots de gloire et de génie dont les assistants se scandalisent, faire honte à la médiocrité qui les coudoie, crier place autour d’eux, etc… »

147. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Ce plan-là en vaut un autre ; il était nouveau alors : il n’a pas cessé d’être bon. […] L’esprit n’en vaut pas l’intention. […] Le promoteur de la première croisade, Pierre l’Ermite, c’est « Coucoupètre ou Cucupiètre, ce Picard qui marche à la tête de l’armée, en sandales et ceint d’une corde, nouveau genre de vanité. » L’éloquence de saint Bernard lui vaut quelque justice ; mais Voltaire s’en rachète bien vite aux yeux de Frédéric, par un portrait de saint Bernard « refusant l’emploi de général pour se contenter de celui de prophète, prêchant partout en français à des Allemands, et prédisant des victoires à des armées qui sont battues. » Pour saint Louis, auquel il n’a pas nui, aux yeux de Voltaire, d’avoir tenu tête à Rome, il l’admire sincèrement ; mais Saladin lui est plus cher. […] L’Essai n’en est pas moins le premier modèle de la critique historique, et si l’exécution n’en vaut pas toujours la méthode, la méthode est la bonne, et l’esprit humain n’en changera pas. […] Concluons de ces différences, non pas que les Lettres de Cicéron valent mieux que la Correspondance de Voltaire, mais qu’un païen qui cherchait sa morale est quelquefois d’un meilleur commerce pour l’âme qu’un chrétien qui s’est ôté la sienne.

148. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

Ne parlez pas… Le silence vaut mieux. […] Écoutons jaser la brise et rêvons : Va, l’étreinte jalouse et le spasme obsesseur Ne valent pas un long baiser même qui mente. […] Il prend soin de nous avertir que ce document vaut pour l’ensemble de sa génération : « Je vais vous parler un peu des jeunes filles et des jeunes gens… Le décousu de leurs sentiments factices… Ah ! […] ces mois passés à prendre son élan, pour ne jamais sauter. » Il s’engage pourtant, vaille que vaille, mais, tandis que le flirt se poursuit, il s’aperçoit de l’accord impossible et que tous deux chantent le même air sur un ton différent.

149. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

Aveugle et souffrant sans espoir, presque sans relâche, je puis rendre ce témoignage, qui de ma part ne sera pas suspect : il y a au monde quelque chose qui vaut mieux que les jouissances matérielles, mieux que la fortune, mieux que la santé même, c’est le dévouement à la science ». […] Boileau se moque de Clélie, « cette admirable fille, qui vivait de façon qu’elle n’avait pas un amant qui ne fût obligé de se cacher sous le nom d’ami ; car autrement ils eussent été chassés de chez elle. « Certes la subtilité n’est pas le vrai : mieux vaut pourtant être ridicule que vulgaire, et c’est un moyen trop commode pour échapper au ridicule que de se réfugier dans la banalité. […] Il ne s’agit plus de dire ce qui est, mais ce qu’il convient de dire. « Qui ne croit rien ne vaut rien », a dit M. de Maistre. […] Reid)  Plus de vigueur d’esprit montre bientôt le peu de fondement de cette nouvelle tentative ; on s’attaque à l’instrument même : de là un grand, terrible, sublime scepticisme (Kant, Jouffroy, Pascal)  Enfin, la vue complète de l’esprit humain, la considération de l’humanité aspirant au vrai et s’enrichissant indéfiniment par l’élimination de l’erreur, amène le dogmatisme critique, qui ne redoute plus le scepticisme, car il l’a traversé, il sait ce qu’il vaut, et, bien différent du dogmatisme des premiers âges, qui n’avait pas entrevu les motifs du doute, il est assez fort pour vivre face à face avec son ennemi. […] Autant vaudrait espérer que le scepticisme engendrera la foi et qu’une religion nouvelle sortira des bureaux d’un ministère ou des couloirs d’une assemblée.

150. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

L’éclat que produisit cette affaire du livre De l’esprit, la position fausse où elle plaça tant de personnes considérables, et le conflit des juridictions qui s’y produisit ouvertement, suggérèrent un moment l’idée de dresser une loi qui régirait la matière, loi qu’il valait mieux que le roi fît que de la laisser faire au Parlement ; et c’est à cette occasion que M. de Malesherbes se mit à rédiger ses intéressants Mémoires sur la librairie. […] , mais de contenir Diderot en lui représentant que sa modération à l’avenir, son attention à éviter dans ce grand travail tout sujet légitime de plainte, lui pourrait valoir ce qu’on appelait alors les grâces du roi ; et il aurait voulu même qu’on lui en donnât quelque garantie à l’avance dans une lettre ministérielle : Si vous approuvez cette idée, disait-il en finissant, et que vous croyiez qu’on la puisse mettre à exécution, j’en parlerai, si vous le jugez à propos, à Mme de Pompadour, et je vous prierai ensuite de vouloir bien me guider dans les autres démarches nécessaires pour l’effectuer. […] Fréron aurait en tout ceci un trop beau rôle, si je n’ajoutais que, vers la fin de sa lettre, son amour-propre prenait le dessus et s’exaltait jusqu’à dire : Je crois que je m’y connais un peu, monsieur ; je sais ce qu’ils valent, et je sens ce que je vaux. […] Il était négligé dans sa forme, rond dans sa tournure, et avait quelque chose de l’homme de campagne. — « M. de Malesherbes, lui disait Louis XVI, vous et moi avons ici le ridicule de tenir aux mœurs du vieux temps ; mais ce ridicule ne vaut-il pas mieux que les beaux airs d’aujourd’hui ? 

151. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre x »

Je ne pourrais pas me battre si je n’espérais pas dans la naissance de cette France-là, qui, elle, aura valu qu’on tue et qu’on meure pour elle… (Lettres publiées aux éditions de Foi et Vie.)‌ […] Vraiment ce pays de France vaut qu’on se batte pour lui…‌ Il arrive dans les bois de Meuse, voisins des coteaux, des sources et des bosquets de Jeanne d’Arc. […] Quelle pluie de mirabelles et que c’était bon…‌ Ô Jean-Jacques, voilà qui vaut mieux encore que votre cerisier d’Annecy et les deux demoiselles charmantes. […] Touchés ou non de la balle folle, ces enfants magnifiques se valent. […] Ô jeunes gens, qui valez mieux que nous !‌

152. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre V. Du jeu, de l’avarice, de l’ivresse, etc. »

Dans cette situation, toutefois, si l’on dépend de la fortune, on n’attend rien de l’opinion, de la volonté, des sentiments des hommes ; et sous ce rapport, comme on a plus de liberté, on devrait obtenir plus de bonheur ; néanmoins ces penchants avilissants ne valent aucune véritable jouissance ; ils livrent à un instinct grossier, et cependant exposent aux mêmes chances que des désirs plus relevés. […] Et comme tous les sentiments qui ont le caractère de la passion, dévorent jusqu’à l’objet même qu’ils chérissent ; l’égoïsme devient destructeur du bien-être qu’il veut conserver, et l’avarice interdit tous les avantages que l’argent pourrait valoir.

153. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXIII. Des panégyriques en vers, composés par Claudien et par Sidoine Apollinaire. Panégyrique de Théodoric, roi des Goths. »

Colletet, pensionné par un ministre, n’en est pas moins ridicule, et le Cid persécuté n’en vaut que mieux. […] Souvent les panégyriques valent mieux que les rois : ici c’est le contraire.

154. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Mon quibikque ne valait presque rien ; toutes les roues étaient déferrées. […] Je vous dirai, en attendant, que le climat de ce pays-ci vaut mieux que les habitants. […] Tous les habitants ont la… Ainsi voilà une misère de moins que leur vaudra la connaissance des Européens. […] Les hommes ne valent pas la peine d’être gouvernés. […] ils ne valaient pas en vérité la queue de Favori.

155. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

Appliquant cette idée aux dernières époques historiques, il montre que le xvie  siècle, par exemple, fut un siècle de troubles et de divisions, d’abaissement de l’autorité royale et de rébellions à main armée, tellement que ces guerres et rivalités de princes et de grands seigneurs sous forme de religion étaient devenues le régime presque habituel : Comme il y avait beaucoup de chemins différents pour la fortune, et des moyens de se faire valoir, l’esprit et la hardiesse personnelle furent d’un grand usage, et il fut permis d’avoir le cœur haut et de le sentir. […] Pour moi, je l’avoue, ces beaux raisonnements et pronostics de décadence, même en partie justifiés depuis, me touchent peu ; il me semble qu’il y avait quelque chose qui eût mieux valu : supporter quelques refus de plus de la part de Louvois, tenir bon sous les armes et sous le drapeau, et rester en mesure pour être de ceux qui honoreront la France dans ses mauvais jours avec Boufflers, ou qui la sauveront avec Villars. Cela ne valait-il pas mieux que de se gorger, comme nous le verrons, dans les orgies de la butte Saint-Roch ou du Temple ? […] Mieux vaudrait encore un démon au cœur que cette absence de tout ressort, de tout mobile élevé77.

156. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — II » pp. 18-34

J’ai vu l’océan agité, mais ce désordre, quelque sublime qu’il soit, est loin de valoir, à mon gré, le spectacle de la mer sereine et bleue. Mais pourquoi dire que l’un ne vaut pas l’autre ? […] Et alors, qu’elle cesse ; car ce que j’écris, ce que j’ai écrit et ce que j’écrirai ne vaudra jamais le sommeil d’un atome. […] Mais quand il se risquait à dire ces choses à ses amis, gens d’esprit, gens du métier, de spirituel entrain et de verve, à d’Aurevilly, à Scudo, à Amédée Renée4 et quelques autres, il était impitoyablement raillé et tancé, et, ce qui vaut mieux, il était rassuré contre lui-même ; il leur empruntait, à son insu, de leur mouvement et de leur intrépidité5.

157. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

Je ne les donne que pour ce qu’ils valent, mais il ne faut pas tout à fait les ignorer. […] À Paris et dans les salons on le faisait valoir à l’excès, par opposition à son collègue : « Les troupes, disait-on, ont en lui une entière confiance, parce qu’elles sont assurées qu’il paye de sa personne, et que le courage est ce qui les frappe le plus. » Louis XV qui, pendant ces mois-là, se comparait à l’oiseau sur la branche et qui désirait, disait-il, vieillir, ne pouvait s’empêcher de tenir le maréchal de Noailles au courant de ces méchants propos : « J’ai promis de vous tout dire, vous voyez que je tiens parole. […] Le maréchal de Noailles, en cette crise troublante, ne fait rien qui vaille en Alsace, et s’il est vrai que Louis XV ait dit au comte d’Argenson : « Écrivez de ma part au maréchal de Noailles que, pendant qu’on portait Louis XIII au tombeau, le prince de Condé gagna une bataille » ; si ce mot, qui a tout l’air de ceux qu’on fait après coup et qu’on prête aux rois, n’est pas de l’invention de Voltaire, le maréchal répondit mal à l’appel ; il ne répondit certainement pas à l’intention ; il a manqué là le moment rapide, le moment illustre ; il n’est pas Turenne, et dès cet instant le prestige de son grand crédit s’évanouit. […] Et pourtant tous les contemporains qui en valent la peine sont d’accord là-dessus : le maréchal est homme à donner d’admirables conseils, même au comte de Saxe (voir Lettres et Mémoires tirés des papiers de ce dernier) ; il a de l’entrain quand il écrit ; il appelle le maréchal de Saxe son fils : il a des effusions et des démonstrations qui ne déplaisent pas : mais en tout il écrit mieux qu’il n’agit, ; il fait de beaux mémoires pour justifier ses lenteurs (Journal du duc de Luynes, tome VI, page 73) ; il a des quantités de projets et des infinités d’idées à la fois, qui donnent de l’éblouissement et qui se nuisent (ibid.

158. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

Ses biens valent en capital près de 4 milliards23, ils rapportent de 80 à 100 millions, à quoi il faut joindre la dîme, 125 millions par an, en tout 200 millions, somme qu’il faudrait doubler pour en avoir l’équivalent aujourd’hui ; outre cela, le casuel et les quêtes24. […] En fait d’histoire, il vaut mieux continuer que recommencer. — C’est pourquoi, surtout quand la majorité est inculte, il est utile que les chefs soient désignés d’avance par l’habitude héréditaire qu’on a de les suivre, et par l’éducation spéciale qui les a préparés. […] Marquis de Bouillé, Mémoires, 41. — Notez toujours qu’il faut au moins doubler ces chiffres pour avoir ceux qui leur correspondraient aujourd’hui. 10 000 livres de rente en 1766 en valaient 20 000 en 1825. […] La place de chancelier chez le duc d’Orléans vaut 100 000 livres par an (Gustave III et la cour de France, par Geffroy, I, 410).

159. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

Il nous parle de cette « aristocratie submergée qui se maintient, vaille que vaille, à la surface de notre société remuée — dont elle pourrait bien n’être que l’écume, quoiqu’elle affiche assez volontiers la prétention d’en être la crème. » Il ne dissimule point que la vie qu’on mène là est « nulle et attirante comme le vide », ni que les membres de cette confrérie flottante ne sont point tous des modèles de grâce et de distinction : Quand ils furent assis côte à côte sur deux de ces chaises de louage si bêtement alignées pour le plus interminable des divertissements chorégraphiques, ils furent frappés en même temps de la vulgarité d’ensemble de cette pépinière de mondains et de mondaines. […] Sa philosophie est plus parfaite que celle de l’artiste qui écrit — et qui trahit par là quelque ingénuité, car il se figure apparemment qu’il vaut la peine d’écrire et que la gloire littéraire est quelque chose. […] Et, fût-on soi-même l’inventeur du système réfrigérant dont on invoque le secours dans les grandes crises de la passion, on ne tarde pas à se dire, mettant de côté tout amour-propre d’auteur, qu’il n’y a pas de système qui vaille une caresse de femme aimée, ni de traité de morale que l’on puisse mettre en balance avec l’immorale, mais toute-puissante volupté d’un amour heureux.

160. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

… mais cela vaut de l’or ! […] … Et il raconte à Dusaulx l’histoire des moineaux que Rousseau nourrissait chaque matin, auxquels il donnait du pain sur sa fenêtre, et qu’il se flattait d’avoir apprivoisés : J’avais bien le droit, ce me semble, dit Rousseau parlant par la bouche de Rulhière, de croire que nous fussions les meilleurs amis du monde ; point du tout, ils ne valaient pas mieux que les hommes. […] Homme de lettres, il était entré à l’Académie en 1787 avec un discours supérieur de vues et parfait d’élégance, qui lui avait valu un applaudissement unanime. […] Parmi les places et prérogatives dont jouissait Rulhière, il est une sinécure trop singulière pour ne pas être notée ; il avait ou devait prochainement avoir le gouvernement de la Samaritaine, ce qui valait de cinq à six mille livres.

161. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre III. L’art et la science »

Tant vaut le cerveau, tant vaut le cœur. […] La beauté de toute chose ici-bas, c’est de pouvoir se perfectionner ; tout est doué de cette propriété : croître, s’augmenter, se fortifier, gagner, avancer, valoir mieux aujourd’hui qu’hier ; c’est à la fois la gloire et la vie. […] Et il est probable que les tempêtes d’Orphée valaient celles d’Homère, bien qu’Orphée, lui, n’eût, pour soulever les vagues, que deux vents, le Phœnicias et l’Aparctias, c’est-à-dire le vent du sud et le vent du nord, souvent confondus à tort, observons-le en passant, avec l’Argestes, occident d’été, et le Libs, occident d’hiver.

162. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Il ne vaut pas la peine de s’arrêter sur tous ces libelles, en vers ou en prose, signés de Cotin, de Coras, de Boursault, de Carel de Sainte-Garde, de Pradon, de Bonnecorse, qui s’échelonnent de 1666 à 1689 : ce ne sont que chicanes puériles, insinuations perfides, ou injures grossières. […] C’est ce que disait Chapelain, mais il le disait de la Pucelle : et c’est un argument qui ne vaut que par l’occasion où l’on s’en sert. […] À ce triple titre, et par l’autorité que ses lumières et sa facilité lui avaient value, il représentait pour Boileau le goût de l’école à laquelle il faisait la guerre.

163. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VII. Maurice Barrès et Paul Adam » pp. 72-89

(Parallèlement les écrits des poètes valent comme excitateurs.) […] Mais un âne vivant vaut mieux, non seulement qu’un lion mort, mais même qu’un lion à naître, éventuel et douteux… Et jusqu’à ce qu’un mien livre ait prouvé le contraire, je n’ai pas le droit de ne pas reconnaître qu’Oscar Méténier, par exemple, dont cependant l’écriture est hâtive et la pensée de court vol, vaut mieux que moi-même.

164. (1890) L’avenir de la science « IV » p. 141

En vérité, je crois qu’il vaudrait mieux laisser le peuple pauvre que de lui faire son éducation de la sorte. […] Il eût mieux valu sans doute ne pas abstraire si fort votre Dieu, ne pas le placer dans ces nuageuses hauteurs où, pour le contempler, il vous fallut une position si tendue. […] Car le barbare, avec ses rêves et ses fables, vaut mieux que l’homme positif qui ne comprend que le fini.

165. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre V. Les esprits et les masses »

Exister, c’est savoir ce qu’on vaut, ce qu’on peut, ce qu’on doit. […] Il ajouterait ici, si cela valait la peine d’être dit, que, la part faite à l’erreur possible, ce mot, sorti de sa conscience, a été la règle de sa vie. […] Mieux vaut encore être flatté, comme Louis XV, par un chat.

166. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Police générale d’une Université et police, particulière d’un collège. » pp. 521-532

Il vaut mieux risquer d’égarer le génie que d’enlever aux professions subalternes une multitude d’enfants pour les livrer à tous les vices qui suivent l’ignorance et la paresse. […] Il vaut mieux savoir peu et bien, même ignorer, que de savoir mal ; la fausse science fait les entêtés et les confiants ; l’ignorance absolue dicte la circonspection et inspire la docilité. […] Au lieu d’affecter une supériorité de savoir, il vaudrait mieux avoir l’air d’étudier et, de travailler avec eux ; c’est ainsi qu’en apprenant on les familiariserait avec l’art de montrer.

167. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

Or, quelles que soient les sévérités contre les œuvres, le dictame à mettre sur l’amour-propre d’un homme est toujours souverain quand le miel en est composé avec les fleurs de l’espérance et quand la Critique a le droit de dire : Son esprit vaut mieux que ses livres, et voilà pourquoi il peut et même il doit faire mieux. […] Monselet, qui a étudié le xviiie  siècle sans précaution, et qui était, il y a quelques jours encore, visage contre visage avec la face de satyre du chèvre-pieds littéraire Rétif de la Bretonne, l’auteur du Paysan perverti, a échappé si peu à l’influence du xviiie  siècle pour le déshabillé du détail et la crudité de l’expression, qu’il se donne, sans aucun embarras, dans la préface même de son livre, pour une espèce de continuateur de Louvet de Couvray, quoiqu’il vaille infiniment mieux de toutes manières que ce misérable écrivain, de fausse élégance et de faux monde, ce Girondin du vice, « tout laitage aigri et cantharides noyées  », comme disait Byron de Lewis. […] C’est sous l’empire de ce système — qui, scientifiquement, vaut, certes !

168. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Avertissement »

« Bien écrire, c’est penser ou sentir quelque chose qui vaille la peine d’être dit, et le dire précisément comme on le pense ou comme on le sent. […] Pour ceux qui commencent à écrire, nul livre ne vaut la voix du maître, et nul exemple n’est bon que celui qu’ils se donnent à eux-mêmes.

169. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Orientales » (1829) — Préface de l’édition originale »

Qu’il vaut bien mieux une belle et correcte nudité, de grandes murailles toutes simples, comme on dit, avec quelques ornements sobres et de bon goût : des oves et des volutes, un bouquet de bronze pour les corniches, un nuage de marbre avec des têtes d’anges pour les voûtes, une flamme de pierre pour les frises, et puis des oves et des volutes ! […] En y réfléchissant, si cela pourtant vaut la peine qu’on y réfléchisse, peut-être trouvera-t-on moins étrange la fantaisie qui a produit ces Orientales.

170. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 29, si les poëtes tragiques sont obligez de se conformer à ce que la geographie, l’histoire et la chronologie nous apprennent positivement » pp. 243-254

Ces sortes de critiques courent dans le monde, sur tout quand une piece est nouvelle, et souvent on les fait valoir contre un poëte encore plus qu’elles ne devroient valoir.

171. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 7, que les genies sont limitez » pp. 67-77

Mais ne vaut-il pas mieux être un des premiers parmi les païsagistes que le dernier des peintres d’histoire ? Ne vaut-il pas mieux être cité pour un des premiers faiseurs de portraits de son temps, que pour un miserable arrangeur de figures ignobles et estropiées.

172. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Armand Baschet »

Ni le testament de Charles II, dont Henri Delatouche a fait une comédie, ni le renvoi de la princesse des Ursins, qui en serait une si belle s’il y avait un homme en France capable de manier un sujet de cette force-là, ni sa prise de bec à bec avec la femme qu’elle avait faite reine et qui l’en paya en la faisant jeter, sans une chemise de rechange, à la frontière, ne valent l’impayable comédie de ce mariage de Louis XIII, qui n’a besoin que de trouver un Beaumarchais pour être plus comique que le Mariage de Figaro. […] Il a bien tourné, comme on dit vulgairement, autour du pot, et même de tous les pots, depuis les petits pots où buvaient les pies-grièches de cet oiseleur couronné, qui ne valait pas ses faucons, jusqu’au pot de chambre (révérence parler !)

173. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

Ne feroit-on pas valoir alors les six mille ans d’approbation, comme aujourd’hui l’on fait valoir les trois mille ? […] Un dieu, selon lui, ne vaut précisément que deux hommes. […] L’esprit géometrique vaut bien l’esprit commentateur. […] C’est alors que je fis mes odes qui me valurent quelque approbation du public, et enfin le gage le plus flatteur de cette approbation, par l’honneur que me fit l’académie françoise de me recevoir dans son corps. […] Malgré tous ces adoucissemens, le discours est encore vicieux, parce que j’y fais trop valoir les secours des troyens, et que j’y mêle trop aussi la volonté des dieux.

174. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

Je suis étonné des propos édifiants que je vous ai tenus, et j’en éprouve quelque pudeur, car mes paroles valent évidemment mieux que moi. Mais vous ne m’accuserez pas d’avoir voulu me faire valoir en les prononçant, puisque je vous ai prévenus que ce que j’exprimerais ici, ce seraient vos propres pensées. […] Car notre plaisir vaut en somme ce que nous valons. […] Puis, on ne voit pas assez si l’auteur est ironique dans cette conclusion même, et s’il se rend bien compte que Costard et Bobette, « rangés » de la façon qu’il dit, vaudront moins qu’ils ne valaient, puisque passer du nouveau jeu au vieux jeu, ce sera, pour eux, passer du cynisme ingénu à l’hypocrisie. — Mais surtout ce dernier acte est si inutile ! […] Donc, nous inclinons à croire finalement, avec l’auteur, que Piégois, qui certes ne vaut pas grand’chose, vaut pourtant mieux que ce sec et lâche Henri Tasselin, qui n’a encore volé personne, mais qui est sans entrailles.

175. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Qu’il se donne ou qu’il se vende, ce qui lui vaut un nom spécial, c’est qu’il donne ou vend des apparences et des déceptions. […] La composition du livre ne vaut pas mieux que sa conception générale. […] Elle fait des quatrains qui valent celui de Rachel Boyer. […] L’érudition de Mme Carette, toujours née Bouvet, vaut son talent d’écrivain. […] La collection vaut bien celle d’Armand Sylvestre, l’inepte papa de Lekelpudubec.

176. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

La science ne vaut qu’autant qu’elle peut rechercher ce que la révélation prétend enseigner. […] Je trouve, moi, que les religions valent la peine qu’on en parle et qu’il y a dans leur étude autant de philosophie que dans quelques chapitres de sèche et insipide philosophie morale. […] Aucun argument logique ou métaphysique ne vaut contre lui. […] L’Italie païenne de Jules II et de Léon X ne valait-elle pas cette Italie exclusivement catholique de Pie V et du Concile de Trente ? […] Tel ouvrage allemand de premier ordre est lourd et insupportable en français ; ôtez à l’eau de rose sa senteur, elle ne vaut pas de l’eau ordinaire.

177. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Elle lui a valu dans la haute société, en France et hors de France, de puissantes amitiés. Elle lui vaut l’influence très réelle qu’il exerce sur la jeunesse. […] De la prédication au dix-huitième siècle, il vaut mieux ne rien dire. […] On devine que c’est un passage plus soigné et que le Père veut faire valoir. […] Ce système est un moyen, vaille que vaille, pour rendre la prédication plus vivante.

178. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Lisez, jugez et croyez ce que vous pourrez, et puis offrez à Dieu votre incrédulité, qui vaut mille fois mieux que la crédulité d’un autre. […] Vous trouveriez, dit-il, une famille toute disposée à vous aimer, à vous admirer, et, ce qui vaut mieux, le plus beau pays du monde. […] Les partis mitoyens ne valent rien ; dans le moment actuel, ils valent moins que jamais. […] Le salon de l’ambassade lui vaut mieux que le petit cabinet de Colombier. […] Vous me direz que, si c’est tout, il ne vaut pas la peine de vivre.

179. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

C’est un livre plein d’onction & écrit avec cette simplicité touchante qui vaut quelquefois mieux que l’éloquence. […] Ce titre vaut un analyse. […] Alletz, vaut mieux que l’ouvrage d’Hermant ; mais la partie historique est trop abrégée, & ce Dictionnaire, quoique fait avec soin, est d’une médiocre utilité pour la connoissance des événemens qui ont précédé, accompagné ou suivi les grandes Assemblées ecclésiastiques. […] Racine, son histoire vaut beaucoup mieux que celle de l’Abbé de Choisi. […] Macquer, en deux volumes in-8°. 1757. vaut beaucoup mieux.

180. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre IV. Comparaison des variétés vives et de la forme calme de la parole intérieure. — place de la parole intérieure dans la classification des faits psychiques. »

Nous ne devons pas exprimer au dehors toute notre existence intérieure ; il en est une partie qui, n’étant que pour nous, doit rester entièrement nôtre ; la raison nous le dit, et, si la raison ne nous trompe pas, il est inutile que nous croyions externer ce qui doit rester interne et reste tel en effet ; quand on est raisonnable, mieux vaut l’être jusqu’au bout ; être raisonnable et s’imaginer qu’on ne l’est pas, c’est ne pas l’être entièrement, c’est mêler un grain de folie à une sagesse qui, dès lors, est imparfaite. […] Mais, malgré tout, cet élément de la pensée est bien une parole ; s’il a perdu les caractères accessoires de la parole physique, il en a gardé tous les caractères intrinsèques ; c’est une parole affaiblie, purifiée de tout mélange, et incorporée à la pensée ; mieux vaut donc continuer à l’appeler une parole. […] L’ancienne psychologie distingue l’imagination créatrice et l’imagination reproductrice ou mémoire imaginative, qu’il vaudrait mieux nommer mémoire des sensations. […] Mieux vaut, en effet, dans la classification des faits psychiques élémentaires, réserver le mot imagination pour les faits qui sont nouveaux à quelque degré234, et caractériser la mémoire par l’absence de toute innovation. […] Autant vaudrait dire que la parole intérieure est une hallucination qui n’a aucun des caractères de l’hallucination ; car l’hallucination proprement dite, si souvent décrite par les aliénistes, est un phénomène intermittent, toujours anormal, presque toujours morbide, et surtout elle implique toujours une illusion : son élément caractéristique est le jugement d’extériorité que nous portons à tort, trompés par les caractères anormaux de certains états de conscience purement internes237.

181. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

D’ailleurs, une critique un peu large et qui se pique de justice n’a point à faire de chicanes à des facultés qui naissent tard, pourvu qu’elles naissent ; à des œuvres inespérées et qui rompent une série de travaux sur lesquels on pouvait compter, pourvu toutefois que l’œuvre nouvelle vaille ce qu’on perd dans un autre ordre. […] c’est là justement ce qu’il importe de dire, nous croyons que le succès de Mme de Longueville, succès qui, du reste, vaut le livre, peut s’expliquer très bien par des raisons qui ne sont nullement les mérites de M.  […] On ne les trouve pas plus dans ce livre que dans les autres histoires que nous avons de Mme de Chevreuse, qui était suffisamment connue, — connue exactement pour ce qu’elle valait. […] trente femmes qui, essentiellement, valent cette duchesse aux amours faciles, et qui dépensent sur les misères d’une vie abjecte une énergie supérieure à la sienne. […] Cousin cela vaut le serment d’Annibal !) 

182. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Vaut-il mieux que cette race s’expose de temps en temps à perdre sa liberté par une dictature de son armée ? En d’autres termes : vaut-il mieux vivre désarmés devant l’Europe ou désarmés devant soi-même ? […] S’il faut que quelque chose soit exposé, il vaut indubitablement mieux que ce soit un mode de gouvernement de la France que la France elle-même. […] c’est différent, dit-il, je ne savais pas… cela vaut mieux en effet. […] « — Oui, oui, lui dis-je, ne soyez pas enfant, ça vaut mieux.

183. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Les œuvres qu’on tentait étaient monstrueuses, au lieu d’être parfaites ; et elles valaient moins encore, s’il est possible, que le système hautain et vide qui prétendait les inspirer. […] Regrettons, si nous le voulons, de n’en avoir qu’une faible partie ; mais ne réduisons pas encore notre richesse, en ne comprenant point assez tout ce que vaut ce trésor. […] « Ainsi, l’on peut compter dans toute la tragédie six éléments qui servent à déterminer ce qu’elle est et ce qu’elle vaut : ce sont la fable, les mœurs ou caractères, le style, l’esprit ou les sentiments, le spectacle et la mélopée. […] Peut-être la dialectique vulgaire de son temps ne valait-elle pas davantage ; peut-être même celle que Kant a voulu ressusciter ne vaut-elle pas beaucoup mieux ; mais on peut l’affirmer contre Aristote et contre Kant, ce n’est pas là la dialectique de Platon. […] Évidemment les faits ne vaudront qu’autant qu’ils contribueront à ce résultat décisif.

184. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

L’intention était bonne ; mais ces articles de journaux ne valaient réellement pas la peine qu’il les réimprimât. […] Après le départ de Mme Récamier, je réfléchissais aux jugements de ce monde : il a souvent accusé cette jolie femme de coquetterie, de légèreté, et je la voyais livrée à un sentiment si profond de regret, elle exprimait en si peu de mots et avec tant de douceur ses plaintes, que j’ai plus d’une fois pensé que tous les succès de Mme de Staël ne valaient point une semblable amitié. […] Alors, me supposant l’amie d’un homme à pendre, je suis devenue l’objet de la considération et de l’intérêt général, ce qui m’a valu des confidences de tous les genres et très nouvelles pour moi, je vous jure ; j’en ai bien fait rire notre ami. […] Coulmann l’alla voir à Sainte-Pélagie, et il rapporte l’entretien suivant ou plutôt le soliloque du prisonnier : « L’affluence à mon procès m’a fait plaisir, disait Béranger, mais je sais ce que cela vaut.

185. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Tout ce qui vaut la peine d’être fait mérite et exige d’être bien fait, et rien ne peut être bien fait sans attention. » Ce précepte, il le répète sans cesse, et il en varie les applications à mesure que son élève grandit et est plus en état d’en comprendre toute l’étendue. […] Il aurait mieux valu presque avoir échoué totalement et n’avoir réussi à faire qu’un original en sens inverse, tandis qu’avec tant de soins et à tant de frais, n’en être venu qu’à produire un homme du monde insignifiant et ordinaire, un de ceux desquels, pour tout jugement, on dit qu’on n’a rien à en dire, il y avait de quoi se désespérer vraiment, et prendre en pitié son ouvrage, si l’on n’était pas un père. […] Mieux vaut lire un homme que dix livres : « Le monde est un pays que jamais personne n’a connu au moyen des descriptions ; chacun de nous doit le parcourir en personne, pour y être initié. » Voici quelques préceptes ou remarques, qui sont dignes de ces maîtres de la morale humaine : La connaissance la plus essentielle de toutes, je veux dire la connaissance du monde, ne s’acquiert jamais sans une grande attention, et je connais bon nombre de personnes âgées qui, après avoir été fort répandues, ne sont encore que des enfants dans la connaissance du monde. […] Des cinq sens que nous avons en partage, vous n’en avez qu’un seul qui soit affaibli, et milord Huntingdon assure que vous avez un bon estomac, ce qui vaut bien une paire d’oreilles.

186. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

Or, comme toujours, ce fut ce qui valait le moins qui tua ce qui valait le plus en lui. […] V Je crois donc qu’il eût mieux valu laisser un si grand nom tranquille. […] VI Après ce livre insuffisant sur Rivarol où ils se sont mis quatre, comme pour une contredanse, ces pauvres biographes, paillettes d’un or dont Rivarol était le lingot, on aurait pu avoir l’idée qu’il ne fallait pas toucher aux œuvres de Rivarol laissées comme elles l’étaient dans la pénombre du passé, et que rien ne valait, pour sa mémoire, l’espèce de gloire sans œuvres et sans preuves dont il avait été brillamment et vaporeusement enveloppé.

187. (1927) André Gide pp. 8-126

Mais l’idéologie d’André Gide ne vaut certes pas son style. […] Béraud, l’exemple de Molière ne vaut rien. […] Il m’accorde une certaine valeur « en tant qu’artiste », mais « comme penseur » trouve que je ne vaux rien. […] Tel régime vaut mieux pour tel peuple, à tel moment ; tel autre pour tel autre peuple, ou pour le même dans une autre période de son histoire. […] Mieux vaut s’évader avec effraction et voler des valises.

188. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXIX » pp. 117-125

Pour la gravité, elle en vaut une autre ; c’est comme chez vous cette question de la séparation de l’Église et de l’État. […] Puisqu’il faut un os à ronger, mieux vaut celui-là qu’un autre.

189. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre V »

Certains d’entre ces verbes techniques qui s’efforcent d’englober toute une théorie sous leurs syllabes barbares, ne valent qu’en raison de la théorie elle-même. « Croyez bien, dit encore Trousseau, que ces nomenclatures, dont le ridicule n’est pas le moindre défaut, ne valent guère la peine qu’on en salisse sa mémoire, et que jamais des médecins sérieux ne daigneront s’en servir, autant par respect pour la philologie que dans l’intérêt véritable du progrès de notre art. » 94 Flaubert a judicieusement évité ce défaut.

190. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Préface »

Pour répondre à cette question, il faut savoir comment cette France s’est faite, ou, ce qui vaut mieux encore, assister en spectateur à sa formation. […] D’ailleurs, l’événement par lui-même est si intéressant, qu’il vaut la peine d’être observé pour lui seul, et l’on n’a pas besoin d’effort pour exclure les arrière-pensées.

191. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre X. Zola embêté par les jeunes » pp. 136-144

Mais ce n’est pas pour ses mérites de descripteur accompli et d’adroit régisseur de foules que ce romancier vaut supérieurement. […] Le sage respect de cette obligation n’a pas empêché que les épisodes successifs des Rougon-Macquart ne vaillent par la plus inouïe variété.

192. (1890) L’avenir de la science « VII »

Cela vaut mieux sans doute ; mais enfin il n’y a pas l’infini de l’un à l’autre. […] Mieux vaut l’humble paysan qui sert Dieu que le superbe philosophe qui considère le cours des astres et se néglige lui-même.

193. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

Je connais peu de pages qui valent celles-là. […] Ghéon ne vaut rien.

194. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 10, du temps où les hommes de génie parviennent au mérite dont ils sont capables » pp. 110-121

Que le titre d’apprentif n’épouvante personne, car il est des apprentifs qui valent déja mieux que des maîtres, bien que ces maîtres fassent moins de fautes qu’eux. […] Le Guide, dit Le Carache, a fait en maître, et Le Dominiquin en apprentif ; mais, ajoûta-t-il, l’apprentif vaut mieux que le maître.

195. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 30, objection tirée des bons ouvrages que le public a paru désapprouver, comme des mauvais qu’il a loüez, et réponse à cette objection » pp. 409-421

On y entend paisiblement de mauvaises pieces, et quelquefois des comédiens qui ne valent pas mieux. […] Ils peuvent en faire valoir les beaux endroits, en excuser les mauvais, comme ils peuvent aussi extenuer le mérite des plus beaux, soit en disant qu’ils sont pillez, soit en les mettant en paralelle avec les vers d’un autre poëte qui aura traité un sujet semblable.

196. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

C’est un paysan franc-comtois, qui vaut deux paysans du Danube. […] Pour ce mystique révolutionnaire et ce ressasseur d’histoires préoccupé, l’Antiquité vaut mieux que le présent, et le présent vaudra moins que l’avenir. […] Les Spartiates exposaient l’ilote ivre devant leurs fils pour les dégoûter de l’ivresse ; mais nous ne valons pas les Spartiates, ces moines militaires de l’Antiquité, comme les appelle un moderne. […] Elle vaut mieux pour lui et pour sa ressemblance que l’ignoble portrait de Courbet. […] Et quand la Législation ne lui attacha plus, comme un carcan, son étiquette, l’Opinion lui cloua la sienne, qui valait bien l’autre en cruauté.

197. (1924) Critiques et romanciers

Quelque chose qui vaut mieux que la poésie : une offense ! […] Mais leurs négations valent des affirmations : et le doute s’est évanoui. […] Sans aucun doute, un style naturel vaut mieux. […] Conséquemment, une esthétique revient à être en quelque sorte une morale : tant vaut l’âme et tant vaudra l’image. […] Autant vaut ne le point juger.

198. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

Les idées neuves sont rares en ce monde : on pourrait n’en pas rencontrer une seule dans l’œuvre de plus d’un grand écrivain, qui n’en vaut pas moins. […] On demandera aux Italiens l’Enfer et le Purgatoire de Dante, quelques discours de Machiavel, quelques pièces de Leopardi ; aux Espagnols, deux ou trois pièces de Calderón et de Lope, et leur Don Quichotte, qui vaut seul une bibliothèque pour qui sait lire. […] Il n’est pas de mauvais livre pour un bon liseur, et le meilleur ne vaut rien si on ne sait pas l’exploiter.

199. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre V. Subordination et proportion des parties. — Choix et succession des idées »

On ne gagne rien à isoler toutes les idées particulières : autant vaudrait les laisser agglomérées en une masse confuse. […] Mais elles sont si jolies, elles feront tant d’honneur à l’écrivain, elles se présentent dans une forme déjà achevée et qui les fait si bien valoir, qu’on n’a vraiment pas la force de les exclure. […] Que valent ces traits : Rodrigue, as-tu du cœur ?

200. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

Du moins il professe hautement tous les dogmes et, par surcroît, s’émerveille volontiers, sans que cela en vaille toujours la peine, des « vues profondes de l’Église ». […] Et est-ce sa critique, croyez-vous, qui lui vaudra le paradis ? […] Comme il fait quelque chose avec le néant, comme ses inventions consistent en des riens parfaitement superflus et qui ne valent que par l’opinion qu’il en a su donner, il nous apprend que les choses n’ont de prix que celui que nous leur attachons, et que « l’idéalisme est le vrai ».

201. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verlaine, Paul (1844-1896) »

Verlaine est toujours admirable, la sûreté de son tact d’écrivain égale la délicatesse de son oreille ; ses Liturgies intimes valent ses vers d’hier, comme les vaudront ceux de demain. […] Quelle messe vaudra celle de ce cœur qui s’offre tout entier, brûlant, extasié, sur l’autel de son repentir ?

202. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

La sœur Emmerich, dans l’ordre de la mysticité, vaut tête d’homme, mais de femme, il n’y en a plus ! Elle ne vaut homme que parce qu’il n’y a plus de femme. […] il ne faut pas qu’on l’oublie, et j’avoue que j’ai un fort plaisir à le répéter aux écrivailleuses endiablées de cette époque superbement plate, puisqu’elle accepte leurs extravagantes prétentions, c’est qu’il faut que Dieu s’en mêle, par voie extraordinaire et par grâce surnaturelle, pour qu’une femme, en génie, vaille un homme… Dans l’ordre humain, cela ne s’est jamais vu.

203. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « De Stendhal »

Esprit de demi-jour et même quelquefois de ténèbres, cet Excentrique prémédité passa dans la littérature, ou plutôt à côté de la littérature de son temps, « embossé » dans une cape hypocrite, ne montrant qu’un œil, à la façon des Péruviennes sous leur mantille, un seul œil noir, pénétrant, affilé, d’un rayon visuel qui, pour aller à fond, valait bien tous les stylets de l’Italie, mais qui avait, croyez-le bien ! […] Assurément il eût mieux valu ne pas les penser et ne pas les soutenir, mais il ne s’agit pas ici du fond des choses et du mutisme radical de l’esprit de Stendhal en fait de morale, il s’agit seulement de signaler la fermeté d’un caractère dont la force augmentait encore celle d’un esprit qui, naturellement, savait oser. […] Car on se demande, en lisant ces lettres, dont quelques-unes valent en critique ce que leur auteur a jamais écrit de plus profond et de plus piquant dans ses livres, on se demande ce qu’il eût été, ce Stendhal-Beyle, s’il avait été spiritualiste et chrétien, c’est-à-dire ce qu’aucune intelligence moderne, ce qu’aucun esprit de ce côté du temps ne peut se dispenser d’être sans à l’instant même se rompre, en plus ou en moins, se dessécher, se rabougrir.

204. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Stendhal » pp. 43-59

Esprit de demi-jour et même quelquefois de ténèbres, cet Excentrique prémédité passa dans la littérature, ou plutôt à côté de la littérature de son temps, « embossé » dans une cape hypocrite, ne montrant qu’un œil, à la façon des Péruviennes sous leur mantille, un seul œil noir, pénétrant, affilé, d’un rayon visuel qui, pour aller à fond, valait bien tous les stylets de l’Italie, mais qui avait, croyez-le bien, la prétention d’être vu et même d’être trouvé beau. […] Assurément, il eût mieux valu ne pas les penser et ne pas les soutenir, mais il ne s’agit pas ici du fond des choses et du mutisme radical de l’esprit de Stendhal, en fait de morale, il s’agit seulement de signaler la fermeté d’un caractère dont la force augmentait encore celle d’un esprit, qui, naturellement, savait oser. […] Car on se demande, en lisant ces lettres, dont quelques-unes valent en critique ce que leur auteur a jamais écrit de plus profond et de plus piquant dans ses livres, on se demande ce qu’il eût été, ce Stendhal-Beyle, s’il avait été spiritualiste et chrétien, c’est-à-dire ce qu’aucune intelligence moderne, ce qu’aucun esprit de ce côté du temps ne peut se dispenser d’être, sans, à l’instant même, se rompre en plus ou en moins, se dessécher, se rabougrir.

205. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

Même pour ceux qui inclinent avec le plus de curiosité vers ces lectures, toujours un peu badaudes, même pour ceux qui n’ont pas le mépris littéraire qui convient pour des livres écrits en courant et comme sous la dictée des choses matérielles, le voyage, en soi, est si peu de chose, qu’il ne vaut guères que par le voyageur qui le raconte et qui sait y imprimer cette personnalité que rien ne remplace lorsque l’auteur ne l’y met pas. […] Supposez que le plus intéressant, le plus plein et le plus brillant sans contredit des voyageurs du xixe  siècle, le marquis de Custine, n’eût pas pris pour une vocation la paresse trop aristocratique et l’inquiétude trop troublante de son esprit, et qu’il nous eût donné moins de Voyages, nous aurions des œuvres sévères, creusées et profondes comme ce génie dépensé sur les chemins était capable d’en produire, et cela ne vaudrait-il pas mieux que les quelques belles pages au-dessus desquelles surnage, déjà obscurément, son nom ? […] Celles d’Eugène Fromentin valaient-elles donc réellement la peine qu’il a prise de les publier ?

206. (1714) Discours sur Homère pp. 1-137

Ils prétendent justifier leur goût, en prouvant la perfection de l’original qu’ils ont choisi ; et ils recommandent en même tems leur propre ouvrage, où ils se flatent d’avoir fait passer les mêmes beautés qu’ils font valoir. […] Il étoit ébloüi lui-même de l’excès où il portoit la valeur d’Achille : il lui a paru beau qu’un homme fit valoir sans cesse sa supériorité sur les autres ; qu’il ne connût de raison ni de droit que son épée, et qu’il se vengeât aussi impitoyablement que les dieux se vengent. […] Il vouloit d’un côté que son héros fût absolument nécessaire aux grecs, et qu’il valût lui seul, autant que toute l’armée. […] Les sentences triviales rebutent, parce qu’elles n’apprennent rien ; et l’on ne veut pas perdre de tems à ce qui ne vaut pas la peine d’être dit. […] ce qu’Homere a pensé et dit, ce sont ses termes, quoique rendu plus simplement et moins poëtiquement qu’il ne l’a dit, vaut certainement mieux que tout ce qu’on est forcé de lui prêter, en le traduisant en vers .

207. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

J’en parlai un jour à Vacquerie lui-même, qui me dit : « Croyez-vous que cela valût mieux auparavant ? […] Huysmans un paragraphe d’approbation qui vaut des volumes de la part de ce très compétent mais si sévère ami du Beau intelligent. […] Je riais ou je souriais de ces « leçons » ; quand ça en valait la peine, j’en profitais. […] Une bonne canne à la main vaut mieux dans plus d’un cas. […] J’entends parler de ceux à qui leurs excès, bien de leur âge et de leur intransigeance, charmante au fond, avaient valu de la part de tels critiques qui ne les valaient pas les épithètes de Décadents et de Symbolistes...

208. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Celles du mistère nous semblent d’énormes naïvetés, des maladresses ; elles froissent notre goût ; celles du théâtre de nos jours ne vaudront pas mieux dans cent ans. […] Avec une naïveté qui serait touchante si elle n’avait été si funeste, on étudia chez Homère, plus encore chez d’autres qui ne le valent pas, la formule de l’épopée : le choix du sujet, la conduite de l’action, le rôle du merveilleux, la qualité des personnages, les épisodes, la forme métrique, tout cela fut établi en règles précises12 ; et la forme tua l’esprit. […] Je ne vois qu’une seule raison de le regretter : c’est que son exemple maintint pour tout le xviiie  siècle l’illusion de la tragédie, et nous valut Rhadamiste et Zénobie, Œdipe, Mahomet, etc. […] mieux vaudrait dire : poèmes. […] La poésie des Parnassiens, même quand elle est lyrique, tend par principe à l’objectivité qui analyse et qui décrit, à l’impassibilité qui serait la négation du lyrisme…, si elle se réalisait ; mais le sentiment persiste ; uni à la science, il nous vaut chez Sully Prudhomme une œuvre extraordinaire, où le penseur a concentré, comme en un élixir, toutes les douleurs et toutes les espérances humaines.

209. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

Ces temps de néant, il fallait que j’eusse la grande patience de les laisser s’écouler inutiles, car, dans de pareilles circonstances, ce que j’aurais écrit n’aurait rien valu. […] — Oui, dis-je, j’irai au théâtre ; il me semble que ce soir il vaut mieux pour moi que je rie. […] Mais à côté de beaucoup de bonnes choses il en existe beaucoup de mauvaises, d’injustes, d’imparfaites, et un ami du fait existant est souvent un ami de ce qui est vieilli, de ce qui ne vaut rien. […] Ce qu’elle a produit pour moi de bon, je ne pourrais pas le publier, et ce qui pourrait être publié ne vaut pas la peine de l’être. […] Lamartine n’a pas écrit l’épopée qu’il rêvait, mais il a écrit quelques lois qui valent bien des chants épiques.

210. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

Il fit beaucoup valoir le P. le Bossu ; le donna pour l’homme qui avoit le mieux entendu tout le méchanisme de l’épique, & dont les décisions sur ce point devoient être autant d’oracles. […] Soyons raisonnables ; il me semble que cela vaut bien quelques opéra qui sont des ouvrages très-modestes, & presque moraux en comparaison de ceux que je cite. […] Virgile, dit-il, n’en vaut que mieux, pour n’avoir pas étalé cette profusion de caractères qu’on remarque dans l’Iliade. […] Gil Blas vaut lui seul plusieurs traité de morale. […] Nunc hæc ad minuenda mala non magis valent, Quam nœnia præficæ ad excitandos mortuos.

211. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

S’il n’y en avait point, il vaudrait beaucoup mieux être doucereux et faible qu’horrible et atroce. […] Le poème de La Pucelle n’est pas ennuyeux, et assurément le genre en est très mauvais : il vaut encore mieux ennuyer que corrompre. […]  » Les comédies de Rousseau ne sont pas bonnes, mais celles de Voltaire ne valent pas beaucoup mieux : un bossu ne doit pas reprocher à son camarade d’avoir le dos voûté. […] Condorcet procède encore plus finement ; et, à l’aide d’une distinction philosophique, qui vaut pour le moins une distinction jésuitique, il sépare Racine de ses ouvrages. […] Il vaut beaucoup mieux ne point faire de pièces de théâtre que d’en faire qui séduisent et corrompent notre jugement.

212. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

Les vieux généraux de la guerre de Sept Ans, exhumés après tant d’années et pris pour guides, se trouvèrent à court ; ils n’avaient rien appris depuis : « l’âge avait glacé chez eux les qualités qui leur avaient valu du renom, et ne leur avait pas donné le génie, car le génie n’est jamais le fruit de l’âge ni de l’expérience. » Les jeunes, « le prince de Hohenlohe, et Massenbach, son bras droit, avaient tout juste assez d’esprit et de science pour prendre de la guerre ce qu’il y avait de plus faux. » Les manœuvres leur cachaient les vrais mouvements. […] Je me décidai donc à retourner à Landsberg et à reprendre ensuite la route de Creutzburg, pensant qu’il valait mieux arriver tard que de ne pas arriver du tout. […] Si je n’avais pas éprouvé tant d’obstacles dans ma mission, nous l’aurions précédé, ce qui valait mieux que de le suivre. » Voilà la vérité40. […] Il servit à l’état-major de ces troupes qui ont contribué à la défense de la Suisse aux affaires de Frauenfeld, Zurich, Dettingen ; au Grimsel, à la défense du Valais, notamment du Saint-Bernard.

213. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Pour lui, il valait autant lire ce livre-là qu’un autre, d’autant plus que son nom s’y trouvait encadré dans l’auréole à chaque page. […] Quand une chose ou un homme lui déplaisait, ou ne valait pas la peine qu’il s’y arrêtât plus longtemps, il se détournait et portait son regard ailleurs dans ce vaste univers où il n’avait qu’à choisir ; non pas indifférent, mais non pas attaché ; curieux avec insistance, avec sollicitude, mais sans se prendre au fond ; bienveillant comme on se figure que le serait un dieu ; véritablement olympien : ce mot-là, de l’autre côté du Rhin, ne fait pas sourire. […] La Correspondance, publiée depuis, a montré Goethe le conseillant, influant salutairement sur lui sans se faire valoir, le menant à bien comme eût fait un père ou un frère. […] Il vaut mieux accepter tout cela comme un rêve. » Si Goethe était réellement amoureux, remarquez bien qu’il aurait souvent de quoi être jaloux de Bettina ; car elle se prend en courant à bien des choses et à bien des gens.

214. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

Sans ce mérite un poëte ne vaut presque pas la peine d’être lu ; il est sans couleur. […] Sur les deux ailes et sur le fond, ce sont des combats particuliers, des actions moins ramassées, plus éteintes, et fesant valoir la masse principale. […] Je préfère cette manière ; elle demande plus de fécondité, elle fournit plus au génie, tout se déploie et se fait valoir, c’est un instant d’une action générale, c’est un poëme, les trois unités y sont ; au lieu qu’à la manière de Loutherbourg, deux ou trois objets principaux, un ou deux énormes chevaux couvrent le reste. […] Si Loutherbourg en avait le secret, comme ils feraient valoir le reste de sa composition !

215. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution française »

Ils savent que dans les races d’idées c’est comme dans les races physiologiques, et qu’on peut dire à tout être, à toute chose, à toute créature : « Que je sache d’où tu viens et je saurai ce que tu vaux. » Si, comme on le verra, Cassagnac a réussi, il a rendu le plus grand service que, dans les circonstances présentes, un écrivain isolé pût rendre à la cause de l’Ordre et du Pouvoir, et il a bien mérité des gouvernements de l’Europe. […] en vaudrait bien un autre, le peuple s’est laissé apprendre la Révolution comme le mal s’apprend, mais il ne l’a point inventée. […] Selon moi, c’est une bien grande question de savoir si le Roi avait le droit de porter à terre, sous des réformes qui valaient des coups de hache, les institutions monarchiques dont il était le couronnement. […] Dans le grand procès refait une fois de plus à la Révolution française, et jugé par Granier de Cassagnac de manière à ce que désormais l’arrêt ne soit plus cassé par personne, j’ai dit qu’après les institutions, appréciées, on l’a vu, pour ce qu’elles valent, il y avait les hommes, à leur tour démasqués aussi de leur gloire, également triés et diminués au jour cruel de l’examen.

216. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Jules Vallès » pp. 259-268

Cela valait mieux. […] Ils sont de Paris comme les chiffonniers, qui valent mieux qu’eux, — comme les cocottes, ces autres réfractaires, qui ont aussi leurs historiens et leurs Vallès, non dégoûtés et quittant la place comme le Vallès, d’aujourd’hui, mais, au contraire, voulant y entrer !

217. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

S’il est véritable, cela vaut des millions. […] Cette douzaine de cuillères pouvait valoir seize mille écus. […] Il y en a qui valent jusqu’à mille tomans, qui font quinze mille écus. […] Celles qui se donnent aux gens de considération, comme des ambassadeurs, valent d’ordinaire quatre-vingts pistoles ; les autres, qu’on donne aux gens de moindre condition, ne valent que la moitié. On en donne quelquefois qui ne valent pas dix pistoles, et ne consistent qu’en une veste et une surveste.

218. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Achille vaut Mars. […] Le reflet vaut-il la lumière ? le satellite qui se traîne sans cesse dans le même cercle vaut-il l’astre central et générateur ? […] La première chose ne valait pas la peine d’être faite ; il a préféré tenter la seconde. […] Qu’a-t-il fait d’ailleurs qui vaille cette peine ?

219. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Naples est le joyau de l’Italie, qui allèche à cette proie éblouissante toutes les convoitises ; mais Naples n’en est pas le patriotisme et la force ; d’ailleurs son peuple a immensément mûri et grandi en civisme et en nationalisme ; il n’accepterait plus les premiers venus pour arbitres de sa destinée ; peuple calomnié qui vaut mieux que sa renommée, Naples est peut-être aujourd’hui le royaume de l’Italie qui est le plus capable d’institutions modernes par ses lumières ; mais sa déshabitude des armes et son petit nombre ne lui donneraient pas la force de les défendre, encore moins de les imposer seul à toute l’Italie ; vous ne ressusciteriez qu’un fantôme ; par sa situation excentrique, comme celle du Piémont, Naples peut être un brillant rayon de l’Italie : il ne peut en être le centre. […] Tournez et retournez tant que vous voudrez la question de la souveraineté temporelle des papes, vous n’y trouverez à faire valoir politiquement que cela ; c’est la meilleure raison, parce que c’est la vraie raison, et c’est la dernière que les partisans de cette souveraineté mystérieuse avaient pensé à faire valoir en faveur de cette possession d’un coin de terre par les maîtres du ciel. […] XXIII Voyez ce qui se passe à Londres : L’Angleterre cherchait en vain depuis trois siècles une position militaire, politique et navale au Midi contre nous ; elle l’avait trouvée en Espagne et en Portugal pendant la guerre de l’indépendance contre Napoléon ; lui aussi avait voulu s’annexer l’Espagne ; on a vu, à la bataille de Toulouse et à l’invasion des Anglais à Bordeaux en 1814, ce qu’a valu à la France le patronage anglais fatalement introduit en Espagne et en Portugal ! […] Son protectorat temporaire ne vaut-il pas celui du Piémont ?

220. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

Lemaître, qui vaut beaucoup par les idées qu’il exprime, vaut plus encore par la forme qu’il leur donne. […] Mais voyez-le aux prises avec une œuvre qui vaille la peine d’une étude sérieuse. […] En somme, une méthode qui consiste à étudier d’après soi-même les tendances intellectuelles et morales de toute une génération vaut exactement ce que vaut celui qui l’emploie. Dans le cas particulier elle a valu beaucoup. […] Mieux vaut, ce me semble, en marquer les limites et les dangers.

221. (1890) Nouvelles questions de critique

Gaston Paris en convient, heurte toutes les règles, la question est donc de savoir ce que valent ces règles et quel en est le vrai fondement. […] Et ce n’est pas assez de dire qu’à ce point de vue, la Chansons de Roland vaut l’Iliade ou la Divine Comédie, mais on doit dire qu’elle vaut davantage. […] En vérité, je l’assure que Buffon vaut Destouches et que Diderot vaut Sedaine. […] puisque n’ayant, en effet, le moindre candidat ni déprécier ni à faire valoir, nous en pouvons parler sans complaisance ni malice. […] Il pourrait être bon dans une histoire de la littérature, il ne vaut rien pour un Dictionnaire historique.

222. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (3e partie) » pp. 5-79

Chaque année du siècle porte ses nécessités avec sa date : Louis XVIII et la charte valaient un peu mieux que le comité de salut public et la guillotine en permanence ! […] Il s’avoua qu’il avait commis une action extrême et blâmable ; qu’on ne lui eût peut-être pas refusé ce pain, s’il l’avait demandé ; que dans tous les cas il eût mieux valu l’attendre, soit de la pitié, soit du travail ; que ce n’est pas tout à fait une raison sans réplique de dire : Peut-on attendre quand on a faim ? […] À la fatigue, pour filer un câble, pour tirer un cabestan, Jean Valjean valait quatre hommes. […] Cette longue image de quatre pages vaut tout un livre. […] Mieux valait mourir en silence !

223. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

À ce compte là Joconde valait mieux que ces impuissantes imitations ; Nicolo représentait un petit genre, il est vrai, mais il ne portait la livrée de personne. […] Il aurait pu ne pas insulter du tout, la chose est vraie, et cela eût mieux valu sans doute. […] Et beaucoup le font uniquement parce qu’ils savent ce que vaut l’œuvre et quel tort irréparable elle causerait à leurs propres productions : ceux-là sont de bons calculateurs, voilà tout. […] Henry Fouquier : il vaut mieux que M.  […] … Il vaut mieux ne pas jouer Lohengrin.

224. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Sans rechercher ce que vaut cette tentative, constatons du moins à titre de fait que la morale, elle aussi, ne s’effrayerait pas d’être indépendante et de se constituer un domaine à part. […] Que valent nos sens ? […] Et qui prouvera d’ailleurs que les faits valent mieux que les idées, et les découvertes que les recherches ? […] Nous répondons que cette question n’a point de sens et qu’autant vaudrait la poser à propos de la physique expérimentale. […] Si elle gagne quelques partisans, la suite pourra montrer ce qu’elle vaut et ce qu’elle donne.

225. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

Mais si mes confessions littéraires ont le moindre intérêt et valent quelque chose, c’est parce que j’ai rejeté loin de moi toute hypocrisie. […] Elles ne valent évidemment rien, en cas de larcin pur et simple. […] Mais en règle ordinaire, la critique est impuissante à retenir le génie sur la voie où il penche, et en règle ordinaire cette impuissance vaut mieux. […] La réclame vaut mieux, sans pouvoir d’ailleurs rivaliser avec l’incomparable effet des hyperboles gratuites et sincères d’une grande voix dans un grand journal. […] Il peut arriver qu’un livre réussisse d’abord, pour des raisons moins bonnes que celles qui lui valent sa réputation dans l’avenir.

226. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Nous autres critiques, placés entre la tradition et l’innovation, c’est notre plaisir de rappeler sans cesse le passé à propos du présent, de les comparer, de faire valoir l’œuvre ancienne en même temps que d’accueillir la nouvelle (car je ne parle pas de ceux qui sont toujours prêts à immoler systématiquement l’une à l’autre). […] Après avoir raconté qu’il a vu mourir sous ses yeux une vieille amie, une femme âgée et d’un esprit supérieur, avec qui il avait souvent épuisé, en conversant, toutes les réflexions morales et anticipé l’expérience de la vie : Cet événement, continue Adolphe, m’avait rempli d’un sentiment d’incertitude sur la destinée, et d’une rêverie vague qui ne m’abandonnait pas… Je trouvais qu’aucun but ne valait la peine d’aucun effort. […] Pour moi, je me contenterai d’en dire qu’il révèle avant tout une étoffe, un tempérament, une force ; que la main de l’ouvrier y surpasse la matière ; que la monture y vaut encore mieux que le brillant : en d’autres termes, qu’il y a plus de talent qu’il n’en faut.

227. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

Les boulets valaient bien les balles. […] Le pouvoir est beau ; il est peut-être supérieur à tout, quand il est réellement le pouvoir ; l’action n’a rien qui la vaille. Mais qu’on mette en regard, d’un côté ce livre si souverainement conduit et si harmonieusement terminé, et, de l’autre, quelques années d’un pouvoir semblable à ce qu’on voyait trop souvent par le passé, — d’un pouvoir partagé, disputé, insulté, parfois calomnié d’en bas, parfois déjoué d’en haut et du côté où l’on devait le moins s’y attendre, — d’un pouvoir le plus souvent aussi paralysé dans l’action que magnifique et brillant par le discours, mais par un discours encore qui s’envolait et ne se fixait pas en des pages durables : — et qu’on me dise, au point de vue de la gloire solide, ce qui vaut le mieux !

228. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Les succès de l’amour-propre, le dernier degré des jouissances de la personnalité, la gloire, que vaut-elle auprès d’être aimé ? […] Des années de peines et d’efforts leur valent un jour, une heure de cet enivrement qui dérobe l’existence ; et le sentiment fait éprouver, pendant toute sa durée, une suite d’impressions aussi vives et plus pures que le couronnement de Voltaire, ou le triomphe d’Alexandre. […] Si l’on veut sentir le prix de la gloire, il faut voir ce qu’on aime honoré par son éclat ; si l’on veut apprendre ce que vaut la fortune, il faut lui avoir donné la sienne ; enfin, si l’on veut bénir le don inconnu de la vie, il faut qu’il ait besoin de votre existence, et que vous puissiez considérer en vous le soutien de son bonheur.

229. (1911) Nos directions

Mais on a cru… parce qu’on espérait. — La politique nous valut une trêve qu’on rêva bienfaisante et qui ne fit, en somme, qu’aggraver la confusion. […] marthe. — Thomas Pollock, pensez-vous que la vie ne vaille que d’être gaspillée ainsi ? […] De fait, ici, le ballet ne vaut que par eux, par la fraîcheur volontairement surannée de leur pathétique. […] Que peut valoir le fond, quand vaut si rarement la forme ? […] Et son rythme vaudra ce que vaudra ce qu’il exprime.

230. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Peut-être vaudrait-il mieux que vous vinssiez ici, laissant toutes choses là-bas. […] À cette seule condition, elle peut valoir pour tous les temps et pour tous les esprits. […] Chimère sublime : mais les déceptions qu’elle leur vaut leur sont d’autant plus cruelles. […] — Il vaut mieux, Valérie, que nous n’allions pas au théâtre, à cause de Xara. […] Mais elle nous vaut encore d’autres renseignements précieux.

231. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre I. Querelle des Anciens et des Modernes »

Le Maistre est plus magnifique que Demosthène ; Pascal est au-dessus de Platon ; Despréaux vaut Horace et Juvénal, et « il y a dix fois plus d’invention dans Cyrus que dans l’Iliade. » Il y a six causes qui font les modernes supérieurs aux anciens dans la littérature : le seul fait d’être venus les derniers, la plus grande exactitude de leur psychologie, leur méthode plus parfaite de raisonnement, l’imprimerie, le christianisme, et enfin la protection du roi. […] Enfin, avec une étonnante sûreté de goût, il faisait le départ des œuvres immortelles du xviie  siècle ; il séparait les Molières des Sarrasins : il disait, pour faire valoir son temps, précisément les noms que nous disons encore.

232. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Ephrussi lui valut à Berlin la place de lecteur de l’impératrice Augusta, aux appointements de 9 000 francs par an. […] Ses Complaintes, publiées, lui ont valu du bruit et de précieuses affections.

233. (1762) Réflexions sur l’ode

Versificateur, homme de lettres, philosophe même, on se fait tout à peu de frais ; et on se plaint ensuite que ce qui a coûté si peu soit estimé ce qu’il vaut. […] Un sentiment confus semble nous dire, qu’il ne faut pas mettre à exprimer les choses plus de peine et de soin qu’elles ne valent ; et que ce qui paraîtrait commun en prose, ne mérite pas l’appareil de la versification.

234. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « J.-K. Huysmans »

Et dites si des imaginations aussi pauvres valaient la peine d’être si absurdes. […] Mais quand cette tète est l’expression de toute une société et fait équation avec elle, alors elle vaut et mérite le cri du moraliste et de l’historien, et nous le poussons !

235. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Vaut-il la peine d’être rangé fastueusement sur les rayons d’une bibliothèque, souvent pour y rester comme une momie, relié en veau ou dans sa propre peau ? […] Elle en vaut la peine. » Je montrerai aussi la tête de Diderot, et on verra si elle valait la peine d’être montrée. […] mais un artiste qui ne fait qu’une chose et qui l’accomplit eût valu plus que lui… Il a touché à tout comme Voltaire, mais il n’avait pas plus la main ailée de Voltaire qu’il n’avait la main fine et languissante de Sterne. […] En résumé, ces piètres poésies ne valent pas la peine que la Critique, qui les timbre, en passant, du fameux mot de Rabelais, les ramasse pour les regarder. […] L’esprit enthousiaste de Diderot se précipita de ce côté avec l’ardeur d’un tempérament qui valait mieux que ses doctrines, et qui le prouva par la plus complète inconséquence.

236. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Les deux partis se valent. […] Mais enfin cela vaut mieux. […] La littérature vaut bien qu’on lui applique la relativité généralisée. […] La civilisation a ses inconvénients, mais vaut mieux que cet état de nature. […] Mais on conçoit que le milieu nègre fit valoir ses lectures par contraste.

237. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Alors Gotte furieuse : « Je vaux pourtant bien Hélène ! […] Elle vaut par la minutieuse, singulière et souvent inattendue vérité des détails. […] Cette histoire vaut ce qu’elle vaut ; mais, telle qu’elle est, elle n’a assurément pas l’air d’une ballade ni d’un conte du cycle d’Arthur. […] Il est clair qu’aucune créature au monde ne vaut ce que Germaine réclame ici comme son dû. […] Ce genre en vaut un autre.

238. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Le seul ouvrage de M. de Méré qui vaille aujourd’hui la peine qu’on s’y arrête avec détail, ce sont ses Lettres ; l’on en pourrait tirer un certain nombre de singulières et d’intéressantes. […] Ainsi coupé, l’aimable récit est plus délicat ; un peu de malice s’y mêle ; le conteur n’a voulu que faire valoir les avantages du bien lire ; c’est un conseil et un encouragement qu’il donne aux jeunes gens pour s’y former : que lui demandez-vous davantage ? […] Peut-être qu’Aristide et Socrate n’étoient que trop vertueux, et qu’Alcibiade et Phédon ne l’étoient pas assez ; mais je ne sais si, pour vivre content et comme un honnête homme du monde, il ne vaudrait pas mieux être Alcibiade et Phédon qu’Aristide ou Socrate. […] Cette lettre une fois connue, je n’ai plus guère longtemps affaire avec le chevalier ; il était surtout bon, lui le maître des cérémonies, à nous introduire auprès des autres, de ceux qui valent mieux que lui. […] Madame de Sablé usait volontiers de la première de ces expressions, dire des choses, donnant à entendre que la manière relève tout et fait tout passer ; c’était sentir d’avance comme Voltaire : La grâce, en s’exprimant, vaut mieux que ce qu’on dit.

239. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

On n’a jamais fait, que je sache, une histoire complète de l’art dramatique ; autant vaudrait entreprendre l’histoire universelle du genre humain. […] Encore vaut-il mieux chercher nos pères dans Le Cabinet satyrique 37, que dans l’histoire de France écrite en très beau latin, par M. le président de Thou. […] Notez bien que les femmes de la ville ne valaient guère mieux que les femmes de la cour […] L’âge mûr est le creuset de tes mérites, et le monde, étonné de tes cheveux blancs, va savoir enfin ce que tu vaux par toi-même, ou si vraiment tu étais assez bien doué pour atteindre à la palme ardue et difficile ! […] Elle vaut bien, par les spoliations et les supplices qui l’attendent, qu’on lui pardonne son élégance et son imprévoyance à toutes les menaces de l’avenir !

240. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

Cette vie de marche, jour et nuit, par monts et par vaux, à travers les ronces et les épines, l’atteint aux entrailles, lui donne la fièvre et l’abat : « Si l’on se battait, si l’on se tirait des coups de fusil, passe au moins, cela reposerait. […] C’est payé bien plus cher que cela ne vaut. » En 1833, il est envoyé à Blaye où était enfermée la duchesse de Berry ; il s’y fait bien venir du général Bugeaud en traduisant au courant de la plume, en trois langues différentes, un petit ouvrage de lui, Aperçu sur l’art militaire. […] Les conceptions générales, les grandes vues viendront après, s’il y a lieu ; mais le grade avant tout : c’est la première condition pour pouvoir montrer à tous ce qu’on est et ce qu’on vaut. […] S’il se bat comme un lion, « c’est, dit-il à son frère, que chaque grade gagné me rapproche de vous et de mes enfants » ; et plus tard : « Il vaut mieux pour mes enfants qu’ils soient orphelins d’un colonel que d’un chef de bataillon. » En versant ainsi son sang en Afrique, en prodiguant sa vie, il ne cesse d’être occupé des siens : « Moi, je n’ai que votre souvenir pour me soutenir. […] À sa noble femme, la maréchale de Saint-Arnaud qui l’avait accompagné jusqu’à Constantinople et qui avait songé à aller même plus loinae, il écrivait de Varna, à cette heure du départ pour la Crimée : Il vaut mieux que je ne te voie pas.

241. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

Et enfin, il y a tant de bourgeois parmi les artistes, qu’il vaut mieux, en somme, supprimer un mot qui ne caractérise aucun vice particulier de caste, puisqu’il peut s’appliquer également aux uns, qui ne demandent pas mieux que de ne plus le mériter, et aux autres, qui ne se sont jamais doutés qu’ils en étaient dignes. […] Delacroix a même introduit dans ce tableau, à ce que nous croyons du moins, quelques tons dont il n’avait pas encore l’usage habituel. — Ils se font bien valoir les uns les autres. — Le fond est aussi sérieux qu’il le fallait pour un pareil sujet. […] 3° Une sibylle qui montre le rameau d’or C’est encore d’une belle et originale couleur. — La tête rappelle un peu l’indécision charmante des dessins sur Hamlet. — Comme modelé et comme pâte, c’est incomparable ; l’épaule nue vaut un Corrége. […] On dit qu’il y a des éloges qui compromettent, et que mieux vaut un sage ennemi…, etc. […] Pilliard est évidemment un artiste érudit ; il vise à imiter les anciens maîtres et leurs sérieuses allures — ses tableaux de chaque année se valent — c’est toujours le même mérite, froid, consciencieux et tenace.

242. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

De même qu’alors chacun, selon le mot du vieil Étienne Pasquier, avait sa maîtresse qu’il célébrait et magnifiait par ses vers, chacun ici avait son auteur qu’il épousait, qu’il poussait de son mieux et faisait valoir avec feu, avec science. […] Ainsi, dans la bouche de Bégon, qui, tout fort et redouté qu’il est en Gascogne, ne s’y sent pas chez lui, cette belle réponse à ceux qui lui vantent et lui énumèrent ses richesses : Le cœur d’un homme vaut tout l’or d’un pays. […] Eustache Morel, dit Deschamps, mort après 1403, à plus de 90 ans, et qui fleurissait dans la seconde moitié du xive  siècle, poète moral, didactique, gnomique, patriotique, est un de ceux qu’on a essayé de faire valoir dans ces derniers temps. […] Pellisson, qui s’était mis un jour à relire, disait qu’il ne s’en était point repenti, et « y ayant trouvé, ajoutait-il, une infinité de choses qui valent bien mieux, à mon avis, que la politesse stérile et rampante de ceux qui sont venus depuis. » Ronsard et ses amis ont droit en particulier à notre reconnaissance, à nous qui avons tenté une œuvre qui n’était pas sans quelque rapport avec la leur, et on ne dépassera pas d’un mot la stricte vérité lorsqu’on dira : « En échouant manifestement sur bien des points, ils avaient réussi sur d’autres, beaucoup plus qu’on n’a daigné s’en souvenir et le reconnaître depuis. […] Et ce qui vaudrait mieux que toutes les Poétiques, ce serait un exemple nouveau et vivant.

243. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Charles Baudelaire, m’occuper de signaler et d’expliquer ce que je vois de beau et de rare dans son talent, plutôt que de perdre mon temps à relever des taches qu’on verra bien sans que je m’en mêle, et que la charité de tels de nos confrères saura merveilleusement faire valoir. […] Faites-leur lire l’Histoire des Voyages ou les Lettres édifiantes ; abonnez-les aux bibliothèques paroissiales ; mais écartez d’elles tout livre qui a l’Art ou la passion pour but ; vers, romans, pièces de théâtre, le meilleur n’en vaut rien pour elles. […] Aurions-nous la prétention de valoir mieux que ne valaient nos pères ? La société actuelle vaut-elle mieux que celles de Louis XIV et de Henri IV ?

244. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

« Cet homme, disent-ils, était planteur de choux, Et le voilà devenu pape : Ne le valons-nous pas ? » — Vous valez cent fois mieux ; Mais que vous sert votre mérite ? […] Et puis la Papauté vaut-elle ce qu’on quitte, Le repos ? […] » Je vous dirai que je n’en sais rien ; que, peut-être, la fable avant La Fontaine, c’est-à-dire telle que Boileau en pouvait parler, puisqu’il ne parlait pas d’actualité, n’était rien du tout ou si peu de chose qu’en réalité elle ne valait guère la peine d’être nommée, pas plus, à la vérité, que le triolet, le rondeau, et il n’a sans doute pas considéré la fable comme vraiment un genre poétique, ni par son importance puisque, jusqu’à La Fontaine exclusivement, elle n’en avait pas, ni par sa forme ; et s’il a parlé du rondeau et du triolet, et du sonnet, c’est que ce sont des formes de versification, des formes, au point de vue de la versification, tout à fait intéressantes, tout à fait curieuses qu’il ne faut pas, au moins, avoir l’air d’ignorer. […] Je tiens à vous citer la jolie strophe de Victor Hugo sur La Fontaine qui vaut d’être citée.

245. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

Et c’est ce qui vaut mieux que tout ! […] Les faits valent mieux, et je les trouve dans les œuvres de notre poète et de notre conteur. […] « Cela en vaut la peine, — dit Felicia, — vous allez voir danser la Cremnitz… » « C’était charmant et féerique. […] une telle page vaut presque des vers. […] … Toujours est-il que plus de vingt-cinq ans après lui le romancier que voici a ramassé cette glane, qui vaut une gerbe, dans le riche sillon de Balzac.

246. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

Une fois il regrette de n’avoir pas fait tout exprès le pèlerinage du Perche pour y connaître la fille de Fernel, qui y était morte il y avait peu d’années ; il aurait voulu se donner l’honneur de la voir et de lui baiser les mains : « On nous fait baiser bien des reliques qui ne valent pas celle-là. » Telle est la religion littéraire dans laquelle Gui Patin a été nourri et dans laquelle il persévère jusqu’à la fin, entouré d’amis qui la partagent plus ou moins, des Gassendi, des Gabriel Naudé et autres de cette race, de ce qu’il appelle les restes du siècle d’or. […] Descartes ; que notre médecine commune ne vaut rien ; qu’il faut des remèdes nouveaux et des règles nouvelles ; que tous les médecins d’aujourd’hui ne sont que des pédants avec leur grec et leur latin… Bourdelot, on l’entrevoit, a pu lui dire quelques bonnes vérités, mais un peu trop neuves, et qui lui ont paru des scandales. […] Il vaudrait mieux qu’ils étudiassent la science des anciens dans Hippocrate, Galien et Fernel… Toujours l’érudition et l’autorité plutôt que l’expérience21. […] Du reste, le meilleur, suivant lui, n’en vaut rien ; il ne voudrait pas être à leur service.

247. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « De la tradition en littérature et dans quel sens il la faut entendre. Leçon d’ouverture à l’École normale » pp. 356-382

» Toutes les moissons sauvages, si on parvenait à les ramasser à grand-peine, valent-elles, en effet, une seule de ses guirlandes ? Tout le butin épars, toute la monnaie des autres, mise en tas et en monceau, aurait-elle valu et pesé un seul talent d’or de celle-là ? […] Il ne se passe pas de jour sans qu’on annonce une découverte : chacun veut faire la sienne, chacun s’en vante et fait valoir sa marchandise sans contrôle. […] La meilleure manière, non seulement de sentir, mais de faire valoir les belles œuvres, c’est de ne point avoir de parti pris, de se laisser faire chaque fois en les lisant, en en parlant ; d’oublier s’il se peut, qu’on les possède de longue main, et de recommencer avec elles comme si on ne les connaissait que d’aujourd’hui.

248. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Certes, instruit comme il l’était, possédant ses auteurs anciens et son siècle de Louis XIV, fidèle au goût sain, Marais eût été un membre de l’Académie française qui en eût valu bien d’autres ; mais il oublia trop, en couvant ce désir, qu’il vivait dans un cercle qui n’était pas celui du monde littéraire ; il avait en haine le salon de Mme de Lambert où se décidaient la plupart des choix académiques ; il n’était, lui, d’aucun salon. […] Et cependant la vérité est qu’il valait infiniment mieux que plusieurs de ceux qui servent à remplir notre superbe liste… » On saisit bien, dans la Correspondance de Marais avec le président Bouhier, l’instant où sa fièvre lente eut un redoublement d’accès, et où il fut tenté de se mettre sur les rangs. […] J’accepte, monsieur, cette nomination, qui me vaut une élection dans les formes, et comme la plus grande joie que j’aurais serait d’être d’un corps dont vous êtes, j’en suis dès que vous m’avez nommé, et cet in petto me plaît plus que la chose même… Vos lettres ne manqueront pas de faire du bruit ; mon nom sera mêlé avec le vôtre ; on dira que vous m’avez jugé digne d’être un jour académicien : n’en est-ce pas plus cent fois que je ne mérite ? […] Lui, il valait infiniment mieux que ce dernier rôle auquel il s’était réduit.

249. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

Composé de théorèmes prouvés, le contrat social a l’autorité de la géométrie ; c’est pourquoi il vaut comme elle en tous temps, en tous lieux pour tout peuple ; son établissement est de droit. […]  » En d’autres termes, vous cessez d’être père, mais, en échange, vous devenez inspecteur des écoles ; l’un vaut l’autre ; de quoi vous plaignez-vous ? […] Par nature, il est hostile aux associations autres que lui-même ; elles sont des rivales, elles le gênent, elles accaparent la volonté et faussent le vote de leurs membres. « Il importe, pour bien avoir l’énoncé de la volonté générale, qu’il n’y ait pas de société partielle dans l’État, et que chaque citoyen n’opine que d’après lui449. » Tout ce qui rompt l’unité sociale ne vaut rien », et il vaudrait mieux pour l’État qu’il n’y eût point d’Église  Non seulement toute Eglise est suspecte, mais, si je suis chrétien, ma croyance est vue d’un mauvais œil.

250. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

Les collecteurs, avec les huissiers, suivis de serruriers, ouvrent les portes, enlèvent les meubles et vendent tout pour le quart de ce qu’il vaut, et les frais surpassent la taille… » — « Je me trouve en ce moment en Touraine, dans mes terres. […] On leur paye quinze sous ce qui vaut un écu pour leur voiture. […] Le paysan est trop pauvre pour devenir entrepreneur de culture ; il n’a point de capital agricole640. « Le propriétaire qui veut faire valoir sa terre ne trouve pour la cultiver que des malheureux qui n’ont que leurs bras ; il est obligé de faire à ses frais toutes les avances de la culture, bestiaux, instruments et semences, d’avancer même à ce métayer de quoi le nourrir jusqu’à la première récolte. » — « À Vatan, par exemple, dans le Berry, presque tous les ans les métayers empruntent du pain au propriétaire, afin de pouvoir attendre la moisson. » — « Il est très rare d’en trouver qui ne s’endettent pas envers leur maître d’au moins cent livres par an. » Plusieurs fois, celui-ci leur propose de leur laisser toute la récolte, à condition qu’ils ne lui demanderont rien de toute l’année ; « ces misérables » ont refusé ; livrés à eux seuls, ils ne seraient pas sûrs de vivre  En Limousin et en Angoumois, leur pauvreté est telle641, « qu’ils n’ont pas, déduction faite des charges qu’ils supportent, plus de vingt-cinq à trente livres à dépenser par an et par personne, je ne dis pas en argent, mais en comptant tout ce qu’ils consomment en nature sur ce qu’ils ont récolté. […] Les paysans y vivent de seigle dont on n’ôte pas le son, qui est noir et lourd comme du plomb  Dans le Poitou et ici, on ne laboure que l’épiderme de la terre, avec une petite vilaine charrue sans roues… Depuis Poitiers jusqu’à Montmorillon, il y a neuf lieues, qui en valent seize de Paris, et je vous assure que je n’y ai vu que quatre hommes, et trois de Montmorillon chez moi, où il y a quatre lieues ; encore ne les avons-nous aperçus que de loin, car nous n’en avons pas trouvé un seul sur le chemin.

251. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

La Rochefoucauld La vie de La Rochefoucauld peut se résumer en deux mots : une période d’action furieuse, où l’amour, l’ambition, la passion de jouer un rôle, ne lui attirent que déconvenues, désastres, ruine de ses affaires et de son corps ; une période de méditation amère, lorsque, infirme et vieilli avant l’âge, il se remet en mémoire ce que lui ont valu ses hautes aspirations, lorsqu’il raconte les faits auxquels il a pris part, dans ses Mémoires, et en tire la philosophie, dans ses Maximes. […] Aucun mensonge ne lui coûte pour se faire valoir : il fausse les dates, dénature ou suppose les faits. […] Retz se plaît à détailler les conversations, les discussions politiques, où chaque partie fait valoir son intérêt de gloire ou de profit : et son entretien avec Condé, au début de la Fronde, fait vraiment pendant aux grandes scènes politiques de Corneille. […] En deux mots, il définit un homme, par sa propriété essentielle ; ou bien il développe tous les replis, fait valoir toutes les nuances, explique tous les rouages avec une clairvoyance qui devient à l’égard de ses ennemis la plus exquise perfidie.

252. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

La Gavriliade valut à son auteur le renom de révolutionnaire, outre celui d’homme immoral, un peu moins dangereux en Russie que le premier. […] Cette fantasmagorie ne vaut guère mieux que les tigres de carton que les Chinois plaçaient sur leurs forteresses pour empêcher nos gens de donner l’assaut. […] Déjà à l’apogée de sa réputation, Pouchkine défiait ses critiques et ne cherchait pas à se justifier de l’accusation d’immoralité qui, dit-on, lui valut quelques succès parmi de bonnes âmes, comme il s’en trouve toujours pour convertir les mauvais sujets. […] Il est vrai que ces études nous ont valu la Fille du Capitaine, petit roman où Pougatchev joue un rôle, et se fait mieux connaître que dans l’histoire officielle.

253. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Homme de guerre, Bussy se distingua durant vingt-cinq ans (1634-1659) par des qualités hardies et de brillants services qui, joints à plus de conduite et de ménagement du côté de l’esprit, lui auraient valu presque immanquablement le bâton de maréchal de France. […] En général, Bussy peut être frondeur et imprudent, mais il n’est pas menteur : « Et pour faire voir, dit-il encore, que c’est plutôt par amour pour la vérité que je parle, que par aucune malignité de naturel, je dis du bien, quand j’en trouve, de la même personne de qui j’ai dit du mal. » C’est en ce point que le jugement de Bussy vaut mieux que son caractère. […] car, bien que nous ne soyons pas demeurés muets chacun de notre côté, il me semble que nous nous faisons valoir l’un l’autre, et que nous nous entredisons des choses que nous ne disons pas ailleurs. […] Mais pratique du monde, qui, la plupart, ne vaut rien, m’a donné de l’aigreur aux occasions où il en faut avoir… Sa douceur était donc, de son aveu, une douceur très corrigée.

254. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Marivaux y trouva des acteurs, et surtout une actrice unique, pour revêtir et faire valoir ses rôles. […] C’est une qualité dans un amant bien traité que d’être d’un caractère exactement constant ; mais ce n’est pas une grâce, c’est même le contraire… En amour, querelle vaut encore mieux qu’éloge. […] Sans doute le mot de marivaudage s’est fixé dans la langue à titre de défaut : qui dit marivaudage dit plus ou moins badinage à froid, espièglerie compassée et prolongée, pétillement redoublé et prétentieux, enfin une sorte de pédantisme sémillant et joli ; mais l’homme, considéré dans l’ensemble, vaut mieux que la définition à laquelle il a fourni occasion et sujet.

255. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — I » pp. 39-56

De même s’il avait un peu de romanesque dans l’humeur, il le devait sans doute à son père, à qui sa belle mine et ses airs de héros de roman avaient valu dans la société le surnom d’Orondate. […] Elle lui vaudra un jour, quand il parviendra aux grands emplois, bien des ennemis et des envieux, à une époque où l’opposition frondeuse et dénigrante se sera glissée partout, même sur les terrasses de Marly. […] Le maréchal, bien qu’il eût de l’amitié pour Villars et qu’un jour, qu’il le voyait en habit brodé d’or s’exposant sur une brèche, il s’échappa jusqu’à lui dire : « Jeune homme, si Dieu te laisse vivre, tu auras ma place plutôt que personne », ne fit point dans le cas présent ce qu’il désirait : « Et cela fut heureux pour le marquis de Villars, ajoutent les Mémoires ; car d’être demeuré dans cette brigade lui valut d’avoir la meilleure part à quatre actions considérables qui se passèrent dans le reste de cette campagne. » Ce petit désagrément, qui tourna si bien, servit dans la suite à le persuader tout à fait de sa bonne chance et le guérit pour toujours de demander ni même, à ce qu’il assure, de désirer d’être plutôt dans un corps que dans un autre.

256. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Si ce n’était faire tort à un écrit si solide que d’en présenter des extraits de pages, je détacherais celle qui marque le caractère de Montesquieu dans son livre de la grandeur et de la décadence des Romains… Je la donnerai pourtant, parce que nous sommes Français et que nous aimons les morceaux, mais je n’en donnerai que le commencement ; tout lecteur sérieux voudra lire la suite : Dans ce livre, il (Montesquieu) oublie presque les finesses de style, le soin de se faire valoir, la prétention de mettre en mots spirituels des idées profondes, de cacher des vérités claires sous des paradoxes apparents, d’être aussi bel esprit que grand homme. […] Il se croyait par moments, et à ses mauvais jours, dans un état de diminution et de décadence intérieure ; cette faculté de réflexion qu’il portait en lui, et qu’il s’appliquait constamment, lui nuisait à force de subtilité ou de clairvoyance : J’assiste comme témoin à la dégradation, à la perte successive des facultés par lesquelles je valais quelque chose à mes propres yeux. Il vaudrait mieux peut-être ne pas s’en rendre compte et se faire illusion sur son prix ; mais si je suis amené, par ce sentiment même de ma décadence intellectuelle et morale, à chercher plus haut que moi une consolation et un appui, la réflexion et la raison m’auront rendu sans doute, après avoir été cause de souffrances, le plus grand service qu’il soit possible d’en retirer.

257. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Ainsi encore, à propos des attaques dernières dont Les Époques de la nature furent l’occasion, et de je ne sais quel manuscrit de Boulanger qu’on l’accusait d’avoir pillé : « Il vaut mieux, disait-il, laisser ces mauvaises gens dans l’incertitude, et comme je garderai un silence absolu, nous aurons le plaisir de voir leurs manœuvres à découvert… Il faut laisser la calomnie retomber sur elle-même. » À M. de Tressan qui s’était, un jour, ému et mis en peine pour lui, il répondait : « Ce serait la première fois que la critique aurait pu m’émouvoir ; je n’ai jamais répondu à aucune, et je garderai le même silence sur celle-ci. » Ainsi pensait-il, et il ne se laissait pas détourner un seul jour du grand monument qu’il édifiait avec ordre et lenteur, et dont chaque partie se dévoilait, successivement à des dates régulières et longtemps à l’avance assignées. […] Buffon reste impassible là où Montesquieu se pique et où Voltaire enrage, et ils se valent à peu près tous les trois pour le fond des croyances. […] Il aura du moins réussi à faire valoir en Buffon et à mettre de plus en plus en lumière l’honnête homme, l’homme de cœur, de sagesse et de sens.

258. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Le renard, qui tant sait de guille (ruses) Vit que cil déprise et aville Les autres, et se prise et se loue ; Si lui dit en faisant la moue : « Ainsi cuides-tu que mieux vaille, Pour ta peau où tant a de mailles, Dont les deux, non mie les trois, Ne valent pas un petit pouois (poids) Tu te fais de ta peau moult cointes Pour les mailles qui y sont pointes (peintes) Mais je ne pris rien tel peinture Ni ne me fi, ni n’asségure. […] Beauté ne vaut rien sans savoir : L’un et l’autre fait bon avoir.

259. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre IV. L’heure présente (1874) — Chapitre unique. La littérature qui se fait »

Il a appliqué à l’étude de la littérature un fort tempérament de polémiste et d’orateur, une rare puissance d’abstraction, de logique et de synthèse, une grande richesse d’information bibliographique et chronologique ; et tout cela a valu beaucoup, parce que des impressions fines et originales, de vives intuitions déterminées au contact des œuvres, un goût enfin sûr et délicat lui ont fourni la base de ses constructions. […] Il a toujours défendu l’objectivité de l’œuvre d’art, le respect de la nature fidèlement rendue, et il a toujours affirmé que les œuvres d’art valent par les idées qu’elles traduisent, par la force morale qu’elles contiennent. […] On s’est blasé sur le genre brutal, ou amer, ou immoral : c’est un « poncif » qui ne vaut pas mieux qu’un autre.

260. (1903) Zola pp. 3-31

Il semble ne les avoir pas complétées par cette éducation que l’on se donne à soi-même et qui est la seule qui vaille, ayant, dès la vingtième année, été forcé de gagner sa vie d’abord comme employé de librairie, ensuite comme écrivain. […] Il dit, avec une colère qui est peu dans ses habitudes, particulièrement significative, par conséquent : « Son œuvre est mauvaise et il est un de ces malheureux dont on peut dire qu’il vaudrait mieux qu’ils ne fussent jamais nés. […] Rien ne vaut la descente des ouvriers, à la fin de la journée, par la rue Oberkampf, la lente coulée des voitures à travers les Champs-Élysées au retour des courses, la galopade furieuse des ouvriers révoltés dans Germinal, l’éternel va-et-vient des chevaux démontés, nuit tombante, dans le champ de bataille de Sedan, le « train blanc » de Lourdes et, à Lourdes aussi, le vent de folie extatique qui couche, relève et prosterne à nouveau la foule, avec ce cri monotone qui s’élève, s’enfle et roule dans l’air enfiévré : « Seigneur !

261. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une croisade universitaire » pp. 107-146

Cette audace me vaudra la qualification de Jeune-France, et vous ne manquerez pas de dire que je suis sorti hier soir de la première représentation d’Hernani. […] Les provinciaux de Quévilly, gens timides, seraient capables de s’en formaliser. — Prie ton rédacteur en chef de se charger de cette besogne, ça vaudra mieux. […] Le petit vieillard regrettait fort l’ancien régime littéraire : — une fois par semaine, régulièrement, il venait se plaindre — poliment et spirituellement — au public que le présent ne valût pas le passé.

262. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Ne vaut-il pas mieux se reporter directement à Hugo, Hérédia, Leconte de Lisle, que de parcourir les œuvres des alumni engagés sur la même voie que celle du chef de file respectif, et rééditant, moins bien, les mêmes choses ? […] Pour eux, un poète à rimes insuffisantes ne vaut rien, témoin Musset, que beaucoup de Parnassiens, — sinon peut-être tous, — n’aiment point. […] Mais elles n’avaient valu jusqu’ici qu’injures et dénigrements aux poètes qui avaient osé s’en prévaloir.

263. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

Mais elle enfante l’orgueil de rang et les mœurs d’antichambre, et ce côté de la médaille valait bien la peine d’être montré. […] La régente était faible, il s’agissait « de se bien faire valoir » et de prendre la plus grosse part possible du trésor public. […] sans doute, dit-il, il eût mieux valu lutter contre son cœur, et à force de courage et de vigilance se sauver de toute faiblesse.

264. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

Autant vaut qu’elles soient publiées par moi qu’après moi.  […] Au fond, voyez-vous, c’est là ma prédilection secrète, mon courant caché ; et quand toutes mes digressions dans les bouquins me fournissent jour à un sonnet neuf, à un mot à bien encadrer, à un trait heureux dont j’accompagne un sentiment intime, je m’estime assez payé de ma peine ; et, en refermant mon tiroir à élégies, je me dis que cela vaut mieux après tout que tous les gros livres d’érudition, lesquels je veux pourtant faire de plus en plus profession d’estimer. — Mais, il faut en venir, mon cher Béranger, à l’objet de cette lettre.

265. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Oberman, édition nouvelle, 1833 »

Ampère, Albert Stapfer ; dans une correspondance curieuse et touchante que j’ai sous les yeux, et qui, entre les mains de l’ami qui me la confie, pourra devenir un jour la matière d’un beau livre de souvenirs, je lis d’autres noms encore de cette jeune intimité ; j’en lis un que j’efface, parce que l’oubli lui vaut mieux ; j’en lis deux inséparables, qui me sont chers comme si je les avais connus, parce qu’un grand charme de pureté les enveloppe, Edmond et Lydia, amants et fiancés. […] Cet homme eut l’oppression des montagnes sur le cœur ; il en eut la noble infirmité et le chaos dans les hasards de ses délirants systèmes ; il en eut les contours et la virginité dans le galbe sans soleil de son style blanc et terne. » Mais c’est en entrant dans le Valais seulement que l’on comprend bien certaines descriptions désolées d’Oberman et ces contrées d’un amer abandon : le pays et le livre s’expliquent l’un par l’autre, et je me suis dit tout d’abord à cette vue : Et l’ombre des hauts monts l’a durement frappé !

266. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Relation inédite de la dernière maladie de Louis XV. »

Tel on le va voir au sortir des bras de la Dubarry, dans les transes pusillanimes de la maladie et de la mort, tel il était avant la Pompadour, avant sa maladie de Metz, avant ces vains éclairs dont la nation fut dupe un instant et qui lui valurent ce surnom presque dérisoire de Bien-aimé. […] On voit que, dans une chose quelconque, son goût apathique le porte du côté où il y a le moins d’embarras, dût-il être le plus mauvais. » Et plus loin : « Les nouvelles de la Bavière sont en pis… On prétend que le roi évite même d’être instruit de ce qui se passe, et qu’il dit qu’il vaut encore mieux ne savoir rien que d’apprendre des choses désagréables.

267. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre II. Utilité de l’ordre. — Rapport de l’ordre et de l’originalité »

Fénelon savait pourtant ce que vaut l’ordre, et dans cette même Lettre à l’Académie il en fait la plus rare et presque la plus essentielle des qualités de l’orateur. […] Ce ne sont point des pièces d’un métal précieux, qui circulent de main en main sans se déprécier ni acquérir de plus-value : ce sont des papiers qui sont aujourd’hui en baisse, demain en hausse, chiffons aux mains du malhabile, qui valent une fortune aux mains de l’homme avisé.

268. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre I. Influence de la Révolution sur la littérature »

Mieux vaudrait, comme Spinoza, polir des verres de lunettes : au moins, cela laisse l’esprit intact, et il gagne même au repos. […] Cela vaut par l’ironie acérée, par la netteté des formules dans le décousu du développement et l’incertitude de la pensée générale, par l’esprit qui revêt la violence, par un accent de passion sincère où la déclamation emphatique et les souvenirs classiques mettent seulement la date.

269. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VI. Le charmeur Anatole France » pp. 60-71

France vaut surtout parce qu’elle est disciplinée à une philosophie supérieure. […] Il leur sourit plutôt, sans se faire la moindre illusion sur leur vertu, mais assuré qu’un avenir révolutionnaire ne vaudrait pas mieux.

270. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les petites revues » pp. 48-62

Ce dernier poème vaut d’autant mieux d’être reproduit qu’il ne figure pas dans le recueil des Poèmes paru depuis : LE RÊVE DE LA REINE La reine aux cheveux d’ambre, à la bouche sanglante, Tient de sa dextre longue ouvert le vitrail d’or, Pensant que l’heure coule ainsi qu’une eau trop lente. […] C’est de Baudelaire, du groupe parnassien, puis de Stéphane Mallarmé et de Paul Verlaine — dissidents de ce groupe — qu’est née toute la poésie aujourd’hui adolescente… Il y a même encore des romantiques purs, mais peu et qui ne valent pas cher.

271. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Therbouche » pp. 250-254

Les artistes ne sont pas polis, on lui demande grossièrement s’il est d’elle, elle répond que oui, un mauvais plaisant ajoute : et de votre teinturier. on lui explique ce mot de la farce de Patelin qu’elle ne connaissait pas ; elle se pique, elle peint celui-ci qui vaut mieux ; et on la reçoit. […] Je lui dis : comment demander, en dépit de ce qu’en pourront penser les artistes de ce pays qui à cet égard en vaut bien un autre, de l’ouvrage pour une étrangère à des ministres qui refusent des àcomptes sur celui qu’ils ont ordonné à des hommes du premier ordre ?

272. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 5, des études et des progrès des peintres et des poëtes » pp. 44-57

Une perle baroque et de vilaine eau, de quelque poids qu’elle soit, ne sçauroit valoir la fameuse peregrine ; cette perle, dont un marchand avoit osé donner cent mille écus, en songeant, dit-il à Philippe IV, qu’il y avoit un roi d’Espagne au monde. Cent mille beautez médiocres mises ensemble ne valent pas, ne pesent pas, pour ainsi dire, un de ces traits qu’il faut bien que les modernes, mêmes ceux qui font des églogues, loüent dans les poësies bucoliques de Virgile.

273. (1912) L’art de lire « Chapitre VI. Les écrivains obscurs »

Ceux-ci, sans doute, il faut les laisser sur le vert, et je ne vois guère quel profit on en pourrait tirer ; car de penser, à propos d’eux ce qu’ils n’ont point pensé et ce qu’ils auraient pu penser s’ils avaient pensé quelque chose, cela est un peu vain et si hasardeux qu’il vaut mieux penser directement pour son compte. […] C’est ce qui a fait valoir plusieurs choses de néant, qui a mis en crédit plusieurs écrits et les a chargés de toutes sortes de matières qu’on a voulu, une même chose recevant mille et mille et autant qu’il nous plaît d’images et considérations diverses. » Or bien, c’est juste le travail contraire qu’il convient que vous fassiez sur les auteurs difficiles.

274. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIV »

Bien que la mode soit aux conférences, j’ai toujours pensé que les meilleures ne valaient rien. […] Elle vaut la peine d’être retenue : « L’art d’écrire consiste en ceci : Dire tout ce que l’on veut dire, rien que ce que l’on veut dire, comme on veut le dire et comme il faut le dire. » Ce qui signifie que le seul moyen de bien écrire est d’écrire comme il faut écrire.

275. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Philippiques de la Grange-Chancel »

Nous allons savoir tout à l’heure si on a eu le dédommagement sur lequel on comptait peut-être, et si moralité, peinture, parti pris, exagération ou mensonge, tout ne se vaut pas dans La Grange-Chancel. […] Tout le monde n’est pas bâti pour faire un héros et même le métier n’en vaut rien, au point de vue des aises et des tranquillités de l’existence, mais il y a des gens pourtant qui se sentent faits pour cette mauvaise vie des héros.

276. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Bruyère » pp. 111-122

Avec un peu de hardiesse, un peu de confiance dans un esprit qu’il n’a pas assez tiré des brassières des La Harpe, des Auger et des d’Olivet, et qui aurait pu très bien se mouvoir tout seul, Destailleur nous aurait donné un commentaire qui aurait valu par le renseignement ce que son édition vaut par la correction du texte et l’exactitude méthodique des tables, et sa publication n’eût rien laissé à désirer.

277. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vitu » pp. 103-115

Le kaléidoscope le plus brillant ne vaut jamais une simple glace de Venise, qui renvoie la lumière telle quelle, mais qui ne la brise pas. […] Esprit vraiment français de fond et de forme, sans déclamation d’aucune sorte, sans surcharge, sans pesanteur, sans pédantisme, Vitu est un voltairien, de l’autre bord, qui rendrait aux voltairiens et à Voltaire lui-même la monnaie de leur pièce en une plaisanterie qui vaudrait la leur.

278. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Edmond Magnier que je parle) est littérairement une pomme encore très verte, aussi verte que son laurier, mais cela vaut mieux que d’être un fruit sec. […] car il a des couronnes à revendre, des couronnes de sainteté et d’héroïsme qui valent cent fois mieux que les couronnes de poésie.

279. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

Roitelet, verselets, poésies et poète, vaudraient aujourd’hui cent pour cent de plus dans leur inspiration et leur manière, par cela seul qu’ils n’auraient pas trempé dans l’air ambiant de la poésie contemporaine ! […] Plus les pièces sont courtes, plus elles valent, et le progrès pour lui et pour elles sera toujours en raison directe de leur brièveté.

280. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXII. Des panégyriques latins de Théodose ; d’Ausone, panégyriste de Gratien. »

On voit combien ce nom et le souvenir d’une ancienne grandeur en imposaient encore : « L’orateur, dit-il, craint de faire entendre devant les héritiers de l’éloquence romaine, ce langage inculte et sauvage d’au-delà des Alpes, et son œil effrayé croit voir dans le sénat les Cicéron, les Hortensius et les Caton assis auprès de leur postérité pour l’entendre. » Il y a trop d’occasions où il faut prendre la modestie au mot, et convenir de bonne foi avec elle qu’elle a raison ; mais ici il y aurait de l’injustice : l’orateur vaut mieux qu’il ne dit ; s’il n’a point cet agrément que donnent le goût et la pureté du style, il a souvent de l’imagination et de la force, espèce de mérite qui, ce semble, aurait dû être moins rare dans un temps où le choc des peuples, les intérêts de l’empire et le mouvement de l’univers, qui s’agitait pour prendre une face nouvelle, offraient un grand spectacle et paraissaient devoir donner du ressort à l’éloquence : la sienne, en général, ne manque ni de précision, ni de rapidité. […] Il s’en faut beaucoup qu’il vaille celui de Théodose, que nous ayons cité : il semblerait qu’entre les deux, il y a l’intervalle d’un siècle.

281. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

Mieux vaut, même dans les ruines du génie des Romains, recueillir une de ces épitaphes qu’avaient laissées les martyrs. Mieux vaut entendre de la bouche du lyrique chrétien sa belle invocation au Créateur, foyer des âmes humaines, et sa confiance dans la vie éternelle qui leur est promise : « La mort220, ô Dieu !

282. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Il valait mieux, reprend M.  […] … Mieux vaut périr que de contempler ce que tu aurais contemplé. […] Aucun de ces ouvrages ne vaut les poèmes d’André Chénier. […] Tant vaut l’historien, tant vaut l’hypothèse. […] Il valait d’y regarder à dix fois.

283. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Il est sans pitié pour les imaginations aliénistes du dramaturge à la mode, et les succès de commerce ne lui disent rien qui vaille. […] L’histoire vaut qu’on la raconte et qu’on la commente. […] Il mourut bravement, mais il ne fut pas le seul, hélas… Combien, en cette douloureuse année, sont morts qui le valaient ? […] Mais les époques se valent. […] J’imagine que la méprise, en ce qui regarde Fénéon, vaut celle-là, à quelques blessures près.

284. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

Il vaudrait mieux bouffonner toujours, et crever de rire en divertissant le bourgeois, que crever d’orgueil et de dépit pour satisfaire les beaux-esprits. […] Je n’imiterai point l’audace des ignorants qui décident et qui tranchent la question sans être en état de l’entendre ; je ne dirai point : L’Iphigénie de Racine vaut mieux que celle d’Euripide : Racine n’a pas besoin d’être honoré par une injustice ; mais je dirai : L’Iphigénie de Racine vaut beaucoup mieux pour des Français ; laissant à de plus hardis ou à de plus habiles à prononcer si les Français du côté du goût, de l’esprit et des mœurs, valent mieux que les Athéniens. […] Elle arrive accompagnée de l’élite de ses guerriers ; elle trouve dans le temple des prêtres armés, qui valent encore mieux que ses soldats. […] La vérité est que nous ne valons pas mieux que nos pères, bien heureux si nous ne valons pas moins : mais cette vérité ne peut être saisie que par des esprits d’une trempe excellente, et mise au jour que par des philosophes francs, simples et droits, pour qui la littérature n’est pas une intrigue, et la philosophie l’art de faire des dupes. […] Le Crispin musicien, donné quelque temps avant Crispin médecin, est absolument du même genre, et ne vaut pas mieux.

285. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article »

Elle lui valut une pension de Louis XIV, & une place dans l’Index.

286. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Maryllis, Paul »

Paul Maryllis sont fraîches comme tels bouquets de terroir qu’on eût aimé respirer avec des souvenirs d’enfance retrouvés, et leur franche allure agreste vaut par la simplicité.

287. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Il vaut ce que vaut la nature, qui, après tout, est plus indifférente que méchante. […] Car je suis sûr qu’elle vaut infiniment mieux pour mon pays. […] S’il est vrai, comme je le crois, que vous valiez moins que nous ne valons, je ne vous en louerai que davantage. […] Comme encadreur, Sandeau vaut infiniment mieux. […] Le reste ne vaut pas un regard.

288. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » p. 536

Il s’en faut de beaucoup que ses Mémoires vaillent ceux de son Maître, qui, par son esprit, conserve la même supériorité qu’il avoit sur lui par son rang.

289. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article »

Nous ne prétendons pas placer dans cette classe plusieurs Prônes modernes qui ne les valent pas.

290. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article »

Ces différentes Traductions ne sont pas du premier mérite ; mais nous en avons beaucoup qui ne les valent pas, & on peut lire celles-ci avec plaisir.

291. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bonnery, Raoul (1851-.... ; poète) »

Raoul Bonnery a réuni des poésies de circonstance, un très grand nombre de morceaux lus par lui à mainte inauguration de statue, à mainte cérémonie commémorative, et aussi une quarantaine de pièces plus intimes, plus familières, qui n’en valent pas moins.

292. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — I — Icres, Fernand (1856-1888) »

Léon Cladel Ses œuvres de début lui valurent les encouragements de ses aînés, qui le tenaient déjà pour un artiste de race et qui ne peuvent que l’applaudir sans restriction pour son dernier recueil de poésies : Les Farouches.

293. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Paul, Albert (1864-19..) »

Achille Delaroche Son œuvre, encore peu volumineuse, vaut surtout par la qualité et le met au rang des meilleurs.

294. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Ne vaudrait-il pas mieux rester la matière inerte ? […] Et j’espère que mon renoncement me vaudra une place à la droite du Seigneur. […] Cet ermite te vaut le désagrément dont tu te plains. […] C’est à peine si la livre vaudrait deux sous de plus. […] Je la vénère, puisqu’elle me valut l’inestimable avantage de votre considération.

295. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Il faut que les divers arrangements de rimes vaillent ce qu’ils ont coûté. […] Il est vrai que ce travail en vaut un autre. […] La remarque vaut, je crois, la peine d’être faite : la période poétique de M.  […] Rien ne vaut telle impression rare fixée toute vive par l’artiste au moment même où il en a été frappé. […] C’est d’abord la clarté du dessein, l’unité du plan, la correction de la forme, la décence (et j’avoue que, si une œuvre peut valoir encore quelque chose sans ces qualités, elle vaut mieux quand elle les possède).

296. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 514

On les voit traduits dans toutes les Langues, & les Traductions en ont fait disparoître les vices de l’élocution & fait valoir l’énergie & la sagesse.

297. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Damedor, Raphaël »

Francis-Vielé-Griffin Les vers de Damedor ne valent ni plus ni moins que la moitié des vers des Châtiments ; la satire politique en vers est presque toujours insupportable et difficilement littéraire.

298. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 279

Nous n’en dirons pas autant de celle de Laodamie, qui ne vaut pas la peine d’être lue.

299. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 383

Il y a mêlé par intervalles une ironie fine, qui répand heureusement le ridicule sur ses adversaires, & plus particuliérement dans son Philosophe du Valais.

300. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 387

On est fâché qu’après avoir si bien fait valoir les regles, M.

301. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Lui, noble cœur, imagination fougueuse, esprit fumeux, de qui Fauriel disait : « Il est naturellement éloquent et ignorant » ; lui qui a précisément choisi Napoléon en 1836 pour le sujet d’une légende épique des plus extraordinaires sans doute, mais qui ne valait pas assurément les quelques chansons de Béranger, c’est lui aujourd’hui qui vient nous rapprendre l’histoire exacte et en remontrer à M.  […] Cette fin vaut mieux qu’un séjour prolongé dans cette île avec l’avenir qui m’y attend.

302. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les poëtes français. Recueil des chefs-d’œuvre de la poésie française »

On ne saurait demander à un volume composé de tant d’extraits et de notices dues à des plumes différentes une unité qui est plus de décorum que d’utilité réelle ; mais ce qui vaut mieux, ici, la variété est infinie, et les choix ont été faits avec goût et conscience, même quand il s’y est mêlé un peu de caprice. […] Ajoutez que ces petits volumes sont pour la typographie de vrais bijoux, sortis des presses de Perrin : l’écrin vaut le diamant.

303. (1874) Premiers lundis. Tome I « J. Fiévée : Causes et conséquences des événements du mois de Juillet 1830 »

En laissant de côté les préventions naturelles à des princes longtemps proscrits, et qui, malgré ce qu’on a dit, ne se sont jamais réjouis de nos victoires, par la raison toute simple qu’ils ne pouvaient fonder l’espoir de leur retour que sur nos désastres, on concevra comment la vieillesse de Louis XVIII, et ses infirmités, qui ajoutaient à son isolement d’étiquette, nous ont valu les Cent Jours ; et pourquoi le règne de Charles X a fini par un crime, dont la première compensation sera de nous avoir épargné la vieillesse de M. le duc d’Angoulême, vieillesse qui aurait été d’autant plus déplorable qu’il n’a jamais été jeune. […] Une maladie, une simple indisposition, et la réputation du régent était à la merci des absolutistes et du parti prêtre ; et les idées de crime se répandaient avec effroi, comme pour faire croire sans cesse qu’une couronne valait bien un crime pour l’obtenir comme pour la conserver.

304. (1874) Premiers lundis. Tome II « Des jugements sur notre littérature contemporaine à l’étranger. »

alors le goût peut intervenir en son nom et faire valoir ses motifs. […] L’article en question est, dans son genre, une manière de grossièreté qui vaut (en fait d’offense au goût et à la vraie décence) tout ce qu’il impute à cette littérature un peu relâchée.

305. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Conclusion » pp. 355-370

Il ne s’agit pas de savoir si les conseils pratiques, les préceptes dictés par Aristote, Horace, Boileau, sont légitimes et valent quelque chose. […] Sans définir les mots d’art et de science (ce dont il faut se garder, si l’on veut s’entendre soi-même et se faire entendre), on peut dire qu’entre la science et l’art il y a cette différence que, dans l’une les gens médiocres peuvent rendre d’utiles services, au lieu que dans l’autre ils ne font rien qui vaille.

306. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rostand, Edmond (1868-1918) »

Cela même eût mieux valu : l’auteur n’eut pas été tenté de défigurer, en un médiocre récit, l’étonnante Histoire comique des États et Empires de la Lune, et n’eût pas commis les interminables plaisanteries sur le nez de son héros. […] Il vaut plus et mieux que Cyrano de Bergerac, auquel il fut préféré et sacrifié.

307. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre X. L’antinomie juridique » pp. 209-222

En raison de quoi, Papinien proclame qu’il vaut mieux juger faussement que de ne point juger du tout ; car les hommes sans justice sont autant que bêtes en forêts, tandis que par justice se manifeste leur noblesse et dignité96. » L’individu n’est rien ; il doit être trop heureux d’être sacrifié à la société et de jouer le rôle du guillotiné par persuasion. […] Ce dogmatisme juridique s’exprime naïvement dans l’article IV du Code civil qui enjoint au juge de juger coûte que coûte : « Le juge qui refusera de juger sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice. » Ainsi, en tout état de cause, la décision juridique doit être tenue pour bonne et elle doit l’être parce que, quelle qu’elle soit, elle vaut mieux pour l’ordre social que l’absence de jugement qui laisserait se perpétuer un débat et une cause de trouble.

308. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le cardinal Ximénès »

Vingt fois des hommes qui valaient beaucoup moins que lui ont occupé l’attention des historiens modernes, et pour ce moine il semblait qu’on avait tout dit quand on avait écrit son nom. […] et s’ouvrit alors cette période de vingt-deux années de raffermissement et d’extension, de conquête et de force intérieure pour Espagne, qui resta, depuis Ferdinand jusqu’à la mort de Philippe II ; malgré les malheurs, le temps et les fautes, ce faisceau serré dans un chapelet de moine, qui valait le baudrier d’un héros !

309. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Crétineau-Joly » pp. 367-380

Polémiste d’habitude ardente, talent incorrect, mais vigoureux, Crétineau-Joly, qui est, je crois, du Bocage, cette ancienne terre de guerre civile, a la rudesse des paysans de son pays, qui valent bien ceux du Danube. […] Or, les hommes ne permettent pas sans mépris à l’ambition d’être une trembleuse, et les plus faux d’entre eux ont un tel besoin de franchise et de fermeté dans les relations de la vie, qu’il vaudrait mieux pour Louis-Philippe et sa renommée dans l’Histoire y avoir été ouvertement ou même horriblement coupable, que d’y être l’espèce de demi-criminel ou de demi-couard qu’il y sera.

310. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Camille Desmoulins » pp. 31-44

À travers le journaliste, fatalement vieilli comme ils vieillissent tous, dont la personnalité reculait, en s’effaçant, dans un passé qui s’éloignait et qu’on rapproche, on aperçoit l’homme, si on peut dire l’homme de cet enfant trépignant et passionné, qu’il aurait valu mieux faire oublier que rappeler, pour son honneur et pour sa gloire. […] Il n’avait de langage et de style que la plume à la main, homme de lettres jusque-là que, quand vous lui ôtiez sa plume, il était désarmé de tout, et que son esprit valait alors son caractère.

311. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IV. Saisset »

Depuis Aristote jusqu’à liant qui l’a complété, depuis Hegel le descendant jusqu’à Spinosa l’aïeul, et qu’un nuire poëte, mais qui valait mieux, Lessing, a réhabilité à force de poésie, vous n’avez, prenez-y bien garde, dans tous ces philosophes, que des poëtes abstraits. […] Ce sont d’énormes poëtes abstraits, mais le moindre poëte vivant, avec la plus modeste des fleurs à la bouche, le moindre poëte d’expression vaut mieux que tout cela, et, je finirai par ce blasphème philosophique, fait plus véritablement que tous ces abstracteurs de quintessence pour l’avancement moral du genre humain.

312. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Francis Lacombe »

Son livre n’est pas un système, c’est un récit ; mais c’est un récit qui vaut une leçon, et qui vaut même beaucoup mieux si c’est une leçon d’économie politique.

313. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Armand Hayem »

Si l’Académie des sciences morales et politiques n’avait pas la langue si pâteuse, elle n’aurait dit qu’un mot qui les valait tous : « Quelles sont les causes de l’anarchie contemporaine ?  […] certes, il valait mieux que cela !

314. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

Jules Levallois, qui se vante de nous donner un Corneille inconnu, — ce qui serait une fière découverte, une découverte qui vaudrait mieux que celle d’une étoile, — est-il réellement le Leverrier de ce nouveau Corneille, qui s’élève, sous sa plume, de l’ancien ? […] Corneille, non pas l’inconnu, mais le connu et aussi le méconnu, car il l’a été souvent, ce grand homme, y est apprécié ce qu’il vaut au poids de son génie.

315. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 144

Ce qu’il a écrit en prose ne vaut pas mieux.

316. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Legouis, Louis »

Si l’on admet qu’un sonnet sans défaut vaut seul un long poème, le livre de M. 

317. (1894) Propos de littérature « Dédicace » p. 7

Cet été, en Bretagne, lorsque nous parcourions ensemble les pages inachevées de ce petit volume, j’hésitais à confier au libraire un travail — du genre ennuyeux — qui m’a coûté quelque peine et me vaudra peut-être chez nos amis une solide réputation de pédanterie.

318. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 442

Le grand nombre d’inepties qui se produisent tous les mois dans ce Journal, étoit un préjugé contre le mérite de ces Drames ; mais il est aussi difficile aux Rédacteurs du Mercure de décréditer un bon Ouvrage, que d’en faire valoir un mauvais.

319. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 450

Si cette Histoire n’est pas la meilleure que nous ayons, elle a contribué du moins à la perfection de celles qui valent mieux aujourd’hui.

320. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 201

On lui a donné le nom de Pere de l’Histoire de France : à la bonne heure ; mais ce Pere a eu des enfans qui ont beaucoup mieux valu que lui.

321. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 351

Mais les suffrages du Gouvernement & des Hommes sages, sont bien capables de les dédommager de la petite gloire qu'ils perdent, & qui ne vaut pas la satisfaction légitime que doit éprouver quiconque peut dire, comme M.

322. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Venevault »

Froide et mauvaise miniature ; mauvais salmi, qui n’en vaut pas un de bécasses.

323. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Elles détruisent : mieux vaut bâtir. […] On a imprimé que la recherche de l’originalité a été la marque de la littérature française au xixe  siècle ; cela vaut mieux que démarquer. […] La suite offre le spectacle singulier d’un art classique aussi parfait que jamais (dans Flaubert et Renan par exemple), de réussites imprévues, comme ce Verlaine qui vaut La Fontaine ; et de tentatives manquées en apparence, sans œuvres visibles, mais qui ont semé plus d’une graine d’avenir. […] Leurs chefs-d’œuvre valent des victoires. […] Sa réponse vaut d’être étudiée et savourée, où l’éminent écrivain nous parle de « l’art anarchique du xixe  siècle » et du « chaos intellectuel qu’il représente à notre esprit ».

324. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Il vaut mieux la prendre veuve que fille, pas trop facile à vivre, intéressée. […] Non que les romans qui ne sont pas des utopies ne soient de beaucoup les meilleurs : Gil Blas vaut mieux que la Nouvelle Héloïse. […] Il vaut mieux dire : Faites cela. » Quoi donc ? […] Redoublez de précaution avec celui qui vous prend à témoin de ses fautes ; le moins qu’il pense, c’est qu’il vaut mieux que vous. […] Quel miel pour attirer les lecteurs que de leur dire à chaque instant : « N’allez pas vous piquer de me ressembler » ; et, pour varier : « N’oubliez pas que je vaux mieux que vous ! 

325. (1884) Articles. Revue des deux mondes

— Les classes dirigeantes deviennent ainsi presque fatalement les classes rétrogrades, et l’hérédité, qui semblerait devoir constamment accumuler chez les descendans les qualités qui ont valu l’empire aux ancêtres, a pour principal effet de hâter leur irrémédiable déchéance. […] Ainsi la chasteté vaut mieux que la débauche, indépendamment des conséquences funestes que celle-ci peut entraîner pour l’individu ou la société. […] Or l’âme vaut mieux que le corps, l’être animé vaut mieux que l’être inanimé, être vaut mieux que n’être pas, vivre vaut mieux que ne pas vivre.

326. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Santeul, le poète latin si fier de ses vers, si heureux de les réciter en tous lieux ou de les entendre de la bouche des autres, et qui aimait encore mieux qu’on dît du mal de lui que si l’on n’en avait rien dit du tout ; Santeul, qui dans une de ses plus grosses querelles écrivait à l’abbé Faydit, qui l’avait attaqué sur son épitaphe d’Arnauld : Je fais le fâché par politique, mais je vous suis redevable de ma gloire ; vous êtes cause qu’on parle de moi partout, et presque autant que du prince d’Orange ; vous avez rendu mes vers de l’épitaphe de mon ami plus fameux que l’omousion du concile de Nicée ; ceux des autres poètes sur le même sujet sont demeurés ensevelis avec le mort, faute d’avoir eu comme moi un Homère pour les prôner et les faire valoir ; — Santeul, qui était si fort de cette nature de poète et d’enfant qui tire vanité de tout, serait presque satisfait en ce moment. […] » Ce distique lui valut une montre de cent cinquante francs. […] Femmes, moines, vieillards, tout était descendu ; L’attelage suait, soufflait, était rendu… « En fait d’essoufflement pittoresque, voilà, ô poète latin, ce qui vaut encore mieux que ton vers, et ce qui le fera oublier. » Mais personne sans doute alors ne faisait ces comparaisons.

327. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Œuvres complètes d’Hyppolyte Rigault avec notice de M. Saint-Marc Girardin. »

Et, en général, c’est le polémiste en lui qui vaut mieux encore que le critique. […] J’en fus charmé et je lui en sus gré, non que je haïsse les coups ni que je craigne d’en recevoir à la condition d’en rendre, mais il vaut toujours mieux avoir les gens d’esprit pour soi que contre soi. […] Veuillot : c’était pour lui une source inépuisable de contradictions, une occasion de succès coup sur coup dans son monde qui ne lisait ni ne goûtait L’Univers ; c’était une suite d’ovations qui finissaient par valoir le grand triomphe.

328. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

Il est positif que, depuis son retour, l’Empereur a rappelé toutes ses vieilles bandes, qu’elles arrivent de tous les coins de la France, amenant avec elles des jeunes gens que leur exaltation a électrisés ; que l’Empereur a aujourd’hui tout équipés 250,000 hommes de troupes, dont chaque soldat croit valoir quatre hommes ; qu’à la fin de ce mois, il aura 50,000 hommes de plus, et à la fin de mai, 400,000 encore ; ils sont là, on les équipe. […] À toutes ces invraisemblances de détail qu’on fait valoir, j’opposerai un petit signe qui fait plus, à mon sens, que les compenser, et qui est bien propre à Mme de Staël ; je crois qu’aucun de ceux qui ont vu beaucoup de ses lettres ne me démentira ; ce sont ces quelques mots anglais, my dear sir, jetés dans une lettre écrite en français : Mme de Staël, avec les gens avec qui elle n’était pas entièrement familière, aimait à faire cela, et à mettre sur le compte d’une autre langue cette sorte d’anticipation de tendresse. […] Nous avons eu des querelles terribles par lettres sur Bonaparte : il a vu la liberté là où elle était impossible ; mais il faut convenir aussi que pour la France tout valait mieux que l’état où elle est réduite actuellement. » Cette parole écrite à la date du 8 décembre 1815, et en partie à la décharge de Sismondi, montre que si Mme de Staël avait pu, sans partager ses espérances de liberté, paraître approuver pourtant l’Acte additionnel, elle avait bien pu, à plus forte raison, faire une tentative auprès du Prince-Régent en faveur de la paix, c’est-à-dire de l’indépendance nationale dont elle déplorait si amèrement la violation et la perte.

329. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Fontaine »

Ces petites pièces, avec le Songe de Vaux, sont les premières productions originales que nous ayons de La Fontaine : elles se rapportent tout à fait au goût d’alors, à celui de Saint-Évremond et de Benserade, au marotisme de Sarasin et de Voiture, et le je ne sais quoi de mollesse et de rêverie voluptueuse qui n’appartient qu’à notre délicieux auteur, y perce bien déjà, mais y est encore trop chargé de fadeurs et de bel esprit. Le poëte de Fouquet fut accueilli, dès son début, comme un des ornements les plus délicats de cette société polie et galante de Saint-Mandé et de Vaux. […] Ce qui est vrai jusqu’ici de presque tous nos poëtes, excepté Molière et peut-être Corneille, ce qui est vrai de Marot, de Ronsard, de Régnier, de Malherbe, de Boileau, de Racine et d’André Chénier, l’est aussi de La Fontaine : lorsqu’on a parcouru ses divers mérites, il faut ajouter que c’est encore par le style qu’il vaut le mieux.

330. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre V. De la littérature latine, pendant que la république romaine durait encore » pp. 135-163

L’instruction vaut quelquefois beaucoup mieux que l’érudition ; car, dans la nuit de l’antiquité, l’on peut se perdre dans des faits de détails qui empêcheront de saisir la vérité de l’ensemble. […] Rien, car il ne s’y serait point livré dans un pays où elles ne lui auraient point valu de succès. […] Il ne nous est resté ni un titre ni un éloge de semblables tragédies dans Horace ni dans Cicéron, qui mettaient l’un et l’autre cependant beaucoup de prix à faire valoir la littérature latine.

331. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « La génération symboliste » pp. 34-56

Carl Vogt, cela vaut mieux que d’être un Adam dégénéré. » Et des souffles nouveaux traversent l’espace, font tressaillir la jeunesse studieuse, derrière ses grilles. […] Ils valent mieux que Joseph Delorme. […] Ils savent ce qu’ils valent, mais ils savent aussi que les âmes médiocres seules sont capables de cabotinage, d’intrigues et de « bluff ».

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