C’est elle qui est le symbole de toute grandeur, de toute force, de toute beauté. […] L’important, le capital, c’est la conception de beauté. […] Mais j’aurais tort de laisser croire que cette petite morale de la vie quotidienne ne comporte pas une grande beauté, une suave douceur, une magnifique consolation. […] Ce qui fait la beauté du livre, c’est sa morale. […] Il a voulu y imprimer l’empreinte d’une beauté inconnue et majestueuse.
Elle en implique ou en explique à la fois les lacunes et les défauts, la puissance et la beauté. […] Au contraire Racine, Molière, La Fontaine ont tous dans l’esprit un idéal d’art, un type formel où la nature s’exprime dans son énergie et son caractère, mais de plus se revêt d’une absolue beauté. […] Ils ont la vérité et la beauté : nous sommes romanesques et spirituels, nous cherchons le rare et le joli. […] Il fit parler spirituellement et même raisonnablement son abbé sur la technique des beaux-arts ; il y distingua des beautés universelles et des beautés relatives ; il fit voir que les formes, le style et le goût sont choses infiniment variables, qui enveloppent et déguisent certaines conditions générales et permanentes. […] Il parut plus occupé de contredire Perrault et d’opposer une négation absolue à chacune de ses affirmations légères, que de mettre en évidence la vraie beauté d’Homère et de Pindare.
Les Fastes ont de l’éclat surtout, mais leur beauté procède encore de plusieurs autres qualités parfois opposées, depuis la douceur nacrée de Watteau jusqu’à la force qui tend les muscles. […] C’est que son éducation, formée à toutes les universelles beautés, s’est compliquée, dans l’adoration, à Bayreuth, de Wagner ; en Allemagne et en Italie, des très merveilleux primitifs ; à Londres, des préraphaélites ; et, en France, de la lecture approfondie de Verlaine, de Villiers, de Dierx, de Hugo, de Baudelaire. […] Américain d’origine, il est bien le compatriote de ce suprême et grand Edgar Poë, de celui qui osa penser que la poésie était la création rythmique de la beauté, lorsqu’il écrivit que cette beauté était une des conditions de la parfaite vie « au même titre que la vertu et la vérité ». […] Ce qu’on y voit encore, c’est un retour vers la campagne, vers la maison de douce solitude… Après avoir chanté les plus glorieuses des légendes dans les Fastes, puis la douceur de l’automne avec les Petits Poèmes, le voici qui chante simplement la beauté des choses. […] Van Bever Disciple fervent de la Beauté, il le fut non moins de la Justice, et pendant que ses vers, en France, faisaient le charme d’une élite, il organisait les groupes socialistes américains à New York.
Certainement lorsqu’il signale les beautés, il incite ses lecteurs à connaître davantage le livre ou la pièce qui les renferme. […] La critique ici nous découvre des beautés souvent inaperçues. […] Elle a reflété trop de beautés diverses pour que son évolution s’en puisse résumer succinctement. […] Tout ce qui touche à la vie peut se traduire en beauté. […] « Quand on signale une beauté de lui à un auteur, il répond : “À qui le dites-vous ?”
Je n’immobilise point cette beauté hellénique première, je ne l’isole point et c’est pour cela que je ne crains pas de lui tant attribuer. […] Ne pas avoir le sentiment des lettres, cela, chez les anciens, voulait dire ne pas avoir le sentiment de la vertu, de la gloire, de la grâce, de la beauté, en un mot de tout ce qu’il y a de véritablement divin sur la terre : que ce soit là encore notre symbole. […] On partait dans le christianisme d’un principe trop différent, trop contraire à cette beauté du dehors, pour la saluer à première vue et pour ne pas l’offenser à la rencontre. […] Quelquefois on va plus loin avec la douleur et par la douleur, mais la beauté est plus tranquille. […] D’autres ont dressé au fond de vous les colonnes ; vous avez les exemplaires de la beauté véritable.
Les vraies beautés ne sont pas ainsi, les vrais talents encore moins : ils se renouvellent, s’augmentent longtemps, se soutiennent et varient avec les âges. […] Les endroits quelque peu vifs de passion et de tendre amorce sont dominés, traversés et comme assainis par des courants d’une chasteté purifiante ; un sentiment d’ineffable beauté plane toujours et pacifie l’âme pudique qui lit. […] Le plus sublime moment de la situation, après l’hymne exhalé vers l’idéale et chaste beauté, vers la beauté sans sexe encore, est cette vaste éclosion du printemps qui éclate, en quelque sorte, un matin, dans la haute vallée : du sein de cette nature soudainement attiédie et ruisselante, s’élève le chant en chœur des deux enfants qui s’ignorent l’un l’autre et qui se regardent avec larmes. […] Wordsworth pense avec Akenside, dont il prend le mot pour devise, que « le poëte est sur terre pour revêtir par le langage et par le nombre tout ce que l’âme aime et admire ; » et Lamartine nous dit quelque part en son Voyage d’Orient :« Je ne veux voir que ce que Dieu et l’homme ont fait beau ; la beauté présente, réelle, palpable, parlant à l’œil et à l’âme, et non la beauté de lieu et d’époque. Aux savants la beauté historique ou critique ; à nous, poëtes, la beauté évidente et sensible, etc. » Mais ces deux poëtes, fidèles également à la beauté naturelle, d’une âme aussi largement ouverte à la réfléchir, se distinguent dans la manière dont ils s’élèvent et par laquelle ils arrivent à l’embrasser, à la dominer.
La pensée philosophique doit être le naturel fondement mais non le but du poème dont la fonction est avant toute chose de créer de la beauté. […] Ce ne sont plus les sentences rigoureusement déduites et l’enchainement de théorèmes dont le type le plus parfait se trouve dans Spinosa ; l’œuvre de Spinosa est belle, d’une beauté sombre, glacée, sans plastique, mais elle n’arrive à la Beauté que par la Vérité dont elle contient quelques reflets. […] Je pourrais ajouter étourdiment : comme la déesse Vénus suscitant l’idée de Beauté par ses seules formes merveilleuses ; mais on objecterait avec raison à ce dernier exemple que toute œuvre d’art est donc symbolique, puisque, étant belle, elle doit susciter l’idée de beauté…, cela est vrai, tout juste comme la tour Eiffel est le symbole de la hauteur. […] La cathédrale parfaite s’élève ainsi comme un immense symbole ; on peut dire aussi que, par sa particulière nostalgie, elle suggère la Vérité (Dieu, ici) à travers la Beauté. […] Plus est idéale leur beauté, plus la vision est allégée, musicale et lointaine, — plus est pénible une telle conclusion.
On trouve, dans cette dernière oraison funèbre, plus de beautés vraies et solides que dans toutes les autres. […] Bossuet a encore quelques-uns de ces défauts ; mais qui ne sait par combien de beautés il les rachète ? […] Ce défaut, comme on voit, tient à de grandes beautés ; car l’esprit humain est borné par ses perfections mêmes. On souhaiterait cependant qu’un si grand orateur fût quelquefois plus soutenu, ou du moins lorsqu’il descend, qu’il remplaçât son élévation par des beautés d’un autre genre. […] Une seule beauté de ces grands écrivains fait pardonner vingt défauts.
Chapitre X Une Académie de la beauté verbale. — La formation savante et la déformation populaire. — La vitalité linguistique. — Innocuité des altérations syllabiques. — La race fait la beauté d’un mot. — Le patois européen et la langue de l’avenir. […] Elle agirait dans le sens populaire, contre le pédantisme et contre le snobisme ; elle serait, en face des écorcheurs du journalisme et de la basse littérature, la conservatrice de la tradition française, la tutrice de notre conscience linguistique, la gardienne de notre beauté verbale112 . […] Il y a transformation de sens ; il n’y a pas déformation, puisque le mot reste identique à lui-même et n’a rien perdu de sa beauté plastique. […] La beauté d’un mot est tout entière dans sa pureté, dans son originalité, dans sa race ; je veux le dire encore en achevant ce tableau des mauvaises mœurs de la langue française et des dangers où la jettent le servilisme, la crédulité et la défiance de soi-même.
Je défie qu’on découvre un échantillon quelconque de beauté qui ne contienne pas ces deux éléments. […] Le signe particulier de la beauté sera donc, ici, une insouciance martiale, un mélange singulier de placidité et d’audace ; c’est une beauté qui dérive de la nécessité d’être prêt à mourir à chaque minute. […] La nature embellit la beauté ! […] Ce qui fait la beauté particulière de ces images, c’est leur fécondité morale. […] Ce but, cette visée, cette ambition, c’était de rendre, dans un style approprié, non pas la fureur de l’amour, mais la beauté de l’amour et la beauté des objets dignes d’amour, en un mot l’enthousiasme (bien différent de la passion) créé par la beauté.
Sa fille lui était demandée par toutes les cours, non-seulement à cause de sa renommée précoce de génie et de beauté, mais surtout pour acquérir par un mariage avec elle un titre à la couronne d’Écosse, adjonction vivement convoitée à d’autres couronnes. […] Ses prédilections étaient toutes pour Diane de Poitiers, qui sentait s’élever en elle une fille ou une émule future de beauté et d’empire. […] Mais ce cœur n’était pas seulement celui d’une reine, il était celui d’une femme accoutumée, à la cour de France, à l’idolâtrie professée par tout un royaume pour sa beauté. […] Cette beauté seulement, qui n’était pas encore accomplie par l’âge, manquait de cette virilité que donnent les années. […] XXI Il n’était plus dans la fleur de la jeunesse ; mais, quoique borgne d’une blessure reçue à l’œil dans un de ses combats de mer, il était encore beau, non de cette beauté efféminée de Darnley, ni de cette beauté mélancolique et pensive de l’Italien Rizzio, mais de cette beauté sauvage et mâle, qui donne à la passion l’énergie de l’héroïsme.
La beauté célèbre de Damayanti les fait accourir de tous les royaumes voisins. […] Ils rencontrent Nala qui s’y rend de son côté, dans tout l’éclat de sa beauté et de sa magnificence. […] Sa beauté est relevée par sa vertu. […] Si tu es une déesse comme ta beauté le révèle, protège notre négoce et enrichis-nous ! […] Nala reparaît sous sa vraie forme et sous sa beauté primitive.
Quand les anciens, nos maîtres en tout, parce qu’ils ont marché les premiers, voulurent exprimer dans une seule figure la suprême beauté physique de l’homme, ils ne sculptèrent pas un enfant, ils sculptèrent Apollon, le dieu de la beauté à trente ans ; ils sculptèrent Hercule, le dieu de la force à quarante. […] C’était le règne de l’esprit, de la débauche, de la beauté, sous le spirituel et voluptueux Charles II. […] Nous l’avons connue et admirée aussi, cette apparition transparente du génie dans la beauté. […] Ce nuage assombrissait sa beauté. […] C’était la beauté métaphysique n’empruntant à la matière que juste assez de forme pour être perceptible aux yeux d’ici-bas.
Notre siècle a vu des beautés lyriques qui nous rendent sévères pour la muse artificielle de J. […] Il n’y manque pas certaines beautés spécieuses où l’on pouvait se tromper. […] Ils sont inventés, car ils vivent ; et par quoi vivent-ils, sinon par les beautés du style ? […] Cependant les satires de Gilbert méritent leur réputation par des beautés durables. […] Par le peu qu’il a laissé d’ébauches imposantes ou charmantes, on peut deviner quelle eût été la beauté de l’œuvre achevée.
Qui ne sait d’ailleurs qu’outre les beautés de tous les temps et de tous les lieux, il y a pour chaque genre, des beautés analogues au climat, au gouvernement, à la religion, à la société, au caractère national ? Sous ce point de vue, les beautés de l’art sont plus resserrées. […] Son génie austère et dépourvu de sensibilité comme d’imagination, était trop accoutumé à la marche didactique et forte du raisonnement pour en changer ; et il ne pouvait répandre sur une oraison funèbre cette demi-teinte de poésie qui, ménagée avec goût et soutenue par d’autres beautés, donne plus de saillie à l’éloquence. […] La Rue fit couler des larmes et par la force de son sujet et par les beautés que son génie sut en tirer. […] On n’ignore point qu’il y a un art de disperser les grandes masses pour que l’œil se repose et que l’imagination ait à désirer ; alors les intervalles même sont utiles, et ils préparent la beauté de ce qu’on ne voit point encore.
J’exposerai ensuite mes conjectures sur l’ode, et sur les beautés qui lui conviennent. […] Ils ont plus de véritables beautés les uns que les autres ; ils rendent les ouvrages plus ou moins estimables, quoiqu’ils n’en changent pas la nature. […] Si elle l’est avec excès, on extravague ; si elle l’est modérément, le jugement y puise les plus grandes beautés de la poësie et de l’eloquence. […] Nous avons d’un des maîtres de l’art une ode pindarique, où il n’a pas mis un autre désordre que celui que je reconnois ici pour une beauté. […] Tout le monde convient aujourd’hui que sans le vrai, il ne peut y avoir de solide beauté, ni par conséquent de sublime.
Je l’avoue, il y a dans ces vieilles productions de l’Asie une réelle et incontestable beauté. […] Il n’y a que des pédants de collège qui puissent y voir le type éternel de la beauté. […] Celui-là seul peut saisir la grande beauté des choses qui voit en tout une forme de l’esprit, un pas vers Dieu. […] La beauté de Béatrix appartient à Dante, et non à Béatrix ; la beauté de Krichna appartient au génie indien, et non à Krichna ; la beauté de Jésus et Marie appartient au christianisme, et non à Jésus et Marie. […] La critique de l’avenir les admirera comme l’anatomiste qui perce ces beautés sensibles pour trouver au-delà, dans les secrets de l’organisation, un ordre de beautés mille fois supérieur.
Ruskin en effet est surtout grand en ceci, qu’il restitue aux plus simples aspects du monde, l’éternelle beauté que méconnaît l’artiste vulgaire. […] En dix lignes descriptives au cours de son enseignement esthétique, Ruskin sait enfermer plus de beauté que n’en reflète le préraphaélisme tout entier en une centaine de toiles. […] Non seulement l’action puissante de nos sociétés modernes ne signifie rien à ses yeux pour la grandeur ou la beauté d’un monde futur, mais l’impiété lui paraît régner sans conteste sur les hommes de son temps. […] L’innocence et la candeur résument pour lui toute la beauté humaine. […] Ruskin et la Religion de la beauté, id. 1897.
La jeune personne gardait toujours une pension de 600 livres de la reine, et en 1639 elle mérita, pour sa beauté et sa bonne réputation, d’être mariée à M. […] Elle avait les plus beaux cheveux du monde : ils étaient fort longs et en grande quantité, qui se sont conservés longtemps sans que les années aient eu le pouvoir de détruire leur beauté. […] Plusieurs la regardèrent avec admiration : tous avouèrent que, dans la gravité et la douceur de ses yeux, on connaissait la grandeur de sa naissance et la beauté de ses mœurs. […] J’ai vu de ses portraits, qui étaient faits du temps de sa beauté, qui montraient qu’elle avait été fort aimable, et, comme sa beauté n’avait duré que l’espace du matin et l’avait quittée avant son midi, elle avait accoutumé de maintenir que les femmes ne peuvent plus être belles passé vingt-deux ans. […] On aura remarqué ce trait d’observation et de malice féminine, que la reine d’Angleterre n’ayant été belle que jusqu’à l’âge de vingt-deux ans, assignait involontairement ce terme à la beauté de toutes les femmes.
Pour vos femmes, et le reste de votre composition, je conviens qu’il y a de la beauté ; des caractères de l’expression ; de la sévérité de couleur ; mais mettez la main sur la conscience, et rendez gloire à la vérité ! […] Le beau tableau, si le peintre avait su faire des montagnes au pied desquelles la Vierge eût passé ; s’il eût su faire ses montagnes bien droites, bien escarpées et bien majestueuses ; s’il eût su les couvrir de mousses et d’arbustes sauvages ; s’il eût su donner à sa Vierge de la simplicité, de la beauté, de la grandeur, de la noblesse ; si le chemin qu’elle eût suivi eût conduit dans les sentiers de quelque forêt bien solitaire, et bien détournée ; s’il eût pris son moment au point du jour ou à sa chute. […] ce n’est pas cela ; il faut d’abord qu’elle soit belle ; puis qu’elle le soit de cette sorte de beauté qui s’allie avec la fermeté, la tranquillité et la joie féroce. […] Qu’il soit jeune, vigoureux, et d’une beauté rustique ; qu’il soit assis sur un bout de rocher ; que de vieux arbres qui ont pris racine sur ce rocher et qui le couronnent, entrelacent leurs branches touffues au-dessus de sa tête ; que le soleil penche vers son couchant ; que ses rayons, dorant le sommet des montagnes et la sommité des arbres viennent éclairer pour un moment encore le lieu de la scène ; que les trois déesses soient en présence de Paris ; que Venus semble de préférence arrêter ses regards ; qu’elles soient toutes les trois si belles, que je ne sache moi-même à qui accorder la pomme ; que chacune ait sa beauté particulière ; qu’elles soient toutes nues ; que Venus ait seulement son ceste, Pallas son casque ; Junon son bandeau.
On peut reprocher au Paradis perdu de Milton, ainsi qu’à l’Enfer du Dante, le défaut dont nous avons parlé : le merveilleux est le sujet et non la machine de l’ouvrage ; mais on y trouve des beautés supérieures, qui tiennent essentiellement à notre religion. […] La philosophie ne peut demander un genre de beautés plus élevées et plus graves. […] , toutes ces beautés réunies ont en soi quelque chose de si moral, de si solennel, de si attendrissant, qu’elles ne sont peut-être point effacées par les Prières du chantre d’Ilion. […] Nonobstant ces beautés, qui appartiennent au fond du Paradis perdu, il y a une foule de beautés de détail dont il serait trop long de rendre compte. […] Cet art de s’emparer des beautés d’un autre temps pour les accommoder aux mœurs du siècle où l’on vit, a surtout été connu du poète de Mantoue.
Mais, sans s’arrêter à cette ligne extrême du dandysme, de Vigny avait pourtant le sentiment de la forme, — de la beauté voulue dans tous les détails de la vie, qui répugne à tout ce qui est inférieur, et qui faisait admirer au vieux Mirabeau le rouge que se mettait Mazarin mourant ! […] Le plan des joues, dans ce portrait, est abbatial, et on y regrette la main, cette main que j’ai vue plus tard maigrie par la souffrance, et d’une transparence plus grande que la crosse d’agate de la petite canne qu’il portait, en ses derniers jours, même pour traverser son salon, et qui, pour la beauté, était une main d’Évêque grand seigneur. […] IV Telle donc est l’inspiration dernière d’Alfred de Vigny ; tel le sentiment amer, mais dompté, qui donne une beauté de douleur calme, de beauté de Niobé devenue marbre, aux compositions de sa vieillesse, et à son livre, que d’aucuns disent déjà un peu sec, son originalité, son pathétique et sa grandeur. […] … et on se dit que leur beauté n’est que l’éclat du sang du cœur blessé, durci par la fierté du poète ! […] Mais ces poésies, dont je ne puis rien citer, resserré que je suis dans les bornes de ce chapitre, sont pour moi, malgré leurs beautés incontestables, les inférieures du recueil, sinon par l’exécution, au moins par la pensée qui les anime.
Alors il produit des beautés ; il relève une idée par une autre ; il avertit l’esprit de son étendue, en lui faisant voir à la fois des objets qui sont à une grande distance ; il fait éprouver rapidement des sensations différentes ou contraires, et produit par des mélanges une sorte de sentiments combinés, souvent plus agréables que les sentiments simples. […] À la vue d’une beauté on devine celle qui lui est opposée, et qu’on ne voit pas encore : ce n’est pas ainsi que travaille la nature. […] Après avoir vu les défauts de cet orateur, rendons justice à ses beautés. […] L’oraison funèbre de Marie-Thérèse est du même genre et offre les mêmes beautés. […] C’est lui qui est aussi l’auteur d’une oraison funèbre de M. le Dauphin, où le public a trouvé les plus grandes beautés.
Une grande émotion lyrique l’envahit, annonciatrice de la beauté qui va naître. […] Les fruits de beauté vont mûrir au grand jour. […] Il est la plus haute expression de la vie dans son effort incessant vers l’ordre et la beauté. […] Préparons ensemble la revanche de notre race, nécessaire à la paix comme à la beauté du monde ! […] Ta parole était une leçon éloquente de raison et de beauté !
L’objet de l’art c’est la beauté. […] Cousin se réduit en dernière analyse à la beauté morale. […] Même doctrine, sauf quelques détails, sur l’essence du beau, sur la nécessité de l’idéal, sur la réduction de toute espèce de beauté à la beauté intellectuelle et morale. […] Plus elles se montrent librement dans un objet, plus aussi éclate la beauté. […] Quant à la laideur, il l’admet dans une sage mesure, comme moment (élément) de la beauté complexe.
Aux préventions romantiques dont elle avait hérité à l’endroit de la femme fatale, s’ajoutait l’influence de Schopenhauer, qu’elle venait de découvrir, et qui déniait à la femme toute vertu d’intelligence et de beauté. […] Si le poète Edmond Haraucourt, reprenant l’idée de Schopenhauer, allègue que : La Beauté de la femme est dans les nerfs de l’homme, sa génération n’aura plus les nerfs assez solides pour conférer à cette beauté un pouvoir irrésistible. […] Et qu’importe, au surplus, que sa beauté ne soit qu’une illusion de nos sens, comme la saveur du fruit ou l’odeur de la rose ? […] « Je voudrais que sa beauté nue me manifestât la beauté métaphysique du dieu-monde… Concevoir l’absolu en spécialisant ses attributs symbolisés par des impressions d’elle… Trouver des révélations flamboyantes aux mystères des analogies ! […] Écoutez le poète hindou, Rabindranath Tagore : « J’essaie d’étreindre la beauté.
Il faut donc que ce que le poète a inventé arbitrairement pour amener ces beautés, devienne pour les spectateurs le fondement nécessaire dont elles naissent. […] L’art consiste à couvrir ce défaut par des beautés d’un ordre supérieur. […] Que de beautés dans cette scène ! […] Il en tire une beauté. […] Une des beautés de l’art dramatique, c’est de disposer tellement la pièce, que les principaux personnages soient eux-mêmes les agents de leur propre malheur.
Chacun de nous en a sa petite provision, et c’est la base du jugement que nous portons de la laideur et de la beauté. […] C’est qu’à dix-huit ans, ce n’était pas l’image de la beauté, mais la physionomie du plaisir qui me faisait courir. […] Sous le despotisme, la beauté sera celle de l’esclave. […] De la beauté naît l’admiration ; de l’admiration, l’estime, le désir de posséder et l’amour. […] C’est quand on est en même temps attiré et repoussé violemment, qu’on éprouve le plus de malaise, et ce sera l’effet d’une Euménide à laquelle on aura conservé les grands traits de la beauté.
Mais justement il est difficile de distinguer ce qui, dans la beauté totale de quelques-uns de leurs vers, revient au sentiment et ce qui revient à la forme. […] car cela est à la portée de tout le monde et je me demanderai si c’est à la beauté de ses vers que je suis sensible, ou à la beauté de son âme. C’est donc par un excès de loyauté et de délicatesse artistique que les Parnassiens se déclaraient impassibles, ne voulaient exprimer que la beauté des contours et des couleurs ou les rêves et les sentiments des hommes disparus. […] Tel sonnet renferme toute la beauté d’un mythe, tout l’esprit d’une époque, tout le pittoresque d’une civilisation. […] Elle exprime d’abord l’exaltation d’une âme tendue à jouir superbement de toute la beauté éparse dans le monde et dans l’histoire et de toutes les œuvres où l’humanité a le plus joyeusement épanché son génie.
Lui s’enivre de la beauté des formes ; mais il aspire à quelque chose par-delà. […] cette beauté parfaite n’a point d’âme, et c’est l’âme aussi qu’il voudrait étreindre… En attendant, le Désir du poète adore à genoux la Beauté de la femme. […] Et, après ces sonnets vaguement platoniciens, le poète chante les Vestales, la beauté chaste, « la fleur spirituelle dont il veut boire, après la mort, les longs parfums ». […] Je ne sais encore comment j’ai pu sauver quelque chose de ma fatale beauté des emportements de son amour. […] Les contes et les sonnets, c’est, à des moments différents, la manifestation du même sentiment originel, le sentiment de la beauté génétique, c’est-à-dire de ce que la nature a mis d’attrayant dans les formes pour amener les hommes à ses fins.
Hugo du moins avait quelque puissance constructive et ses immenses châteaux de cartes présentent une certaine beauté architecturale. […] Nul autre ne donnait une si grande impression de beauté, nul autre « n’avait la gueule construite pour mordre d’une façon aussi parfaite ». […] Mais des matériaux et même des procédés de composition empruntés n’empêchent pas toujours l’œuvre de revêtir une beauté originale. […] La beauté sérieuse de Don Quichotte fut longtemps méconnue ; le ridicule de Madame Bovary finira par frapper tous les yeux. […] En vain son âpre volonté de beauté extérieure lui fait jeter d’amples draperies sur ces squelettes, on finira par apercevoir leur néant et que ces riches vêtements les écrasent.
. — La vraie critique est-elle celle des beautés ou celle des défauts. — Du pouvoir d’admirer ou d’aimer. — Difficulté de découvrir et de comprendre les beautés d’une œuvre d’art ; difficulté de les faire sentir aux autres ; rôle du critique. […] La critique ainsi entendue n’est plus que l’agrandissement égoïste de la personne, qui veut dominer une autre personne. « N’y a-t-il pas du plaisir, demande Candide, à tout critiquer, à sentir des défauts où les autres hommes croient voir des beautés ? […] On a dit encore43 que « la critique des beautés est stérile », celle des défauts seule est utile et « nous instruit de la vraie nature du génie ». […] La critique des beautés est et sera toujours plus complexe que celle des défauts. […] Pour atteindre ce double but, ce n’est pas la critique systématique et irritée des défauts qui convient, c’est la critique impartiale et calme des beautés et des défauts.
Eh bien, c’est ce traducteur de Carlyle, qui s’est interrompu lui-même et dont la traduction étincelle des beautés de l’original, qui nous donne aujourd’hui une histoire de la littérature anglaise, et, malgré son titre, qui dit faux en disant : « de la littérature contemporaine », une histoire intégrale de la littérature en Angleterre, commençant à la première chronique saxonne et au premier poème normand, et allant jusqu’au dernier journal anglais de l’heure présente, jusqu’à la dernière feuille de chou, comme disent avec tant de distinction ces charmants journalistes, ces fameux lapins du journalisme qui se mangent leurs journaux entre eux ! […] La démocratie ne croit point à la beauté intrinsèque des œuvres. […] Sans doute, quand il en est aux premières pages de son histoire, ou plus tard, quand il touche à cette phase historique où le génie, désintéressé de tout ce qui n’est pas l’effet esthétique, apparaît dans sa plus pure splendeur, sous Élisabeth, par exemple, — car le despotisme des rois n’a jamais empêché le génie de croître et il l’a quelquefois fait fleurir, — Odysse Barot ne peut point ne pas signaler les beautés des œuvres qu’il rencontre, surtout quand ces œuvres sont celles d’hommes comme Chaucer, Marlowe, Shakespeare, Et il les signale, et je crois même qu’il les sent avec énergie ; mais l’intérêt supérieur pour lui n’est pas là. […] La littérature et les arts n’ont à se préoccuper que d’une chose, tout aussi importante d’ailleurs que l’émancipation de l’humanité : c’est de la beauté à exprimer, — à inventer ou à reproduire, — mais à exprimer dans des œuvres fortes et parfaites, si l’homme de lettres ou l’artiste peuvent atteindre jusque-là… La littérature et les arts sont désintéressés de tout, excepté de la beauté qu’ils expriment pour obéir à cette loi mystérieuse et absolue de l’humanité, qui veut de la beauté, pour le bonheur de son être, tout aussi énergiquement qu’elle veut des vêtements et du pain… Je parle, bien entendu, de l’humanité à son sommet, élevée à sa plus haute puissance ; je ne parle pas d’elle à l’époque de ses besoins inférieurs… Mais c’est le vice justement des libres penseurs, strangulés par la logique que leur a faite l’épouvantable matérialisme de ce temps, de ne voir jamais que les besoins les plus bas de l’humanité. […] Le traducteur de Poe, le suggestif et perçant Baudelaire, qui vivait dans la préoccupation de la beauté des œuvres spirituelles comme Robinson en son île, mais sans vouloir jamais en sortir, Théophile Gautier, indifférent à tout excepté à la perfection de la forme, étaient aussi dans la condition nécessaire où il faut être pour écrire, sans distraction, sans adultérisation d’aucune sorte, l’histoire d’une littérature.
Aristote a donc raison de dire que la beauté du rithme ne venoit pas de la même cause qui produisoit les beautez d’harmonie et les beautez de melopée. C’étoit du choix des pieds qu’avoit fait le poëte, par rapport au sujet exprimé dans ses vers, que naissoit la beauté ou la convenance de la mesure, et par conséquent celle du rithme. […] Ainsi notre auteur a raison de dire que l’harmonie une des beautez de son langage preparé pour plaire, ne couloit point des mêmes sources que la beauté resultante de la diction. La beauté resultante de la diction venoit des principes de l’art poëtique, comme de ceux de l’art metrique et de l’art rithmique ; au-lieu que la beauté resultante de l’harmonie procedoit des principes de la musique harmonique. Les beautés de la melodie couloient encore d’une source particuliere, je veux dire du choix des accens ou des tons convenables aux paroles et propres par conséquent à toucher le spectateur.
Les cheveux noirs sont légèrement frisottants et crêpelés, ce qui leur donne l’air ébouriffé ; le teint d’un brun mat, les dents blanches, petites et espacées, les lèvres pourprées d’un rouge de corail, les yeux petits et un peu enfoncés, mais très vifs, et qui prennent l’air malin quand le rire les éclaire, les narines ouvertes, les sourcils fins et droits, l’oreille exquise, le col un peu fort et très bien attaché, sont d’une sphinge tranquille et divine, ou d’une guerrière de Thyatire dont la beauté simple, accomplie et idéalement parfaite ne peut fournir aucun thème d’illustration aux dessinateurs de La Comédie humaine. […] Du reste, Mme Judith Gautier avait reçu les leçons et les conseils de Tin-Tong-Liu, un Chinois de pure souche qui lui avait révélé les beautés inconnues des écrivains de son pays. […] J « Fleurs de luxe, de charme et de beauté, que l’on cultive encore aujourd’hui et qui seront bientôt les seuls vestiges du Japon splendide d’autrefois, … artificielles princesses choisies parmi les beautés les plus rares, élevées dans tous les raffinements du goût aristocratique, instruites des rites et de l’étiquette, savantes, virtuoses en tous les arts, jeunes, passionnées, enivrantes et… accessibles », ces Princesses d’amour, dans la cité d’amour, content et vivent des histoires d’amour évoquant les précieux décamérons et les merveilleuses « Mille et Une nuits ».
En tout cas il cherche une forme d’art où la vie et la beauté soient réalisées et soient profondément unies, où la beauté soit présentée vivante, mouvante et agissante ; et où la vie soit présentée en beauté, toujours en beauté et sous toutes les formes de beauté, musique, rythme, vers, noblesse des attitudes, union intime de la beauté et de la vie, union intime de l’état apollinien et de l’état dionysiaque, réalisation approximative de l’olympisme. […] Vie et beauté dans le ciel, vie et beauté sur la terre ; vie et beauté céleste enseignée par la tragédie à la terre. […] Ceci est contraire à la vie, à la beauté et à la lumière. […] Un peu moins de beauté et un peu plus de bonheur. […] L’humanité doit produire de la beauté ; elle doit vivre en force saine et en beauté, autant qu’elle peut.
Rien de curieux en engouement, en niaiserie et en badauderie, comme les jugements de ce Heine, qui était pourtant démocrate, sur Louis-Philippe, le duc d’Orléans, Guizot, Thiers, madame Sand, Béranger, lesquels sont tous, sous sa plume inventive, des créations d’une grande beauté. Mais beauté terrible, qui soufflettera autant celui qui l’a faite que ceux pour qui elle aura été faite, cette beauté menteuse ! […] … Poète en rapport direct avec le monde et l’Histoire par la poésie, il a fait œuvre de poète, il a fait œuvre de beauté. Faire œuvre de beauté, c’est la moralité des poètes ; car la beauté élève le cœur et nous dispose aux héroïsmes.
Uthal était d’une beauté rare et qui était passée en proverbe : aussi fut-il chéri des femmes. […] Uthal s’avance à pas lents, fier de sa force et de sa beauté. […] Mes yeux contemplèrent la beauté de sa fille. […] Tu t’avances dans ta beauté majestueuse. […] « Fille de la beauté, tu n’es plus.
On a discuté interminablement sur la Beauté. […] Est-il la beauté supérieure à la beauté vraie… « pulchritudinem quæ est supra veram… » une seconde nature glorifiée ? […] Il est certain que le beau a toujours à la fois quelque beauté visible et quelque beauté cachée. […] à l’unité primitive de la Vérité et de la Beauté. […] La Fiction, c’est l’atmosphère de la Beauté, et la Beauté, c’est la religion de l’esprit.
Disséquer le corps humain, c’est détruire sa beauté ; et, pourtant, par cette dissection, la science arrive à y reconnaître une beauté d’un ordre bien supérieur et que la vue superficielle n’aurait pas soupçonnée. […] Elle est, elle est, cette beauté infinie que nous apercevons dans ses vagues contours et que nous essayons de rendre par de mesquines images. […] Il ne faut jamais s’effrayer de la marche de la science, puisqu’il est sûr qu’elle ne mènera qu’à découvrir d’incomparables beautés. […] Il faut bien se figurer que ce qui est surpasse infiniment en beauté tout ce qu’on peut concevoir, que l’utopiste qui se met à créer de fantaisie le meilleur monde n’imagine qu’enfantillage auprès de la réalité, que, quand la science positive semble ne révéler que petitesse et fini, c’est qu’elle n’est pas arrivée à son résultat définitif. […] C’est assurément un admirable génie que saint Paul ; et pourtant, sont-ce les grands instincts de la nature humaine pris dans leur forme la plus générale qui font la beauté de ses lettres, comme ils font la beauté des dialogues de Platon, par exemple ?
Cette témérité le perd : il est fasciné lui-même par la beauté surhumaine de la magicienne. La description de cette beauté égale ou surpasse tout ce que l’Albane ou le Corrège ont de plus suave et de plus velouté dans le pinceau. […] Il ne fallait rien moins que tant de jeunesse, de vie et de beauté dans les hôtesses de ce palais, pour qu’un tel séjour n’assombrît pas notre société de plaisir. […] Ce qui est dangereux pour ces jeunes âmes, ce ne sont pas les beautés de l’imagination, ce sont ses laideurs. […] Charlemagne, sa cour, Bradamante elle-même, croiront que c’est lui, Léon, qui a conquis ainsi l’héroïque beauté que les chevaliers se disputent.
Et cette douce âme fut aussi une âme haute, rêveuse de la grandeur et de la beauté. […] Ô sublimité de la beauté d’autrefois ! […] Que de beautés cependant, et quelle largeur paisible de vision ! […] Et cette beauté, chacun de nous la conçut selon son personnel idéal. […] Il y eut l’ironie contre l’espoir, la négation devant la beauté, le calembour contre le poème.
Les âmes généreuses se retirent en elles-mêmes et s’émeuvent à y retrouver toute la beauté du ciel détruit. […] Comme les Grecs réduisirent à la beauté humaine les effroyables divinités cosmiques, elle ramène cette métaphysique de pessimisme et d’abstention écrasée à une psychologie presque optimiste et vaillante. […] La réputation et la gloire, qu’on peut voler à l’écrivain, sont de faux biens qui ne sauraient s’additionner avec les vrais biens : la pensée et la beauté. « Il ne faut pas mêler l’idée de gloire à l’idée de beauté. »« Tout à fait dépendante des révolutions de la mode et du goût », la première est méprisable. […] Même d’une cire qui fondra, attache-toi les nobles ailes et vole, enivrée, dans la beauté immensément monotone de l’azur.
Au début du Consulat, on la trouve brillante, fêtée, applaudie, la plus jeune reine des élégances, donnant le ton à la mode, inventant avec art des choses simples qui n’allaient qu’à la suprême beauté. […] Quand Mme Récamier vit s’avancer l’heure où la beauté baisse et pâlit, elle fit ce que bien peu de femmes savent faire : elle ne lutta point ; elle accepta avec goût les premières marques du temps. Elle comprit qu’après de tels succès de beauté, le dernier moyen de paraître encore belle était de ne plus y prétendre. […] Quant à la jeunesse, à la beauté de son cœur, s’il a été donné à tous de l’apprécier, c’est à ceux qui en ont joui de plus près qu’il appartient surtout d’en parler un jour. […] Son buste a été sculpté par Canova dans son idéal de beauté.
Sa simplicité candide la défendait contre l’enthousiasme qu’inspiraient sa jeunesse, sa beauté et sa voix. […] La contemplation des tableaux des grands peintres ou des statues des grands sculpteurs, qui gravent, en immortelles attitudes, leur pensée dans l’œil de leurs admirateurs, avait convaincu la jeune fille que l’effet de la beauté vivante ne serait pas moins impressionnant que celui de la beauté morte, et que la chair était au moins l’égale de la pierre, ou du bronze, ou du marbre. […] Ce n’était plus une femme, c’était une passion sous l’idéale beauté ; elle ne se livrait à cette inspiration des attitudes que dans l’intimité la plus confidentielle. […] C’était une des plus belles jeunes filles des Alpes du midi qui eût jamais ravi mes yeux ; je n’ai retrouvé cette beauté accomplie, à la fois idéale et incarnée, que dans la race grecque ionienne, sur la côte de Syrie. […] La beauté sereine du temps m’engagea à monter beaucoup plus haut, jusque dans la montagne.
L’étude de l’art a donc son utilité ; et si elle ne donne pas le génie, elle en fait du moins mieux sentir la grandeur et la beauté. […] Sans doute, il est des beautés si universelles, si éternelles, que toutes les intelligences peuvent les comprendre et les admirer. […] Ces beautés de second ordre nous font un devoir d’étudier les objets auxquels elles se rapportent, si nous voulons qu’elles ne nous échappent pas. […] On a dit que le goût était la faculté de se plaire aux beautés de la nature et de l’art. […] La délicatesse du goût sent mieux les beautés de la nature ; la pureté du goût est plus sensible aux combinaisons de l’art.
de la beauté littéraire. […] Seulement, n’y a-t-il pas, ne peut-il pas y avoir de la beauté dans l’éclat de voix, le geste et le regard d’un fou, et n’est-ce pas cette beauté-là, qu’on trouve en ces pages, écrites contre Dieu par un homme qui ne peut se débarrasser de l’enveloppante idée de Dieu qui l’enveloppe par-dessus toutes ses tortures physiques et morales, par cet athée à l’enfer qui croit à l’enfer, par ce damné d’avant la mort, qui, dans les courts moments de sa vie, a mangé en herbe l’affreux blé de sa damnation éternelle ? […] c’est cette beauté qu’ont les quelques pages de Georges Caumont ; c’est la beauté de cet enfant malade et insensé, à qui la souffrance l’a donnée, et qui, sans cette souffrance, serait horrible, avec ses idées, comme les sophistes de son temps, et ne mériterait, comme eux, que toutes les violences du mépris. […] Voilà pourquoi ceux qui aiment la beauté partout où elle est, — qui l’aiment pour elle-même et même indépendamment de ce qu’elle exprime, liront ces pages où il y a tant à condamner, mais tant à plaindre et tant aussi à admirer !
Mais les visions qu’il rêve se prêtent on le dirait d’elles-mêmes à l’harmonie. — Une fée le toucha de sa baguette fleurie, lorsqu’il naquit, et de cette caresse enchantée ses yeux s’ouvrirent à la Beauté. […] Or, en cette promenade, ses émerveillements, ses émois, ses chagrins, sa frayeur ont mis sur ses cheveux la lourde couronne de la pensée ; désormais sa parole est virile : il s’adresse à l’homme ainsi qu’au frère d’une contrée voisine et d’une voix souple et franche, parlant les mots inattendus qui peuvent suggérer, il est heureux de ce qu’il chante, dit la beauté de toute la vie, même la beauté de la douleur et nous commande là saine Joie. […] Il y a en M. de Régnier la noblesse d’une attitude morale face à face avec la noblesse des attitudes arrêtées au clair de ses strophes ; il est cependant bien loin du poète des Cygnes, qui me paraît épris de la Beauté morale au moins autant que de la Beauté plastique ; la joie de l’Acte est belle en soi, pour l’un, et, pour l’autre, presque indifférente si on la sépare de la forme qui l’exprime. […] Si l’on entend par personnalité l’originalité interne, foncière d’un artiste, laquelle se trahit en révélant une nuance de la Beauté, certes M. […] Pourtant, — MM. de Régnier et Griffin l’ont compris en tentant la poésie la plus noble, — il n’est pas de demi Beauté ; et qui d’entre nous, se disant artiste, aurait la lâcheté de ne pas dévouer tout son être au poème éternel ?
Presque toutes sont malades, et resplendissent d’une certaine beauté intérieure. […] Non, il mettra un rapport entre l’action et le genre de beauté. […] Vidal connaît la beauté moderne ! […] La beauté absolue et éternelle n’existe pas, ou plutôt elle n’est qu’une abstraction écrémée à la surface générale des beautés diverses. L’élément particulier de chaque beauté vient des passions, et comme nous avons nos passions particulières, nous avons notre beauté.
La beauté est dans son essence tout invisible, tout immatérielle. […] L’art ne reproduit pas seulement la beauté et la vérité visibles, mais une beauté et une vérité supérieures à celles des faits réels. […] Or, cette beauté forte et paisible de la statuaire, c’est la beauté propre à la poésie, à toute la littérature des Grecs. […] c’est celui de la beauté des monuments grecs. […] C’est pourquoi l’art est chargé d’exprimer seulement la beauté des choses afin de nous faire aimer le monde divin que cette beauté représente.
L’amour, la jeunesse, les premières ivresses de la vie, tout cela est si beau quand tout cela n’est plus, tout cela s’empourpre tant en nous quand le noir de la nuit nous tombe sur la tête, qu’il n’est pas dit que cette Juliette et ce Roméo, ce groupe exquis et très certainement le plus pur que le Génie humain ait produit pour exprimer l’Amour partagé, n’aient pas une beauté plus grande que la simple beauté de la vie : — la beauté divine des fantômes ! […] Il y a cette figure sinistre de l’apothicaire au poison, la seule laideur qu’il y ait dans cet univers de clarté, de beauté, d’azur et de joie, mais pour en repousser et faire mieux briller les rayons ! […] Dans le long pèlerinage que nous avons à faire avec lui dans les œuvres de Shakespeare, nous aurons bien à revenir sur les beautés que contiennent les pièces publiées dans ce volume-ci. […] Rien ne manque à cette tête, devenue sérieuse, de Henri, pas même, par instants, la mélancolie du repentir et la grandiose beauté de la pensée religieuse. […] François-Victor Hugo a senti les beautés du Henri V autant que personne, et il les a traduites avec la fidélité d’expression à laquelle il nous avait accoutumés.
Le symbolisme n’apporta pas en réalité un art original, ni même une conception nouvelle de la beauté. […] Par ce que nous prêterons à nos concepts des apparences de chair et de fleurs, il sera possible aux foules de ressentir la pathétique beauté immanente à la fois panthéiste. […] * * * Avec une pareille compréhension de la Beauté, il est aisé de se rendre compte de la singulière aversion que nous inspira l’état présent des lettres vers les premières heures de nos débuts. […] Selon lui, au lieu d’entraîner les naïves imaginations vers de fantastiques empyrées, des forêts féeriques et de légendaires paysages, ce qui contribue, en quelque sorte, à détacher de leur existence habituelle les hommes pour qui nous chantons, il s’agirait de les persuader, au contraire, de la beauté, de la grandeur même et de la pompe dont sont empreints leurs actes ordinaires et leurs occupations courantes. […] Sa beauté est relative aux pensées qu’il exprime.
Ce qui en fait la beauté, c’est la vérité du dialogue. […] Ce qui fait la beauté de celle-ci, c’est la prétention du loup qui veut avoir raison de son injustice, et qui ne supprime tout prétexte et tout raisonnement, que lorsqu’il est réduit à l’absurde par les réponses de l’agneau. […] Ce vers de six syllabes, suivi d’un autre de trois, si l’on peut appeler ce dernier un vers, ne me semble qu’une négligence et non une beauté. Quand cette hardiesse sera une beauté, je ne manquerai pas de l’observer. […] Il faudrait insister sur chaque mot, pour en faire sentir les beautés.
Il lui faisait d’ailleurs la grâce d’y reconnaître, sans doute sur parole, « une foule de beautés de style et d’expressions qui devaient être vivement senties par les compatriotes du poète, et même quelques morceaux assez généralement beaux pour être admirés par toutes les nations. » On en était là au commencement de ce siècle. […] Les beautés de La Divine Comédie, les difficultés qu’elle continue d’offrir, les disparates qui nous y frappent, ses rapports avec l’histoire, ce qui est du temps et ce qui semble en avant du temps, tout cela était touché, parcouru, soulevé avec ce talent unique qui caractérisait le professeur en M. […] On est revenu de l’idée de trouver dans les œuvres du passé, fût-ce même dans les chefs-d’œuvre, des modèles parfaits d’idéal et de pure et facile beauté. […] Toutefois c’est encore dans les exemplaires grecs et latins, ou dans les productions chrétiennes appartenant à des âges plus doux, qu’on retrouve le genre de beautés le plus direct, le plus naturel et, pour nous, le plus aisé à sentir, le plus exempt de toutes les ligatures et de tous les emboîtements pédantesques qui, en le reconstituant, ont déformé à de certains siècles et mis à la gêne l’esprit humain. Les beautés chez Dante sont grandes, et elles sont d’un ordre si imprévu, si puissant et si élevé, qu’on ne regrette point, quand on les possède une fois, la peine qu’elles ont coûtée ; elles ont pourtant coûté une grande peine, et il est de ceux qu’on admire, en étant obligé de les conquérir à chaque pas et à chaque instant.
Ce songe est une espèce d’abrégé du génie de Virgile : l’on y trouve dans un cadre étroit tous les genres de beautés qui lui sont propres. […] Ce songe offre d’ailleurs une beauté prise dans la nature même de la chose. […] Quel Hector paraît au premier moment devant Énée, quel il se montre à la fin : mais la pompe, mais l’éclat emprunté de Jésabel, Pour réparer des ans l’irréparable outrage, suivi tout à coup, non d’une forme entière, mais ………………… De lambeaux affreux Que des chiens dévorants se disputoient entre eux, est une sorte de changement d’état, de péripétie, qui donne au songe de Racine une beauté qui manque à celui de Virgile. Enfin, cette ombre d’une mère qui se baisse vers le lit de sa fille, comme pour s’y cacher, et qui se transforme tout à coup en os et en chairs meurtris, est une de ces beautés vagues, de ces circonstances effrayantes de la vraie nature du fantôme.
La Maison de l’Enfance, la Beauté de Vivre, les Clartés Humaines, l’Or des Minutes, réalisent heureusement le noble programme de l’auteur. […] Et songeant au destin des hommes, aux joies éphémères de l’amour et de l’orgueil, il entame le chant Lucrécien avec un cœur blessé, mais toujours confiant dans la Bonté et la Beauté de Vivre. […] Antigone sévère et douce, je te suis, Devinant ta beauté sans la voir, car je suis, L’Œdipe étrange de mon songe. […] » Le poème qui prétend réaliser ou essaie de réaliser cette esthétique nous attire surtout par la réelle beauté des images. […] Cependant il a un sentiment très exalté de la beauté pure, un culte généreux de la tradition, l’intelligence des lignes harmonieuses.
La description du printemps, de l’orage, de la nuit, de la beauté, des combats, peut se varier dans ses détails ; mais la plus forte impression a dû être produite par le premier poète qui a su les peindre. […] Les pensées qu’on ajoute à la poésie, sont un heureux développement de ses beautés ; mais ce n’est pas la poésie même : Aristote l’a nommé le premier un art d’imitation. […] Les poètes savaient peindre de la manière la plus frappante les objets extérieurs ; mais ils ne dessinaient jamais des caractères où la beauté morale fût conservée sans tache jusqu’à la fin du poème ou de la tragédie, parce que ces caractères n’ont point leur modèle dans la nature. […] Le paganisme des Grecs était l’une des principales causes de la perfection de leur goût dans les arts ; ces dieux, toujours près des hommes, et néanmoins toujours au-dessus d’eux, consacraient l’élégance et la beauté des formes dans tous les genres de tableaux. […] Après avoir essayé de montrer quelles sont les causes premières des beautés originales de la poésie grecque, et des défauts qu’elle devait avoir à l’époque la plus reculée de la civilisation, il me reste à examiner comment le gouvernement et l’esprit national d’Athènes ont influé sur le rapide développement de tous les genres de littérature.
Votre présence augmente les divertissements, et les divertissements augmentent votre beauté lorsqu’ils vous environnent. […] La voilà bien au naturel dans son cadre et dans son épanouissement : une beauté, un esprit et une grâce à découvert, qui reluit en plein soleil. […] Walckenaer a consacré tout un chapitre à cette beauté romanesque ; mais il s’est appliqué à la traduire, et il ne la laisse pas assez parler elle-même. […] On comprendra qu’étant de cette humeur, elle ne devait pas manquer sur ses pas de téméraires et d’indiscrets ; on le comprendra mieux encore, quand on aura su d’elle-même quelle était sa beauté ; et il ne paraît pas qu’elle l’ait exagérée en aucun trait. […] Quelques censeurs ont voulu dire que, dans les justes proportions de la beauté, on pouvait me trouver la lèvre du dessous un peu trop avancée.
J’aime mieux Ariane que Manlius de toute la préférence que je donne aux beautés de sentiment sur les autres beautés de l’art. […] Il avait pris pour modèle le cinquième acte de Rodogune et ses beautés si périlleuses. […] Il est utile sans doute que le poète donne des indications aux acteurs ; mais les bons ouvrages sont ceux qui forment les bons acteurs par la secrète vertu de leurs beautés. […] Mais avant de dire par où il pèche, je voudrais m’arrêter un moment sur ses beautés. […] Là où les pensées sont fortes, ces expédients sont des beautés, ailleurs, c’est une phraséologie d’emprunt, dont Voltaire se serait moqué dans les ouvrages d’un autre.
Il est vrai que dans ce début le poète semble moins occupé de la fuite et de la rapidité du sentiment que de la fragilité même de la beauté ; il pense à des attraits positifs, à une forme, à un visage, à ce que la poésie du Midi, celle de Rome et de la Grèce a surtout considéré. Il dirait volontiers comme le Tasse dans ce sonnet à Mme Lucrèce, duchesse d’Urbin : « Negli anni acerbi tuoi, etc. » En vos années d’âpre verdeur, vous ressembliez à la rose purpurine qui n’ouvre son sein ni aux tièdes rayons ni au Zéphyre, mais qui dans sa robe verte se cache vierge encore et toute honteuse ; Ou plutôt vous paraissez (car aucune chose mortelle ne peut se comparer à vous) comme une céleste Aurore qui emperle les campagnes et dore les monts, brillante dans un ciel serein, et tout humide de rosée : Aujourd’hui la saison moins verte ne vous a rien ôté ; et, fussiez-vous même en négligé, la beauté de première jeunesse, tout ornée d’atours, ne saurait vous vaincre ou vous égaler. […] Ou, comme un jeune poète auprès de moi l’a traduit pour les derniers vers : L’âge mûr est venu, qui ne t’a rien ôté ; Même en ton négligé, la plus jeune beauté Sous ses plus beaux habits, te cède la couronne. […] Après les premières stances, il n’insiste plus sur cette seconde beauté préférable ou encore enviable de la maturité ; il accorde que le Temps triomphe, et qu’il renverse les grâces fragiles comme il change et détruit tout ce qui se succède incessamment sur cette scène toujours renouvelée de la nature ou de l’histoire. […] On noterait encore de ces strophes qu’on aime à retenir, dans l’ode adressée par Denne-Baron Aux Mânes d’Octavie Devéria, sœur des célèbres peintres ; cette jeune femme, morte peu après le mariage, dans tout l’éclat de la beauté et entourée du charme des arts, a bien inspiré le poète ami : Des chœurs de l’Hyménée à peine tu déposesq, Ta chevelure encor sent l’haleine des roses Dont il te couronna comme un ciel du matin… Properce occupa de bonne heure M.
La beauté d’un Ouvrage quelconque ne consiste pas à n’avoir rien d’étranger, mais à former un Tout habilement composé des différentes matieres qui peuvent l’embellir. […] Il a fait plus ; semblable à l’Abeille qui fait tirer des fleurs les sucs primitifs dont elle fait son miel, en les transformant en sa propre substance, il s’est nourri des beautés de ce grand Poëte, sans qu’on puisse l’accuser de lui avoir rien dérobé, & par-là il est devenu lui-même original. […] Il se transforme en son Original, évite ses défauts, s’approprie ses beautés, & , en les adoptant au sujet qu’il traite, il sait leur donner une forme & un caractere qui les lui rend propres. […] Apelle ne crut pouvoir former le Tableau d’une Beauté parfaite, qu’en empruntant de chaque Beauté ce qu’elle avoit de plus agréable & de plus régulier.
pourquoi vous, chétifs flûtistes, éphèbes de la Décadence, répudier la Lyre qui dans les grands siècles chanta si merveilleusement toute la Beauté ? […] Mais empruntant à chacune d’elles ses éléments, surgit la conception — l’unique vraie à mon sens — du Poète : en son âme vibrent les reflets des choses du dehors, et cependant il leur communique sa vie à lui ; lui seul est vraiment, entièrement poète, parce que seul il aura su donner l’idée de l’Être entrevu dans toute sa beauté. […] J’ai dit plus haut que l’Être, sous toutes ses faces, s’ouvre — champ d’espace infini — aux investigations du poète ; j’ai montré que beaucoup, pour avoir volontairement clos d’une limite leur horizon, n’ont exprimé que la Beauté partielle et furent incomplets : Parnassiens et Symbolistes. Et j’arrive à cette conclusion — malgré moi, puisque en dehors de la question — qu’une œuvre ne peut être d’absolue beauté si l’âme n’y transparaît ; à travers la matière, si la vie n’y aime et souffre sous la Forme : la Forme éternellement morne en dépit de sa splendeur, lorsqu’elle s’isole. Donc le Poète absolu sera celui qui de son humanité animera la beauté inerte des Choses ; car la Forme ne sera jamais qu’un vêtement, lâche quelquefois, mais le plus souvent strict fiancé de l’Idée.
Voluptueux intellectuel, il se contenta de s’enivrer du plaisir qu’il donnait aux autres, et il le donnait sur place, à l’instant même, — avec l’idée, avec l’image, avec la parole, le geste, le regard, la voix, jouissant de son esprit comme les femmes jouissent de leur beauté ! […] C’est l’éloquence donnée à pur don comme la beauté, existant comme la beauté, et qu’il avait comme la beauté, cet homme à qui Dieu avait tout donné et qui n’ajouta rien aux dons de Dieu, fascinant mais lâche génie ! […] Mais quoi qu’il fût d’ailleurs, il avait l’esprit, l’élégance, la tournure, la distinction, la beauté, toutes les aristocraties naturelles qui vengent de la seule qu’on n’ait pas ! […] Sa beauté célèbre commença ses succès, et son irrésistible esprit les acheva. […] Cet Alcibiade du Royalisme, par sa puissance de séduction et par sa beauté, mourut à l’étranger, comme Alcibiade chez les Perses.
On a fait de ses œuvres de petites éditions ineptes, ignobles, honteuses, belges enfin (le mot dit tout), et en France, personne n’a songé à dessouiller son génie de ces porcheries qu’on a osé faire de ses œuvres, en prenant l’initiative d’une édition, digne de leur distinction et de leur beauté ! […] Les contemporains de Mme de Staël qui n’entendaient pas grand’chose à la physiologie et qui avaient dans la tête le type de beauté dont Pauline Borghèse et Mme Récamier étaient l’idéal, n’ont rien compris à ces traits un peu gros, à ce large nez de lionne, à ces lèvres roulées plus amoureuses encore qu’éloquentes, aux orbes solaires de ces yeux, sincèrement ouverts jusqu’à l’âme, qui ont trempé tant de fois leurs feux dans les larmes, comme le soleil trempe les siens dans les mers ! […] Mais pour les peintres et les sculpteurs, et les connaisseurs en beauté, elle ne l’était pas et rien ne pouvait diminuer ou voiler la femme en elle, car la femme déborde de tout l’ensemble vivant et robuste de Mme de Staël ! […] La beauté d’âme de Mme de Staël est aussi pure que la beauté physique de Mme Récamier. […] Elle l’a sacrée non pas seulement reine de beauté — les hommes suffisaient pour ce sacre-là — mais elle l’a sacrée, comme une « ingénuité céleste », et elle était, elle, en ingénuité, plus que l’égale de son amie, car l’ingénuité du génie (le plus grand ingénu que je sache) s’ajoutait à l’ingénuité de son âme… Femme d’esprit par-dessus le génie, qui manque d’esprit quelquefois, Mme de Staël, qui pouvait dialoguer avec Rivarol, n’a peut-être pas eu dans toute sa vie la cruauté d’une épigramme à se reprocher.
Mais souvent à leurs vers défailloit la beauté, Comme aux corps qui n’ont rien qu’une lourde santé. […] La nouveauté, ce fut d’en avoir fait un troisième pour Cléonice, suivi d’un quatrième pour diverses beautés qu’il ne nomme pas. […] Les plus grandes beautés du recueil de Bertaut ne suffisent qu’à motiver le jugement de Boileau. […] Toutes les autres beautés de Malherbe sont comme le fruit de cette beauté première. […] Ni l’autorité de la discipline qu’elles ont sanctionnée n’a fléchi, ni leurs beautés ne se sont fanées.
Cousin, de se faire une idée vivante et précise du genre de beauté de Mme de Longueville, et cependant c’est le greffier de ses beautés et de ses charmes ! […] C’était la beauté classique de l’époque : œil de velours bleu, cheveux blonds, incarnat aux joues et bouche en cœur ! […] Cousin qui s’émerveille de cette beauté de vers hexamètre. […] Cousin exagère les mérites de beauté physique ou de beauté morale d’une personne aussi insignifiante, aussi engloutie dans l’oubli que Mme de Hautefort, c’est une fantaisie ! […] « Soyez bénies, en nous séparant, muses gracieuses et grandes, qui m’avez montré la beauté véritable et dégoûté des attachements vulgaires.
Beauté dans la forme : voyez ses femmes ! Beauté dans l’architecture : voyez ses temples et ses palais ! Beauté dans la sculpture : voyez son Michel-Ange ! Beauté dans la peinture : voyez son Raphaël ! Beauté dans la musique : voyez son Rossini !
Madame de Montespan avait remarqué que madame de Soubise mettait des pendants d’oreille d’émeraude les jours que M. de Soubise allait à Paris ; elle fit suivre le roi un de ces jours-là, et il se trouva que c’était effectivement le signal d’un rendez-vous L’intrigue du roi avec madame de Soubise inquiéta madame de Montespan : une lettre de madame de Sévigné nous apprend le 7 août que madame de Montespan redoublait de soins pour sa parure, qui y dit-elle, est extrême comme sa beauté et sa gaîté, ajoute-t-elle, est extrême comme sa parure. […] D’un autre côté, le parti de l’amitié n’est point pris nettement ; tant de beauté encore et tant d’orgueil se réduisent difficilement à la seconde place. […] On veut ménager des restes de beauté. Cette économie ruine plutôt qu’elle n’enrichit. » Dans les mois de novembre et de décembre, madame de Montespan épuisa, pour se rendre les charmes de la jeunesse, toutes les ressources qui restent à la beauté par les ans confirmée.
. — Beauté de la langue des métiers, dont l’étude pourrait remplacer celle du grec. […] Il ne s’agit en cette étude que de la beauté verbale et je dois me borner à chercher si le mot grain est moins beau que le mot décigramme, si l’extraordinaire kilo n’est pas une perpétuelle insulte au dictionnaire français43. […] La vénerie et le blason possèdent des langues entièrement pures et d’une beauté parfaite ; mais il m’a semblé plus curieux de choisir comme type de vocabulaire entièrement français celui d’une science plus humble, mais plus connue, celui de l’ensemble des corps de métier nécessaires à la construction d’une maison. […] Et en effet la beauté de ces douze mots est vraiment originale ; on ne peut rien reprendre dans leur sonorité et presque rien dans leur forme.
… Mais non, le signalement ne va que sur quelques points (fille d’une terre esclave, l’Italie ; homme par le cerveau ; poëte par les rêves ; à toi qui es encore la Beauté. » On nous assure que c’est plutôt à une dame russe, madame de S…of, célèbre par sa beauté et par l’étrangeté et les fantaisies d’une grande existence. […] Voici la suite : « Enfant par la foi, vieillard par l’expérience, homme par le cerveau, femme par le cœur, géant par l’espérance, mère par la douleur et poëte par les rêves ; à toi qui es encore la Beauté, cet ouvrage où ton amour et ta fantaisie, ta foi, ton expérience, ta douleur, ton espoir et tes rêves sont comme les chaînes qui soutiennent une trame moins brillante que la poésie de la pensée, que le poëme gardé dans ton âme, semblable à l’hymne d’un langage perdu dont les caractères irritent la curiosité des savants. »
Donc la raison fait la beauté. […] Car, si tous les hommes sentent la nature, le succès, c’est-à-dire le consentement universel, sera non pas assurément la preuve, mais le signe de la beauté des œuvres. […] Par conséquent, si l’on n’en sent pas soi-même la beauté, il ne faut pas les condamner pour cela, mais douter de soi-même et de ses lumières. […] Or que peut être cette cause, sinon la beauté effective et intrinsèque des œuvres ? Mais qu’est-ce que cette beauté même, sur laquelle se fait l’accord de tant d’hommes si différents d’ailleurs ?
C’était l’expression d’un sentiment naturel qui, à force de profondeur et de beauté vraie, a rencontré, sans la chercher, la forme littéraire la plus exquise — Maurice de Guérin avait une sœur, non pas seulement de sang, mais de génie. […] Il lui avait refusé cette beauté des vases et des statues que le temps peut détruire ; mais il l’avait ornée de la beauté qui ne passe point, de celle dont elle disait : « Quelle que soit la forme, l’image de Dieu est là-dessous. Nous avons tous une beauté divine, la seule qu’on doive aimer, la seule qu’on doive conserver pure et fraîche pour Dieu qui nous aime. » Simple et profonde manière de se voir et de s’accepter qu’elle eut toute sa vie et qui aurait sauvé Mme de Staël, qu’on appelle une laide de génie, de ses tristesses sans grandeur ! […] Les âmes basses ne comprendront rien à la beauté cachée de ce récit, dont celle qui le fait et qui a les yeux attachés sur la source de la Beauté éternelle, ne se doute, certes, pas non plus ! […] Maurice de Guérin se mariait atteint déjà de la maladie dont il mourut peu de temps après… Il en ressentait les premières souffrances, les premières illusions et ces premiers symptômes, qui rendaient plus touchant le genre de beauté qu’il avait ; car, pour les têtes d’imagination, il avait la beauté qu’on pourrait attribuer au dernier des Abencerrages.
Ce peuple s’emplit l’âme de fables qui n’ont aucun mérite supérieur de beauté, de moralité, de vérité. […] Elle peut être moralement indifférente, mais elle doit tout au moins récréer les âmes par le spectacle de la beauté, les alléger du fardeau de la vie, être créatrice d’une heure de joie et de repos. […] Dès qu’on s’adresse au peuple, on ne fait plus de haute littérature ou de grand art, et le succès même de pareilles tentatives ne s’achète qu’au prix de la beauté sacrifiée. […] J’en aurai fini avec l’objection de l’incompatibilité entre l’intelligence populaire et la beauté littéraire, lorsque j’aurai expliqué de quelle compréhension il s’agit. […] Et moi j’admirais comment ces primitifs, si loin de nos sciences et de nos discours, avaient le sentiment de la beauté de leur âpre pays.
Les uns ont employé leurs veilles à développer son sens, et à relever ses beautés ; les autres assez hardis pour lui trouver des défauts, se sont révoltés contre l’admiration publique. […] C’est l’élégance qui y répand la beauté, c’est la précision qui y met la force, et c’est le grand sens qui en fait le prix. […] Toutes les maximes de l’iliade ne sont pas de la même beauté. […] Ils courent risque à tout moment de prendre pour faute ce qui est beauté, et pour beauté ce qui est faute. […] Notre langue, pourroit-il dire, n’est pas si hardie ; mais ce sont autant de beautés qui nous manquent.
C’est la considération de la beauté qui retient son esprit dans des admirations ou des estimes en apparence contradictoires. […] Un esprit porté à ne juger, à ne sentir qu’en fonction de la beauté est naturellement compréhensif. La beauté morale du dogme chrétien retint M. Anatole France, et surtout le charme anecdotique de l’histoire de l’église, des apôtres et des saints : la beauté plus directement plastique des lettres et des arts grecs et français ne l’attira pas moins ; ni la beauté intellectuelle de la philosophie déterministe, de la science moderne, si relativiste, et si sceptique.
Combien de traductions, semblables à des beautés régulières sans âme et sans physionomie, représentent de la même manière les ouvrages les plus disparates ? […] C’est à peu près comme si un graveur habile, qui copie le tableau d’un grand maître, s’interdisait quelques touches fines et légères pour en relever les beautés, ou pour en masquer les défauts. […] Nos littérateurs trouveraient surtout un avantage considérable à traduire ainsi par morceaux détachés certains ouvrages qui renferment assez de beautés pour faire la fortune de plusieurs écrivains, et dont les auteurs, s’ils avaient eu autant de goût que d’esprit, effaceraient ceux du premier rang. […] Sénèque, si excellent à citer et si fatigant à lire de suite, qui tourne sans cesse avec une rapidité brillante autour du même objet, différent en cela de Cicéron, qui avance toujours vers son but, mais avec lenteur ; Lucain, le Sénèque des poètes, si plein de beautés mâles et vraies, mais trop déclamateur, trop monotone, trop plein de maximes et trop dénué d’images ? […] Un tel homme pouvait-il se flatter de connaître les vraies beautés d’Homère, et Homère lui-même eût-il été flatté d’avoir un pareil admirateur ?
Il acheva d’y apprendre l’adoration de la beauté plastique. […] Cet amour enthousiaste de la vie, de la religion et de la beauté grecques a été un des sentiments les plus remarquables de la dernière génération poétique. […] De là, en maintes occasions, des effets d’un comique délicat et savoureux par le contraste inattendu que font avec certaines idées et certains objets la gravité, la prudhomie, l’exactitude scientifique et, d’autres fois, la beauté antique du langage de M. […] Bonnard s’exprime dans la langue la plus pure, la mieux rythmée, la plus harmonieuse, dans une langue toute nourrie de grâce et de beauté grecques. […] Il en éprouve déjà les passions : vanité, amour-propre, jalousie amour aussi désir de gloire, aspiration à la beauté.
Or cette ceinture ne pouvoit être donnée qu’à Vénus ; elle ne pouvoit convenir à la beauté majestueuse de Junon, car la majesté demande une certaine gravité, c’est-à-dire une contrainte opposée à l’ingénuité des graces ; elle ne pouvoit bien convenir à la beauté fiere de Pallas, car la fierté est opposée à la douceur des graces, & d’ailleurs peut souvent être soupçonnée d’affectation. […] Ce qui fait les grandes beautés, c’est lorsqu’une chose est telle que la surprise est d’abord médiocre, qu’elle se soûtient, augmente, & nous mene ensuite à l’admiration. […] Des beautés qui résultent d’un certain embarras de l’ame. […] Ces sortes de surprises font le plaisir que l’on trouve dans toutes les beautés d’opposition, dans toutes les antithèses & figures pareilles. […] Ainsi les contrastes sont cause des défauts, aussi bien que des beautés.
Mlle de Scudéry, « qui était de très bonne mine » et d’assez grand air, n’avait aucune beauté : « C’est une grande personne maigre et noire, et qui a le visage fort long », nous dit Tallemant. […] Et abordant courageusement ce chapitre de la beauté, c’est encore à elle-même qu’elle pense, lorsqu’elle dit : Encore que vous m’entendiez parler de Sapho comme de la plus merveilleuse et de la plus charmante personne de toute la Grèce, il ne faut pourtant pas vous imaginer que sa beauté soit une de ces grandes beautés en qui l’envie même ne saurait trouver aucun défaut… Elle est pourtant capable d’inspirer de plus grandes passions que les plus grandes beautés de la terre. […] Mais, d’après ces seuls traits, on fait plus qu’entrevoir l’idéal qu’elle n’était pas fâchée de présenter de sa beauté, ou, si vous voulez, le correctif de sa laideur. […] Et dans ce portrait de Sapho toujours, qui nous est précieux, elle arrive enfin aux charmes de l’esprit, sur lesquels elle s’étend avec un redoublement de complaisance : Car les charmes de son esprit surpassent de beaucoup ceux de sa beauté. […] J’ai beau leur parler de la beauté de la saison, des nouvelles qui courent et de toutes les choses qui font la conversation ordinaire, ils en reviennent toujours à leur point : et ils sont si persuadés que je me contrains pour leur parler ainsi, qu’ils se contraignent pour me parler d’autres choses qui m’accablent tellement que je voudrais n’être plus Sapho quand cette aventure m’arrive.
Mais on conçoit sans peine que la société cléricale, en vertu du principe qui régit son activité et lui fixe son objet, ne lasse œuvre de littérature que par exception, ou par accident ; elle a autre chose à faire eu général, que de réaliser la beauté pour le plaisir de l’esprit. […] Puis pendant des siècles, une à une, les provinces qui entreront dans l’unité nationale recevront la langue de France, et mêleront à son esprit leur génie original : ce sera la rude et rêveuse Bretagne, réinfusant dans notre littérature la mélancolie celtique, ce sera l’inflexible et raisonneuse Auvergne, Lyon, la cité mystique et passionnée sous la superficielle agitation des intérêts positifs ; ce sera tout ce Midi, si varié et si riche, ici plus romain, là marqué encore du passage des Arabes ou des Maures, là conservant, sous toutes les alluvions dont l’histoire l’a successivement recouvert, sa couche primitive de population ibérique, la Provence chaude et vibrante, toute grâce ou toute flamme, la Gascogne pétillante de vivacité, légère et fine, et, moins séducteur entre ces deux terres aimables, le Languedoc violent et fort, le pays de France pourtant où peut-être les sons et les formes sont le mieux sentis en leur spéciale beauté. […] Au xvie siècle, affranchi par l’antiquité retrouvée sinon matériellement dans ses œuvres, du moins dans son véritable esprit, éveillé au sens de l’art par la vision radieuse que lui offre l’Italie, le génie français crée ou emprunte les formes littéraires capables de satisfaire ses besoins nouveaux de science et de beauté. Il se fait au xviie siècle comme une conciliation ou plutôt un juste équilibre de la science et de la loi d’un côté, de l’autre de la science et de l’art : révélation et rationalisme, vérité et beauté, l’un ou l’autre de ces deux couples est la formule de presque tous les chefs-d’œuvre.
Outre les beautés de forme et de détail, son livre12 a donc une beauté d’ensemble, qui provient de la continuité d’une même inspiration. […] Notre rêve avait fait la beauté de ces choses… Tout ce qui ce soir-là nous fit ivres et fous Etait créé par nous et n’existait qu’en nous… …………………………………………………………….. […] Et toute la dernière pièce, Vers dorés : Sois pur, le reste est vain, et la beauté suprême, Tu le sais maintenant, n’est pas celle des corps : La statue idéale, elle dort en toi-même ; L’œuvre d’art la plus haute est la vertu des forts.
Elle a été patiente outre mesure ; elle a attendu longtemps sa beauté, son esprit, sa jeunesse, sa grâce, son charme enfin. […] Elle avait appelé à son aide tout ce qui lui restait de force, de grâce, de charme, de beauté ! […] Sa mère jouait la comédie, et aussi sa jeune tante dont la beauté était célèbre dans un temps où il était difficile de se faire remarquer parmi tant de beaux visages. […] Mademoiselle Mars n’a pas vu son héritière en jeunesse, en beauté, en charme, cette admirablement belle Madeleine Brohan ! […] On se rappelle cette phrase de Marivaux ; « Ma beauté !
Une beauté, dans la beauté grecque, une beauté que les poètes nous montrent appréciée, c’est la forme et la délicatesse des joues, le masque osseux de la figure devait être singulièrement resserré, amenuisé aux pommettes. […] La sévère et profonde beauté des yeux, qu’on sent plutôt qu’on ne perçoit dans leur cernure d’ombre. […] La beauté de la femme est la beauté d’un bel animal. […] On dirait que les peuples ont les vices de leur beauté et les vertus de leur laideur. […] Mme Berthelot, une beauté singulière, inoubliable : une beauté intelligente, profonde, magnétique, une beauté d’âme et de pensée, semblable à ces créations de l’extra-monde de Poë.
Les angoisses du père et du fils se calmèrent bientôt en apprenant que les Turcs avaient respecté la rare beauté de Cornélia, et l’avaient rendue à son mari pour une modique rançon. […] L’extrême jeunesse et la beauté pensive de Torquato ajoutèrent l’attrait et la tendresse à cet accueil. […] Toutes deux d’une beauté célèbre, quoique différente, et d’un esprit cultivé, elles rassemblaient dans leur personne la grâce de la France et la passion de l’Italie. […] D’une beauté plus idéale et plus délicate que sa sœur, elle évitait souvent, sous prétexte d’une santé plus frêle, les cérémonies et les fêtes de la cour. […] On n’osait aimer une beauté transfigurée en angélique apparition, au milieu d’une cour galante et souvent licencieuse d’Italie.
Il avait, il est vrai, aussi une œuvre forte : le De Summo Pontifice de Bellarmin, mais cette œuvre, qui a sa grandeur, n’a pas le charme de beauté dans la plus pure clarté qu’a ce livre incroyable du Pape, où la transparence de la forme est égale à la transcendance du sujet ! […] Dans ce livre métaphysico-théologique, la beauté du style qu’il s’y permet est adéquate à la beauté de la pensée, et le tout tremble d’une émotion adorable, que ceux qui n’aiment pas Dieu comme cette âme privilégiée comprendront, s’ils sont capables d’un autre amour. […] Mais quand on le pourrait, on se priverait encore de la beauté que le philosophe, grand artiste toujours, donne au développement de ses idées, et de la force qu’il imprime à leurs conséquences. […] tout cela a le malheur, définitif et suprême, d’exprimer la vérité, l’invalidante vérité, et cette vérité est si haïe et méprisée que ceux qui pourraient lire ce livre pour sa seule beauté ne le lisent pas et n’y touchent pas, à cause de sa vérité ! La Vérité, dans notre temps, fait tort à, la Beauté même. — Ah !
. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. […] Une raie de peupliers solitaires au bout d’un champ grisâtre, un bouleau frêle qui tremble dans une clairière de genêts, l’éclair passager d’un ruisseau à travers les lentilles d’eau qui l’obstruent, la teinte délicate dont l’éloignement revêt quelque bois écarté, voilà les beautés de notre paysage ; il paraît plat aux yeux qui se sont reposés sur la noble architecture des montagnes méridionales, ou qui se sont nourris de la verdure surabondante et de la végétation héroïque du nord ; les grandes lignes, les fortes couleurs y manquent ; mais les contours sinueux, les nuances légères, toutes les grâces fuyantes y viennent amuser l’agile esprit qui les contemple, le toucher parfois, sans l’exalter ni l’accabler. — Si vous entrez plus avant dans la vraie Champagne, ces sources de poésie s’appauvrissent et s’affinent encore. […] On aime pourtant le joli soleil qui luit doucement entre les ormes, le thym qui parfume les côtes sèches, les abeilles qui bourdonnent au-dessus du sarrasin en fleur : beautés légères qu’une race sobre et fine peut seule goûter. […] Ici, et à cinquante lieues alentour de Paris, la beauté manque, mais l’intelligence brille, non pas la verve pétulante et la gaieté bavarde des méridionaux, mais l’esprit leste, juste, avisé, malin, prompt à l’ironie, qui trouve son amusement dans les mécomptes d’autrui. […] Ils ne sont point frappés par la magnificence de la nature ; ils n’en voient guère que les jolis aspects ; ils peignent la beauté d’une femme d’un seul trait, qui n’est qu’aimable, en disant « qu’elle est plus gracieuse que la rose en mai. » Ils ne ressentent pas ce trouble terrible, ce ravissement, ce soudain accablement du coeur que montrent les poésies voisines ; ils disent discrètement « qu’elle se mit à sourire, ce qui moult lui avenoit. » Ils ajoutent, quand ils sont en humeur descriptive, qu’elle eut « douce haleine nette et savourée », et le corps aussi blanc « comme est la neige sur la branche quand il a fraîchement neigé. » Ils s’en tiennent là ; la beauté leur plaît, mais elle ne les transporte pas ; ils goûtent les émotions agréables, ils ne sont pas propres aux sensations violentes.
Réveil du goût de la beauté antique. — 2. […] Il se produit vers la fin de l’Ancien Régime un fait assez considérable, qui modifie la littérature : on voit l’antiquité gréco-romaine reparaître, et ramener, comme il était naturel, un idéal de beauté formelle et plastique. […] Réveil du goût de la beauté antique. […] Il avait dans le sang, il reçut parmi ses premières impressions d’enfance, quelque chose qui lui permit de comprendre la beauté antique : il la sentait toute voisine de lui et dans une parfaite harmonie avec son intime organisation ; où les autres ne voyaient que des souvenirs de collège ou des décors d’opéra, il saisissait sans effort les réalités concrètes. […] La Grèce qu’il, aime, où il vit, c’est la Grèce aimable, légère, joyeuse de vivre, absorbant avidement de ses sens subtils tout ce que la nature a répandu de beautés et de plaisirs dans l’air, dans la lumière, dans les lignes des monts et la mobilité des îlots ; la Grèce des joies physiques et des passions naturelles, primitivement sensuelle ou voluptueuse avec raffinement, la Grèce homérique, alexandrine ou gréco-romaine, épique, idyllique, élégiaque.
Oratio loue la beauté du corps et décrit l’une après l’autre ses perfections. Cinthio loue la beauté de l’âme et vante tous les dons exquis qui l’ont fait brûler pour elle. Isabelle dit à Cinthio qu’il jouira de la beauté de son esprit et lui souhaite le bonsoir ; elle dit à Oratio qu’il jouira de l’autre beauté et sera son mari. […] « Il y avait à Gênes un jeune homme bien né et riche nommé Cinthio, lequel, resté sans père ni mère, n’avait qu’une sœur douée d’une beauté rare et d’une éducation distinguée. […] Il se donne à Pantalon pour envoyé par ses ennemis de Venise afin de le tuer ; mais touché de la beauté d’Isabelle, il renonce à son projet et demande la main de sa fille.
Cet état d’enthousiasme où l’âme entend soudain le vivant tressaut d’elle-même est une des plus nobles attitudes de l’homme et tout être capable de comprendre la beauté a dû le connaître au moins une fois. […] Vielé-Griffin manquent d’une direction certaine, on les sent agités de sourds bouillonnements qui hésitent et retombent ; le poète y est inférieur à lui-même par la beauté réalisée, mais il y révèle de plus larges désirs qui longtemps cherchent leur forme définitive et s’illuminent, plus tard, dans la Vie et le Rythme. […] » Faire l’acte de Beauté pour sa simple grandeur, se donner comme donne un prince. […] La vie est à nos pieds ; elle passe, mais l’ensemble de ses apparences subsiste au moins l’espace d’un long instant ; le Poète reporte son idéal dans la vie présente, et sans voir qu’il a passagèrement déchu, il veut créer une Beauté qu’il imagine vivante et mortelle comme il croit vivante et mortelle cette vie. — Il ignore encore, et peut-être l’ignorera-t-il toujours, qu’il n’a lui-même d’autre terme que l’infini ; la Vie, il ne la voit encore que comme une chose relative et concrète. […] Ne devrait-elle pas indiquer au moins le ressort de l’acte qui suscite la beauté ?
S’il est un sentiment que ne suggère pas cette beauté, c’est, en effet, celui de grandeur et de majesté qu’enferme en ses romanesques sites la pathétique Bretagne. […] Il faut les aimer, non seulement parce qu’ils vivifient en nous la notion de Beauté, mais d’une certaine Beauté, qui n’est qu’à nous, et par laquelle nous avons exercé sur les esprits ce long prestige que seul put affaiblir le flot des importations de l’étranger et ce cosmopolitisme malsain venant composer de toutes les esthétiques un étrange amalgame. […] Mais celle-ci donne le désir de mourir lentement sous son regard. » Beauté pliante et soumise, Grâce Mirbel est de la race des premières. […] C’est peu encore, au prix de l’élégance du style, de la beauté formelle, qui donne à cet ouvrage un rang à part parmi les productions féminines de ce temps. […] De notre existence contemporaine, avec ses inquiétudes, ses tourments, ses angoisses, sa beauté aussi — car tout ce qui lutte a sa beauté propre — voici donc une jeune femme qui se refuse à rien connaître, parce que délibérément elle plaça son amour dans la contemplation d’un rêve.
Henri Degron Tout net, il me plaît d’affirmer la Beauté grande de cette œuvre, qui est la manifestation dramatique (théâtre idéaliste) la plus importante de ces quinze dernières années. […] … Le souffle tragique de Mort qui la traverse dit assez qu’au-dessus d’elle encore, il y a la Beauté, l’immortalité. […] Vers d’une inouïe beauté, d’une longueur comme sans fin, d’un raccourci charmant, s’entremêlant en un désordre merveilleux. […] Marée montante, d’où émergent les rubis et les émeraudes, et dont les flots aux embruns échevelés battent le phare où brille, fulgure l’étoile de Beauté claire !
Car, s’il est bien constaté qu’une chose est laide par opposition à une autre qui est belle, le Chevalier ne voit-il pas qu’on peut lui demander la raison pour laquelle cette beauté est beauté et cette laideur est laideur ? […] Le sentiment de la beauté lui-même, est-il bien nécessaire de le conserver ? […] Il n’y a ni beautés, ni défauts dans l’ordre littéraire ; car, sans les défauts les beautés ne seraient pas ; défauts et beautés, c’est la même faculté qui produit tout389. […] Le critique ne blâme ni la beauté harmonieuse, ni la beauté discordante et violente, ni la noblesse oratoire, ni l’imagination folle. […] Connaissance des beautés et des défauts de la poésie et de l’éloquence dans la langue française.
De là les sentiments de plaisir que nous donne la beauté. Ou plutôt, la beauté est une logique qui est perçue comme plaisir. Si l’on admet cela, on comprendra aussitôt pourquoi l’idée de beauté, dans les sociétés féministes, s’est presque toujours restreinte à l’idée de beauté féminine. La beauté, c’est une femme. […] La beauté, c’est la femme ; et aussi l’art c’est la femme.
« Ne revoyez jamais, dit Hoffmann, la beauté qui fut votre premier idéal dans la jeunesse. » Faut-il dire cela également des nations ? […] Que de beautés, à les relire aujourd’hui, dans cette suite de romans en rimes et de stances brûlantes ! […] … » Lui qui, dans le dernier chant de Childe Harold tout entier consacré à la glorification de l’Italie, appellera Rome une « mère sans enfants, la Niobé des nations », il avait fait auparavant, de la Grèce morte, cette admirable et divine comparaison avec une femme dont la beauté se conserve encore, dans une indéfinissable nuance de calme, de douceur et de majesté, pendant les premières heures du moins qui suivent le dernier soupir : « Tel est l’aspect de ce rivage, s’écrie-t-il ; c’est la Grèce encore, mais non plus la Grèce vivante. […] Sa beauté à elle, c’est la beauté dans la mort, qui ne s’en va pas toute avec le dernier souffle envolé, beauté à l’effrayante fleur, avec cette teinte qui la suit jusque dans la tombe, dernier rayon d’expression qui se retire, cercle d’or qui voltige autour de la ruine, rayon d’adieu du sentiment évanoui, étincelle de cette flamme, peut-être d’origine céleste, qui éclaire encore, mais ne réchauffe plus une argile chérie. » Il faudrait tout relire de ce Childe Harold. […] About n’a senti et n’a décrit le caractère et le genre de beauté des paysages, l’éclat et la transparence du ciel de l’Attique à de certaines heures, la maigreur élégante de cette plaine, opposée à la terre riche et grasse, aux fertiles glèbes d’Argos ou de Thèbes.
« Le Renard et la Panthère se disputaient le prix de la beauté ; la Panthère vantait surtout la beauté de son corps ; le Renard lui dit : « Combien suis-je plus beau, moi qui ai cette bigarrure, non sur le corps, mais dans l’esprit ! » Cette fable montre que la perfection de l’âme est préférable à la beauté du corps. »206 Voilà le modèle de la fable philosophique. […] Non ; elle la répète en la transformant ; elle copie la nature, mais en la perfectionnant, et, comme une glace pure, en même temps qu’elle réfléchit les choses, elle leur prête sa lumière et sa beauté. […] Pour ce les autres ne déprise, Si Dieu a en toi beauté mise. […] Beauté ne vaut rien sans savoir : L’un et l’autre fait bon avoir.
Elle n’affectait pas de rigorisme avec moi ; elle ne s’informait pas avec inquiétude des visites d’une belle princesse romaine qu’elle rencontrait quelquefois sur mon escalier, et dont elle admirait la beauté sans en connaître le nom. […] Devenu veuf peu de temps après, je contribuai beaucoup à lui faire épouser la beauté et la bonté le plus accomplies du royaume de Naples, la fille de M. […] Je fus frappé de son admirable beauté. […] La beauté du prince de Léon se grava tellement dans mon imagination, que, deux ans après, je m’en souvenais encore. […] C’était le moment où madame Récamier, à seize ans, sous le Directoire, apparaissait dans le monde comme un piége de beauté qui devait tenter tous les jeunes hommes.
Chantre de la beauté, il ne fut pas le flatteur intéressé de la puissance injuste. […] « Leurs yeux, qui virent la beauté de ta face, que regarderont-ils encore, qui ne leur soit ennui ? […] Quelle beauté d’éloquence et de style, quel tour original d’expression n’éclate point déjà dans notre Montaigne ! […] ses beautés laissé cheoir ! […] Et, chose remarquable, bien que le langage et le rhythme de Ronsard offrent çà et là des beautés savantes, ce qui plaira le plus en lui, c’est quelque retour fortuit de langage expressif et simple.
La beauté d’ Athénaïs est de celles qui réussissent généralement ; mais si les hommes d’une éducation vulgaire, suivant la remarque de l’auteur, aiment les grâces qui attirent, les yeux qui préviennent, le sourire qui encourage, il n’en va pas ainsi de Bénédict : ses observations malignes ont plus d’une fois troublé jusqu’aux larmes la coquetterie naïve et réjouie de sa fiancée. […] Ce sera pourtant une belle fête que celle où il va conduire sa fiancée ; et Athénaïs ne peut manquer d’être la première, la reine du bal, à moins que ces dames du château ne viennent et que Mlle Valentine de Raimbault n’y montre sa pure et noble beauté. […] On sentait qu’il avait fallu toute une race de preux pour produire cette combinaison de traits purs et nobles, toutes ces grâces quasi royales qui se trahissaient lentement, comme celles du cygne jouant au soleil avec une langueur majestueuse. » Quoi qu’il en soit de l’explication dont je ne suis pas garant, la beauté fine et aristocratique de Valentine, qui ne répond point, dans le premier instant, au type rêvé de Bénédict, le gagne peu à peu, et la pauvre Athénaïs, déjà si compromise dans son cœur, lui semble une bourgeoise plus frelatée que jamais. […] Après l’intérieur de la ferme et le bal champêtre qu’un critique très-spirituel, dans la Revue des deux Mondes, a comparés à quelque tableau malicieux et tendre de Wilkie, on a, au retour, cette nature si fleurie et si odorante, sur laquelle la nuit jette ses ombres grandioses et que la lune éclaire avec beauté ; on a, dans ces solitudes suaves, un chant mélodieux de jeune homme qui arrive tout d’abord au cœur d’une amazone égarée comme Herminie. […] Ce roman de Valentine, comme on le voit, dont une grande partie a tant d’attrait et de beauté, n’est pas un livre tout à fait excellent ; mais il en promet d’autres, à coup sûr, qui le seront.
. : jamais beauté ne fut plus défigurée. […] On représenta les vers comme l’ame de la poësie, comme le point de réunion de toutes les beautés enfantées par la véritable verve, comme la source du pouvoir magique d’Amphion & d’Orphée. Et qu’importe, disoit-on, aux ennemis des vers, qu’ils soient une beauté réelle ou de convention, un plaisir né de la chose même ou de l’effet du méchanisme, du moment qu’ils sont tant que de charmer ? […] Celui-ci fit voir, dans une ode, que les difficultés de la versification disparoissent devant ceux qui sont nés poëtes ; & que, bien loin d’être nuisibles au talent, elles contribuent à le faire sortir, & deviennent la source de mille beautés : De la contrainte rigoureuse, Où l’esprit semble resserré, Il acquiert cette force heureuse Qui l’élève au plus haut dégré. […] Elle peut réclamer toutes les beautés poëtiques qu’ils renferment, & faire valoir contr’eux le systême de La Mothe.
C’est cette raison humaine, philosophique, didactique, qui n’admet ou du moins ne veut admettre que ce qu’elle conçoit en elle-même ; c’est cette raison qu’il reconnaît, et qui fait la force, la beauté, la grandeur de histoire de Thucydide. […] Aussi les invoque-t-il pour expliquer à fond tout son Thucydide, et en cela a-t-il raison encore, comme il l’a eue déjà en disant que Thucydide n’était que l’expression du génie grec… Partout, en effet, à toutes les objections qu’on a faites ou qu’on pourrait faire contre Thucydide et la beauté littéraire de son histoire, M. […] Et, de fait, il doit avoir raison encore, notre très logique commentateur : si le génie grec est le plus beau génie qu’il puisse y avoir parmi les hommes, sa poétique doit participer de la beauté incomparable de ce génie. […] Par simplification, il laisse l’idée du droit se dégager toute seule du spectacle des choses, et il ne comprend pas, ce Grec qui n’est dirigé que par la raison, que la beauté de son histoire — à ne regarder que la seule beauté !
Dans le pays de la plus cynique utilité, il ne vit que la beauté, la beauté par elle-même, la beauté oisive, inféconde, l’art pour l’art. […] Victor Hugo, même aux plus chaudes années de sa jeunesse, est bien tiède et bien transi dans son amour fanfaron de la forme et de la beauté, en comparaison d’Edgar Poe, de ce poëte et de cet inventeur qui a la frénésie patiente, quand il s’agit de donner à son œuvre le fini… qui est son seul infini, hélas ! […] Tout cela, — des contes d’ogre pour des enfants qui se croient des hommes, — n’a qu’une prise d’un moment sur l’imagination du lecteur, et manque, comme impression d’art, de profondeur et de vraie beauté.
Il divisa les reliures en deux classes, selon l’utilité ou la beauté. […] La beauté de la reliure est de la beauté décorative abstraite. […] Dobson, a produit des pièces absolument classiques dans leur exquise beauté de forme. […] « Il devient familier avec la beauté de la solitude. […] Mais l’Essai sur Wordsworth a une beauté intellectuelle qui lui est propre.
C’est alors seulement que l’idée de la beauté reparaît dans l’intelligence et l’idée du droit dans l’ordre politique. […] Le prince des lyriques contemporains n’a-t-il pas pour fonction supérieure de sonner victorieusement, dans son clairon d’or, les fanfares éclatantes de l’âme humaine en face de la beauté et de la force naturelles ? […] La grandeur et la beauté de cette légende tragique ne furent pas comprises. […] Rien de plus foudroyant de beauté épique. […] Les mêmes beautés d’imagination, d’originalité et de style s’y retrouvent à chaque ligne.
Le centaure grandit en souplesse, en force et en beauté. […] Qu’il crée de la Beauté ! […] L’écrivain veut fixer cette réalité avec des symboles de beauté. […] Qu’est-ce que la beauté ?) […] Elle est dispensatrice de toute consolation et de toute beauté.
Ce qui contribua beaucoup à la lui adoucir, c’est qu’il vit bientôt arriver en Angleterre la belle duchesse de Mazarin, la nièce même de celui qui était la cause première de son malheur : il s’attacha à elle et l’aima pour son esprit, pour ses qualités solides, autant que pour sa beauté. […] Tallemant dit un mot remarquable sur Ninon, c’est qu’« elle n’eut jamais beaucoup de beauté », elle avait surtout de l’agrément. Somaize, dans Le Grand Dictionnaire des précieuses, ne dit pas autre chose : « Pour de la beauté, quoique l’on soit assez instruit qu’elle en a ce qu’il en faut pour donner de l’amour, il faut pourtant avouer que son esprit est plus charmant que son visage, et que beaucoup échapperaient de ses fers s’ils ne faisaient que la voir. » Mais, dès qu’elle parlait, on était pris et ravi : c’était son esprit qui achevait sa beauté et qui lui donnait toute son expression et sa puissance. […] La Fare, le délicat voluptueux, disait d’elle : Je n’ai point vu cette Ninon dans sa beauté ; mais, à l’âge de cinquante ans et même jusqu’au-delà de soixante, elle a eu des amants qui l’ont fort aimée, et les plus honnêtes gens de France pour amis. […] Toutes les deux en ce temps-là tenaient le sceptre de l’esprit, et passaient pour les arbitres des élégances… La dernière avait été façonnée de telle sorte par la nature qu’elle semblait une Vénus pour la beauté, et pour l’esprit une Minerve.
Ni dans l’art ni dans la vie réelle la beauté n’est une pure question de sensation et de forme. […] C’est que la beauté est en grande partie action, perpétuel rayonnement du dedans au dehors. La vraie beauté se crée ainsi elle-même à chaque instant, à chacun de ses mouvements ; elle a la clarté vivante de l’étoile. « La beauté sans expression, dit Balzac, est peut-être une imposture. » Partout où l’expression se trouve, elle crée une beauté relative, parce qu’elle crée la vie. […] L’amour apporte la beauté avec lui. La vibration du cœur est comme celle de la lumière : elle se communique tout alentour ; produisez en moi l’émotion, cette émotion, passant dans mon regard, puis rayonnant au dehors, se transformera eu beauté pour mes yeux.
Âme saine et vaillamment religieuse, elle cherche à exercer une influence meilleure que celle de l’art qui ne vise, lui, qu’à la beauté et à l’émotion, et cette influence, elle l’exerce, tout en produisant bien souvent l’émotion qu’elle ne cherche pas et en réalisant la beauté ! […] Mais cette émotion et cette beauté sont là comme par surcroît. […] Dans une couleur plus sombre et plus terrestre, il y a un Pauvre garçon qui commence, net, cru et observé comme un conte de Crabbe, — qui se transforme et s’illumine dès que l’Évangile entre dans le grenier du scrofuleux, — puis finit brusquement dans une beauté vraiment tragique. […] Malgré les ressemblances de manière et des incertitudes de touche, les Horizons prochains étaient un vrai chef-d’œuvre tremblé, il est vrai, mais tremblé par une main exquise, et nous dîmes sincèrement, — si on se le rappelle, — et les débilités (presque charmantes) du chef-d’œuvre et la beauté pure de la main. […] La beauté humaine cède ici devant la beauté surnaturelle, et on a jugé par le contraste entre une religion qui produit des Saintes comme sainte Thérèse et celle qui ne fait d’une âme, naturellement propre à tout ce qu’il y a de plus grand, rien de plus peut-être que la femme la plus méritante du protestantisme contemporain, et certainement le cœur le plus vaillant qui y ait jamais palpité !
Par là il créa de la beauté et fit vrai. […] Voici de la beauté ; que réclamer de plus ? […] La figure du mot détermine la beauté de la forme, ses proportions, son harmonie. […] Or la Vie, cette forme de la Beauté, ne se définit pas. […] Cela n’est point l’harmonieuse beauté.
Il se peut aussi que les hommes soient très intéressés, très amusés surtout, par l’attrait que leur inspire la beauté, par l’espoir ou la certitude de la captiver ; mais qu’a de commun ce genre d’impression et le sentiment de l’amour ? […] Racine, ce peintre de l’amour, dans ses tragédies, sublimes à tant d’autres égards, mêle souvent aux mouvements de la passion des expressions recherchées qu’on ne peut reprocher qu’à son siècle : ce défaut ne se trouve point dans la tragédie de Phèdre ; mais les beautés empruntées des anciens, les beautés de verve poétique, en excitant le plus vif enthousiasme, ne produisent pas cet attendrissement profond qui naît de la ressemblance la plus parfaite avec les sentiments qu’on peut éprouver.
Pétrarque avait sa Laure, et Dante sa Béatrix ; mais Laurent s’est appliqué avec soin à cacher le nom de la souveraine de ses affections, laissant aux mille descriptions brillantes qu’il a faites de sa rare beauté et de ses perfections le soin de la faire connaître. […] Voici les circonstances de cet événement, telles qu’il les a rapportées lui-même : « Une jeune dame douée de grandes qualités personnelles et d’une extrême beauté mourut à Florence : comme elle avait été l’objet de l’amour et de l’admiration générale, elle fut universellement regrettée ; et cela n’était pas étonnant, puisque, indépendamment de sa beauté, ses manières étaient si engageantes, que chacun de ceux qui avaient eu occasion de la connaître se flattait d’avoir la première place dans son affection. […] Ses traits étaient, comme je l’ai déjà dit, d’une beauté ravissante, et elle avait le teint d’une fraîcheur admirable. […] Je finirai donc en affirmant qu’il n’y a rien de ce qu’on peut désirer dans une femme d’une beauté et d’un mérite accomplis qui ne se trouvât en elle au plus haut degré. […] Le peuple n’en recevait que des bienfaits ; la jeunesse et la beauté de Laurent et de Julien y ajoutaient le prestige de l’avenir, et la séduction de tous les cœurs.
Il étoit avec raison, charmé de la beauté des ouvrages du Poëte grec, & cependant sa grande faute est de l’avoir imité ; car l’imitation demande plus de gêne & plus d’art qu’on ne croit communément. […] Qu’on pardonne ces extravagances poétiques en faveur des beautés qui les accompagnent ; à la bonne heure. […] Mais cet art est beaucoup, & il faut que ce Poëme soit plein de grandes beautés de détail, puisqu’il fait depuis deux cens ans les délices d’une nation spirituelle, qui certainement en connoît les fautes. […] Leurs versificateurs ont de grands défauts ; mais ils ont aussi de grandes beautés. […] Son Caton d’Utique est un chef-d’œuvre pour la diction, & pour la beauté des Vers.
Un miracle de beauté, de vertu, de bonté, de pitié, de pureté et de charme, et non pas seulement pour son temps, mais pour tous les temps ! […] Madame Récamier, la modeste Madame Récamier, qui n’eut jamais rien de superbe, même dans sa beauté, forme le contraste le plus hardi, le plus étonnant et le plus facile à apercevoir avec les mœurs, les attitudes et les passions de son époque. […] L’idéal de la femme n’est peut-être ni la beauté splendide, ni le feu de l’esprit, ce diamant du front, ni le feu de l’amour, cet autre diamant de la poitrine, mais un peu de bonté dans un peu de grâce, et en voilà assez pour le ravissement de l’humanité ! […] Elle étendait entre eux des bras tout-puissants de faiblesse, des bras délicats plus forts que la force et plus beaux que la beauté, de ces bras comme, depuis, nous n’en avons plus vu qu’à Rachel ! […] Comme femme, elle a régné, de même qu’il a régné comme homme, mais lui, l’Empereur, sa grandeur et sa beauté sont arrêtées, précises, positives comme son génie ; tandis qu’elle, Madame Récamier, c’est tout ce qui est puissant aussi, mais ce qu’il est impossible d’arrêter et de préciser.
Et ce sont là des beautés qui appartiennent bien à M. […] Pilon est l’un des poètes, de plus en plus rares, qui gardent au vers la plénitude qui contribue pour beaucoup à sa beauté… La voix de M. […] Et vous savez, Keats l’a dit : « La vérité c’est la beauté ».
. — Le mouvement, tantôt lent, tantôt rapide, l’inspiration toujours hautement lyrique, l’éclat des images et l’adéquate beauté de l’élocution leur donnent une perfection puissante. — Si elles rappellent, pour vrai, la grandeur des odes malherbiennes, elles sont néanmoins d’une originalité absolument personnelle. […] Il est si désespérément rare qu’on rencontre un grand poète parmi la tourbe qui s’agite sur cette grande route fangeuse : la littérature contemporaine, que, sans le connaître, je vouai à celui-ci de la reconnaissance pour m’avoir aussi splendidement évoqué la Beauté. […] Dans cette œuvre malheureusement parcimonieuse, de rares beautés s’imposent, parterre de fleurs qui s’inclinent à mourir et regrettent parmi les marbres d’automne une terre ensoleillée qu’elles n’ont point connue.
Ce grand homme, rempli d’Aristote & d’Horace, tira de son génie créateur, & puisa dans l’élévation de son ame, toutes les beautés mâles dont brillent ses ouvrages. […] Qui devoit par conséquent juger avec plus d’autorité, de connoissance & d’intérêt les beautés & les défauts des ouvrages des Anciens ? […] les ouvrages de ces génies immortels de l’Antiquité, n’ont plus de beautés pour nous ! […] Que de beautés & de traits piquans dans les détails ! […] N’est-on jamais la dupe de l’art du déclamateur, dont l’intérêt est de glisser légèrement sur les endroits foibles ou défectueux, & d’appuyer sur quelques beautés de détail ?
Avant lui, notre Nation étoit réduite à admirer chez les Anciens ou les Etrangers les beautés du Poëme épique : Fénélon parut, & nous lui dûmes la gloire de pouvoir offrir un chef-d’œuvre capable de surpasser peut-être, ou du moins de balancer la gloire de ceux qui l’avoient précédé. […] Homere & Virgile ne le cedent-ils pas souvent à Fénélon du côté de l’intérêt général, des intérêts particuliers, de la vérité des caracteres, de la beauté des sentimens, de la sublimité de la morale ? […] Les Poëmes épiques écrits en vers perdent beaucoup dans la Traduction, tandis que le Télémaque conserve ses beautés originales dans les Langues où on l’a traduit. […] L’esprit ne le quitte qu’avec le désir d’y revenir, & tout Lecteur en sent les beautés, parce qu’elles sont tout à la fois sublimes & naturelles. […] Quiconque les lira avec attention [& tout le monde devroit s’empresser de les lire], y apprendra à éviter les écueils, à respecter les regles, à préférer le naturel au bel-esprit, les beautés réelles & solides au feu brillant & aux pensées recherchées, l’éloquence de tous les temps à celle du moment.
Mais je ne proscris pas les poésies de pur agrément, pourvu qu’elles contiennent des beautés propres à l’auteur, et par conséquent nouvelles ; je dirai, si vous voulez, en ce sens, que la poésie même me déplaît quand elle ne m’apprend rien. […] Vous faites plus que d’exiger des beautés nouvelles, vous n’en voulez que d’une certaine espèce : nierez-vous, par exemple, que vous êtes l’ennemie des images, qui sont pourtant l’âme de la poésie ? […] Voyez Horace, qui nous fournit des modèles de beautés poétiques de toute espèce : vous trouvez dans ses épîtres et ses satires, des vers qui ne sont que pensés ; dans quelques-unes de ses odes le sentiment domine, dans d’autres ce sont les images. […] Mais puisque vous admettez dans les vers tant de genre de beautés et d’ornements, dont aucun ne les caractérise, puisque aucun n’y est essentiel, quelle est donc selon vous la marque distinctive des bons vers ? […] Je sais aussi que Pascal a dit qu’il n’y avait point de beauté poétique, mais j’en suis fâché pour l’honneur de ce grand génie, qui après tout était peut-être excusable, s’il ne jugeait de la poésie que sur le grand nombre de vers de son temps.
Elle avait cette insondable pureté du cœur qui est un glaçon de cristal auquel on se coupe et qui fait saigner les âmes tendres, et elle avait aussi, a-t-on dit, la grâce de la bonté, la plus divine de toutes les grâces, qui faisait pardonner le mal involontaire que faisait sa beauté autour d’elle ; car sa beauté avait un rayonnement meurtrier, et l’amour qu’elle inspirait était une contagion dont on pouvait ne pas guérir. Cette beauté, du reste, aucun portrait d’elle ne l’a révélée, et il y en a trois d’immortels… Ni celui de Gérard, ni celui de David, ni celui de Chateaubriand, autre genre de peintre ! […] … » La beauté de Madame Récamier est insaisissable, et les récits qu’on en a faits à ceux qui ne l’ont pas vue sont comme les portraits qu’on en voit… C’est le camée des beautés du temps, commun à en devenir vulgaire : le camée de Pauline Borghèse, de Madame de Rovigo, de Madame de Custine, de Mademoiselle Georges, de Mademoiselle Mars.
« Il n’y a de beau que les commencements », a dit une femme qui savait que le génie de son sexe n’est pas plus durable que sa beauté, et c’est cette beauté des commencements, c’est cette loi qui fait, chez la femme, quand il a le plus l’air d’exister, quelque chose d’aussi délicat, d’aussi fragile et d’aussitôt passé que l’humidité de ses yeux et le rose de sa joue, c’est cette loi que va nous démontrer aujourd’hui le volume de poésies de Mme de Girardin, qui furent ses commencements, à elle ! […] Ainsi, à ses propres yeux et aux yeux encharmés des hommes de son temps, elle était la réalité dont Mme de Staël avait fait le rêve, et elle était davantage encore, elle était les deux rêves à la fois de Mme de Staël, car elle avait le génie de Corinne et la beauté de Lucile Edgermond. […] Il s’en va avec la beauté et la jeunesse, laissant aux femmes qui ont vécu par lui les yeux pleins de ces larmes qui tacheraient l’honneur de la vieillesse, si on osait les essuyer avec des cheveux blancs ! […] L’émotion vraie éclate, casse les cordes de la vieille harpe, et les bras veufs survivent dans le naturel de leur beauté !
Béatrice mourut dans la fleur de sa beauté, à vingt-cinq ans. […] Peu de pages de poésie égalent en mélancolique beauté et en perfection ces quelques vers. […] C’est que l’émotion et la beauté y sont complètes et pour ainsi dire infinies. […] Ainsi cette beauté se transforma pour lui en un type idéal qui remplissait son imagination et qui devait la faire se dilater et s’épancher au dehors. […] » Alors aussi, quoique protégé par le souvenir de Béatrice, sa sensibilité elle-même résistait mal aux séductions d’autres beautés.
Quand je parle de beauté, je m’entends, et je m’adresse à ceux qui savent de quoi il s’agit, lorsqu’ils prononcent ce mot. […] grandeur ou flamme du sentiment, éclat de l’expression et, s’il se peut, harmonie de composition et d’ensemble (et s’il n’y A pas de composition proprement dite dans Homère, il y a une flamme perpétuelle, un feu et un torrent de poésie qui rachète tout), — ce sont là quelques-uns des traits et des conditions de cette beauté plus aisée à sentir qu’à définir. […] Elle n’a brillé dans ses parfaits exemplaires, cette incomparable beauté, qu’une seule fois ou peut être deux fois sous le soleil. Il y a certes des beautés de différentes sortes et de différents degrés ; les manifestations de la vie et de l’âme humaine sont infinies. […] Relisons la belle page de Guillaume Schlegel dans laquelle il compare les chefs-d’œuvre de la tragédie antique aux groupes du Laocoon et de la Niobé : voilà les images qui conviennent à cet ordre de beautés nobles, sublimes ou tendres.
Marguerite, à cette fleur de sa jeunesse, était, selon tous les témoignages, d’une ravissante beauté. Cette beauté était moins encore dans les traits particuliers du visage que dans l’ensemble et la grâce de toute la personne, dans le mélange de séduction et de majesté. […] Cette beauté si réelle et si solide, et qui avait si peu besoin d’emprunt, avait, comme toute sa personne, ses bizarreries et ses superstitions. […] On a, chemin faisant, de jolis tableaux flamands qu’elle rend à ravir : à Mons, par exemple, à ce festin de gala où la belle comtesse de Lalain (née Marguerite de Ligne), dont la beauté et le riche costume sont décrits si particulièrement, se fait apporter son enfant au maillot et lui donne à téter devant toute la compagnie, « ce qui eût été tenu à incivilité à quelque autre, dit Marguerite ; mais elle le faisait avec tant de grâce et de naïveté, comme toutes ses actions en étaient accompagnées, qu’elle en reçut autant de louanges que la compagnie de plaisir ». […] Quelques-uns ont essayé de la comparer à Marie Stuart pour la beauté, pour les infortunes, pour l’esprit.
La foule crée le succès ; la caste crée la beauté. […] Il y a une beauté de passage aussi précaire que les succès d’engouement. […] On se souvient du mot de Stendhal : la beauté, c’est une promesse de bonheur. […] Tous les hommes raffinés d’une époque s’entendent sur l’idée de beauté. […] La beauté, œuvre de l’art, est plus élevée que celle de la nature », et : « La beauté dans la nature n’apparaît que comme un reflet de la beauté de l’esprit : « Hegel, Esthétique.
ils laissèrent les morts ensevelir les morts, les néo-parnassiens ressasser les parnassiens d’antan et, libres, confiants en eux-mêmes, ils s’élancèrent à la conquête d’une Beauté nouvelle, de leur Beauté ! […] Oui, c’est à cela qu’on arrivait en confondant la beauté poétique avec la difficulté vaincue. […] … Ce livre est d’une singulière beauté. […] L’action se révèle à lui dans toute sa noblesse, capable de beauté, sainte et grandiose. […] L’effort est immense, et une magnifique beauté lui vient du prodigieux déploiement d’énergies qu’il a suscité.
S’il doit quelque chose au monde, ce n’est que de la beauté. […] En lui, vont se joindre, se fondre, se compléter, empirisme et formisme, la vérité et la beauté. […] Comme si la beauté des mots ne risquait rien à quitter la pensée ! […] La beauté ne se transmet pas toute faite. […] La vraie beauté n’est pas « excentrique » mais bien « centrale ».
Et, pendant qu’elle se divertissait des tourments causés par sa beauté insouciante, elle ne s’aperçut point, hélas ! […] Parmi les fêtes qu’on lui donna, il y eut un bal paré où brillèrent les plus fameuses beautés de la ville. […] où est maintenant ta jeune bonne grâce Et ton gentil esprit plus beau que ta beauté ? […] Sens-tu l’effort de sa beauté. […] Mais les beautés poétiques y sont peu nombreuses.
Cette cour de Madame n’était que jeunesse, esprit, beauté, divertissement et intrigue. […] La beauté de Mlle de La Vallière était d’une nature, d’une qualité tendre et exquise, sur laquelle il n’y a qu’une voix parmi les contemporains. […] « Elle était aimable, écrit Mme de Motteville, et sa beauté avait de grands agréments par l’éclat de la blancheur et de l’incarnat de son teint, par le bleu de ses yeux qui avaient beaucoup de douceur, et par la beauté de ses cheveux argentés qui augmentait celle de son visage. » Ce blond d’argent de ses cheveux, joint à cette blancheur transparente et vive, cette douceur bleue de son regard, s’accompagnaient d’un son de voix touchant et qui allait au cœur ; tout se mariait en elle harmonieusement. […] En tout, c’était une beauté touchante et non triomphante, une de ces beautés qui ne s’achèvent point, qui ne se démontrent point aux yeux toutes seules par les perfections du corps, et qui ont besoin que l’âme s’y mêle (et l’âme avec elle s’y mêlait toujours) ; elle était de celles dont on ne peut s’empêcher de dire à la fois et dans un même coup d’œil : « C’est une figure et une âme charmantes. » Le roi l’aima donc, et pendant des années uniquement et très vivement : pour elle, elle n’aima en lui que lui-même, le roi et non la royauté, l’homme encore plus que le roi. […] Âme et beauté toute fine et suave, elle a plus de Bérénice en elle que ces deux-là.
Il a compté sur le plus ignoble sentiment qui soit dans le cœur de l’homme, et qui n’est pas l’envie du génie, de la puissance, de la richesse, mais qui est l’envie de la beauté. En Angleterre, où l’on souffre les distinctions et où la beauté de Byron passa sans révolter personne, ce sentiment d’envie n’a pas donné le succès sur lequel on comptait et qu’il aurait donné en France, par exemple, dans ce pays de l’égalité, ou être plus beau que les autres est contraire à la loi et au sentiment public. Mais rassurons-nous, cependant, les âmes basses, qui sont de tout pays, ont très voluptueusement pourléché leur bassesse en pensant aux jambes de Byron, qui les ont vengées de sa beauté, encore plus insupportable que son génie ! […] Comme Achille, il demeurera éternellement dans nos esprits le jeune homme à la beauté divine, vulnérable seulement au talon, comme l’était Achille, et la flèche de l’étrange Pâris que le sort aujourd’hui lui envoie ne portera pas plus coup que le trait imbécile du vieux Priam ! […] Byron ne nous est pas particulièrement cher à cause de la beauté de son génie, il l’est pour des raisons plus hautes encore… Nous n’oublierons jamais, nous, que les plus beaux vers de ce protestant sont adressés à la Vierge Marie, qu’il a voulu que sa fille Allegra fût catholique, et que, dans nos églises, la force et la beauté du catholicisme lui remuaient le cœur.
Isocrate prit enfin le parti de répondre ; ce discours d’un vieillard, qui, pour réfuter l’envie, fait la revue de ses pensées depuis quatre-vingts ans, et avant de descendre au tombeau, rend compte à la patrie et aux lois, de l’usage qu’il a fait de son éloquence, n’était pas moins susceptible de pathétique que de force ; mais l’ouvrage, avec des beautés, est bien loin d’avoir ce caractère ; le sujet est grand, l’exécution est faible. […] D’abord, un des principaux mérites d’Isocrate, était l’harmonie ; on sait combien les Grecs y étaient sensibles ; nés avec une prodigieuse délicatesse d’organes, leur âme s’ouvrait par tous les sens à des impressions vives et rapides ; la mélodie des sons excitait chez eux le même enthousiasme que la vue de la beauté ; la musique faisait partie de leurs institutions politiques et morales ; le courage même et la vertu s’inspiraient par les sons. […] Admettez un tiers à cette conversation, il ne concevra point ce que ces mots ont de touchant, ni pourquoi ils excitent une émotion si tendre, et font peut-être verser les plus douces larmes : telle est l’image du différent effet que produisent les beautés accessoires et les finesses d’expression dans une langue vivante ou dans une langue morte ; plus un écrivain a de ce genre de beautés, plus il doit perdre.
Pareils au peuple qui demeure pour nous, à jamais, l’initiateur de la beauté classique, nous n’hésiterons pas à dresser des autels à un dieu inconnu, à reconnaître des beautés en dehors de celles qui s’élevèrent, selon nos particulières théories d’art. […] Sans doute, ils ont été amenés par leurs théories à dédaigner certaines beautés, à s’interdire certaines façons de séduire, mais est-ce vraiment un mal dans un moment de production si intense ?
Ici la Beauté pure est déesse, mais déesse dans un temple de marbre noir. […] A-t-elle dérobé la moindre beauté à Virgile ? […] Le Procès de Thraséas ajoute à cette ironie, à cette verve, la beauté du stoïcisme éloquent. […] Ce défaut ne doit pas du reste rendre insensible aux beautés éparses. […] Les beautés en sont aussi neuves, aussi fraîches qu’elles pouvaient le paraître aux contemporains.
Il connut la rêverie sans tendresse, le sentiment de notre impuissance à l’égard des choses, la soif de rentrer au grand Tout, dont la vie un moment nous distingue, et, en attendant, la joie immobile de contempler de splendides tableaux sans y chercher autre chose que leur beauté. […] Le goût de l’action se réveille sous un ciel moins accablant qui permet la lutte, et le sens de la beauté vit et se développe dans une nature aux contours harmonieux et modérés, dans une lumière qui réjouit et n’aveugle point. […] Surtout ils adorent la beauté et savent l’exprimer sans y faire effort. […] Il a passionnément aimé ces amants de la vie et de la beauté Nous sommes loin de Hâri formidable et inintelligible. […] Mais aussitôt surgissent les rebelles, chers au poète de Kaïn : c’est Khirôn puni pour avoir rêvé des dieux meilleurs que ceux de l’Olympe ; c’est Niobé, fidèle aux Titans vaincus, qui auront leur jour et qui rétabliront le règne de la Justice Enfin, il se repose de ces graves histoires dans l’adoration de la beauté physique.
Mes yeux sont-ils trop faibles pour apercevoir les beautés mystérieuses de cet ouvrage ? […] Dieu merci, je ne suis pas de ceux qui placent dans l’érudition la loi suprême de la poésie ; il ne m’arrivera jamais de contrôler, au nom d’une chronique oubliée, la libre fantaisie d’un inventeur : pourvu que la beauté humaine, la beauté de tous les temps, domine et supplée la beauté relative et locale, je fermerai volontiers les yeux sur l’ignorance ou l’omission. […] comment s’est-elle résignée à vendre sa beauté ? […] Est-ce la beauté, la jeunesse ou le courage ? […] Comme l’ode et le roman, le drame aura des beautés successives ; on reviendra voir trente fois la même héroïne, avec la certitude d’éprouver une émotion nouvelle.
Seulement, tels que les voilà, ces fragments, ils ont trois ou quatre beautés différentes pour les esprits sensibles à tous les genres de beauté. […] cette tradition de tous les génies militaires sur la nécessité de la discipline, retrouvée aujourd’hui dans sa beauté sévère sous la plume du colonel Ardant du Picq, sera considérée, qui sait ? […] … J’ai compté toutes les beautés de son livre, mais, de toutes, c’est là la plus triste, et la plus triste, pour nous autres hommes, c’est toujours la plus grande beauté !
Louis XV, dégoûté de Marie Lecsinska, aimée (si on peut prostituer ce mot sacré) comme la femelle l’est, une minute, de son mâle, et laissée là, sans que cette vertueuse Maladroite de l’amour conjugal ait eu la puissance de le retenir et de le captiver, Louis XV, — il faut bien dire le mot, — l’empêtré Louis XV, malgré sa beauté et la royauté qui s’ajoutait à cette beauté pour la rendre irrésistible, fit attendre un moment le règne des maîtresses, et c’est alors qu’on vit la France tout entière lutter presque de proxénétisme empressé avec les grands seigneurs et les valets de cour qui le poussaient à l’adultère ! […] … V Eh bien, c’est ce presque impossible, c’est ce difficile de leur tâche que M. de Goncourt a réalisé, et cette fois avec une gravité, une autorité et une raison que les incestueuses sorcières de beauté, d’esprit et de manèges qui commencèrent les affolements adultères de Louis XV, n’ont pu lui faire perdre ou troubler. […] — doublait son impérieuse et séduisante beauté d’Armide. […] Séduction de la perversité humaine arrivée à l’idéal de la perversité absolue dans une femme divine de beauté et d’esprit, et séduction, peut-être, hélas !
, j’ajouterais encore : la moins apte à sentir le coup de cette foudre qu’on appelle la beauté ! […] Être capable d’amour encore à l’âge terrible et sans beauté où les femmes sentent leur cœur impuissant ou détruit, est au contraire une chose touchante… et superbe ! […] C’était un chevalier, et ses qualités morales faisaient équation avec sa beauté souveraine. Un portrait, gravé par Rajon, et qui doit être ressemblant, car il est copié d’un portrait de famille appartenant aux Poniatowski, nous donne l’idée de cette beauté qui séduisit Catherine à l’âge où cette femme, quand il s’agissait de choisir ses amants, avait son libre arbitre encore. […] V Le portrait gravé par Rajon à la tête du volume, et qui représente ce Roi de beauté créé Roi politique par une femme, nous le montre avec son cou nu de taureau adouci découvert jusqu’à la poitrine, et ses magnifiques épaules pleines de promesses viriles et nonobstant d’une grâce tombante d’épaules de femme.
Il l’est aussi, même quand il croit et veut le moins l’être, même quand il insulte la beauté littéraire. « J’ai eu », dit-il dans une lettre à M. de Montalembert, « le fanatisme de l’expression, le fanatisme de la beauté dans les formes, et ce fanatisme est passé… Je dédaigne plutôt que je n’admire ce talent qui est plus une maladie de nerfs qu’un talent de l’esprit… », ce qui est assez insolent et assez faux, par parenthèse, et au moment même où il écrit cela, sans transition et comme pour se punir, il ajoute ce mot de rhéteur inconséquent, de rhéteur incorrigible, qui tout à coup reparaît « les formes d’une lettre ne sont ni littéraires ni belles », misérable axiome de rhétorique, non moins faux ! […] C’est toujours enfin de la pure logique qu’il tire, lorsqu’elle est belle, toute la beauté de sa pensée. […] C’est le contraire d’un autre Éclatant, de Chateaubriand, sur lequel il l’emporte par la pureté, le calme et la beauté de l’âme, s’il ne l’emporte pas par la beauté de son génie.
Si quatre-vingt-dix-neuf variantes n’ajoutent ni sens ni beauté à un texte ancien, la centième pourra nous donner un beau vers. […] Il n’a guère connu la beauté plastique. […] Il ne faut pas oublier que ces cinq siècles ont été fort troublés, que la guerre de Cent ans a été une terrible interruption dans le progrès intellectuel de notre race ; et, malgré cela, nous étions déjà en bon chemin quand la beauté antique nous a été révélée. Je ne sache pas qu’il y ait dans notre XVIe siècle rien de comparable en poésie, même pour la beauté de la forme, à telle ballade de Rutebeuf, de Charles d’Orléans et de Villon. […] On pourrait donc dire que nous avons reconnu cette beauté plutôt que nous ne l’avons découverte, et que l’imitation de l’antiquité n’a pas été pour nous une « Renaissance », mais un achèvement.
L’histoire de l’Italie a la beauté poignante d’une tragédie. […] Elle hantait l’imagination des Barbares, par la haine d’abord et par la cupidité, puis, dès qu’ils y touchaient, par la beauté, par le passé et par ce charme indicible qui fait « un homme nouveau », selon Gœthe, de quiconque pénètre dans ses murs. […] En effet, c’est la sensualité qui frappe d’abord chez lui, son amour de la beauté plastique, sa saine compréhension de l’amour physique et son grand sens pratique ; c’est qu’il est naturaliste, dans le sens profond du mot ; ce qui explique alors le fonds de mysticisme qu’il y a aussi en lui, et l’intuition géniale qui en fait le peuple des inventeurs, des précurseurs, des martyrs. — L’étranger s’étonne de la « combinazione », la blâme sans la comprendre ; elle est à la fois un art de la politesse et le dernier refuge des consciences opprimées. […] Enfin la civilisation millénaire lui donne ce respect de la beauté, qui est une grande morale et qui s’exprime en un mot intraduisible : la gentilezza. […] C’est par l’intuition de la beauté des formes, par un égoïsme qui se torture, par le conflit du paganisme atavique avec le christianisme, et par un renoncement douloureux à la patrie impossible, que l’âme infiniment sensible de Pétrarque parvient à une vision nouvelle de l’univers.
On oppose toujours Milton, avec ses défauts, à Homère avec ses beautés : mais supposons que le chantre d’Éden fût né en France, sous le siècle de Louis XIV, et qu’à la grandeur naturelle de son génie il eût joint le goût de Racine et de Boileau ; nous demandons quel fût devenu alors le Paradis perdu, et si le merveilleux de ce poème n’eut pas égalé celui de l’Iliade et de l’Odyssée ? […] Or, les beautés touchantes qui émanent de cette source feraient seules une ample compensation pour les ingénieux mensonges de l’antiquité. […] Nous osons le prédire : un temps viendra que l’on sera étonné d’avoir pu méconnaître les beautés qui existent dans les seuls noms, dans les seules expressions du christianisme ; l’on aura de la peine à comprendre comment on a pu se moquer de cette religion de la raison et du malheur.
Auprès de la beauté, il a des adorations dignes de Dante et de Plotin. […] Voilà la grandeur de cette œuvre : il a pu prendre toute la beauté, parce qu’il ne s’est soucié que de la beauté. […] On garde toujours le culte de la beauté et de la volupté ; mais on joue avec elles. […] Le sentiment de la beauté fait place au besoin de la vérité. […] Hymnes à l’amour et à la beauté, — à l’amour et à la beauté célestes.
Il faut avoir bien de la force pour soûtenir un sujet trop simple par la richesse et la beauté des détails. […] Ses beautés croissent ; et ses défauts diminuent par l’élégance singuliere de ses discours. […] Le poëte se propose d’abord quelques beautés principales sur lesquelles il fonde son succès. […] Les beautés de théatre perdent toûjours de leur effet, à mesure que l’art en est trop sensible. […] Des beautés déplacées deviennent de véritables fautes.
Quoi qu’il en soit de ces beautés de détails, jusqu’ici notre reproche ne subsisterait pas moins, et l’on pourrait toujours dire à M. […] Il s’étonne de l’indifférence de ses compagnons, qui chantent la beauté des femmes, chassent le jaguar et s’enivrent tour à tour ; sa passion l’a tout d’un coup civilisé ; elle lui a révélé l’isolement de son existence, et, pour la première fois, les forêts lui ont paru solitaires. […] Si la beauté confie à la colombe messagère le secret qu’elle n’oserait révéler à ses austères gardiens, il ajoute : « Prête à voir l’oiseau charmant s’élever dans les airs, en emportant les vœux de sa tendresse, elle voudrait le retenir, comme on retient un aveu qui va s’échapper. » S’il parle des bouquets mystérieux qui racontent et les tendres inquiétudes et les douces espérances d’une jeune captive : « Messager, dit-il, plus discret que notre écriture, maintenant si connue, son parfum est déjà un langage, ses couleurs sont une idée. » L’ouvrage dont nous venons de rendre compte est suivi d’une espèce de nouvelle historique sur la vie du Camoëns. […] Qu’on ne croie pourtant pas que les beautés manquent dans ce second écrit de M.
Satan, caché sous la forme d’une de ces bêtes, contemple les deux époux, et se sent presque attendri par leur beauté, leur innocence, et par la pensée des maux qu’il va faire succéder à tant de bonheur : trait admirable. […] ton autre moitié te réclame. » En parlant ainsi, ta douce main saisit la mienne : je cédai ; et depuis ce temps j’ai connu combien la grâce est surpassée par une mâle beauté, et par la sagesse qui seule est véritablement belle. […] Adam, ravi de sa beauté et de ses grâces soumises, sourit avec un supérieur amour : tel est le sourire que le ciel laisse au printemps tomber sur les nuées, et qui fait couler la vie dans ces nuées grosses de la semence des fleurs. […] Ce morceau n’est point inférieur à celui que nous venons de citer, et doit aussi sa beauté à une religion sainte et pure.
Un essaim de beautés réfléchi par vingt glaces, Étalait à l’envi ses attraits et ses grâces y De leurs riches atours les yeux étaient charmés. […] La beauté se pâmait en répétant ses phrases ; Et quand il eut fini de les faire claquer, Aucun des auditeurs ne sut les expliquer. […] Voltaire vainement nous répète vingt fois Que, sur ses douze chants, on peut en lire trois ; Que le reste est absurde et plein d’extravagances, Grossier, bizarre, obscur, chargé d’invraisemblances ; C’est par là qu’il nous plaît \ l’ombre sert aux tableaux ; Verrait-on ses beautés, s’il n’avait des défauts ? […] Peut-être dira-t-il qu’aux plus mâles beautés Ils mêlent du pathos et des absurdités ; Que l’amour dans leurs vers est un dévergondage ; Que chez eux les héros font du marivaudage.
Boileau relevait vivement, dans une lettre de Huet, cette méprise qui dans la beauté des ouvrages donnait tout au sujet, rien à l’art et à l’auteur. […] Nulle beauté n’est belle, si elle n’est nécessaire. […] Pour parler crûment, on croit sentir que la « beauté » de l’expression va farder et fausser la nature. […] La beauté du travail les charmait autant que l’excellence de la matière. […] En somme, l’art orne la nature, parce qu’il l’exprime dans des formes conventionnelles, dont l’objet est la beauté autant que la vérité.
» De tels vers, adressés à la plus jeune et à la plus enivrante des beautés de la cour d’Alphonse, devaient être amers à Léonora, si les sentiments de Léonora dépassèrent jamais l’enthousiasme et l’amitié d’une femme vertueuse pour un respectueux adorateur. […] L’opinion générale du temps est que le Tasse avait célébré la beauté et l’amour de Léonora d’Este sous les traits et sous le nom de Sophronie. […] Invité aux fêtes de Modène, au mois de janvier 1577, par la comtesse Tarquinia Molza, égale en beauté et en génie poétique à Vittoria Colonna, il se plaint, du sein des délices, de son malheur, et semble en accuser déjà ses bienfaiteurs. […] Tout porte à croire aussi qu’il ne fut point poursuivi dans sa fuite, car la beauté de ses traits, l’égarement de sa physionomie, l’élégance de son costume, ne pouvaient manquer de signaler son passage et de révéler ses traces aux poursuites du duc de Ferrare. […] La beauté et la variété de ce site enchanté complétaient sa joie.
Ce culte poétique pour la beauté ne souillait pas plus la femme vertueuse qui en était l’objet, qu’un chevalier ne souillait sa dame en en portant les couleurs et en lui consacrant ses exploits. […] Je ne m’en glorifie pas, car il n’y a point de gloire dans le hasard ; mais je m’en suis toujours félicité, car la poésie et la beauté ont été toujours à mes yeux les vraies noblesses des femmes. […] Elle était pour lui la Béatrice du Dante sortie de l’enfance et du rêve, et arrivée à la réalité et à la perfection de la beauté. […] De ce jour il ne songe plus qu’aux lettres, dont l’empire est éternel, et à l’amour qui ne meurt pas avec la beauté mortelle. […] La vertu, la beauté, la politesse, sortiront de ce monde avec Laure.
Ferrare était le salon de l’Italie ; la noblesse, la jeunesse, la beauté, la modestie d’Arioste, le rendaient, comme le Tasse le fut bientôt après lui, l’ornement et le favori des hommes et des femmes de cette cour. […] La beauté de la comtesse Héléna, ou, comme on l’appelait parmi ses amies, par abréviation familière, Léna, ne pouvait se peindre : les mots et les couleurs, quelque nuancés qu’ils soient, ont des limites que le talent même de l’Arioste ou de Corrège ne peut dépasser ; la beauté féminine n’en a pas, de limites. […] Telle était la comtesse Léna ; je n’ai connu que madame Malibran, sa compatriote, qui me l’ait rappelée, non pour la beauté, mais pour l’attraction de l’âme. […] Puis il se plaint à haute voix, dans des strophes aussi pathétiques qu’amoureuses, d’avoir été abandonné et trahi, pour un autre amant, par la beauté qu’il adore. […] « Car l’un, ajouta-t-il, croit combattre pour la vertu, et combat pour la calomnie ; l’autre ignore s’il est dans le vrai ou dans le faux, et combat, par une magnanime générosité, pour arracher à la flétrissure et à la mort une si parfaite beauté.
Le bon esprit philosophique a inspiré tout ce que la littérature du dix-huitième siècle a de beautés durables. […] La grande beauté de l’Histoire de Charles XII, c’est le récit. […] Cette vérité ne pouvait échapper au sens profond de Lesage ; son livre n’a peut-être pas de beauté plus élevée et plus pénétrante. […] La traduction n’éteint pas seulement les beautés des mots, elle ôte de la vie aux choses. […] Vérité, justesse, beauté, autant de choses qu’on ne peut juger sans les sentir, ni sentir sans que la conscience soit de moitié avec l’esprit.
Il analysa les beautés des plus anciens poëmes, & défia qu’on pût y rien trouver qui annonçât la règle de la moralité. […] Ils n’ouvroient les yeux que sur les beautés de détail des anciens, & les fermoient sur l’ensemble. […] Entre deux genres de beauté différente, ce ne sera jamais que le goût particulier qui décidera. […] Les six derniers livres, dit-on, ne sont pas de la beauté des six premiers. […] La Julie, ou la nouvelle Héloïse, si lue & si critiquée, remplie de tant de défauts, & de tant de beautés, mérite surtout ce reproche.
Son frère, Paolo Malatesta, était, par sa jeunesse, par sa beauté et par son caractère, le contraste le plus dangereux pour le cœur de Francesca. […] Peu de pages de poésie égalent en sublime et mélancolique beauté ces quelques vers. […] « Elle m’apparut », poursuit le poète, « de l’autre côté du ruisseau verdi par l’ombre de ses bords ; elle m’apparut à travers son voile, et elle effaçait sa beauté première par sa beauté présente autant que jadis elle effaçait toutes les autres beautés d’ici-bas. […] Accorde-nous, par grâce, de dévoiler devant ses yeux ta bouche, afin qu’il contemple la seconde beauté que tu lui dérobes encore ! […] Béatrice y est revêtue par cette influence d’un surcroît de beauté.
Les beautés d’Atala, son premier essai, ont été vivement senties. […] Je choisis le parallèle des beautés d’Homère et de la Bible. […] Il la dut autant à ses défauts qu’à ses beautés. […] Mais les beautés n’en peuvent être senties que par des lecteurs d’un âge plus avancé. […] Mais plus d’une beauté couvre ces taches et doit les faire pardonner.
Née à la Havane dans cet opulent climat qui plus tard lui faisait paraître l’Andalousie si chétive, et où les mouches volantes seraient seules des clartés suffisantes de la nuit, la jeune Mercedès Jaruco, élevée d’abord et très gâtée chez sa grand-mère, puis mise au couvent où elle ne peut tenir et d’où elle s’échappe un matin, puis auprès d’une tante de chez laquelle elle s’échapperait non moins volontiers, nous apparaît dans sa beauté native, sachant lire à peine, souvent sans bas, un peu sauvage, ne s’arrêtant jamais entre un désir et son but, courant à cheval et tombant, grimpant à l’arbre et s’évanouissant au toucher d’une couleuvre, bonne pour les nègres, dévouée au premier regard pour ce qui souffre ; on se plaît à admirer une enfance si franche et si comblée des plus riches dons, racontée avec finesse et goût par la femme du monde. […] Madame de La Fayette écrivait à madame de Sévigné : « Votre présence augmente les divertissements, et les divertissements augmentent votre beauté lorsqu’ils vous environnent : enfin, la joie est l’état véritablement de votre âme, et le chagrin vous est plus contraire qu’à personne du monde. » Ninon écrivait encore à Saint-Évremond : « La joie de l’esprit en marque la force. » L’auteur de ces Souvenirs, à mesure qu’ils se déroulaient devant nous, et que nous nous plaisions à composer son image, nous paraissait ainsi une personne chez qui la joie, une joie qui n’exclut nullement la sensibilité, est compagne de la force de l’âme. Née dans des climats brillants où la terre est pétrie d’une meilleure argile, développée d’abord et grandie en liberté, un peu sauvage, comme elle dit, ayant puisé ses premières idées sur l’hiver dans les romans, nous la voyons, dans le cours de ces volumes, fidèle à ce culte de l’été de la vie, de la jeunesse, de la beauté dont elle aime à couronner en toute occasion ses louanges.
Dans Lohengrin, fils de Parsifal, le grand-prêtre, ami de Séléné, se lève, et se tournant vers les vierges assemblées « dans le silence polaire », il leur dit : « Mes sœurs, comme ces soirs vont décidément à votre beauté ! » Eh bien, je vous affirme qu’à l’endroit où elle se trouve, cette petite phrase des faubourgs de la vie est plus conforme à je ne sais quel sourire auguste de notre âme que la page la plus éloquente sur la beauté des soirs… Un poète n’est jugé justement que par ceux qui l’entourent et par ceux qui le suivent. […] Remy de Gourmont De ses vers, beaucoup sont comme roussis par une glaciale affectation de naïveté, parler d’enfant trop chéri, de petite fille trop écoutée, — mais digne aussi d’un vrai besoin d’affection et d’une pure douceur de cœur, — adolescent de génie qui eut voulu encore poser sur les genoux de sa mère son « front équatorial, serre d’anomalies » ; mais beaucoup ont la beauté des topazes flambées, la mélancolie des opales, la fraîcheur des pierres de lune, et telles pages… ont la grâce triste, mais tout de même consolante, des aveux éternels.
En avançant vers lui, le parfum des fleurs et la beauté du soleil me frappèrent. […] Il s’éloigne, il se décourage, il épouse dans sa patrie une jeune parente d’une beauté virginale, d’un esprit médiocre, d’un caractère plus rassurant pour sa félicité domestique. Corinne, punie de sa beauté et de son génie, expire de tristesse sous l’excès même des dons qu’elle a reçus de la nature. […] Il exige des beautés absolues, des beautés qui frappent le lecteur solitaire, lorsque ses sentiments sont plus naturels et son imagination plus hardie. […] Un monde nouveau s’offre à lui ; l’image sublime de chaque situation, de chaque caractère, de chaque beauté de la nature frappe ses regards, et son cœur bat pour un bonheur céleste qui traverse comme un éclair l’obscurité du sort.
On la montre hardiment, de face, dans la magnifique horreur de toute sa beauté ! […] En pleine beauté de corps et de génie, il mourut du delirium tremens dans la rue, — ce n’est pas assez dire : dans le ruisseau, — couché là, abattu, loin de Dieu et damné, croyait-il ; — car il le croyait ! […] Dans le pays de la plus cynique utilité, il ne vit que la beauté, la beauté par elle-même, la beauté oisive, inféconde, l’art pour l’art. […] Tout cela — des contes d’ogre pour des enfants qui se croient des hommes — n’a qu’une prise d’un moment sur l’imagination du lecteur, et manque, comme impression d’Art, de profondeur et de vraie beauté. […] Edgar Poe, le poète de la Beauté désintéressée, était né dans le pays le plus hideusement utilitaire.
qu’en allant au fond de l’art et de la poésie grecque, on arrive à je ne sais quel mélange de laideur et de beauté, et qu’on rejoigne le caractère sauvage, souvent rude et, en tous cas, plus compliqué, de la poésie du Nord, de la poésie shakspearienne ! […] Tout ce qui tend à élargir, à aiguiser du même coup et à simplifier le goût public, est favorable à cette régénération poétique dans laquelle il s’agit d’introduire, de combiner le plus de naturel et de vérité avec le plus de beauté. […] Le ton de Méléagre semble s’épurer pour la célébrer : « Les Muses aux doux accents avec la lyre, et la parole sensée avec la Persuasion, et l’Amour guidant en char la beauté, t’ont donné en partage, ô Zénophila, le sceptre des Désirs ; les trois Grâces t’ont donné leurs dons. » Et il explique de toutes les manières, il commente avec complaisance ce triple don, cette voix mélodieuse qui le pénètre, cette forme divine qui darde le désir, ce charme surtout qui l’arrête : beauté, muse et grâce. […] Il n’existe dans l’antiquité que bien peu d’épigrammes comparables en beauté, et presque en grandeur, à celle qu’on lui doit sur Niobé. […] Les belles œuvres industrieuses occupent les abeilles nées des flancs des taureaux, et, assises sur la ruche, elles fabriquent les blanches beautés des rayons humides aux mille trous.
II Sans doute il est impossible de séparer complètement dans une telle femme la grâce du génie, et la beauté des traits de la beauté de l’intelligence : comment séparer ce que Dieu a si bien uni sur une physionomie éloquente ? […] Un peintre n’aurait pas choisi pour la peindre une attitude, une expression et un jour plus conforme à sa grandiose beauté. […] D’ailleurs, une des qualités précoces et dominantes de son esprit était le bon sens ; ce sens exquis chez elle lui disait assez qu’il fallait attribuer à sa jeunesse et à sa beauté la plus grande partie des hommages que le monde rendait à ses promesses de talents. […] C’est la vertu de Paris de courir à la beauté, à la gloire, à l’agrément, plus qu’à la richesse et à la puissance. […] Ceux d’entre eux qui l’ont vue comme moi dans ces derniers temps, étaient frappés du caractère solennel, majestueux et serein qu’avait contracté sa beauté plus mûre.
Ingres peut être considéré comme un homme doué de hautes qualités, un amateur éloquent de la beauté, mais dénué de ce tempérament énergique qui fait la fatalité du génie. […] Pour me résumer, je crois qu’abstraction faite de son érudition, de son goût intolérant et presque libertin de la beauté, la faculté qui a fait de M. […] Ces deux tableaux sont d’une beauté essentiellement shakspearienne. […] Il déplorait, — c’était dans les beaux temps du Romantisme, — que celui à qui l’opinion publique faisait une gloire parallèle à la sienne commît de si monstrueuses erreurs à l’endroit de la beauté. […] Ces femmes ont même la beauté physique moderne, l’air de rêverie, mais la gorge abondante, avec une poitrine un peu étroite, le bassin ample, et des bras et des jambes charmants.
Barbier, artiste, sinon stoïcien, sectateur de Dante et de Michel-Ange, sinon de Chrysippe et de Crantor, il y avait un idéal de beauté et d’élévation qu’il confrontait violemment avec la cohue de vices qu’un brusque orage avait soulevée. […] La religion sans âme, la beauté vénale et souillée, ce n’est pas seulement Rome ou Venise ; le peuple méprisé et fort, c’est partout la Terre de labour ; Juliette assoupie et non pas morte, Juliette au tombeau, appelant le fiancé, c’est la Vierge palingénésique de Ballanche, la noble Vierge qui, des ombres du caveau, s’en va nous apparaître sur la plate-forme de la tour ; c’est l’avenir du siècle et du monde. […] Puis, tout à côté, jaillit l’apostrophe outrageante et impie aux vieillards, dérision dure qui les traîne devant nous par les cheveux, afin qu’ils nous récitent, un pied dans la tombe, leurs joies de vingt ans, comme s’il n’y avait de sacré au monde que la jeunesse, la beauté et l’amour. […] Pourquoi, quand la lumière a percé, redonner champ libre au chaos, et livrer le lecteur sans réplique à ce monologue incohérent qui couronne la mystification du cercueil, à ce conflit de beautés aveuglantes et de pensées qui se heurtent, Telles par l’ouragan les neiges flagellées ? […] Il y a force obscurités par manque de liaison ; ainsi, je n’ai pas compris le duc Laërte disant (page 168) : Nous voulons la beauté pour avoir la tristesse.
Ce n’est point l’irrégularité ni l’inconséquence des pièces anglaises et allemandes qu’il faut imiter ; mais ce serait un genre de beautés nouvelles pour nous, et pour les étrangers eux-mêmes, que de trouver l’art de donner de la dignité aux circonstances communes, et de peindre avec simplicité les grands événements. […] On n’égalera jamais, dans le genre des beautés idéales, nos premiers tragiques. […] Les véritables convenances du théâtre ne sont que la dignité de la nature morale ; les convenances poétiques tiennent à l’art des vers en lui-même, et si elles augmentent souvent l’impression d’un genre de beautés, elles mettent des bornes à la carrière que le génie, observateur du cœur humain, pourrait parcourir. […] Je ne conseille pas cependant d’essayer en France des tragédies en prose, l’oreille aurait de la peine à s’y accoutumer ; mais il faut perfectionner l’art des vers simples, et tellement naturels, qu’ils ne détournent point, même par des beautés poétiques, de l’émotion profonde qui doit absorber toute autre idée. […] Quand les anciens personnifiaient l’amour et la beauté, loin d’affaiblir l’idée qu’on en pouvait concevoir, ils la rendaient plus sensible, ils l’animaient aux regards des hommes, qui n’avaient encore qu’une idée confuse de leurs propres sensations.
Quand on est en état de sentir la beauté et d’en saisir le caractère, franchement on ne se contente plus de la médiocrité, et ce qui est mauvais fait souffrir et vous tourmente à proportion que vous êtes enchanté du beau. […] Il ne dit jamais aux Français d’abandonner leur tragédie pour l’imitation des beautés étrangères : « Nous dirons au contraire : Français, conservez vos tragédies précieusement, et songez que, si elles n’ont pas les beautés sublimes qu’on admire dans Shakespeare, elles n’ont pas aussi les fautes grossières qui les déparent. » En jugeant la tragédie française de son temps, il en sait toutes les faiblesses et toutes les langueurs ; il a des réflexions à ce sujet, qui lui sont suggérées par le Timoléon de La Harpe, mais qui remontent et portent plus haut. […] Lui et La Motte, représentant tous deux le bel esprit, l’emportaient déjà sous la Régence, et allaient faire école, si Voltaire n’était venu à temps pour remettre le naturel en honneur : Son style simple, naturel et original à la fois, le charme inexprimable de son coloris, nous ont bientôt fait mépriser, dit Grimm, tous ces tours épigrammatiques, cette précision louche et ces beautés mesquines, auxquels des copistes sans goût avaient procuré une vogue passagère. Buffon et Rousseau contribuèrent ensuite à remettre en lumière par de larges exemples le style plein, mâle, éloquent : Ces sortes de beautés, observe Grimm, étaient perdues pour M. de Fontenelle. […] Insensible à tout autre genre de beauté, tout ce qui ne finissait pas par un tour d’esprit était nul pour lui.
Ou bien il faut reconnaître qu’il y a un genre de beautés dont l’ordre et la règle ne sont pas le principe, ou il faut condamner les Pensées de Pascal comme une œuvre déréglée où quelques beautés sublimes ne compensent pas le dangereux exemple d’une raison fière et solitaire, qui dans l’obéissance même a tous les caractères de la révolte, et, tout en se soumettant, ne veut se soumettre qu’à sa manière et ne servir que comme un roi vaincu. […] Ce que je ne puis comprendre, c’est que l’on ne sente pas l’extrême originalité, la profondeur de ce système, les rares et merveilleuses beautés que Racine et Corneille en ont tirées. […] Toutefois, après avoir fait la juste part à cette influence, je voudrais que l’on me dît en même temps ce qu’elle a pu avoir de fâcheux, ce que le goût du roi, noble sans doute, mais sec et froid, a pu retrancher de beautés libres et hardies à notre littérature. […] Par sa passion du vrai, par son horreur du faux, Boileau a instruit le goût public, et, s’il n’a pas formé les grands poètes de son temps, qui auraient pu se passer de lui, il a rendu le public attentif et sensible aux beautés de leurs chefs-d’œuvre ; par là, il s’est associé à leur gloire, et avec justice. […] Ne saisissant pas l’origine historique et tout humaine du spectacle qu’il avait devant les yeux, Bossuet n’en vit que la beauté idéale, et crut y reconnaître une œuvre divine.
Homère a mille façons sublimes de peindre une mort violente ; mais l’Écriture les a toutes surpassées par ce seul mot : « Le premier-né de la mort dévorera sa beauté. » Le premier-né de la mort, pour dire la mort la plus affreuse, est une de ces figures qu’on ne trouve que dans la Bible. […] Quand Démodocus recommençait ses chants, et que les anciens l’excitaient à continuer (car ils étaient charmés de ses paroles), Ulysse s’enveloppait la tête de nouveau, et recommençait à pleurer. » Ce sont des beautés de cette nature qui, de siècle en siècle, ont assuré à Homère la première place entre les plus grands génies. […] Et après s’être lavé le visage, il revint, et, se faisant violence, dit à ses serviteurs : Servez à manger116. » Voilà les larmes de Joseph en opposition à celles d’Ulysse ; voilà des beautés semblables, et cependant quelle différence de pathétique ! […] Ulysse, caché chez Eumée, se fait reconnaître à Télémaque ; il sort de la maison du pasteur, dépouille ses haillons, et, reprenant sa beauté par un coup de la baguette de Minerve, il rentre pompeusement vêtu. […] Par là nous espérons (du moins aussi loin que s’étendent nos lumières) avoir fait connaître aux lecteurs quelques-unes des innombrables beautés des livres saints : heureux si nous avons réussi à leur faire admirer cette grande et sublime pierre qui porte l’Église de Jésus-Christ !
La vue de la beauté le touche, le pénètre, l’élève au-dessus de lui-même, et il s’abandonne à ce transport avec d’autant plus de charme qu’il ne craint pas de s’égarer. […] La beauté dans les ouvrages d’esprit est un reflet de l’intelligence divine ; en quelque endroit qu’il plaise à Dieu de le faire tomber, nous lui devons au moins notre respect. […] Cette image de la beauté divine que nous portons en nous-mêmes est d’abord quelque peu obscure ; il faut que les traits de cette beauté, aperçus par des yeux plus clairvoyants et reproduits dans les écrits qu’elle a inspirés, habituent peu à peu nos yeux à la distinguer. […] Pénétré de leur mérite, il n’exigera pas que tous leur ressemblent ; mais à travers les variétés de langues, de mœurs et de génie, il reconnaîtra plus sûrement la beauté éternelle dont leurs ouvrages exposent à notre étude le portrait le plus achevé.
Rien ne fit trembler dans sa main et ne ternit sous sa paupière le pur cristal de la lorgnette qu’il promenait sur tous les étages de cette grande salle de spectacle qu’on appelle le monde, et quand, de son encoignure, il se prit tout à coup à dire ce qu’il voyait, de cette belle voix d’or qui ressemble à la voix de Montaigne, mais sans ses fêlures et ses quintes, nulle des clameurs que soulève d’ordinaire la beauté d’organe du génie ne couvrit cette magnifique voix d’une si pleine et si merveilleuse résonnance ! […] Il avait pendant neuf ans (nous disait-on) étudié amoureusement les beautés de cet écrivain et cohabité avec son génie. […] Nous avons certainement beaucoup d’estime pour l’homme qui passe neuf ans de sa vie — une année de moins que pour prendre Troie — à purifier le texte imprimé d’un grand écrivain, à lui ôter, avec une loupe pour les voir mieux, ses plus imperceptibles grains de poussière, et à le rétablir dans toute la force et dans toute la beauté de ses points et de ses virgules ; mais il nous reste dans l’âme encore beaucoup d’estime que nous lui aurions offerte, et avec quel élan ! […] Quoique Destailleur ait le sentiment fort juste des beautés de détail de son auteur, nous sommes sûr qu’il pouvait, en s’abandonnant à une admiration plus courageuse, trouver mieux, pour les mettre en saillie, que des interjections qui ressemblent à des étiquettes, que les parfait !
Singulier mélange de vérité et d’afféterie, de grandeur et de pincé, de beauté plus fine et plus étincelante que pure, et d’incroyable bizarrerie, Lefèvre-Deumier a eu les défauts des romantiques de la première heure ; mais il n’a pas eu ceux des romantiques de la dernière, qui no sont plus que des rimeurs mécaniciens. […] Ce livre, intense et individuel comme la passion qui l’a dicté, n’est point le plus beau que Lefèvre ait écrit (car Lefèvre n’a fait qu’une seule fois cette chose complète qu’on appelle un beau livre, et ce n’a pas été en vers) ; mais, à coup sûr, c’est celui où, malgré d’atroces bizarreries, des viols de langue dans des alliances de mots forcenées, il y a le plus de ces beautés humaines que le comble de l’art est d’imiter, et qui jaillissent parfois du fond de la vie. […] Avec une telle manière de sentir et de concevoir la beauté poétique, l’auteur du Couvre-feu, qui, nous devons en convenir, a, pendant ces dix dernières années, accompli un rude travail de lime sur lui-même, a eu beau se polir, se dépouiller, s’élever, — et qui s’élève se simplifie ! […] Quand nous en sommes aux Dames Bovary, comme nous voilà maintenant, pour toute observation, il serait curieux d’examiner un livre de la beauté spirituelle et morale de Lionel d’Arquetenay.
Gautier devrait s’appeler plutôt : Perles fondues, car presque toutes ces perles de poésies, que l’esprit boit avec des voluptés de Cléopâtre, se fondent en larmes aux dernières strophes de chacune d’elles, et c’est là un charme, — un charme encore meilleur que leur beauté ! […] Ils sont, en effet, comme expression, d’une sécurité de beauté réussie qui est le comble de l’art, et on n’a jamais mieux senti, qu’en les lisant, ces vers incomparables même aux autres vers de M. […] La pureté de l’expression, qui est une partie de la Beauté poétique, touche par un point à la Beauté morale, et c’est cette pureté de l’expression qui est surtout celle de M.
La beauté de cette tragédie serait la conséquence obligée des métaphores à tous crins d’un adversaire ? […] Que n’eût pas été cet ouvrage, qui abonde, d’ailleurs en beautés de premier ordre et à qui toute justice n’a pas été rendue, si le poète, en l’écrivant, n’eût pas senti peser sur lui sa précoce gloire de chef de l’école de bon sens ? Charlotte Corday : Ce n’est pas seulement la beauté des vers qu’il convient d’admirer dans le drame de Charlotte Corday, c’est aussi, et surtout, l’intelligence d’une époque, le sens intime et profond de la couleur historique.
Une même illusion de beauté les motive. […] Tu ne veux pas vivre, tu craches sur la beauté des formes… Eh bien ! […] — Tu as compris que la beauté de la vie se double d’ironie contre les faibles. […] Près de toi l’on apprend la beauté. […] Chacun dans notre sphère, nous travaillons pour la beauté.
La beauté d’une femme est autant dans le parfum et le rayonnement de sa chair que dans la ligne de son corps. […] C’est lorsqu’elle parle la langue simple et presque rurale qui lui est familière que Marie Dauguet atteint sa plus parfaite beauté. […] Amoureuse de sa chair, de sa ligne et de sa grâce, Renée Vivien ne voulait pas survivre à sa beauté. […] Mais lorsqu’on parlera de Renée Vivien, il faudra oublier ce blasphème des dernières heures, pour ne se souvenir que de la beauté de son chant d’amour. […] La mort, la mort fait seule épouser la Beauté.
Il portait sur sa figure une certaine beauté incohérente comme son regard, mais c’était la beauté de Méphistophélès quand il aide Faust à séduire Marguerite. […] Le chaste attrait de madame Récamier ne s’adressait, en effet, qu’aux yeux et à l’âme ; Ballanche y vit un symbole de la beauté immaculée, il l’aima comme un philosophe aime une abstraction, il se sentit glorieux de s’attacher, sans aucun intérêt sensuel, à cette personnification de la beauté. […] Sa beauté prit un caractère grave et pensif que les ruines de Rome donnent au regard qui les contemple longtemps. […] En 1815, madame de Krüdener, sibylle mystique attachée à l’esprit de l’empereur Alexandre de Russie, la rechercha ; mais madame Récamier n’avait rien des sibylles que la beauté. […] » Voilà le véritable ami de Juliette, l’ami de l’âme ; l’autre n’était que l’ami de la beauté ; et cependant c’est l’autre qui était aimé, c’est l’autre qui brisait le cœur.
La poésie jaillit tout à coup, avec une prodigieuse explosion de sève, du sein de la barbarie, au moment où cette barbarie se civilise ; puis elle se corrompt en s’éloignant de la nature primitive, et quand on veut la retrouver dans toute sa beauté, il faut la chercher presque dans son berceau. […] La beauté presque divine de la jeune vierge éblouit et enlève le cœur du roi. — « Qui donc es-tu, fille céleste ? […] Le héros lui confesse alors qu’il a employé ce stratagème pour convaincre son peuple de la beauté, de la vertu, des droits de Sacountala à sa main, et pour se faire commander par les dieux et par les hommes son bonheur. […] Assujettir une telle beauté à de pareilles austérités, une beauté qui, sans aucun artifice, enlève à l’instant tous les cœurs, c’est être aussi insensé que si l’on voulait fendre le tronc de fer de l’arbre lami avec le tranchant délicat de la feuille du lotus ! […] Il leur vante la beauté céleste de la jeune cénobite dont il a été enivré ; puis, comme se repentant de son vain amour : « Ô insensé !
Et sera-t’il permis, après avoir montré les beautés, d’indiquer quelques taches légeres, d’après les gens de goût. […] Mais le plan & la conduite ne répondent pas aux beautés de détail ; & dans ces détails même le déclamateur fait quelquefois disparoître le Poëte tragique. […] Que de beautés de détail dans ces deux piéces, & sur-tout dans la seconde ! […] Les cantates sont ainsi que les chansons l’ouvrage de la Poésie & de la Musique ; mais elles sont susceptibles de bien plus de beautés. […] Lambert, offrent à la fois les charmes touchans de la poésie & les beautés nobles de la philosophie.
Sous prétexte que toucher ou convaincre son lecteur, c’est sacrifier l’art en le subordonnant à une autre fin que lui-même, on vide son discours de toute vérité, que la raison, la conscience ou le cœur pourraient saisir : on poursuit une beauté toute matérielle et physique, que nul mélange du vrai, du bien, du beau moral même ne vient corrompre, et l’on travaille son style pour l’œil et l’oreille du public : on se fait ciseleur, coloriste ; on sculpte des phrases marmoréennes, on exécute d’étourdissantes variations ; on a une riche palette, un clavier étendu. […] Tout ce qu’on pense est vrai ; la première pensée venue en vaut une autre ; ce que les mots se trouvent signifier n’est ni mauvais ni pire que ce que d’autres mots signifieraient : il ne reste donc de sûr, de solide, que l’apparence, la beauté même des mots, harmonie, couleur, forme, ce qui enivre ou charme les sens. […] Ils croient au vrai et au bien, ils les cherchent partout : la pure beauté, toute formelle, purement sensible, sans mélange d’éléments intellectuels ou pathétiques, leur est incompréhensible.
. — Lethumque Laborque ; consonances qui prouvent que les anciens n’ignoraient pas l’espèce de beauté attachée à la rime. […] Voilà précisément la même sorte de beautés que dans le poète latin. […] Harris, dans son Hermès, a remarqué que le genre masculin, attribué à la mort par Milton, forme ici une grande beauté.
Il y a dans cette œuvre de Vigny une double beauté, beauté dramatique et beauté didactique. […] Une beauté suprême y apparaît. […] Leur beauté leur vient du style. […] C’est une des plus grandes beautés qui soient. […] Il y a en tout homme un désir de poésie et de beauté.
Mille beautés éparses dans l’univers ont été rassemblées sur cette toile sans confusion, sans effort, et liées par un goût exquis. […] Pourquoi personne ne partage-t-il avec moi le charme, la beauté de ce site ? […] Il est d’expérience que la nature condamne au malheur celui à qui elle a départi le génie, et celle qu’elle a douée de la beauté ; c’est que ce sont des êtres poétiques. […] Il est bien plus aisé de démêler le vice d’un raisonnement que la raison d’une beauté ; d’ailleurs, l’une est bien plus vieille que l’autre. […] Le génie crée les beautés, la critique remarque les défauts ; il faut de l’imagination pour l’un, du jugement pour l’autre.
Mais ce n’est point assez de bien peindre, il faut bien choisir ce qu’on peint : toute peinture vraie a sa beauté ; mais chaque beauté a sa place. […] ils ont recueilli les beautés éparses des modeles existans, & en ont composé un tout plus ou moins parfait, suivant le choix plus ou moins heureux de ces beautés réunies. […] Cependant la beauté de composition n’est pas toûjours un assemblage de beautés particulieres. […] La bassesse & la noirceur concourent de même à la beauté d’un tableau héroïque. […] Quoi qu’il en soit de la beauté physique, sur laquelle du moins les notions éclairées & polies sont d’accord depuis trois mille ans, la beauté morale est la même chez tous les peuples de la terre.
La certitude a sa beauté ; l’inquiétude n’est pas laide. […] Son style est magique non par l’éclat des couleurs, ou par l’éclat des sonorités, mais pour la beauté de sa couleur unique et la pureté de son timbre. […] Telle image avoue son origine ; que d’autres frappent par l’impudeur de leur beauté neuve ! […] La femme à la beauté impassible souffre en silence, sans gestes, sans parade, sans larmes : sa peine est adoucie par la joie d’être belle. […] Chacun des livres des Goncourt fut une de ces belles actions, chacune d’une beauté différente et neuve.
Ils cherchent le sentiment religieux par-delà les dogmes, la beauté poétique par-delà les règles, la vérité critique par-delà les mythes. […] C’est ma sensation qui est poétique, c’est elle que je dois respecter, comme la fleur la plus précieuse de la beauté. […] Le barbare, l’homme féodal, le cavalier de la Renaissance, le musulman, l’Indien, chaque âge et chaque race a conçu sa beauté, qui est une beauté. […] C’est le sentiment vrai, et non la dignité des gens, qui fait la beauté du sujet ; c’est le sentiment vrai et non la dignité des mots, qui fait la beauté de la poésie. […] Il y a un sérieux imposant, une austère beauté dans cette réflexion si sincère ; le respect vient, on s’arrête et on est touché.
Tout acteur qui n’est pas nécessaire, gâte les plus grandes beautés. […] Il ne faut jamais attendre que le théâtre soit dans la chaleur et l’activité de l’intrigue, pour faire ces délibérations, parce qu’elles la ralentissent et en étouffent les beautés. […] Cette scène est encore une beauté de dialogue, plutôt qu’une beauté dramatique ; mais son plus grand défaut est d’être dans une pièce dépourvue d’intérêt. […] Par sa nature, il est une source de beautés du genre admiratif ; et les deux amis peuvent être placés dans des situations qui produisent des beautés non moins dramatiques que celles de la terreur et de la pitié. […] Le style de sentiment est celui qui tire sa force et sa beauté, de la force même et de la beauté des sentiments et des pensées qu’il exprime.
Ce soir, 31 mai, en descendant du Vésuve à cinq heures et demie, admirable vue du golfe : fines projections des îles sur une mer blanche, sous un ciel un peu voilé ; ineffable beauté ! […] Ce que je veux, c’est une femme toute jeune et toute naissante à la beauté ; je consulte mon rêve, je le presse, je le force à s’expliquer et à se définir : cette femme dont le fantôme agite l’approche de mon dernier printemps, est une toute jeune fille. […] Elle n’a pas seulement cette primeur de beauté ; si je me presse pour dire tout mon vœu, ses sentiments par leur naïveté répondent à la modestie et à la rougeur de l’apparence. […] Je dirai tout : oui, un baiser me plairait, un baiser plein de tendresse ; mais surtout la voir, la contempler, rafraîchir mes yeux, ma pensée, en les reposant sur ce jeune front, en laissant courir devant moi cette âme naïve ; parer cette belle enfant d’ornements simples où sa beauté se rehausserait encore, la promener les matins de printemps sous de frais ombrages et jouir de son jeune essor ; la voir heureuse : voilà ce qui me plairait surtout et ce qu’au fond mon cœur demande.
Ils ont retiré d’utiles leçons de cette étude féconde ; mais leurs beautés originales portant l’empreinte de la mythologie du Nord, ont une sorte de ressemblance, une certaine grandeur poétique dont Ossian est le premier type. […] L’amour des arts, la beauté du climat, toutes ces jouissances prodiguées aux Athéniens, pouvaient leur servir de dédommagement. […] Le frémissement que produisent dans tout notre être de certaines beautés de la nature, est une sensation toujours la même ; l’émotion que nous causent les vers qui nous retracent cette sensation, a beaucoup d’analogie avec l’effet de l’harmonica. […] Les tragiques du Nord ne se sont pas toujours contentés des effets naturels qui naissent du tableau des affections de l’âme, ils se sont aidés des apparitions, des spectres, d’une sorte de superstition analogue à leur sombre imagination ; mais quelque profonde que soit la terreur qu’on peut produire une fois avec de tels moyens, c’est plutôt un défaut qu’une beauté.
Ceux qui conçoivent toutes les beautés de son Avare, et de son Amphitryon, soutiennent qu’il a surpassé Plaute dans l’un et dans l’autre. […] On sait de quelle manière il y a excellé, non seulement comme Acteur, par le grand nombre d’Ouvrages qu’il nous a laissés, et qui ont tous leurs beautés proportionnées aux sujets qu’il a choisis. […] Toutes ses Pièces n’ont pas d’égales beautés, mais on peut dire que dans ses moindres il y a des traits qui n’ont pu partir que de la main d’un grand maître, et que celles qu’on estime les meilleures, comme Le Misanthrope, Le Tartuffe, Les Femmes savantes, etc. sont des chef-d’œuvres qu’on ne saurait assez admirer. […] Il a épuisé toutes les matières qui lui ont pu fournir quelque chose, et si les critiques n’ont pas été entièrement satisfaits du dénouement de quelques-unes de ses Comédies, tant de beautés avaient prévenu pour lui l’esprit de ses auditeurs, qu’il était aisé de faire grâce à des tâches si légères.
Dans ce livre d’une si hideuse beauté qu’il intitula Les Liaisons dangereuses, Laclos fit faire des fautes d’orthographe à Cécile de Volanges pour que ses lettres à Valmont fussent ainsi plus virginales et plus pensionnaires. […] La beauté peut être plus rare, mais elle n’est pas moins vraie que la laideur. […] Duranty, aurait une beauté amère et touchante, suspendue qu’elle est si longtemps entre sa pitié pour des parents qu’elle afflige et le loyal honneur d’une promesse faite a un homme qui a semblé l’abandonner ! […] Tout a croulé de ce livre frappé dans la seule beauté qu’il pût avoir ; et lorsque je me suis demandé l’explication de cette bévue esthétique dans un homme dont j’affirme aujourd’hui le talent comme écrivain et comme observateur, il a bien fallu me répondre par le réaliste, le réaliste qui se détourne systématiquement de l’idéal !
Il se plaît donc à faire défiler devant nous le cortège des beautés illustres, des reines puissantes, des héroïnes, et il se demande : Où sont-elles ? […] Où est la beauté de Jason, d’Absalon ? […] … Mélusine et tant d’autres beautés célèbres ? […] Rigault l’avait déjà remarqué), est donc principalement dans ce refrain si bien trouvé, si bien approprié à la beauté fugitive et qui s’écoule en si peu d’heures : Mais où sont les neiges d’antan ? […] Tant qu’on ne produira pas un exemple ancien de cette façon de réplique qui donne ici tout l’agrément, et qui a surtout son à-propos quand il s’agit de femmes et de beautés célèbres, Villon reste en possession de son titre ; il garde en propre son plus beau fleuron.
Puis il y a l’époque Louis XVI, bien marquée et tranchée, Marie-Antoinette donnant le ton ; aux femmes de cette nouvelle génération, à celles qui règnent ou fleurissent pendant ces quinze premières années brillantes, et dont la duchesse de Lauzun est le parfait modèle, succèdent les femmes de la Révolution, Mme de Staël, Mme Roland, Mme de Condorcet, tant d’autres ; puis, l’on a les beautés du Directoire. […] On voit poindre une beauté toute différente des beautés du Palais-Royal dans cette petite femme peinte en buste par la Rosalba et exposée au Louvre. […] Peu à peu, la beauté de la femme s’anime et se raffine. […] Elle trouve l’âme et le charme de la beauté moderne : la physionomie. […] Elle a été très-jolie, très-abandonnée, et très-méchante ; sa beauté s’en est allée, ses amants s’en sont allés, et elle pense que le Diable va venir.
Dans quelle image est la beauté ? […] Au tour du laboureur : — « Ce qui plaît le mieux à nos regards est un champ d’épis jaunes. » Mais le poète : — « C’est de laurier que la beauté se couronne. […] on l’écoute. » Et le peintre : — « La beauté n’a point d’images : c’est une image. » — « La beauté, affirme le philosophe, c’est la vérité. » — « C’est le succès », s’écrie le partisan. […] fait le marchand, le bonheur ne joue pas, il calcule. » Le moine vient à son tour : — « L’heureux croit, mes frères, la beauté prie. » Mais tout à coup : — « Malédiction ! […] » Pour le marin, la beauté, tête de bois, rit à la poupe du vaisseau quand on rentre au port après l’orage.
Quand il nous définit la qualité du sol de l’Égypte et en quoi ce sol se distingue du désert d’Afrique, ce « terreau noir, gras et léger », qu’entraîne et que dépose le Nil ; quand il nous retrace aussi la nature des vents chauds du désert, leur chaleur sèche, dont « l’impression peut se comparer à celle qu’on reçoit de la bouche d’un four banal, au moment qu’on en tire le pain » ; l’aspect inquiétant de l’air dès qu’ils se mettent à souffler ; cet air « qui n’est pas nébuleux, mais gris et poudreux, et réellement plein d’une poussière très déliée qui ne se dépose pas et qui pénètre partout » ; le soleil « qui n’offre plus qu’un disque violacé » ; dans toutes ces descriptions, dont il faut voir en place l’ensemble et le détail, Volney atteint à une véritable beauté (si cette expression est permise, appliquée à une telle rigueur de lignes), une beauté physique, médicale en quelque sorte, et qui rappelle la touche d’Hippocrate dans son Traité de l’air, des lieux et des eaux. […] Je voudrais détacher de Volney une page qui rendît son genre de beauté quand il en a, cette vérité précise, nue et sèche comme certaines parties des contrées mêmes qu’il a parcourues. […] De même, quand il considère la nature, il ne se desserre point le cœur, il ne s’ouvre jamais avec plénitude à l’impression tranquille et sereine de ses grandeurs et de ses beautés. […] La pureté de ses eaux, les beaux ombrages qui l’entourent, les rochers escarpés et les épaisses forêts qui en défendent l’approche ; ce mélange de beautés tout à la fois douces et imposantes cause un saisissement difficile à exprimer, et semble annoncer la secrète présence d’un Être supérieur à l’humanité. […] Après bien des tourbillons affreux et des tempêtes, le ciel tout d’un coup se rassérène ; la seizième et dernière soirée que passent les voyageurs en ce haut lieu est d’une beauté ravissante : « Il semblait que toutes ces hautes sommités voulussent que nous ne les quittassions pas sans regrets. » L’horizon en tout sens se colore, les cimes supérieures se nuancent, ainsi que les neiges qui les séparent : Tout l’horizon de l’Italie paraissait bordé d’une large ceinture, et la pleine lune vint s’élever au-dessus de cette ceinture avec la majesté d’une reine, et teinte du plus beau vermillon.
Elle applaudissait le poëte pour son génie, on l’applaudit pour sa beauté. […] Cette profonde compréhension des choses modernes rendait, il faut le dire, Balzac peu sensible à la beauté plastique. […] » — Le caractère lui plaisait plus que le style, et il préférait la physionomie à la beauté. […] Sa beauté, comme celle des plantes de son jardin, a quelque chose d’inquiétant, de fatal et de morbide. […] Ils ont leur beauté propre, connue des seuls poètes et des fins artistes.
Toute la physionomie exprime la beauté apollonienne en elle-même, et hors d’elle-même l’amour et la jouissance de la beauté. […] Cette nature était allemande par le terroir, grecque par la beauté, française par l’indépendance des préjugés des lieux et des temps. […] Goethe, d’une beauté déjà olympienne et d’une célébrité déjà entrevue, était à Wetzlar. […] cette enfant est la beauté accomplie ! […] À quoi te sert donc la beauté, ô jeunesse ?
Combien y a-t-il de spectateurs qui, devant un tableau de Raphaël, sachent ce qui en fait la beauté, et ne préféreraient, s’ils étaient francs, un tableau moderne, d’un style clair et d’un coloris éclatant ? […] En général, les Grecs ne connaissaient pas les beautés de plan, et c’est bien gratuitement que nous leur en faisons honneur. […] L’œuvre belle est celle qui représente, sous des traits finis et individuels, l’éternelle et infinie beauté de la nature humaine. […] Comment comprendre par exemple la beauté d’Homère sans être savant, sans connaître l’antique, sans avoir le sens du primitif ? […] M. de Maistre a dit très naïvement : « Pour sentir les beautés de la Vulgate, faites choix d’un ami qui ne soit pas hébraïsant, et vous verrez comment une syllabe, un mot et je ne sais quelle aile légère donnée à la phrase feront jaillir sous vos yeux des beautés de premier ordre. » (Soirées de Saint-Pétersbourg, 7e entretien.)
Nous ne nions pas que la littérature de décadence n’ait parfois sa beauté propre, beauté de forme et de couleur. […] Et pourtant, n’est-ce pas l’auteur même des Fleurs du mal qui, en une heure de philosophie, écrivait cette dissertation édifiante : « L’intellect pur vise à la vérité, le goût nous montre la beauté et le sens moral nous enseigne le devoir. […] Alors, ô ma beauté ! […] Fait-il un hymne à la beauté, il s’écrie : Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques, De tes bijoux l’Horreur n’est pas le moins charmant.Voici d’ailleurs sous quelles couleurs il nous dépeint son propre cœur : Mon cœur est un palais flétri par la cohue ; On s’y soûle, on s’y tue, on s’y prend aux cheveux ! […] La vraie beauté artistique est par elle-même moralisatrice, et elle est une expression de la vraie sociabilité.
La beauté des paroles voilà, à ses yeux, la beauté extérieure. […] Parmi les poètes de cette époque, sa vie et son œuvre demeurent d’une beauté indépendante et sauvage. […] Le seul criterium est la beauté. […] C’est un Maître de Joie, de Beauté, de Sagesse. […] Et nul ne s’élève à une haute beauté morale.
Il fut ensuite principalement renommé et illustre pour la beauté de ses traductions, dont il a fait un bon nombre, tant du grec que du latin. […] M. de Joyeuse avait une fille qui avait de l’esprit et de la beauté ; Maucroix la voyait se former et grandir : « Comme ce garçon est bien fait, a beaucoup de douceur et beaucoup d’esprit, et fait aussi bien des vers et des lettres que personne, à quinze ans elle eut de l’inclination pour lui. » C’est Tallemant qui nous peint ainsi son ami, et qui nous raconte l’historiette romanesque. […] …………………………………………………… C’est toujours trop pour moi, quoi qu’elle puisse faire, Et, si peu que m’accorde une telle beauté, Elle me donne plus que je n’ai mérité. […] Cependant, disons à son honneur que lorsque la marquise, ayant épuisé ses coquetteries à la Cour et en tous lieux, délaissée de son mari, frappée dans sa beauté, se voyant malade et dépérissante, cherchait un lieu où s’abriter, ce fut à Reims, chez MM. de Maucroix, le nôtre et son frère, qu’elle fut recueillie, qu’elle reçut les derniers soins et qu’elle mourut, aussi bien que sa mère, qui y était morte également. […] Le chanoine de Reims n’était pas de l’Académie, mais il en eût été certes depuis longtemps s’il eût résidé dans la capitale ; il était connu pour la beauté de sa plume : on avait fort admiré sa traduction des homélies de saint Jean Chrysostome.
C’est une des beautés et l’un des charmes de la jeunesse et du génie que de se produire et d’éclater avant tout raisonnement, et de s’élancer vers son objet par une impulsion première irrésistible. […] M. de La Rochefoucauld, parlant de celle qu’il avait aimée, n’aurait pas commencé par décrire « ses cheveux d’un blond cendré de la dernière finesse, descendant en boucles abondantes, ornant l’ovale gracieux du visage, et inondant d’admirables épaules, très découvertes, selon la mode du temps. » Et après cette description toute physique et caressante, et qui sent l’auteur du Lys dans la vallée, il n’eût point déclaré tout aussitôt, en reprenant le ton du professeur d’esthétique qui se retourne vers la jeunesse pour lui faire la leçon : « Voilà le fond d’une vraie beauté ! […] Parlant d’une beauté qui, dans l’habitude de la vie, avait « un certain air d’indolence et de nonchalance aristocratique, qu’on aurait pris quelquefois pour de l’ennui, quelquefois pour du dédain », M. de La Rochefoucauld n’aurait jamais ajouté, en se dessinant, et en se caressant le menton : « Je n’ai connu cet air-là qu’à une seule personne en France… » Comme si celui qui écrit cela avait connu vraiment toute la fleur des beautés de la France. […] Tout cela me charmait, c’était ce qu’un Dieu m’avait mis dans le cœur : car chaque homme prend diversement plaisir à des œuvres diverses. » (Odyssée, XIV, 228.) — Ce que Virgile a traduit moins gravement par ces mots : « Trahit sua quemque voluptas. » — Et Homère a dit encore par la bouche du même Ulysse parlant à un jeune et beau Phéacien, qui l’avait offensé par ses paroles : « Ainsi donc les dieux ne donnent pas toutes les grâces à tous les hommes, ni la beauté, ni les qualités de l’esprit, ni l’éloquence. […] Un autre, au contraire, est égal en beauté aux immortels, mais la grâce ne couronne point ses paroles. » (Odyssée, VIII, 167.)
Tantôt c’est une beauté hardie, d’aspect superbe et sauvage, aux goûts bizarres, aux mœurs orientales, osant et se permettant tous ses caprices presque en reine du Caucase ou en dame romaine d’autrefois, et mettant en déroute à première vue nos mesquines voluptés et nos jolis vices à la mode. Tantôt c’est une beauté non moins éblouissante, mais d’une ambition plus variée, qui sait unir les plaisirs à la politique, le jeu des cabinets et des cours aux intrigues d’éclat, qui mène de front la galanterie et les affaires, et, sur le pied déjà de souveraine, attire à soi les plus graves philosophes politiques ou impose le respect aux plus grandes dames de Paris : qui les a rencontrés une seule fois ne saurait jamais les oublier, ces deux yeux d’une clarté d’enfer et qui faisaient lumière dans la nuit. […] La vieillesse n’est pas une bonne chose, naturellement parlant ; il y a trois beautés qui n’en sont pas, dit le proverbe : un beau froid, une belle grossesse, une belle vieillesse. […] Amenée, moins encore par mon âge que par la reconnaissance qu’il laisse croître, à étudier la vieillesse, je me retrouve peu sur le chemin des autres, et je voudrais ici l’étudier dans ses rapports avec Dieu et l’autre vie ; montrer que la vieillesse est pleine de grandeur et de consolation ; que son activité, concentrée en un foyer, en est plus intense ; que la dignité, la beauté d’une situation dont l’âme fait toute la vie, élèvent au-dessus de tout cette situation même ; et qu’enfin, comme on l’a dit du prêtre, si le vieillard est le plus malheureux des hommes, il est le plus heureux des chrétiens, le plus averti, et, s’il le veut, le plus consolé. […] Elle se fait, croyez-le bien, les objections ; elle se rend bien compte que, pour lui donner raison, il faut commencer par tourner le dos à la nature et se placer « dans la partie la plus providentielle des desseins de Dieu. » Aussi tous ceux qui feront ce chemin sous sa conduite et en fils dociles passeront-ils légèrement sur ses défauts pour se récrier à tout moment sur la beauté des points de vue.
Comment traduire des beautés si simples ? […] » Et M. de Belloy, homme de goût, serait le premier à confesser qu’il a été dans un embarras inexprimable en présence de ces beautés simples et courantes où les liaisons surtout et les petits mots, les mille attaches du discours, sont si difficiles ou plutôt impossibles à rendre. […] Fénelon et Addison, deux esprits polis et doux, de la même famille littéraire, ont loué ce passage de Térence comme d’une beauté et d’un naturel inimitables. […] Quand il arrive sur la scène, comme un jeune chien en défaut, courant, hors d’haleine, ayant perdu la piste de la beauté qu’il suivait, qu’il brûlait d’aborder, qu’un maudit fâcheux lui a fait tout d’un coup manquer, quel jeu de passion ! […] Térence est le contraire de bien des choses, il l’est surtout de la dureté, de l’inhumanité, de la brutalité, — de ce qu’on court risque, à mesure qu’on avance dans les littératures, d’ériger insensiblement en beauté et de prendre pour la marque première du talent.
Villemain, il n’était que le plus brillant, le plus ingénieux, le plus éloquent des littérateurs, agrandissant et prolongeant sans doute le plus qu’il pouvait son domaine, un peu trop curieux, je le crois, d’y faire entrer avec une émulation visible les beautés parlementaires de nos voisins qui étaient à l’ordre du jour, mais fécondant d’ailleurs tout ce qu’il touchait, et nous en offrant le sentiment et la fleur. […] de Mme de Longueville en personne, oui, de cette sœur du Grand Condé, de cette beauté aux langueurs incomparables, qui, après avoir été une héroïne de la Fronde, est devenue un modèle de pénitence. […] Il paraît croire18 que, dans les grands siècles, les siècles classiques, « qui ont seuls le goût de la grande beauté », il y a en effet et bien réellement une beauté plus abondante et plus exubérante que dans d’autres ; et qu’ainsi au xviie siècle, non loin de Descartes, de Pascal ou de Malebranche (dussent-ils en user très peu), il y a de plus belles femmes au physique qu’à côté de Condillac, d’Helvétius et de Galiani, qui les aimaient davantage. Il ne dit pas seulement cela du type de beauté à la mode, mais de la réalité même. En un mot, il croit que la femme maigre était assez bonne pour les héros de Rossbach et pour les philosophes sensualistes du xviiie siècle, tandis que les héros de Rocroi et les contemporains spiritualistes de Descartes avaient droit à des beautés plus réelles, et à plus de solidité comme dirait Mme de Sévigné ; et, comme dit encore le proverbe, « Tant moins ils en voulaient, tant plus ils en avaient. » Le buste de Mme Du Barry protesterait au besoin contre cette théorie dont M.
Ici, je citerai car la scène est d’une grande beauté et M. […] Maintes phrases donnent le frisson de la beauté parfaite. […] la Beauté n’est point là. […] La Beauté, elle est multiforme comme la vie. […] Jaurès, la beauté de Madame Adam.
Il a une beauté de roi dépossédé. […] On la regarde, et soudain on subit le charme d’énigme de cette beauté singulière. […] Il avait la démarche rythmée, légère, le corps ailé, la beauté de l’Apollon antique. […] Or, en quoi réside essentiellement cette beauté ? […] Vous ne la goûtez pas, vous, cette beauté.
Si une inclinaison irrésistible au songe, une recherche inquiète et patiente de la beauté, une sensibilité nostalgique, combattue et dominée par une faculté d’idéalisation généreuse, créent la poésie, il était né poète. […] Henri Degron Qu’ajouter, sinon dire de relire ses poèmes empreints du charme triste qui semble prédestiné à ceux qui vont partir, et ces pages d’une beauté sûre d’un écrivain déjà maître de sa langue, qui sont Un portrait du duc d’Albe, et les Trianons d’automne.
L’on sait que d’aucunes sont d’une beauté indiscutable. […] Georges Rency Arthur Toisoul qui, avant Opéra, cette douce merveille, avait publié déjà Mai, livre de pure grâce et de délicate beauté, dont on a trop peu, oh !
» Mais ce qui pouvait me faire douter, c’est que ce mot, dont je faisais une espérance, ne s’appliquait qu’à la manière générale de procéder de l’esprit humain dans toutes les circonstances de la vie, et non au cas particulier d’une vérité surnaturelle en qui l’auteur des Guise, probablement, ne croyait point ; car, s’il y avait cru, son histoire, qui a des beautés incontestables, aurait la beauté contestée, qui est la beauté suprême dans le monde où la Vérité, cette beauté des beautés, a toujours été crucifiée, — mais pour ressusciter ! Et cette beauté, elle ne l’a pas. […] Elle y a perdu également de sa justice et de sa beauté. De sa justice, c’est bien évident ; mais de sa beauté ? Le livre de Forneron a la sienne, celle que les anciennes rhétoriques, maintenant dépassées, attribuaient jadis à l’Histoire : la beauté sévère et froide, et digne, sans rien plus.
Aspiration à la beauté. […] Il respectera son œuvre : il n’aura souci que de la faire belle ; de cette beauté la gloire sera le prix. […] Il leur faudra bien de l’originalité, bien du bon sens, dans leur création de la beauté, pour ne pas se méprendre et poursuivre, au lieu du beau, le rare ou l’érudit. […] Mais cela, en soi, était excellent : à la place de formes étroites, maigres et compliquées, telles que la Ballade et le Chant royal, les formes antiques, larges, simples, réceptives, si je puis dire, mettaient l’inspiration à l’aise, et se prêtaient à revêtir une beauté bien supérieure. […] Entraîné par son préjugé aristocratique, ce gentilhomme poète trouve plus de beauté, de grandeur dans les termes de guerre, et dans tous ceux qui désignent les occupations de la vie noble.
Substitution d’idéal : le caractère, au lieu de la beauté. […] Il y a de tout dans son style : analyse, synthèse, idée, sensation, hallucination, réalisme, romantisme ; c’est un monde grouillant, qui n’a pas toujours la beauté, qui du moins a souvent la vie. […] La nature n’a cure de la beauté, de ce que les hommes conviennent d’appeler ainsi. […] Les formés de la vie, et l’activité de la vie, c’est cela que l’artiste doit s’attacher à rendre : plus ces formes auront de particularité, plus cette activité sera intense, et plus il y aura de beauté dans l’être. Le caractère (et non la régularité, la noblesse, la généralité, éléments classiques de la beauté) doit être l’objet de l’imitation, de l’expression littéraires.
Il a eu en partage la beauté, le courage, la générosité, l’intelligence et le don poétique. […] La beauté musicale propre à la poésie de Lamartine, et qui la rend d’abord reconnaissable entre les toutes les autres, va se dégageant de plus en plus pour éclater sans nul reste d’alliage classique dans les Nouvelles méditations, dans les Harmonies. […] Doué de tous les dons souverains, — beauté, poésie, éloquence, courage, sens profond de l’avenir, et, au-dessus du génie, la bonté, ce génie du cœur, — Lamartine est un des plus nobles êtres qui aient paru sous le ciel de France. […] On est en droit de remarquer que, parmi nos artistes modernes, Lamartine est celui qui ressemble le plus aux grands rêveurs du Nord, à un Shelley et à un Keats, par ce caractère d’une beauté poétique absolument étrangère à tout ce qui n’est pas la poésie. […] L’hymne n’est qu’une méditation qui s’exalte, soit à l’appel tumultueux des émotions intérieures, soit devant le spectacle des embellissements que répandent sur le monde la beauté et l’héroïsme.
Il dit quelque part du duc de Buckingham qui faisait la cour à une beauté : Elle ne haïssait point la médisance ; il en était le père et la mère ; il faisait des vaudevilles, inventait des contes de vieille, dont elle était folle. […] Ajouterai-je que, jusque dans le portrait de sa sœur, cette plume malicieuse ne s’épargne pas une insinuation sur des beautés cachées, qui prouve qu’au besoin son indiscrétion ne respecte rien ? […] Mais, avec un peu d’attention, on finit par se reconnaître, comme dans un bal de Cour, au milieu de ce raout de beautés anglaises les plus fines et les plus aristocratiques du monde, et dont le peintre a rendu avec distinction les moindres délicatesses. J’ai sous les yeux la magnifique édition exécutée à Londres en 1792, avec les nombreux portraits gravés ; je vois défiler ces beautés diverses, l’escadron des filles d’honneur de la duchesse d’York et de la reine ; je relis le texte en regard, et je trouve que c’est encore l’écrivain avec sa plume qui est le plus peintre : Cette dame, dit-il d’une Mme de Wetenhall, était ce qu’on appelle proprement une beauté tout anglaise ; pétrie de lis et de roses, de neige et de lait quant aux couleurs ; faite de cire à l’égard des bras et des mains, de la gorge et des pieds ; mais tout cela sans âme et sans air.
Seulement, parce qu’il a fait son métier de prêtre, désintéressé de gloire humaine, et profond d’intention religieuse, est-ce une raison pour que nous, les critiques mondains, nous soyons dispensés de faire le nôtre, en ne portant pas la lumière sur ce qui est beau de la beauté humaine… et littéraire, la plus nette, la plus pathétique, la plus impérieusement incontestable, et cela indépendamment du sujet sur lequel s’est produite cette beauté inouïe et de l’explication surnaturelle qu’il faut en donner ? […] Et parce que la cause de ce résultat est surnaturelle, faut-il renoncer à caractériser, comme nous le ferions dans un poëte inconnu s’il venait à naître, le genre de beauté qu’elle a laissé derrière elle à la Critique et à la Littérature, ces deux jouisseuses, dont l’adorable âme en Dieu qu’elle était, cette sœur Emmerich ne se doutait pas ! […] Et voilà pourtant ce qu’a fait la sœur Emmerich, et avec une telle certitude, une telle sûreté d’elle-même, qu’elle a réussi de manière à ce que les théologiens l’absolvent, tout au moins, quand ils ne la glorifient pas, et que nous, critiques littéraires, nous admirons au nom de la beauté, telle que l’art la conçoit, l’intuition, quelle qu’elle fût, qui fut en elle et qui nous a donné ces trois livres, comme on n’en avait pas vu encore dans la littérature sacrée, — ces trois livres d’histoire qui, en définitive, sont trois poëmes ; car l’histoire se puise à des sources, et ici il n’y a pas d’autre source qu’une âme en extase, — ces trois livres enfin dont on peut dire : « théologiquement, il n’est pas de rigueur d’y croire », mais dont on n’oserait dire cependant : « théologiquement, ils sont faux ! […] Ils sont là tous, plus humainement particularisés avec le détail, les mille petits ou profonds coups de poinçon, qui les gravent dans l’esprit au fond duquel ils étaient déjà (mais moins avant), dans la beauté pure de leurs grandes lignes lumineuses !
Les critiques alexandrins, Aristophane, Aristarque66, en firent un de leurs sujets favoris d’étude ; et, comme il arrive au génie, ses hardiesses originales, ses brusques fantaisies, devinrent des beautés classiques servilement imitées. […] Et n’est-ce pas le triomphe de la beauté de l’art que si peu de paroles si fortuitement sauvées suffisent pour assurer un immortel souvenir ? […] Platon, ce qui étonne davantage, avait voulu voir en elle un sage autant qu’un poëte ; et, quand il lui donnait ce nom de dixième et dernière Muse, qu’une flatterie banale a répété pour tant d’autres bouches gracieuses, sans doute l’idée de quelque chose de divin, dans l’union du talent et de la beauté, s’attachait pour lui à cette expression ; et, plus tard, chez d’autres écrivains moins curieux de l’art et de la forme, on sent que le même nom réveille le même souvenir d’admiration idolâtre et de culte mystérieux. […] L’espérance de cette gloire, l’orgueil, non plus de la beauté, mais du génie, éclate dans quelques vers d’une pièce perdue71 : « Morte, tu seras gisante », dit la Muse lesbienne à quelque femme ennemie ou rivale ; « il ne restera de toi nulle mémoire dans l’avenir ; car tu ne touches pas aux roses de la montagne des Piérides ; mais tu iras, obscure, visiter les demeures d’Adès, t’envolant sur le sol des aveugles morts. » Une autre fois, devant des femmes qui, riches et belles, semblaient enivrées de leur destinée, elle parut plus fière encore, en disant « que les Muses lui donnaient, à elle, le vrai bonheur et le seul digne d’envie ; car, même dans la mort, elle ne serait jamais oubliée ». […] « C’est elle qui prépare et anime la fête, orne de guirlandes la chambre nuptiale72, dépeint la beauté des jeunes vierges, fait avancer Aphrodite sur le char des Grâces entouré du chœur des Amours, attache avec une tige d’hyacinthe les cheveux de la déesse qui se partagent sur ses tempes, et laisse flotter les autres au souffle de l’air.
Dans les Martyrs, encore un ancien monde et un nouveau monde, le monde païen et le monde chrétien, la beauté gracieuse et la sainteté sublime : où Corneille n’avait vu que deux âmes (dans Polyeucte), faire voir deux sociétés, deux civilisations, deux morales, deux esthétiques ; ce que Bossuet avait indiqué d’un trait sobre et sévère, en prêtre qui instruit (dans le Panégyrique de saint Paul, et ailleurs), le développer en artiste, pour la beauté et pour l’émotion. […] Il est curieux de les comparer aux parties de l’Itinéraire qu’ils emploient ; on préférera souvent le style simple des impressions de voyage aux beautés écrites du roman. […] Et leur vision ne se forme pas en lui selon l’idée d’un certain rapport du physique au moral, mais selon l’idée de beauté. […] Ici nous tenons un grand peintre : dans ses tableaux, les cadres ou les prolongements sentimentaux se décollent d’eux-mêmes ; il ne reste que la nature fortement saisie, fidèlement rendue en sa beauté originale et locale. […] Avec les motifs d’inspiration, il a révélé la forme : il a rétabli l’art et la beauté, comme objets essentiels de l’œuvre littéraire.
Et où qu’il soit, l’héroïsme a toujours de la beauté et de la grandeur. […] Comme tous les Infatués de ce temps-ci, qui s’aiment dans le siècle, il peut se tromper et il se trompe sur la beauté de la vie moderne, qui n’est, à mes yeux, que plate et laide ; mais il s’efforce toujours d’en faire bomber les platitudes et d’en pousser jusqu’à l’horrible les laideurs. […] Évidemment, la beauté d’un livre n’est pas, pour lui, dans l’agencement réfléchi et combiné de ses diverses parties. […] Je puis bien admettre que cet homme, qui est, avant tout, un artiste, soit assez indifférent aux idées philosophiques et religieuses, mais il n’a point de parti-pris contre elles, et si même il pouvait croire que d’être religieux donnerait une beauté de plus à son œuvre, je suis parfaitement sûr qu’immédiatement il le serait !
Stanley sont, à aller au fond des choses, des entreprises commerciales dont le bénéfice est, je le sais, à longue échéance, ce qui leur communique une certaine beauté ; mais enfin les actes, pris en eux-mêmes, sont ici fort supérieurs aux pensées. […] Je fais seulement remarquer que l’endurance ni l’énergie déployée ne sont point l’unique mesure de la beauté des actes. […] Ce qui donne encore un air d’artifice à plus d’une page du célèbre explorateur, c’est ce qui aurait pu, tourné autrement, ajouter à la beauté de son récit : ce sont les ressouvenirs de son éducation protestante.
Il était célèbre dans le monde galant par sa beauté, ses grâces, son esprit et son tendre cœur. […] Le marquis d’Urfé devait en grande partie sa célébrité à sa longue et merveilleuse passion pour Diane de Châteaumorand, personne d’une admirable beauté, d’une grande fortune, toute occupée de ses charmes, et pénétrée du respect pour elle-même, au point d’avoir refusé à un neveu de s’arrêter une nuit dans un château qu’il avait sur une route où elle passait, parce qu’on y avait remplacé des vitres de cristal par du verre. […] « Ces ouvrages, dit Huet, furent reçus du public avec un applaudissement infini, et principalement de ceux qui se distinguaient par la politesse et par la beauté de l’esprit. » Rien ne nous apprend comment le Ier volume du roman du marquis d’Urfé fut accueilli à l’hôtel de Rambouillet, ni si l’auteur s’introduisit dans cette société.
Tout consiste en quelques oppositions vulgaires de la beauté, de la jeunesse, de la grandeur et de la mort ; et c’est pourtant sur ce fond stérile que Bossuet a bâti un des plus beaux monuments de l’éloquence ; c’est de là qu’il est parti pour montrer la misère de l’homme par son côté périssable, et sa grandeur par son côté immortel. […] — « Et maintenant, dit-il, ces deux âmes pieuses (Michel Le Tellier et Lamoignon), touchées sur la terre du désir de faire régner les lois, contemplent ensemble à découvert les lois éternelles d’où les nôtres sont dérivées ; et si quelques légères traces de nos faibles distinctions paraît encore dans une si simple et si claire vision, elles adorent Dieu en qualité de justice et de règle. » Au milieu de cette théologie, combien d’autres genres de beautés, ou sublimes, ou gracieuses, ou tristes, ou charmantes ! […] » Le poète (on nous pardonnera de donner à Bossuet un titre qui fait la gloire de David), le poète continue de se faire entendre ; il ne touche plus la corde inspirée ; mais, baissant sa lyre d’un ton jusqu’à ce mode dont Salomon se servit pour chanter les troupeaux du mont Galaad, il soupire ces paroles paisibles : « Dans la solitude de Sainte-Fare, autant éloignée des voies du siècle, que sa bienheureuse situation la sépare de tout commerce du monde ; dans cette sainte montagne que Dieu avait choisie depuis mille ans ; où les épouses de Jésus-Christ faisaient revivre la beauté des anciens jours ; où les joies de la terre étaient inconnues ; où les vestiges des hommes du monde, des curieux et des vagabonds ne paraissaient pas ; sous la conduite de la sainte Abbesse, qui savait donner le lait aux enfants aussi bien que le pain aux forts, les commencements de la princesse Anne étaient heureux200. » Cette page, qu’on dirait extraite du livre de Ruth, n’a point épuisé le pinceau de Bossuet ; il lui reste encore assez de cette antique et douce couleur pour peindre une mort heureuse.
Une imagination qui a quelquefois l’éclat de celle d’Homère, des expressions de génie, de la force quand il peint, de la précision toutes les fois qu’il est sans images ; assez d’étendue dans ses tableaux, et surtout la plus grande richesse dans ses couleurs ; voilà ses beautés. Peu de goût, souvent une fausse grandeur, une majesté de sons trop monotone, et qui, à force d’être imposante, fatigue bientôt et assourdit l’oreille ; enfin trop peu d’idées, et surtout aucune de ces beautés douces qui reposent l’âme : voilà ses défauts. […] Après lui, on trouve Sidoine Apollinaire, qui n’eut ni ses beautés, ni ses défauts ; il était trop au-dessous des unes ; peut-être même ne pouvait-il atteindre aux autres.
— Le plus grand de tous, l’Ouvrier Nonpareil à qui l’Éternelle Beauté doit sa plus radiante parure : Victor Hugo ! […] Il a en quelque sorte humanisé la Beauté. […] À nos yeux d’iconoclastes, la physionomie vaut la beauté. […] Victor Hugo a la beauté des monstres. […] Je chéris en des talents aux affirmations très espacées l’excellence de beautés admirées incomplètes chez les plus grands génies.
C’est donc en elle qu’il faut commencer à chercher l’origine de leur beauté. […] On remarquera qu’il en est de la beauté de l’éloquence et de la haute poésie, comme de la beauté du corps humain ; ce n’est ni au fard, ni aux ressorts artificiels qu’il doit sa force et sa couleur, c’est à la santé. […] Elle est obligée de les embellir et se mettrait, en ne le faisant pas, au-dessous de la peinture, qui choisit, parmi les qualités éparses en de nombreux modèles, les beautés qu’elle réunit pour en composer une beauté plus parfaite. […] Toujours on y trouve des beautés qu’on n’avait point aperçues. […] Son talent adroit s’efforce à l’ébranler de sa place en vantant les beautés que chacun y reconnaît, louant à peine ses autres beautés supérieures qu’il n’avait pas atteintes.
La beauté en art est un résultat relatif et qui s’obtient par le mélange d’éléments très divers, souvent les plus inattendus. […] Avec lui, on participe aux plaisirs d’une vie normale et simple, aux désirs de la paix, à la certitude de la beauté, à l’invincible jeunesse de la Nature. […] La beauté, à quoi sert-elle ? […] C’est une âme païenne ou qui se voudrait païenne, car si ses yeux cherchent avidement la beauté sensible, son rêve s’attarde à vouloir forcer la porte derrière laquelle dort obscurément la beauté enclose dans les choses. […] Il y a dans son œuvre plusieurs pages qui donnent un peu l’impression de beauté que l’on pourrait ressentir devant un crapaud congrûment pustuleux, une belle syphilis ou le Château Rouge à onze heures du soir.
De Pure dit d’elles : Ce sont des beautés, ce sont des muses. […] C’est en effet une aristocratie que la société où le pouvoir passe d’une main à l’autre, comme la beauté passe d’un visage vieilli à un plus jeune, et comme l’éclat du bel esprit d’hier passe au bel esprit du jour. […] De Pure nous a dit d’elles : Ce sont des beautés, ce sont des muses. Voyons la morale qu’elles observent comme beautés. […] Celles qu’on appelle simplement des beautés, ont pour but principal de charmer les yeux.
Le raisonneur prétend assigner des règles à la beauté du paysage : « pour qu’un paysage soit beau, il faut que toutes ses parties impriment une idée commune et concourent à produire une même sensation. » Il y a des paysages où, avec de grandes parties, l’impression totale est manquée ; il y en a où, avec les circonstances les plus vulgaires, les plus triviales, l’effet est produit. Les montagnes elles-mêmes peuvent avoir une autre beauté que le grandiose : Voyez cette petite chaîne isolée, contre laquelle s’appuient les Thermes (aux environs des Eaux-Bonnes) : personne n’y monte ; elle n’a ni grands arbres, ni roches nues, ni points de vue. […] Cette expression est l’âme du paysage ; or, autant d’expressions diverses, autant de beautés différentes, autant de passions remuées. […] Il sait, pour l’avoir souvent éprouvé dans cette continuité d’émotions excessives, « que le grandiose lasse vite ; qu’il n’y a rien de plus beau que la beauté riante, qu’elle seule met l’âme dans son assiette naturelle. » Toutefois, il ne peut se dérober là à la condition de son sujet et aussi au tour naturel de son esprit ; et ce sont encore les aspects sévères, les sublimités gigantesques qui l’attirent le plus et l’inspirent le plus puissamment. […] Je n’ai donné que la partie purement pittoresque : les pages qui suivent et où l’auteur s’emparant des notions géologiques, expose et ressuscite les révolutions de ces contrées durant les âges antérieurs à l’homme, sont d’une extrême élévation et d’une vraie beauté ; la conclusion est d’une humilité mélancolique, mêlée d’un sourire, pour la race humaine éphémère.
Vos espoirs pour demain sont irréalisables et vos moyens puérils ; mais, si vous confondez, ange enfant, le rêve avec la vie, du moins vos rêves sont des sourires de beauté et dissipent les songes des réformateurs vils, cauchemars écrasants pour tout esprit un peu noble. […] Mais nos opinions sur la beauté sont diverses. […] Prenant pour laideur toute beauté expressive et insoucieux de régler ou d’exalter le dedans, il aime dans le geste, non ce qu’il peut révéler de calme noblesse ou de générosité fougueuse, mais la seule beauté précise et presque immobile de la ligne. […] Ils vont au christianisme « inventé par les esclaves », au christianisme qui a « ravalé jusqu’à la plus honteuse barbarie le monde gréco-romain, effaçant tout vestige de raison et de beauté » ; au christianisme qui a « posé sur l’univers, comme une chape de plomb, son manteau de folie et de laideur ». […] Le procédé donne la liberté de ne pas choisir ; permet d’être soi en toute richesse complexe, sans souci d’harmonie ; autorise l’impudeur d’étaler sa beauté et ses verrues.
Il y a eu là un Chateaubriand primitif, et, selon moi, le plus vrai en sentiment comme en style, un Chateaubriand d’avant Fontanes, mais qui offre, avec des beautés uniques, les plus étranges disparates et un luxe de sève, une extravagance de végétation qu’on ne sait comment qualifier. […] Et pourtant, malgré l’affectation générale du style, qui répond à celle du caractère, malgré une recherche de fausse simplicité, malgré l’abus du néologisme, malgré tout ce qui me déplaît dans cette œuvre, je retrouve à chaque instant des beautés de forme grandes, simples, fraîches, de certaines pages qui sont du plus grand maître de ce siècle, et qu’aucun de nous, freluquets formés à son école, ne pourrions jamais écrire en faisant de notre mieux. […] Par la nature de défauts qu’il démêle si bien dans les Mémoires et par les beautés de premier ordre qu’il y relève aussi, il me paraît résumer toute la vérité sur l’ensemble. […] Il ne serait pas difficile, si l’on avait l’espace, de justifier ces remarques générales par un grand nombre d’exemples ; et tout à côté, pour rester dans le vrai, on citerait de ces paroles qui semblent couler d’une lèvre d’or, et qui rappellent l’antique beauté avec le sentiment moderne, c’est-à-dire le genre de beauté propre à M. de Chateaubriand, celle où il est véritablement créateur. […] C’est de lui que viennent comme de leur source les beautés et les défauts que nous retrouvons partout autour de nous, et chez ceux même que nous admirons le plus : il a ouvert la double porte par où sont entrés en foule les bons et les mauvais songes.
Il nous la peint dès ce temps-là d’un caractère égal et uni en tout, « fort belle et d’une beauté qui plaît toujours » . […] La voilà donc à dix-sept ans (1652), dans sa première fleur de beauté, mariée à un mari infirme et qui ne pouvait lui être de rien, au milieu d’une société joyeuse et la moins scrupuleuse de propos comme de mœurs : il lui fallut tout un art précoce et un sentiment vigilant pour se faire considérer et respecter de cette jeunesse de la Fronde. […] Représentons-nous-la, en effet, dans cette beauté première que Mlle de Scudéry nous a décrite fidèlement : Lyriane (c’est Mme Scarron, qui est censée, dans Clélie, la femme du Romain Scaurus), Lyriane était grande et de belle taille, mais de cette grandeur qui n’épouvante point, et qui sert seulement à la bonne mine. Elle avait le teint fort uni et fort beau, les cheveux d’un châtain clair et très agréable, le nez très bien fait, la bouche bien taillée, l’air noble, doux, enjoué et modeste ; et, pour rendre sa beauté plus parfaite et plus éclatante, elle avait les plus beaux yeux du monde. […] Les hommes me suivaient parce que j’avais de la beauté et les grâces de la jeunesse.
Conception de la beauté. […] A côté du désir sexuel, il y a place pour l’amour véritable, né d’une émotion esthétique en présence de la beauté soit physique soit morale. […] La Beauté lui tient lieu de toute autre vertu. Sur la conception indigène de la beauté physique, les contes renferment peu de détails. […] Le conteur, pour flatter l’Européen, prendrait comme type de la beauté pure les traits de la race blanche.
Elle a senti les beautés et les laideurs des œuvres, ce qui n’est que le premier degré de l’intelligence, et, après les avoir senties, elle les a décrites et caractérisées, ce qui n’est encore que le second. […] » dit-il, avec un charmant rapport de vérité, et il ajoute excellemment, pour conclure une thèse soutenue avec une raison étincelante : « L’immense supériorité du monde moderne sur le monde antique, c’est, tout en gardant la beauté physique, de l’avoir reconciliée avec la beauté morale », et rien n’est plus vrai. […] Mais elles n’en sont pas moins des pastels ravissants de chasteté d’attitude, de regards baissés, de rougeurs d’aurore, de beauté bien à elles, de beauté vraie, à éteindre et à effacer toutes les parures, tous les diamants, tous les maquillages de la terre ! […] sur le Byron d’Aubryet et sur sa superbe notion de la supériorité poétique de l’Angleterre, qui est de la beauté la plus vraie et de la plus belle vérité… IX Dans les circonstances actuelles de la vie d’Aubryet, de telles pages, dignes d’être admirées en tout temps, deviennent prodigieuses.
En un mot, si André Chénier eût vécu, je me figure qu’il aurait pu être le grand poëte régnant depuis 95 jusqu’en 1803 ; réaliser admirablement ce que son frère, et Le Brun, et David dans son genre, tentèrent avec des natures d’artiste moins complètes et avec une sorte de sécheresse et de roideur ; exprimer poétiquement, et sous des formes vives de beauté, ce sentiment républicain à la fois antique et jeune, qui respire dans quelques écrits de Mme de Staël à cette époque, et surtout dans sa Littérature considérée par rapport à la Société. […] Ingres, quelque chose d’isolé, de sincère, de pénétrant à la longue, de chaste en beauté, d’un peu froid par rapport au temps présent, mais, au fond, empreint de qualités impérissables. […] Et puis, comme l’art a mille faces possibles, et qu’aucune n’est à supprimer quand elle correspond à la nature, il y aura toujours lieu à des talents et à des œuvres qui exprimeront des sentiments plus isolés, plus à part des questions flagrantes, et s’inquiéteront, en les exprimant, de la beauté calme et juste, de la perfection de la pensée et de l’excellence étudiée du langage : ce seront ceux de la même famille qu’André.
Et cette âme de la nuit est encore une femme aux beautés magnifiques, mais un spectre silencieux. […] Quelques-unes de ses poésies, grâce à leur personnalité et à leur beauté, le désignent à ma profonde admiration, et son caractère fier et simple me le fait aimer. […] Léon Deschamps Le poète dont la vie fut noblement acquise à l’art, celui dont l’œuvre témoigne d’un inquiétant souci de beauté souveraine, est M.
— supérieure en beauté à ce qu’il y a de plus beau dans Shakespeare. […] À ce point de vue, ni Maleine, ni les sœurs, dans l’Intruse, ni la jeune aveugle, ne nous suscitèrent aussi rare vision de beauté que le sommeil clos des sept sœurs, le surnaturel réveil et le cortège tragique d’Ursule morte. […] Il recherche, pour en orner sa beauté intérieure, les parures les plus habituelles et les décors les plus communs.
Soit préjugé d’éducation, soit habitude d’errer dans les déserts, et de n’apporter que notre cœur à l’étude de la nature, nous avouons qu’il nous fait quelque peine de voir l’esprit d’analyse et de classification dominer dans les sciences aimables, où l’on ne devrait rechercher que la beauté et la bonté de la Divinité. […] Lorsqu’on n’a point de religion, le cœur est insensible, et il n’y plus de beauté : car la beauté n’est point un être existant hors de nous ; c’est dans le cœur de l’homme que sont les grâces de la nature.
Selon lui, les beautés du goût de toutes les nations doivent être conservées : mais il ne juge pas qu’il en soit de même de certaines beautés locales, que des allusions, à des usages particuliers, empêchent d’être senties partout, & rendent le plus souvent des énigmes insipides. […] Est-ce en vers, est-ce en prose qu’il faut les traduire, pour en faire sortir toutes les beautés ? […] Ils les jugeoient les plus cruels fléaux de la vérité & des beautés originales.
Il en parle comme d’une beauté, pour ainsi dire, aussi inherente aux vers qu’il cite, que la beauté qui résultoit du sens qu’ils renferment, et du choix des mots dont ils sont composez. […] Ce chant en étoit toujours plus grave, mais il en avoit moins de beauté et moins d’expression. […] Ainsi les quinze cordes de la musique ancienne entrerent dans le chant gregorien, et tout le monde a trouvé que le chant grégorien surpassoit tellement en beauté le chant ambroisien, que dès le temps de nos rois de la seconde race, les églises des Gaules quitterent l’usage du chant ambroisien pour y substituer le chant grégorien.
Dans quelque temps que ce pût être, cette grande figure historique, enfoncée et comme perdue en des chroniques qu’on ne lit plus, mais entrevue d’abord et finalement déterrée, aurait passionné de sa beauté singulière toute imagination qui serait restée poétique sous les formes sévères et sobres de l’histoire et de l’érudition. […] L’Histoire gagne en beauté humaine et en moralité sensible lorsqu’elle montre à travers la chaste amitié de Mathilde, qui l’adoucit, mais ne la change pas, cette tête moïsiaque d’Hildebrand, toujours plus haute que les calomnies qui veulent monter jusqu’à elle, et qui les domine de son impassible majesté. […] Renée s’est contenté de le signaler, mais il ne pouvait le prendre et il ne l’a pas pris, et c’est ainsi que son œuvre a payé de sa beauté, un peu diminuée, un reste de rationalisme dans les jugements de l’historien. […] Et lui, Renée, lui qui a le goût et le sens, ces deux grands avertissements critiques, ces deux consciences de ce qui fait la force et la beauté littéraires, a-t-il donc pu oublier que, pour écrire l’histoire de Grégoire VII, presque autant que pour la penser, il faut avoir en soi cet absolu que Grégoire avait dans le génie, dans le caractère, dans la foi, et que ceux qui ne l’ont pas dans la pensée ne peuvent s’empêcher d’admirer ?
Et cependant l’admiration que nous avons pour le grand poète saigne dans nos cœurs quand nous voyons, en ses Mémoires, cette glace d’une magique beauté mais qui nous l’a tant rapetissé en le réfléchissant, qu’il eût pu, s’il avait voulu, arracher encore aux riens de son existence de dandy assez d’heures pour achever le Don Juan, ou pour nous écrire quelque autre poème comme Lara ou le Giaour. […] L’auteur de Guy Livingstone est idéal de sentiment et d’expression, de société et de caractère, dans un temps où nous nous mourons du mal de cœur de la réalité, qu’on nous donne pour l’art ou la vie ; il est idéal parce qu’il est un byronien d’abord et ensuite un dandy, préoccupé, comme tout dandy, de la beauté des attitudes de son orgueil ; il l’est encore parce que tous les caractères de son roman sont pris dans un milieu humain et social exceptionnel, parce que le high life est la vie des classes supérieures, qui valent mieux que les autres de cela seul (comme le mot le dit) qu’elles sont au-dessus. […] Le Satan de Milton ne se repent point, ni Lovelace non plus, ni les héros de Byron, ni personne ; mais Livingstone, lui, a la beauté morale suprême, la beauté de l’humilité et du repentir.
Et cependant l’admiration que nous avons pour le grand poëte saigne dans nos cœurs quand nous voyons, en ses Mémoires, cette glace d’une magique beauté, mais qui nous l’a tant rapetissé en le réfléchissant, qu’il eût pu, s’il avait voulu, arracher encore aux riens de son existence de dandy assez d’heures pour achever le Don Juan ou pour nous écrire quelque autre poème, comme Lara ou le Giaour. […] L’auteur de Guy Livingstone est idéal de sentiment et d’expression, de société et de caractère, dans un temps où nous nous mourons du mal de cœur de la réalité, qu’on nous donne pour l’art ou la vie ; il est idéal, parce qu’il est un byronien d’abord et ensuite un dandy, préoccupé, comme tout dandy, de la beauté des attitudes de son orgueil ; il l’est encore parce que tous les caractères de son roman sont pris dans un milieu humain et social exceptionnel, parce que la high life est la vie des classes supérieures qui valent mieux que les autres, de cela seul (comme le mot le dit) qu’elles sont au-dessus. […] Le Satan de Milton ne se repent point, ni Lovelace non plus, ni les héros de Byron, ni personne ; mais Livingstone, lui, a la beauté morale suprême, la beauté de l’humilité et du repentir.
En général, elle méprisa presque toutes les conventions, celles de la beauté, comme de la grandeur. […] Ce n’est que par degrés que le goût vient les polir ; et quand ce goût est arrivé, ils ont déjà assez de connaissances et assez d’art pour substituer des beautés grandes et correctes, à ces premières beautés inexactes, mais fières. Il n’en est pas de même, quand, chez un peuple, l’esprit d’imitation et un goût puisé chez les modèles, succèdent tout à coup et presque sans degrés à la barbarie : alors les écrivains n’ont ni la vigueur originale et brute dont ce goût d’imitation les éloigne, ni les beautés solides et vraies auxquelles ils n’ont pas eu le temps d’atteindre, et qui sont presque toujours le résultat de la philosophie et des passions mêlées ensemble.
Il y a eu un public pour comprendre ce qui fait la beauté des Propylées et la supériorité des sculptures du Parthénon. […] Un excellent architecte avec qui j’avais voyagé avait coutume de me dire que, pour lui, la vérité des dieux était en proportion de la beauté solide des temples qu’on leur a élevés. […] ô beauté simple et vraie ! […] Tard je t’ai connue, beauté parfaite. […] Elle faisait ce qu’elle pouvait pour cacher sa beauté.
Je crois même qu’à titre de pièce achevée et accomplie, de tragédie parfaite offrant le groupe dans toute sa beauté, il mettait Iphigénie au-dessus des autres, et la qualifiait le chef-d’œuvre de l’art sur notre théâtre. […] Guillaume de Schlegel, dans laquelle il compare la Phèdre de Racine et celle d’Euripide ; il y exprime admirablement le genre de beauté de celle-ci, ce caractère chaste et sacré de l’Hippolyte, qu’il assimile avec grandeur au Méléagre et à l’Apollon antiques. […] Sans doute la tragédie française, si l’on excepte Polyeucte et Athalie, n’est pas exactement du même ordre que l’antique ; celle-ci égale la beauté et l’austérité de la statuaire ; elle nous apparaît debout après des siècles, et à travers toutes les mutilations, dans une attitude unique, immortelle. […] Mais là aussi se retrouvent la vérité, l’élévation, un genre de beauté ; seulement il s’agit presque d’un art différent. […] Un organe pur, encore vibrant et à la fois attendri, un naturel, une beauté continue de diction, une décence tout antique de pose, de gestes, de draperies, ce goût suprême et discret qui ne cesse d’accompagner certains fronts vraiment nés pour le diadème, ce sont là les traits charmants sous lesquels Bérénice nous est apparue ; et lorsqu’au dernier acte, pendant le grand discours de Titus, elle reste appuyée sur le bras du fauteuil, la tête comme abîmée de douleur, puis lorsqu’à la fin elle se relève lentement, au débat des deux princes, et prend, elle aussi, sa résolution magnanime, la majesté tragique se retrouve alors, se déclare autant qu’il sied et comme l’a entendu le poëte ; l’idéal de la situation est devant nous. — Beauvallet, on lui doit cette justice, a fort bien rendu le rôle de Titus ; de son organe accentué, trop accentué, on le sait, il a du moins marqué le coin essentiel du rôle, et maintenu le côté toujours présent de la dignité impériale.
La Messiade de Klopstock, à travers une foule innombrable de défauts, de longueurs, de mysticités, d’obscurités inexplicables, contient des beautés du premier ordre. […] Les tragédies allemandes, et en particulier celles de Schiller, contiennent des beautés qui supposent toujours une âme forte. […] Après avoir parcouru les principales beautés de la littérature des Allemands, je dois arrêter l’attention sur les défauts de leurs écrivains, et sur les conséquences que ces défauts pourraient avoir, si l’on ne parvenait pas à les corriger. […] J’ai déjà tâché de faire sentir, en analysant Shakespeare, que ses beautés ne pouvaient être égalées que par un génie semblable au sien, et que ses défauts devaient être soigneusement évités. […] Quelques-uns d’entre eux craignant ce reproche, dont les Anglais se glorifient, veulent imiter en littérature le goût français ; et ils tombent alors dans des fautes d’autant plus graves, qu’étant sortis de leur caractère naturel, ils n’ont plus ces beautés énergiques et touchantes qui faisaient oublier toutes les imperfections.
Après tout, ôtez le ciel d’Italie et le costume de Procida, ce n’est qu’une aventure de grisette, embellie et idéalisée par l’artiste, élevée après coup aux proportions de la beauté, mais une de ces aventures qui ne laissent que trop peu de traces dans la vie, et qui ne se retrouvent que plus tard dans les lointains de la pensée, quand le poète ou le peintre sent le besoin d’y chercher des sujets d’élégie ou de tableau. […] Les défauts qui y circulent, et qui souvent y débordent, sont précisément les défauts de notre temps, c’est-à-dire ceux auxquels les lecteurs ordinaires sont le moins sensibles, tellement que quelques-uns vont peut-être jusqu’à y être sensibles dans un sens inverse et à y voir des beautés. […] Pour moi qui, en qualité de critique, suis de ce lendemain plus que je ne veux, je me demande, après avoir lu Raphaël non pas s’il y a assez de beautés pour nous toucher çà et là et pour ravir les jeunes cœurs avides et qui dévorent tout ; mais je me demande si les esprits devenus avec l’âge plus délicats et plus difficiles, ceux qui portent en eux le sentiment de la perfection, ou qui seulement ont le besoin du naturel jusque dans l’idéal, ne sont pas arrêtés à tout moment et ne trouvent pas, à cette lecture, plus de souffrance de goût que de jouissance de cœur et d’émotion véritable. Je ne ferai que courir sur la préface dans laquelle Raphaël, ce meilleur ami de l’auteur, nous est représenté et décrit dans les moindres détails de sa beauté avec plus de coquetterie et d’application, mais avec moins d’agrément, selon moi, que nous n’en avons vu l’autre jour à cette jolie Mme de Courcelles s’asseyant devant son miroir. […] L’auteur, en essayant d’appliquer à son héros le type de beauté du grand peintre d’Urbin, a oublié une seule chose ; c’est que la première, la souveraine impression que fait sur nous la vue d’une figure de Raphaël, est une impression de pureté virginale et de chasteté.
Il nous le montre beau, à vingt ans, assis au bord d’une prairie, à côté de sa maîtresse endormie, et protégeant, comme l’ange, son sommeil : Le voilà, jeune et beau, sous le ciel de la France… Portant sur la nature un cœur plein d’espérance, Aimant, aimé tous, ouvert comme une fleur ; Si candide et si frais que l’Ange d’innocence Baiserait sur son front la beauté de son cœur. […] Mais, dans ces compositions de suprême et un peu froide beauté, le poète n’a pas la passion en lui ; il attend le mouvement du dehors, il reçoit successivement ses impressions de la nature ; il se contente d’y porter une disposition grave, noble, sensible, mais calme, comme un miroir légèrement ému. […] Il se retrouve plus sensible qu’auparavant aux innombrables beautés de l’univers, à la verdure, aux fleurs, aux rayons du matin, aux chants des oiseaux, et il porte aussi frais qu’à quinze ans son bouquet de muguet et d’églantine. […] Je ne viens point jeter un regret inutile Dans l’écho de ces bois témoins de mon bonheur : Fière est cette forêt dans sa beauté tranquille, Et fier aussi mon cœur. […] Après tant d’essais et d’expériences en tous sens, après avoir tenté d’aimer tant de choses pour savoir quelle est la seule et suprême qui mérite d’être aimée, c’est-à-dire la vérité simple et à la fois revêtue de beauté, il n’est pas étonnant qu’au moment où l’on revient à celle-ci et où on la reconnaît, on se trouve en sa présence moins vif et plus lassé qu’on ne l’était en présence des idoles.
La beauté du ciel, des bois et des rivières de la terre française lui fournit des motifs en supplément pour accomplir son devoir. […] Sous ce langage insuffisant et délicieux (on dirait une mauvaise traduction du Cantique des Anges), je vois et j’admire combien la discipline de la guerre a vaincu dans les jeunes cœurs les ferments d’anarchie auxquels nous trouvions tant de beauté, jadis. […] Je crois en la beauté, en la jeunesse, en la vie. […] Ils en épanouissent la beauté et nous en rendent le parfum sans avoir eu le temps de se roidir pour devenir des individus. […] Quand je parle des Marie-Louise de la France, combien je suis loin d’épuiser ce sujet d’une déchirante beauté !
Ainsi que le titre l’indique, les poèmes de ce recueil sont une suite de cantiques à la gloire de l’homme, de l’Homme dernier-né des dieux, qui a vénéré autrefois, dans les religions sublimes, les beautés de sa propre pensée, et rend aujourd’hui à cette pensée même l’hommage qui lui est seul dû. […] Ceux qui aiment les « Vers d’un Philosophe » de Guyau et les strophes d’Alfred de Vigny se plairont à lire ce livre, où, malgré quelques prosaïsmes, telles pages, les dernières, par exemple, sont empreintes d’une sobre beauté.
Ne vous sentez-vous pas divinisés devant une poésie, une musique, une peinture, une statue, un temple dont la beauté vous élève de la fange à l’idéal Ne vous écriez-vous pas : C’est divin ! […] Il éloignait les vices, il n’enfantait pas la beauté ; il avait un pinceau, il n’avait point d’âme. […] L’Italie s’était emparée de son imagination : ses yeux étaient le miroir de cette terre de la lumière et de la beauté ; son âme entière n’était qu’une transfiguration de l’Italie en amour et en culte. […] Et Raphaël ne mourut-il pas lui-même d’admiration pour la beauté plébéienne de la Fornarina ? […] Sa sœur aînée, Maria Grazia, femme d’un autre bandit emprisonné ou supplicié à Naples, était aussi renommée à Rome par sa beauté que par son caractère.
C’est de cette dernière image, qui a sa beauté aussi, dont on se souvient. » Nous avons eu le bonheur de les connaître à leur plus frais moment de jeunesse, de beauté et d’épanouissement, tous ces poètes de la pléiade moderne dont on ne connaît plus le premier aspect. […] Cependant nous n’étions pas dénués de sculpteurs qui essayaient d’introduire la vérité dans l’idéal et de rapprocher la beauté de la nature. […] Madame Gay, qui fut plus tard madame Delphine de Girardin, et qui était déjà célèbre comme poétesse, attirait les yeux par sa beauté blonde. […] Les prétendus défauts se transforment en beautés, et tel s’étonne de pleurer là où il riait et de s’enthousiasmer à l’endroit qu’il sifflait. […] Quoique dès lors elle eût passé l’âge qu’on appelle jeunesse pour les autres femmes, elle était de la plus étonnante beauté.
Il croit que l’honnêteté de l’âme est nécessaire à la beauté de l’œuvre. […] Je parais tous ces jeunes hommes qui m’entouraient de mes sentiments d’héroïsme, de gloire et de beauté. […] Toute créature de l’univers possède de la grâce, contient une parcelle de beauté. […] Si subtil écrivain, si érudit connaisseur, si délicat styliste que l’on soit, c’est le devoir du poète de ne jamais se désintéresser des affaires nationales, de ne jamais abdiquer ce rôle sublime de professeur de beauté, non seulement de beauté plastique, mais aussi de beauté morale. […] Le plus humble des hommes, le plus modeste des artisans, sont égaux devant le poète et devant la beauté.
Paul Valéry est le représentant d’un art d’exception, d’une poésie restreinte à une élite et à l’expression de beautés mystérieuses… M. […] On n’isole pas impunément de la vie l’essence de toute beauté… Nous rêvons, je crois, d’un autre art, plus large, plus humain, avec des libres correspondances dans la nature et dans l’homme.
Comment concilier l’image de la beauté avec les convulsions de la colère et de la féroce rage ? […] Telles sont les beautés qui demeurent toujours originales, et qu’il faut savoir ou créer ou reproduire avec art dans la poésie épique. […] « Rien, rien de cette scène en beautés si féconde, « Ne se peint dans ces yeux où se peignait le monde. […] Cet ordre de chants totalement graves y fait régner l’ennui, malgré les beautés majeures qui prédominent par intervalles. […] Tout ce luxe, tout ce fard italien a quelquefois terni les plus réelles beautés des discours du Tasse.
Brassolis était la beauté de la plaine, et Grudar l’ornement de la colline. […] Loclin fut consumé du feu de ta colère dans cet âge où ta beauté le disputait à celle de nos jeunes filles. […] Le vent jouait dans ses cheveux dénoués ; ses joues de rose étaient couvertes de pleurs : « Fille de la beauté, lui dis-je avec douceur, d’où viennent tes soupirs ? […] « — Viens te placer, lui dis-je, à l’abri de mon bouclier, et rassure-toi, beauté ravissante. […] Belle qui me fus si chère, viens réjouir mon âme du doux aspect de ta beauté. » « Mille harpes et mille voix unirent leurs sons mélodieux.
Les défenseurs d’Homere, en avouant une partie de ses défauts, ne tarissent point sur ses beautés. […] Il a écarté les imperfections, & ne s’est attaché qu’aux beautés. […] Elle vient encore plus de ce qu’il a donné à tant de sujets différens la beauté propre à chacun. […] C’étoit une copie qu’on pouvoit admirer, après même qu’on avoit senti les beautés de l’Original. […] On ne s’est accordé qu’à louer la beauté de l’édition, & l’élégance des figures gravées aux dépens du Roi.
L’artiste, doublé nouvellement du chrétien dans Paul Féval, a élevé le tout à un idéal de beauté qui prouve que le talent est déjà chez lui transfiguré par la Foi. […] L’utilitarisme, en religion, est aussi bas qu’en autre chose… Il n’y a de beau et même d’utile, puisqu’on aime ce mot et cette idée-là, mais d’utile dans le sens infini, que ce qui est beau, toujours plus beau, que ce qui se rapproche le plus de la Beauté Éternelle ! […] Mais le rire y est désarmé par la charité du chrétien, et les larmes y ont la beauté pure des larmes chrétiennes. […] C’est là ce qui, pour nous, en fait la vérité, l’originalité, la beauté, la hardiesse. […] Ce qu’il faut admirer, c’est son courage et la beauté de son livre.
Il publia en 1801 son Tableau de l’Agriculture toscane, dans lequel, à côté des détails précis, techniques et tels que les peut désirer tout lecteur propriétaire rural, se trouvent des peintures véritables inspirées par la beauté des lieux, et qui ne se rencontreront plus jamais ensuite sous sa plume. […] J’y distingue trois beaux morceaux, trois paysages : l’un intitulé les Champs ; l’autre, la Beauté des collines ; et le troisième, Description d’une petite métairie. […] Ce genre de beauté est aussi celui des plaines toscanes, et elles le possèdent au plus haut degré : « Mais, ajoute l’agronome amateur, les collines qui s’élèvent autour d’elles unissent les grâces à l’opulence et étalent les trésors de la campagne comme un accessoire seulement des charmes de la perspective. […] Les bois de châtaigniers qui couronnent les collines, et qui quelquefois les traversent en descendant le long des torrents, contrastent agréablement avec l’olivier par la beauté de leur verdure, l’étendue de leurs rameaux et la majesté de leur forme. […] La montagne est étincelante ; si l’on abaisse les regards sur quelque vallon, il forme un lac de lumière ; la terre entière paraît électrisée et pétillé de toutes parts. » « L’hiver, auquel la neige est inconnue, présente aussi ses beautés : le gazon conserve sa verdure ; il est même émaillé de fleurs dont quelques-unes mériteraient une place dans les jardins, comme différentes anémones, toutes les espèces de narcisses, les jacinthes, les ellébores, etc.
Rousseau lui-même, quoique ce soit là une beauté dans son genre et taillée sur le patron de son idéal, sent bien le défaut. […] Elle s’exalte et se monte la tête sur la pureté de sa passion, sur la beauté du motif qui l’anime. […] René, qui se flatte si fort de s’être séparé de son célèbre devancier, s’est écrié tout comme lui dans Les Natchez : « C’est toi, Être suprême, source d’amour et de beauté, c’est toi seul qui me créas tel que je suis, et toi seul me peux comprendre ! […] Il n’a pas seulement jeté l’enchantement sur la passion, il a su, comme l’a dit Byron, donner à la folie l’apparence de la beauté, et recouvrir des actions ou des pensées d’erreur avec le céleste coloris des paroles. […] Elle justifie ce qu’a remarqué si bien Byron : l’amour de Rousseau n’était pour aucune femme vivante, ni pour une de ces beautés d’autrefois, que ressuscitent les rêves du poète.
Coupeau, gouailleur, bon enfant les yeux gais et le nez camus, un peu niais en plusieurs occasions, se trouve montré tel dans sa cour auprès de Gervaise, et résumé de même par ces mots : « avec sa face de chien joyeux » ; aux premiers chapitres du Ventre de Paris est décrite la beauté calme de Lisa, puis des actes, de raisonnable placidité, double trait que condense encore cette apposition répétée « avec sa face tranquille de vache sacrée » : Saccard, brûlé de toutes les lièvres et de toutes les cupidités, est sans cesse suivi des adjectifs « grêle, rusé, noirâtre », comme Renée, possède cette « beauté turbulente » qui concentre la physionomie ardemment avide de joie, et les passions à subites sautes, de celle dont les faits d’égarement tiennent tout le volume. La force d’Eugène Rougon, la noble beauté de Mme Grandjean, la séduction d’Octave Mouret et la douce fermeté de Denise, sont ainsi empreints en une effigie, marqués par des faits et résumés en une phrase. […] Gervaise raisonnable et fraîche, au début de l’Asommoir, est aimable ; Mme Hédouin illumine de sa beauté de femme de tête l’ignoble bourgeoisie de Pot-Bouille ; Denise pousse à bout la raison vertueuse ; et l’héroïne de la Joie de vivre est de même une fille sensée, forte et savante. […] Tout le second livre de la Faute célèbre la beauté de l’accouplement. […] Dans Son Excellence, à la force mâle de Rougon, la souple beauté de Clorinde Balbi fait contre-poids.
Le grand Gœthe, le maître de la critique, a établi ce principe souverain qu’il faut surtout s’attacher à l’exécution dans les œuvres de l’artiste, et voir s’il a fait, et comment il a fait, ce qu’il a voulu : « Il en est beaucoup, disait-il, qui se méprennent, en ce qu’ils rapportent la notion du beau à la conception, beaucoup plus qu’à l’exécution des œuvres d’art ; ils doivent ainsi, sans nul doute, se trouver embarrassés quand l’Apollon du Vatican et d’autres figures semblables, déjà belles par elles-mêmes, sont placés sous une même catégorie de beauté avec le Laocoon, avec un faune ou d’autres représentations douloureuses ou ignobles. » Il y a donc, selon lui, une part essentielle de vérité, qui entrait dans les ouvrages des anciens, dans ceux qu’on admire et qu’on invoque le plus, et c’est cette part de vérité, cette nature souvent crue, hideuse ou basse, moins négligée des anciens eux-mêmes qu’on ne l’a dit, qu’il ne faut point interdire aux modernes d’étudier et de reproduire : « Puisse, s’écriait Gœthe, puisse quelqu’un avoir enfin le courage de retirer de la circulation l’idée et même le mot de beauté (il entend la beauté abstraite, une pure idole), auquel, une fois adopté, se rattachent indissolublement toutes ces fausses conceptions, et mettre à sa place, comme c’est justice, la vérité dans son sens général ! » En France et dans notre société, c’est moins encore l’idée de beauté que celle de morale qui fait ce même office de pavé accablant, et dont on s’arme sans cesse, qu’on jette à la tête de tout nouveau venu, avec une vivacité et une promptitude qui ne laissent pas d’être curieuses, si l’on songe à quelques-uns de ceux qui en jouent de la sorte.
Sourds aux sollicitations du monde qui leur demande des beautés harmonieuses à l’idéal enfantin, ils passent, doux et graves, déléguant aux parvis célèbres les solliciteurs, et traversent dans l’exil de leur pensée les joies et les douleurs tumultueuses. […] D’abord l’art, en toutes ses manifestations, est essentiellement « l’aspect en beauté » des idées religieuses d’une race et d’une époque vivantes. […] Mais cette contre-facon elle-même de la foi est usée et si les Naturalistes ont pu se passer de toute religion comme ils se sont privés de toute beauté, que vont faire ceux qui viennent ? Ils ont tous ce double trait commun : un sentiment très vif de la Beauté et un furieux besoin de Vérité.
Non, il se maria tard, dans sa beauté mûrie, et distribua ses jours entre la Méditation et la Nature, entre l’amour sans trouble du mariage et les vigilances tendres et lucides de la paternité. […] » Riche par le fait de son énergie, il employa sa fortune à former des relations nécessaires à son ambition sans turbulence, et il avait dès lors, nous dit son biographe, « l’aplomb de la richesse et de la beauté », ces deux choses qui font d’ordinaire perdre leur équilibre aux hommes ! […] Ensorcellement par la beauté, par la grandeur, par le charme, enfin, du génie, plus que par la vérité qu’on lui doit ! Si, vous autres savants, vous vous laissez entraîner ainsi hors du vrai limité, impérieux, immuable, que voulez-vous que nous devenions, nous, devant les beautés littéraires de cet homme qui fut certainement, en définitive, plus un grand artiste dans l’ordre scientifique qu’un savant !
L’Histoire n’a pas perdu une seule des paroles du soldat devenu prophète, et elles ont une beauté grandiose : « Dieu — dit-il — vous a frappé à la bouche, Sire (le couteau avait glissé, en remontant, jusqu’à la lèvre), parce que vous ne l’avez encore renié que débouché. […] Après Lamartine, c’est du de Musset aux grâces charmantes : Tu m’avois demandé, mignonne, De Paris quelque nouveauté : Le nouveau plaist à ta beauté, C’est la nouveauté qui m’estonne ! […] Que di-je, je ne pouvoy’ mieux Pour monstrer ensemble à tes yeux, Mon feu, ta beauté merveilleuse. […] Lyrique, élégiaque, didactique (car il y a, toujours dans le troisième volume de ses Œuvres, un poème didactique de QUINZE chants intitulé L’Univers), ce magnus parens dans l’Histoire littéraire avait l’étoffe de tout, — mais remploi de l’étoffe qui est l’Art, qui est le fini, qui est la beauté accomplie, lui manquait.
Les joueurs aiment à appeler une partie du nom de bataille, ils livrent combat au hasard ; un coup heureux est une victoire ; un coup malheureux est une défaite, et quand ils ont tenu longtemps, quand ils se sont obstinément, stupidement acharnés à se ruiner, ils se donnent le mérite d’une héroïque résistance et ne sont pas bien sûrs de n’avoir pas déployé la même espèce de courage que Wellington à Waterloo : s’ils nommaient les choses par les mots propres, peut-être auraient-ils moins de complaisance pour leur passion ; du moins elle ne se colorerait pas à leurs yeux d’une telle beauté ; ils céderaient peut-être autant, ils s’en feraient moins honneur. […] Il n’est point une image, point une exclamation, une apostrophe, une prosopopée qu’on en puisse faire disparaître sans dommage : ce n’est pas la forme qui en souffrirait dans son élégance ou sa beauté, c’est surtout le fond, qui ne serait plus suffisamment exprimé, et quelque chose manquerait à la clarté lumineuse ou à l’énergie persuasive du discours. […] Il n’y aurait point d’images, de métaphores, de grands mouvements de style, qui me donneraient de Turenne une idée plus haute, plus complète, qui me le feraient mieux voir et plus admirer, que le très sobre portrait que Bussy-Rabutin en a tracé : c’est comme une ligne légère et ferme qui, par un léger relief, exprime toute la vie et toute la beauté du modèle.
d) Personnages : a′) extérieur : * Simples ; beauté, laideur absolues ** Doubles ; beauté sinistre, laideur bonne *** Beaux costumes, belles loques, coloris b′) intérieur : * Âmes simples à répétition d’actes ** Âmes doubles à actes antithétiques *** Âmes doubles par volte-faces subites c) Sujets abstraits : a′) Vers à propos de rien, sujets nuls b′) Sujets indifférents, vers à propos de tout, versatilité c′) Développement de lieux communs d′) Humanitarisme, socialisme, optimisme, idéalisme et panthéisme vagues e′) Aspects grandioses, mystérieux ou bizarres, de la légende, de l’histoire ou de la vie. […] Beauté des lieux et des milieux.
Il tourne son âme inquiète vers le Ciel : quelque chose lui dit que c’est là qu’habite cette souveraine beauté après laquelle il soupire : Dieu lui parle tout bas, et cet homme du siècle, que le siècle n’avait pu satisfaire, trouve enfin le repos et la plénitude de ses désirs dans le sein de la religion. […] « Vous êtes infiniment grand, dit-il, infiniment bon, infiniment miséricordieux, infiniment juste ; votre beauté est incomparable, votre force irrésistible, votre puissance sans bornes. […] Mais saint Cyprien imite presque partout Tertullien, en affaiblissant également les défauts et les beautés de son modèle .
Comme le sublime auteur de la Vénus de Milo, il sait nous faire voir la beauté nue innocemment. […] Aussi, un certain âge passé, Télémaque n’est-il guère lu, quoiqu’il soit plein de beautés appropriées aux esprits mûrs. […] Il y a même plus d’un endroit où ce mélange a produit les plus grandes beautés. […] Telles sont les beautés du Télémaque comme ouvrage d’éducation. […] Une statue qui rappelle la beauté noble et naïve de la statuaire grecque donne à l’artiste qui la crée le premier rang dans les arts.
Ils lui demandent combien de fois il a gémi de sacrifier au goût de la nation, de ne pouvoir pas déployer toutes les beautés neuves, mâles & sublimes que lui présentoit son génie. […] Mais qu’en peut-on conclure en Europe, contre un usage dont l’introduction a été la source de tant de beautés, & de tant de chefs-d’œuvre de sentiment ? […] Molière a les beautés & les défauts des uns & des autres. […] Telle scène de la foire ou du théâtre Italien coûte autant quelquefois, & renferme presque autant de beautés, que telle autre scène du théâtre François, extrêmement vantée. […] Donnez-nous seulement les défauts de Corneille ; Nous vous quittons de ses beautés.
Idéal de beauté, idéal de laideur, n’importe ! […] C’est parce que chez eux, en Italie, presque toutes les femmes ont les cheveux noirs. — Réciproquement, quand les poètes célèbrent plus volontiers les beautés brunes, vous devinez qu’ils sont du Nord, climat des beautés blondes. […] D’une Grecque, célèbre par sa beauté et son esprit. […] Je reconnais qu’il y a des beautés réelles, et même des délicatesses, au milieu de ces bruyantes vulgarités ; mais peut-être que les vulgarités enterreront les beautés. […] Il n’affirmait pas la beauté du Christ : il n’avait pas encore songé à la beauté de la Vierge.
Ces langues sales gâtent la beauté de son langage. […] » On voit que les images et les expressions si contraires à la chaste pureté et à l’éternelle beauté des poésies antiques répugnaient à Pétrarque comme à Voltaire, comme à nous-même. […] L’engouement de ce siècle a élevé Dante au-dessus de ses œuvres, sublimes par moment, mais souvent barbares ; l’oubli de ce même siècle a négligé Pétrarque, le type de toute beauté de langage et de sentiment depuis Virgile. […] La beauté, la vertu, la docilité de sa fille et le caractère accompli de son gendre adoucirent les regrets de la mort d’un fils peu digne d’un tel père. […] Il rentre chez lui ; il cherche à effacer de ses yeux cette image ; il n’y peut parvenir : c’est le sortilège de la beauté ; il n’y a pas d’exorcisme qui puisse le vaincre : c’est la vision du ciel sur un visage de femme : c’est le charbon qui ne s’éteindra plus.
Le poëte vieillissant a mis ses goûts à la raison ; il s’efforce d’accepter la loi du temps, de s’y soumettre sans murmure ; lui si fier de sa chevelure de jais, si épris dans sa jeunesse de la beauté réelle et sensuelle, il en est venu aux délicatesses morales, aux subtilités mortifiées ; il célèbre, il a l’air d’aimer les cheveux blancs ; il dira, par exemple : L’AMOUR PUR. Cette beauté blanche et vermeille, Qui des heures fait des instants, Divine femme de trente ans, Dont la grâce est une merveille ; Que j’aime et trouve sans pareille ; Oh ! […] De ta fleur, acceptant l’hommage, Ils choisissent pour leur image Ton inaltérable beauté. […] Il se le disait à d’autres instants ; il savait que tout passe, que de nos jours tout poëte qui n’est pas souverain passe plus vite qu’autrefois, aussi vite que les plus fragiles beautés. […] Ton verre a réfléchi, dans leurs vives couleurs, La force et la beauté, sans rien conserver d’elles.
Il a très bien compris, et très bien dit — et dit à Scudéry même, — que le Cid est beau, en dépit des règles, et que l’objet de la poésie est le plaisir par la beauté ; il a très finement écrit — et à Corneille même — sur la prétendue vérité historique de Cinna. […] Une des préoccupations des humanistes, au siècle précédent, avait été d’étudier la structure des œuvres antiques ; et l’on en avait réduit la beauté en formules, en recettes, en règles. […] Et il manque aussi trop absolument du sens de l’art : cet élément essentiel des œuvres antiques, la beauté, il ne le découvre pas ; ces règles dont il fait tant de bruit, sont un mécanisme plutôt qu’une esthétique. […] Le soin de la forme, l’idée de la beauté furent maintenus par le respect des modèles grecs ou romains : grâce à cette influence, la littérature resta un art : et l’idée d’une vérité artistique, concrète et sensible, l’idée du vrai naturel et réel se superposa à l’idée de la vérité scientifique, nécessairement abstraite. […] La perfection des œuvres classiques consiste précisément à combiner les deux formules, esthétique et scientifique, de la littérature, de façon que la beauté de la forme manifeste la vérité du fond.
Mais l’étrange n’a-t-il pas aussi sa beauté ! Et, chez Maurice Rollinat, cette étrange beauté est saisissante et pénètre jusqu’au fond de l’âme ceux qui en ont. […] Seulement, ce ne serait pas un poète rose comme Little Moore, qui chantait l’amour et ses beautés visibles ; c’est, lui, un poète noir, qui chante ses épouvantes de l’invisible et qui nous les fait partager… Ce jeune homme, sombre comme Manfred et comme la nuit dont son cœur est l’image, s’appelle Maurice Rollinat. […] VII Eh bien, c’est cette souveraine équation entre la puissance du talent et la sincérité, qu’atteste, dans sa terrible beauté, le livre des Névroses, — même avec ses excès, ses défauts et ses indigences ; car certainement il en a, et je les connais aussi bien que vous ! […] Il y en a une surtout, parmi les pièces laissées dans ce sombre volume et qui y font tache : La Belle Fromagère, qui a produit sur certaines âmes, et c’était ces âmes-là auxquelles le poète des Névroses aurait dû tenir le plus, un effet de dégoût si profond et si invincible, que ces âmes poétiques, dignes d’apprécier les beautés et les hardiesses du livre, l’ont fermé pour ne plus jamais le rouvrir.
… Quelque chose surgirait de moi, qui était une beauté ! […] Il ne croit plus à la révolution, ne s’exalte plus pour la justice, ignore la beauté. […] Et nous passons à côté des beautés, sans les voir, sans nous y intéresser, sans nous y arrêter comme autrefois. […] Certes, sensible et vibrant à toutes les beautés, il en comprenait la poésie énorme. […] D’infâmes cosmopolites sont venus qui ont détruit à jamais cette beauté nationale !
Louise de Saxe croyait à la beauté de la révolte. […] Qui donc aujourd’hui ose encore unir l’idée de beauté à une conception de l’ordre ? […] De la considération de l’ordre je tire la beauté de la vertu, et sa bonté de l’utilité commune. […] Cette aisance souveraine, cette chaude beauté, sont pourtant l’ouvrage du temps et des hommes. […] Il nous montre à quelle beauté peuvent atteindre les jeux mêlés des idées et du style.
Malgré leur beauté de composition, c’est parmi les premières œuvres qu’on doit classer les Chansons éternelles. […] Aujourd’hui, mieux regardée et mieux comprise, c’est l’œuvre entière que j’aime en sa beauté diverse et savante, en la haute signification de son ensemble.
Corneille & Racine ont sans doute puisé dans Sophocle & dans Euripide le goût des vraies beautés théatrales ; mais, quoique Disciples des Tragiques d’Athenes, ils ont néanmoins très-souvent égalé, & quelquefois surpassé leurs modeles, & le sont devenus à leur tour. […] Les beautés de la langue Latine étoient aussi familieres au P.
Préface Esthétique de la langue française, cela veut dire : examen des conditions dans lesquelles la langue française doit évoluer pour maintenir sa beauté, c’est-à-dire sa pureté originelle. […] Gaston Paris me permettra de citer ici quelques lignes de son écriture, car elles sont une critique et elles disent ma pensée même, depuis que je les ai lues : « Sur quelques points (comme ce qui regarde l’orthographe) je ne serais pas tout à fait d’accord avec vous, et en thèse générale je ne sais si dans l’évolution linguistique on peut faire autre chose qu’observer les faits ; mais après tout dans cette évolution même toute volonté est une force et la vôtre est dirigée dans le bon sens. » Ma pensée c’est cela même, c’est que je ne suis qu’une force, aussi petite que l’on voudra, qui voudrait se dresser contre la coalition des mauvaises forces destructives d’une beauté séculaire.
Celui de Babuti beau-père de Greuze est de toute beauté ; et ces yeux éraillés et larmoyants ; et cette chevelure ; et ces chairs ; et cette vie, et ces détails de vieillesse qui sont infinis au bas du visage et autour du col ; il les a tous rendus, et cependant sa peinture est large. […] Sa tête, celle de son fils, et celle de sa femme sont d’une beauté rare.
La divine Iliade n’était entendue que des érudits, on leur enviait avec respect ce dépôt sacré ; ils insultaient impunément à nos meilleurs écrivains, l’injustice leur tournait même à honneur, parce qu’on se persuadait que les beautés modernes, comparées par eux aux merveilles antiques, leur devaient faire une impression moins vive. […] Qu’on ne dise donc plus que les beautés qu’on a senties en lisant Homère ne peuvent être parfaitement rendues en français. […] Ils n’admirent bien que les beautés des troisièmes siècles littéraires. […] J’ai marqué les erreurs de l’abbé et de son ami : ce qu’il faut dire maintenant à leur avantage, c’est qu’ils pensaient par eux-mêmes, qu’ils voyaient clair là où leur vue portait ; qu’ils avaient raison contre ceux qui prétendaient trouver dans les poèmes d’Homère un dessein moral réfléchi, et de plus une règle et un patron de composition savante pour tous les poèmes épiques à venir ; c’est enfin qu’en forçant les adversaires à déduire leurs raisons et à débrouiller leur enthousiasme, ils hâtaient le moment où l’on saurait faire les deux parts, et où l’admiration pour Homère ne serait plus qu’une libre, une vive et directe intelligence de ses beautés sans aucune servitude. […] Lorsque Homère nous montre les vieillards causeurs assis sur les murailles de Troie, au haut des portes Scées, au moment où ils vont louer la beauté d’Hélène, il les compare à des cigales harmonieuses qui chantent posées sur un arbre dans un bois, et exhalent leur voix de lis.
Lamartine De tout temps et même dans les âges les plus troublés, les moins assujettis à une discipline et à une croyance, il y a eu des âmes tendres, pénétrées, ferventes, ravies d’infinis désirs et ramenées par un naturel essor aux régions absolues du Vrai, de la Beauté et de l’Amour. […] Lamartine, vers le même temps, aima et lut sans doute beaucoup le Génie du Christianisme, René : si sa simplicité, ses instincts de goût sans labeur ne s’accommodaient qu’imparfaitement de quelques traits de ces ouvrages, son éducation religieuse, non moins que son anxiété intérieure, le disposait à en saisir les beautés sans nombre. […] Il existait avant sa passion, il s’est retrouvé après, avec ses grandes facultés inoccupées, irrassasiables, qui s’élançaient vers la suprême poésie, c’est-à-dire vers l’Amour non déterminé, vers la Beauté qui n’a ni séjour, ni symbole, ni nom : Mon âme a l’œil de l’aigle, et mes fortes pensées, Au but de leurs désirs volant comme des traits, Chaque fois que mon sein respire, plus pressées Que les colombes des forêts, Montent, montent toujours, par d’autres remplacées, Et ne redescendent jamais ! […] Dans les femmes qu’il a aimées, même dans Elvire, Lamartine a aimé un constant idéal, un être angélique qu’il rêvait, l’immortelle Beauté en un mot, l’Harmonie, la Muse. […] Cette voix chante les beautés et les dangers de la nuit, l’ivresse virginale du matin, l’oraison mélancolique des soirs ; elle devient la douce prière de l’enfant au réveil, l’invocation en chœur des orphelins, le gémissement plaintif des souvenirs en automne, quand les feuilles jonchent la terre, et qu’au penchant de la vie soi-même, on suit coup sur coup les convois des morts.
Quant au fond, l’Art poétique préjuge une grande question : y a-t-il une beauté, partant un goût absolus ? […] La raison fait donc la beauté : donc encore, la beauté sera quelque chose d’absolu, de constant, d’universel ; car ce sont là les trois caractères par lesquels les choses satisfont à la raison. Mais ainsi, la beauté sera identique à la vérité : Rien n’est beau que le vrai. […] L’imitation de la nature est le principe de la beauté dans la poésie : mais quelle nature imitera-t-on ? […] Mais il se pourrait que son naturalisme, dans lequel un rationalisme positiviste se combine avec la recherche d’une forme esthétique, et qui pose ces trois termes comme identiques ou inséparables, plaisir, beauté, vérité : il se pourrait que ce fut en somme la doctrine littéraire la plus appropriée aux qualités et aux besoins permanents de notre esprit371.
Je ne les note point comme des progrès du bien au mieux dans un genre, mais comme des beautés d’un même fonds, dont aucune ne fait ombre à l’autre. […] Cette première variété, propre à tous les chefs-d’œuvre du dix-septième siècle, est une des beautés du théâtre de Molière104. […] C’est cette ressemblance nécessaire des styles, dans la différence des sujets ou du génie particulier des grands écrivains, qui fait la beauté de notre littérature : c’est l’unité de la langue dans la diversité des écrits. […] L’art de l’écrivain supérieur est de les aller chercher au fond de nous-mêmes, où elles sont comme étouffées et assoupies par nos besoins et nos passions, et de les exprimer dans le caractère et la sévère beauté de la langue de son pays. […] L’art ne consiste pas à contenter tous les goûts, en flattant les uns par ce qui choque les autres, mais à faire que les goûts les plus différents soient d’accord de la justesse d’une pensée, de la beauté d’une expression, de la vérité d’une peinture.
Cependant, avec ses méchants habits, elle ne laissait pas d’être cent fois plus belle que ses sœurs, quoique vêtues magnifiquement. » Ainsi commence, ou à peu près, ce conte charmant de la beauté tirée de la cendre, brillante et joyeuse, comme une flamme soudaine. […] Tout d’abord, et pour commencer par le commencement, je n’aime pas ce nom de Philiberte donné à la beauté voilée et souffrante. […] Le paradoxe est flagrant ; mais, à moins d’être borgne, cagneuse ou bancale, une jeune fille ornée de deux millions trouvera cent prétendus pour célébrer sa beauté, sur tous les modes de la flatterie et du madrigal. […] Aimer sans la beauté, c’est chercher à souffrir. […] La toile tombe, et l’acte est charmant malgré toutes nos critiques ; il amuse, il intéresse, il a la beauté du diable et la gaieté de la jeunesse, et, si la suite tenait tout ce qu’il promet, nous aurions là, à coup sur, une très piquante et très agréable comédie.
C’est une aimable beauté de cœur et de génie qui nous ravit et nous touche par toutes les images connues, par tous les sentiments éprouvés, par toutes les vérités lumineuses et éternelles. […] Ses idées sur l’amour et la beauté, sur la mort et l’autre vie, sont telles que chacun les pressent, les rêve et les aime. […] La vie de campagne, la vie patriarcale de famille dans ces belles provinces qu’arrose la Saône, les hautes herbes qui ploient sous l’aquilon, les bois dont le murmure et l’ombre sont au maître, les entretiens des pâtres autour des feux allumés, ces rayons de soleil couchant sur les fléaux, les socs de charrue et les gerbes des chars, ces ombres allongées des moulins monotones, toutes ces douces géorgiques de notre France ont une beauté forte et reposée qui égale à nos yeux la splendeur blanchissante du Golfe de Gênes et les autres tableaux enchantés que l’Italie a inspirés au poète.
Aux jours de révolte, de colère et d’héroïque beauté, c’est le premier qu’on lira ; aux heures d’apaisement, d’aveux et de délices, c’est le second qui conviera avec plus de charme. […] de quelle limpide et réconfortante beauté il est, ce livre, la Clarté de vie ! […] Remontant aux sources ingénues de la Beauté, modelant sa pensée selon son rythme, il s’est révélé l’interprète de la vie intense, mêlant je ne sais quel sourire attendri à la mélancolie de paysages dont on pressent la décrépitude à l’heure des vents d’automne.
Rêver de ta beauté, de ta grandeur, de la douceur affolante de tes baisers, cela suffit à remplir une vie. […] Tu vivras de ta beauté comme d’autres vivent de leur force. […] Il a promis aussi des statues de vaillance et de beauté, des statues qui seraient des adulations.