Des esprits de haute portée et d’une grande puissance de dialectique peuvent s’égarer dans le domaine des spéculations métaphysiques sans profit pour la philosophie elle-même, parce qu’ils sont dupes d’abstractions verbales, et que la réalité se dérobe parfois sous leurs pieds. […] C’est une sensation de crainte sans le moindre mélange de respect, d’adoration pour un être dont ils reconnaîtraient la supériorité de puissance, d’intelligence ou de bonté.
Il y avait de tristes, de hideuses vérités entrevues, et plus qu’entrevues, des monstres arrachés et traînés au jour du fond de cette caverne du cœur, comme l’appelle Bacon : mais le tout revêtu d’un éclat, d’une puissance sonore incomparable.
Écoutez-le : sans morgue, sans emphase, et tout en badinant, il va insinuer l’égalité de l’esprit en face des puissances ; il va, sans dire les grands mots, avertir qu’il y a là aussi un ministère de la pensée à respecter, et, comme nous dirions, un sacerdoce : « Mais, madame, faut-il que la fille d’Ernest-le-Pieux veuille par ses générosités me faire tomber dans le péché de la simonie ?
Que si cette vue, d’ailleurs, concorde assez bien avec les circonstances éparses, si seulement ces circonstances s’y prêtent et que le talent soit doué d’assez de puissance, non pas pour les créer (à lui seul il n’y suffirait pas), mais pour les rallier en faisceau, il en résulte les grands succès.
D’ailleurs, à quoi bon attribuer à une brochure une puissance qu’elle ne tirait elle-même que de l’opinion publique ?
Pour sauver la Turquie sous le coup du désastre, les puissances chrétiennes s’interposent : mais l’islamisme n’en réchappera pas ; soit qu’elle énerve et polisse Constantinople, soit qu’elle instruise et enhardisse Alexandria, c’est toujours notre civilisation qui gagne et qui triomphe ; de son côté seul est l’avenir.
Mais il se taisait : il voulait leur donner le temps de s’accoutumer à la peine que leur causaient les adieux de leurs compagnons ; et cependant il se préparait en silence à les éveiller tout à coup par le hourra du Cosaque, pour rallumer avec une nouvelle puissance le courage dans leur âme.
Il retrouve le grand sentiment de Lucrèce pour décrire « le temps où tout aime et pullule dans le monde », et pour sentir la puissance et la fécondité de la nature immortelle.
Et pourtant, par un jeu mécanique de la mémoire, ces mêmes esprits pensent avec des mots abstraits, généraux, collectifs : les ayant pensés et exprimés, ils semblent avoir épuisé du coup leur puissance d’invention, et ne peuvent passer outre.
Je n’ai pas cru impossible d’écarter toutes les passions du présent, et de goûter en chaque œuvre la puissance individuelle du talent, quelle que fût l’orthodoxie politique, religieuse, métaphysique, et même esthétique, qui s’y révélât.
Ou bien, on la regarde comme le piège universel, comme l’instrument de toute chute, et on l’adore à cause de sa funeste puissance.
Et alors, je me pose une question : — Est-il possible ou est-il vraisemblable qu’un homme qui a cette puissance et cette lucidité d’esprit se laisse à la fois emporter à l’excès de démence et de cruauté dont ce statuaire méditatif nous donne le spectacle détestable (voir surtout le dernier chapitre) ?
On conçoit ainsi une hiérarchie d’idées dans laquelle la puissance des idées se mesurerait à leur clarté et à leur intelligibilité.
Gobineau sur les qualités d’indépendance et d’énergie intelligente ; Nietzsche glorifie la force sauvage et indomptée, la volonté de puissance des maîtres, destructrice et créatrice, qui renouvelle le monde, parfois au prix de terribles convulsions et de sanglantes hécatombes.
Quand le reste de ce groupe, riche en versificateurs et pauvre en poètes, sera effacé, deux resteront quelque temps reconnaissables : l’un, éclatant de force et de passion contenue, viril de puissance immobile, grand d’impassibilité apparente et de profondeur désespérée ; l’autre, triste, délicat et tendre ; l’un stoïquement beau d’une sévérité sans défaillance ; l’autre, charmant et un peu décevant comme un sourire de femme.
Stimuler, presser, gronder, réveiller, suggérer, inspirer, c’est cette fonction, remplie de toutes parts par les écrivains, qui imprime à la littérature de ce siècle un si haut caractère de puissance et d’originalité.
Chacun sort de l’autre par la puissance propre de l’âme, et en vertu des lois d’association ou de répulsion qui président au développement des phénomènes moraux.
Le cerveau, dans cette hypothèse, aurait donc en puissance les mêmes fonctions des deux côtés ; mais certaines circonstances détermineraient la partie gauche à certaines habitudes que n’aurait point le côté droit.
Je ne dirai rien des grandes puissances qui se trouvent innocentes, mais pesons chaque circonstance de la confession de l’âne.
Je ne sais si les maîtres allemands ont jamais surpassé cette puissance dans cette exactitude.
Ce n’est pas Mme Sand qui nous aurait fait accepter, avec ce talent qui est une magie, tous les écrivains de l’Allemagne sur le pied des plus hautes puissances intellectuelles, et nous les eût fait avaler, à nous autres railleurs français, pomme des hosties consacrées, alors que la plupart d’entre eux n’étaient guère que des pains à cacheter !
… Elle est un cerveau brouillé et en révolte, et dont la révolte manque même de puissance.
Je veux parler d’un talent de style très brillant et très littéraire, lequel, se rencontrant avec éclat sous la plume d’un officier qui n’a pas le temps d’être artiste, étonna beaucoup tout le monde, — du moins tous ceux qui ne savent pas ce que l’esprit militaire cache d’aptitudes et de puissances, et de quelles forces il arme un homme (c’est le mot ici) quand il est profond.
Qu’on écrive l’histoire sans être un homme de génie, qu’on étudie les faits, et qu’on prouve qu’on les a étudiés en les discutant et en les racontant texte en main, cela est courageux et modeste, et cela donne le droit, quand on en a la puissance, de s’élever de ces faits jusqu’à ces généralités qui sont comme la raison des choses et l’essence même de l’histoire.
— ne peut pas ne point tenir pour des civilisations, — et des civilisations sterling, — des sociétés de cette puissance monumentale, de cette richesse, de ce luxe inouï, de ces mœurs, fabuleusement somptueuses, qui éblouirent et enivrèrent jusqu’à leurs vainqueurs.
La littérature et les arts n’ont à se préoccuper que d’une chose, tout aussi importante d’ailleurs que l’émancipation de l’humanité : c’est de la beauté à exprimer, — à inventer ou à reproduire, — mais à exprimer dans des œuvres fortes et parfaites, si l’homme de lettres ou l’artiste peuvent atteindre jusque-là… La littérature et les arts sont désintéressés de tout, excepté de la beauté qu’ils expriment pour obéir à cette loi mystérieuse et absolue de l’humanité, qui veut de la beauté, pour le bonheur de son être, tout aussi énergiquement qu’elle veut des vêtements et du pain… Je parle, bien entendu, de l’humanité à son sommet, élevée à sa plus haute puissance ; je ne parle pas d’elle à l’époque de ses besoins inférieurs… Mais c’est le vice justement des libres penseurs, strangulés par la logique que leur a faite l’épouvantable matérialisme de ce temps, de ne voir jamais que les besoins les plus bas de l’humanité.
et cependant, malgré sa puissance et la splendeur de sa loi, malgré cette superbe invention d’un héroïque tribunal d’honneur qui, la France constituée comme elle l’était alors, était une idée de génie, ce tribunal d’honneur n’empêcha pas ce qu’il devait empêcher, et les épées incoercibles passèrent à travers cet édit, qui est un chef-d’œuvre, et qu’elles déchirèrent.
On sent sous ce visage, aux fibres visibles et tendues, la contractilité d’un esprit puissant, et dont la puissance s’exerça toujours sur lui-même… Positif et pratique, Montesquieu, qui écrivait, sans métaphysiquer, sur les gouvernements, gouverna sa vie et sa maison mieux que personne.