Quelques mots d’introduction Nous pouvons dire au moins avec autant de justesse qu’un écrivain bien connu à propos de ses petits livres : ce que nous disons, les journaux n’oseraient l’imprimer. […] Ce mot, qui sent l’argot d’atelier d’une lieue, devrait être supprimé du dictionnaire de la critique. […] Nous avons vu plus d’un critique, important dans la presse, lui jeter en passant son petit mot pour rire — que l’auteur n’y prenne pas garde. — Il est beau d’avoir un succès à la Saint-Symphorien. […] Les critiques et les journalistes se sont donné le mot pour entonner un charitable De profundis sur le défunt talent de M. […] En deux mots — à quoi bon tant d’érudition, quand on a du talent ?
Comme elle apprenait à lire, étant enfant, par les soins de sa sœur aînée, dans Florian, dans Estelle et Némorin, on lui faisait épeler surtout le paragraphe où il est dit (c’est le vieux Raimond qui s’adresse à Némorin) : « Cependant vous aimez ma fille ; » et là-dessus elle se sauvait dans le cimetière pour n’en pas lire davantage, et en répétant ce mot-là durant de longues heures. […] Des obstacles de bien des sortes donnent un démenti à ce mot toujours… Mais tu vois aussi que la persévérance dans le bien touche toujours la bonté de Dieu qui semble dire à la fin : « Laissez-la faire. » Donc, si j’avais toujours voulu le bien, avec un si bon père, j’y serais peut-être parvenue ! […] Ce qu’il faut dire à la décharge de sa mémoire, c’est qu’il avait de l’humanité ; que Mme Desbordes-Valmore n’avait jamais invoqué en vain en lui le compatriote et le pays ; qu’elle lui demandait chaque année des grâces pour étrennes ; qu’elle avait une manière de les lui demander en glissant un mot de patois flamand (acoutè’m un peo, écoutez-moi un peu !) […] Elle avait, en un mot, le catholicisme individuel ; elle croyait au divin crucifié, à sa mère, à l’efficacité de son intervention, mais d’un élan direct et sans se sentir le besoin d’aucun intermédiaire auprès d’eux. — Je donnerai quelques passages encore de ses lettres d’après 1848 ; celles-ci sont adressées à ses parents de Rouen. […] Je n’ai pas opposé un mot à celte résolution, la voyant très lasse et n’ayant à lui offrir qu’un espace assez étouffé, et moins que jamais de cette gaieté calme qui convient au bien-être moral et à la santé d’une jeune fille.
Au fond il n’y a ni mythologie, ni langues, mais seulement des hommes qui arrangent des mots et des images d’après les besoins de leurs organes et la forme originelle de leur esprit. […] Un poëte moderne, un homme comme Alfred de Musset, Hugo, Lamartine ou Heine, ayant fait ses classes et voyagé, avec un habit noir et des gants, bien vu des dames et faisant le soir cinquante saluts et une vingtaine de bons mots dans le monde, lisant les journaux le matin, ordinairement logé dans un second étage, point trop gai parce qu’il a des nerfs, surtout parce que, dans cette épaisse démocratie où nous étouffons, le discrédit des dignités officielles a exagéré ses prétentions en rehaussant son importance, et que la finesse de ses sensations habituelles lui donne quelque envie de se croire Dieu. […] Quand son éducation critique est suffisante, il est capable de démêler sous chaque ornement d’une architecture, sous chaque trait d’un tableau, sous chaque phrase d’un écrit, le sentiment particulier d’où l’ornement, le trait, la phrase sont sortis ; il assiste au drame intérieur qui s’est accompli dans l’artiste ou dans l’écrivain ; le choix des mots, la brièveté ou la longueur des périodes, l’espèce des métaphores, l’accent du vers, l’ordre du raisonnement, tout lui est un indice ; tandis que ses yeux lisent un texte, son âme et son esprit suivent le déroulement continu et la série changeante des émotions et des conceptions dont ce texte est issu ; il en fait la psychologie. […] Si, au contraire, la conception générale à laquelle la représentation aboutit est une création poétique et figurative, un symbole vivant, comme chez les races aryennes, la langue devient une sorte d’épopée nuancée et colorée où chaque mot est un personnage, la poésie et la religion prennent une ampleur magnifique et inépuisable, la métaphysique se développe largement et subtilement, sans souci des applications positives ; l’esprit tout entier, à travers les déviations et les défaillances inévitables de son effort, s’éprend du beau et du sublime et conçoit un modèle idéal capable, par sa noblesse et son harmonie, de rallier autour de soi les tendresses et les enthousiasmes du genre humain. […] Un seul homme, Stendhal, par une tournure d’esprit et d’éducation singulière, l’a entrepris, et encore aujourd’hui la plupart des lecteurs trouvent ses livres paradoxaux et obscurs ; son talent et ses idées étaient prématurés ; on n’a pas compris ses admirables divinations, ses mots profonds jetés en passant, la justesse étonnante de ses notations et de sa logique ; on n’a pas vu que sous des apparences de causeur et d’homme du monde, il expliquait les plus compliqués des mécanismes internes, qu’il mettait le doigt sur les grands ressorts, qu’il importait dans l’histoire du cœur les procédés scientifiques, l’art de chiffrer, de décomposer et de déduire, que le premier il marquait les causes fondamentales, j’entends les nationalités, les climats et les tempéraments ; bref, qu’il traitait des sentiments comme on doit en traiter, c’est-à-dire en naturaliste et en physicien, en faisant des classifications et en pesant des forces.
À ces mots, elle voulait bien rire, mais elle avait comme une larme dans la voix, comme une goutte d’eau dans le goulot d’une gourde qui ne peut ni rester ni couler par le cou de la courge. […] Ces hommes s’en allèrent gaiement le soir, après leur opération finie, et nous restâmes tous les cinq sans nous dire un mot, jusqu’à la nuit noire, sur le seuil de notre porte. […] Un frisson nous prit à ces mots, nous pensâmes tous, et tous à la fois au châtaignier, notre seul nourricier sur la terre. […] XCVII À ces mots, nous entendîmes monter par le sentier de rochers polis, du côté de Lucques, le padre Hilario ; il suait et il soufflait comme une mule trop chargée qui a besoin qu’on la soulage, au sommet de la montée, de sa charge. […] Voilà ce que l’on disait dans les montagnes du père Hilario ; mais lui, il n’en disait jamais un mot dans ses entretiens avec nous ; on eût dit que san Francisco lui avait ôté la mémoire de ses amours ou qu’il lui avait mis le doigt du silence sur les lèvres ; il ne parlait jamais que de nous, des anciens de la cabane qu’il avait connus, des mariages, des naissances, des morts de la famille, de l’abondance ou de la rareté des châtaignes, du prix de l’huile pour les lampes du sanctuaire, et quelquefois des révolutions qui se passaient là-bas dans les plaines, à Florence, à Sienne, à Rome ou à Lucques.
Il paraissait aussi enivré du peu que je lui disais par mes mots entrecoupés, par mon front baissé, par mon agitation, que je l’étais moi-même, seulement par le son timide de sa voix. […] À ces mots, il m’a béni et j’ai baisé ses sandales. Voilà, mot à mot, les paroles du père Hilario ; mais j’ai bien vu à son accent et à son visage qu’il avait plus de confiance que de doute sur le succès de sa confidence à l’évêque et à ses supérieurs, et que mon désir était déjà ratifié dans sa pensée. […] CCXL — Prenez bien garde, avait dit à nos parents le père Hilario, de rien révéler ni au bargello, ni à sa femme, ni à personne du secret qui se passe entre Hyeronimo, Fior d’Aliza, vous et moi ; un seul mot, un seul geste perdrait, non seulement la vie, mais le salut même de votre cher enfant, s’il doit mourir.
Les derniers mots que l’Ombre achève Du Tasse ont calmé les regrets : Plein de courage il se relève, Et tenant sa lyre et son glaive, Du destin brave tous les traits. […] Il cherche les tableaux sublimes plus que les raisonnements victorieux ; il sent et ne dispute pas ; il veut unir tous les cœurs par le charme des mêmes émotions, et non séparer les esprits par des controverses interminables : en un mot, on dirait que le premier livre offert en hommage à la Religion renaissante fut inspiré par cet esprit de paix qui vient de rapprocher toutes les consciences. » En parlant ainsi, il caractérisait l’ouvrage tel qu’il l’avait autrefois conseillé à son ami, mais non pas tel tout à fait que celui-ci l’avait exécuté en bien des points : l’esprit de douceur et de paix n’y respirait pas avant tout, et il y avait plus d’éclat que d’onction. […] Jure, tandis que je te presse sur mon cœur, jure que c’est la dernière fois que tu te livreras à tes folies ; fais le serment de ne jamais attenter à tes jours. » « En prononçant ces mots, Amélie me regardait avec compassion et tendresse, et couvrait mon front de ses baisers ; c’était presqu’une mère, c’était quelque chose de plus tendre. […] Quand il prononça ces mots : « Elle a paru comme l’encens qui se consume dans le feu », un grand calme et des odeurs célestes semblèrent se répandre dans l’auditoire ; on se sentit comme à l’abri sous les ailes de la colombe mystique, et l’on eût cru voir les anges descendre sur l’autel et remonter vers les cieux avec des parfums et des couronnes. […] » « À ces mots, échappés du cercueil, l’affreuse vérité m’éclaire, ma raison s’égare, je me laisse tomber sur le linceul de la mort, je presse ma sœur dans mes bras, je m’écrie : « Chaste épouse de Jésus-Christ, reçois mes derniers embrassements à travers les glaces du trépas et les profondeurs de l’éternité, qui te séparent déjà de ton frère !
Un soir qu’il ne peut plus avancer, les serre-file le fusillent sous un pin, dans la neige, et l’homme reçoit la mort avec indifférence, comme un chien malade ; disons le mot, comme une brute. […] Ici encore relisez Madame Bovary : vous verrez que tous les actes, toutes les démarches, toutes les rêveries même d’Emma sont expliqués, d’abord par sa nature, puis par quelque excitation du dehors, une rencontre, un objet qu’elle voit, un mot qu’elle entend. […] Ou une force indéfinie, inaccessible, à qui je ne puis m’adresser, que je ne puis même exprimer par des mots, le grand tout ou le grand rien, — ou bien Dieu qui est cousu là, dans cette amulette que m’a donnée Marie ? […] Il est évident que, dans ces moments-là, le fond chez eux ne se distingue plus de la forme : je sens, même dans la traduction, que tous les mots sont nécessaires, qu’on ne pouvait en employer d’autres. […] Sous cette forme neutre, cette espèce de cote mal taillée qu’est une traduction, sous ces mots français recouvrant un génie qui ne l’est pas, de vieilles vérités ou des observations connues me font l’effet de nouveautés singulières.
— Nous répondrons d’abord que rien ne serait plus original et plus neuf pour le public, que la représentation naïve sur notre théâtre d’une grande tragédie de Shakespeare, avec toute la pompe d’une mise en scène soignée ; car les représentations anglaises où les trois quarts et demi des spectateurs n’entendent pas un mot, et les traductions en prose, privées de la magie du style et du jeu des acteurs, ne donnent du grand poète qu’une idée toujours imparfaite et quelquefois très fausse. […] Il est temps de dire un mot du style, cette qualité sans laquelle les ouvrages sont comme s’ils n’étaient pas ; on se figure assez généralement parmi les gens du monde, qu’écrire sa langue avec correction et avoir du style, sont une seule et même chose. […] Cet abbé, avec tout son esprit et tout son talent, a singulièrement appauvri la langue poétique, en croyant l’enrichir, parce qu’il nous donne toujours la périphrase à la place du mot propre. […] Et puis quel misérable progrès de de versification, qu’un logogriphe en huit alexandrins dont le mot est carotte ou chien-dent… Ce qu’il y a de plus triste c’est que beaucoup de nos auteurs ont transporté ce feux langage dans la tragédie. […] Il faut pourtant dire aussi un mot de ce recueil.
Ailleurs, ayant à parler de Fontanes, il dira : « M. de Fontanes, qui restait fort amoureux du passé et était ce qu’on eût appelé dans le jargon moderne un grand réactionnaire… » J’avoue que ce dédain de la langue courante m’impatiente un peu riiez Tocqueville : car enfin le mot de réaction ne pouvait exister sous Louis XIV, puisqu’il n’y avait pas lieu au mouvement des partis, qui a motivé l’introduction du mot ; il fallait la Terreur et Thermidor, le Directoire et Fructidor, 1815 et les Cent-Jours, pour qu’il naquît et s’autorisât : à choses nouvelles il faut des mots nouveaux ; et quand l’emploi en est modéré, comme dans les exemples que je cite, quand l’usage les accepte et les consacre, c’est le fait d’un dégoût ou d’une timidité extrêmes de s’en priver ou de ne s’en servir qu’en s’en excusant de cette façon… Tangens maie singula dente superbo. […] Lorsque son livre de la Démocratie parut, j’en écrivis quelques mots d’éloge que je fis insérer dans le journal le Temps, dirigé alors par M.
Sur le rapport qu’il en revint faire aussitôt à l’empereur Alexandre : « Vous êtes trop vif, lui dit le monarque ; on ne prend pas les mouches avec du vinaigre : il faudra tâcher de raccommoder cela. » Rien ne se raccommoda pourtant, et l’on sut que le premier mot de Languenau à Radetzky avait été : « Il faut enterrer ce Jomini ; sinon, on lui attribuera tout ce que nous ferons de bien. » — Le mauvais vouloir de ce côté et les tracasseries à son égard furent sans trêve et se produisirent dans les moindres détails de service et de la plus mesquine manière : pour son logement, pour l’ordonnance de cavalerie qui lui était nécessaire et qu’on ne lui donnait pas, etc. […] En un mot, je me rappelai la célèbre réponse de Scanderbeg au sultan, qui lui avait demandé son sabre (« Dites à votre maître qu’en lui envoyant le glaive je ne lui ai pas envoyé le bras ») ; fiction ingénieuse et applicable à tous les militaires qui se trouveront dans le cas de donner leurs idées sur des opérations qu’ils ne dirigeront pas. » Après la bataille perdue et quand on se décida à la retraite, lorsque, dans la soirée du 27, Jomini vit l’ordre apporté par Toll, — « le brouillon encore tout trempé de pluie56 », — qui réglait cette retraite jusque derrière l’Éger en quatre ou cinq colonnes, « chacune d’elles ayant son itinéraire tracé pour plusieurs jours, comme une feuille de route, par étapes, qu’on exécuterait en pleine paix, sans s’inquiéter de ce qui arriverait aux autres colonnes » ; à la vue de cette disposition burlesque », il n’y put tenir : toute sa bile de censeur éclairé et de critique militaire en fut émue, comme l’eût été celle de Boileau à la vue de quelque énormité de Chapelain ; et il s’écria sans crainte d’être entendu : « Quand on fait la guerre comme ça, il vaut mieux s’aller coucher. » L’ambassadeur anglais, lord Cathcart, présent, crut devoir le prendre à part pour lui conseiller de ménager davantage l’amour-propre de ses nouveaux camarades. […] Revenant donc de l’état-major autrichien avec sa réponse mortifiante, il ne put s’empêcher de dire à Alexandre : « Je suis vraiment peiné, Sire, du rôle qu’on fait jouer à Votre Majesté. » Le mot était vif et toucha l’épiderme. […] Après ces journées de Leipsick, lui, l’homme de l’art, il pouvait bien se répéter au sens militaire le mot célèbre que le chancelier Oxenstiern avait dit autrefois au sens politique : « Avec combien peu d’habileté et de sagesse sont donc conduites ces grandes armées qui demeurent pourtant victorieuses et qui changent la face du monde !
Je viens de prononcer le mot de querelle, mais quelle querelle, bon Dieu ! […] On sait sa jolie dissertation sur le mot Vaste, qu’il tient à ne prendre que dans l’acception d’un défaut. […] Ce mot de vaste devient un prétexte à des portraits de Pyrrhus, d’Alexandre, de Catilina, de César, de Richelieu, de Charles-Quint. […] Je ne dirai qu’un mot des deux discours couronnés par l’Académie française.
Un moment Voltaire sent la piqûre d’un mot du roi, qui dans une ode l’a traité de soleil couchant : et le petit Baculard d’Arnaud était le soleil levant ! […] Puis on rapporta au roi des mots un peu libres de Voltaire. […] Il y eut ainsi pendant quelque temps entre le roi et Voltaire une sourde guerre de mots aigres, toujours colportés et envenimés par des amis communs. […] « Je suis las des histoires où il n’est question que des aventures d’un roi, comme s’il existait seul ou que rien n’existât que par rapport à lui : en un mot, c’est encore plus d’un grand siècle que d’un grand roi que j’écris l’histoire. — Ce n’est point simplement les annales de son règne, c’est plutôt l’histoire de l’esprit humain puisée dans le siècle le plus glorieux à l’esprit humain519. » Faire l’histoire de l’esprit humain au temps de Louis XIV, exposer le progrès de la civilisation générale, depuis les poèmes et les tableaux, jusqu’aux canaux et aux manufactures, il n’y avait pas de conception de l’histoire qui fût plus juste, plus large et philosophique.
La langue est la bonne langue, mais refroidie, et d’un habile homme qui connaît la valeur des mots plutôt que d’un écrivain qui se les rend propres par l’imagination et le sentiment. […] Un mot d’un contemporain, homme instruit, qui vivait loin des salons parisiens, nous dit quel jugement en portaient tous les esprits restés libres dans cette servitude de la négation universelle. […] Fénelon démontrant l’existence de Dieu « par les merveilles de la création », indique par le mot de merveilles, le caractère indistinct de ses peintures. […] Quel ne fut pas mon chagrin en voyant, à chaque rature, la pensée s’éloigner du vrai et les mots de leur sens propre, et tout le morceau jeter de vains rayons qui m’éblouissaient en me laissant l’âme vide !
XVIII La fin de l’humanité, et par conséquent le but que doit se proposer la politique, c’est de réaliser la plus haute culture humaine possible, c’est-à-dire la plus parfaite religion, par la science, la philosophie, l’art, la morale, en un mot par toutes les façons d’atteindre l’idéal qui sont de la nature de l’homme. […] En un mot, la société doit à l’homme la possibilité de la vie, de cette vie que l’homme à son tour doit, s’il en est besoin, sacrifier à la société. […] Ces mots ne désignent pas une nuance unique et constante : ils varient suivant les aspects. […] Persuadées qu’elles possèdent le fin mot de l’énigme, ces bonnes âmes sont importunes, empressées ; elles veulent qu’on les laisse faire, elles s’imaginent qu’il n’y a que le vil intérêt et le mauvais vouloir qui empêchent d’adopter leurs systèmes.
Plus de ces grands mots sonores dont il avait eu si grande frayeur. […] Arrivé à l’échafaud, le bourreau le prend au prêtre, l’emporte, le ficelle sur la bascule, l’enfourne, je me sers ici du mot d’argot, puis il lâche le couperet. […] Comment donc les gens du roi comprennent-ils le mot civilisation ? […] Il hait le mot propre presque autant que nos poëtes tragiques de l’école de Delille.
Notre thèse, à nous, se résume en ces deux mots : « Il est à désirer que l’homme de lettres ne vive pas de sa plume, et, en ce cas, voici de quoi il doit vivre. » M. […] Le sentiment du réel devient plus vif et plus précis ; les pensées sont plus sérieuses, les mots se remplissent, la déclamation s’évapore. […] C’est l’association tacite, mais fort réelle des esprits éclairés, la communion sainte des lumières de la raison, communion offerte à tous, et à laquelle tous participent plus ou moins, selon leurs forces ; en un mot, c’est la civilisation. […] C’est le mot de Ducis lui-même dînant à la Malmaison.
Au cas où le mot de l’énigme est trouvé, celui ou celle qui l’a proposé meurt sur le champ ou tout au moins tombe sous le pouvoir de celui qui l’a résolue. […] Malgré de nombreux efforts et quoique je me sois renseigné près de divers Indigènes, je n’ai pu trouver d’explications satisfaisantes ni surtout concordantes du sens de ces mots : soutoura, hakilé et dyiké, et, par suite, il m’est impossible de déterminer le sens des symboles auxquels ils correspondent. […] A côté de cela, on trouve dans les chansons des noirs des mots sans signification spéciale qui forment une sorte de refrain analogue aux « tra dé ri dera » ou aux « et lon lon laire et lon lon la » de nos chansons françaises. […] [Conclusion] Quelques mots me restent à ajouter touchant la forme des récits que je publie.
Elle opère par deux méthodes complémentaires — d’un côté par une action explosive qui libère en un instant, dans la direction choisie, une énergie que la matière a accumulée pendant longtemps ; de l’autre, par un travail de contraction qui ramasse en cet instant unique le nombre incalculable de petits événements que la matière accomplit, et qui résume d’un mot l’immensité d’une histoire. […] On imitera certains caractères de la matière vivante ; on ne lui imprimera pas l’élan en vertu duquel elle se reproduit et, au sens transformiste du mot, évolue. […] Pour que la pensée devienne distincte, il faut bien qu’elle s’éparpille en mots : nous ne nous rendons bien compte de ce que nous avons dans l’esprit que lorsque nous avons pris une feuille de papier, et aligné les uns à côté des autres des termes qui s’entrepénétraient. […] La pensée qui n’est que pensée, l’œuvre d’art qui n’est que conçue, le poème qui n’est que rêvé, ne coûtent pas encore de la peine ; c’est la réalisation matérielle du poème en mots, de la conception artistique en statue ou tableau, qui demande un effort.
Remarquez ce joli mot désœuvrées de la part d’une amante blessée au cœur, et qui, même en se ressouvenant après des années, devrait sentir se rouvrir sa plaie vive. […] » Ce mot pourrait servir d’épigraphe à toutes les pièces de Marivaux. […] Sans doute le mot de marivaudage s’est fixé dans la langue à titre de défaut : qui dit marivaudage dit plus ou moins badinage à froid, espièglerie compassée et prolongée, pétillement redoublé et prétentieux, enfin une sorte de pédantisme sémillant et joli ; mais l’homme, considéré dans l’ensemble, vaut mieux que la définition à laquelle il a fourni occasion et sujet.
Il y a quelque chose qui, dans une étude sur Bailly, dominera toujours sa vie et ses ouvrages : c’est sa mort, son courage calme et céleste 66, sa patience, ce mot simple et sublime, le seul tressaillement suprême qui échappa à sa conscience de juste et d’homme de bien. […] Bailly a, ce me semble, une idée peu juste, en vertu de laquelle il juge très défavorablement de ces peuples anciens et les déclare incapables des inventions scientifiques, qu’il estime peut-être supérieures elles-mêmes à ce qu’elles étaient en effet : quand il voit chez eux des fables accréditées et prises au pied de la lettre, il croit que tout cela a dû commencer par être une poésie allégorique, et que ce n’est que par une sorte de corruption et de décadence qu’on en est venu à prêter graduellement à ces fables une consistance qu’elles n’avaient pas d’abord dans l’esprit des inventeurs : en un mot, il croit à une sorte d’analyse antérieure à une réflexion philosophique préexistante à l’enfance et à l’adolescence humaines si aisément riches de sensations et toutes fécondes en imagesj. […] [1re éd.] en un mot, il croit à une sorte d’analyse antérieure et à une réflexion philosophique préexistante à l’enfance et à l’adolescence humaines si aisément riches de sensations et toutes fécondes en images.
Il faudra plus de vingt ans encore pour que le Werther de la France, celui qui s’approprie si bien à elle par sa beauté mélancolique, sa sobriété, même en rêvant, et son noble éclair au front, pour que René en un mot puisse naître ; il faudra plus de temps encore pour que l’élégie vraiment moderne, inaugurée par Lamartine, puisse fleurir et se propager. […] N’est-ce pas celle qui garantit à une portion malheureuse de l’humanité les soins les plus prévenants, la condescendance la plus attentive, en un mot, ce tendre intérêt si supérieur à la simple compassion ? […] Quant à ceux qui ont atteint quelques-unes des hauteurs du globe, je les appelle en témoignage : en est-il un seul qui, à leurs sommets, ne se soit trouvé régénéré et n’ait senti avec surprise qu’il avait laissé au pied des monts sa faiblesse, ses infirmités, ses soins, ses inquiétudes ; en un mot, la partie débile de son être et la portion ulcérée de son cœur ?
Quoi qu’il en soit, ce dilettante brillant et incrédule dut à quelque chose de fier et de hardi qu’il avait dans l’imagination, et qui tenait sans doute à ses origines méridionales, d’être le premier chez nous à parler dignement de Dante, et même de le juger très finement sur des beautés de détail et d’exécution qui semblaient être du ressort des seuls Italiens : Il faut surtout varier ses inversions, disait-il en pensant au travail imposé aux traducteurs ; le Dante dessine quelquefois l’attitude de ses personnages par la coupe de ses phrases ; il a des brusqueries de style qui produisent de grands effets ; et souvent, dans la peinture de ses supplices, il emploie une fatigue de mots qui rend merveilleusement celle des tourmentés. — Quand il est beau, disait-il encore, rien ne lui est comparable. […] Aujourd’hui en France, l’étude critique de La Divine Comédie, inépuisable dans le détail, est fixée quant à l’ensemble et a comme donné son dernier mot. […] C’est dans de tels passages que Dante justifie complètement le mot de Manzoni, qui dit de lui que, pour la langue italienne, il n’a pas été seulement le maître de la colère, mais celui du sourire.
Les physionomies d’hommes qu’il nous présente ne sont que des esquisses rapides en deux ou trois mots ; mais il y revient plus d’une fois, et ces généraux que de loin on serait assez porté à confondre se peignent chez lui bien moins par les traits de l’historien que par leurs actes mêmes. […] On comprend ce que ce mot de ridicule a ici de poignant ; ce fut le coup d’éperon qui fit partir Masséna. […] En un mot, il faut encore dans l’historien un talent à part, un don, celui de narrer, celui qu’a M.
Pour écrire des lettres excellentes et durables en tant que pièces littéraires, je ne sais que deux manières et deux moyens : avoir un génie vif, éveillé, prompt, à bride abattue, et de tous les instants, comme Mme de Sévigné, comme Voltaire ; ou se donner du temps et prendre du soin, écrire à main reposée, comme Pline, Bussy, Rousseau, Paul-Louis Courier : — en deux mots, improviser ou composer. […] Celui-ci, attaqué par le gazetier janséniste au sujet de L’Esprit des lois, avait cru devoir répondre par une brochure qui réussit ; « Malgré cet exemple, disait Buffon, également attaqué, et par le même gazetier, je crois que j’agirai différemment et que je ne répondrai pas un seul mot. […] c’est un mot qui jure avec l’habitude et avec l’essence même de Buffon.
En un mot, malgré l’extension morale et la tolérance relative, due à l’influence de Turretin, la cité intellectuelle génévoise restait, à quelques égards, fermée comme la cité politique. […] On était alors, au xviie siècle, pour le bel esprit, comme on a été de nos jours pour le talent ; c’était un mot magique qui couvrait tout. […] Il lui arrive de s’élever, mais il a de la peine à se soutenir ; il a le vol court, et ses poésies sentent l’effort et le travail ; on s’aperçoit que la recherche du beau, d’un certain éclat, en fait le grand ressort : de là viennent les bons mots où il lui arrive si souvent de s’échapper, aussi bien que toutes ces malignités hors d’œuvre, ces traits qui divertissent le lecteur, mais qui ne font pas honneur au poète.
Le futur Pierre III, tel qu’il sort de son récit, est une brute ; il n’y a pas d’autre mot. […] » Quand on pense au résultat final et suprême, chaque mot porte dans ce jugement : l’insensé et l’imprudent ! […] Peu s’en faut que, par la faute de cette mère, la fortune de Catherine ne se brise dès le premier pas, et qu’on ne les renvoie toutes deux dans leur Allemagne ; mais la jeune fille sait par sa conduite se garantir, et par quelques mots bien placés, par des riens, se séparer des sottises de sa mère.
C’est lui qui, accosté, au milieu d’un groupe d’amis, par un philosophe soi-disant stoïcien ou cynique qui lui demandait arrogamment, au nom de sa barbe et de son manteau, de lui donner de quoi acheter du pain, répondait : « Qu’il soit ce qu’il veut, donnons-lui pourtant quelque chose, si ce n’est comme à un homme, du moins comme étant homme nous-mêmes… tanquam homines, non tanquam homini. » C’est là une charmante application encore du sentiment et du mot de Térence. […] Qu’on imagine un Tertullien évangéliste, avec ses antithèses et ses cliquetis de mots ou d’images ; est-ce possible ? […] Il y a, en un mot, tout un monde enchevêtré dans les bras et les pieds du vieux chêne.
C’est le dernier mot pastoral de l’Antiquité païenne. […] Il faut en venir à ce roman en prose, Daphnis et Chloé, à ce dernier des Daphnis, pour y retrouver, comme dans une petite épopée finale, toute la grâce, toute la tradition, la fleur suprême, en un mot, de ces fables pastorales pressée et, rassemblée. […] Il y a en tête, de ce manuscrit : Discours des choses de Lesbos ; de ce mot discours (λόγοι) lu de travers, on aurait fait Longus, qui a si peu l’air en effet d’un nom grec ; la faute une fois mise en circulation, et voilà un auteur célèbre de plus à l’adresse de la postérité11.