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420. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Mais après avoir encore une fois savouré ces tristes délices de la lecture d’Adolphe, avoir goûté cette finesse consommée d’expérience sociale, cette vérité aride et terne, si bien dissoute et démêlée, et avoir reconnu, par-dessus tout, le cachet d’élégance et de distinction achevée empreint dans l’ensemble, je n’ai pu m’empêcher d’admirer la différence des temps, des sociétés, des écoles diverses. […] Après avoir raconté qu’il a vu mourir sous ses yeux une vieille amie, une femme âgée et d’un esprit supérieur, avec qui il avait souvent épuisé, en conversant, toutes les réflexions morales et anticipé l’expérience de la vie : Cet événement, continue Adolphe, m’avait rempli d’un sentiment d’incertitude sur la destinée, et d’une rêverie vague qui ne m’abandonnait pas… Je trouvais qu’aucun but ne valait la peine d’aucun effort.

421. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Biot s’était de tout temps occupé de la branche de physique qu’on appelle Optique, et qui se traite à la fois par l’expérience et par l’application rigoureuse du calcul. […] Biot que l’Académie lui avait donné pour commissaire, et sous les yeux duquel il avait à répéter l’expérience décisive d’un de ses beaux mémoires, au moment où le résultat annoncé se produisit, M. 

422. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Mais il s’aventure un peu trop, l’habile docteur, quand il exprime l’idée qu’on pourrait donner à la femme le dégoût du mal avant l’entière expérience, lui faire connaître les déboires de la trahison, avant qu’elle soit irréparable ; bref, mettre la femme en goût d’un amant et l’en déprendre avant qu’il soit trop tard : un vrai tour de passe-passe. […] C’est un remède dangereux ; pour y croire, j’ai besoin qu’il y ait plus d’une expérience.

423. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Or, l’expérience nous avertit que les choses ne se passent pas de cette façon à la fois simple et décourageante. […] Est-ce qu’une génération ne transmet pas à celle qui la suit une langue toute formée, des moules et des procédés éprouvés par une longue expérience, toute une technique enfin ?

424. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Âme chaste et qui, malgré quelques premiers désordres, s’était vite rangée et réparée, il excellait, plutôt par divination que par expérience, à découvrir les vertus et les vices dans leurs principes, dans leurs semences pour ainsi dire et leurs racines, et à les suivre dans leurs progrès, prescrivant les moyens d’acquérir les unes et d’éviter les autres. […] Sans nulle expérience de la politique, animé d’une foi profonde, jamais il n’avait eu à manœuvrer dans le siècle.

425. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre premier. Considérations préliminaires » pp. 17-40

Dans de telles circonstances on est donc, jusqu’à un certain point, en droit d’exiger d’un écrivain le tact même de l’avenir ; car nous ne sommes plus au temps des théories consacrées par l’expérience, et des doctrines revêtues de l’autorité imposante des traditions : toutes nos destinées se sont en quelque sorte réfugiées dans le nuage de l’avenir. […] Maintenant, éclairés par des expériences de plus d’un genre, et rendus à notre véritable existence sociale, convenons qu’il n’y a qu’un moyen de réunir tous les partis ; c’est de sentir les raisons de tous, de condescendre à toutes les opinions, de ne point s’attaquer mutuellement avec les armes toujours inconvenantes de l’ironie ou du sarcasme, de se mettre à la place de tous les intérêts.

426. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Seconde partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère de la littérature et des arts » pp. 326-349

La société marche dans des voies insolites, et n’accepte pour règle que des doctrines non éprouvées par l’expérience. […] La philosophie éclairée par ses expériences ne dédaignera plus les vieilles doctrines, car les vieilles doctrines sont demeurées dans le genre humain.

427. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXI » pp. 281-285

Il n’est que trop vrai, en effet, que le Journal des Débats, depuis des années, ne cesse de contrevenir et de faire défaut de plus en plus au rôle important qu’il lui convenait de tenir : la Presse dit très-insolemment de lui : « Il a l’expérience de la vieillesse, mais il en a aussi la corruption, l’ironie et la stérilité.

428. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rimbaud, Arthur (1854-1891) »

Gustave Kahn Sans doute, Rimbaud était au courant des phénomènes d’audition colorée ; peut-être connaissait-il par sa propre expérience ces phénomènes.

429. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 28, du temps où les poëmes et les tableaux sont apprétiez à leur juste valeur » pp. 389-394

Mais le public s’étant affermi dans son sentiment par l’expérience, il est sorti de l’espece de contrainte où l’on l’avoit tenu, et il a eu la constance de parler enfin comme il pensoit déja depuis long-temps.

430. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Nous savons, par une triste expérience, que deux nations qui vivent en paix, peuvent se réveiller en guerre ; il suffit pour cela de la vanité et de l’égoïsme des chefs. […] Quelles sont les raisons et les expériences pour et contre l’impôt sur le revenu ? […] Il n’a rien à apprendre des courtiers d’élection ; il en sait plus qu’eux, et son opinion, fondée sur son expérience personnelle, est tenace. […] Quand ils ont quelque expérience, ils font une mine effroyable en y entrant, et souvent ils en sortent plus vite qu’ils n’y sont entrés, car c’est une vilaine bête à visiter que le blaireau. […] Son procédé est la méthode déductive qui, écartant l’observation, dédaignant l’expérience et l’histoire, construit la société d’après un axiome préconçu.

431. (1890) L’avenir de la science « VIII » p. 200

La rareté des livres, l’absence des index et de ces concordances qui facilitent si fort nos recherches obligeaient à citer souvent de mémoire, c’est-à-dire d’une manière très inexacte  Enfin les anciens n’avaient pas l’expérience d’un assez grand nombre de révolutions littéraires, ils ne pouvaient comparer assez de littératures pour s’élever bien haut en critique esthétique. […] J’ai la conscience que j’ai tout pris de l’expérience ; mais il m’est impossible de dire par quelle voie j’y suis arrivé, de quels éléments j’ai composé cet ensemble (qui peut avoir très peu de valeur sans doute, mais qui enfin est ma vie). […] Le vrai, c’est que le raisonnement ne doit pas être écouté en cet ordre de choses, c’est que les résultats du raisonnement ne sont ici légitimes qu’à la condition d’être contrôlés à chaque pas par l’expérience immédiate.

432. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

Hennequin : « Une œuvre n’aura d’effet esthétique que sur les personnes qui se trouvent posséder une organisation mentale analogue et inférieure à celle qui a servi à créer l’œuvre, et qui peut en être déduite. » Personne, par exemple, n’admet une si cette description description ne lui paraît pas correspondre à la vérité, mais cette vérité est variable, elle est une idée ; elle ne résulte pas de l’expérience exacte, mais de la conception froide ou passionnée, vraie ou illusoire, que l’on se fait des choses et des gens34. […] Les hommes à vocation native présentent rarement, ajoute M. un désaccord Hennequin, accusé entre leurs délassements et leurs occupations. « L’expérience générale ne s’est guère trompée sur ce point ; ce qu’on cherche à connaître d’un homme pour le juger, ce ne sont pas ses occupations, ce sont ses goûts L’histoire, de même, nous montre que Louis XVI était simplement un excellent ouvrier serrurier, Néron un médiocre poète, Léon X un bon dilettante. » Ces considérations admettent pourtant bien des exceptions. […] Le même raisonnement est valable pour la figure de la courtisane, qu’il faut présenter tout autrement à un débauché ou à un rêveur romanesque ; cela est si vrai que parfois le type illusoire, l’idée, l’emportent sur l’expérience la plus répétée.

433. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre IV. Comparaison des variétés vives et de la forme calme de la parole intérieure. — place de la parole intérieure dans la classification des faits psychiques. »

La mémoire étant la reproduction des faits d’expérience, l’imagination est l’innovation expérimentale ; or le fond de toute cette activité novatrice est mémoriel ; en supposant l’imagination à son maximum et pénétrant les couches les plus profondes de nos phénomènes, la mémoire est comme une couche infinitésimale, irréductible, plus profondément située encore, et sur laquelle repose nécessairement l’édifice construit par l’imagination. […] Je l’accorde ; mais peut-être est-il philosophique de remarquer que, dans l’expression un fait, le mot un n’a aucun sens précis : car, selon le point de vue ou le caprice de l’esprit, un fait est une fraction de fait, le même fait ou une de ses fractions est un ensemble de faits ; l’expérience ne nous donne que du fait ; sur cette matière indifférente à l’unité, nous appliquons à notre guise la forme de l’unité ; quelle que soit l’étendue phénoménale embrassée par l’unité, la matière qui la reçoit ne nous contredira jamais ; pour régler l’usage de cette notion, l’esprit ne doit consulter que les convenances de la science qui l’occupe36. […] Contre cet anéantissement graduel, l’âme est défendue par l’expérience et l’imagination, puissances d’innovation et de renouvellement, qui introduisent sans cesse dans la succession des éléments nouveaux, doués, avant tout effet de l’habitude, d’une intensité et d’une durée propres ; et elle se défend elle-même par l’attention, puissance qui tantôt vivifie et renforce les états nouveaux en prolongeant leur durée et en augmentant leur intensité, tantôt restaure les états passés en leur conférant à chaque reproduction une durée plus grande et une intensité plus forte.

434. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Le seul nom d’enfance n’évoque-t-il pas un roman qui est en nous tous, et qui s’y trouve à l’état romanesque précisément, je veux dire avec la poésie de la réalité et celle du recul, avec le double attrait de la jeunesse qui se souvient et de l’expérience qui raconte, avec ces grossissements de certains épisodes, que le lointain déforme et amplifie, comme il fait, entre les branches d’arbres, pour les astres qui se lèvent ? […] Ici, je suis obligé de parler de moi, d’analyser mon expérience personnelle. Mais j’ai pour excuse la nécessité même, car, dans un problème si délicat, il est impossible de parler d’après l’expérience des autres, et nul ne saurait noter avec certitude la marche de pareilles idées, si ce n’est dans son propre esprit.

435. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Mais le dada des ballons à diriger l’a pris : ses 300,000 francs ont été déjà dépensés en expériences qui n’ont pas abouti. […] Il faut de l’argent au père pour continuer ses expériences qui seront demain la fortune : ses amis l’ont refusé ; il s’adresse à l’aînée de ses filles et lui demande ses 50,000 francs ; elle aussi refuse, car ces 50,000 francs c’est le moyen d’assurer le pain de la vieillesse de son père qu’elle sait ruiné. […] De cette façon il héritera de ses deux filles, il aura leurs 100,000 francs à lui seul pour continuer ses expériences.

436. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Le désir que l’on éprouvait, c’était celui de « communiquer », si je puis ainsi dire ; et, à l’expérience, ou jugeait que la langue n’en fournissait pas les moyens. […] » ou si Molière savait par expérience, autant qu’homme du monde, « les désordres des mauvais ménages et les chagrins des maris jaloux » ! […] Ce n’est point d’en haut que nous l’avons reçue, mais de la pratique même de la vie, mais de l’expérience de l’histoire. […] Si Bossuet appelle sans doute constamment à son aide l’expérience et l’histoire, et si même, plus souvent qu’il ne le croit peut-être, il part de l’observation de la réalité, cependant il ne saurait admettre que la réalité contredise en aucun cas l’Écriture, et l’histoire ou l’expérience n’ont d’autorité pour lui qu’autant que l’interprétation s’en accorde avec la lettre du texte sacré. […] Il faut que les subtiles spéculations de l’une prennent un corps, pour ainsi dire, en se liant avec les expériences de l’autre, et que les expériences, naturellement bornées à des cas particuliers, prennent., par le moyen de la spéculation, un esprit universel et se changent en principes.

437. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Ils l’enfoncent en eux par des méditations, ils la nourrissent de raisonnements, ils y attachent le réseau de toutes leurs doctrines et de toutes leurs expériences, en sorte que lorsqu’une tentation les assaille, ce n’est pas un principe isolé qu’elle attaque, c’est l’écheveau entier de leurs croyances qu’elle rencontre, écheveau infiniment ramifié et trop tenace pour qu’une séduction sensible puisse l’arracher. […] Ainsi absorbé dans sa lutte et dans son sacerdoce, il demeurait en dehors du monde, aussi aveuglé contre les faits palpables que défendu contre les séductions sensibles, placé au-dessus des souillures et des leçons de l’expérience, aussi incapable de conduire les hommes que de leur céder. […] Pour garder de pareilles illusions après de pareilles expériences, il fallait être insensible à l’expérience et prédestiné aux illusions. […] Il demeura entier et intact jusqu’au bout, sans découragement ni faiblesse ; ni l’expérience ne put l’instruire, ni les revers ne purent l’abattre ; il supporta tout et ne se repentit de rien. […] Ainsi muni, il traverse la vie en combattant, en poëte, avec des actions courageuses et des rêves splendides, héroïque et rude, chimérique et passionné, généreux et serein, comme tout raisonneur retiré en lui-même, comme tout enthousiaste insensible à l’expérience et épris du beau.

438. (1842) Discours sur l’esprit positif

Quand une expérience pleinement décisive eut à jamais constaté, aux yeux de tous, l’entière impuissance organique d’une telle philosophie, l’absence de toute autre théorie ne permit pas de satisfaire d’abord aux besoins d’ordre, qui déjà prévalaient, autrement que par une sorte de restauration passagère de ce même système, mental et social, dont l’irréparable décadence avait donné lieu à la crise. […] Bien loin que l’assistance théologique soit à jamais indispensable aux préceptes moraux, l’expérience démontre, au contraire, qu’elle leur est devenue, chez les modernes, de plus en plus nuisible, en les faisant inévitablement participer, par suite de cette funeste adhérence, à la décomposition croissante du régime monothéique, surtout pendant les trois derniers siècles. […] D’irrécusables expériences ont d’ailleurs prouvé, en même temps, sur une vaste échelle, au sein des masses populaires, que le prétendu privilège exclusif des croyances religieuses pour déterminer de grands sacrifices ou d’actifs dévouements pouvait également appartenir à des opinions directement opposées, et s’attachait, en général, à toute profonde conviction, quelle qu’en puisse être la nature. […] En achevant cette sommaire appréciation, il importe d’y remarquer l’heureuse corrélation qui s’établit naturellement entre un tel esprit philosophique et les dispositions, sages mais empiriques, que l’expérience contemporaine fait désormais prévaloir de plus en plus, aussi bien chez les gouvernés que chez les gouvernants. […] Or, tel est l’important avantage que l’absence d’éducation scolastique procure aujourd’hui à nos prolétaires, et qui les rend, au fond, moins accessibles que la plupart des lettrés aux divers sophismes perturbateurs, conformément à l’expérience journalière, malgré une excitation continue, systématiquement dirigée vers les passions relatives à leur condition sociale.

439. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Comtesse Merlin. Souvenirs d’un créole. »

Ainsi elle nous est venue, une de ces natures actives et utiles à la société qu’elles décorent, gardant de l’entraînement malgré l’expérience et l’impulsion native à travers la finesse acquise ; talent sympathique et éclatant, toujours dévoué aux infortunes comme aux agréments d’autrui et prodigue de lui-même.

440. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre premier. Du rapport des idées et des mots »

D’abord l’esprit, parcourant en tous sens le sujet qu’il s’est proposé, interrogeant l’expérience d’autrui et la sienne propre, s’est fait une provision de pensées, encore vagues et informes, flottantes ou troubles.

441. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 27, qu’on doit plus d’égard aux jugemens des peintres qu’à ceux des poëtes. De l’art de reconnoître la main des peintres » pp. 382-388

Quoique l’expérience nous enseigne que l’art de deviner l’auteur d’un tableau en reconnoissant la main du maître, soit le plus fautif de tous les arts après la médecine, il prévient trop néanmoins le public en faveur des décisions de ceux qui l’exercent, même quand elles sont faites sur d’autres points.

442. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Collèges, écoles, universités même ont toujours eu la fonction de transmettre d’une génération à l’autre une certaine provision de connaissances, des habitudes d’esprit, des procédés de travail, bref des résultats acquis par l’expérience des siècles. […] A côté de ces divers enseignements visant à faire des chrétiens, supposez-en un autre, tout laïque, se donnant pour tâche de faire avant tout de bons citoyens et des esprits libres, accoutumés à éprouver toute opinion par le contrôle de l’expérience et de la raison. […] Une longue expérience a prouvé qu’il préfère la correction à la verve inventive et, s’il faut choisir entre deux maux, l’excès de pondération à l’excès d’originalité. […] Expérience et railleries ont-elles corrigé personne ?

443. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Celui qu’une longue expérience a formé, l’emporte sans doute par la précision des idées ; il a rassemblé plus de faits, et la vérité lui est mieux connue : on y parvient plus difficilement avec l’autre, mais on la désire plus vivement, et il sait mieux la faire aimer. […] Ainsi encore, à propos des expériences de Haller sur l’œuf du poulet, si le physiologiste, étendant ses considérations aux autres animaux, conclut que le fœtus appartient entièrement à la femelle, et qu’elle a, par conséquent, la plus grande part à la reproduction de l’espèce, Vicq d’Azyr, regardant son élégant auditoire, s’empressa d’ajouter : « Ce système plaira sans doute au sexe qui nous prodigue dans l’âge le plus tendre tant de caresses et de soins, et auquel nous devons un juste tribut d’amour et de reconnaissance. » Il se glisse aisément jusque dans les exposés des savants d’alors, dès qu’ils veulent réussir et plaire, des tons et des intentions de Florian et de Legouvé.

444. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — II. (Fin.) » pp. 427-443

non, je vous assure ; j’en ai fait trop souvent l’expérience, ce n’est que par l’inspection la plus grande, la patience la plus méritoire, et je dirai naturellement, le sentiment que l’on doit avoir en soi, qu’on peut arriver à faire quelque chose. […] Accroissons le plus possible le nombre de ces livres naturels, où des esprits et des cœurs vivants se montrent avec sincérité et apportent une expérience de plus dans le trésor de l’observation humaine.

445. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

Pourquoi deux grandes puissances ne feraient-elles pas une fois au profit de l’humanité la plus belle et la plus utile des expériences, celle d’une liberté de commerce de bonne foi, convenue pour un certain terme et sans aucun dessein de se circonvenir mutuellement ? […] Ou je suis fort trompé, ou cette expérience découvrirait une grande vérité.

446. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [I] »

Puységur donnait et compilait dans un Traité complet le résumé de son expérience, mais le génie était absent. […] L’auteur n’y perd jamais de vue cette maxime : « La théorie est le pied droit, et l’expérience est le pied gauche. » Les guerres de la Révolution lui fournissaient aussi des termes naturels de comparaison et des exemples ; il les empruntait le plus volontiers à la campagne d’Italie de 1796-1797 et à celle de 1800.

447. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LE COMTE MOLÉ (Réception à l’Académie.) » pp. 190-210

Pas un mot de politique, ceci seulement : quand on est bien persuadé (et c’est peut-être fort triste) que l’art de gouverner les hommes n’a pas dû changer malgré nos grands progrès, et que, moyennant ou nonobstant les divers appareils plus ou moins représentatifs et soi-disant vrais, au fond cet art, ce grand art, et le premier de tous, de mener la société à bien, de la conserver d’abord, de l’améliorer et de l’agrandir s’il se peut, ne se pratique jamais directement avec succès qu’en vertu de certains résultats secrets d’expérience, très-rigoureux, très-sévères dans leur équité, très-peu optimistes enfin, on en vient à être, non pas indifférent, mais assez indulgent pour les oppositions de systèmes plus apparentes que réelles, et à accorder beaucoup, au moins quand on n’est que simple amateur, à la façon : je rentre, on le voit, en pleine littérature. […] Je conjecturerais que les résultats de l’expérience de l’homme politique sont devenus, depuis, d’autant plus positifs qu’il ne les formule jamais.

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