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881. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Du Deffand »

Et cependant, à toutes les époques de cette existence brillante et qui aurait dû être heureuse, le cri de l’ennui que, seule dans tout son siècle, elle a poussé, elle le jeta partout autour d’elle et avec une vibration dont, un siècle plus tard, Chateaubriand, qui avait vu la Révolution française, n’a pas dépassé l’intensité.

882. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

Il y a là un dénoué d’existence qui permit à ces deux êtres, si éloignés l’un de l’autre dans la vie, de se trouver un instant âme à âme, et ces deux âmes se fondirent.

883. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal. »

… Quand un homme et une poésie en sont descendus jusque-là, — quand ils ont dévalé si bas, dans la conscience de l’incurable malheur qui est au fond de toutes les voluptés de l’existence, poésie et homme ne peuvent plus que remonter.

884. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Ronsard »

Il avait vécu de la grande existence de la haute société de son temps, et il s’en était blasé vite, comme les grandes imaginations qui dominent tout et qui finissent par être de grandes dégoûtées.

885. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Les Mémoires d’une femme de chambre » pp. 309-321

Elle n’a donc servi, disons le mot, que chez des coquines, et cette particularité seule ôte au livre toute nouveauté, toute profondeur et toute portée, rien n’étant plus connu et plus rabâché sur les théâtres, dans les livres et dans les journaux de ce temps, que l’existence de ces dames, qui n’a rien, du reste, de bien compliqué, puisque c’est toujours le même luxe extravagant et gâcheur, la même manière de tromper et de voler leurs hommes, la même abjection d’âme et de langage, le même mutisme de sens moral et d’autres sens, et enfin la même stupidité souveraine, que je ne reprocherais pas cependant à un observateur tout-puissant de peindre encore, s’il en tirait des effets nouveaux et des choses nouvelles !

886. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Il y a eu de tout temps, dans le monde des patriciennes, comme disent ces messieurs, des exceptions coupables et bruyantes, des existences volontairement déclassées, des femmes que l’ennui, le désordre d’imagination ou une vocation invincible poussent hors des voies régulières et transplantent violemment dans les zones torrides où le roman va les chercher. […] Ce qui frappe dans ce chapitre de l’histoire de Voltaire, c’est cette existence théâtrale, tout arrangée pour l’effet, employant les prestiges du spectacle et se faisant spectacle elle-même pour mieux diriger sa propagande philosophique. […] Ce qui lui reste encore, dans sa ruine, d’existence et de souffle, ce spiritus qui plane sur les décombres, cette âme qui survit dans la mort, tout cela se transforme, s’épure et reçoit une vie nouvelle ; d’où ? […] L’époque vers laquelle nous ramènent ces brillantes et orageuses existences, si bien dépeintes par M.  […] Cousin, cette existence aventureuse, brillante, conquérante, si virile et si féminine tout ensemble, de Marie de Rohan, duchesse de Chevreuse.

887. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Même les partisans d’une épopée primitive admettent la coexistence d’une poésie lyrique (« il va sans dire qu’on ne nie pas l’existence de chants lyriques », Lanson) ; les uns supposent des cantilènes lyrico-épiques, devenues poèmes par « juxtaposition » ; les autres supposent de « petits poèmes », agrandis plus tard par « étirement ». […] Le théâtre lui-même affirme son existence : il est vrai que nous en possédons bien peu de chose : le Jeu d’Adam, le Jeu de Saint-Nicolas de Bodel, le Théophile de Rutebeuf, le Jeu de la Feuillée et Robin et Marion d’Adam de la Halle. […] Cette qualité d’amuseur fut sa plus sûre garantie, une condition d’existence ; quand il cessa de rire, on lui refusa la sépulture des chrétiens. […] Résignons-nous à avoir toujours, dans notre équation, au moins une inconnue ; et, au lieu de races, parlons de nations ; ici nous avons des éléments matériels qu’il est plus aisé d’évaluer à peu près : les dates du groupement, ses vicissitudes, ses intérêts communs, sa situation géographique, ses conditions d’existence, le climat et les esprits directeurs qui sont d’abord un effet, ensuite une cause, de sorte que tout s’enchaîne et que le passé est la force vive de l’avenir. — Le caractère distinctif d’une nation n’est pas, comme plusieurs semblent le croire, dans telle vertu particulière dont cette nation aurait le monopole ; il est dans l’ensemble, dans un certain dosage des qualités et des défauts que possède chaque nation, mais chacune avec une combinaison différente, avec une orientation particulière.

888. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

D’un autre côté, une fois bien établie, l’existence de ce système décoratif nous explique plus d’un texte jusqu’à présent mal compris. […] d’honnêtes écrivains, de second ou de troisième ordre, qui n’ont plus qu’un fantôme d’existence littéraire, et qui, d’ailleurs, de leur temps même, en dépit des apparences, n’ont exercé qu’une bien faible influence. […] Pour croire au Dieu qu’il enseigne, Pascal n’a pas besoin de longs raisonnements, ni de « preuves » de son existence, et rien n’excite, dans ses Pensées, sa verve sarcastique et hardie comme cette prétention de lui « démontrer » Dieu. […] Fénelon, mieux averti, n’aurait peut-être pas écrit la première partie de son Traité de l’existence de Dieu. […] La seconde est l’application de l’instrument mathématique à toutes les questions scientifiques, ce qui est une suite et une preuve à la fois de leur solidarité et de l’objectivité de leur existence.

889. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Loin que les Mémoires ne remplissent pas tout le cadre de l’histoire, ils le débordent presque toujours ; mille existences individuelles s’y croisent dans le tableau de l’existence commune d’une époque ; on y saisit cette réflexion du général sur le particulier, qui fait le charme des œuvres de Walter Scott, et l’on reconnaît, non sans surprise, qu’on a avec l’histoire le roman historique. […] Le peu qu’on sait de la longue existence de Lesage ne la rend pas indigne d’être mise en parallèle avec l’honorable carrière fournie par Rollin. […] Ils concluent que personne ne serait plus excusable qu’eux de succomber aux tentations de ce monde, et qu’il n’y a non plus personne qui ne puisse, à leur exemple, se créer une existence heureuse. […] Cette percée, qui s’est faite brusquement à ses yeux vers le vaste monde, a failli troubler l’idylle de son existence. […] C’est là, pour ainsi dire, dans l’existence de Saint-Simon, le faîte.

890. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Remarquez que Lamartine ne connaissait qu’à peine et de loin seulement Mme Valmore ; mais la divination du génie est comme une seconde vue, et du premier coup d’œil il avait tout compris de cette existence, il avait tout exprimé en images vivantes et dans un tableau immortel : Ils n’ont, disais-je, dans la vie Que cette tente et ces trésors ; Ces trois planches sont leur patrie.

891. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Note »

Même dans le discours de réception de Lamartine à l’Académie, en 1830, on trouve un grand parallèle établi entre la poésie et l’action, entre la vie du littérateur en temps régulier et cette même existence dans les siècles d’orage, en « ces époques funestes au monde, glorieuses pour l’individu. » Dans les temps calmes, chacun est classé, chacun suit sa voie ; avec plus ou moins de distinction, selon nos forces ou nos faiblesses, « nous arrivons au terme.

892. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre II. Des tragédies grecques » pp. 95-112

Les anciens revêtaient la vie à venir des images les plus brillantes ; ils avaient matérialisé l’autre monde par des descriptions, par des tableaux, par des récits de tous les genres ; et l’abîme que la nature a mis entre l’existence et la mort était, pour ainsi dire, comblé par leur mythologie.

893. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre IV. La langue française au xviie  »

Le bruit de ces doctes entretiens se répandit ; en 1629, Richelieu fit offrir à la société de lui donner sa protection et une existence officielle.

894. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Richepin, Jean (1849-1926) »

Tancrède Martel Ceux qui, comme le grand et vigoureux poète de la Chanson des gueux , ont voué leur existence entière aux flammes d’un art élevé, savent seuls ce qu’il y a de bonheur dans l’enfantement laborieux d’une œuvre préférée.

895. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

L’argent n’est pas l’essentiel des existences brillantes qu’on nous dépeint.

896. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXV. Mort de Jésus. »

L’existence d’un caveau sépulcral (celui qu’on appelle « Tombeau de Joseph d’Arimathie ») sous le mur de la coupole du Saint-Sépulcre porterait aussi à supposer que cet endroit était hors des murs.

897. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIII » pp. 109-125

Le duc de Saint-Simon parle de l’hôtel d’Albret comme d’une maison somptueuse, où affluait la meilleure compagnie, et il en suppose l’existence du vivant de Scarron, mort en 1660.

898. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIV. L’auteur de Robert Emmet »

Lord Byron, à lui seul, l’emporte, en intérêt littéraire et surtout en intérêt de nature humaine, sur tous ces Allemands sans passion ardente et profonde et qui n’ont de nature humaine que dans le cerveau… La vie de ce grand poëte, qui s’est élevé jusqu’au grand homme, est autre chose que celle de ces travailleurs en rêveries dont l’existence ressemble à une table des matières de leurs œuvres, dans laquelle elle tient… Pour tout homme, pour tout être si heureusement et si puissamment organisé qu’il soit, la vie de Byron est un sujet de critique et de biographie de la plus redoutable magnificence ; car Byron fut comme le plexus solaire du xixe  siècle, et tous les nerfs de la société moderne, cette terrible nerveuse, aboutissent à lui… Toucher à cet homme central, magnétique et vibrant, qui mit en vibration son époque, c’est toucher à l’époque entière… Jusqu’ici, ceux qui y ont touché s’y sont morfondus.

899. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Chamfort »

V Vignette fatale dans la mémoire, coup de sifflet dans l’intelligence, corruption dans la volonté fourvoyée, le bâtard est la parabole de la chute, la contrefaçon du dogme qu’il repousse, et un argument vivant, dans sa propre existence, contre sa propre incrédulité !

900. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Louis XIV. Quinze ans de règne »

Il faut être juste : la philosophie, qui se moque des hypocrites religieux et qui a les siens, les révolutions, qui ont détruit les grandes fortunes et rendu la vie si exiguë, ne devaient-elles pas arriver à ce résultat de nous pousser l’imagination, de toute la force de l’ennui enragé qu’elles ont créé pour les peuples modernes, vers le temps passé des grandes existences et des plaisirs largement conçus et splendidement réalisés ?

901. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Balzac »

Il ne la désarticule pas ; il s’infuse, au contraire, dans tout l’ensemble de l’existence, et il y répand la lumière, la force et la chaleur.

902. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

Il a traduit, avec, une expression française qui est à l’allemand ce que l’opale est à du grès, cette logique, qui n’est plus la logique des autres philosophies et à laquelle Hegel s’est vanté de donner une existence substantielle.

903. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Fleuve magnifique et pur dès sa source, il entra aisément et fortement dans l’existence, comme ces fleuves qui roulent sur des pentes et qui n’ont pas besoin de surmonter des résistances pour creuser un lit à leurs eaux.

904. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

Il ne discute pas une minute l’existence de ses deux Églises parallèles qui doivent, dit-il dans sa préface, former jusqu’à la fin du monde une asymptote, et il passe immédiatement à ses biographies parallèles.

905. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

Catholique pour son propre compte, ayant accepté par conséquent le dogme et la tradition catholiques sur la question des influences surnaturelles et l’existence des bons et des mauvais esprits, il a voulu faire pour d’autres que pour lui même la preuve d’un fait auquel il croit, lui, mais que les autres auxquels il s’adresse repoussent et nient.

906. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Mme de Girardin. Œuvres complètes, — Les Poésies. »

Cet orgueil aux yeux baissés, cette orgueil jeune fille est superbe et n’avait jamais été exprimé d’un trait plus profond et plus vrai… Certainement, rien n’a jamais valu ni pour elle, ni pour personne, ni au point de vue de la galerie et du succès, ni au point de vue de son émotion intérieure, ce moment unique… ce premier coup d’archet de l’ouverture d’une existence qui ressembla, hélas !

907. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Alfred de Vigny »

Évidemment, de destinée révélée par la physiologie, l’auteur des Destinées semblait fait pour porter la mitre ou la barrette comme Fénelon et le cardinal de Polignac, natures analogues à la sienne, si la Révolution n’avait pas renversé sens dessus dessous toutes les existences, comme la main d’un enfant secoue et mêle, dans leur sac, tous les numéros d’un loto.

908. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

Si pourtant il fallait rester là-bas, je fais dès maintenant le don de ma frêle existence à la cause qui secoue notre patrie d’un spasme héroïque et divin11.

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