Revenant habiter à Paris l’année suivante, vers octobre 1793 : J’ai la douce consolation, dit-il, d’y éprouver que l’on peut trouver Dieu partout, que partout où on trouve son Dieu on ne manque de rien, on ne craint rien, on est au-dessus de tout, enfin que l’on peut obtenir toutes les connaissances qui nous sont nécessaires sur notre propre conduite si on les demande avec confiance. […] Il avait déjà parlé à une précédente séance et obtenu quelques amendements qu’il demandait sur ces expressions exagérées, faire nos idées, créer nos idées, etc., qu’il voulait qu’on réduisît à leur juste valeur et sans préjudice pour la faculté intérieure naturelle qui seule avait réellement ce pouvoir. À cette nouvelle séance, il demanda, par une lettre motivée qu’il lut à haute voix, trois nouveaux amendements à la doctrine du professeur : 1º sur le sens moral dont il réclamait la reconnaissance nette et distincte et le rétablissement formel dans une bonne description de la nature humaine ; 2º sur la nécessité d’une première parole accordée ou révélée à l’homme dès la naissance du monde, et sur la vérité de ce mot de Rousseau que la parole a été une condition indispensable pour l’établissement même de la parole ; 3º sur la matière non pensante, et qu’il fallait remettre à sa place bien loin de ce sublime attribut : Je fus mal reçu par l’auditoire, dit-il, qui est dévoué en grande partie à Garat à cause des jolies couleurs de son éloquence et de son système des sensations. […] Garat avait dit en opposition à l’universalité des idées morales ou autres idées premières : « Je ne connais rien d’universel, à la rigueur, que l’univers. » Saint-Martin le presse sur ce mot et lui en demande compte : Malgré l’opposition que vous annoncez contre le matérialisme, vous avez cependant été entraîné à dire, comme ses sectateurs, que vous ne connaissiez rien d’universel, à la rigueur, que l’univers, tandis qu’il y a quelque chose en vous de bien plus universel que cet univers, savoir votre pensée.
Elle rompait là-dessus des lances avec ses parents et amis d’autrefois : et cependant, quand l’Empereur rencontrait Mme de Coigny aux Tuileries, la sachant femme avant tout, prompte aux bons mots et aux reparties, il lui arrivait le plus souvent de lui demander : « Comment va la langue ? […] À Paray, où elle poursuivait de préférence son travail, elle ne trouvait aucun secours ; le curé du village n’était pas capable de la diriger, ni même de l’entendre : Je lui demandais un jour ce qu’il pensait des Pères apostoliques ; il n’en pensait absolument rien, ne sachant pas même leurs noms. […] Molé qui lui demandait la cause de sa tristesse, il livrait cet aveu pénible : « J’ai quarante ans. » M. de Chateaubriand était de l’avis de ce vieil élégiaque d’Ionie, de Mimnerne, celui qu’on a pu appeler le huitième sage de la Grèce ou le sage du plaisir, et qui mettait tout le prix de la vie dans les jouissances de la jeunesse. Mimnerne demandait, pour extrême limite, à mourir à soixante ans.
Francis Wey,, dans un spirituel Rapport adressé au Comité des travaux historiques51, a cité de ce poème des vers descriptifs fort exacts sur l’avalanche, sur sa formation et sa marche ; mais là encore ce qui domine chez Peletier, dans cet ouvrage qu’on a bien fait de réimprimer et qui est, en effet, une curiosité locale, je le demande, est-ce bien le poète, celui qui mérite qu’on l’appelle et qu’on le salue de ce nom, et n’est-ce pas plutôt le savant encore, l’observateur, le physicien et le curieux de la nature ? […] Elle demande justice et vengeance de l’attentat de Folie. […] Folie, citée à comparaître, demande qu’un dieu plaide pour elle : elle craindrait, si elle plaidait en personne, les murmures de la cabale des jeunes dieux, toujours portés « du côté d’Amour. » La Folie n’est pas si folle. […] Mais cela demande à être expliqué.
Ce n’est pas moi pourtant qui lui ferai un reproche d’être resté au fond mécontent de lui ; d’avoir eu comme une teinte de tristesse répandue jusqu’à la fin sur ses souvenirs, et, sans regretter précisément ce qu’il avait fait, d’avoir compris qu’il y avait sur cette partie de sa vie sinon une tache, du moins une obscurité qui demandait un éclaircissement. […] Cette lettre est adressée à l’un de ses amis, négociant et nullement militaire, qu’il avait connu à Paris dans le temps où lui-même était dans les affaires, et qui habitait en dernier lieu à Saint-Pétersbourg63 : « 16/28 mars 1822. — Mon cher Pangloss, j’ai reçu votre aimable et philosophique épître du 8/20 février, et après l’avoir lue et savourée, je me suis bien demandé lequel de nous deux était le coupable du silence de 900 jours… Vous broyez donc décidément du noir sur les bords de la Newa, et, à vous entendre, il ne faut s’occuper ni du passé, ni du présent, ni de l’avenir. […] Désenchanté de toutes les illusions humaines, je ne désire qu’une retraite que je ne puis pas décemment demander, ayant si peu servi depuis ma démarche ; je traînerai donc par reconnaissance et par devoir ma triste carcasse sur le premier champ de bataille où il me sera possible de courir au-devant d’un boulet bienfaiteur. […] Je ne crois pas me tromper en disant que l’empereur, dès la déclaration des hostilités, lui avait demandé son plan : Jomini avait répondu que, pour faire un tel plan et savoir jusqu’où l’on pouvait s’engager au-delà du Danube, il fallait savoir où l’on en était avec l’Autriche et la Prusse ; qu’autrement c’était une souricière.
Lorsque, en 1827, à l’occasion du sujet proposé par l’Académie française, qui avait demandé le Tableau de notre littérature au xvie siècle, quelques esprits curieux se portèrent plus particulièrement vers la poésie de ce temps-là, leur première impression fut la surprise : on leur avait tant dit que cette poésie, celle qui remplissait l’intervalle de Clément Marot à Malherbe, était barbare et ridicule, qu’ils furent frappés de voir, au contraire, combien elle l’était moins qu’on ne le répétait de confiance ; combien elle offrait, après un premier et rude effort, d’heureux exemples de grâce, d’esprit, et parfois d’élévation. […] Il accorde que la négligence de nos ancêtres, ayant plus à cœur le bien faire que le bien dire, a laissé le français rude et sec, si pauvre et si nu, qu’il a présentement besoin « des ornements et, s’il faut ainsi parler, des plumes d’autrui. » Il ignore notre langue romane française du xiiie siècle, de laquelle Rivarol, par un instinct remarquable, disait : « Il faut qu’une langue s’agite jusqu’à ce qu’elle se repose dans son propre génie, et ce principe explique un fait assez extraordinaire, c’est qu’aux xiiie et xive siècles la langue française était plus près d’une certaine perfection qu’elle ne le fut au xvie . » Combien cette langue du xiiie siècle, et presque européenne alors, avait perdu de terrain au commencement du xvie , on le voit par les termes mêmes de la tentative de Du Bellay ; il importe, pour apprécier équitablement cette tentative, qui fut celle de tous les jeunes esprits doctes et généreux d’alors, de se mettre au point de vue de cette génération même qui entra sur la scène vers 1550 et de ne pas lui demander plus ni autre chose que ce qu’elle pouvait raisonnablement. […] Léon Gautier, dans un livre intéressant sur les anciennes Épopées françaises, se plaçant à l’époque qu’il estime la plus belle de notre moyen âge poétique, a jugé avec une extrême rigueur notre Renaissance littéraire du xvie siècle ; et je demande à le citer ici de préférence à d’autres qui ont pensé de même, au poète Miçkiewicz par exemple, parce qu’il embrasse plus complètement tous les éléments du procès et qu’il y entre, le dernier venu, en toute connaissance de cause : « Nous ne savons pas, dit M. […] En conscience, on ne saurait demander aux hommes d’avoir des horizons historiques tout à fait hors de leur temps, de savoir ce que nul alors ne savait, de deviner ce qui était caché et ce qui s’était perdu ou altéré au point d’être méconnaissable ; je reviendrai, à l’occasion d’un chapitre de Du Bellay, sur cet article des romans de chevalerie sons lesquels on aurait voulu qu’il retrouvât les chansons de geste.
Poésie et amour se confondirent toujours à ses yeux, et c’est de lui, dans une Épître à Victor Hugo, que sont ces vers que j’aime à citer comme la devise du poëte élégiaque, et qui le peignent lui-même tout entier : Il est aussi, Victor, une race bénie Qui cherche dans le monde un mot mystérieux, Un secret que du Ciel arrache le génie, Et qu’aux yeux d’une amante ont demandé mes yeux. […] Je demande d’en citer un passage (prose et vers), qui me semble fidèlement reproduire l’impression élégiaque sous laquelle j’avais conçu le héros. […] C’est donc le cœur qu’il faut demander chez Arthur et que nous y louerons sans réserve comme plein d’aspirations adorables. […] et, quand vos grains recueillis seront devenus le pain des familles, ce pain que nous autres, insensés des villes, mangeons avec tant d’indifférence et d’oubli, le pauvre, toujours chrétien, lui, n’entamera pas sa nourriture unique, la vie de ses enfants, sans faire, avec la pointe de son couteau, cette croix dont il salue le jour et la nuit, et tous les actes de on existence laborieuse ; il remerciera Dieu du bienfait accordé à ses peines ; il lui demandera de bénir encore les travaux auxquels il s’apprête et pour lesquels il se fortifie.
Ce qui la caractérise en ce moment cette littérature, et la rend un phénomène tout à fait propre à ce temps-ci, c’est la naïveté et souvent l’audace de sa requête, d’être nécessiteuse et de passer en demande toutes les bornes du nécessaire, de se mêler avec une passion effrénée de la gloire ou plutôt de la célébrité, de s’amalgamer intimement avec l’orgueil littéraire, de se donner à lui pour mesure et de le prendre pour mesure lui-même dans l’émulation de leurs exigences accumulées ; c’est de se rencontrer là où on la supposerait et où on l’excuse le moins, dans les branches les plus fleuries de l’imagination, dans celles qui sembleraient tenir aux parties les plus délicates et les plus fines du talent. […] De cascades en cascades, je n’aurais pas de sitôt fini sur l’annonce, qui demanderait toute une histoire : Swift, d’une encre amère, l’aurait tracée. […] Il y a peut-être, à l’heure qu’il est, des personnes qui se croient les représentants uniques et jurés de la littérature française, prêts à vous demander compte des bons ou méchants mots, et à vous citer par-devant eux pour la plus grande dignité de l’Ordre. […] Dans l’épître au Roy pour avoir esté desrobé, il épuise tous les tours et toutes les gentillesses de la requête ; il ne ressemble pas à tant de gens insatiables, dit-il, il ne veut plus rien demander : Mais je commence à devenir honteux, Et ne veux plus à vos dons m’arrester ; Je ne dy pas, si voulez rien prester, Que ne le prenne……….
Par l’autre voix secrète, il n’était pas moins excité à se marquer une place entre les jeunes et hardis investigateurs qui, dans les dix dernières années de la Restauration, allaient demander aux littératures étrangères des vues plus larges, des précédents et des points d’appui pour l’émancipation de l’art, et des termes nombreux de comparaison pour l’histoire de l’humaine pensée. […] De tous ces courants parallèles ou rivaux, de toutes ces lames redoublées (cette image physique et presque domestique est ici permise) il est résulté vraiment une manière de pile de Volta, un appareil littéraire considérable. — Je parlerai encore moins de ces autres influences incomparables qui ne se mesurent pas, et pour lesquelles il faudrait demander un nom aux muses. […] En général, on pourrait demander à certains chapitres un peu plus de refonte et une sorte de bouillonnement, si cela était conciliable avec la précise exactitude. […] Mais, de dom Rivet à dom Brial, ne cherchez que des matériaux ; ne demandez ni une vue rare ni un éclair.
Sa figure, sans être belle, était perçante ; il était impossible d’apercevoir dans un théâtre ou dans un salon cette figure de fils des preux, fière, gracieuse, accentuée, sans demander quel était ce jeune gentilhomme, et sans se souvenir de lui. […] VIII Je faisais donc quelquefois effort sur moi-même et trêve à ma solitude absolue pour me faire recommander tantôt à M. de Rayneval, tantôt à M. d’Hauterive, tantôt à M. de Barante, tantôt à M. de Vaublanc, et leur demander protection ; ils me recevaient bien, mais en souriant de ma jeunesse et de ma figure, et me remettaient à d’autres temps. […] On ne lui demandait pas d’où il venait ; mais on pleurait en le revoyant comme en revoyant une ombre. […] C’étaient ensuite mille autres questions sur l’état de mon cœur : elles me demandaient si j’avais vu une biche blanche dans mes songes, et si les arbres de la vallée secrète m’avaient conseillé d’aimer. » Cependant Atala apparaît pour la première fois à Chactas : « Une nuit que les Muscogulges avaient placé leur camp sur le bord d’une forêt, j’étais assis auprès du feu de la guerre avec le chasseur commis à ma garde.
L’ame aime la symmétrie, mais elle aime aussi les contrastes ; ceci demande bien des explications. Par exemple : Si la nature demande des peintres & des sculpteurs, qu’ils mettent de la symmétrie dans les parties de leurs figures, elle veut au contraire qu’ils mettent des contrastes dans les attitudes. […] Voyez, je vous prie, la multiplicité des causes ; nous aimons mieux voir un jardin bien arrangé, qu’une confusion d’arbres ; 1°. parce que notre vûe qui seroit arrêtée ne l’est pas ; 2°. chaque allée est une, & forme une grande chose, au lieu que dans la confusion, chaque arbre est une chose & une petite chose ; 3°. nous voyons un arrangement que nous n’avons pas coûtume de voir ; 4°. nous savons bon gré de la peine que l’on a pris ; 5°. nous admirons le soin que l’on a de combattre sans cesse la nature, qui par des productions qu’on ne lui demande pas, cherche à tout confondre : ce qui est si vrai, qu’un jardin négligé nous est insupportable ; quelquefois la difficulté de l’ouvrage nous plaît, quelquefois c’est la facilité ; & comme dans un jardin magnifique nous admirons la grandeur & la dépense du maître, nous voyons quelquefois avec plaisir qu’on a eu l’art de nous plaire avec peu de dépense & de travail. […] Or cette ceinture ne pouvoit être donnée qu’à Vénus ; elle ne pouvoit convenir à la beauté majestueuse de Junon, car la majesté demande une certaine gravité, c’est-à-dire une contrainte opposée à l’ingénuité des graces ; elle ne pouvoit bien convenir à la beauté fiere de Pallas, car la fierté est opposée à la douceur des graces, & d’ailleurs peut souvent être soupçonnée d’affectation.
avec naturel, gaieté, et une certaine abondance et richesse de nature qui ne demandait qu‘à s’épanouir. […] Revenons et demandons-nous, quand on relit aujourd’hui ces poésies de la première manière de Mme de Girardin, ce qu’il en faut penser. […] Le Nil, le climat d’Égypte, le soleil d’Afrique, deviennent successivement des thèmes à des tirades plus ou moins magnifiques : mais cette vérité qui sort, qui par endroits éclate d’une époque bien comprise ou de la nature humaine vue dans tous les temps, ne la demandez pas. […] Mme de Girardin se demande : « Ces grands égards que témoigne pour Mlle Rachel le monde parisien, sont-ils accordés à son talent ?
Droz, jugeant les écrits de Mme de Lambert24, était frappé de ce qu’une telle morale, qui prêche ouvertement l’ambition, renferme de dangereux et même d’absurde : je lui en demande bien pardon, Mme de Lambert savait qu’à la date où elle écrivait, le, danger pour cette jeunesse guerrière était bien plutôt dans le trop de dissolution et de mollesse. Fénelon, jugeant ces mêmes Avis de Mme de Lambert à son fils, disait : L’honneur, la probité la plus pure, la connaissance du cœur des hommes, règnent dans ce discours… Je ne serais peut-être pas tout à fait d’accord avec elle sur toute l’ambition qu’elle demande de lui ; mais nous nous raccommoderions bientôt sur toutes les vertus par lesquelles elle veut que cette ambition soit soutenue et modérée. » Mme de Lambert perdit son mari en 1686 ; elle l’avait accompagné deux années auparavant à Luxembourg, quand il avait été nommé gouverneur de cette province, et, dans ce pays nouvellement conquis, elle l’avait aidé à se concilier les cœurs : « Il avait la main légère, dit-elle, et ne gouvernait que par amour, et jamais par autorité. » Elle avait consacré tout son bien personnel, qui était considérable, à l’avancement de la fortune de son mari et à une honorable représentation. […] On est tenté de se demander si c’est Mme de Lambert qui a été tout d’un coup saisie de la maladie de bel esprit à soixante ans, et si ce n’est pas plutôt lui qui a été pris d’un redoublement de sévérité et de scrupule. […] Ailleurs, dans un petit Traité de la vieillesse, elle parlera de la dévotion, non pas comme d’un faible, mais comme d’un soutien à mesure qu’on avance en âge : « C’est un sentiment décent et le seul nécessaire… La dévotion est un sentiment décent dans les femmes, et convenable à tous les sexes. » Cette manière d’envisager la religion est irréprochable au point de vue social et moral ; mais le vrai chrétien demande davantage, et je conçois que le digne M. de La Rivière n’ait pas été entièrement satisfait, à cet égard, des dispositions de son amie.
Convaincue de ces vérités, Sa Majesté demande le plan d’une université ou d’une école publique de toutes les sciences. […] Et puis leur demander à tout moment : Voulez-vous être un ignorant, un sot ? […] C’est dans les mêmes écoles qu’on étudie encore aujourd’hui, sous le nom de belles-lettres, deux langues mortes qui ne sont utiles qu’à un très-petit nombre de citoyens ; c’est là qu’on les étudie pendant six à sept ans sans les apprendre ; que, sous le nom de rhétorique, on enseigne l’art de parler avant l’art de penser, et celui de bien dire avant que d’avoir des idées ; que, sous le nom de logique, on se remplit la tête des subtilités d’Aristote et de sa très-sublime et très-inutile théorie du syllogisme, et qu’on délaye en cent pages obscures ce qu’on pourrait exposer clairement en quatre ; que, sous le nom de morale, je ne sais ce qu’on dit, mais je sais qu’on ne dit pas un mot ni des qualités de l’esprit, ni de celles du cœur, ni des passions, ni des vices, ni des vertus, ni des devoirs, ni des lois, ni des contrats, et que si l’on demandait à l’élève, au sortir de sa classe, qu’est-ce que la vertu ? […] Sa Majesté Impériale ne veut certainement point de ces genslà, et s’il lui faut des prêtres, elle les demande sans doute édifiants, éclairés et tranquilles.
pour l’universalité des esprits, l’embarras eût été cela même ; l’embarras eût été de faire prendre le change à l’opinion sur des faits aussi clairs que ceux que Chasles produit dans son livre, et qu’on ne lui demandait pas. […] Dans sa Virginie de Leyva, ce n’est qu’un libertin par la pensée et un précieux dans le langage, et, dans son impossibilité d’être énergique, parce qu’il n’est pas passionné, il nous déteint l’indécente Religieuse de Diderot, ce vermillon obscène, et nous raconte, avec des chatteries de style comme il en a, même dans les sujets les plus graves, une histoire de la Gazette des Tribunaux d’Italie qui, pour faire balle dans nos âmes et y éveiller l’écho de haine qu’on y voudrait entendre, ne demandait qu’une poignante simplicité. […] Dans sa Virginie de Leyva, Philarète Chasles est un moraliste qui traite lestement toutes les religions de formules et qui demande les libres essors du phalanstérien. […] Mais, dans l’entente des choses· historiques et humaines, j’aurais cru plutôt Philarète Chasles du côté de Machiavel que de l’abbé de Saint-Pierre, et pourtant c’est du côté de l’abbé de Saint-Pierre que je le trouve dans ce livre-ci… Comme : l’abbé, il y baye aux corneilles de la paix perpétuelle, et il la demande à tout le monde : aux gouvernements, aux arts, à la littérature, comme ce pauvre abbé, pauvre spirituellement autant que physiquement sans· soutane, car il ne savait pas écrire, et à qui Chasles prête généreusement son habit !
Chaque être demande à se nourrir des contingences pour les refondre en lui, suivant son propre caractère. […] Tout être vivant qui, plongé dans un milieu d’action et de passion, de haines et de sympathies, de lutte et de liberté, de mille et mille liens entremêlés, d’hommes et de femmes, dans un ensemble de toutes les vies, de toutes les natures, de toutes les jouissances, ne s’élance pas d’un libre instinct dans ce riche univers, pour y satisfaire sa soif infinie du plaisir et lui demander sa part de tout ce qu’il recèle de saveur et de sens, ne sera jamais qu’un rameau desséché sur l’arbre de la grande vie : sans parfum, sans éclat, sans fruit et sans couleur, sans force créatrice. […] En renonçant à m’attaquer à la doctrine tellement surnaturelle du moderne « vierge et martyr », je me demande ce qu’il faut le plus admirer, du courage de celui qui écrivit un livre semblable au sien, ou de l’inépuisable sympathie de ceux qui eurent la constance de prendre pour autre chose que ce qu’elle est au fond, cette amusante comédie dont l’auteur est le seul personnage, et à laquelle il voudrait nous voir participer. […] Je me demande si M.
Dix ou douze ans après la mort de Dumas, nous nous demandons si quelqu’une de ses œuvres passera à la postérité. […] Edmond de Goncourt croit que son frère Jules tomba malade et mourut des blessures reçues en luttant avec la phrase rebelle, à qui il demandait ce que nul écrivain ne lui demanda jamais, de surpasser la palette. […] Je sais que beaucoup de gens demandent de leur prêter un roman d’Alarcon de préférence à ceux des autres auteurs. […] Il se compose de gens qui demandent au roman un honnête délassement et les clames en forment la majeure partie. […] Enfin, n’y a-t-il pas eu des gens qui m’ont demandé de leur prêter mes romans !
Jules Lemaître, allait jusqu’à se demander si leur œuvre était durable, et si l’on ne devait pas la considérer seulement comme « une brillante erreur littéraire154 ». […] Volontiers, ils auraient demandé aux hommes et aux choses des spectacles plus tourmentés, plus romanesques, plus excentriques. […] En une superbe pièce de vers qui, on se demande pourquoi, ne fut jamais rééditée, lui-même a dépeint ce phénomène psychologique avec des traits si explicites qu’ils valent, dans leur brièveté, les plus longues confessions. […] « Tout ce qui est dans la Nature est dans l’Art », dit l’auteur d’Hernani, et il se demande si « cette nature mutilée en serait plus belle ». […] Et, en effet, on se demande ce qu’ils ont pensé ou accompli qui mériterait davantage d’attirer les regards.
On ne demande pas encore aux vers d’être beaux comme de la belle prose ; mais on exige déjà d’une Ode qu’elle soit « construite » comme un Sermon. […] Que nous fallait-il davantage que ce fond inaltérable des livres sacres, et que pourrions-nous demander de plus à la divine Providence ? […] Mais je demande qui s’en douterait à parcourir nos histoires de la littérature. […] Si l’on commence par supposer les problèmes résolus, n’est-ce pas demander à la raison, pour sa première démarche, de s’abdiquer elle-même ? […] C’était trop demander à nos jansénistes et à nos gallicans, et c’était les disposer à recevoir l’impulsion de nos philosophes.
Voilà ce que se demande le poète à une de ces heures où la grâce est en défaut, et où nous tombons dans le délaissement. […] Un moment, son désespoir est au comble ; l’ironie va le saisir, et, prenant l’existence pour l’amer sarcasme d’un maître jaloux, il est prêt à lui rendre mépris pour mépris, à le maudire et à le railler ; — ou bien, à d’autres instants, la défaillance le poussant à la mollesse, il se demande s’il n’est pas mieux de prolonger les voluptés jusqu’à la tombe et de se noyer l’âme sur des seins embaumés de roses.
Puis, quand il a tout énuméré, quand il a touché une à une toutes ces plaies du cœur, une pensée le saisit, une inquiétude le prend, qu’a ressentie quiconque est resté orphelin ici-bas ; il se demande si tous ces morts qui voient désormais la lumière se souviennent encore de nous. […] Il répond quelque part à l’un de ses amis qui l’interroge : Tu demandes de moi les phases de ma vie, Le compte de mes jours ; — mes jours, je les oublie… Il avait déjà dit ailleurs : Ces temps sont déjà loin : que l’oubli les dévore ; Ce qui n’est plus pour l’homme, a-t-il jamais été ?
Les anciens ne demandaient aux autres que de s’abstenir de leur nuire ; ils désiraient uniquement qu’on s’écartât de leur soleil pour les laisser à eux-mêmes et à la nature. […] La terreur causée par un supplice non mérité se prolonge d’une génération à l’autre : on entretient l’enfance du récit d’un tel malheur ; et quand l’éloquent Lally, vingt ans après la mort de son père, demandait en France la réhabilitation de ses mânes, tous les jeunes gens qui n’avaient jamais pu voir, jamais pu connaître la victime pour laquelle il réclamait, versaient des pleurs, se sentaient émus, comme si le jour horrible où le sang avait été versé injustement ne pouvait jamais cesser d’être présent à tous les cœurs.
Et d’abord, avant de trop s’émouvoir il convient de se demander si tout cela est bien vrai. Toutes ces dérogations aux principes, on ne les rencontre que dans les infiniment petits ; il faut le microscope pour voir le mouvement brownien ; les électrons sont bien légers ; le radium est bien rare et on en a jamais que quelques milligrammes à la fois ; et alors on peut se demander si, à côté de l’infiniment petit qu’on a vu, il n’y avait pas un autre infiniment petit qu’on ne voyait pas et qui faisait contrepoids au premier.
L’auteur n’eût pas mieux demandé ; mais depuis qu’on a plaisanté contre les susdits et susdites marquises, prêtres, nonnes et capucins avec des guillotines, des fusillades, des mitraillades, des bateaux à soupapes et autres railleries tout à fait délicates, il est devenu vraiment difficile de trouver contre ces monstres rien qui soit plus sanglant, plus piquant, plus mordant ou plus tranchant que les diverses drôleries dont on vient de lire une énumération abrégée. […] Il allait clore cette trop longue note, lorsque son libraire, au moment d’envoyer l’ouvrage aux journaux, est venu lui demander pour eux quelques petits articles de complaisance sur son propre ouvrage, ajoutant, pour dissiper tous les scrupules de l’auteur, que son écriture ne serait pas compromise, et qu’il les recopierait lui-même.
Que c’était à sa fille à lui présenter à manger, et à son gendre à relever sa tête et son traversin, parce que l’un demande de l’adresse, et l’autre de la force. […] Le moment qu’ils demandent est un moment commun, sans intérêt ; celui que le peintre a choisi, est particulier.
favor archimimus, c’est le nom et la profession de l’acteur qui faisoit le rolle de Vespasien, aïant demandé aux directeurs du convoi combien coûtoit sa pompe funebre, il s’écria, lorsqu’il eut appris que la dépense montoit à des millions. épargnons, messieurs, donnez-moi cent mille écus, et jettez mon cadavre dans la riviere. […] Nos premiers faiseurs d’opera se sont égarez, ainsi que nos poëtes comiques, pour avoir imité trop servilement les opera des italiens de qui nous empruntions ce genre de spectacle, sans faire attention que le goût des françois aïant été élevé par les tragedies de Corneille et de Racine, ainsi que par les comedies de Moliere, il exigeoit plus de vrai-semblance, qu’il demandoit plus de regularité et plus de dignité dans les poëmes dramatiques, qu’on n’en exige au-delà des Alpes.
Si donc son entreprise demande à être reprise, il a eu l’honneur de montrer la route où il convient de s’engager. […] C’est se demander quelles sont les causes qui ont donné naissance aux 12911 différentes maximes dont elle est faite et quelles en sont les raisons d’être, etc. ; puisqu’il s’agit de quelque chose qui est et qui a duré, on peut être certain par avance que ces causes et que ces raisons existent.
… Dans les bois, je ne me soucie pas beaucoup des fourmis et j’évite de m’asseoir près d’elles, mais je me demande si, pour moi qui ne suis pas un savant, leur voisinage ne serait pas encore plus dangereux en littérature ? […] Jules Levallois le sent bien, du reste, et serait effroyablement embarrassé si on lui demandait, à lui, cet observateur, ce solitaire et cet ermite, l’analyse de l’éducation morale donnée à l’homme par la Nature, et les moyens dont elle se sert pour doubler ou tripler cette liberté qui vient en pleine terre, comme une plante, et qui n’a autour de soi que des êtres muets, indifférents à ses efforts, à son développement et à ses mérites.
… Dans de telles circonstances, qui sont les circonstances présentes, les grandes ou fortes œuvres tarissent et les petits livres abondent, les petits livres qui sont aux œuvres dignes de ce nom ce que le tableau de genre est aux grandes toiles ; les petits livres qui ne demandent que des facultés secondaires et qui dispensent de tout ce qui est difficile : la profondeur dans l’inspiration, la combinaison, l’ordre, la distribution de la lumière dans le fourmillement des détails, l’étoffe de l’ensemble enfin ; les petits livres dont ce brillant dandy, Mirabeau manqué dans l’intrigue, lord Bolingbroke, disait, avec sa fatuité épigrammatique, « qu’au moins ils avaient le mérite d’être bientôt lus ». […] … Voilà ce qu’on est obligé de se demander quand on l’a lue.