L’exécution complète en peut être repoussée dans un avenir lointain, reculée même indéfiniment : l’idée n’en est pas moins formulable, dès maintenant, en termes actuellement donnés. […] C’est dire que son avenir déborde son présent et ne pourrait s’y dessiner en une idée. […] Un plan est un terme assigné à un travail : il clôt l’avenir dont il dessine la forme. Devant l’évolution de la vie, au contraire, les portes de l’avenir restent grandes ouvertes. […] Ces animaux pouvaient ressembler à certains de nos Vers, avec cette différence toutefois que les Vers aujourd’hui vivants auxquels on les comparera sont les exemplaires vidés et figés des formes infiniment plastiques, grosses d’un avenir indéfini, qui furent la souche commune des Échinodermes, des Mollusques, des Arthropodes et des Vertébrés.
Mais on comptait sur l’avenir, et l’on voulait être complet. […] Ils n’ont pas fait l’avenir, mais ils ont sur lui une influence considérable. […] Et voici, des académiciens au doigt levé vers la porte close de l’avenir, qu’ils n’entrebâillent d’ailleurs point, dont ils ne sauraient éclairer nulle fente, et des pasteurs au parler un peu glacé et trop correct. […] On les pourrait diviser en deux classes : les sociologues et les moralistes ; et, parmi ces deux classes, distinguer deux partis : ceux qui règlent l’avenir d’après les hommes calmes et conservateurs du passé ; ceux qui l’entrevoient à la lumière des rêveurs généreux et des progressives déterminés du même passé ! […] Il est donc évident que l’artiste doué d’une sensibilité très fine, s’il est d’habitude disposé à négliger les importantes et usuelles questions de tarifs, de douanes, de budgets, peut n’en être pas moins prêt à saisir les lignes essentielles de l’avenir, les aspects fermes ou mobiles du présent, et énoncer sur l’heure où il vit les plus sages aperçus.
Mme Daudet l’interrompt, en disant ingénument : « Je crois vraiment que je n’étais pas tout à fait développée en ce temps, je ne me rendais pas compte… » Je penserais plutôt qu’elle avait la foi des gens heureux et amoureux, la confiance que tout s’arrangerait dans l’avenir. […] ce plan d’avenir, qui me semblait une toquade de folle et de paresseuse, était inspiré à la pauvre enfant par cette anémie, qui a tout à coup éclaté, par le sentiment de sa faiblesse, qui lui faisait craindre, qu’après ma mort, elle ne puisse plus servir dans une autre maison. […] Et c’est le peuple et la jeunesse qui, à l’encontre des gens éclairés, intelligents, devinent les gouvernements et les grands hommes de l’avenir. […] » Paul Bert, le ministre de l’instruction publique, dans l’anxieuse inquiétude qu’il a de l’avenir de la République, avoue que dans le moment, il n’a plus sa tête pour son travail.
Ce sont les articles faits d’avance sur les gens qui sont en train de mourir, et qu’on garde, même quand ils réchappent, pour éviter de payer un autre article dans l’avenir. […] Il confesse ses projets d’avenir. […] votre Journal, c’est bien curieux… et je regrette bien de n’avoir pas écrit des notes plus tôt… mais j’ai commencé à en écrire l’année dernière. » Décidément, immense sera le nombre de journaux autobiographiques, que va faire naître dans l’avenir, le Journal des deux frères. […] Moi je crois que vous vous illusionnez, et que la jeune École normale vous trouve un critique démodé, un critique perruque, un critique vieux jeu, et voici la lettre qui va vous le prouver : Monsieur, Bien qu’il y ait de la hardiesse à adresser des félicitations à un homme tel que vous, je me risque à vous offrir les miennes, sûr que le témoignage de la jeunesse ne vous est pas indifférent, car il est sincère, et c’est un gage de l’avenir : ce que nous aimons nous le ferons triompher, quand nous serons des hommes.
Je vais en faire fondre une seconde épreuve, par laquelle je remplacerai le Louis XV de mon balcon, et signerai de son effigie dans l’avenir, la maison où il est mort. […] Et à propos de la révolution opérée dans les esprits, Daudet cite ce fait curieux, c’est qu’autrefois la classe chic des humanités françaises était la classe de rhétorique, la classe des professeurs en vue et des élèves destinés à un grand avenir, tandis que depuis la guerre avec l’Allemagne, c’est la classe de philosophie qui possède les intelligences du moment, et les professeurs faisant du bruit, comme Burdeau. […] Lundi 1er juin J’ai eu du plaisir à retrouver dans une interview d’Hervieu, une idée de mon Journal sur l’avenir du roman, à la date du 6 juillet 1856 et qui dit : « … Enfin le roman de l’avenir est appelé à faire plus l’histoire des choses qui se passent dans la cervelle que des choses qui se passent dans le cœur. » Il me semble que c’est là, où va décidément le roman dans ce moment.
Quant à Malherbe, il échappe vite à son temps pour fonder l’avenir : il en est pourtant par quelques-unes de ses pièces, d’un style moins tendu, plus fraîches que fortes de couleur et qui servent de transition entre le pétrarquisme mignard de ses premiers essais et la sévérité classique de ses chefs-d’œuvre. […] Car la vraie tragédie était déjà née : encore brute, à peine littéraire, aux mains du vieux Hardy, elle avait pour elle d’être un drame, une image mobile de la vie, un conflit de passions et de caractères toujours en action ; dans son style rude et barbare, elle contenait les chefs-d’œuvre de l’avenir. […] Précaution de ministre peu sûr de l’avenir ; mais qui sait si, cessant d’être Italien, il n’eût pu jeter quelques racines en Espagne ? […] Claretie sera définitif, et qu’on sera dispensé à l’avenir, quand on s’occupera de Gil Blas, d’étaler d’abord aux yeux du lecteur le fatras et les sottises qui composent aux trois quarts le dossier de l’affaire22. […] Mais surtout, sous cet épuisement apparent, la comédie que le xviiie siècle transmet à notre siècle contient les germes de l’avenir, qui paraîtront en leur temps.
De celui-ci il disait souvent, comme rêvant avec inquiétude de l’avenir : « Après tout, de nous tous, c’est lui qui est le plus sûr de vivre ! […] Nous souhaitons à ces messieurs et à leur publication un bon et solide avenir. […] Va donc à l’avenir en chantant, poëte providentiel, tes chants sont le décalque lumineux des espérances et des convictions populaires ! […] La musique de l’avenir est enterrée ! […] Je les engage vivement à célébrer moins haut un triomphe qui n’est pas des plus honorables d’ailleurs, et même à se munir de résignation pour l’avenir.
Je n’ose presser l’avenir ni forcer les présages ; je ne veux pas regarder au plus ou moins de ressemblance ; je m’en tiens à cette pieuse et enthousiaste invocation par laquelle un fidèle, un croyant saluait à un commencement d’année la patrie absente : « (Boitsfort, 1er janvier 1856)… Oh !
Cet homme que nous fait entrevoir le grand romancier Tolstoï, lorsqu’il peint le défilé interminable des blessés de Borodino qui passe sous les yeux de son héros ému et navré, cet homme couché sur le ventre au fond d’une charrette, dans la demi-ombre de la bâche, blessé, on ne sait où ni quand, d’on ne sait quelle blessure, sans visage, sans nom, sans passé, sans avenir, forme obscure et vague un moment devinée et disparue pour jamais : c’est là, semble-t-il, un détail insignifiant ; et pourtant que de pensée, que d’émotion ramassée en ce seul trait !
Ainsi notre déclamation théatrale est devenuë si vive et si passionnée, que l’acteur qui devroit réciter le plus posément, qu’un personnage qui raisonne sensément sur l’avenir, débite aujourd’hui les maximes les plus sages avec autant d’agitation que la prêtresse de Delphes en pouvoit montrer lorsqu’elle rendoit ses oracles assise sur le trépié.
Lui pourtant, qui accepte avec Spencer, contre Guyau, la théorie de l’art fin en soi, désintéressé, il sent bien que l’art doit avoir sa marque propre, que l’émotion esthétique se distingue en quelque chose des émotions ordinaires, et il recourt, pour se tirer d’embarras, à une hypothèse ingénieuse : « Nous croyons, écrit-il (p. 36), qu’il faudra à l’avenir distinguer dans l’émotion ordinaire (non plus esthétique) : d’une part, l’excitation, l’exaltation neutre qui la constitue, qui est son caractère propre et constant ; de l’autre, un phénomène cérébral additionnel, qui est l’éveil d’un certain nombre d’images de plaisir ou de douleur, venant s’associer au fond originel, le colorer ou le timbrer, pour ainsi dire, et produire la peine ou la joie proprement dites, quand elles comprennent le moi comme sujet souffrant et joyeux. » L’émotion esthétique aurait alors ceci de particulier, que, « tout en conservant intact l’élément excitation », elle « laisse à son minimum d’intensité l’élément éveil des images, etc. ».
Impuissant qu’on n’aurait pas même le courage de détester, si on ne pensait à l’avenir, au mal affreux que des esprits comme lui ont commis pourtant dans leur impuissance, Tallemant des Réaux est déjà — dans la première moitié du xviie siècle — une expression très vive et très nette de cet individualisme que Descartes représente dans la philosophie, Robinson Crusoé dans la vie romanesque, l’idéal de la vie réelle, Jean-Jacques Rousseau plus tard, et même Béranger.
Ils ont la conscience de l’histoire et sa gravité, le soin vigilant des faits et du détail, et cette raison moderne et libérale, cet esprit du temps qui voit peut-être avec trop de confiance et de sérénité les problèmes sociaux auxquels est suspendu l’avenir.
Tous les intérêts du temps, l’avenir des institutions chrétiennes, remplissaient sa vaste pensée.
Cependant, tels qu’ils sont et tels que l’avenir saura les discuter et les réduire, Guizot et Thierry resteront comme des historiens, du moins de gravité et d’effort, tandis qu’après eux, il faut bien le dire, le xixe siècle, tout à l’heure sexagénaire, n’a sur le Moyen Âge que des romanciers… qui ne sont pas des Walter Scott !
Seulement, la trombe hideuse reviendra, et pas plus dans l’avenir que dans le passé, cette poésie de Chénier ne l’empêchera de nous passer sur le corps !
Obstinations, taquineries, aigreurs, objurgations de la presse contre le pouvoir et du pouvoir contre la presse, arrestations, duels, convois politiques, émeutes, conspirations et révolutions plus ou moins avortées, toute cette petite pluie de petites choses qu’après les tonnerres de l’Empire il nous a fallu entendre tomber, voilà les événements que Carrel jauge, interprète, éclaire, et sur lesquels il cherche, en tâtonnant, à ajuster la loi de l’avenir.
nous signalons bien moins l’effet esthétique d’un tel dénoûment que la promesse qu’il nous fait implicitement pour l’avenir, — que la révélation ici entr’aperçue, non pas d’un grand romancier de plus dans le pays des Richardson, des Walter Scott et des Fielding, mais d’un grand romancier chrétien dans un pays littérairement hébraïque, et dont les Indiens cités par Michelet disent, avec leur sagacité ignorante et sauvage : « Les Anglais sont les Juifs de Londres qui ont fait crucifier Jésus-Christ lequel était Français. » 32.
L’atroce ennui qui s’échappe de sa logique, et sa logique est tout son système, ne servira pas de bouclier à Hegel contre les Heine de l’avenir, qui l’attendent, car comme Kant tué par un Allemand, il ne mourra pas d’une plaisanterie française.
Flourens jetait aux Bichats de l’avenir, pour le développer, le germe d’une nouvelle chirurgie, et ce n’était là qu’un profit de la physiologie ; mais la théorie posant l’axiome superbe : « la matière passe et les forces restent », frappait le matérialisme, d’un premier coup, au ventre même.
Les Purgon et les Diafoirus du xixe siècle n’ont pas rencontré le Molière qui doit les bafouer et les déshonorer dans l’avenir.
Tel a été le but dominant de l’abbé Monnin, en écrivant, pour la première fois, la vie prodigieuse de cet homme inouï qui a perdu son nom dans le titre de sa fonction, et qui, dans l’avenir comme dans le ciel, ne s’appellera plus que le Curé d’Ars.
C’est ainsi que pourrait l’être, et que l’a été à plusieurs places de son poème, l’auteur du Poème humain, qui nous invente une mythologie de l’avenir tout aussi fausse que les mythologies du passé, mais moins facile à trouver, car, ainsi que l’auteur des Métamorphoses, il ne l’avait pas sous la main et il l’a cherchée dans sa tête.
Que dans un fidèle avenir De l’oubli desséchant les mousses, Toujours jeune, le souvenir Vous reverdisse de ses pousses !
Et la valeur de son œuvre actuelle peut-elle donner à ceux qui l’étudient de grands pressentiments sur son avenir ?
Par respect pour les égarements d’un talent immense, je me tus sur ces incroyables Odelettes, quoiqu’elles m’inquiétassent pour l’avenir du poète ; car si je conçois jusqu’à un certain point qu’Hercule, imbécillisé par l’amour, file aux genoux d’Omphale, je ne le conçois plus si, en filant, il ne casse pas tous ses fuseaux.
Dans ses poèmes d’il y a trente-quatre ans, qui lui avaient fait tout de suite cette renommée sans tache qui s’étendit devant son avenir comme un moelleux tapis d’hermine, il avait imaginé ce genre de poésie qu’un vers de lui a si bien caractérisé ; L’enthousiasme pur dans une voix suave !
Qui sait si tout l’art de son livre n’est pas le froid machiavélisme d’un esprit capable de tout dans l’avenir, et qui se tâte et qui s’essaye ?