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736. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

Durant l’Empire, dans l’intérêt de la propagande anti-bonapartiste et républicaine, on n’osait s’opposer à cette cristallisation de la fantaisie, en quête de demi-dieux : après le 16 mai, il n’y avait pas nécessité de troubler les dernières années d’un homme âgé, dont le rôle était fini. […] Sans nul doute, les honorables Michelin, Ruel et Lyon Allemand de Londres s’imaginèrent que l’écrivain, qui venait de trépasser, était un de ces prolétaires de la plume, qui louent à la semaine et à l’année leurs cervelles aux Hachette de l’éditorat et aux Villemessant de la presse. […] L’engagement pour tous prendrait la date même de leur embarquement et ne pourrait excéder 15 années, à l’expiration desquelles il cesserait de droit. […] De 1848 à 1885, Hugo se comporte en « républicain honnête et modéré » et l’on peut défier ses adversaires de découvrir pendant ces longues années, un seul jour de défaillance. […] Ils n’avaient qu’à rester les maîtres du pouvoir, pour que Hugo conservât jusqu’à sa quatre-vingt-troisième année, la foi au Dieu des prêtres : mais il dût se rendre à l’évidence et suspendre son culte pour ce Dieu qui cessait de révéler sa présence réelle par la distribution de pensions.

737. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

C’est à l’intensité des sensations que la vie de l’âme se mesure, ce n’est pas à la longueur des années. […] si vous me connaissiez mieux, dirai-je à ces critiques, combien vous seriez loin de m’accuser de cette puérile vanité, morte en moi depuis bien des années ! […] J’avais acheté, quelques années avant, à Lyon, une édition de Milan de ce Corneille italien, en douze volumes. […] Reculer de quelques années sa mort, c’est toujours mourir. […] Enfin le prétendant était mort de tristesse et de dégoût plus que d’années à Rome ; cette mort avait rendu la liberté à la comtesse d’Albany.

738. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Indépendamment de son mariage avec une fille d’une famille illustre de Florence, dont il avait eu sept enfants, Boccace confesse, dans l’histoire de sa vie, écrite sur les lieux et si peu d’années après la mort de Dante, que son héros et son poète avait eu la faiblesse des héros et des poètes : un amour de la beauté poussé quelquefois jusqu’à la licence du cœur. […] Mais nous avons vécu de longues années en Italie dans la société de ces érudits commentateurs et explicateurs du Dante, qui se succèdent de génération en génération comme les ombres des hiéroglyphes sur les obélisques de Thèbes. […] Il avait passé alors à Florence de longues années dans la société d’Alfieri et de la comtesse d’Albany. […] Ma passion précoce pour l’Italie poétique l’intéressa à moi ; il m’ouvrit le sanctuaire du Dante ; il m’apprit à épeler vers à vers ce grand poème ou cette grande énigme dont il était le sphinx depuis tant d’années. […] « J’accomplis aujourd’hui ma quarantième année, plus que la moitié du chemin ordinaire de la vie.

739. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

Mais quand il en choisirait une autre, ce qu’il faudrait, c’est que le travail fût fait ; et j’ajoute qu’à mesure que le temps s’écoule, la difficulté de le bien faire augmente elle-même d’année en année. […]   Tel est, messieurs, le programme du cours que nous essayerons de traiter cette année. […] Les premières années du xviiie  siècle rappelleront à cet égard les premières années du xviie . […] Ce qui revient à dire qu’entre les années 1820 et 1830, le mouvement romantique, très loin d’aider l’évolution de la critique, l’aurait troublée plutôt. […] Il se pourrait, depuis une cinquantaine d’années, que l’on eût un peu perdu de vue ces considérations.

740. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Il mourut dans les premières années du xive  siècle. […] L’expérience et les années semblaient lui avoir donné, avec la satiété des spectacles qui avaient amusé sa jeunesse et son âge mur, un certain goût de pénétrer dans les causes et de tirer la morale des événements. […] La chronique de George Chastelain commence à l’année 1419, et se termine en 1474, date présumée de sa mort. […] Les Mémoires d’Olivier de la Marche commencent au règne de Charles le Téméraire, et se terminent à l’année 1501, quelques mois ayant sa mort. […] Quelques années auparavant, Olivier de la Marche traçait ce portrait de Philippe le Bon Philippe le Bon, duc de Bourgogne, « avoit une identité de son dedans à son dehors ; n’y avoit qui desmentît l’ung l’autre, ne visaige coraige, ne coraige semblant (physionomie).

741. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Oui, il y a quelque chose de neuf dans mon dernier bouquin, et il ne serait pas impossible qu’il se créât dans une vingtaine d’années, une école autour de La Faustin, comme il y en a aujourd’hui une, autour de Germinie Lacerteux. […] Ça pour venir quand même, à défaut d’innocence d’une époque, ça demande chez les nations, des illusions, des illusions comme il y en avait autour de l’année 1789, et comme il n’y en a pas autour de l’année 1882. […] Mercredi 31 mai Aujourd’hui, une femme mariée disait à une de ses amies : « Je n’ai eu qu’un bon mois, cette année… celui du krach ! […] Cette année-ci, il lui a demandé, si elle avait un calorifère dans sa maison. […] * * * — Une folie, un prurit de japonaiseries, cette année, j’aurai dépensé là-dedans 30 000 francs : tout l’argent que j’ai gagné, et parmi tout cet argent, je n’aurai jamais trouvé 40 francs pour m’acheter une montre en aluminium.

742. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

C’était par de semblables imprécations que les classiques accueillaient, dans les premières années du siècle, le Romantisme vagissant. […] Mais Rolla possédait « trois bourses d’or » ; pendant trois années il vécut en débauché vulgaire et « la meule de pressoir de l’abrutissement » le broya. […] Il est des années que j’enlève des foires d’Allemagne de fort belles parties de littérature brute, que je fais dégrossir à Paris, dans un atelier de traduction. […] La vie politique intense qu’on avait menée pendant des années avait habitué aux longues discussions, qui à elles seules ne pouvaient distinguer un roman d’entre les douzaines paraissant tous les mois. […] Quelques années après les bourgeois de Paris devaient montrer leur patriotisme en léchant les bottes des Prussiens de Blücher et des Cosaques d’Alexandre qui ravageaient et pillaient la France vaincue.

743. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Comme Duclos, après avoir donné ses Considérations sur les mœurs où il avait oublié de parler des femmes et où il avait à peine prononcé leur nom62, voulut réparer cette omission singulière en publiant l’année suivante (1751), sous le titre de Mémoires pour servir à l’histoire des mœurs du xviiie  siècle, une espèce de répétition de ses Confessions du comte de…, Voltaire qui trouvait ce genre de romans détestable, et qui voyait dans ceux de Duclos une preuve de plus de la décadence du goût, écrivait : « Ils sont d’un homme qui est en place (dans la place d’historiographe), et qui par là est supérieur à sa matière. […] Voltaire avait beau lui écrire, toujours en cette même année 1760 : « Vous êtes ferme et actif, vous aimez le bien public ; vous êtes mon homme, et je vous aime de tout mon cœur. […] Sachons-le : Duclos a été maire de Dinan pendant plusieurs années ; il a trouvé moyen de concilier cette vie bretonne avec son existence parisienne ; il a été membre des états de sa province ; c’est un homme de lettres qui a de la pratique administrative, et qui a connu un coin de vie parlementaire et politique. […] Il se sentit un redoublement de colère et d’indignation contre les hommes en place tracassiers ou timides, qui l’avaient empêché de faire sa visite accoutumée en Bretagne cette année.

744. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Il faudrait, pour son honneur, lui retrancher les douze dernières années de sa vie active. […] Montluc a oublié de nous dire la date et le lieu précis de sa naissance ; il dut naître dans les premières années du xvie  siècle et vers 1503. […] Il insiste peu sur ses débuts, et n’a pas les tendresses de l’enfance ni des premières années ; il ne pense qu’à prendre l’essor, à aller par-delà les monts, à voir l’Italie, le Milanais, qui depuis les expéditions de Charles VIII et de Louis XII était le champ de bataille et l’école militaire de la jeune noblesse. […] Dans l’invasion de la Provence par Charles-Quint (1536), il se signale par un coup de main heureux et qu’il raconte avec complaisance ; car c’est par là qu’après cette interruption pénible, lui qui ne hait rien tant que sa maison et à qui les « jours de paix sont des années », il se remet en train aux choses de guerre et qu’il rafraîchit l’idée de sa réputation que ce temps d’oisiveté et la longueur de sa blessure avaient un peu mise en oubli : « Ce n’est rien, mes compagnons, dit-il, d’acquérir la réputation et un bon nom, si on ne l’entretient et continue. » Il s’agissait d’affamer l’armée de Charles-Quint et de détruire certains moulins d’où il tirait ses farines, notamment les moulins d’Auriole entre Aix et Marseille.

745. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Cette beauté faisant retraite avec les années, — une retraite bien lente —, et se voilant insensiblement, l’esprit avait apparu peu à peu, comme à certains jours, bien avant le soir, l’astre au front d’argent se dessine dans un ciel serein du côté opposé au soleil. […] Il ne cessa, dans aucun temps, d’être pour Mme Récamier un ami fidèle, constant, attaché, non exigeant, se plaignant à peine d’être rejeté au second ou au troisième plan (car il y avait une hiérarchie marquée dans ce monde d’amis), mais prouvant par la délicatesse et la suite de son affection qu’il eût été digne d’être mieux traité, d’être avancé au moins d’un cran. « Il n’y a de doux, de consolant, et je dirais même d’honorable, lui écrivait-il après trente années de liaison, que la suite et la persévérance des sentiments. […] Pour celui qui y entrait, ne fût-ce qu’une fois, il n’y avait pas à s’y méprendre : le roi de céans, le Dieu du petit temple, durant toutes les dernières années, c’était M. de Chateaubriand. […] Il est fâcheux que les défauts de sa manière se marquent trop avec les années, et je regrette qu’on nous ait donné, dans la dernière moitié du second volume, un trop grand nombre de ces pages qui sont des certificats de décadence.

746. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Si cet événement était arrivé dans ma vingtième année, je ne serais pas resté le dernier, mais j’avais déjà plus de soixante ans. […] Je ressens là, sous une nouvelle forme, la vieille haine dont on me poursuit depuis des années et qui cherche à s’approcher tout doucement de moi. […] Vous, me connaissez depuis des années, et vous savez tout ce qu’il en est. […] Cette hauteur convenait à ma nature, et, longtemps avant d’avoir atteint ma soixantième année, je m’y étais fermement établi. » Acceptons cette généreuse déclaration pour la France, et, au lieu de faire chorus avec les détracteurs, honorons le sentiment élevé qui l’a dictée.

747. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

» On devine le reste ; c’est la femme qui tout à l’heure est allée brouiller la serrure, en y jetant du sable ; elle retient insensiblement son mari chez elle ; ce jour même, elle a découvert sur la tête du volage ce bienheureux cheveu blanc si désiré, elle prétend bien en tirer parti ; elle s’en empare au moral, ouvre son cœur, exhale ses plaintes du délaissement auquel elle s’est condamnée, dix années durant, pour lui laisser une indépendance entière à laquelle il tenait tant et dont, elle, elle n’a jamais entendu se prévaloir ni s’autoriser ; elle dit et fait si bien qu’elle reconquiert enfin l’infidèle qui ne pense plus à sortir du délicieux réduit. […] Il y en a d’autres qui ne les en chassent que deux ou trois ans après, pour leur tenir rigueur pendant des années entières et les reprendre ensuite et les raccrocher par une rouerie innocente et légitime. […] Il est méthodique, ponctuel, à l’heure et à la minute ; mais cette année il retarde de cinq minutes sur l’an passé : sa vieille amie s’en aperçoit et tout bas s’en alarme ; elle y voit un acheminement à la fin prochaine. […] cet homme, jeune encore d’air et d’années, est assis devant vous, de côté, près d’une fenêtre ; le soleil se couche ; un rayon glisse et l’effleure, et alors, sur cette tête si riche et si fière de sa brune parure, vous voyez tout à coup se dessiner, avec une précision désespérante, quelques mèches qu’on ne soupçonnait pas et qui ont beau être mêlées artistement aux autres plus naturelles : une couleur rougeâtre, sous cette lumière rasante, les a trahies.

748. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Quelques-uns vont plus loin : en présence du spectacle qui se déroule depuis une quarantaine d’années environ, ils sont saisis d’un redoublement d’ardeur, d’une espérance, d’une audace toutes nouvelles : il leur semble qu’une direction plus juste, des plus salutaires en même temps que des plus grandioses, soit imprimée a l’humanité, et qu’elle ait désormais une mission à accomplir plus nette, mieux définie, et digne à la fois de la passionner, de l’enflammer, si elle sait la comprendre. […] Dans ce laps de temps, les fortifications d’Alexandrie seraient achevées ; cette ville serait une des plus fortes places de l’Europe ; … l’arsenal de construction maritime serait terminé ; par le moyen du canal de Rahmaniéh, le Nil arriverait toute l’année dans le port vieux, et permettrait la navigation aux plus grandes djermes ; tout le commerce de Rosette et presque tout celui de Damiette y seraient concentrés, ainsi que tous les établissements civils et militaires ; Alexandrie serait déjà une ville riche ; l’eau du Nil, répandue autour d’elle, fertiliserait un grand nombre de campagnes, ce serait à la fois un séjour agréable, sain et sûr ; la communication entre les deux mers serait ouverte ; les chantiers de Suez seraient établis ; les fortifications protégeraient la ville et le port ; des irrigations du canal et de vastes citernes fourniraient des eaux pour cultiver les environs de la ville… Les denrées coloniales, le sucre, le coton, le riz, l’indigo, couvriraient toute la Haute-Égypte et remplaceraient les produits de Saint-Domingue. » Puis, de dix années de domination il passe à cinquante ; l’horizon s’est étendu ; l’imagination du guerrier civilisateur a pris son essor, et les réalités grandioses achèvent de se dessiner, de se lever à ses yeux de toutes parts : « Mais que serait ce beau pays, après cinquante ans de prospérité et de bon gouvernement ? […] Mille écluses maîtriseraient et distribueraient l’inondation sur toutes les parties du territoire ; les huit ou dix milliards de toises cubes d’eau qui se perdent chaque année dans la mer, seraient réparties dans toutes les parties basses du désert, dans le lac Mœris, le lac Maréotis et le Fleuve sans eau, jusqu’aux Oasis et beaucoup plus loin du côté de l’ouest, — du côté de l’est, dans les Lacs Amers et toutes les parties basses de l’Isthme de Suez et des déserts entre la mer Rouge et le Nil ; un grand nombre de pompes à feu, de moulins à vent, élèveraient les eaux dans des châteaux d’eau, d’où elles seraient tirées pour l’arrosage ; de nombreuses émigrations, arrivées du fond de l’Afrique, de l’Arabie, de la Syrie, de la Grèce, de la France, de l’Italie, de la Pologne, de l’Allemagne, quadrupleraient sa population ; le commerce des Indes aurait repris son ancienne route par la force irrésistible du niveau… » Le mot de civilisation ne s’est pas rencontré encore ; il n’échappe qu’à la fin et aux dernières lignes, comme le résumé de tout le tableau ; il introduit avec lui et implique l’idée morale, qui a pu paraître jusque-là assez absente : « Après cinquante ans de possession, la civilisation se serait répandue dans l’intérieur de l’Afrique par le Sennaar, l’Abyssinie, le Darfour, le Fezzan ; plusieurs grandes nations seraient appelées à jouir des bienfaits des arts, des sciences, de la religion du vrai Dieu ; car c’est par l’Égypte que les peuples du centre de l’Afrique doivent recevoir la lumière et le bonheur ! 

749. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

Il n’en fallut pourtant pas davantage, sans doute, avec la sensibilité qu’avait Racine, pour lui donner cette maladie de foie qui, un peu plus d’une année après, causa sa mort. […] Il n’y est tenu aucun compte de l’élément intérieur, du ressort principal qui explique les actions et toute la conduite de Racine dans ses dernières années, de son inspiration religieuse véritable, de son âme en un mot : et c’est elle qu’un ami du dedans va nous découvrir dans toute sa sincérité. […] Quand on a lu cette correspondance et qu’on a vu de quoi s’entretenaient en secret ces hommes respectables ; quand on sait de plus que, peu d’années après, M.  […] M. de Saint-Séverin en fit la cérémonie à Saint-Sulpice avec l’agrément du curé, car c’est depuis quelques années la paroisse de M. 

750. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

Il avait eu l’idée, quelques années auparavant, d’être grand prieur de Malte. […] En revanche, on lit dans ce même Journal de Luynes, vers ces mêmes années, qu’un jour le roi étant allé voir le château d’Anet, appartenant à la duchesse du Maine, au défaut de la duchesse qui ne s’y trouvait pas, les princes ses fils, le prince de Dombes et le comte d’Eu lui en firent les honneurs : « M. le comte de Clermont y était aussi ; il s’éloigna dans le moment que le roi se mit à table, pour que M. le prince de Dombes pût présenter la serviette à Sa Majesté. » Ainsi il voulut bien, dans ce cas d’exception, céder l’insigne honneur de présenter la serviette, prérogative à laquelle il tenait beaucoup sans doute, mais à laquelle certainement les mêmes personnes, qui devaient bientôt s’opposer à ses désirs académiques comme à une dérogation, attachaient un souverain prix. […] La même année qu’il prétendait à un siège à l’Académie et qu’il ambitionnait d’appeler confrères les gens de lettres, il méconnaissait ce qu’il y a de sérieux dans les Lettres mêmes et ce qui leur confère le seul caractère sans lequel elles resteraient à jamais futiles. […] Monseigneur, traiter Jean-Jacques comme le poëte Roy, faire bâtonner l’un et l’autre en moins d’une année ; mais y pensez-vous bien ?

751. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

Je vois, en effet, dans l’un des petits papiers, qui me sont communiqués par sa fille, un feuillet de dossier avec cette indication : « — Notes pour les années 14 août 1789-31 décembre 1809. — Donc vingt ans quatre mois et demi. […] J’ai été séparé de mes amis ; je n’ai pu conduire les premières années de mes enfants ; et, aujourd’hui, dans le vingt et unième de ces tristes printemps, j’ignore quelle région j’habiterai dans quelques mois et dans quelle autre peut-être sera ma fille. […] Quand je jette un coup d’œil sur le passé, sur tout le non-succès de mes desseins, sur la perte de tant d’années, je me condamne, je me dis : « Il fallait prendre tel parti ; » puis je trouve qu’il a été si mal à propos de ne pas prendre ce parti que je me mets à examiner mieux les circonstances pour voir ce qui a pu faire obstacle : alors je me rappelle des choses qui me prouvent qu’en effet cette conduite qui eût été la plus sage n’a pas été praticable. […] « Et dois-je chercher avec tant de soin pour quelques années rapides qui me restent d’ici à la vieillesse ?

752. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

La troupe italienne ne fit pas cette fois un long séjour à Paris ; elle partit à la fin de l’année 1647 ou au commencement de 1648. On entrait dans les années de la Fronde. […] Pendant ces années qui précédèrent immédiatement le retour de Molière à Paris, les Italiens eurent une grande vogue ; ils étaient les héros comiques du moment ; on leur faisait jouer des scènes burlesques, même à la ville, et hors du théâtre. […] Voyez ci-contre Scaramuccia, tel qu’il a été dessiné par Callot dans les premières années du dix-septième siècle.

753. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Cette pension resta fixée au même chiffre, que l’on trouve inscrit encore dans les comptes de l’année 1674 et de l’année 1688. En outre, Scaramouche et sa femme Marinette, qu’il avait emmenée avec lui, touchaient, à la date de 1664, un supplément de pension personnelle, ainsi qu’il résulte des mêmes comptes : « À Tiberio Fiurelli dit Scaramouche, comédien italien, pour ses gages, tant de lui que de sa femme, pendant une année finie le dernier juin 1664… 200 liv. » Ce n’est pas tout. […] Pendant une première période de cinq années, ils jouèrent exclusivement les pièces qu’ils avaient rapportées d’Italie.

754. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Despréaux, avec le plus grand nombre des écrivains de son temps. » pp. 307-333

C’est du fameux poëme de la Pucelle dont il vouloit parler, poëme à jamais mémorable par les ridicules qu’on y a jettés, & qui cependant est l’ouvrage de trente années d’un travail assidu. […] Il y a quelques années qu’il parut, à Paris, un prospectus d’une nouvelle édition de la Pucelle, avec les douze derniers chants. […] Tant de ridicules essuyés à la fois plongèrent Cotin dans une affreuse mélancolie ; de manière que plusieurs années avant sa mort, il tomba dans une espèce d’enfance. […] Il passa les dernieres années de sa vie à Auteuil, s’y occupant de dieu, de l’étude & de ses amis.

755. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

le patriotisme littéraire, c’est-à-dire la foi dans la supériorité du génie français, me semble depuis longues années exposée à d’inquiétantes défaillances. […] Est-il besoin de passer en revue les prosateurs qui se succèdent sans relâche au dix-septième, au dix-huitième et au dix-neuvième siècle, dont les soixante premières années, selon l’heureuse expression de M.  […] Des délégations de tous les pays venaient trouver ce châtelain de Ferney, toujours plus jeune sous le redoublement des années, et recevoir la parole d’émancipation de cette bouche qui avait si fréquemment jeté le cri de la pitié et de l’humanité méconnues. […] Il n’est pas de moment plus captivant pour l’historien et le penseur que ces années d’étincelante polémique et de propagande au grand jour, où la reconnaissance du genre humain saluait avec une ferveur enthousiaste ceux qui faisaient ainsi resplendir la France sur l’univers, Montesquieu, cette clarté, Rousseau, cet orage, Diderot, cette flamme, Voltaire, cette lumière !

756. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Aujourd’hui elle édite ou réimprime chaque année plus de deux millions de volumes ou de pièces de théâtre. […] Il est mort plein d’années, Dieu ait son âme ! […] Il y a quelques années M.  […] Le texte que j’en ai sous les yeux date de 1678, c’est-à-dire de l’année même où parut l’Avare. […] Il y mourut, après douze jours de maladie, le 29 mai 1889, dans sa vingt-septième année.

757. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — Notice sur M. G. Duplessis. » pp. 516-517

Duplessis, à Lyon, à Caen, à Douai, ou à Chartres, pendant les séjours qu’il y faisait chaque année au sein de sa famille. Je citerai dans ce nombre : Les Faintises du monde de Pierre Gringore ; L’Advocat des dames de Paris, etc. ; Le Doctrinal des nouveaux mariés ; Le Doctrinal des nouvelles mariées ; Le Mirouer des femmes vertueuses, etc., etc. : ces petits livrets renouvelés du gothique qui se trouvaient il y a quelques années chez le libraire Silvestre.

758. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Baudelaire.] » pp. 528-529

Le poète Baudelaire, très raffiné, très corrompu à dessein et par recherche d’art, avait mis des années à extraire de tout sujet et de toute fleur un suc vénéneux, et même, il faut le dire, assez agréablement vénéneux ; il avait tout fait pour justifier ce vers d’un poète : La rose a des poisons qu’on finit par trouver. […] Mais en obéissant à l’impulsion et au progrès naturel de mes sentiments, j’ai écrit l’année suivante un recueil, bien imparfait encore, mais animé d’une inspiration douce et plus pure, Les Consolations, et grâce à ce simple développement en mieux, on m’a à peu près pardonné.

759. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Ghil, René (1862-1925) »

[L’Année littéraire (7 juin 1887).] […] La première partie de cette œuvre, qui est aujourd’hui réalisée, compte cinq livres, lesquels se composent chacun d’un ou de plusieurs petits volumes paraissant à peu près chaque année.

760. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVI » pp. 188-192

Chapitre XVI Années 1660 et 1661 (commencement de la septième période). — Mœurs de la cour. — Mœurs des précieuses. — Mœurs de la société d’élite. — Madame de Montausier, gouvernante de M. le Dauphin. — Mademoiselle de La Vallière, maîtresse du roi. […] Un chagrin mortel l’atteindra dans cette période, et elle y succombera quelques années plus tard, victime d’une perfidie du roi et de sa maîtresse.

761. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVII » pp. 193-197

Chapitre XVII Années 1662 et 1663 (suite, de la septième période). — Concours de Molière, La Fontaine, Boileau et Racine, pour exalter les brillantes qualités du roi. — Ils favorisent le règne naissant de la galanterie. […] En 1663, les fêtes de Versailles font oublier le carrousel de l’année précédente.

762. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 348-354

Freron le fils est peu jaloux de ces prérogatives, puisque dans la continuation de l’Année Littéraire, il s’efforce de marcher constamment sur les traces de feu M. son pere. […] Voyez l’Année Littéraire, 1754, tom. 3.

763. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

La Fronde présente donc la seconde période de la vie de M. de La Rochefoucauld ; la troisième comprend les dix ou douze années qui suivirent, et durant lesquelles il se refit, comme il put, de ses blessures au physique, et s’en vengea, s’en amusa, s’en releva au moral dans ses Maximes. […] J’ai raconté, en parlant d’elle, les douceurs graves et les afflictions tendrement consolées de ces quinze dernières années. […] Il avait fait son entrée dans le monde vers 1666, à peu près l’année des Maximes : le livre chagriné et la jeune espérance, ces deux enfants de la Fronde ! […] Voir tout le récit dans les Mémoires de l’abbé Arnauld, à l’année 1672. […] L’Étude sur La Rochefoucauld annonce la guérison et marque la fin de cette crise, le retour à des idées plus saines dans lesquelles les années et la réflexion n’ont fait que m’affermir (1869).

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