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418. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Cette émigration traînait après elle ses orateurs de l’Assemblée constituante échappés en petit nombre à la mort, ses poètes, ses publicistes, ses pamphlétaires, ses écrivains, ses journalistes expatriés. […] « Je crois que Dieu a créé des êtres d’une beauté tellement harmonieuse et idéale qu’ils échappent à toute analyse et à toute description. […] L’extrême beauté de ses lèvres a toujours échappé à tous les peintres et à tous les sculpteurs. […] Je m’en échappais sans cesse comme un oiseau mal apprivoisé qui revole à ses forêts, et je préférais mille ibis ma mansarde avec un ami ou le désert avec un rêve. […] C’était une nuée ; on n’y échappait pas.

419. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Aristote ne connaît que la Grèce, c’est vrai ; aujourd’hui nous connaissons l’esprit humain entier ; et il n’est pas une œuvre quelque peu digne d’attention qui échappe à nos regards, et que nous ne puissions étudier. […] Les autres, ou lui échappent, ou du moins restent obscures pour lui. […] — « Tout comme il vous plaira, dit-il, si toutefois vous pouvez me saisir et que je ne vous échappe pas. […] Mais si l’âme échappe à la prise des sens, s’ils ne peuvent ni la voir ni la toucher, l’âme se voit et se touche elle-même. […] Il faut le déclarer, quoi qu’il en coûte : Aristote, en contredisant Platon, a rétrogradé vers le passé ; il a rebroussé chemin à peu près jusqu’à l’Ionisme ; et malgré la sagacité des développements nouveaux qu’il a donnés à des principes surannés, le germe que contenaient ces principes n’a pas tarde à reparaître : si le maître lui-même a su échapper au sensualisme, son école presque tout entière y est fatalement tombée.

420. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Rien ne le gêne, rien ne resserre ou n’abaisse le vol de sa pensée ; les grandes vues qui vivent en lui s’échappent toujours sans restrictions, sans vaines considérations. — C’était là un vrai homme ! […] La comparaison du peuple allemand avec les autres peuples éveille des sentiments douloureux auxquels j’ai cherché à échapper par tous les moyens possibles ; j’ai trouvé dans la science et dans l’art les ailes qui peuvent nous emporter loin de ces misères, car la science et l’art appartiennent au monde tout entier, et devant eux tombent les frontières des nationalités ; mais la consolation qu’ils donnent est cependant une triste consolation et ne remplace pas les sentiments de fierté que l’on éprouve quand on sait que l’on appartient à un peuple grand, fort, estimé et redouté. […] Elle agit avec beaucoup de savants comme une malicieuse jeune fille, qui nous attire par mille charmes, et qui, au moment où nous croyons la saisir et la posséder, s’échappe de nos bras8. » XVIII La religion chrétienne l’occupait de plus en plus, et il l’admirait d’une affection éclectique. […] Pendant cette cérémonie, Goethe était dans les bois de sapins d’Ilmenau ; comme d’habitude, il s’était échappé de Weimar pour éviter toutes les félicitations officielles. […] … « Trop d’émotions et de souvenirs se pressaient dans son âme ; il ne put se maîtriser, et des larmes abondantes s’échappèrent de ses yeux. »

421. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Ces deux moyens qu’a l’homme d’échapper à lui-même, preuves au moins du besoin qu’il a de vivre hors de lui, Stendhal ne les a pas connus par lui-même, et ne les a pas aperçus, constatés, au moins comme faits, dans ses semblables. […] Ils voulaient échapper au réel et ils y échappaient comme ils pouvaient. […] Vous croyez échapper à la barbarie, vous la retrouvez sous une nouvelle forme : l’ouvrier fonctionnaire, c’est le travail noir opposé au travail blanc. […] Vous croyez échapper à l’absolutisme, vous ne faites qu’en remplacer un par un autre. […] S’il nous échappe, semblait-il dire, c’est précisément une raison pour le poursuivre.

422. (1886) Le roman russe pp. -351

Cet esprit nous échappe ; les philosophies et les littératures de nos rivaux font lentement sa conquête. […] À travers le rire, qui ne s’était jamais échappé de moi avec plus de force, le spectateur sentait mon chagrin. […] Échappé à la police autrichienne, il court prendre part à la révolution de Dresde. […] Ce fragment autobiographique n’est pas une œuvre d’imagination : notre romancier le tenait d’un de ses compatriotes, échappé des prisons tusses. […] Tourguénef en a laissé échapper quelques-unes ; mais l’ensemble de son legs est bon, est sain.

423. (1921) Esquisses critiques. Première série

Ils passent avec une prodigieuse aisance de l’indignité à l’équivoque et bien souvent n’échappent à aucun des deux. […] Ce fut d’ailleurs chance qu’il y échappât puisqu’il l’amuse d’être en coquetterie avec l’autre. […] Le fond des âmes est impitoyablement découvert par cet investigateur à qui nul mobile n’échappe. […] Il lui survit parfois même et seul échappe à l’oubli. […] Entre les fautes de grammaire et les fautes de goût, il gravit d’un pied sûr un très étroit sentier qui les côtoie, les contourne, et les échappe infailliblement.

424. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

C’est à peine si le prisonnier conserve l’espérance d’une liberté lointaine ; c’est à peine s’il entrevoit la chance d’échapper à la hache qui a déjà tranché tant de têtes. […] Rien de confus ou d’indécis ; les paroles s’ordonnent avec une merveilleuse précision, et semblent défier le temps qui va leur échapper. […] Mais il manque au chevalier, pour échapper à sa ruine, un auxiliaire indispensable, la faculté de se gouverner. […] Elles expriment un ordre de vérités qui échappe à tout contrôle, et dont les éléments ne se trouvent que dans la pensée de l’auteur. […] Il avait pris pour la poésie une ombre vaine, qu’il a longtemps poursuivie et qui lui échappe.

425. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. RODOLPHE TÖPFFER » pp. 211-255

Deux années de vain espoir et de tentatives pénibles suivirent ; elles furent cruelles pour celui qui s’en était promis tant de joie : décidément la peinture lui échappait. […] De retour à Genève, sous-maître dans un pensionnat d’abord, puis à la tête d’un pensionnat de sa propre création, père de famille, finalement appelé à occuper la chaire de Belles-Lettres dans l’Académie, c’est du sein d’une vie heureuse et comblée, et comme unie en calme à son Léman, que se sont échappés successivement et sans prétention les écrits divers, tous anonymes, dont plus d’un nous a charmés. […] Il est saisi tout d’un coup par un mouvement imprévu, par un tressaut 122 du dormeur, il est pris sous lui et ne peut plus s’échapper. […] Prévère s’en est brisé, et il échappe devant tous en de chrétiennes plaintes.

426. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Alexis, d’abord emprisonné avec son père, s’était échappé sur un vaisseau jusqu’à Ancône ; rencontrant les croisés qui s’acheminaient vers Venise, les amis qui l’avaient accompagné lui dirent : « Voici une armée toute trouvée : que ne vous en servez-vous pour aller reconquérir le trône de votre père ?  […] Joinville n’avait pas échappé à cette ambition. […] Cette dure vie de nos pères trouble nos nerfs ; cette facilité à mourir offense notre tendresse pour la vie ; et ce chroniqueur, qui n’a jamais pleuré, nous intéresse aux malheurs de son temps, comme à des dangers auxquels nous aurions échappé. […] Je n’assiste plus, comme dans Froissart, à un vain spectacle, dont le sens et la moralité m’échappent mais je sens mon jugement se fortifier du jugement d’un homme supérieur, élevé, comme dit Montaigne, aux grandes affaires, et qui m’apprend à connaître mon temps par le sien.

427. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Je me souviens d’un brave homme, pas beaucoup plus fou que les autres, qui s’échappait quand il pouvait, le soir. […] Vous m’enlevez un véritable poids de dessus le cœur. » Elle joua ainsi pendant deux ans avec la guillotine, et ce fut miracle si elle y échappa. […] Ses cheveux, qu’elle tenait en vain prisonniers sous un lourd bonnet, s’échappaient en tresses tordues, comme des gerbes de blé mûr. […] Les balances descendues du ciel sont la fatalité : on ne la fléchit pas, on ne lui fait point sa part ; mais, au moyen de l’abnégation absolue, en lui jetant sa proie, on lui échappe, car elle n’a plus alors de prise sur nous.

428. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Pour échapper à l’accusation d’aristocrate et à la liste des suspects, il court les sections, les assemblées populaires et prend les allures d’un sans-culotte. […] Les uns purent échapper aux réquisitions militaires en se cachant dans les administrations, les autres durent émigrer ; ceux qui furent incorporés dans les armées républicaines se conduisirent bravement, gagnèrent des épaulettes, des titres et des terres ; quelques-uns, en très petit nombre, désertèrent. […] On signait à Paris, en 1801, une pétition « tendant à obtenir du gouvernement que le gros Bourdon de Notre-Dame puisse être sonné pour annoncer les fêtes publiques… Il est temps de faire jouir notre oreille de cette harmonie céleste, qui doit rappeler à tous les vrais Français de bien doux souvenirs… Quel bonheur que le gros Bourdon ait échappé à la proscription qui frappe depuis dix ans toutes les sonneries de la République ». […] L’écrivain est rivé à son milieu social ; quoi qu’il fasse, il ne peut s’échapper ni s’isoler du monde ambiant, et ne peut cesser d’en subir l’influence à son insu et malgré lui : qu’il se plonge dans le passé ou s’élance vers l’avenir, dans l’un ou l’autre sens, il ne saurait aller plus loin que ne comportent les données de son époque.

429. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Dénoncé au représentant Albitte et décrété d’arrestation, il n’échappa qu’en passant par une fenêtre. […] Mais ici, et dans ce mot échappé du cœur, on reconnaît plutôt encore la religion de l’amitié.

430. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Le Tellier ni Louvois ne l’aimaient ; il ressentit bientôt les effets de cette défaveur, et fut envoyé de Montauban, une des meilleures intendances du royaume, dans la moindre de toutes, en Béarn, contrée inégale, difficile et mal soumise, qui avait échappé jusque-là au niveau de Louis XIV. […] « Heureux, est-on tenté de s’écrier quand on lit ces choses, heureux qui réussit à passer sa vie sans être dans ces alternatives de faveur et de disgrâce ; que les nécessités d’une carrière, l’aiguillon d’un continuel avancement ne commandent pas ; qui n’a pas soif de pouvoirs et d’honneurs ; qui n’est pas ballotté entre Colbert et Louvois, au risque d’oublier entre les deux sa conscience, d’étouffer ses scrupules et d’y perdre même le sentiment d’humanité ; qui n’est ni persécuteur ni victime, ni hypocrite, ni dupe, ni écrasant ni écrasé ; qui, après avoir connu sans doute quelques traverses de la vie et avoir essuyé quelques amertumes inévitables (sans quoi il ne serait pas homme), s’échappe le plus tôt qu’il peut, retire son âme de la foule et de la presse (comme dit Montaigne), passe le restant de ses jours « entre cour et jardin », ne voyant qu’autant qu’il faut et n’étant pas vu ; aussi loin de l’ovation que de l’insulte ; qui se soustrait en soi-même aux appels et aux tentations de la fortune non moins qu’aux irritations sourdes de l’envie et des comparaisons inégales qu’elle suggère, aux ennuis de toutes sortes, aux iniquités souvent qui s’en engendrent ; qui aime de tout temps quelques-unes de ces choses innocentes et paisibles qu’aimait et cultivait Foucault dans la dernière moitié de sa vie, mais sans en avoir taché comme lui le milieu, sans y avoir imprimé une note brûlante, et en pouvant, d’un bout à l’autre, reparcourir doucement, à son gré, et supporter du moins tous ses souvenirs ! 

431. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Plus tard pourtant, et peu à peu, tout ce qui est romans, nouvelles, commence à vous échapper, surtout venant d’auteurs jeunes, et, une fois le fil perdu, on ne le rattrape pas aisément. […] L’intérêt qu’il ne fallait pas laisser échapper un moment est tout entier dans les rapports, à peine entamés, de l’artiste et de la jeune dame.

432. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires du comte Beugnot »

Cet excellent homme de bien dissimula jusqu’au dernier jour à ses compagnons de prison l’issue trop certaine de son jugement au tribunal révolutionnaire ; ce ne fut que la veille de la condamnation qu’il laissa échapper devant eux quelque chose de ses pensées. […] Il est évident qu’on ne comptait pas assez avec lui, qu’on le traitait avec un certain sans-gêne, que son caractère n’imposait pas, qu’on le prenait trop au mot dans les plaisanteries qui lui échappaient sans cesse sur lui-même.

433. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

M. de Talleyrand a longtemps nié être venu cette fois à Londres pour un autre motif que celui d’échapper aux périls qu’il courait en France : ce qui n’empêcha point qu’il ne reçût l’ordre de quitter l’Angleterre en janvier 1794, parce qu’on l’y considérait comme un hôte dangereux13. […] Elle juge, de quelques mots qu’il a laissé échapper dans sa dernière conversation avec elle, qu’il est question pour lui de mourir ; aussi a-t-elle passé la nuit dans une grande agitation et dans les larmes.

434. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. BRIZEUX (Les Ternaires, livre lyrique.) » pp. 256-275

On ferait une Anthologie charmante de tout ce qui échappe d’excellent à l’un ou à l’autre en tel jour de sa vie, et dont le public, non plus que l’auteur en son pêle-mêle, ne se doute pas. […] Par moments sa Bretagne lointaine lui échappait, la courtoisie florentine l’avait conquis, il allait oublier son Ithaque ; mais tout d’un coup un costume, un son d’instrument, un écho, venait réveiller son vieux culte et croiser ses amours.

435. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

Léonard y échappera aujourd’hui. […] Léonard faillit être assassiné ; il paraît même qu’il n’échappa que blessé.

436. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Je le vis, et je remarquai combien, dans cet état, ce qui nous est inutile nous devient indifférent. » Lemontey255 croit apercevoir dans ces quelques mots une révélation qui échappe ; c’est être bien fin. […] A un retour de printemps, il lui échappe ce mot terrible : « Quant à moi, je ne m’en soucie plus (de printemps !) 

437. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

Il y a un moment de jouissance dans toutes les passions tumultueuses, c’est le délire qui agite l’existence, et donne au moral l’espèce de plaisir que les enfants éprouvent dans les jeux qui les enivrent de mouvement et de fatigue : l’esprit de parti peut très bien suppléer à l’usage des liqueurs fortes ; et si le petit nombre se dérobe à la vie par l’élévation de la pensée, la foule lui échappe par tous les genres d’ivresse ; mais quand l’égarement a cessé, l’homme qui se réveille de l’esprit de parti, est le plus infortuné des êtres. […] … C’est d’une telle supposition que les anciens ont tiré les plus terribles effets de leurs tragédies : ils attribuent à la fatalité les actions coupables d’une âme vertueuse ; cette invention poétique, qui fait du rôle d’Oreste le plus déchirant de tous les spectacles, l’esprit de parti peut la réaliser ; la main de fer du destin n’est pas plus puissante que cet asservissement à l’empire d’une seule idée, que le délire que toute pensée unique fait naître dans la tête de celui qui s’y abandonne ; c’est la fatalité, pour ces temps-ci, que l’esprit de parti, et peu d’hommes sont assez forts pour lui échapper.

438. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Échappé de Nouméa, il reprend son œuvre de destruction avec plus d’acharnement encore, je ne dis pas avec plus de sérieux. […] V Quelqu’un me dit : « Quand ce serait une comédie (et ce n’en est pas une), ce pourrait être une comédie fort excusable, pour des raisons qui nous échappent.

439. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

On veut échapper à la noire incertitude, au cauchemar du présent. […] Cette aventure, tragique à la fois et ridicule, offre les éléments d’un drame shakespearien, d’un roman échappé à l’imagination d’un Balzac.

440. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

« Il est très vrai », écrit-elle, le 6 février, à madame de Coulanges, « que le roi m’a nommée madame de Maintenon et que j’ai eu l’imbécillité d’en rougir, et tout aussi vrai que jamais de plus grandes complaisances pour lui que de porter le nom d’une terre qu’il m’a donnée. » Ce nom échappé au roi comme un mot dès longtemps usité, cette rougeur de celle qui le reçoit pour la première fois, cette expression d’étonnement et de reconnaissance, qu’aucun autre bienfait antérieur ne paraît avoir excité dans madame de Maintenon, montrent qu’elle sentit à l’instant tout ce que renfermait de bon pour elle cette substitution d’un nom nouveau à celui qu’elle portait. […] « Il est certain que l’ami (le roi) et Quanto (madame de Montespan) sont véritablement séparés ; mais la douleur de la demoiselle (madame de Montespan) est fréquente et même jusqu’aux larmes, de voir à quel point l’ami s’en passe bien, Il ne pleurait que sa liberté et ce lieu de sûreté contre la dame du château. » Il ne pleurait, pendant la séparation, que la liberté qu’il trouvait dans la maison de la maîtresse, et un lieu où il pouvait échappera l’ennui que lui causait la société de la reine.)

441. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

M. de Musset n’échappera point à ce destin, dont il n’aura peut-être pas tant à se plaindre ; car il y a de lui des accents qui iront d’autant plus loin, on peut le croire, et qui perceront d’autant mieux les temps, qu’ils y arriveront sans accompagnement et sans mélange. […] Les vers lyriques que M. de Musset a laissé échapper depuis ses Nuits et qu’on vient de recueillir offrent quelques pièces remarquables.

442. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

Une plaisanterie qu’il laissa échapper contre la reine, et qui revint à celle-ci (il l’avait appelée Suissesse), irrita la femme, et contribua à la vengeance finale plus peut-être que ne l’auraient pu faire les seules infidélités politiques de Retz. […] Retz, à qui rien n’en échappa, en a maintes fois la nausée, et on se demande, en le lisant, comment un matin quelque bon sentiment, quelque accès de bon sens énergique et de droiture, ne fût-ce même qu’un accès d’impatience et d’ennui, ne l’a pas décidé à rompre une fois pour toutes avec cette complication inextricable d’intrigues, désormais sans but et sans issue.

443. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre troisième. L’appétition »

En effet, il reconnaît que, « les plus primordiales expressions de la peine semblent n’être qu’autant d’efforts pour échapper à la cause de cette peine ; elles contiennent au moins le dessein aveugle d’échapper à un mal défini50. » N’est-ce pas là une description du mouvement appétitif, non pas seulement expressif ?

444. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

Et ce poète, qui s’appelait André Chénier, émerveillé de la variété des sites, de la diversité des productions, de la copieuse fertilité de notre patrie, laissait s’échapper comme un long cri de gratitude ce poème familier à vos mémoires, l’Hymne à la France. […] Au quatorzième siècle et au quinzième l’Italie prend la dictature intellectuelle du monde qui semble partagée au seizième ; mais à partir du dix-septième siècle elle revint à la France pour ne plus lui échapper.

445. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Si les finesses de la diction leur échappent dans l’original, elles n’échappent pas moins à leurs juges.

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