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49. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Je reviens au cardinal de Bernis que je n’avais pas songé d’abord à prendre si politiquement, ni d’une manière si grave ; je reviens au caractère général qui m’avait d’abord attiré vers sa personne et dont je ne me laisserai plus détourner même par les grandes affaires et les controverses très vives où son nom se trouve mêlé. […] Il était temps que les affaires et le monde revinssent occuper cette vive et brillante intelligence. […] Le nom de Richelieu revient quelquefois sous la plume de Voltaire comme une flatterie indirecte : « Ah ! […] Bernis ne revint plus jamais vivre à Paris depuis ces années. […] Ce n’est que depuis, et après connaissance plus ample, qu’il a reconnu qu’il s’était mépris sur ce point, et qu’il est revenu à de plus justes sentiments sur l’homme et sur le pontife.

50. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

Il y a en lui l’homme de gouvernement, il y a l’homme de publicité ; les habitudes de celui-ci reviennent fréquemment à travers l’autre61. […] Plus tard, dans ses loisirs, lui aussi il reviendra passionnément et avec une prédilection marquée à une sorte de culte, au culte littéraire du xviie  siècle ; mais, même dans ce mouvement qui lui est commun avec d’autres, notez les différences. […] Quand Roederer reviendra sous la Restauration à la belle littérature et à la société de Louis XIV, ce sera par un long détour et par un revers imprévu, en vertu d’une vue ingénieuse, fine, et moyennant tout un enchaînement d’idées ; il y reviendra à la manière de Fontenelle, non de Fontanes. […] Dès sa jeunesse et du temps qu’il était à Metz, il s’était déjà occupé de Louis XII ; il y revient en vieillissant, et il fait de lui son héros de prédilection et son roi. […] Les premières années de la jeunesse de Louis XIV lui causaient un peu de chagrin : on revenait à la méthode de François Ier, aux maîtresses brillantes.

51. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

Nous y reviendrons. […] Il revint chez son père. […] Il revint avec plus d’égards à Pétersbourg. […] comment avez-vous pu revenir ? […] Virginie revenait souvent sur cet objet.

52. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet. (suite et fin.) »

» Je n’en reviens pas. […] Serait-ce que ceux à qui la vraie jeunesse a manqué en sa saison sont plus sujets que d’autres à ces après-coup et à ces revenez-y de jeunesse ? […] De l’effet désagréable et même répulsif, je l’avoue, de ce médaillon, il faudrait défalquer, avant tout jugement, ce qui revient en propre à la matière, à la cire en elle-même, dont le ton jaunâtre est celui de la mort.

53. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

Mais j’ai hâte d’en revenir à de plus riantes ébauches, et de m’ébattre avec lui, avec le lecteur, comme par le passé, dans sa renommée gracieuse. […] Il reviendra sans doute. […] il te tend les bras ; Va trouver ton amant : il ne reviendra pas !  […] » Disant ces mots, il sort… Elle était interdite ; Son œil noir s’est mouillé d’une larme subite ; Nous l’avons consolée, et ses ris ingénus, Ses chansons, sa gaieté, sont bientôt revenus. […] Mais je reviens à mon idylle, à mon édition oisive.

54. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

Pour se renouveler, il n’a qu’à revenir à l’Évangile. […] De même, si Jésus revenait parmi nous, il reconnaîtrait pour disciples, non ceux qui prétendent le renfermer tout entier dans quelques phrases de catéchisme, mais ceux qui travaillent à le continuer. […] Ne disons pas davantage que la gloire de la fondation du christianisme doit revenir à la foule des premiers chrétiens, et non à celui que la légende a déifié. […] Son perfectionnement consistera à revenir à Jésus, mais non certes à revenir au judaïsme.

55. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

Il y a dans l’ordre de la nature de ces moments de retour et de ces reprises de jeunesse : il y a, au déclin de l’automne, de ces journées encore si brillantes, qu’on est tenté de se demander si c’est le printemps qui revient. […] Mais, apprenant que Blucher en personne s’avance pour avoir raison de l’affront de ses lieutenants, il revient sur Montmirail ; le 14 au matin, rejoignant Marmont qui tient tête à Blucher, il prend à l’instant l’offensive et fait perdre au généralissime prussien de 9 à 10000 hommes ; c’est la journée dite de Vauchamps. […] Thiers, qui revient plus d’une fois sur ce noble et patriotique ouvrage, et qui en fait honneur à qui de droit, nous permettra de lui en attribuer à lui-même, à lui le grand promoteur, une très bonne part. […] C’est que chacun, comme par enchantement, était revenu de 1840 à ses anciens sentiments de 1814 et jugeait de la nouvelle mesure par ses dispositions d’autrefois. […] Chacun était subitement revenu à ses origines : les blancs étaient redevenus blancs, les bleus étaient bleus.

56. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Ce sont les questions qui se posent fatalement devant nous et qui reviennent inévitablement à l’esprit chaque fois qu’on se trouve en présence d’une de ces destinées brillantes, tranchées et interrompues. […] Cette escapade n’eut pas de suite, son père l’ayant obligé de revenir à ses classes et à ses étudesn. […] Revenu dans sa ville natale, chez son père, il y rencontra des dangers moins beaux. […] Cette idée reviendra souvent jusque dans ses lettres les plus belliqueuses ; tout son feu n’exclura jamais la modération. […] [1re éd.] son père l’ayant obligé de revenir à ses classes et aux études.

57. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Et ce n’est qu’ainsi qu’on peut bien goûter les poètes anciens ; il ne suffit pas de les comprendre, de les lire purement et simplement comme on consulterait un texte, et de passer outre ; il faut avoir vécu avec eux d’un commerce aisé, continuel et de tous les instants : Nocturna versale manu… Or les traductions en vers qui, pour les ignorants et les non doctes, étaient une dispense de remonter au-delà, devenaient un prétexte, au contraire, et une occasion perpétuelle pour les gens instruits, un peu paresseux (comme il s’en rencontre), de revenir à la source, et d’y revenir tout portés sur un bateau. […] Tout cela revient à dire que la disposition particulière des esprits et le moment précis de culture littéraire qui favorisaient et réclamaient les traductions en vers sont passés et ont fait place à une autre manière de voir, à un autre âge ; et ici, comme dans des ordres d’idées bien plus considérables et bien autrement importants, il n’est que vrai d’appliquer ce mot d’un ancien sage que je trouve heureusement cité, à savoir qu’on ne retourne jamais au même point et que le cours universel du monde ressemble à « un fleuve immense où il n’est pas donné à l’homme d’entrer deux fois. » Les choses allant de la sorte, on doit savoir d’autant plus de gré aux esprits non pas attardés, mais foncièrement religieux à l’art ou obstinément délicats, qui n’ont pas perdu la pensée, même devant un public si refroidi, de lutter de couleur, de relief et de sentiment avec de désespérants modèles. […] Dire comme un de nos jeunes et spirituels critiques très au fait de l’Antiquité84 que Térence n’a que du talent tandis que Ménandre avait du génie, c’est sans doute marquer les degrés probables et faire la part de l’invention ; mais n’est-il pas juste aussi de considérer que, dans ce naufrage de l’Antiquité (j’y reviens toujours), une équité indulgente doit tenir compte à ceux qui ont survécu de ce qui a disparu à côté d’eux, derrière eux ? […] Après avoir réussi sur la scène, non sans bien des difficultés et quelques vicissitudes, jouissant de l’amitié du second Lélius et de Scipion Émilien (ce qui lui fit bien des envieux), possesseur d’une maison avec jardin sur la voie Appienne, il voulut voir la Grèce, y étudier de plus près ses sources et grossir son trésor : il partit et ne revint pas ; il mourut au retour du voyage, avant d’avoir revu l’Italie. […] « Je ne m’inquiète pas de la valeur de Térence, me disait à ce sujet un des maîtres qui l’entendent le mieux ; tout ce que je sais, c’est qu’il me plaît infiniment ; je l’oublie, j’y reviens, et chaque fois il me plaît de nouveau.

58. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires du comte Beugnot »

Je ne sais : peut-être simplement le vin n’était-il pas depuis assez longtemps en bouteille, et n’avait-il pas fait tous les voyages voulus pour nous revenir juste à point, à l’heure propice. […] L’auteur, il est vrai, ne les écrivit pas de suite et avec continuité ; il y revint à plus d’une reprise et comme par époques, sans se soucier beaucoup des liaisons. […] Beugnot revient un peu de ses préventions. […] Je ne revenais pas de la promptitude et de l’habileté avec lesquelles les baraques avaient été construites. […] Je sais toutes les exceptions qu’on peut faire, elles me reviennent et se lèvent devant moi en ce moment : je salue tous ces grands beaux hommes spirituels ; mais en fait il n’en est pas moins vrai que cela semble une singularité de trouver l’esprit d’un abbé Galiani dans le corps d’un grenadier.

59. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. BRIZEUX (Les Ternaires, livre lyrique.) » pp. 256-275

Par toutes les pentes, on revient ainsi à la prose. […] Si elles s’appellent Marie, il leur revient de droit avec un bouquet de fleurs blanches. […] Le joli volume, avec ses élégies à la pauvre villageoise qui reviennent à des intervalles et comme à des nœuds égaux, avec les autres pièces noblement calmes et unies qui y sont entremêlées, me paraît exactement comparable à cette houlette pastorale dont il est dit dans l’églogue, Formosum paribus nodis atque ære, Menalca : De nœuds égaux formé, garni d’un bout de fer. […] Il s’est supposé plus vieux qu’il ne l’est, revenu à son point de départ après l’âge des excursions, mais revenu avec l’expérience acquise. Cette idée des trois pas essentiels dans la vie revient très-ingénieusement de distance en distance, trop ingénieusement même.

60. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

. — Madame de Maintenon revient de Barèges. — Faveur de madame de Maintenon. […] Madame de Maintenon n’est revenue de Barèges, avec le jeune prince, que dans le mois de novembre. […] L’histoire nous apprend que le roi, qui était parti dans les premiers jours du mois de mai pour l’armée des Pays-Bas, prit Dinan le 29 et ne revint à Versailles que le 18 ou le 20 juillet. […] « Louis XIV n’était pas encore revenu de l’armée. […] Madame de Coulanges revient : je n’en ai jamais douté. » 18 décembre.

61. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Chapelle avait quelquefois des remords ; il faisait, le matin, de beaux projets, de grands serments ; il se proposait de revenir à l’étude, aux leçons savantes de son maître Gassendi, de s’appliquer à quelque ouvrage sérieux et qui lui fît honneur, qui lui donnât rang dans l’avenir. […] À la duchesse de Bouillon, qui lui demandait un jour s’il n’avait jamais eu l’envie de se marier, il répondait : « Oui, quelquefois le matin. » Il n’eut jamais aussi que le matin cette idée de revenir à l’étude, de se mettre aux choses sérieuses. […] Chapelle, en cette rencontre, est l’original que Boileau a imité, comme il a imité en tant d’autres endroits Horace et les anciens. — Il est dommage cependant que le tout se termine par cette histoire désagréable et indécente de d’Assoucy, sur laquelle l’auteur revient encore plus loin et insiste avant de finir ; ici Boileau retrouverait toute sa supériorité de bon goût et de bonnes mœurs. […] Ces imitateurs, au xviiie  siècle, deviennent moins excusables parce qu’avec Rousseau on est revenu, péniblement il est vrai, mais on est revenu enfin à voir et à décrire la nature en elle-même, dans ses beautés et dans son caractère. […] Ici nous sommes revenus à l’antique, à la primitive et unique manière d’observer la nature en elle-même, sans souci des livres, des beaux esprits de la capitale ni des coteries littéraires, avec vérité, application vive et présente, et, quand il y a lieu, avec grandeur.

62. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

CCLVI Moi, cependant, j’avais promis à Hyeronimo de revenir passer avec lui la dernière nuit, sans crainte d’être découverte, puisque je ne devais plus le quitter qu’après qu’il serait sauvé et me dévoiler qu’après être morte à sa place. […] Je revins ensuite à la chapelle, je rétablis vite le barreau de la fenêtre à sa place, pour qu’on ne s’aperçût pas qu’il avait été déplacé ; puis je me mis à genoux la tête entre mes mains devant l’autel, comme un mourant qui a passé la nuit dans les larmes en pensant à ses péchés. […] que de bénédictions nous lui donnâmes, quand ce jour fut arrivé et quand la femme du bargello, sauvée de tous soupçons par ma ruse, revint avec eux me reprendre, huit jours après au couvent, pour rentrer ensemble dans notre demeure. […] Fior d’Aliza reprit la place qu’elle avait laissée, et continua en regardant sa tante : — Je partis à pied avec cette lettre, et en promettant à mon père et à ma tante de revenir ainsi de Livourne tous les samedis pour leur rapporter tout ce qui serait nécessaire à leur vie, et pour passer avec eux le dimanche à la cabane, seul jour de la semaine où les galériens ne sortent pas pour travailler dans le port ou pour balayer les grandes rues de Livourne. […] Cela ranimait le pauvre Hyeronimo ; il le regardait, il me regardait, il revenait à la santé en jouissant de notre vue.

63. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Mme Du Deffand regrettait souvent de n’avoir pas eu une autre éducation, et maudissait celle qu’elle avait reçue : On se fait quelquefois, disait-elle, la question si l’on voudrait revenir à tel âge ? […] Il revint plusieurs fois à Paris exprès pour elle. […] Elle est ingénieuse à revenir sans cesse sur ce qu’il lui défend, sur cette pensée constante qui n’est que vers lui. […]  » J’ai dit qu’Horace Walpole revint d’Angleterre la voir plusieurs fois. […] Si nous revenons à une heure du matin de souper à la campagne, elle vous propose de s’en aller faire un tour aux boulevards ou à la foire, parce qu’il est de trop bonne heure pour se coucher.

64. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

La préméditation, d’ailleurs, n’était pas aussi nette pour lui dans le moment même qu’elle lui a paru depuis et qu’il nous l’a exprimé lorsqu’il y est revenu avec la supériorité du critique contemplateur dans ses mémoires. […] Pour revenir à la correspondance de Goethe avec les époux Kestner, dont le mariage se fit en avril 1773, on y suit assez bien les traces du projet et de la composition, jusqu’au moment où toute la pensée prend flamme. […] Qui plus est, une amie qui revient de la noce lui apporte le bouquet de mariage de Lotte, et il s’en pare. […] Il n’est pas ici ; il est depuis trois mois à Weimar chez le duc, et Dieu sait quand il reviendra. […] J’espère que vous en serez satisfait. » — Albert-Kestner, à qui Goethe écrivait cela, prit la nouvelle avec feu, et il revint sur son désir d’obtenir les modifications qu’il avait à cœur.

65. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

 — « Ne vaut-il pas mieux, Madame, lui écrivait durant ce temps le soigneux M. de Grasse, que vous reveniez à l’hôtel de Longueville, où vous êtes encore plus plénipotentiaire qu’à Munster ? […] Monseigneur votre frère est revenu chargé de palmes ; revenez couverte des myrtes de la paix : car il me semble que ce n’est pas assez pour vous que des branches d’olivier. » Elle reparut en effet à Paris en mai 1647. […] Singlin, une fois introduit, revint souvent ; il faisait ses visites déguisé en médecin et sous l’énorme perruque qui était alors de rigueur ; il avait besoin de se dire, pour se justifier à lui-même ce déguisement, qu’il était bien médecin en effet. […] Elle en sortait de temps en temps, et revenait faire des séjours aux Carmélites, où elle voyait successivement passer comme un convoi des grandeurs du siècle, Mme de La Vallière y prendre le voile, et peu après arriver le cœur de Turenne, — ce cœur, qu’hélas ! […] L’exemple de Mme de Longueville revient souvent : « Mme de Longueville n’a que deux laquais : ne seroit-ce pas assez pour vous ?

66. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

— Nous reviendrons, jeune mère, me dirent-ils, en me saluant poliment, et si vous voulez marier votre fille dans un an ou deux, nous la retenons pour mon fils, que voilà, et qui en est déjà aussi fou que s’il la connaissait depuis sept ans, comme Jacob. […] Cette fois, Fior d’Aliza, c’était un dimanche, revenait de la messe des Camaldules avec son cousin Hyeronimo, revêtu de ses plus beaux habits. […] — Ne vous attristez pas, disait-il à ma belle-sœur, à sa fille et à Hyeronimo, le capitaine est de bon cœur ; il ne veut que ce qui lui revient, il ne poussera pas les choses à l’extrême ; il m’a chargé de vous ménager. […] Hyeronimo enfant l’avait appelé Zampogna, parce qu’il aimait la musique comme un pifferaro, et que toutes les fois que nous voulions le faire revenir avec les chevreaux du pâturage où il gardait les moutons, nous n’avions qu’à sonner un air de musette sur la porte. […] Ils y coururent et ils revinrent en pleurant, comme Adam et Ève qui sont en peinture là-haut aux Camaldules, quand ils virent pour la première fois mourir quoi ?

67. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Il est temps, définitivement, de revenir à la vérité de la vie et de renoncer à tout cet artifice de convention, reste de nos distinctions aristocratiques et de la société artificielle du XVIIe siècle ; il est temps de revenir à la vérité des mœurs antiques. […] La bourgeoisie d’ailleurs a eu parfois le tort de chercher à revenir aux vieux airs de la noblesse ; à quoi elle n’a nullement réussi, et par là elle s’est rendue ridicule. […] Mais il vaut mieux encore revenir à la vérité et ne reconnaître d’autre majesté que celle de la nation et de l’idéal. […] Ce n’est pas au catholicisme, en tant que catholicisme, que le siècle est revenu, mais au catholicisme, en tant que religion. […] Ô Dieu de ma jeunesse, j’ai longtemps espéré revenir à toi enseignes déployées et avec la fierté de la raison, et peut-être te reviendrai-je humble et vaincu comme une faible femme.

68. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Quelques mois plus tard, ce zèle du jeune Bayle s’était refroidi ; les doutes le travaillaient, et, dix-sept mois après sa conversion, sortant secrètement de Toulouse, il revint à sa famille et au calvinisme. […] Ce mot lui revient souvent ; le côté de l’amusement de l’esprit le frappe, le séduit en toute chose. […] l’infidélité est un trait de ces esprits divers et intelligents ; ils reviennent sur leurs pas, ils prennent tous les côtés d’une question, ils ne se font pas faute de se réfuter eux-mêmes et de retourner la tablature. […] Nous aimons donc à trouver que le mot de bon Dieu revient souvent dans ses lettres d’un accent de naïveté sincère. […] Une conversation gaie lui revenait fort par moments, et on aurait été près alors de le loger dans la classe des rieurs.

69. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

La famille royale n’en était même pas instruite par lui, mais elle l’était d’ailleurs ; et n’osant pas venir, comme elle l’aurait voulu, pénétrer dans son intérieur pour savoir de ses nouvelles, elle se bornait à désirer qu’on le déterminât à revenir à Versailles. […] Quelque désir qu’eût Lemonnier de faire revenir le roi à Versailles, il n’avait pas la force de s’opposer à la volonté de Mme Dubarry. […] Cependant tout Paris fut averti que le roi avait resté dans son lit jusqu’à quatre heures, qu’il était revenu en robe de chambre et au pas de Trianon, et qu’il s’était couché en arrivant. […] Il voulait qu’il ne fût livré qu’à elle et à ceux qu’elle y introduirait, te roi, comme je l’ai dit, avait déjà fait acte de soumission en disant à ses enfants de ne pas revenir sans qu’il les envoyât chercher. […] Revenons à la maladie.

70. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

L’établissement de l’École militaire vers le milieu du siècle suivant, et dont le principal honneur revient à Pâris-Duverney, fut le complément nécessaire de ces fondations monarchiques, et remplaça ce que les compagnies de cadets avaient d’insuffisant. […] Elle avait toujours eu un grand goût pour élever les enfants, pour les enseigner, les reprendre, les morigéner : c’était un de ses talents particuliers et prononcés : « J’ai grande impatience, écrivait-elle à Mme de Brinon, la première directrice de ces écolières, de voir mes petites filles et de me trouver dans leur étable… J’en reviens toujours plus affolée. » De Rueil, l’institution fut transférée à Noisy, où elle continua de croître : Mme de Maintenon y consacrait tous les moments qu’elle pouvait dérober à la Cour. Elle commençait à s’applaudir de son succès : « Jugez de mon plaisir, écrivait-elle à son frère, quand je reviens le long de l’avenue suivie de cent vingt-quatre demoiselles qui y sont présentement. » Mme de Maintenon était faite pour ce gouvernement intérieur et domestique ; elle en avait l’art et le don, elle en goûtait tout le plaisir. […] L’idée de la fondation de Saint-Cyr fut décidée, et le roi en parla au Conseil le 15 août 1684 ; deux années se passèrent, durant lesquelles on bâtit la maison, on régla les dotations et les revenus et on prépara les constitutions. […] Les détails de la composition de cette adorable pièce et des représentations qu’on en fit sont trop connus pour y revenir : ils forment un des plus gracieux épisodes, et le plus virginal assurément, de notre littérature dramatique.

71. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

. — Il revint à soi et fit son sacrement, et acheva de chanter sa messe d’un bout à l’autre ; et oncques depuis ne chanta. […] Une belle scène, et qui est capitale, est celle de la délibération pour savoir si l’on reviendra incontinent en France. On y voit combien Joinville, sur l’article de la charité, sentait à l’unisson de saint Louis ; il croyait que nul chevalier, ni pauvre ni riche, ne pouvait honorablement revenir d’outre-mer, s’il laissait entre les mains des Sarrasins le menu peuple de Notre-Seigneur. […] Après que saint Louis pourtant a rempli, et surabondamment, ce semble, tous les devoirs qui sont les conséquences de son premier malheur, il revient en France (juillet 1254), et Joinville trouve alors qu’il est temps. […] Cet invincible et maladif désir d’une croisade dernière le prit comme prend à d’autres, après une longue absence, le désir de s’en revenir mourir dans la patrie.

72. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin (suite et fin.) »

Riche propriétaire du pays, il y a été élevé et y a passé son enfance, sa première jeunesse ; il y est revenu après une assez longue absence, pour ne plus le quitter ; il est marié, il a une femme jeune encore et sérieuse, et deux enfants ; il a tout l’extérieur du bonheur. […] Un voyage que fait Madeleine, l’été de cette année, avec ses parents à une ville d’eaux, cette courte absence d’où elle reviendra tout à fait grande personne et jeune fille accomplie, contribue fort à mûrir l’amour au cœur de Dominique et à lui apprendre ce qu’il ne se disait qu’assez vaguement. […] Plus en proie et plus déchiré que jamais, il se résout alors à un grand parti ; il entreprend un lointain voyage, mais d’où il revient vite et sans tenir tout ce qu’il s’était juré en partant. […] tout ce passé perdu revient à peu près au même. […] Nous sommes revenus à l’analyse morale la plus déliée, sans retomber dans le vague et le gris qui ôtait le relief et la forme aux objets environnants.

73. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

On était loin d’être revenu alors des préjugés contre les personnes de théâtre : qu’on se rappelle le scandale qui s’était produit à l’enterrement de Mlle Raucourt ; et ce n’était pas seulement le clergé, c’était le monde qui avait son genre de réprobation et sa nuance d’anathème. […] Et puis les soirs, au moment où la vie lui laissait un peu de trêve, quand elle revenait à ses souvenirs de théâtre, elle avait toutes sortes d’agréables récits. […] » — Et pour toute réponse et explication, toute revenue qu’elle était, la bonne maman Gontier leur disait dans sa langue du xviiie  siècle : « C’est, voyez-vous, mes enfants, que celui-là, il ne payait pas !  […] Cinq ans après, en 1827-1828, lorsqu’une nouvelle troupe anglaise revint à la charge pour représenter Shakspeare, un grand progrès s’était accompli dans l’intervalle chez les esprits cultivés ; les idées du journal le Globe avaient fait leur chemin dans la jeunesse. […] L’autre jour, en voyant Orphée, elle m’est revenue avec une force extraordinaire et toute cette puissance d’orage qu’elle seule a jamais eue sur moi.

74. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

Le pauvre poëte défunt pourrait revenir et, devant ce tombeau refleuri, se croire encore à son heure de triomphe et de fête. […] Envoyé en pénitence à La Flèche, par une punition fort douce, convenons-en, et de bien peu de durée, il ne revint à Paris que pour récidiver de plus belle : la Chartreuse courut avec la pièce des Ombres, qui en est la suite, et un libraire les imprima. […] Il est, je l’ai dit, et j’y reviens comme à la clef de mon explication, il est des natures poétiques qui vieillissent vite, et Gresset était de celles-là. […] Malgré tout, on revient toujours à se poser à son sujet cette question délicate, embarrassante : Comment se fait-il que, lorsqu’on a eu du goût, on cesse tout d’un coup d’en avoir ? […] Gresset, écrit-elle, est revenu à Paris après quinze ans (lisez vingt-quatre) de séjour à Amiens.

75. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Il promet, si la guerre l’épargne, de revenir lui apporter sa vie. […] Le mois de mai est revenu ; le poète le décrit comme tout poète méridional le saura toujours décrire. […] C’est celle de Marthe qui chante cette ravissante complainte, dont voici le premier couplet : « Les hirondelles sont revenues, je vois mes deux au nid, là-haut ; on ne les a pas séparées, elles, comme nous autres deux ! […] Jasmin, dans la seconde partie de sa carrière, a eu l’honneur et le mérite de sentir qu’il y avait à revenir, pour tout le Midi, à une sorte d’unité d’idiome, au moins pour la langue de la poésie. […] ce que j’ai dérobé, je le rends, et je le rende avec usure ; à ma vigne, je n’ai pas de porte ; deux ronces en barrent le seuil ; lorsque des picoreurs, par les trouées, je vois le nez, au lieu de m’armer d’une gaule, je m’en retourne, je m’en vais pour qu’ils y puissent revenir.

76. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Michaud à l’époque de sa mort, qui l’ont célébré à l’Académie française et ailleurs, l’aient fait dignement, il m’a semblé qu’il y avait moyen de revenir sur lui dans nos libres esquisses. […] Michaud revient cet autre honneur solide d’avoir eu, le premier chez nous, l’instinct du document original en histoire, d’en avoir de plus en plus apprécié l’importance en écrivant, d’avoir eu l’idée de l’enquête historique au complet, faite sur des pièces non seulement nationales, mais contradictoires et de source étrangère. […] Michaud revenait aussi, et on le voyait renaître comme à un rayon. […] Michaud revint en France à la fin de juillet 1831. […] [NdA] Je suis revenu sur M. 

77. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

Les deux destinées, celles du frère et de la sœur, sont si étroitement liées qu’il faut revenir à l’un quand on a à parler de l’autre, car elle ne nous entretiendra que de lui. […] Deux ans après, je revins, lui portant une robe que je lui avais faite. […] Dieu si bon, si compatissant, si aimant, si père, n’aurait-il pas eu pitié et tendresse pour un fils revenu à lui ! […] Un saint prêtre me dit : Votre frère reviendra. […] » La femme, avec son sourire et son indulgence, revenait donc à temps pour adoucir ce que la noble vierge féodale paraît avoir de trop rigoureuse austérité.

78. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

Le reste de sa dissertation revient à dire qu’un livre de maximes vaut exactement ce que vaut l’esprit de l’auteur : nous n’avions pas besoin du secours de ses lumières pour nous en aviser. […] Il leur est fort égal d’être injustes pour ceux dont le nez ne leur revient pas. […] Mme Sarah Bernhardt me fait toujours l’effet d’une personne très bizarre qui revient de très loin ; elle me donne la sensation de l’exotisme, et je la remercie de me rappeler que le monde est grand, qu’il ne tient pas à l’ombre de notre clocher, et que l’homme est un être multiple, divers, et capable de tout. […] En somme, c’est peut-être cet artifice, et le contraste qu’il fait avec les passages où la comédienne revient à la diction naturelle, qui fait l’originalité du jeu de Mme Sarah Bernhardt. […] Car j’espère que vous reviendrez, quoique ce soit bien loin, cette Amérique, et que vous ayez déjà porté plus de fatigues et traversé plus d’aventures que les fabuleuses héroïnes des anciens romans.

79. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VII. Le cerveau et la pensée : une illusion philosophique »

Nous ne reviendrons pas sur cette solution que nous avons exposée dans un travail antérieur. […] La vérité est que, dans l’hypothèse idéaliste, le souvenir ne peut être qu’une pellicule détachée de la représentation primitive ou, ce qui revient au même, de l’objet. […] Et faire des états cérébraux l’équivalent des perceptions et des souvenirs reviendra toujours, de quelque nom qu’on appelle le système, à affirmer que la partie est le tout. […] De là vous avez passé brusquement à une réalité qui sous-tendrait la représentation : soit, mais alors elle est subspatiale, ce qui revient à dire que le cerveau n’est pas une entité indépendante. […] On revient donc à l’idéalisme, et l’on devrait y rester.

80. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

Il partit, promettant de revenir dans très peu de temps. […] Après un certain laps de temps, il revient avec le capitan, son ami, dont il se fait passer pour le valet. Le capitan, qui dit s’en revenir de la guerre de Hongrie, raconte à Flaminia, qui se croit veuve, la mort de son mari. […] C’est, par exemple, la désolation burlesque d’Arlecchino, de Pedrolino et de Burattino mangeant un plat de macaroni en pleurant tous trois à chaudes larmes à cause d’un accident qui est survenu à la femme de Pedrolino. — Ou bien, c’est Burattino dupé par deux larrons : « Burattino, ayant été chercher des provisions pour l’hôtellerie, revient avec un panier plein de victuailles. […] Burattino, revenu de l’étourdissement que lui a causé leur flux de paroles, se met en devoir de manger, mais ne trouve plus que le vide et rentre chez lui en pleurant. » Un certain nombre des canevas des Gelosi sont purement burlesques ; l’on n’y voit d’un bout à l’autre que scènes nocturnes, quiproquos, trocs de costumes, gourmades et horions pleuvant de toutes parts.

81. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VIII. La crise actuelle de la Physique mathématique. »

En m’entendant parler ainsi, vous pensez sans doute au radium, ce grand révolutionnaire des temps présents, et en effet je vais y revenir tout à l’heure ; mais il y a autre chose ; ce n’est pas seulement la conservation de l’énergie qui est en cause ; tous les autres principes sont également en danger, comme nous allons le voir en les passant successivement en revue. […] Voilà pourquoi, par exemple, les températures tendent à se niveler sans qu’il soit possible de revenir en arrière. […] Pour ceux qui se placent à ce point de vue, le principe de Carnot n’est qu’un principe imparfait, une sorte de concession à l’infirmité de nos sens ; c’est parce que nos yeux sont trop grossiers que nous ne distinguons pas les éléments du mélange ; c’est parce que nos mains sont trop grossières que nous ne savons pas les forcer à se séparer ; le démon imaginaire de Maxwell, qui peut trier les molécules une à une, saurait bien contraindre le monde à revenir en arrière. Y peut-il revenir de lui-même, cela n’est pas impossible, cela n’est qu’infiniment peu probable ; il y a des chances pour que nous attendions longtemps le concours des circonstances qui permettraient une rétrogradation ; mais, tôt ou tard, elles se réaliseront, après des années dont il faudrait des millions de chiffres pour écrire le nombre. […] S’il en est ainsi, pour voir le monde revenir en arrière, nous n’avons plus besoin de l’œil infiniment subtil du démon de Maxwell, notre microscope nous suffit.

82. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

Voici la première, qui exprimait mes plaintes pour certains propos qui me revenaient de Passy : « Mon cher Béranger, « Bien que j’eusse bien pris la résolution de me taire vis-à-vis de vous jusqu’à ce que le hasard me fit vous rencontrer, je crois pourtant sentir qu’il est mieux de vous demander franchement en quoi et comment j’ai pu avoir tort envers une personne que j’ai toujours fait profession d’honorer autant que vous. Il me revient encore récemment que vous avez fait dire à un tiers que vous n’avez pas pris parti contre lui dans l’affaire de M. […] J’y mis tous les intervalles et toutes les quarantaines convenables ; mais, quinze ans après, le 15 juillet 1850, je me crus en droit de revenir à neuf et comme si de rien n’était sur les Chansons de Béranger (voir Causeries du Lundi, tome II). […] Béranger, qui était homme d’un bon esprit, eut celui de comprendre qu’ayant tout fait pour exalter et populariser l’Empire, il eût été ridicule à lui d’attaquer l’Empire revenu.

83. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

On célébrait à Argos la fête de Junon, et leur mère se préparait à monter sur son char pour se rendre au temple ; mais les bœufs, qui devaient être attelés, n’étaient point encore revenus des champs. […] De quel œil voulez-vous que l’on me voie tous les jours aller à la place publique, et en revenir ? […] Le jour suivant, les Perses revinrent, et Cyrus, les ayant fait asseoir dans les prairies voisines, les traita avec magnificence. […] Les voleurs revinrent comme de coutume, et celui des deux qui entra le premier, s’étant approché d’un de ces vases, fut saisi subitement par le piége. […] Mégabaze revient en Europe, attaque sur les bords de la mer Noire les Thraces, la nation, après les Indes, la plus nombreuse de l’Europe.

84. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Je respire l’odeur d’une rose, et aussitôt des souvenirs confus d’enfance me reviennent à la mémoire. […] Or, s’il opte pour OX, la ligne OY n’en subsistera pas moins ; s’il se décide pour OY, le chemin OX demeurera ouvert, attendant, au besoin, que le moi revienne sur ses pas pour s’en servir. […] — Et l’on ne voit pas que cette double question revient toujours à celle-ci : le temps est-il de l’espace ? […] Ce qui revient à dire que plus on fortifie le principe de causalité, plus on accentue la différence qui sépare une série psychologique d’une série physique. […] Mais d’autre part, cette idée de force, transportée dans la nature, ayant cheminé côte à côte avec l’idée de nécessité, revient corrompue de ce voyage.

85. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — George Sand. Cosima. »

Le nom de Jean-Jacques revient inévitablement dès qu’il s’agit d’un maître à qui dignement le comparer. Si le fond et l’idée sont parfois plus à discuter que le style, il est en tout une certaine précision, une certaine franchise et un sérieux (nous y reviendrons), qui ne l’abandonnent jamais. […] Au second acte, par exemple, quoi de mieux comme vérité d’analyse que cette scène entre Cosima et Ordonio, lorsque celui-ci, qu’on croyait mort, revenu à l’improviste, surprend Cosima en larmes, lisant la dernière lettre qu’elle a reçue de lui ? […] Rien de plus cruel, mais rien de plus finement observé qu’à la fin de cet acte, l’oubli qu’elle fait de Néri : par amour, par reconnaissance, il s’est dévoué pour sauver les jours d’Alvise accusé, il a subi la prison et peut-être la torture ; mais l’horreur s’éclaircit, Ordonio vit, Alvise est sauvé ; tous reviennent, et c’est fête entière.

86. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Elle lui conseille, à lui et à leurs amis, de ne pas faire d’entreprise à la légère, comme aussi de ne pas désespérer trop tôt ; elle ne préjuge pas absolument, en ce qui la concerne, de ce que l’avenir pourra l’amener à décider ; elle semble revenir sur ce premier refus de fuir, et elle n’y mettrait pas d’obstination, dit-elle, si les circonstances empiraient. […] Était-ce la peine, dira-t-on, de tant soulever de montagnes et de tant bouleverser de trônes, d’adresser des lettres si foudroyantes au roi et au pape, pour revenir, dès la première génération, à ce résultat ? […] Faugère, d’accepter cette variante de la tradition, non plus que ce surcroît d’interprétation qu’il y joint, et puisqu’il faut revenir sur cette mort, l’une des plus belles qui existent, je demande à retracer les faits sans surcharge et dans leur simplicité. Le malheur attaché à ces belles choses est que chacun y revient, et, en y revenant, veut y ajouter et renchérir sur les prédécesseurs. […] Nombre de pages de ce volume sont consacrées à Mme Roland, dont le nom et l’exemple reviennent sans cesse sous la plume de l’auteur.

87. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Il a peu d’idées, des systèmes importuns, une modestie fausse, une prétention à l’ignorance, qui revient toujours et impatiente un peu ; mais il sent la nature, il l’adore, il l’embrasse sous ses aspects magiques, par masses confuses, au sein des clairs de lune où elle est baignée ; il a des mots d’un effet musical et qu’il place dans son style comme des harpes éoliennes, pour nous ravir en rêverie. […] Lorsqu’il revint au commencement de 1830 pour sa réception à l’Académie française et pour la publication de ses Harmonies, il fut agréablement étonné de voir le public gagné à son nom et familiarisé avec son œuvre. […] Jamais antique bois où tu reviens t’asseoir, Milly, ses sept tilleuls ; Saint-Point, ses deux collines.  […] Et pourtant Elvire elle-même revient : le Crucifix l’atteste en assez immortels accents. […] Puis la nacelle est devenue une barque plus hardie, plus confiante aux étoiles et aux larges eaux : le rivage s’est éloigné et a blanchi à l’horizon ; mais de la rade on y revenait encore, on y recueillait encore de tendres ou cruels vestiges ; on y voyait à chaque approche comme plusieurs phares scintillants qui vous rappelaient : c’était trop s’éloigner ou trop souvent revenir.

88. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LES JOURNAUX CHEZ LES ROMAINS PAR M. JOSEPH-VICTOR LE CLERC. » pp. 442-469

En France, d’ailleurs, on aime assez que les idées, comme les vins, nous reviennent de l’étranger. […] C’est ainsi depuis longtemps dans les plus petites comme dans les grandes choses : Dufreny, avant Wathely, avait déjà tenté le genre des jardins dits anglais, qu’on a repris ensuite de l’Angleterre, tout comme Beaufort ou Pouilly nous est revenu par Niebuhr, comme le rationalisme de Richard Simon nous revient par Strauss. […] Le Clerc que revient le soin d’en dépister. […] Je ne revenais pas de tout ce que j’y surprenais, à chaque pas, d’intéressant, d’imprévu, de neuf et de vieux à la fois, d’inventé par nous-mêmes hier. […] A la mort de La Roque, Fuzelier lui succéda, et le Mercure revint au galant.

89. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

Le chapitre si remarquable de ses Pensées, intitulé Politique, nous le montre revenu à l’autre pôle, c’est-à-dire à l’école monarchique, à l’école de ceux qu’il appelle les sages : « Liberté ! […] Joubert durant la Révolution consista à être juge de paix à Monugnac où ses compatriotes l’avaient rappelé ; il y resta deux ans, de 90 à 92 ; puis il revint à Paris et se maria. […] Cicéron surtout lui revient souvent, comme Voltaire ; il le comprend par tous les aspects et le juge, car lui-même est un homme de par-delà, plus antique de goût : « La facilité est opposée au sublime. […] Sur quantité de points qui reviennent sans cesse, sur bien des thèmes éternels, on ne saurait dire mieux ni plus singulièrement que lui : « Il n’y a pas, pense-t-il, de musique plus agréable que les variations des airs connus. » Or, ses variations, à lui, mériteraient bien souvent d’être retenues comme définitives. […] Joubert un article de moi au tome  1er des Causeries du Lundi, et l’ouvrage intitulé : Chateaubriand et son Groupe littéraire…  ; il revient presque à chaque page.)

90. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Les œuvres défilent devant le miroir de notre esprit ; mais, comme le défilé est long, le miroir se modifie dans l’intervalle, et, quand par hasard la même œuvre revient, elle n’y projette plus la même image. […] Mais, Hippias étant revenu, elle ne peut plus résister à son amour : ils fuiront tous deux, ou plutôt ils iront se jeter aux pieds de Kallista et la fléchiront… Kallista survient et chasse le jeune homme avec des imprécations ; mais Daphné le rejoint, la nuit, au tombeau des aïeux et meurt dans ses bras, car elle a pris du poison et l’évêque Théognis vient trop tard la délier du vœu de sa mère. […] Aujourd’hui le père et la mère sont revenus pour six semaines sous le toit du vieillard… Jeanne monte lentement l’escalier, m’embrasse et murmure à mon oreille quelques mots que je devine plutôt que je ne les entends. […]  » Voici un jeune couple qui revient de la promenade : Les voici qui reviennent de la forêt en se donnant le bras. […] c’est peut-être là la suprême sagesse : voir le monde et s’en émerveiller comme les tout petits, mais ne revenir à cet émerveillement qu’après avoir passé par toutes les sagesses et les philosophies ; concevoir le monde comme un tissu de phénomènes inexplicables, à la façon des enfants, mais par de longs détours et pour des raisons que les enfants ne connaissent pas.

91. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

Il allait accompagner, au chemin de fer, son ami Daniel partant pour l’exode ; il ne sort pas moins, après avoir appris tout cela, persuadé que le Dieu dont il est le prophète le fera revenir à temps. […] Antonin revient, poursuivi par Césarine, qui le presse de fuir avec elle. […] Des théories creuses et nuageuses qui l’en éloignaient, il est revenu à la pratique, vivante et consommée, de son art. […] Nous y reviendrons. […] Point de réplique, c’est son dernier mot : et, ce soir même, elle reviendra chercher la fillette.

92. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

Quant à la noblesse, qui dispose à *** de douze ou quinze voitures, c’est au pas solennel de ses chevaux caparaçonnés qu’elle va, vient et revient le long de la chaussée qui borde les Allées Neuves. […] Après avoir été mousse sur un navire marchand, aventurier avec de Pindray au Mexique, — et chenapan partout, le baron revint dans la ville de ses pères, misérable, déguenillé, abruti. […] La main tâtait quelque chose là-dedans, — puis il la retirait et revenait à ses journaux. […] — J’ai vu la population siffler ou ne pas applaudir (ce qui revient au même dans l’espèce) Mélingue, le plus artiste de nos acteurs français. […] * *   * Justement, — comme je revenais, — je fis rencontre, à mi-côte, d’une caravane d’Espagnols qui promenaient un arsenal de coutellerie. « Oh !

93. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

« La duchesse est revenue d’Albano abîmée, désolée de la douleur de son cher cardinal. […] Pendant que M. de Chateaubriand s’acheminait vers Rome, madame Récamier revenait à Paris. […] Je vous reviendrai, et promptement, j’espère, comme je suis parti. […] On remarque aussi avec quelle délectation de plume ce nom de Rome revient constamment dans sa phrase. […] Il était la fidélité bruyante ; il y parut, il y parla, et revint sans avoir produit autre chose qu’un effet poétique, des cheveux blancs sur une scène du passé.

94. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Aujourd’hui nous revenons tout simplement à un disciple d’Horace. […] Règle générale : pour les poètes et gens de lettres qui se retirent en province après un premier éclat (je parle toujours de la province telle qu’elle était alors, aujourd’hui j’admets que tout est changé), pour ces esprits et ces talents qui ne se renouvellent pas, qui se continuent seulement et qui vivent jusqu’à la fin sur le même fonds, il faut toujours en revenir, pour les bien connaître, à la date de leur floraison première. […] Revenu après cet orage à ses loisirs de Reims, Maucroix, comme le pigeon voyageur rentré au nid, se promit bien de s’y tenir coi et ne plus quitter ses amis ni ses compères : Voilà nos gens rejoints ; et je laisse à juger De combien de plaisirs ils payèrent leurs peines. […] Cette fâcheuse fin de son voyage à Rome lui en gâta tout le plaisir s’il en eut, et on ne le voit jamais revenir ensuite sur ses impressions d’Italie ; il semble n’avoir nullement rempli la recommandation de La Fontaine, qui lui écrivait à la fin de sa lettre sur les Fêtes de Vaux : « Adieu, charge ta mémoire de toutes les belles choses que tu verras au lieu où tu es. » Malgré son vœu d’être en repos, Maucroix eut quelques devoirs à remplir pendant certaines années : le chapitre le choisit pour l’un de ses deux sénéchaux, et le chargea de défendre ses intérêts, ses prérogatives. […] Hier, comme j’en revenais, il me prit au milieu de la rue du Chantre une si grande faiblesse, que je crus véritablement mourir.

95. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Pendant les années de Santeul il y eut à Saint-Victor un pieux confrère, le père Simon Gourdan, qui essaya de revenir à la régularité primitive, et ce fut lui qui fit presque scandale et schisme dans la maison. […] le poète qui s’était publiquement consacré à célébrer les saints dans ses hymnes, revenir de la sorte à la mythologie païenne ! […] Saint Paulin, après sa conversion, sollicité par Ausone, son maître, de revenir aux muses, répondait qu’un cœur une fois voué au Christ ne se rouvrait plus à Apollon : Nec patent Apollini dicata Christo pectora. […] Les derniers vers surtout étaient bien ; il y disait que ce cœur, qui revenait porté sur les ailes de l’amour divin, n’avait jamais été absent en réalité de ces lieux chéris : Huc coeleslis amor rapidis cor transtulit alis, Cor nunquam avulsum, nec amatis sedibus absens. Mais il y avait d’autres choses encore dans l’épitaphe ; il y disait d’Arnauld qu’il revenait de l’exil, ayant triomphé de ses ennemis, « exul, hoste triumphato » ; il l’appelait le défenseur de la vérité, l’oracle du juste, Arnaldus veri defensor, et arbiter aequi.

96. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée, par M. le chevalier Alfred d’Arneth et à ce propos de la guerre de 1778 »

L’Électeur palatin à qui revenait régulièrement la succession se trouvait évincé du coup, et l’Autriche était même parvenue d’abord à lui arracher son consentement. […] Il ne semble pas qu’elle en eût soupçon encore, lorsqu’elle écrivait le 14 mars 1778 : « Madame ma chère fille, le courrier nous est revenu hier du 2, et nous a un peu rassurés sur les intentions du roi. […] Malheureusement, les anciens préjugés dans nos deux nations ne sont pas encore si effacés que je le souhaiterais, et on voit souvent encore revenir les anciennes préventions contre lesquelles il n’y a que notre constance et amitié qui, à la longue, triomphera pour le bien de nos maisons, peuples et sainte religion. […] Cette femme superbe, dévorée d’ambition, voulait aller à la gloire par tous les chemins ; elle mit dans ses finances un ordre inconnu à ses ancêtres, et non seulement répara par de bons arrangements ce qu’elle avait perdu par les provinces cédées au roi de Prusse et au roi de Sardaigne, mais elle augmenta encore considérablement ses revenus. Le comte Haugwitz devint contrôleur général de ses finances ; sous son administration, les revenus de l’impératrice montèrent à trente-six millions de florins ou vingt-quatre millions d’écus.

97. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

Le roi était revenu de l’armée à Paris dès le 14 juin, pour assister aux premières couches de la dauphine : c’était une infante d’Espagne. […] Mais j’en reviens là, Sire, n’admettez aucun délai ni aucune difficulté ; on ne veut pas vous lier les mains, mais on veut espérer… » Ce sont là de bons, de justes et même de sages et raisonnables sentiments. […] Je reviendrai sur ce trait qui chez lui est assez caractéristique. […] Mais je reviens à la lettre qu’il écrivait au roi Auguste III sur le mariage de la future dauphine. […] Revenons vite au mariage que chacun appelait de ses vœux et dont Louis XV pressait la conclusion, désirant qu’il pût se célébrer avant le carême de 1747.

98. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Il semble qu’après dix ans les dispositions littéraires se rejoignent plus qu’elles n’avaient fait dans l’intervalle, qu’elles se rapprochent du moins ; on ne revient pas au point de départ sans doute, et le cercle ne se ferme pas ; mais il y a une sorte de correspondance, comme d’un cercle à l’autre dans la spirale. On revient, après dix ans, en vue des mêmes idées, non plus pour y aborder, mais pour les juger ; si on y revient ensemble, il y a de quoi se consoler peut-être. […] Qu’il aille donc ce talent à la plume si sûre, qu’il épuise çà et là ses fougues d’essor, mais que surtout il revienne encore souvent au naturel et charmant récit. […] Le départ du mauvais s’est fait de lui-même : les excès se sont tirés sur chaque ligne et jusqu’à leurs dernières et révoltantes conséquences : l’industrialisme, la cupidité, l’orgueil, ont atteint d’extravagantes limites qui font un camp à part et bien large à tous les esprits modérés, revenus des aventures, amis des justes et bienfaisantes lumières. […] Le premier caractère de cette critique serait précisément d’être revenue des programmes.

99. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Je lis, à ce propos, dans un ouvrage inédit, le passage suivant, qui revient à ma pensée et la complète : « Lamartine, assure-t-on, aime peu et n’estime guère André Chénier : cela se conçoit. […] Pourtant Regnier, tout épicurien et débauché qu’on le connaît, est revenu, vers la fin et par accès, à des sentiments pieux et à des repentirs pleins de larmes. […] Il le sentait bien, et ne se livrait à elles que par instants, pour revenir ensuite avec plus d’ardeur à l’étude, à la poésie, à l’amitié. « Choqué, dit-il quelque part dans une prose énergique trop peu connue44, choqué de voir les lettres si prosternées et le genre humain ne pas songer à relever sa tête, je me livrai souvent aux distractions et aux égarements d’une jeunesse forte et fougueuse : mais, toujours dominé par l’amour de la poésie, des lettres et de l’étude, souvent chagrin et découragé par la fortune ou par moi-même, toujours soutenu par mes amis, je sentis que mes vers et ma prose, goûtés ou non, seraient mis au rang du petit nombre d’ouvrages qu’aucune bassesse n’a flétris. […] — puis, revenu à terre et rentré dans la vie réelle, qu’il eût buriné en traits d’une empreinte ineffaçable ces grands qui l’écrasaient et croyaient l’honorer de leurs insolentes faveurs ; et, cela fait, l’heure de sortir arrivée, qu’il eût fini par son coup d’œil d’espoir vers l’avenir, et son forsan et hæc olim ? […] Il nous semble, en un mot, et pour revenir à l’objet de cet article, que la touche de Regnier, par exemple, ne serait point, en beaucoup de cas, inutile pour accompagner, encadrer et faire saillir certaines analyses de cœurs ou certains poèmes de sentiment, à la manière d’André Chénier.

100. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Regnard, désespéré, navré, s’en revient à Paris, et, pour se distraire, il entreprend ses voyages du Nord. […] Dans ce voyage extrême de Laponie, après avoir aperçu du haut d’une montagne la mer Glaciale et toute l’étendue de la contrée, après avoir laissé sur une pierre une inscription en vers latins, signée de ses compagnons, et de lui, et destinée à n’être jamais lue que des ours, Regnard, qui s’est frotté, comme il dit, à l’essieu du pôle, songe au retour ; il ne revient point pourtant en France directement, et il achève le cours de ses pérégrinations instructives par la Pologne et par l’Allemagne. […] Il s’en revient en France après deux années d’absence environ, riche d’observations et mûr. […] Dans Le Joueur, le caractère principal a beaucoup de vérité : cet homme, qui a joué, qui joue et qui jouera, qui, toutes les fois qu’il perd, sent revenir sur l’eau son amour, mais qui, au moindre retour de fortune, lui refait banqueroute de plus belle, cet homme est incurable ; il a beau s’écrier dans sa détresse : Ah ! […] Je n’ai pas à revenir ici sur des pièces qui sont dans toutes les mémoires, et qui ont été cent fois analysées par les critiques nos confrères.

101. (1874) Premiers lundis. Tome I « Fenimore Cooper : Le Corsaire Rouge »

Nous reviendrons aujourd’hui, quoiqu’un peu tard, sur ce bel ouvrage que tout le monde a lu ; et sans chercher à en donner une sèche et inutile analyse, nous en causerons un instant avec nos lecteurs, comme d’une ancienne connaissance dont on aime de part et d’autre à se ressouvenir. […] Tantôt faible et mal nouée, tantôt tourmentée et obscure, presque toujours invraisemblable, on dirait, à la voir se dérouler péniblement, tourner et revenir sur elle-même, qu’elle a été conçue après coup, et que les accidents de sa marche ont été prévus et commandés dans un dessein étranger. […] Depuis l’instant où il entre comme capitaine à bord de la Caroline jusqu’à celui où il revient à bord du Dauphin, toute l’action porte sur lui, et il la soutient admirablement : c’est la plus belle partie du livre.

102. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIV » pp. 394-401

Madame de Maintenon était revenue de son domaine, où le roi lui avait « envoyé Le Nôtre pour ajuster cette belle et laide terre. […] Enfin, la joie était revenue, et tous les airs de jalousie avaient disparu. […] Le 15 du même mois, elle adressait à sa fille ces réflexions d’une profonde sagesse et d’une parfaite honnêteté : « Si Quanto avait bridé sa coiffe à Pâques de l’année qu’elle revint à Paris, elle ne serait pas dans l’agitation où elle est.

103. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

J’étais revenu, soulagé et non surpris, me reposer quelques jours du fardeau d’une année et réparer mes forces dans ma solitude ; j’allai voir mon voisin, le solitaire d’Audour. […] « On lui fait passer de Londres ses revenus : sa fortune est en Syrie au moins égale à celle d’un scheik puissant. […] Il revenait chez moi, quand un caprice de curiosité le conduisit chez les Ansariés, où il a péri on ne sait trop comment. […] « — Vous ne reviendrez donc jamais en Europe, Milady ? […] Elle me prophétisa ce qui m’est arrivé par hasard, un rôle grave dans une courte pièce, à grand mouvement. — Vous reviendrez après en Orient mourir où je vis, me dit-elle.

104. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Frochot, Préfet de la Seine, histoire administrative, par M. Louis Passy. »

« Si je revenais à la vie, disait Mirabeau, je ferais un bon mémoire sur l’art d’être garde-malade : c’est Frochot qui m’en a suggéré l’idée. » Et à un moment où, la fièvre s’apaisant au matin, Mirabeau faisait approcher son lit de la fenêtre, il dit à Frochot en regardant le soleil qui commençait à luire : « Mon ami, si ce n’est pas là Dieu, c’est son cousin germain. » Et le priant de lui soulever la tête : « Je voudrais pouvoir te la laisser en héritage. » Frochot refusa tout legs testamentaire. […] Puis il revient à son bourg d’Aignay. […] Comme le dit son ami Regnaud de Saint-Jean-d’Angély, d’un mot expressif à la fois et indulgent, « ce jour-là et à cette heure-là, Frochot fut frappé d’une sorte d’apoplexie morale. » Il n’en revint, une demi-heure après, que par un autre mouvement excessif, et qui peint bien le désordre de sa pensée ; lorsqu’il apprit que tout ce qu’il avait cru d’abord n’était qu’une déception et qu’un rêve, quand les écailles tout à coup lui tombèrent de dessus les yeux : « Ah ! […] Les Cent-Jours revinrent tenter Frochot. […] Mon ami, on ne revient pas de là, te dis-je, et après une mutilation aussi horrible, il ne reste plus qu’à aller se cacher, se traîner et mourir dans les bois.

105. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MADAME TASTU (Poésies nouvelles.) » pp. 158-176

fantômes, ombres vaines, Qui lassez à la fin mes pas irrésolus, Quand reviendront ces jours où vos mains étaient pleines Vos regards caressants, vos promesses certaines ? […] Quand, après une longue absence, Je revenais au toit natal, J’épiais dans l’air, à distance, Les doux sons du pieux métal. […] … Ainsi quand ta voix si connue Revint hier me visiter, Je crus que du haut de la nue L’ancienne joie allait chanter. […] Chacun s’en revient seul, rouvre son mal et pleure, Heureux s’il peut pleurer ! […] Après la perte de son mari, elle est allée rejoindre jusque dans l’Orient son fils unique, qui y remplissait des fonctions consulaires : elle est, après des années, revenue en France, la vue affaiblie, sentant le poids de l’âge, étrangère aux vains bruits, aux agitations de la vanité, et ne demandant de consolation qu’à la famille, à l’amitié, aux choses du cœur et de l’intelligence.

106. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

… Il ne faut que partir… et que revenir, hélas ! Revenir pour nous dire ce qu’on a vu, pour nous le décrire, car décrire est la plus grande affaire d’une époque qui meurt d’une hydropisie de description et de peinture, mais qui adore sa maladie. […] Homme qui se déplace bien plus qu’il ne voyage, il a déjà bu, les yeux mi-clos, à cette large coupe de la Contemplation sous le ciel bleu, et il l’a trouvée d’un goût si friand qu’il y revient encore tout en se grondant d’y revenir. […] Le voyageur est le revenant de Théophile Gautier, qui n’a pas besoin qu’on revienne pour lui, car il n’est pas mort, Dieu merci !

107. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre V. Les figures de lumière »

Pour l’observateur intérieur au système, les deux rayons lancés respectivement de O en B et de O en A, dans les deux directions rectangulaires, reviennent exactement sur eux-mêmes. […] Supposons (nous reviendrons bientôt sur ce point) que l’observateur en S ait coutume de mesurer son temps par une ligne de lumière, je veux dire de coller son temps psychologique contre sa ligne de lumière OB. […] C’étaient des temps égaux qui, pour ainsi dire, allaient de O en A et revenaient de A en O dans la figure primitive. […] Dans la théorie de la Relativité, le lien devient un lacet de lumière qu’on lancerait de O en B de manière à le faire revenir sur lui-même et à le rattraper en O, un lacet de lumière encore entre O et A, ne faisant que toucher A pour revenir en O.

108. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Ils n’en revenaient pas de stupéfaction. […] Nous verrons quel dédommagement nous en reviendra de la cour. […] Ils reviennent à Rome au mois de juin. […] La sœur Nanerl était déjà revenue à la maison auprès de son père. […] Je remercierai le Dieu tout-puissant si j’en reviens avec le goût sain et sauf !

109. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

Mais revenons à M. de Lamennais. […] Il revint le matin du quatrième jour. « Voilà votre roman, lui dis-je. […] Madame de L… revint à Paris. […] Il avait cependant marié richement ses fils, mais les revenus de la Gazette ne suffisant pas à ses dépenses, il se fit nommer député. […] Quelques semaines après, il revint.

110. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Il revient et la trouve morte, voilà tout ; mais c’est écrit par Chateaubriand ; le mystère ajoute à l’amour. […] Quoi qu’il en soit, il passa quelques jours enfermé dans le couvent des Pères de terre sainte à Jérusalem, et copia sur les monuments sacrés de cette ville de longs itinéraires qui grossirent le nombre de ses pages et l’autorité de ses volumes ; puis il revint à Carthage, d’où il rentra par l’Espagne en France. […] Cette pensée me revint et me plongea pendant une heure dans des regrets qui ressemblaient à des rêves. […] Un nouveau prophète revint en Europe, apportant ces prodiges de parole. […] Il revient avec ces ébauches dans l’esprit.

111. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « BRIZEUX et AUGUSTE BARBIER, Marie. — Iambes. » pp. 222-234

Marie, roman, est simplement un recueil d’élégies, parmi lesquelles il s’en trouve huit intitulées Marie, qui, sans se suivre du tout, reviennent par intervalles, et, au milieu des distractions de l’amant et des caprices du poëte, renouent le fil de lin flottant de cette première liaison villageoise et printanière. […] En lisant ce petit livre tout virginal et filial, le decor, le venustus, le simplex munditiis des Latins, reviennent à la pensée pour exprimer le sentiment qu’il inspire dans sa décence continue. […] C’est le propre des poésies extrêmement civilisées de revenir avec une curiosité expresse à la nature la plus détaillée, à la simplicité la plus attentive. […] Le tonnerre serein de la grande semaine et quelques vers d’André Chénier, dont le rhythme lui est revenu à l’oreille, ont décidé de sa vocation, et tout cet amas de verve et de peinture a débordé.

112. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIII. Henry Gréville »

Les journaux, ces efféminés, qui ne demandent qu’à s’efféminer davantage, ont pris ses romans avec l’empressement qu’ils ont, en général, pour les œuvres des femmes, et d’ailleurs, disons-le pour les excuser, ces romans avaient un accent étranger, une saveur de terroir lointain, qui leur faisait une originalité, dans un temps où il n’y en a plus, ni petite ni grande… On jabotait que Mme Henry Gréville revenait de Russie. Quand les actrices reviennent de Russie, elles ont du succès, dès le débarcadère. […] Cette revenue du pays des neiges, a tout de suite percé la neige épaisse et glacée de l’indifférence publique, si dure aux débutants. […] En vous parlant de l’auteur de la princesse Oghérof et de Dosia, entre l’Assommoir, dont on nous assomme, et la Fille Élisa, qui sera le succès de demain, je tenais à vous présenter cette plume de cygne ou de grèbe, revenue de Russie, et qui n’a pas de tache encore… Les cygnes de l’heure présente, quand il y en a, se teignent en rouge comme des cocottes… Mme Henry Gréville gardera-t-elle son ingénuité, son naturel, sa délicatesse immaculée ?

113. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « L’Abbé *** »

II J’ai parlé d’Eugène Sue et je suis forcé d’y revenir… C’est lui, en effet, qui a été le modèle de l’auteur du Maudit, dont le Juif Errant est un prêtre. […] Cependant, pour revenir à notre Maudit, les dévotes de Saint-Aventin, qui veulent avoir leur miracle de la Salette, ce à quoi le rationaliste et naturaliste Julio n’a pas voulu consentir, se vengent de leur curé en le calomniant. […] Il laisse ses ouailles, vole à Rome, où il est volé, détail délicat, par un monsignore italien qui lui fait payer des audiences qu’il ne lui livre pas, brise une grille de l’église du couvent où sa sœur est enfermée, la délivre, après des aventures que j’ose supprimer, de contrebandits honnêtes et de policiers scélérats, revient à Paris avec elle et fonde un journal à la barbe de ces Révérends Pères, qui n’en auront pas le démenti pourtant, car ils le font renvoyer du diocèse de Paris, puis interdire, puis maudire dans un concile provincial, et enfin crever de désespoir, puisqu’il faut que tout finisse, dans un hôpital des Pyrénées ! […] Il serait bien humilié, s’il revenait au monde et s’il lisait le Maudit, par l’abbé Trois-Étoiles, de l’adjonction d’une telle capacité à son parti, et il ne s’en consolerait qu’en pensant à la peur farouche qu’après tout une sottise peut causer à un cardinal !

114. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

Il était mûr pour Athènes, et revenu à Rome, ce ne fut que pour en repartir au plus vite (3 mai). […] Assez jouer comme cela. — Gandar revint de la Grèce par l’Adriatique, Corfou, Trieste ; il traversa l’Allemagne, Vienne, Prague, Dresde, Munich. […] Puis je reviendrai à Michel-Ange, achevant ce que j’ai à dire du sculpteur, du peintre, de l’architecte, du poète. […] Après l’Académie et les Précieuses, j’ai cherché dans l’atelier des peintres, surtout dans la vie et les œuvres de Le Sueur, une transition pour revenir de Scarron à Pascal. […] Je l’ai revu à l’École quatorze ans après, chargé d’une Conférence de français… » Mais ceci reviendra plus tard.

115. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

Elles ont suivi l’eau pour ne plus revenir. […] … Et c’est pourquoi je suis tenté d’en revenir à ma première hypothèse et de troubler de nouveau les mânes paisibles de M. de Marcellus. […] La mère de Marceline meurt de la fièvre jaune. « Après une traversée où sa vie et son honneur sont en péril », l’orpheline revient en France. […] — « … Nous sommes partis et revenus avec M. de Lamennais qui nous a ramenés jusqu’à la porte… Je te laisse à juger si l’on a parlé progrès, religion, liberté, avenir humanitaire ! […] Vous avez vu tout à l’heure que Sainte-Beuve revenait souvent dans ces lettres.

116. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Pour moi, je l’avouerai, ces sortes d’explications sur de grands génies pris dorénavant comme types absolus et symboles, non pas précisément surfaits, mais généralisés de plus en plus et comme élevés en idée au-dessus de leur œuvre, si forte et si grande déjà qu’elle soit en elle-même, ces considérations chères à la haute critique moderne restent à mes yeux nécessairement conjecturales ; ce sont d’éternels problèmes qui demeurent au concours et où l’on revient s’essayer de temps à autre : chacun, à son tour, y brise une lance. […] Encore une fois, revenons au vrai, et à ce vrai littéraire qui n’oublie jamais l’humanité, et qui implique une sorte de sympathie pour tout ce qui en est digne ; si nous sommes justes pour l’ex-chaudronnier Bunyan qui, dans ses visions fanatiques, a fait preuve de force et d’imagination, n’écrasons point d’autre part cette gentille et spirituelle créature, cette quintessence d’âme, cette goutte de vif esprit dans du coton, Pope. […] Mais le merveilleux enfant avait pris de lui, en le lisant, une si haute et si chère idée, qu’il obtint de quelques amis qu’on le menât dans le café que fréquentait Dryden, et il revint tout heureux de l’avoir vu. […] Vous lui parliez de votre mère, de votre sœur, de votre maîtresse : « Allons, disait-il, c’est très-bien, mais revenons à la réalité… Que ferons-nous de Nucingen, de la duchesse de Langeais ? […] Un jour que Jules Sandeau revenait de son pays natal où il avait assisté à une perte cruelle, à la mort d’une sœur, Balzac le revoyant et après les premières questions sur sa famille, lui dit tout à coup comme en se ravisant : « Allons, assez de raisonnement comme cela, revenons aux choses sérieuses. » Il s’agissait de se remettre au travail et, je le crois, au Père Goriot.

117. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

La Terreur passée, il revint à Paris ; il entra dans l’institution Hix. […] Ayant reçu cette bordée d’Hoffman, et une autre d’Auger, Mme de Genlis revint à demander pour juge M. de Féletz, qui du moins la piquait plus agréablement. […] Ce Geoffroy pourtant (j’y reviens) était une forte et vigoureuse nature. […] Nous aussi, nous sommes revenus à une de ces époques où l’on sent très bien que la critique, celle même qui se bornerait à résister au faux et au déclamatoire, aurait son prix. […] Carnot le crut un instant ; mais bientôt, mieux éclairé sur les véritables intentions de M. de Féletz, il n’avait pas hésité à revenir sur une première décision.

118. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le voltairianisme contemporain »

Il a été discuté par d’autres avec une impartialité trop sereine pour qu’il soit nécessaire d’y revenir. […] Mais si nous ne revenons pas sur le mérite, historique ou littéraire, d’un livre qui ne peut plus être loué que par Janin, — et dans l’Artiste, encore !  […] Voltaire revient, dit-on ; il sort de son tombeau !

119. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Stendhal, son journal, 1801-1814, publié par MM. Casimir Stryienski et François de Nion. »

« Si, après cela, vous m’accusez d’être fils dénaturé, vous ne raisonnez pas, votre opinion n’est qu’un vain bruit et périra avec vous. » Et il y revient encore avec un acharnement maladif : « Ou vous niez la vertu, ou mon père a été un vilain scélérat à mon égard ; quelque faiblesse que j’aie encore pour cet homme, voilà la vérité, et je suis prêt à, vous le prouver par écrit à la première réquisition. » Or, il paraît bien que ce père était un homme assez rude et désagréable ; mais, si vous songez que ce tyran, n’ayant lui-même que dix mille francs de rente, faisait à son fils, alors âgé de vingt-deux ans, une pension de deux mille quatre cents francs qui en vaudraient plus de cinq mille aujourd’hui ; que Stendhal avait, en outre, une rente de mille francs qui lui venait de sa mère et que, si l’argent lui avait manqué pour se soigner, c’est qu’il en dépensait beaucoup pour ses habits et pour le théâtre, vous verrez peut-être autre chose que de l’indépendance d’esprit dans cette furieuse impiété filiale. […] Tout cela n’empêche point Stendhal de se croire extraordinairement sensible. « Si je vis, ma conduite démontrera qu’il n’y a pas eu d’homme aussi accessible à la pitié que moi… La moindre chose m’émeut, me fait venir les larmes aux yeux… » Ces déclarations reviennent à chaque instant. […] Je n’en reviens pas ! […] » Et un peu après : « Non, je m’étais trompé : il vient seulement lui faire répéter ses rôles. » Une phrase qui revient toutes les dix pages, c’est celle-ci : « A tel moment, si j’avais osé, je l’aurais eue. » Cela devient très comique à la longue.

120. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Oscar de Vallée » pp. 275-289

Oscar de Vallée lui-même, qui ne veut pas qu’on les oublie et qui a plus mesuré son admiration à la moralité révoltée, intrépide et fière de Chénier, qu’à la supériorité intellectuelle de l’écrivain, n’a pu s’empêcher de revenir au poète et de finir son livre par des vers plus beaux que toutes les proses du monde, et qui enterrent le prosateur dans la tombe du poète, à mille pieds dans les rayons de cette tombe, faite avec des rayons ! […] Car c’est à ses vers qu’il faut revenir, et, je l’ai signalé déjà, M. Oscar de Vallée y est revenu lui-même à la fin de son livre, malgré le sujet de ce livre, entrepris pour exalter en André Chénier un talent qui n’était plus celui des vers. […] Seulement, la trombe hideuse reviendra, et pas plus dans l’avenir que dans le passé, cette poésie de Chénier ne l’empêchera de nous passer sur le corps !

121. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Alfred de Vigny »

L’Académie, cette éructatrice de discours, fut obligée de s’y taire et de s’en revenir avec les siens sur l’estomac. […] Je le trouve tout entier dans ce trait : Il avait, je ne sais où, une forêt, le seul débris qui lui restât d’une grande, fortune aristocratique, et les coupes annuelles de cette forêt auraient pu être pour lui un revenu considérable. Mais il aima mieux toute sa vie se priver de ce revenu, que de toucher à une seule des branches de ce bois sacré, le luxe d’un poète ! […] Dans ce portrait dont il est question, son front, qui surplombe un visage tranquillement triste, jette l’ombre de sa voûte puissante à ces yeux rêveurs qui cherchent involontairement le ciel, mais qui, dans la réalité, revenaient se tourner vers les vôtres avec des airs fins et spirituels comme nous entendons le regard, nous autres polissons de la terre !

122. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

Il voulait faire de son voyage à Jérusalem quelque chose comme un bouclier contre le ressentiment des popes, car à Saint-Pétersbourg, dans cette société mi-partie de mode et de religiosité mystique, un homme qui revient de Jérusalem a un charme… Le charme n’agit point sur la mort : frais de voyage, de précaution, de coquetterie religieuse, tout fut inutile. Gogol revint pour mourir en Russie. […] Ce livre a été publié en deux parties et à deux époques, mais la première est la plus curieuse, car le satirique, dans cette première partie, l’est sans esprit de retour ; il brûle son vaisseau, et, dans la seconde, il fait l’effet d’arranger les planches d’une barquette pour s’en revenir ! […] s’il n’était pas mort, il serait revenu !

123. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Je ne sais ce que répondit Hiéron ; mais Parny, lui, n’eut point à se repentir d’avoir envoyé ses Grâces frapper à la porte du cabinet de Français (de Nantes), et elles ne lui revinrent point avec un refus. […] Nous y reviendrons tout à l’heure. […] Parny dit qu’il revint dans Paris après quatre ans d’inconstance et d’erreurs ; il dit cela positivement dans une lettre de 1777 adressée à M. de P. du S. Parti de France à la fin de mai 1773, ces quatre années le conduiraient à 1777 comme date du retour ; mais il paraît qu’il était revenu auparavant, vers la fin de 1775 ou au commencement de 1776. Ce qui est certain, c’est que dans une lettre à Bertin, datée de Bourbon janvier 1775, il parle de son retour comme prochain ; et de plus une lettre de Bertin à lui (en supposant la date exacte) nous le montre revenu en France et plus que revenu en juin 1776, pleinement rendu aux plaisirs de la confrérie, et n’ayant pas du tout l’air d’un amant désolé.

124. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

Mais à la fin le peuple revient au vrai. » Oui, au vrai en tout ce qui le touche directement comme intérêt. […] Mais en 91, pour revenir au point en question, où était l’homme de la circonstance, et y avait-il un homme dirigeant ? […] Girondin, passe encore ; on en revient avec honneur, sauf amendement et judicieuse inconséquence ; mais de 93, jamais ! Pourtant revenons aux grandes choses, au général La Fayette, à ses Mémoires et à sa vie […] Cela reviendra.

125. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Y eut-il jamais, dans la vie d’un peuple militaire et libre, un plus admirable moment et pour ce peuple lui-même et pour les jeunes guerriers dont il était fier, que l’heure où, après une pareille campagne unique par le génie et toute patriotique d’inspiration, toute défensive encore jusque dans ses conquêtes, après n’avoir battu tant de fois l’étranger au dehors et ne l’avoir relancé si loin que pour ne pas l’avoir chez soi au dedans, les enfants de cette triomphante armée d’Italie revinrent dans leurs foyers, simples, modestes, décorés du seul éclat des victoires ? […] Joubert ne revint à Paris qu’après cette journée du 18 fructidor. […] Ces lettres se terminent par des mots dont il est généralement sobre et qui reviennent rarement ailleurs sous sa plume sévère : « Je vous salue et vous embrasse », ou « Je vous salue et vous aime. » Cependant, malgré cette affection mêlée à l’estime, Bonaparte n’emmena point Joubert avec lui dans son expédition d’Orient. […] Revenu en France et à Paris, Joubert n’échappait pour cela ni aux complications ni aux anxiétés : c’était le malheur de la situation. […] Dans une visite qu’il revint faire dans la soirée au général en chef, Saint-Cyr le retrouva le même, sans plan arrêté, et la nuit ne changea rien à son irrésolution : il ne donna point d’ordres.

126. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) »

Et pourtant on y revient toujours. […] Il n’est pas dénué de cette espèce d’avantage et de dédommagement qui semble revenir surtout aux œuvres modernes : il peint les mœurs modernes, les coutumes et costumes d’un temps ; il en est un témoignage. […] C’est alors que la Vierge, ainsi repoussée, en remercie presque son fils et le prie de l’excuser de ses faiblesses ; mais au même moment, tout en paraissant se soumettre, elle revient doucement à la charge en refaisant presque ses mêmes demandes, ses mêmes prières, en les faisant à mains jointes et comme les plus petites, les plus humbles, les plus attendrissantes supplications qui puissent, à pareille heure, sortir des lèvres d’une mère : Notre-Dame Au moins veuillez, de votre grâce, Mourir de mort brève et légère ! […] Cette partie si importante de l’art dramatique ne devait, disent-ils, venir ou revenir que plus tard. […] J’en reviens donc à penser avec MM. 

127. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

Je voudrais revenir sur le cardinal de Retz et sur ses Mémoires, dont j’ai déjà parlé une fois43. […] Les taxes, c’est là le point délicat et auquel il faut toujours revenir dès qu’on veut organiser un ordre quelconque au lendemain d’une révolte, et le premier cri de toute révolte est de se faire au nom d’un soulagement le plus souvent impossible. […] Une plaisanterie qu’il laissa échapper contre la reine, et qui revint à celle-ci (il l’avait appelée Suissesse), irrita la femme, et contribua à la vengeance finale plus peut-être que ne l’auraient pu faire les seules infidélités politiques de Retz. […] Cette retraite du cardinal de Retz en Lorraine ne tint pas, et il revint à son abbaye de Saint-Denis. […] Ceux qui veulent s’en dispenser l’auraient aussi bien fait quand il serait demeuré à Commercy qu’étant revenu à Saint-Denis.

128. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

 » Cette qualification, qui revient à Monseigneur, était sans doute donnée au chevalier castillan par les soldats arabes qu’il eut souvent à commander, et, lorsqu’il eut conquis Valence, par les habitants de cette ville devenus ses sujets. […] Il revint donc au service du roi de Saragosse, Moutamin, et ensuite du fils de ce dernier, Mostaïn. […] Diègue, qui était absent, revient en toute hâte à Bivar, assemble ses frères, et ils font une incursion à Gormaz. […] Cette action du Cid d’avoir trompé les deux Juifs gênait les poètes des âges suivants ; ils y sont revenus plus d’une fois pour la pallier, pour l’excuser. […] Elle vient et revient à la charge, demandant au roi justice et vengeance ; elle le fait en des termes singuliers : « Ô roi !

129. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

Il est revenu souvent là-dessus. […] Je ne dirai pas que ses fables sont pleines de la notion de la Providence, mais cette notion revient très souvent, à beaucoup de reprises, dans ses fables. […] Vous retrouvez la même constatation dans le Loup et l’Agneau, ce Loup et l’Agneau — j’y reviendrai peut-être — qui irritait les nerfs de Napoléon Ier, vous verrez pourquoi. […] C’est, par exemple, dans le Vieillard et ses enfants, le trésor dans le champ, symbole qui veut dire : il y a un trésor qui est le travail que vous ferez et qui vous reviendra en ressource, en revenus et en fortune. […] La médiocrité leur revient, ils en sont heureux, et au départ du Follet, ayant encore un souhait à faire, ils demandent la sagesse. « C’est un trésor qui n’embarrasse point. » Ils demandaient ce qu’ils avaient, car, du moment qu’ils demandaient la médiocrité, ils avaient la sagesse.

130. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

En 1792, Goethe suivit, par dévouement monarchique, le duc de Weimar dans la campagne des Prussiens contre la France ; après la paix, il passa à Bruxelles et revint vivre à Weimar. […] Il se leva, alla dans sa chambre à coucher et revint sans embarras. […] Il revint le 15 septembre de Marienbad, si bien portant, si vigoureux, qu’il pouvait faire plusieurs lieues à pied. […] Mais toujours je suis revenu avec plaisir à Weimar. » J’étais heureux de voir de nouveau Goethe près de moi, de l’entendre parler, et je sentais que je lui appartenais tout entier. […] Lorsque j’eus fini de lire, Goethe revint vers moi : — Eh bien !

131. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Sans cette armée, il était impossible que cela ne finît pas comme cela a fini… Je reviens à l’Empereur. […] Elle s’écrie : « Qu’il faut qu’il ne revienne pas, qu’il se fasse tuer à la tête de son armée !  […] La seconde journée commence et menace de finir comme la première, avec, au fond de l’artiste, un commencement de lâcheté et un vague désir de revenir chez son père. […] Après un séjour de huit ans en Allemagne, il revient en Russie. […] Des ressouvenirs des figures de pierre de la cathédrale de Chartres, mêlés à des réminiscences des récits des temps mérovingiens, me revenaient, je ne sais pourquoi.

132. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Les espèces de même genre varient d’une manière analogue ou reviennent à d’anciens caractères perdus. — XI. […] Revenons maintenant à l’état de nature. […] J’aurai, du reste, à revenir sur ce sujet dans le chapitre sur la Classification. […] Les espèces de même genre varient d’une manière analogue ; les variétés d’une espèce assument les caractères d’une espèce alliée ou reviennent à d’anciens caractères perdus. […] On peut encore prévoir que les espèces du même genre manifesteront de temps en temps leur tendance constante à revenir aux caractères perdus des ancêtres.

133. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Elle y revint après plusieurs voyages à travers l’Europe, en 1801, à ce moment de paix et de renaissance brillante de la société et des lettres. […] Le portrait de Valérie elle-même revient, repasse sans cesse à travers cela, dans toutes les situations, dans toutes les poses, souriant, attristé, mobile, et comme amoureusement répété par mille glaces fidèles. […] de la Chevalerie, dont les rêves ont charmé l’univers, revenez tout entière, car vous êtes vivante d’immortalité ! […] Bien des railleurs à Paris, qui allaient l’entendre dans son grand salon du faubourg Saint-Honoré, ouvert à tous, revenaient, sinon convaincus, du moins charmés et pénétrés de sa personne. […] On lui fit promettre de revenir, d’envoyer de bons livres.

134. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

Pour le coup, je n’en revenais pas ; je faisais les plus folles hypothèses pour imaginer comment une femme peut ressembler à un pistolet. […] Nous revenions toujours ensemble du collège. […] Il revint de bonne heure, trouva sa vieille maison, que personne n’avait voulu occuper, dans l’état où il l’avait laissée. […] Quand l’acquittement fut prononcé, le broyeur de lin reprit ses insignes, se retira rapidement, emmenant sa fille, et revint au village de nuit. […] Les carlistes de Tréguier allaient répétant partout que cela ne durerait pas, que le roi légitime allait revenir.

135. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre X »

Raymond de Nanjac, un jeune capitaine de spahis qui revient d’Afrique, et, à la manière dont leurs yeux s’accrochent au passage, vous devinez que l’amour a passé par là. […] Mais la dame revient de voyage, avec un projet bien formé ; elle lui demande s’il veut l’épouser. […] L’art de couper trois mille livres de revenu en trois cent soixante-cinq parties égales pratiqué avec tant de résignation et de minutie ! […] Cette part faite au sentiment, le banquier revient aux affaires. […] Quant à M. de Charzay, revenu de Sologne, petit rentier comme devant, il a le mauvais goût de préférer la triste Elisa à cette rieuse et jolie Mathilde, qui, du reste, nous a tout l’air de s’en consoler assez vite.

136. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

Nous allons donc simplement revenir à l’hypothèse dont nous étions parti quand nous tracions deux axes rectangulaires et considérions une ligne A′ B′ dans le même plan qu’eux. […] Elle vous donnera moins, car le tas d’images empilées qui constitue la totalité des états de l’univers n’a rien qui implique ou explique le mouvement par lequel votre Espace P les occupe tour à tour, ou par lequel (cela revient au même, selon vous) elles viennent tour à tour remplir l’Espace P où vous êtes. […] Ou — ce qui revient au même — vous voulez que toutes ces images données dans l’instantané ou dans l’éternité soient condamnées, en raison d’une infirmité de votre perception, à vous apparaître comme passant tour à tour sur votre plan P. […] Pour montrer comment Temps et Espace ne commencent à s’entrelacer qu’au moment où ils deviennent l’un et l’autre fictifs, revenons à notre système S′ et à notre observateur qui, placé effectivement en S′, se transporte par la pensée dans un autre système S, l’immobilisé et suppose alors S′ animé de toutes les vitesses possibles. […] Nous revenons ainsi par un long détour à notre point de départ.

137. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Bernis, revenu de Venise et qui était dans la main de Mme de Pompadour, fut chargé de rédiger l’œuvre et de concerter le traité d’alliance : malgré ses premières objections d’homme sensé, il ne résista pas longtemps au mouvement général qui entraînait tout le monde autour de lui ; il fut ébloui et crut contribuer à la plus grande opération politique qu’on eût tentée depuis Richelieu. […] Il y a là un sentiment de dignité avant tout et de haute convenance nationale, d’honneur de couronne, comme on disait alors, lequel sentiment est au cœur de Marie-Thérèse et que Bernis n’a pas : il raisonne dans toutes ses lettres à peu près comme Mme de Maintenon dans celles qu’elle écrivait à la princesse des Ursins, et où le mot de paix revient à chaque page. […] Dans cette absence d’ordre et de direction supérieure, le duc de Richelieu avait voulu revenir à Paris comme s’il n’y avait eu rien à faire en Hanovre (janvier 1758) ; tous les généraux demandaient à revenir de même : « Ce sont les Petites-Maisons ouvertes. » Le comte de Clermont, prince du sang, envoyé pour commander en chef, fit faute sur faute ; il commença par une retraite précipitée, d’une longueur exagérée, et semblable à une déroute. […] Il revient en plus d’un endroit sur les dangers auxquels peut donner lieu l’irritation populaire : Le salut de l’État demande que vous soyez ici pour gouverner notre amie, pour la sauver de la rage de Paris, pour rétablir nos affaires sur un ton et un pied que je n’ai pu réussir à faire établir par les ombrages que d’un côté ma franchise, et la malice de l’autre, ont trouvé le moyen d’élever. (16 septembre.) […] « Il n’y a qu’un ministre nouveau qui puisse prendre de nouveaux engagements. — Le duc de Choiseul est le seul qui puisse soutenir le système du roi ou le dénouer. » Telle est l’idée juste de Bernis ; mais, en tant qu’il se l’appliquait personnellement et qu’il la retournait contre lui-même, cette idée lui devenait un remords poignant et insupportable, et c’est ce qui explique ce mot de déshonneur qui revient si souvent sous sa plume : Souvenez-vous, écrit-il à Mme de Pompadour (dans la soirée du 26 septembre), qu’il est impossible que ce soit moi qui sois chargé de rompre les traités que j’ai faits.

138. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

On le voit, si une idée auguste et grandiose préside à l’inspiration de Gibbon, l’intention épigrammatique est à côté : il conçoit l’ancien ordre romain, il le révère, il l’admire ; mais cet ordre non moins merveilleux qui lui a succédé avec les siècles, ce pouvoir spirituel ininterrompu des vieillards et des pontifes, cette politique qui sut être tour à tour intrépide, impérieuse et superbe, et le plus souvent prudente, il ne lui rendra pas justice, il n’y entrera pas : et de temps en temps, dans la continuité de sa grave Histoire, on croira entendre revenir comme par contraste ce chant de vêpres du premier jour, cette impression dénigrante qu’il ramènera à la sourdine. […] Un homme qui s’exprime comme il vient de le faire n’est point versatile ; il est né ministériel, et, s’il se trouve un moment jeté dans l’opposition, ce n’est qu’à son corps défendant, Cette place de lord du Conseil de commerce à laquelle Gibbon aspirait, il l’obtint et la conserva trois ans (1779-1782) avec un traitement annuel de sept cent cinquante livres sterling ; mais le Conseil de commerce ayant été supprimé, Gibbon, qui se trouvait gêné dans ses revenus, songea à sortir de la vie publique pour laquelle il était si peu fait, à recouvrer son indépendance, et à se retirer en Suisse pour y achever son Histoire. […] Il en jugea sans illusion dès le premier jour, et il n’avait pas à revenir de bien loin pour cela : il était conservateur par essence, et n’avait jamais eu de goût pour les tribuns ni pour les novateurs83. […] Il revient plus d’une fois sur cette idée avec ferveur. […] Byron écrivait d’Ouchy, près de Lausanne, au libraire Murray, le 27 juin 1816 : J’ai été retenu ici par le gros temps, comme je m’en revenais à Diodati (près Genève) d’un voyage en bateau autour du lac, et je joins à cette lettre, pour vous, une petite branche de l’acacia de Gibbon, et quelques feuilles de rose cueillies dans son jardin que je viens de voir, ainsi qu’une partie de la maison.

139. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « I » pp. 1-20

Quant à ce que j’appelle la troisième génération, et dans laquelle je prends la liberté de ranger les gens de mon âge à la suite de ceux qui ont une dizaine d’années de plus, c’est moins d’une admiration excessive qu’ils eurent à revenir que d’un sentiment plus ou moins contraire. […] Je dirai donc, sans croire nous trop accorder, que dans cette troisième génération plus d’un esprit en est revenu, sans fléchir sur les points essentiels, à voir en Voltaire ce qu’il convient d’y voir avant tout lorsqu’on le considère en lui-même et dans les conséquences immédiates qui sont sorties de ses œuvres. […] Voltaire est à Villars ; il s’y oublie un peu ; les gens intéressés à l’affaire le pressent et lui font dire qu’il est urgent qu’il revienne à Paris. […] Il en revint définitivement formé, avec un fonds d’idées qu’il accroîtra peu, et avec un cachet intérieur qu’il ne perdra plus. […] Je ne souhaite de revenir à Paris que pour vous voir, vous embrasser encore une fois, et vous faire voir ma constance dans mon amitié et dans mes malheurs.

140. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Ils revinrent en Italie et s’établirent à Florence pour ne la plus quitter, sauf de rares excursions. […] Elle y revenait aussi prudente que jamais et bien avertie de l’être, mais au fond du cœur, on le conçoit, médiocrement reconnaissante. […] Revenue à la maison, la comtesse, après le déjeuner, allait dans sa bibliothèque et y lisait : c’était sa dernière passion. […] Mme d’Albany, mourant en 1824, nomma Fabre son légataire universel, et Fabre, à son tour, étant revenu mourir dans sa ville natale, a légué à celle-ci, en 1837, tous ses trésors, tableaux, livres et manuscrits. […] Je me promets de revenir un jour, et bientôt, sur l’un des correspondants et des amis de Mme d’Albany, sur Sismondi, dont M. 

141. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

Bonhomme : il n’est pas commode de parler à fond de ce poète-là dans un journal ; je compte y revenir ailleurs ; mais sur Collé, nous avons et allons avoir tous les moyens d’en juger. […] Enfin, pour n’avoir pas à revenir sur ces ennuyeuses chicanes faites à un homme estimable qu’on voudrait n’avoir qu’à remercier, je remarquerai encore une faute criante et sans excuse, même chez quelqu’un qui ne se donnerait pas pour érudit. […] Collé, d’ailleurs, dégoûté pas l’accueil et la morgue des comédiens français, moins accessibles alors qu’aujourd’hui, n’y revint guère, et son théâtre de société, le théâtre du duc d’Orléans, fit, tant qu’il dura, son occupation et ses délices comme il est sa véritable originalité. […] On plaît immanquablement davantage aux hommes, et encore plus aux femmes, en faisant valoir l’esprit ou la raison des autres, qu’en faisant briller le sien ou qu’en montrant son jugement. » Il y revient en plus d’un endroit avec beaucoup de sens et en homme qui sait son monde : « Vous vous plaignez de ce que vous ne savez pas être amusant dans la société. […] Dans sa Correspondance avec le jeune homme, seule partie assez intéressante du volume et qui ne l’est encore que médiocrement, Collé se montre à nous avec la douce manie des vieillards ; il revient sur le passé, sur ses auteurs classiques, sur Horace « le divin moraliste » qu’il cite sans cesse et qu’il a raison d’aimer, mais tort de parodier en de mauvais centons latins ; il voudrait que son jeune financier apprît le grec « à ses heures perdues », ce qui est peu raisonnable.

142. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

Naturellement, dans une Correspondance avec sa mère, Marie-Antoinette s’épanche et revient perpétuellement sur cet objet qui fait, à toutes deux, leur constante et vive sollicitude. […] Madame est Italienne de corps et d’âme ; le caractère de Monsieur y est très-conforme : notre pli est pris, nous vivrons toujours sans division ni confiance, et je crois que le roi est comme moi sur cet article. (14 juillet 1775.) » Cet article des deux beaux-frères revient fréquemment sur le tapis. […] Les éloges se mêlent aux réprimandes, car on sent qu’elles sortent d’un cœur tendre et qui n’a en vue que le bonheur des siens : « Je suis toujours sûre du succès, si vous entreprenez une chose, le bon Dieu vous ayant douée d’une figure et de tant d’agréments, joint avec cela votre bonté, que les cœurs sont à vous si vous entreprenez et agissez ; mais je ne puis vous cocher pourtant ma sensibilité : il me revient de toutes parts et trop souvent que vous avez beaucoup diminué de vos attentions et politesses à dire à chacun quelque chose d’agréable et de convenable, de faire des distinctions entre les personnes. […] … » On sourit à la seule idée d’une telle comparaison entre Mesdames, filles de Louis XV, et celle dont Frédéric, le glorieux rival et ennemi, a parlé comme « d’une grande femme, faisant honneur à son sexe et au trône. » Nous reviendrons sur ces jugements de Marie-Thérèse, portés par l’adversaire qui passa sa vie à se mesurer contre elle, et qui lui a rendu le plus digne, le plus historique des hommages. […] On convient bien que le feu roi a laissé les choses en très-mauvais état, mais les esprits sont divisés, et il sera impossible de contenter tout le monde dans un pays où la vivacité voudrait que tout fût fait dans un moment (30 juillet 1774.) » Bien vite, en effet, les nuages reviennent et les difficultés se prononcent.

143. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Elle écouta, parla peu et m’engagea à revenir. Quand je ne revenais pas assez souvent, elle avait le soin de m’écrire et de me rappeler. […] Serez-vous assez bon pour revenir bientôt ? […] Quand vous reviendrez, tâchez que ce soit le matin, de midi à deux ou trois heures. […] Déjà l’on a pu voir, dans les précédents morceaux de critique, à quel point, même après m’être engagé d’abord par une admiration sincère, je ne craignais pas de revenir et de poser mes réserves quand il y avait lieu.

144. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

Lorsqu’elle revient de sa visite maternelle, elle trouve, non plus un fou, mais un sot furieux qui l’accuse de revenir de chez son amant. […] Mais comment admettre qu’à peine revenue de cette scabreuse expérience, la jeune femme recherche si vite une nouvelle épreuve. […] Le mari revient à cet appel qui ne lui était pas destiné. […] Au moment où le public va protester contre une idée trop bizarre, contre une théorie trop aventurée, il entend sa propre objection qui lui revient de la scène, comme par un écho éclatant d’esprit. […] Valmoreau l’a échappé belle, et la pitié vous prend, lorsqu’on le voit revenir, l’œil contrit et l’air résigné, se déclarant prêt à épouser l’ange déchu, dans la chapelle des Filles repenties.

145. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) «  Mémoires de Gourville .  » pp. 359-379

Né le 11 juillet 1625 à La Rochefoucauld, placé d’abord chez un procureur à Angoulême, il en revint pour entrer comme valet de chambre chez l’abbé de La Rochefoucauld, frère de l’auteur des Maximes ; c’est là que ce dernier, qu’on appelait alors le prince de Marcillac, le trouva, et il l’emprunta à son frère pour en faire son maître d’hôtel dans la campagne de 1646. […] Gourville s’en alla donc avec des pouvoirs secrets ; il trouva moyen d’entrer dans la ville sous prétexte de retirer les meubles de M. de La Rochefoucauld : un reste de maître d’hôtel revenait à point pour cacher l’ambassadeur. […] Il pense bien que Bordeaux, ayant eu une fois un avant-goût de la paix et de la vendange, ne voudra rien remettre en question par égard pour Duretête, et, au pire, qu’il sera toujours temps de revenir à l’amnistie première. […] Quand il n’a plus rien à faire en un lieu, il s’ennuie et s’en revient, n’entendant pas se rouiller dans l’inaction. […] Cependant Gourville aspire à rentrer en France : il n’y revient d’abord qu’à la dérobée, sous le couvert du prince de Condé, et malgré Colbert, qui poursuit longtemps en lui un auxiliaire de Fouquet, et qui ne se rend au mérite de l’homme qu’à la dernière extrémité.

146. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — I. » pp. 224-245

« Il fallait, en cette occasion, s’écrie Richelieu, mépriser sa vie pour le salut de l’État ; mais Dieu ne fait pas cette grâce à tout le monde. » Il revient souvent sur cette idée, que le courage qui fait entreprendre les choses sensées et justes dans l’ordre public est une grâce spéciale de Dieu ; et ce n’est point chez lui une forme de langage : évidemment il le croit. […] Revenue à Paris avec le jeune roi, elle se voit obligée de partager l’autorité avec le prince de Condé ; l’hôtel de ce dernier est assiégé de la foule des courtisans et devient le vrai Louvre ; l’autre Louvre n’était plus qu’une solitude. […] Richelieu raconte qu’il était en visite chez un recteur de Sorbonne au moment où on vint lui apprendre la mort du maréchal : il revint au Louvre, après en avoir conféré un moment avec ses collègues : « Continuant mon chemin, dit-il, je rencontrai divers visages qui, m’ayant fait caresses deux heures auparavant, ne me reconnaissaient plus ; plusieurs aussi qui ne me firent point connaître de changer pour le changement de la fortune. » Il fut le seul de ce ministère que Luynes parut ménager d’abord et vouloir excepter de la disgrâce et de la vengeance commune. […] Je n’ai fait que répandre en quelque sorte mon sujet : c’est avec plus de précision que je devrai bientôt y revenir. […] Avenel, qui le rapporte à la date de 1621 environ : S’il plaît à la divine bonté, par l’intercession du bienheureux apôtre et bien-aimé saint Jean, me renvoyer ma santé et me délivrer dans huit jours d’un mal de tête extraordinaire qui me tourmente, (je promets) de fonder en ma maison de Richelieu une messe qui se célébrera tous les dimanches de l’année, et, pour cet effet, donnerai à un chapelain de revenu annuel trente-six livres pour les messes qui seront célébrées en action de grâces.

147. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

L’Empereur y comptait bien ; aussi ne lui fit-il aucun reproche quand il le revit à Charleroi, où le maréchal revint de sa personne vers minuit. […] Il crut qu’on lui demandait un suprême effort aux Quatre-Bras contre les Anglais, pour pouvoir ensuite, apparemment, se porter sur les derrières de l’autre ennemi, les Prussiens, et, au lieu de ralentir son action et de se borner, comme il le fit plus tard à la fin de la journée et après des prodiges de valeur perdue, à une solide défensive, il songea à ramasser ses forces pour porter un rude coup devant lui ; dans cette préoccupation unique et absolue, il envoya dire à d’Erlon, à ce même chef qu’un ordre de l’Empereur remis par Labédoyère dirigeait en ce moment vers le moulin de Bry, à dos de l’armée prussienne, de revenir en toute hâte aux Quatre-Bras : c’était un contresens. […] Car, avant de rétrograder vers Ney, et lorsqu’il était en marche sur Bry, vers cinq heures, aperçu de loin par Vandamme et mal reconnu par l’un des officiers de ce dernier général, il avait donné des inquiétudes aux nôtres à un moment décisif, et avait contribué à suspendre un mouvement victorieux jusqu’à ce qu’on fut revenu d’une première erreur ; on y perdit près de deux heures bien précieuses. […] Et qu’on ne trouve pas que c’est après bien desannées revenir et s’appesantir à l’excès sur des faits accomplis, user son attention à la recherche de causes dont l’effet s’est dès longtemps épuisé.

148. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Les chefs principaux disparaissent et meurent, quelques rares disciples survivent et essayent de réchauffer le culte en le resserrant ; la lettre grossit pour eux en même temps que l’esprit se retire ; ils reviennent soir et matin sur leurs traces, ils répètent à satiété les mêmes noms, ils ont des gloires domestiques, des grands hommes et des saints à leur usage ; ils sont de vrais dévots, ai-je dit. […] Victorin Fabre, battu dans le concours de 1812, et perdant la belle génisse, c’est-à-dire le prix de l’Académie, ne fit pas autrement que le vaincu de Virgile, et sortit de l’arène avec la rancune superbe du taureau blessé ; mais il ne revint pas avec la même allure, et à le voir reparaître, quelques années après, tout ralenti et tout empesé, on put lui appliquer ce vers assez imitatif d’un moderne : Taurus abit mœrens e regnis : ecce redit bos. […] Victorin Fabre avait un peu de cela, et l’accessit ou la mention honorable de 1812 lui pesait sur le cœur, et lui revenait à la bouche plus souvent qu’il n’était convenable à un homme aussi sérieux et aussi mûr. […] « Victorin Fabre, dit-il, revint à Paris vers la fin de 1821 ; mais combien tout y était changé !

149. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

On s’est amusé follement au carnaval de 1833, parce qu’il y avait longtemps qu’on ne s’était amusé, parce qu’il faut toujours en France en revenir aux plaisirs, parce qu’au milieu des soucis qui assombrissent et des vertus sérieuses que, dit-on (et je le crois), nous acquérons, nous sommes l’éternelle nation de la Fronde et de la Régence, le Paris de Rabelais, de Manon Lescaut, du Mariage de Figaro et du Directoire. […] L’Aquilon te soulève, ô ma jeune hirondelle, Et l’horizon lointain abaisse ses sommets ; Tu tardes ; craindrais-tu de paraître infidèle, Parce qu’aux mêmes lieux tu ne reviens jamais ? […] non, tu ne reviens jamais après l’absence ; Ailleurs, toujours ailleurs, en avant, c’est ta loi ; Ta loi, c’est d’obéir à qui, dès ta naissance, Te crie, à travers tout : Viens à moi, viens à moi ! […] Barehou ; nous tâcherons peut-être de revenir quelque jour sur l’auteur lui-même, en l’abordant cette fois comme le père d’Hébal, par le côté personnel et plus vivant, et en insistant sur les mérites de l’écrivain.

150. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

Il prend Bouchain à la fin de juin, et quitte l’armée, le 4 juillet, pour revenir à Saint-Germain. […] On dit sourdement que si son mari partait elle serait du voyage. » Au moment où le roi allait revenir de l’armée de Flandre et où la saison des eaux finissait pour madame de Montespan, on avait agité à la cour la question de savoir si madame de Montespan y reviendrait118. […] Je vous en parle moins, parce qu’il me revient que vous dites tout à l’abbé Testu. […] « Mais on serait également injuste envers madame de Maintenon, si on se plaisait à attribuer le chagrin de voir madame de Montespan revenir à la cour, à des motifs peu dignes d’elle, et à ces petites passions qu’on retrouve si souvent dans la société.

151. (1824) Notice sur la vie et les écrits de Chamfort pp. -

Letourneur, qui depuis s’est fait connaître par ses traductions d’auteurs anglais, partagea sa disgrâce ; ils parcoururent de compagnie quelques parties de la Normandie, et revinrent demander un asile au collège qui les avait renvoyés, et qui les reprit. […] Cet homme qui avait supporté la mauvaise fortune avec tant de courage, devint la proie d’une mélancolie profonde ; et l’indigence qui s’était un moment éloignée de lui, ne tarda pas à revenir l’assaillir ; mais il trouva dans les soins généreux de l’amitié un soulagement à ses maux. […] Étonné de vivre et résolu de mourir, il saisit un rasoir, essaie de se couper la gorge, y revient à plusieurs reprises, et se met les chairs en lambeaux ; l’impuissance de sa main ne change rien aux résolutions de son âme ; il se porte plusieurs coups vers le cœur, et commençant à défaillir, il tâche par un dernier effort de se couper les deux jarrets, et de s’ouvrir les veines. […] « Ce n’est point à la vie que je suis revenu, disait-il, c’est à mes amis. » Toujours plus indigné des horreurs dont il avait voulu s’affranchir par la mort, on l’entendit dire plus d’une fois : « Ce que je vois me donne à tout moment l’envie de me recommencer. » Obligé, par la perte presque totale de ses moyens d’existence et par les frais considérables de sa détention et de son traitement, à vivre de privations, il alla s’établir, avec ce qui lui restait de ses livres, dans une modeste chambre de la rue Chabanais, sans regretter pourtant le temps où il occupait un appartement au Palais-Bourbon, ou dans l’hôtel de M. de Vaudreuil.

152. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Michelet » pp. 259-274

Si Michelet revenait au monde, on l’appellerait « une vieille barbe », comme on l’a dit même de Victor Hugo ! […] L’utopiste révolutionnaire, qui, dans son Histoire de la Révolution, a voulu décapiter l’Histoire de ses chefs, c’est-à-dire lui couper ses têtes au profit des masses sans têtes ; revient à cette rêverie… Il y revient, en poète qu’il est, au commencement de son livre ; et c’est même beau de forme à nous faire illusion ! […] « La même pensée — ajoute-t-il — m’est revenue souvent dans mes promenades rêveuses à l’Arc de triomphe et aux Invalides.

153. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Nicolas Gogol »

Il voulait faire de son voyage à Jérusalem quelque chose comme un bouclier contre le ressentiment des popes ; car à Saint-Pétersbourg, dans cette société mi-partie de mode et de religiosité mystique, un homme qui revient de Jérusalem a un charme… Le charme n’agit point sur la mort : frais de voyage, de précaution, de coquetterie religieuse, tout fut inutile. Gogol revint pour mourir en Russie. […] Ce livre a été publié en deux parties et à deux époques, mais la première est la plus curieuse, car le satirique, dans cette première partie, l’est sans esprit de retour : il brûle son vaisseau ; et, dans la seconde, il fait l’effet d’arranger les planches d’une barquette pour s’en revenir. […] s’il n’était pas mort, il serait revenu.

154. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « II. Jean Reynaud »

… c’est l’ancienne redite d’une métempsychose progressive, à laquelle la Philosophie revient, — comme la vieillesse revient à l’enfance. […] Au moins, pour expliquer de cette façon le problème surnaturel de l’homme et de sa destinée, pour revenir en plein dix-neuvième siècle, — après les travaux philosophiques de Hegel et de Schelling, — à ce risible système de la métempsychose, digne tout au plus d’inspirer une chanson au marquis de Boufflers ou à Béranger qui l’a faite, fallait-il se sentir une force d’induction et de déduction irrésistibles ; fallait-il que la grandeur des facultés philosophiques sauvât la misère du point de vue que l’on ne craignait pas de relever. […] Ne comprenant jamais l’action divine que comme il comprend l’action humaine, l’auteur de Terre et Ciel se croit fondé à tirer une impertinente induction de nous à Dieu, et cet abus de raisonnement, qui revient dans son livre comme un tic de son intelligence, produit pour conséquence de ces énormités qui coupent court à toute discussion.

155. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Th. Ribot. La Philosophie de Schopenhauer » pp. 281-296

Mais les gens qui reviennent du Schopenhauer sont comme les gens qui reviennent des Grandes-Indes, et qui se mettent à les raconter… Or, comme on disait autrefois, parmi les romantiques, quand les classiques racontaient les choses les plus intéressantes de leurs tragédies, — par exemple, la mort d’Hippolyte ou les empoisonnements, de Locuste : — on aimerait mieux voir. […] II Revenons au plâtre de M.  […] C’est même là ce qui probablement décida son voyage en Italie, d’où il revint pour professer à l’Université de Berlin.

156. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Roger de Beauvoir. Colombes et Couleuvres. »

Non, elle ne doit plus en descendre… Quand la Pensée a pris de certains vols, elle ne peut plus revenir sur elle-même sans avoir l’air de tomber. […] Roger de Beauvoir, ce qui nous a toujours empêché de le confondre, malgré ses erreurs d’homme et de poète, avec les Gentils de notre temps, avec les Idolâtres de la Forme qui n’ont d’autre dieu que le fétiche qu’ils ont eux-mêmes sculpté, c’est le parfum des croyances premières et flétries, mais qu’on retrouve toujours à certaines places de ses écrits ; c’est ce christianisme ressouvenu qu’il tient peut-être de sa mère et qui revient de temps en temps et comme malgré lui, dans sa voix : D’où vient, qu’après avoir dormi sous les platanes, Après avoir sur l’herbe épanché les flacons, Puis être revenus, Ô brunes courtisanes, En rapportant chez nous les fleurs de vos balcons, La tristesse nous prend comme fait la duègne Qui de la jeune Inès s’en vient prendre la main, Et que nous n’arrivons jamais au lendemain Sans qu’aux pensers d’hier tout notre cœur ne saigne ? […] Mais revenons au recueil de M. 

157. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VIII »

D’autres avaient été jadis donnés à l’Angleterre par la France ; ils ont repris assez facilement une forme française ; ainsi trousse, substantif verbal de trousser (tortiare), est devenu en anglais truss et nous est revenu drosse (terme de marine). […] Ainsi la balle à la crosse nous est revenue sous le nom de cricket ; la paume, sous le nom de tennis ; le ballon 80, sous le nom de foot-ball ; le mail 81, sous le nom de crocket. […] Club, prononcé à l’anglaise, est en train de mourir ; l’instinct revient à cercle.

158. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre II. Comment les nations parcourent de nouveau la carrière qu’elles ont fournie, conformément à la nature éternelle des fiefs. Que l’ancien droit politique des romains se renouvela dans le droit féodal. (Retour de l’âge héroïque.) » pp. 362-370

La mancipation revint au moyen âge ; le vassal mettait ses mains entre celles du seigneur pour lui jurer foi et obéissance. […] Avec les stipulations revint ce qui dans l’ancienne jurisprudence romaine avait été appelé proprement cavissæ, par contraction caussæ ; au moyen âge, on tira de la même étymologie le mot cautelæ. […] Mais revenir à l’aristocratie, c’est ce qui est inconciliable avec la nature sociale de l’homme.

159. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Dumont le Romain  » pp. 115-116

On prendrait au premier coup d’œil, le monarque pour un Thesée qui revient victorieux du [Minotaure]. […] On trouverait cent traits de l’histoire grecque ou romaine auxquels cela reviendrait.

160. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

Revenons au drame humain. […] Reviens à toi ! […] J’avais le cœur lourd, mais le soleil parut plus beau que jamais et le courage me revint. […] Elle avoue son penchant pour Herman et sa joie secrète quand elle l’a vu revenir près d’elle à la fontaine. […] Il revint s’établir à son retour, à Weimar.

161. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre III »

Pour toute réponse, il tire de sa poche le bout de son drapeau blanc, avec une négligence de dandy, laissant passer son foulard : — « Et maintenant, monsieur Poirier, que vous savez qui je suis, n’y revenez plus, je vous prie. » Poirier s’incline, rengaine sa harangue et se promet d’y revenir à la prochaine occasion. […] Bien plus, à peine marié, il était revenu à son ancienne maîtresse, madame de Montgey, une Célimène de haut bord. […] — C’est une jolie musique que ce duo champêtre ; elle n’a qu’un défaut, celui d’être un peu fausse… Aussi bien nous y reviendrons. […] En effet, à force d’aller et de revenir, M. de Trélan finit par perdre quelque peu de son héroïsme. […] Faites donc goûter l’innocence du laitage et la douceur du miel au créole qui revient des Indes, calciné en dedans par le feu cuisant des épices.

162. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

Mais la vérité est que si on laisse de côté quelques cas très spéciaux sur lesquels nous reviendrons plus loin, la répétition d’un mot n’est pas risible par elle-même. […] Et nous entrevoyons, derrière ce mot qui revient automatiquement, un mécanisme à répétition monté par l’idée fixe. […] Faire beaucoup de chemin pour revenir, sans le savoir, au point de départ, c’est fournir un grand effort pour un résultat nul. […] Considérée dans le temps, elle est le progrès continu d’un être qui vieillit sans cesse : c’est dire qu’elle ne revient jamais en arrière, et ne se répète jamais. […] Revenons donc au comique des actions et des situations.

163. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

On revient à Angélique, l’amante de Roland. […] Le poète ici l’abandonne ; il revient à Roland dont il chante de nouveaux exploits de chevalier en faveur des dames. […] Ce n’est qu’au vingt-troisième chant que l’on revient à Roland, le véritable héros, mais le héros toujours oublié du poème. […] Mais Roger a disparu et ne revient pas. […] … et je reviendrais d’où je viens ! 

164. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le Roman de Renart. Histoire littéraire de la France, t. XXII. (Fin.) » pp. 308-324

Beaumanoir revient au château de Josselin, proclame l’entreprise et se met à choisir entre ses barons. […] Il revient donc vers son monde, et leur annonce que Bombourg voudrait changer le jour et qu’on s’en retournât sans frapper de grands coups ; il leur en demande leur avis. L’un d’eux, Charuel, change de couleur à cette idée, et déclare honni celui qui ne maintiendra pas la cause du duc légitime (Charles de Blois)e, et qui s’en ira sans donner de coups d’épée. — « Cette chose m’agrée, dit Beaumanoir ; allons à la bataille, ainsi qu’elle est jurée. » Il revient à Bombourg, qui lui représente encore que c’est folie à lui d’exposer ainsi à la mort la fleur de la duché ; car, une fois morts, on ne trouvera jamais à les remplacer. — « Gardez-vous de croire, répond Beaumanoir, que j’aie amené ici toute la chevalerie de Bretagne, car ni Laval, ni Rochefort, ni Rohan et bien d’autres n’y sont ; mais il est bien vrai que j’ai avec moi une part de cette chevalerie et la fleur des écuyers… » Bombourg reprend la bravade et l’invective. […] » À un certain moment et après ce premier assaut, tous, d’un commun accord, s’entendent pour aller chercher à boire, car chacun a dans sa bouteille du bon vin d’Anjou, et ils reviennent au combat sans retard. […] Quand les Argiens revinrent, ils trouvèrent le trophée debout, l’inscription encore fumante, et Othryades qui rendait l’âme à côté ; mais la victoire était acquise et consacrée : la religion défendait de renverser un trophée.

165. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Ce ne sont pas des pointes que fait Marianne ; elle prétend être simple, revenir à la simplicité à force d’art et d’adresse ; elle reste à coup sûr en chemin, mais son manège, quand il ne dure pas trop longtemps, ne déplaît pas : il laisse voir tant d’esprit ! […] Même lorsque le malheur revient surprendre Marianne au moment le plus inattendu, même lorsque celui qui a tout fait pour l’obtenir et qui a surmonté tous les obstacles, Valville, lui devient tout d’un coup infidèle, on n’est pas inquiet, on n’est pas déchiré comme on le devrait ; c’est qu’elle, toute la première, elle ne l’est pas. […] Mais le goût lui en reviendra : c’est pour se reposer qu’il s’écarte ; il reprend haleine, il court après une nouveauté, et j’en redeviendrai une pour lui plus piquante que jamais : il me reverra, pour ainsi dire, sous une figure qu’il ne connaît pas encore… Ce ne sera plus la même Marianne. […] Et ici ce n’est point pour sa sincérité précisément que la marquise entend se choquer, notez-le bien : « Mais quand on a le goût faux, lui dit-elle, c’est une triste qualité que d’être sincère. » Ergaste, à son tour, à qui elle se met à dire des vérités, se fâche, et il se rejette vers Araminte, de même que la marquise revient à Dorante, qu’elle veut forcer aussi à lui dire ses défauts : Dorante, en ayant l’air d’obéir, choisit si bien les deux ou trois défauts qu’il lui reproche, que cela devient une flatterie nouvelle et des plus insinuantes. […] Mais sauf quelques rares exceptions qu’offrirait ce talent fertile, l’amour, qui est le caractère dominant dans le théâtre de Marivaux, est bien tel chez lui qu’il s’est plu à le représenter dans une de ses plus agréables feuilles ; il ne le veut point constant, même lorsqu’il finira par être fidèle et par revenir là d’où il est parti : En fait d’amour, dit-il, ce sont des âmes d’enfants que les aima inconstantes.

166. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Revenue plus tard en France à titre de comtesse de Grammont, femme de la Cour des plus en vue, hautaine, brillante, galante même, mais respectée et considérée jusque dans ses dissipations, elle garda en vieillissant des restes de beauté, se fit agréer en tout temps de Louis XIV, et au point de donner par moments de l’ombrage à Mme de Maintenon. […] Eh bien, la comtesse de Grammont est une des correspondantes spirituelles de Fénelon, non pas précisément une de ses pénitentes ; pourtant il semble être celui qui contribua le plus à la ramener et à la fixer aux idées de religion, et ce ne fut que lorsque Fénelon fut retiré à Cambrai et dans l’exil que la comtesse revint à ses anciens errements de Port-Royal et à se déclarer ouvertement de ce côté : jusque-là, et tant que Fénelon avait été à sa portée, elle se contint dans une voie moyenne. […] Il faut vous rabaisser sans cesse : vous ne vous relèverez toujours que trop. » Il sait bien le point où il touche, et il y revient instamment : conserver le recueillement même en conversation : « Vous avez plus besoin qu’un autre de ce contrepoison. » Mais encore faut-il que ce silence qu’on observe et auquel on se condamne ne soit pas un silence sec et dédaigneux, car l’amour-propre refoulé a bien des détours : « Il faut au contraire que ce soit un silence de déférence à autrui. » Ainsi Fénelon sur tous les tons et avec toutes les adresses essaie d’insinuer la charité pour le prochain à la sœur d’Hamilton3. […] Vous qui êtes d’un goût si exquis et si dédaigneux, vous êtes réduite à être dégoûtée de vous-même… Chaque fois qu’il revient sur ce point pénible, Fénelon a soin de montrer combien l’épreuve est bien choisie, combien l’espèce de mal est appropriée à cette fine et fière nature, la plus faite pour en ressentir l’affront. […] En général, on le voit, la simplicité délicate de Fénelon n’est pas cette simplicité d’où l’on part, c’est celle à laquelle on revient à force d’esprit, à force d’art et de goût.

167. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Ce qui l’occupait d’abord, comme il est naturel, c’était ce qu’il y avait de plus récent et le désastre de la veille, c’était Waterloo et cette dernière campagne ; il en était encore possédé et obsédé ; il ne revenait pas, lui, l’homme du calcul, d’une telle série de contretemps et de malencontres, et il apostrophait les absents. Il n’était pas de ces génies qui acceptent la force des choses comme solution commode ; il n’était pas du tout persuadé qu’une bataille de plus ou de moins, gagnée ou perdue deux mois auparavant, un ennemi de plus ou de moins, repoussé, tout cela revenait à peu près au même, que sa situation en 1815 était de prime abord comme désespérée, que les plus heureux efforts et la plus belle entrée de jeu n’auraient pu en réparer le vice radical ; que Waterloo même gagné n’eût été qu’un répit. […] Aussi, quand Napoléon mort, il revient en Europe et qu’il s’y voit en tous lieux l’objet d’une répulsion instinctive, universelle, ne saurais-je admettre qu’on dise de lui d’un ton de compassion, « l’infortuné Hudson Lowe ». […] Napoléon parlait de tout et avec une impartialité, une douceur qui montraient à quel point il était détaché et revenu de l’action. […] Et si l’on en vient au style tant discuté, tant contesté, qu’on me permette d’y revenir encore moi-même dans un dernier mot.

168. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

Il ne put y consentir ; il recourut au prince Napoléon, notre président et patron naturel pour l’Exposition de Londres, qui fit revenir sur la décision première. […] Ce serait moins que jamais aujourd’hui le moyen de se débarrasser des difficultés, puisqu’elles ont surgi et qu’elles ont éclaté ; de toutes parts puisque des attaques, des négations philosophiques radicales ont eu lieu, telles que celle de Strauss en première ligne ; la meilleure manière pour se retracer l’image de la personne réelle et vivante de celui dont la venue a changé le monde est d’en revenir avec bonne foi et réflexion aux récits originaux qui nous ont conservé la suite de ses actes et de ses paroles. […] Et pour revenir à notre objet d’aujourd’hui, à la lecture d’un des Évangiles, je rappellerai l’excellente remarque de Pascal jugeant des paroles et discours de Jésus : « Jésus-Christ a dit les choses grandes si simplement qu’il semble qu’il ne les a pas pensées ; et si nettement néanmoins, qu’on voit bien ce qu’il en pensait. […] Quant à revenir aux Catacombes, ce serait prendre un grand parti et certainement se rapprocher de Jésus ; mais l’idée d’un tel art est encore à l’état archéologique, et l’Imprimerie Impériale, dont l’objet essentiel est la typographie, et pour qui l’ornementation n’est que l’accessoire, ne pouvait ni ne devait, quand elle en aurait eu le temps, hasarder une telle nouveauté. On ne revient pas à la naïveté comme on le veut ; même quand on se borne à la calquer le plus exactement possible, on a l’air de la singer.

169. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Cette entrée dans Carthage par l’aqueduc n’est apparemment qu’une occasion détournée de nous mieux décrire cet aqueduc important, lequel reviendra encore plus tard. […] Mais elle revient à elle ; elle frappe, et appelle ses suivantes, ses serviteurs, en criant au secours ! […] lui dirons-nous, qu’il déserte et qu’il y revienne. […] Carthage effrayée s’adresse, pour la sauver dans le péril, à l’expérience d’Hamilcar qui revient après une longue absence. […] Grâce à Salammbô qui s’en revient avec sa conquête, Carthage a donc recouvré le voile sacré et a senti relever son espérance.

170. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

Je laisserai ce mot pour vous être envoyé jeudi ; car je ne serai revenu que le soir de Port-Royal, où la famille a souhaité que j’accompagnasse le fils ainé de mon cher ami. […] Vuillart revient sur le sujet qui lui est cher et qui nous intéresse ; il ajoute de dernières particularités : « J’ai de petits paralipomènes à vous faire, monsieur, sur le sujet de M.  […] Il était assez naturel, en effet, que Racine sensible, tendre, ouvert aux passions, timide en même temps et peu courageux, s’effrayât en vieillissant des touchantes faiblesses auxquelles il s’était livré, qu’il revînt en idée à l’innocence de ses premiers jours, qu’il se replongeât tant qu’il le pouvait en arrière, se reprochât ses fautes passées en se les exagérant, et noyât tout son amour-propre dans ses larmes. […] Chez Boileau il n’y avait pas lieu à un si complet retour : le vieil homme, de tout temps moins tendre, n’avait pas à revenir de si loin ni à s’anéantir absolument dans le chrétien ; le poëte ne croyait pas avoir à se repentir ni à se dédire ; il gardait le plus qu’il pouvait de sa verdeur, et se passait encore bien des boutades mordantes que sa probité et sa raison ne lui reprochaient pas. […] Ce terme de grand revient naturellement sons la plume des auteurs originaux de Port-Royal quand ils parlent de lui.

171. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

Aujourd’hui vingt-huit autres années se sont écoulées, et tout à coup il arrive que dans la génération nouvelle on se ressouvient de Charles Loyson, on revient à lui jusqu’au point de croire qu’une édition choisie de ses Poésies et de sa prose n’est pas un contre-temps ni un hors-d’œuvre à l’heure présente. […] De même qu’une conférence sur Millevoye serait privée de son plus gracieux ornement si l’on n’y récitait la Chute des feuilles, de même un article sur Loyson serait sans sa couronne si l’on n’y mettait cette élégie du Retour à la vie ; il y répond à des amis qui, le voyant revenu d’une terrible crise, lui conseillaient d’aller respirer l’air natal :    Quelle faveur inespérée    M’a rouvert les portes du jour ? […] Le Retour à la vie de Loyson peut se comparer avec quelqu’une des pièces où Lamartine, — le Lamartine des Méditations, — après une première langueur, revient aussi à la vie et renaît à l’espérance ; avec la pièce intitulée Consolation, par exemple. […] Tu dis : le Temps se hâte, ou revient sur ses pas. […] Claveau, un de nos meilleurs critiques, discutant sur le degré de croyance ou d’incrédulité de l’auteur de Childe Harold, a montré qu’il y a bien des fluctuations chez lui et du va-et-vient. « Après tant d’épreuves, dit-il, il en était revenu à son point de départ, ou plutôt il ne s’en était jamais éloigné ; il n’avait pu dépasser, dans le blasphème et la révolte, ce qu’on peut nommer l’étape des poètes.

172. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Nous reviendrons sur cette fin. […] Il s’en débarrasse naturellement, dès qu’un sentiment vrai et propice à son talent revient le saisir : témoin la fin de la Messénienne sur le général Foy. […] Delavigne d’y revenir à son gré ? […] enfin faut-il oser repasser par le pis en vue de revenir au mieux ? […] La popularité est un thème qui revient là un peu formellement, et le vieux sir Gilbert, resté seul en scène avec son fils, achève de le clore.

173. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

N’a-t-il bu que de l’eau, quand il revient chez lui le soir, amenant avec soi des femmes d’une vertu délabrée ; et qu’il maltraite celle pour qui je suis, de paroles et de coups ? […] quand ils se mettent comme cela à la raison, on entre en pourparlers ; on écoute, on négocie ; et enfin, après un bon contrat bien et dûment homologué, vous revenez sur l’eau avec sept ou huit cent mille livres d’argent comptant, et tous vos meilleurs effets divertis. […] Dites-lui qu’il revienne une autre fois et que je suis en compagnie. […] Allez, qu’il revienne demain. […] Les maris n’ont d’autre soin que de faire payer les revenus et réparer les maisons.

174. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XI. Le plus brave des trois. »

Au soir, l’amant, qui se nommait Kéléké, ne la voyant pas revenir, pria Missa, son ami, d’aller au devant d’elle. Comme Missa revenait avec la jeune femme, celle-ci qui marchait en avant de lui aperçut un morhoméné ouâra158 (c’est-à-dire une panthère mangeuse d’hommes)159 qui s’avançait à leur rencontre.

175. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — III » pp. 81-102

Elle reviendra, mais j’ai vu clairement que si je n’emportais pas le poste de M. le prince de Bade, on me regarderait comme un fou. […] Cependant l’éclat et le bruit de cette bataille d’Hochstett, livrée et gagnée en quelque sorte malgré l’électeur, ne faisaient, militairement, que procurer un répit ; il fallait en revenir toujours à l’idée d’un secours prochain et indispensable, ou tout au moins d’une diversion. […] Lui aussi, tout le prouve, il eût pu être à son heure un utile pacificateur dans nos Vendées : Il insistait auprès de Chamillart et du roi pour être employé d’une manière conforme à ses talents et à son ardeur : « Je vous avoue, écrivait-il au ministre, que l’amour-propre voudrait quelquefois qu’on ne trouvât pas tous les hommes égaux. » Faute de mieux, dans cet intervalle de campagne, il imagina un moyen de signaler son dévouement et sa reconnaissance, sous prétexte qu’il venait d’être nommé chevalier de l’Ordre : « En réfléchissant, dit-il, à ces bontés du roi et à l’état du royaume, calculant aussi mes revenus et comptant avec moi-même, je crus pouvoir faire une proposition dont l’acceptation m’aurait comblé de joie. » En conséquence, il envoie l’état de sa fortune à Chamillart, et le supplie d’obtenir du roi qu’il veuille accepter en don la somme totale de ses revenus personnels et pensions, le tout montant à soixante-et-onze mille livres par an, et cela jusqu’à la paix générale, se devant contenter, pour ses dépenses, de son traitement annuel comme commandant d’armée. […] Tout l’honneur de l’avoir conjuré revient à Villars, à sa fermeté, à son choix d’un bon poste, à sa sagesse à s’y maintenir, à l’esprit excellent dont il avait animé ses troupes, et qui fit perdre à l’adversaire l’idée qu’on les pût entamer. « Mes affaires, par le parti que vous avez obligé le duc de Marlborough de prendre, lui écrivait Louis XIV satisfait, sont au meilleur état que je les pouvais désirer ; il ne faut songer qu’à les maintenir jusqu’à la fin de la campagne ; si elle était heureuse, je pourrais disposer les choses de manière à la finir par quelque entreprise considérable. » Marlborough, en s’éloignant, crut devoir s’excuser auprès de Villars même (une bien haute marque d’estime) de n’avoir pas plus fait ; il lui fit dire, par un trompette français qui s’en revenait au camp, qu’il le priait de croire que ce n’était pas sa faute s’il ne l’avait pas attaqué ; qu’il se retirait plein de douleur de n’avoir pu se mesurer avec lui, et que c’était le prince de Bade qui lui avait manqué de parole.

176. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

Il vint dès son bas âge à Paris, j’allais dire il y revint, tant il en est. […] lui répond Ferdinand, ils ont travaillé pour leur temps ; s’ils revenaient au monde aujourd’hui, ils feraient probablement l’inverse de ce qu’ils ont fait ; ils sont morts et enterrés comme Malbrouk et bien d’autres qui les valent, et dont il n’est plus question ; qu’ils dorment comme ils nous font dormir ; ce sont des grands hommes, je ne m’y oppose pas. […] Et à ce propos on remarquera combien l’idée du Diable revient souvent dans l’imagination du poète, comme pour piquer la somnolence heureuse et stimuler l’ennui. […] L’enfant revient ; surpris, il voit la plante grasse Sur les débris du pot brandir ses verts poignards. […] Sans compter que le public français (j’y reviendrai) ne peut guère porter qu’un poète nouveau à la fois, notez encore que c’est presque toujours par des côtés accessoires, étrangers à la poésie pure, qu’il l’adopte et qu’il l’épouse.

177. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Elle était connue, assez mal connue, il est vrai, très-mal famée, et elle semblait condamnée sans appel ; il a fallu un certain effort de curiosité et une sorte de courage de goût pour revenir jusqu’à elle et y pénétrer. […] C’était par le goût plus que par la science qu’on y était revenu, et longtemps ç’a été le goût, la fantaisie même plus que la méthode, qui a présidé à ces résurrections ou réhabilitations. […] Gandar, l’un des premiers, dans sa thèse sur Ronsard considère comme imitateur d’Homère et de Pindare (1854), est revenu soumettre à un examen rigoureux et peser dans la balance les résultats en question, insistant sur la partie grave des œuvres de son auteur, il a fait, de plus en plus, pencher le plateau en faveur du vieux poète. […] Marty-Laveaux, va se dresser le compte régulier, le bilan de ce qu’ils ont apporté de nouveau, de ce qu’ils ont aspiré vainement ou réussi à introduire ; de ce qui leur revient à juste titre dans la syntaxe et le vocabulaire de notre langue poétique et dans notre prosodie. […] Aussi, Du Bellay, de même que tes ancêtres se sont entendus appeler patriotes pour avoir défendu la terre de la patrie, de même, toi qui plaides pour la langue paternelle, tu auras à jamais un renom aussi comme bon patriote. » Le mot de patrie revient souvent.

178. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

Elle en revenait toujours à son idée, que la passion est tout, et le reste insignifiant ou très-secondaire ; ou bien elle accordait que les distinctions de M. de Murçay étaient parfaites, qu’il y avait nécessité pour elle de se rendre plus raisonnable et un peu moins tendre, et qu’elle tâcherait l’un et l’autre ; ce qu’il n’entendait pas du tout ainsi. […] Elle le croyait un moment ; mais le lendemain elle revenait à la charge, et disait : « Hier, dans mon amour de vingt ans, je croyais qu’il n’y a rien d’impossible, de la part d’un homme qui aime, pour l’objet aimé. […] L’automne s’achevant, il revint à Paris, et il attendait, pour se présenter chez Mme de Noyon, qu’il avait quittée en froid, un mot, un signe de Mme de Pontivy, elle-même de retour. […] Je partirai, j’irai en de lointains voyages, je reviendrai dans cette vieille terre pleine de vous, où je vous ai reçue ; je ne vous reverrai jamais ! […] Elle n’eut pas à s’efforcer beaucoup ni à raffiner les ruses ; la flamme revint naturelle, où l’ardeur n’avait pas cessé.

179. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Mme de Caylus resta à Versailles jusqu’à la mort de Louis XIV (1715) ; mise de côté alors comme une personne de la vieille Cour, elle revint demeurer à Paris, dans une petite maison qui faisait partie des jardins du Luxembourg. […] Mais laissons causer Mme de Caylus dans ce récit inimitable : Le jubilé fini, gagné ou non gagné, il fut question de savoir si Mme de Montespan reviendrait à la Cour : « Pourquoi non ? […] Car, pour revenir encore une fois à la conclusion de Quintilien interprété à la moderne par Gédoyn, facilité, discrétion, finesse, ne pas trop appuyer, ne rien pousser à bout, ce sont là certes des conditions de l’urbanité, mais tout cela n’est rien sans un certain esprit de joie et de bonté qui anime l’ensemble : « c’est proprement un charme », a dit La Fontaine. […] Une fois revenue à Versailles, on la voit, dans ses lettres (ou plutôt ses courts billets écrits d’une chambre à l’autre), déployer tout ce qu’elle a de grâce et de gentillesse pour fléchir sa tante, pour l’amuser et l’égayer. […] Ce terme de Néron revient souvent sous sa plume pour exprimer avec enjouement cette habitude négative de Mme de Maintenon, inexorable dans les privations qu’elle imposait aux autres comme à elle-même8.

180. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Lebrun dès 1828 ; il était alors âgé de dix-huit ans : c’était au moment où Charles X revenait d’un voyage que lui avait fait faire M. de Martignac. […] Deux ans après, le souvenir de cette douce hospitalité lui revenait à la mémoire, et il envoyait pour étrennes (janvier 1836) cette délicieuse Romance à celle à qui il avait dû, pour un jour du moins, ses pures et innocentes Charmettes : La fermière. […] Il eut finalement un duel, et dut s’en revenir bientôt à Paris, désappointé de nouveau et irrité comme après un échec. […] On nous assure pourtant qu’il était tout à fait revenu, vers la fin, de l’illusion que lui avaient faite certains poètes ou rimeurs matériels et mécaniques, et plutôt robustes que réellement puissants. […] La mélancolie rustique, l’insouciance et la bonhomie pas trop accusées, cette façon de chanter comme si l’on s’en revenait au milieu des champs, il sait tout cela sans feinte, et mieux qu’un chanteur de profession.

181. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Correspondance entre Mirabeau et le comte de La Marck (1789-1791), recueillie, mise en ordre et publiée par M. Ad. de Bacourt, ancien ambassadeur. » pp. 97-120

Mirabeau, après ses premiers éclats de tribune, revenait à la charge du côté de M. de La Marck. […] Puis, tout à coup, sa perspicacité d’homme d’État revenait à la traverse pour l’avertir qu’il poussait lui-même à l’abîme ; et redescendu du théâtre et du rôle : « Mais à quoi donc pensent ces gens-là ? […] Comme il ne souffre pas qu’on revienne d’une seule ligne en arrière sur la révolution accomplie ! […] Sans cesse il revient sur cette idée d’un plan et d’une suite : (17 août 1790.) […] Je n’excepte pas même une contre-révolution armée ; le royaume serait reconquis, qu’il faudrait encore que le vainqueur composât avec l’opinion publique, qu’il s’assurât de la bienveillance du peuple, qu’il consolidât la destruction des abus, qu’il admît le peuple à la confection de la loi, qu’il lui laissât choisir ses administrateurs ; c’est-à-dire que, même après une guerre civile, il faudrait encore en revenir au plan qu’il est possible d’exécuter sans secousse.

182. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame Necker. » pp. 240-263

Voltaire, en ce temps-là, revenu de Prusse, et avant de se fixer près de Genève, essayait de cette vie nouvelle à Lausanne, où il passa surtout les hivers de 1756, 1757 et 1758 ; il y trouvait avec étonnement un goût pour l’esprit qu’il contribuait à développer encore, mais qu’il n’avait pas eu à créer : On croit chez les badauds de Paris, écrivait-il, que toute la Suisse est un pays sauvage ; on serait bien étonné si l’on voyait jouer Zaïre à Lausanne mieux qu’on ne la joue à Paris : on serait plus surpris encore de voir deux cents spectateurs aussi bons juges qu’il y en ait en Europe… J’ai fait couler des larmes de tous les yeux suisses. […] Cette expression de la chaîne des idées aussi lui est familière : on dirait qu’elle en sent constamment le poids. — À tout moment reviennent sous sa plume des comparaisons qui, loin d’expliquer la pensée déjà obscure et énigmatique par elle-même, ont pour effet de l’obscurcir davantage ; le peu de rayon qu’on y entrevoyait s’évanouit. […] Elle revient alors sur le passé, elle aime à y revivre. […] C’était revenir à Philémon et Baucis, mais y revenir de la seule manière dont on le pouvait alors, à travers une certaine déclamation. […] Un moraliste physiologiste a dit : « De même que, lorsqu’on s’est trop appliqué le soir à un travail, on a mille idées pénibles, tiraillées, fatigantes, qui reviennent avant le sommeil ; mais, au matin, tout s’éclaircit, et l’on se réveille avec de nouvelles idées faciles et vives, qui sont dues pourtant à cet effort du soir précédent : de même, d’une génération à l’autre, les formes d’idées qui, chez Mme Necker, sont à l’état de préparation laborieuse et compliquée, et presque de cauchemar, se réveillent chez Mme de Staël, jeunes, brillantes et légères. »

183. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Ces discussions pourtant m’ont reporté en idée vers un homme dont le nom revient sans cesse et se trouve consacré comme exprimant le type du maître d’autrefois, le bon Rollin. […] Maintenant il est difficile d’y revenir. […] Il revient dans une autre lettre encore sur ce rapprochement singulier. […] Aujourd’hui, s’il faut en toucher un mot, d’autres générations sont venues et ont pris rang, animées elles-mêmes d’une inspiration toute différente, mais qui n’ont pas fait pour cela un seul pas de retour vers le passé ; car le passé, pour la masse des générations humaines, ne revient jamais. […] Dans tout ceci, en resongeant au bon Rollin dont le nom revient encore par un reste d’habitude, je crois qu’il est impossible d’en faire autre chose qu’un honorable, un pieux et lointain regret.

184. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Il revint en France dans les premiers mois de 1793. […] triste et sombre vue mécanique à laquelle il reviendra plus d’une fois, qui sera sa doctrine politique finale, et qui peut servir à nous faire mesurer le chemin qu’avait parcouru en deux années l’auteur des Ruines. […] Volney, que ce délit des Ruines avait déjà fait noter en Corse comme entaché d’hérésie, répondit à Priestley par une lettre écrite de ce ton modéré et sage qui nous revient assez naturellement dès que nous sommes accusés. […] De ces tracasseries de plus d’un genre qui menaçaient de devenir une persécution, Volney conclut que les États-Unis n’étaient pas un lieu privilégié de paix, et il s’en revint en France en 1798. […] J’ai un peu été de cette étoffe, jadis ; j’étais un homme précis : j’en suis bien revenu.

185. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres mises en ordre par M. J. Sabbatier. (Tome II, 1844.) » pp. 144-153

Victorin Fabre ne put revenir de cet échec ; il n’y crut pas. […] Lorsqu’il revint en 1822, le monde littéraire avait changé de face ; en philosophie, en critique, en poésie, tout s’essayait au renouvellement. […] Les anciens expliquaient aux plus jeunes de quoi il s’agissait au juste : était-ce un grand écrivain, décidément, qui nous revenait de Jaujac ?

186. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — II »

Après ces flots de larmes et ce débordement de plaintes pieuses, le rythme change encore et revient à son premier mode ; le poète se relève, il reprend confiance, et s’abîme dans une louange éblouissante du Seigneur. […] C’est par une promenade dans les bois en automne que commencent les deux poètes, et que la pensée des morts leur revient également. […] Espérons qu’il ne le dira pas toujours, et que l’âge lui permettra de plus en plus de revenir sur ce passé où tant de flammes couvent encore sous la cendre.

187. (1879) Balzac, sa méthode de travail

On a conté plaisamment que tout caractère imprimé excitant la verve du conteur, s’il s’agissait dans un atelier de typographes de composer du Balzac, une feuille d’un ouvrage quelconque en train, fût-ce la Bible, était envoyée au romancier et que le résultat définitif était le même ; l’une ou l’autre de ces épreuves revenait avec une égale quantité de corrections. […] En voyant revenir les épreuves si diaboliquement chargées de corrections, plus d’un compositeur d’imprimerie dut regretter le temps où ses devanciers portaient l’épée : avec plus de raison que Vatel, un typographe eût pu se transpercer de part en part en jetant un coup d’œil inquiet sur des hiéroglyphes qui n’appartenaient pas plus au mantchou qu’au français. […] Se débattant plus avec la forme qu’avec l’idée, il revenait constamment à la charge contre son adversaire le style, se mesurant avec lui d’estoc et de taille pour le vaincre2.

188. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Louandre »

Et, en effet, nous avons beau être du xixe  siècle, les questions qui ont, à toute époque, chez tous les peuples et à tous les niveaux de civilisation, passionné l’humanité avec cette furie tenace, ne finissent pas si net qu’il n’en revienne toujours quelque chose… C’est là « la spirale » du grand Gœthe. […] Le mystère et l’énigme revenaient… Que disons-nous ? […] ils ne revenaient pas ; ils n’avaient point bougé.

189. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Comte de Gramont »

en y laissant des portions de nous-mêmes qui sont plus que la vie, et qui ne reviendront pas plus qu’elle… Eh bien, c’est le mal de ce temps, au fond de son âme, à lui, qu’on retrouve dans le livre de Gramont ! […] De tous les deuils de la pensée du poète, c’est celui dont l’expression revient le plus dans ses poésies, et il est si beau, et il y jette un éclat d’idéal si sévère, qu’on n’en voudrait pas d’autre à côté. […] Enivré qu’il ait été par la Renaissance et cette poésie moderne qui s’efforce depuis plus de vingt ans d’en réverbérer les rayons, le noble auteur des Chants du Passé (nous l’avons déjà dit) revient, vers la fin de son recueil, à cette simplicité mâle que la vérité chrétienne, embrassée définitivement par notre âme, communique non seulement aux œuvres du cœur, mais aux productions de l’esprit.

190. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

Mais cette harmonie, qui sentait trop Aristophane, et que Jean-Baptiste Rousseau n’avait pas réhabilitée, ne revenait guère à Fontanes, non plus que l’étang bourbeux. […] Pour revenir au Mémorial, l’ensemble de la rédaction de Fontanes dans cette feuille nous montre un esprit dès lors aussi mûr en tout que distingué, qui ne reviendra plus sur ses impressions, et qui, dans la science de la vie, est maître de ses résultats. […] Suivez vos grands projets, et ne revenez surtout à Paris que pour y recevoir des fêtes et des applaudissements. […] Le poëte se suppose dans la situation de Jupiter, qui, après maint volage égarement, revient toujours à Junon. […] » Poëte du Jour des Morts et de la Chartreuse, tout son cœur revenait dans ce cri suprême.

191. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Et ce qu’ils ont ajouté d’exact, ils ont pu le devoir, non à une vue personnelle des lieux, mais aux récits de quelque pèlerin revenu de Cornpostelle. […] Le problème qu’il y sentait obscurément formulé revient souvent dans son œuvre et se posait au fond de sa propre nature, à la fois très sensuelle et très idéaliste. […] Des mortels y sont allés, et l’on en a vu revenir vivants quelques-uns qui y sont retournés pour toujours. […] Cet article, fort intéressant en effet, résout et soulève plusieurs questions dont je dirai un mot, puisque je suis revenu à m’occuper de ce sujet. […] Et depuis il n’est plus revenu dans ce pays.

192. (1886) Le roman russe pp. -351

Il faut revenir aux traditions nationales et rompre avec les idées importées d’Occident. […] Le nom de Napoléon reviendra souvent dans les vers irrités de Pouchkine. […] Il revient, guère plus sage, mais avec un talent en pleine maturité à vingt-cinq ans. […] La génération de 1840 reçut ce baptême d’eau trouble, elle en revint transformée. […] Mon ami, revenez aux travaux littéraires !

193. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Restout le fils » pp. 284-285

Monsieur Restout, que dirait votre père s’il revenait au monde et qu’il vît cela ! […] Monsieur Restout, je reviens à vous.

194. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

Il se tenait encore tout au fond, debout sur sa paille, de peur de se trahir en se précipitant trop vite vers moi ; mais, quand j’eus ouvert sa grille d’une main toute tremblante, il bondit comme un bélier du fond de l’ombre, il me prit dans ses bras et m’étouffa contre son cœur, où je me sentais mourir et où je restai longtemps sans que lui ni moi nous pussions proférer une seule parole ; lui baisait mes cheveux, moi ses mains, tels que nous nous serrions, vous et moi, ma tante, quand, après une longue absence dans les bois après mes chèvres, je revenais le soir plus tard que vous ne m’attendiez sous le châtaignier. […] Il s’en alla demander asile à un couvent voisin de son ordre, promettant à la femme du bargello de revenir tous les matins dire la messe, et tous les soirs donner la bénédiction au jeune criminel. […] Mettez-vous à notre place, pauvres vieux que nous étions, l’un privé de la lumière, l’autre de son mari, tous les deux de leurs chers enfants, leur unique soutien, lui allant chercher sa fille qui ne voudrait peut-être pas revenir tant elle aimait son cousin, moi allant recevoir mon fils pour lui faire le dernier adieu au pied d’un échafaud ou tout au plus à la porte d’un bagne perpétuel, la plus grande grâce qu’il pût espérer, si monseigneur le duc revenait avant le jour fatal, et tous n’ayant pour appui dans une ville inconnue qu’un vieillard chancelant avec sa besace et son bâton, demandant pour eux l’aumône aux portes. […] Nous ne répondîmes que par des larmes, et quand Fior d’Aliza revenait à passer, elles redoublaient tellement dans le cachot que nous en étions comme étouffés pendant sa promenade au fond du cloître. […] — Quand il sera libre, continua la voix, tu revêtiras le froc et le capuchon des pénitents noirs qu’il aura laissés tomber de la fenêtre en s’enfuyant, et tu reviendras dans son cachot, avant le jour, prendre sa place, pour que les sbires te mènent au supplice, en croyant que c’est lui qu’ils vont fusiller pour venger le capitaine ; tu marcheras en silence devant eux, suivie des pénitents noirs ou blancs de toute la ville qui prieront pour toi ; et quand tu seras arrivée au lieu du supplice, tu mourras en prononçant son nom, heureuse de mourir pour qu’il vive !

195. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

« Voilà ceux dont les noms me reviennent », — dit le Messager en terminant son appel funèbre, — « mais je ne t’ai dit que très peu de nos pertes qui sont innombrables. » Alors Atossa lui demande de raconter l’action plus au long. […] Ceux qui survécurent se sauvèrent à grand’peine à travers la Thrace ; mais bien peu sont revenus dans les foyers de la patrie. […] Elles ne se prosterneront plus sous la majesté souveraine ; la puissance royale a péri. — La langue des hommes ne sera plus enchaînée, le peuple détaché du lion pourra parler librement ; le joug de la force est brisé. » La reine revient, chargée des libations funéraires. […] Mais vous voilà, vous aussi, autour de cette tombe, pleurant et chantant les incantations qui font revenir les Mânes, et m’appelant avec des cris lugubres. Il n’est pas facile aux morts de revenir à la lumière, pour bien des causes, et surtout parce que les dieux d’en bas sont plus prompts à prendre qu’à rendre.

196. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Le goût régnant portait les gens du côté du bel esprit, de l’éloquence, des règles classiques, de l’imitation latine ; il y cède vingt fois, mais toujours il revient à lui-même. […] Il essayait des dizains, des ballades, des rondeaux, des virelais ; il revenait à la source gauloise, au style naïf, au petit vers leste et campagnard, qui aime les mots francs, qui dit en courant toutes les choses vraies. […] On ne trouve pas de crime en des idées qui reviennent si fréquemment et d’elles-mêmes. […] La Fontaine n’a pas de visions complètes et durables : il n’est pas oppressé d’images absorbantes ; il entrevoit, il quitte, il vole, il revient, il est un moment en vingt lieux et en vingt sentiments ; pendant que vous achevez une de ses esquisses, il a fait le tour du monde et il est prêt à recommencer.

197. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Une soirée chez Paul Verlaine » pp. 18-33

Il s’était créé un style à part qui devait lui aliéner le commun des lecteurs, une langue qui s’adressait à tous les sens, pleine d’onomatopées, d’artifices typographiques, où les adverbes, des majuscules imprévues, se mettaient à chevaucher follement la phrase, où des incidentes répétées revenaient avec l’obsession du leitmotiv ; une langue musicale et orchestrée. […] Un idiot qui va, revient et glousse, Content, car les enfants sont à l’école ; À sa fenêtre une vieille qui tousse. Elle fait des gestes, à moitié folle, À l’idiot qui va, revient et glousse. […] Sans la moindre hésitation, il tira de sa paillasse les précieux papiers et les tendit d’un geste simple à l’huissier qui les empocha (c’était moins qu’il n’était dû) et sortit, tandis que le logeur, qui assistait à la scène, n’en revenait pas de sa surprise.

198. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

On se jette en avant, on s’engage, on est en peine ensuite pour revenir. […] Tel qui parle contre le raffinement est lui-même légèrement raffiné, ou, s’il revient au simple, il n’y revient qu’à force d’esprit, de dextérité et d’intelligence. […] Le démon de Stagyre, ou, ce qui revient au même, le mal de René, c’est le dégoût de la vie, l’inaction et l’abus du rêve, un sentiment orgueilleux d’isolement, de se croire méconnu, de mépriser le monde et les voies tracées, de les juger indignes de soi, de s’estimer le plus désolé des hommes, et à la fois d’aimer sa tristesse ; le dernier terme de ce mal serait le suicide.

199. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Conclusion »

Conclusion Pour résumer ce qui précède, nous laisserons d’abord de côté la terminologie et même la doctrine de Kant, sur lesquelles nous reviendrons plus loin, et nous nous placerons au point de vue du sens commun. […] On se demande en effet si l’acte pouvait ou ne pouvait pas être prévu, étant donné l’ensemble de ses conditions ; et soit qu’on l’affirme, soit qu’on le nie, on admet que cet ensemble de conditions pouvait se concevoir comme donné à l’avance : ce qui revient, ainsi que nous l’avons montré, à traiter la durée comme une chose homogène et les intensités comme des grandeurs. […] Ainsi la distinction même qu’il établit entre l’espace et le temps revient, au fond, à confondre le temps avec l’espace, et la représentation symbolique du moi avec le moi lui-même. […] Mais il y aurait, selon nous, un troisième parti à prendre : ce serait de nous reporter par la pensée à ces moments de notre existence où nous avons opté pour quelque décision grave, moments uniques dans leur genre, et qui ne se reproduiront pas plus que ne reviennent, pour un peuple, les phases disparues de son histoire.

200. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

Délivrées par nous, elles ont vaincu la mort et reviennent vivre avec nous. […] Et nous revenons ainsi aux passages que je citais trop tôt tout à l’heure et que cette erreur de plan me force à vous relire. […] Peut-être est-il aussi inexact de croire qu’elles s’échappent ou reviennent. […] Je reviens à l’article d’Ortega y Gasset. […] Son grief revenait indéfiniment, comme une vague d’ailleurs amicale, battre ma position.

201. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Préface » pp. 1-3

J’étais revenu à Paris au mois de septembre 1849, quittant la Belgique et Liège, où j’étais allé être professeur un ana. […] Il revient, dans l’introduction de ce livre, sur les accusations de détournement de fonds publics qui le conduisirent, quelques semaines après la révolution de 1848, à démissionner de la Bibliothèque Mazarine et à accepter la chaire qui était vacante à l’Université de Liège (ibid.

202. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Madame de Verdelin  »

Celles qui avaient pleuré toutes jeunes filles à Bérénice n’étaient pas encore devenues des femmes de plus de trente ans et qui peuvent tout dire, que déjà Racine était hors du courant, revenu et rangé vers Port Royal. […] Mais c’est là mon sujet précisément, et j’y reviendrai. […] Une niaiserie qui me revient suffira pour en juger. […] Elle lui explique aussi avec détail et lui soumet l’état de son cœur ; devenue veuve, elle ne peut prendre sur elle d’épouser Margency qui est revenu, du moment qu’il l’a vue libre, et qui lui offre un nouvel établissement. […] Elle me reçut comme si elle m’avait vu la veille, et je la traitai comme si je devais revenir le lendemain.

203. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre premier. Nature et réducteurs de l’image » pp. 75-128

« Ma tête, s’affaissait à peine que mon hallucination était déjà revenue ; mais cette fois ce n’était plus mon nom que j’avais lu : c’étaient des caractères grecs, des mots mêmes, que j’épelais machinalement et presque par un remuement des lèvres. […] À mesure que ses forces revenaient, les fantômes apparaissaient moins fréquemment et diminuaient de grandeur, jusqu’à ce que, à la fin, ils ne furent pas plus grands que son doigt. […] On le saigne au pied : les visions persistent, accompagnées d’insomnies opiniâtres ; on lui applique un bandeau sur les yeux ; aussitôt elles cessent, et reviennent dès qu’on ôte le bandeau, jusqu’à ce que le malade le garde sans interruption pendant toute une nuit et une partie du jour. […] Il vous disait par exemple qu’il avait été aux Indes avec Tavernier, aux îles Sandwich avec Cook, et que de là il était revenu à Philadelphie, où il avait servi sous Lafayette. […] Le rêve lui revient pendant la veille.

204. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

il a fui comme une ombre En me disant je reviendrai ! […] C’étaient deux religieuses qui revenaient encore, abritées sous des parapluies. […] Je revins dans la cour. […] Les mères, qui allaient aux renseignements, ne revenaient plus. […] Elle partit en courant et, après un temps assez long, revint, mais sans rien rapporter.

205. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — I. » pp. 409-426

Après avoir essayé d’entrer dans le commerce, Léopold Robert revint dans sa famille et s’y fit remarquer par un goût instinctif pour la gravure, genre dans lequel s’est illustré plus d’un de ses compatriotes de La Chaux-de-Fonds. […] Or, cette personne qui revient quelquefois dans ses lettres, disciple de Corinne à beaucoup d’égards, surtout par les prétentions à l’enthousiasme, et qui paraît avoir été peintre, si ce n’est poète, il ne put jamais, malgré son esprit et son mérite, parvenir à la goûter : Ma foi, mon cher, écrivait-il à un ami, malgré son amabilité (affectée bien souvent), je lui trouve si peu de naïveté, de vrai sentiment, de jugement raisonnable, qu’elle est bien loin d’aller sur ma piquée… Elle nous fait des compliments si exagérés souvent, qu’il est impossible de ne pas voir qu’ils ne sont que dans sa bouche ; et puis, enfin, on voit le caractère des gens dans leur peinture ; je trouve qu’elle n’a pas l’ombre de sentiment, pas d’expression, pas de vérité bien souvent dans la couleur ; pour le dessin, elle ne s’en doute pas : et elle veut mettre à tout cela une touche-homme… Ma foi, je la juge violemment, tu diras. […] En novembre 1825, il félicite son ami Navez du mariage ; c’est une idée qui reviendra souvent et qui tient une grande place dans la réflexion mélancolique et dans le regret moral de Léopold Robert : « Je te félicite d’avoir enfin pris le parti de te marier et d’avoir trouvé surtout une aimable moitié qui trouvera plus son plaisir d’être chez elle que de sortir. […] Il revenait souvent sur cet exemple d’Ingres, que j’aime moi-même à prendre comme étant l’un des termes de comparaison les plus sensibles, les plus propres à donner la mesure de Léopold Robert ; car celui-ci, plein de déférence et sentant ses côtés inférieurs, ajoutait : Je ne suis pas étonné du tout qu’une comparaison de nos talents l’ait blessé. […] J’ai anticipé en tout ceci sur les derniers sujets de réflexion familiers et chers à Léopold Robert ; car, passé trente ans, il aimait à moraliser de plus en plus : j’ai à revenir en arrière et à le suivre, en le citant surtout et en me servant de ses paroles.

206. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

Il semble qu’il veuille épargner ses secrétaires : c’est dommage qu’il n’est greffier du parlement de Paris, car il gagnerait plus que Du Tillet ni tous les autres. » Ayant à entrer quelquefois dans les parlements de Toulouse et de Bordeaux, quand il était lieutenant pour le roi en Guyenne, il n’en revenait pas de voir que tant de jeunes hommes s’amusassent ainsi dans un palais, vu qu’ordinairement le sang bout à la jeunesse : « Je crois, ajoutait-il, que ce n’est que quelque accoutumance ; et le roi ne saurait mieux faire que de chasser ces gens de là, et les accoutumer aux armes. » Mais toutes ces sorties contre ce qui n’est pas gloire des armes et d’homme de guerre n’empêchent pas Montluc de sentir l’importance de ce chétif instrument, la plume : il s’en sert,-sachant bien que ce n’est que par là et moyennant cet auxiliaire qu’il est donné à une mémoire de s’immortaliser, qu’il n’en sera de votre nom dans l’avenir que selon qu’il restera marqué en blanc ou en noir par les historiens ; et son ambition dernière, à lui qui a tant agi, c’est d’être lu : « Plût à Dieu, dit-il, que nous qui portons les armes prissions cette coutume d’écrire ce que nous voyons et faisons ! […] » Enfin il revient sur l’importance capitale dont serait cette victoire, selon lui facile, qui déconcerterait la coalition et arrêterait les souverains ennemis tout net ; il le dit en des termes plus crus et en une image parlante. — Notez que du moment que Montluc a commencé de parler, il n’a plus pour contradicteur que M. de Saint-Pol. […] Bref, le roi répond à M. de Saint-Pol qui revient à la charge et qui voudrait lui faire honte de changer ainsi d’avis sur le propos d’un fol enragé : « Foi de gentilhomme ! […] C’est ici encore que Montluc fit preuve d’invention et de ressources, aussi bien que d’une intelligence militaire qui était en progrès sur la chevalerie et qui s’en revenait au bon sens pratique des anciens Romains. […] Transporté dans une place voisine, à Montalsin, et sachant Montluc presque à l’extrémité, il dépêcha à Rome pour faire venir un autre gouverneur, M. de Lansac ; mais celui-ci ne sut point s’y prendre et se laissa tomber aux mains des ennemis en essayant d’arriver à Sienne : « S’il fût venu, dit naïvement Montluc, je crois que je fusse mort, car je n’eusse eu rien à faire ; j’avais l’esprit tant occupé à ce qui me faisait besoin, que je n’avais loisir de songer à mon mal. » Après avoir été trois jours regardé comme mort, et avoir reçu la visite de Strozzi guéri plus tôt que lui, Montluc revint peu à peu à une santé suffisante pour vaquer à ses devoirs.

207. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — II » pp. 369-387

Il était temps de revenir à la sévère histoire et à la réalité. […] Pendant la guerre, j’ai couru où le feu était plus allumé, pour l’étouffer ; maintenant que la paix est revenue, je ferai ce que je dois faire en temps de paix. […] Que si maintenant nous revenons à lui comme écrivain, nous ne devons jamais nous surfaire la valeur de ce titre ainsi appliqué ; c’est un écrivain sans le savoir. […] Orateur, grammairien, poète, le plus attique des Latins, quand il écrit des mémoires sur ses guerres, il le fait en un style si simple, si pur, si gracieux dans sa nudité même, qu’en ne voulant que fournir des matériaux aux historiens futurs, il a peut-être fait plaisir, dit Cicéron, aux impertinents et malavisés (ineptis) qui voudront à toute force y mettre des boucles et des frisures ; mais à coup sûr il a détourné à jamais tous les bons esprits d’y revenir (« sanos quidem homines a scribendo deterruit ») ; car il n’est rien de plus agréable en histoire qu’une brièveté nette et lumineuse. […] On y voit que Henri IV n’était qu’un bonhomme et un brave militaire qui gâtait ce à quoi il touchait, mais qui avait bon cœur et revenait toujours à son Sully ; que Sully fit toute sa grandeur, etc., etc. » (Manuscrits de d’Argenson, Bibliothèque du Louvre, dans le volume intitulé : Remarques en lisant.) — Et qu’on s’étonne, après cela, du rôle qu’on a fait à Charlemagne avec son archevêque Turpin et ses douze pairs, dans les romans de chevalerie !

208. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

J’ai parlé des Martyrs, dont la comparaison ici revient sans cesse, et qui ne sont eux-mêmes qu’à demi réussis ; mais, dans Chateaubriand, il y a de temps en temps l’enchanteur qui passe avec sa baguette et son talisman : ici l’enchanteur ne paraît nulle part. […] Quant à la peinture même des visages, c’est la physionomie qu’il convient de rendre d’un mot et d’un éclair, bien plus que le détail des traits dont l’énumération ne doit pas revenir sans cesse. […] Pour revenir à des enfantillages bien innocents, mais indignes d’un pinceau sévère comme celui de l’auteur de Salammbô, je ne sais qui l’on prétend mystifier quand on nous parle sans rire de ce « lait de chienne » qui entre comme ingrédient dans un cataplasme d’Hannon, ou de ces « pattes de mouches écrasées » qui entrent dans un cosmétique de la jeune fille, et de tant d’autres singularités pareilles. […] Revenons à la vie, à ce qui est du domaine et de la portée de tous, à ce que notre époque désire le plus et qui peut l’émouvoir sincèrement ou la charmer. […] Tout ce que nous lui demandons, nous, du simple troupeau des mortels parisiens, c’est qu’il nous revienne le même qu’auparavant, bronzé au front, un peu plus mûr cependant et légèrement radouci au cœur ; ayant jeté là bas, sur la plage africaine, tous ses surcroîts de fureurs et de rages vengeresses ; toujours armé, mais non impitoyable.

209. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Des chevaux qu’on nomme « des enragés » et qu’on nourrit d’une façon particulière141 y vont et en reviennent en trois heures. […] Les princes et princesses du sang, ayant le droit « d’envoyer prendre du poisson à la recette les jours maigres, quand ils ne font pas à la cour de résidence suivie », ce seul article revient, en 1778, à 175 116 livres. […] (Compte général des revenus et dépenses fixes au 1er mai 1789, remis par M. le premier ministre des finances à MM. du Comité des finances de l’Assemblée nationale. […] Ayant trouvé à son goût un mets qu’on lui avait servi, elle y revint, et alors elle parcourut des yeux le cercle devant elle… et dit : « M. de Lowendal ?  […] Compte général des revenus et dépenses fixes au 1er mai 1789, 633  Notez qu’il faut doubler tous ces chiffres pour avoir leur équivalent actuel.

210. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Revenu à Paris, j’appris de M.  […] « Mais l’impression même sous laquelle j’ai écrit les Consolations n’est jamais revenue et ne s’est plus renouvelée pour moi. […] Et tout cela revint en mon âme mobile, Ce jour que je passais le long du quai, dans l’île. […] Lorsqu’il revint au commencement de 1830 pour sa réception à l’Académie française et pour la publication de ses Harmonies, il fut agréablement étonné de voir le public gagné à son nom et familiarisé avec son œuvre. […] » Quand l’amitié revient ainsi à un cœur qui n’a jamais cessé d’aimer, il y a un festin de l’enfant prodigue dans l’esprit d’un homme d’Israël.

211. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Bientôt après, son revenu s’accrut encore ; il refusa toujours à Stella cette grâce, ou plutôt cette justice. […] Ses coups dépassent la mesure, reviennent sur eux-mêmes, font le vide autour de lui. […] Mais ce revenu serait insuffisant. […] Le parti Whig revint au pouvoir avec la maison de Hanovre. […] Swift revint en Angleterre en 1727.

212. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

La Renommée, ce monstre infatigable, du même vol dont elle a touché les ruines des empires, s’arrête à cette chose aimable, s’y pose un moment ; elle en revient, comme la colombe, avec le rameau. […] Un ami dont le nom reviendra souvent sous notre plume, et dont le talent animé d’un pur zèle fait faute désormais en bien des endroits de la littérature, M.  […] Étant revenu en France, il y amena l’enfant62 et la plaça, en attendant mieux, chez sa belle-sœur Mme de Ferriol. […] L’ambassadeur mort (octobre 1722), Mlle Aïssé revint loger chez Mme de Ferriol, qui manqua de délicatesse jusqu’à lui reprocher les bienfaits du défunt. […] « Mais revenons.

213. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Eugène de Rastignac, qui avait été passer les vacances dans son humble famille, revient affamé d’ambition à la pension Vauquer. […] Et je reste, elles doivent revenir. […] Mis en nourrice à la campagne, oublié par ma famille pendant trois ans, quand je revins à la maison paternelle, je comptais pour si peu de chose que j’y subissais la compassion des gens. […] À cette pensée je m’appuyai contre un noyer sous lequel, depuis ce jour, je me repose toutes les fois que je reviens dans ma chère vallée. […] Sans savoir pourquoi, mes yeux revenaient au point blanc, à la femme qui brillait dans ce jardin comme au milieu des buissons éclatait la clochette d’un convolvulus, flétrie si l’on y touche.

214. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxvie entretien. L’ami Fritz »

Le premier jour du printemps revient. […] Et puis, dans une quinzaine, je reviendrai poser les grilles, alors je verrai tout ce que vous me dites. […] Il pensait à Sûzel ; il revient à la ville ; il s’endort. […] Voici bientôt dix heures, je vous accompagne chez David, et, aussitôt après, nous reviendrons dîner. […] Mais, un instant après, la confiance lui revenait, un flot de sang lui colorait les joues.

215. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

De retour dans sa patrie, il est revenu sur ses souvenirs : dans un temps où quiconque a vu est si empressé de dire, à un âge où l’on résiste si peu à l’épanchement d’une première impression, il a su longtemps contenir sa pensée, et l’a mûrie par de grands et consciencieux travaux. […] Or, le petit-fils de Zombé étant allé visiter les ruines de Palmarès,  revient et dit à son père Juan : « Je suis allé dans la vallée, et j’ai été m’asseoir au milieu des palmiers qui sont étendus sur le sable ; tes récits sont revenus à ma mémoire.

216. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre I. Bernardin de Saint-Pierre »

le mot niais est celui qui revient toujours à nos lèvres. […] Notre monde effraie, dégoûte sa pauvre âme : elle revient, et meurt dans un naufrage, sous les yeux de Paul. […] Il va servir à Malte, puis en Russie, d’où il passe en Pologne, manque d’aller en Sibérie, revient en France assiéger le ministère de sollicitations.

217. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

À l’époque de son mariage, Montausier avait à peine trente-cinq ans ; depuis l’âge de vingt ans, il était au service et engagé dans des guerres successives, en Italie, en Lorraine, en Alsace ; en 1638, parvenu au grade de maréchal de camp, bien qu’âgé seulement de vingt-huit ans, il fut nommé gouverneur de l’Alsace, province alors d’une soumission équivoque, où le roi avait besoin d’un homme qui réunit l’art et le courage du guerrier au tarent et à la sagesse de l’administrateur ; en 1638, il se signala au siège de Brissac ; revenu à Paris pendant l’hiver de 1641, il fut rappelé à l’ouverture de la campagne par Guébriant devenu général en chef de l’armée d’Allemagne et peu après maréchal de France ; le maréchal, qui avait une grande confiance en Montausier, ayant été tué en 1643, celui-ci fut fait prisonnier, peu de temps après, à la déroute de Dillingen ; il ne recouvra la liberté qu’en 1644 ; alors enfin il lui restait encore un obstacle à franchir pour se marier ; c’était sa religion. […] En 1649, il revint quelques mois à Paris, pour des affaires personnelles, mais il retourna bientôt avec sa femme dans l’Angoumois, où il se battit et reçut de graves blessures pour la cause royale ; il ne revint dans la capitale qu’en 1653, après la pacification de la guerre civile.

218. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXV » pp. 402-412

On dît qu’il ne reviendra pas sitôt, et qu’il pourrait bien aller en Poitou, car Sa Majesté lui accordera son congé fort librement122. » On voit par les lettres de madame de Sévigné que le roi, après avoir disgracié Marsillac, craignant le ressentiment de son impérieuse favorite, sacrifia madame de Ludres qui lui plaisait. […] Elle alla alors faire une visite à madame de Maintenon, qui était récemment revenue de Barèges, et resta deux ou trois jours chez elle. […] Madame de Maintenon était revenue, à la fin de septembre ou au commencement d’octobre, de Barèges.

219. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Mais revenons. […] Il vous fait brusquement sauter, on s’écrie ; on revient un peu en deçà, on y est. […] Excursion faite, la conclusion rigoureuse revenait toujours. […] Revenons un peu à ses ouvrages. […] Si abeille qu’il soit, c’est à la ruche qu’il revient toujours.

220. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

J’ai reçu des lettres de mon père, qui me presse de revenir, et je le rejoindrai dans peu. […] Pardon, madame, — revenons à nos moutons, — c’est-à-dire à notre prochain, que nous croquons comme des loups. […] Enfin, qu’elles reviennent ou non, je n’y attache que l’importance de ne pas souffrir. […] — Moi, je reviens d’un grand dîner, et je ne sais que diable faire. […] Entre beaucoup d’amis, les reproches et les doutes reviennent à mes : Eh bien !

221. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

On s’en revenait maître du terrain et en vieux soldats. […] Il faut revenir par eux à lui, pour le connaître tout entier. […] Benjamin Constant brûlait de revenir en France depuis qu’on lui en contestait la permission ; il voulait revenir, sinon à Paris, du moins à sa campagne de Luzarche, où des affaires d’intérêt l’appelaient. […] (Fouché), un mot qui est revenu au Premier Consul. […] Nous y reviendrons avec lui tout à l’heure.

222. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XV. Le fils du sérigne »

Et quand le nom t’en aura été donné, alors tu reviendras ici. » Au matin le gourgui166 s’est mis en route. […] Le fils du marabout est revenu chez son père pour lui raconter ce qui lui est arrivé.

223. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

Je revins à Polémieux l’après-dîner. […] Cela me revenait souvent dans l’esprit, et j’ai cherché vingt fois à trouver directement cette solution. […] Delambre, revenu de sa tournée. […] Revenez au milieu de vos amis, et mariez-vous dans votre patrie… « … Au risque de vous fâcher, je dois vous dire ici la vérité. […] Ampère, en même temps qu’il sentait la vie lui revenir encore, dut avoir, en cette saison, de pures jouissances.

224. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

Il revient d’Italie d’où il a rapporté de la facilité et de la couleur. […] La solitude retentira de ma plainte ; je déchirerai le silence et l’obscurité de mes cris, et lorsque mon âme sera rassasiée d’amertumes j’essuierai mes larmes de mes mains, je reviendrai parmi les hommes et ils ne soupçonneront pas que j’aie pleuré. […] Alors je me relèverai, je m’en reviendrai, mais je n’en reviendrai pas sans m’arrêter, sans retourner la tête, sans fixer mes regards sur l’endroit où je fus heureux avec toi et sans toi. […] Je n’ajouterai rien de plus, car il faudrait revenir sur les mêmes éloges qui vous fatigueraient autant à lire que moi à les écrire. […] Cette fermeture est entrouverte. à droite, du côté où la fermeture s’entrouvre, en dehors, un peu en deçà sur le devant, on voit deux paysans avec leur chien ; ils reviennent des champs.

225. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Quand ses idées lui reviennent distinctes, il se trouve dans un hospice, entouré de sœurs charitables ;  Thermidor est passé, l’on respire. […] Mais, pour nous en tenir au curé, au vicaire de campagne. poétique ou poëte, c’est à celui du Village abandonné qu’il faut revenir comme type aimable : A man he was to all the country dear, And passing rich with forty pounds a year. […] Ce qu’il nous raconte, ou plutôt ce qu’il raconte à sa sœur et ce qu’il se rappelle à lui-même, ce n’est pas vieux et apaisé qu’il y revient ; depuis cette dernière maladie à laquelle il manque de succomber, peu après la mort de Laurence, le manuscrit cesse. […] Pourtant, ce qui continue de distinguer expressément le poëte, c’est encore la grandeur, l’élévation à laquelle il revient, vers laquelle il s’échappe toujours par quelque côté. […] Mais, quoique revenu près des bords que j’appelle, Je ne puis rendre aux lieux de visite nouvelle. 

226. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Il revint vite, en traversant la mer, par Carthage, puis par Grenade et l’Alhambra, où il rencontra le véritable but de son voyage. « Mais croyez à ce que je chante, et non à ce que je prêche !  […] Différentes circonstances pénibles amenèrent des réductions et des modifications à cet acte, et le revenu en fut successivement modifié et borné. […] Si vous partez, vous reviendrez au moins promptement, et vous me retrouverez à votre retour tel que vous m’aurez laissé, c’est-à-dire le plus tendrement, le plus sincèrement attaché à vous. […] Malgré tout cela, vous reviendrez ; vous ne serez pas même longtemps. […] M. de Chateaubriand eut la faiblesse d’aller à Londres pour y recevoir quelques puérils hommages ; il en revint plus seul que jamais.

227. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

Votre Majesté sait que l’on donnait les chevaux de cavaliers à vingt-cinq livres ; j’en fis acheter cent à Verdun, Mouzon, Châlons et autres lieux : ils ne me revenaient, rendus à Paris, qu’à trente et une ou trente-deux livres ; ils n’y furent que quatre jours, et de Paris à Ulm, vingt jours : ainsi, aucun de ces chevaux, avec la nourriture, ne revenait qu’à soixante livres. […] La France a eu un succès ; la victoire revient sous nos drapeaux, elle console le cœur d’un roi qui, en cela du moins, est patriote : que leur importe ! […] Il revient à Paris au commencement de janvier 1703, pour voir sa femme et un fils qui lui était né. […] L’envoyé de l’électeur de Bavière à Versailles, M. de Monasterol, chauffait ces discours qui nous sont revenus tout vifs et bouillants par Saint-Simon : Honteux délais de Villars ; jaloux de sa femme, etc., etc. […] On commence par me gronder : j’ai abusé de la confiance de Sa Majesté en prenant trop sur moi ; il me revient des menaces.

228. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

» Ainsi à ces époques, plus heureuses par là que les nôtres, et jusqu’en ces âmes dissipées, même au fort du libertinage, on croyait ; quelle que fût la surface et le soulèvement des orages, le fond était de la foi : on revenait à temps, et les grandes âmes allaient haut. […] On raconta donc qu’étant à la campagne lorsque arriva cette mort imprévue de la plus belle personne de la Cour, et qui le préférait à tous les autres, il revint sans en être informé, et que, montant tout droit dans l’appartement dont il savait les secrets accès, il trouva l’idole non-seulement morte, mais encore décapitée ; car les chirurgiens avaient, dit-on, détaché cette belle tête pour la faire entrer dans le cercueil trop court. […] « Comme il avait étudié les sciences occultes, il essaya les moyens en usage pour faire revenir les morts. […] Rancé, fidèle au principe d’obéissance, repartit sans murmurer de Lyon pour Rome, y reprit la négociation sans espoir, y subit jusqu’au bout toutes les lenteurs, et ne revint qu’après le procès perdu, ayant bien mérité, encore une fois, son désert. […] La princesse Palatine le consultait et suivait ses directions ; le roi d’Angleterre, pour se consoler de la perte d’un trône, revenait l’entretenir de Dieu chaque année ; la duchesse de Guise (fille de Gaston d’Orléans) faisait des stations à la Trappe deux et trois fois l’an et se logeait dans les dehors ; le maréchal de Bellefonds se tenait toujours à portée et avait une maison dans le voisinage.

229. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

À dix-sept ans, muni de ce premier fonds de connaissances et des bonnes instructions morales de sa tante, Béranger revint à Paris, auprès de son père, qui s’y trouvait pour le moment dans une position de fortune très-améliorée . […] Il songea un moment à la vie active, aux voyages, à l’expatriation sur la terre d’Égypte, qui n’était pas abandonnée encore : un membre de la grande expédition, qui en était revenu deux ans auparavant , le détourna de cette idée. […] La Courtisane, idylle d’environ cent trente vers, exprime avec sentiment, naïveté et élégance, les remords et les larmes d’une villageoise pervertie qui revient un moment visiter les campagnes natales et qui voit de loin fumer le toit de la chaumière maternelle. […] reprit l’académicien qui n’en revenait pas, Neptune, Thétis, Amphitrite, Nérée, de gaieté de cœur vous vous retranchez tout cela ? […] Il faut que, toutes les deux ou trois secondes, la pensée revienne faire acte de présence à un coin marqué, jaillir à travers un nœud étroit et fixe, rebondir sur une espèce de raquette inflexible et sonore : elle est à cent lieues, au bout du monde, dans le ciel ; n’importe, il faut qu’elle revienne et qu’elle touche à point.

230. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

  Revenons à nos moutons, et ne mordons plus personne178. […] La plupart d’entre eux, d’ailleurs, reviennent de droit à notre confrère M. […] L’esprit persistait ; la philosophie revient toute voisine de cette pièce pénitente et de quelques paraphrases des Psaumes, dans des réflexions hautement stoïques ; on dirait qu’elle essaie la mort de tous les côtés : Misérable jouet de l’aveugle fortune, Victime des maux et des lois, Homme, toi qui, par mille endroits, Dois trouver la vie importune, D’où vient que de la mort tu crains tant le pouvoir ? […] Mais allez, vous avez beau faire Et triompher d’un air sévère Quand de là je reviens battu : Au lieu du tout, si l’on ne donne Qu’une moitié de sa personne, On n’est qu’une demi-vertu. […] Elle revint souper chez elle au logis avec cinq ou six personnes, du nombre desquelles étoit Pradon.

231. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

Jean s’attendrit, ses bons sentiments lui reviennent, il promet de renoncer aux pompes et œuvres du monde interlope, et de repartir avec elle pour la Bretagne, le soir même. […] Ceci dit, je reviens à Jean de Thommeray, prêt à s’enrôler dans les francs-fileurs, et qui fait part à un sien ami de ce beau projet, avec un cynisme ironique. […] Un emprunt prélevé sur la dot de la femme la tirerait du naufrage ; mais madame Fourchambault défend énergiquement cette dot lucrative de huit cent mille francs qui lui a rapporté le revenu d’un capital de deux ou trois millions, en vingt années de ménage. […] La hausse sur le banquier en baisse étant revenue avec l’association de Bernard, le préfet essaye de raccommoder le mariage qu’il a rompu tout à l’heure. […] Le scandale court par la ville, s’embarque au quai pour l’Angleterre, et en revient avec le dédit formel de la famille anglaise qui devait prendre Marie Letellier pour institutrice. — Shoking !

232. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Dans les premiers moments où ce livre parut, je me suis abstenu d’en parler, estimant qu’un tel sujet revenait de droit à notre vaillant et hardi collaborateurq, M.  […] L’âne y joue un rôle perpétuel, et y revient comme la métamorphose robuste et de prédilection. […] Ces images de Scévola, de Tarquin, de Brutus, reviennent à tout propos dans sa bouche ou à son sujet. […] Biot, à dix-huit ans, soldat et canonnier, revenait de la bataille de Hondschoote : fort malade, ayant un commencement de plique, il ne pouvait se traîner. Il résolut pourtant de traverser le nord de la France avec un billet d’hôpital, sans passeport, pour revenir au moins mourir chez sa mère.

233. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

On revenait en France de cette croisade malheureuse ; on s’était embarqué à Acre, on était en vue de l’île de Chypre (1er mai 1254), et plus près qu’on ne pensait. […] « Lorsque la reine sa mère, dit Joinville, apprit que la parole lui était revenue, elle en fit si grande joie, qu’elle ne pouvait faire plus. […] Toute une moitié de la semaine se passa en fêtes et en danses, et, le vendredi venu, il leur dit : « Seigneurs, je m’en vais outre-mer, et je ne sais si je reviendrai. […] Revenu de Paris dans son pays de Champagne, Joinville s’entend avec un de ses cousins, chef de compagnie également, pour fréter une grande nef à Marseille, et prépare tout pour le départ. […] Cet abbé de Cheminon lui donne l’écharpe et le bourdon, et le voilà parti en pèlerin, pieds nus et en chemise, faisant visite à tous les saints lieux d’alentour, sans plus devoir rentrer à son château jusqu’à ce qu’il revienne de Palestine ; et en passant d’un de ces lieux des environs à l’autre, « pendant que j’allais, dit-il, à Blécourt et à Saint-Urbain, je ne voulus jamais retourner mes yeux vers Joinville, pour que le cœur ne m’attendrît pas trop, du beau château que je laissais et de mes deux enfants ».

234. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

Il y a des bleus qui reviennent de place en place : c’est le ton dominant. […] « Le roi (nous dit le Journal de Luynes) lui a répondu avec la même sécheresse : « Ce n’est pas la peine, je n’y serai presque pas. » Elle lui a demandé ensuite si au moins elle ne pourrait pas rester ici ; il lui a répondu sur le même ton : « Il faut partir trois ou quatre jours après moi. » — La reine est, comme l’on peut juger, fort affligée d’un traitement aussi dur. » Tous ces beaux sentiments, enfants de la maladie et de la peur, étaient dissipés et avec la santé étaient revenus les désirs, les habitudes, toutes les ivresses de la vie. […] cette pauvre duchesse, si elle revenait ! […] Madame, répondit la femme de chambre impatientée, si elle revenait, ce ne serait pas Votre Majesté qui aurait sa première visite. » On ne règne pas véritablement quand on a de ces faiblesses et qu’on s’attire de ces réponses. […] Ayant trouvé bon un mets qu’on lui avait servi, elle y revint, et alors elle parcourut des yeux le cercle devant elle, sans doute pour voir si, dans le nombre de ses observateurs, il n’y avait pas quelqu’un à qui elle dût compte de sa friandise.

235. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

» Dans toutes ces scènes qu’elle a commencé à nous décrire, à partir des Horizons prochains, et où la nature occupe le premier plan, mais où les humains ne sont pas oubliés ; dans toutes les courses et promenades qu’elle fait par monts et par vaux, en rayonnant tout à l’entour ; chez toutes ces bonnes gens qu’elle visite, vignerons, bûcherons, vachers, tuiliers et autres, tous les Jacques et les Jean-Pierre des environs, — et la mère Salomé la rebouteuse, — et Marguerite la désespérée, qui craint d’avoir commis le seul péché sans pardon, le péché contre le Saint-Esprit, — et une autre Marguerite, celle à Jean-Pierre, une Baucis sèche et fervente de quatre-vingt-sept ans, — dans toutes ces historiettes à conclusion édifiante, Mme de Gasparin a fait la Légende Dorée du protestantisme, légende très-modernisée, rehaussée et enluminée, à la mode du jour, de couleurs très-réelles, et présentée sous forme de mœurs populaires ; mais le protestantisme y est, il y revient bon gré, mal gré, il ne souffre jamais qu’on le perde de vue, et l’on pourrait intituler cet ensemble de volumes déjà si variés : le protestantisme dans la nature et dans l’art au xixe  siècle. […] Nous revenons à cette Lisette qui est le but de la promenade : ici la protestante se déclare et ne nous quitte plus. […] Aussi sent-on chez Mmc de Gasparin qu’il y a plus d’un rappel systématique et que, pour revenir à son sujet voulu, après ses effusions de paysagiste enthousiaste et de promeneuse naturaliste, elle fait effort et elle fait exprès. […] Elle prend plus à cœur les beautés de l’exil ; dans cette grande et libre nature qui l’environne, elle se sent à tout moment en plein Éden, elle s’y livre en toute jouissance à des ébats turbulents, innocents ; et quand l’idée du pèlerinage lui revient — un peu tard, — si elle est franche, elle conviendra qu’elle l’avait oublié. […] J’ai pourtant besoin, en finissant, de revenir à Eugénie de Guérin pour nous reposer sur des tons plus doux et rentrer dans l’harmonie qui nous est plus familière.

236. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

Il s’agirait de fixer ce qu’il faut de revenu à un homme intelligent et bien élevé pour commencer à être du monde, et ce qu’il en faut à un imbécile ou à un rustaud. […] Elle revient pourtant, elle revient le cœur gros de chagrin et de reproches. […] Puis les souvenirs des expériences morales consignées dans les livres lui reviennent sans cesse ; il y compare, malgré lui, ou cherche à y conformer sa propre aventure. […] Rabusson — pas toujours très pur ni exempt de toute phraséologie, mais fin, souple, aisé, élégant (c’est le mot auquel je reviens toujours).

237. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Le sujet vaut la peine qu’on y revienne : dernièrement, à l’occasion de l’ouvrage de M.  […] Cette fois, celui qui dicte ne se hâte pas trop ; son imagination revient et s’étend avec complaisance sur cet épisode, qui fut encore le plus fabuleux de sa vie. […] Il revient de la Grèce et de Jérusalem ; il aborde en Égypte, il remonte jusqu’au Caire ; mais l’inondation du Nil l’arrête. […] Bientôt il nous reviendra tout exercé. […] Parmi les mots caractéristiques qu’on lit dans ces derniers volumes, il en est un qui me revient et que je me reprocherais de ne pas relever, car il trahit une pensée intime, et il est un de ceux que Napoléon a ajoutés de sa main au crayon sur le manuscrit.

238. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Revenons avec Vauvenargues à la pureté de la langue, à la sérénité des pensées et à l’intégrité morale. […] Les grands exemples des Richelieu, des La Rochefoucauld, des Retz, des Guillaume Temple, et de tous ces hommes d’État et d’action qui avaient demandé le surcroît et le sceau de leur illustration à leurs écrits, revinrent l’enhardir. […] Dès qu’il le connaîtra mieux, le mot de génie va se mêler à tout moment et revenir sous sa plume à côté du nom de Vauvenargues, et c’est le seul terme en effet qui rende avec vérité l’idée qu’imprime ce talent simple, élevé, original, né de lui-même, et si peu atteint des influences d’alentour. […] Il revient en maint endroit, d’une manière détournée, sur ce qu’il y a d’étroit et de gênant dans une existence privée pour « un particulier qui a l’esprit naturellement grand. » On reconnaît à ces retours et à ces regrets mal étouffés l’homme qui, même en se vouant aux lettres, ne pouvait s’empêcher de penser que le cardinal de Richelieu était encore au-dessus de Milton. […] On ne voit pas qu’il ait été occupé des femmes dans les années où il écrit, et le peu qu’il en dit nous montre un homme revenu : « Les femmes ne peuvent comprendre, dit-il, qu’il y ait des hommes désintéressés à leur égard. » Il semble que, brisé avant l’âge par les maladies, il se soit retranché sur ce point jusqu’aux regrets stériles : « Ceux qui ne sont plus en état de plaire aux femmes et qui le savent, s’en corrigent. » Sans être insensible aux lumières de son temps et sans y fermer les yeux, il était loin de s’en exagérer l’importance, et il se préoccupait du perfectionnement moral intérieur, bien plus que de cette perfectibilité générale à laquelle il est si commode de croire et de s’abandonner.

239. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Il a des défauts sans doute, quelques pointes et jeux de mots, des comparaisons trop recherchées, des ressouvenirs de César, de Pompée et de Scipion, qui reviennent trop souvent, des thèses de parti-pris qui rappellent les déclamations des anciens. […] Ce reste de poète, insuffisant dans la pure poésie, revient à point pour égayer et comme pour fleurir ses pages sérieuses. […] Établissant des degrés dans le mal et dans la calamité publique : La paix vaut mieux que la guerre, dit-il ; la guerre qui est faite contre l’ennemi étranger est beaucoup plus tolérable que l’autre qui se fait de citoyen à citoyen : mais, entre les guerres civiles, il n’y en a point de si aiguë, et qui apporte tant de maux, que celle qui est entreprise pour la religion… Il y a deux grands camps par la France… Il revient en maint endroit sur cette idée que, de toutes les guerres, il n’en est de pire que celle qui se fait sous voile de religion. […] Pibrac, avocat du roi, éloigné de Paris en 1567, et abrité en lieu sûr, lui fait demander s’il doit revenir à Paris et s’exposer aux hasards d’un voyage. Pasquier lui répond que si l’on pouvait librement choisir, et que si l’on était à commencer sa carrière, il faudrait appliquer ici le précepte des médecins sur la peste : Partir tôt, aller loin, et revenir tard : « Mais puisque chacun de nous a passé plus de la moitié de son âge, même que vous, depuis dix-sept ou dix-huit ans en çà, avez été appelé aux plus belles charges de notre robe, il me semble qu’il nous faut résoudre de vivre et mourir comme bons citoyens avec notre État. » Le conseil qu’il donnait là à Pibrac, il le pratiqua aussi pour lui-même : on le vit dans la seconde moitié de sa carrière, lorsqu’il eut passé du barreau dans les rangs de la haute magistrature et qu’il fut devenu avocat général en la Cour des comptes (1585), en remplir tous les devoirs, y compris l’exil, et s’attacher invariablement à toutes les fortunes qui ballottèrent, durant la Ligue, les débris du Parlement et des cours souveraines de la France.

240. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Il revient à Paris exprès pour en conférer. […] On ne revient pas de cette obstination-là. […] ” » — C’est dans cet état de choses que Beaumarchais a la bonhomie de revenir de Londres et de se remettre aux mains de la Convention pour plaider cette affaire, et avoir raison de la dénonciation de Lecointre, dont il démontre surabondamment l’erreur et l’injustice. […] À sa fille et à sa famille, dans les grands moments, il parle trop avec la solennité et l’emphase d’un père de mélodrame ; à ses maîtresses (car il en eut toujours), il écrit sur un ton qui fait reculer d’étonnement les moins scrupuleux et qui condamne ce coin de sa correspondance à ne jamais sortir du tiroir ni du cabinet des curieux ; mais avec ses amis, dans le tous-les-jours, il redevient uniment le gai, le bon et facile Beaumarchais : Je viens de revenir, écrit-il à l’un d’eux (6 juin 1797), dans ma maison du boulevard, dont le séquestre n’était pas levé quand je suis rentré dans Paris. […] Après avoir tiré tout son feu d’artifice d’esprit, Beaumarchais était insensiblement revenu à ses premiers penchants de Grandisson ; un singulier Grandisson toujours !

241. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

Les deux volumes, qui embrassent cette littérature française à l’étranger durant tout le cours du xviie  siècle, nous fourniront plus d’un secours et d’un prétexte pour revenir nous-même vers quelqu’un de ces personnages que l’auteur nous fait mieux connaître, et qu’il éclaire par ses recherches nouvelles ou par ses fins aperçus. […] Et le cardinal Du Perron, le grand controversiste, disait également, quand on proposait de lui amener des calvinistes à combattre : « S’il ne s’agit que de les convaincre, je crois posséder assez de savoir pour cela ; mais, s’il est question de les convertir, conduisez-les à M. de Genève, qui a reçu de Dieu ce talent. » C’est à la fin de ce voyage de Paris que François de Sales apprit la mort de l’évêque de Genève dont il était le successeur désigné, et il s’empressa aussitôt de revenir en son diocèse. […] François de Sales revint une dernière fois à Paris en 1618, pour y négocier le mariage d’une des sœurs de Louis XIII avec le prince de Piémont. […] Un jour, si je venais à parler de la correspondance de Fénelon et de ses lettres spirituelles, ce serait l’occasion de revenir sur celles de saint François de Sales, et de chercher en quoi ces deux aimables et fins esprits se rapprochent et se ressemblent, tout en gardant chacun leurs avantages36. […] Un jour que saint François de Sales était monté à un petit ermitage au-dessus de l’abbaye de Talloires, en compagnie du prieur, il eut le désir d’y revenir une autre fois et la pensée qu’il y pourrait même demeurer.

242. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

À peine revenu à Potsdam, Frédéric écrit à Jordan : « Tu me trouveras bien bavard à mon retour ; mais souviens-toi que j’ai vu deux choses qui m’ont toujours beaucoup tenu à cœur, savoir : Voltaire et des troupes françaises. » Voilà, en effet, les deux passions de Frédéric, et qui se disputeront toute la première moitié de sa carrière de roi : la guerre et l’esprit ; être un grand poète, devenir un grand capitaine ! […] Il y a du novice dans ces premières confidences belliqueuses de Frédéric à Jordan ; ce n’est pas, comme pour Napoléon, dès le premier jour, le grand géomètre militaire embrassant du haut des Alpes son échiquier et développant, avec une perfection inventive, des combinaisons profondes et savantes que l’héroïsme exécutera comme la foudre : Frédéric se forme lentement ; il s’essaye, il entame, il échoue, il revient à la charge, il s’y prend et reprend maintes fois. […] À Berlin, lorsque Jordan n’était pas malade, il voyait le roi tous les jours, de sorte que celui-ci pouvait dire avec regret, après l’avoir perdu : « Nous avons vécu sans cesse ensemble. » La première guerre de Silésie terminée (juin 1742), Frédéric n’a plus qu’un désir, revenir administrer en bon et sage roi ses peuples : J’ai fait ce que j’ai cru devoir à la gloire de ma nation ; je fais à présent ce que je dois à son bonheur. […] L’impératrice de Russie meurt, et le nouvel empereur se déclare pour lui ; cela fait péripétie dans la situation : « Je me reviens, dit-il, comme un mauvais auteur qui, ayant fait une tragédie embrouillée, a recours à un dieu de machine pour trouver un dénouement… ; — trop heureux, après sept actes, de trouver la fin d’une mauvaise pièce dont j’ai été acteur malgré moi. » Une place pas la gloire plus haut ; il ne monte pas au Capitole plus fièrement que cela : — « Je soupire bien après la paix, mon cher Milord ; ballotté par la fortune, vieux et décrépit comme je le suis, il n’y a plus qu’à cultiver mon jardin. » — Jean-Jacques Rousseau, sur ces entrefaites, poursuivi en France pour l’Émile, s’était réfugié dans la principauté de Neuchâtel. […] Si je savais quelque chose de plus capable de vous attirer, je le dirais également. » Milord Maréchal se rendit à ce cordial rappel et s’en revint habiter à Potsdam une maison bâtie exprès pour lui dans le faubourg.

243. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Enfin Daudet arrive avec son succès de la veille, au Vaudeville, sur la figure, et l’on se met à table, au milieu de cette phrase de Zola, qui revient comme un refrain : « Décidément, je crois que je vais être obligé de changer mon procédé ! […] Au bout d’un an, il revenait à Naples, exposait, avec un certain succès, mais les ennuis qu’il éprouvait, de la part de ses frères hostiles à sa vocation, le décidèrent à quitter Naples, avec l’idée d’aller à Paris. […] Je propose de battre les marchands d’antiquités, de faire un petit dîner fin, et de ne revenir que le soir. […] Daudet, Zola et moi, nous repartons, refusant de nous mêler à la ripaille qui se prépare pour ce soir, et revenons, en parlant pieusement du mort. […] Dimanche 26 décembre Ce soir, au milieu d’un lied chanté par la sœur de Berendsen, le traducteur danois de Renée Mauperin, Nittis me dit tout à coup : « Les dimanches de Naples, les dimanches de mon enfance… c’est par des bruits, des sonorités qu’ils me reviennent… Voyez-vous, le bleu du ciel et le plein soleil entrant par toutes les fenêtres… là-dedans montant les fumées de tout ce qui frit dans la rue… là-dessus le branle des cloches sonnant midi, et dominant les cloches, le chant d’un marchand de vin de l’extrémité de la rue, chantant, donnant de la voix, ainsi qu’on dit chez nous, avec une voix telle, que les cloches, je ne me les rappelle plus que… comme du paysage ! 

244. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre III. L’art et la science »

Nous reviendrons plus tard sur cette puissance du livre, n’y insistons pas en ce moment ; elle éclate. […] — « Rien de nouveau sous le soleil. » — « Votre nouveau est du vieux qui revient », — etc., etc. […] De là ceci, d’où nous sommes partis et où nous revenons : l’art n’est point perfectible. […] Oui, et nous revenons souvent, et nous reviendrons encore, sur cet encouragement nécessaire ; stimulation, c’est presque création ; oui, ces génies qu’on ne dépasse point on peut les égaler.

245. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Il revint bientôt à son cher pays, comme l’enfant qui saigne revient à sa mère. […] Seulement, comme ceux-là qui regrettent le mal accompli, lorsqu’il est irréparable, Brizeux, à qui l’Italie ne donna pas de facultés nouvelles, voulut revenir une dernière fois aux inspirations premières de sa jeunesse, et le poème de Primel et Nola marqua cette volonté du retour. […] Tout devient si beau quand on se retourne, — et surtout quand on ne peut revenir ! […] Il ne savait pas que dans cet adorable pays qui n’était pas le sien, il ne faut jamais revenir sur une sensation.

246. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

Toutes les fois cependant que la démangeaison me revenait (et elle me revenait de temps en temps), quand j’étais tenté d’entamer la série, d’ouvrir la tranchée à tout hasard, c’était par M. de Sacy que j’étais bien résolu de commencer : sur celui-là, l’opinion me semblait faite ; j’allais, me disais-je, à coup sûr ; il n’y avait ni à ajouter ni à rabattre, il n’y avait pas de péril. […] Lisant sans autre but que de s’instruire et de se charmer, de revenir à la source de la juste éloquence et des pensées salutaires, il n’a guère pris la plume en littérature que pour exprimer ce sentiment vif, l’amour et le goût des bonnes et vieilles œuvres. […] En combattant La Rochefoucauld, il est à la fois plein d’onction et d’émotion ; il s’arme de tous les souvenirs d’enfance, de toutes les traditions héréditaires, du besoin de croire et d’espérer qui revient et s’augmente avec l’âge.

247. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Parny poète élégiaque. » pp. 285-300

Ce qui me console, c’est que les gens d’esprit de ces doctes générations assurent que cette voie est la meilleure, en définitive pour en revenir à apprécier tout ce qui rentre dans le génie de la France, et ce qui exprime le goût français. […] Parny est trop entièrement épris et trop paresseux pour aller faire comme André Chénier, pour revenir, par une combinaison de goût et d’érudition, aux maîtres de la lyre éolienne. […] Le vent tourna, l’opinion revint, Parny fut maintenu avec honneur à son rang sur la liste de nos autorités poétiques, et c’est M. de Montahmbert qui en est cause. […] Ainsi, quand je partis, tout trembla dans cette âme ; Le rayon s’éteignit ; et sa mourante flamme Remonta dans le ciel pour n’en plus revenir… Ce sentiment qui se trahit dans le détail et qui respire dans tout l’ensemble, c’est une singulière complaisance du poète à décrire le mal qu’il a causé, et cette complaisance, à mesure qu’on avance dans la lecture, l’emporte visiblement sur la douleur, sur le regret, au point de choquer même la convenance.

248. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

J’ai dit qu’entre autres amusements favoris, ce prince, âgé pour lors de vingt et un ans (1749), avait, fait de ses chambres un chenil et qu’il y dressait une meutes en criant comme les chasseurs ; il n’interrompait cet exercice furieux que pour prendre son violon et en racler avec violence ; puis il revenait à ses chiens qu’il corrigeait. […] Poniatowsky, après un tour qu’il va faire en Pologne, revient plus autorisé et en qualité de ministre résident : le voilà donc en pied à Pétersbourg. […] Comme le cabinet était fort petit, hormis Léon Narichkine, sa belle-soeur et moi, personne ne vit cela ; mais le comte Horn ne fut pas trompé, et tandis que je traversais les appartements pour revenir dans la salle, le comte Horn tira le compte Poniatowsky par l’habit et lui dit : “Mon ami, il n’y a rien d’aussi terrible qu’un petit chien de Bologne ; la première chose que j’ai toujours faite avec les femmes que j’ai aimées, c’est de leur en donner un, et c’est par eux que j’ai toujours reconnu s’il y avait quelqu’un de plus favorisé que moi”. » Je passe sur bien des gaietés et des espiègleries. […] Tout ce qu’on vous dira à la place de ceci ne sera que des propos de pruderie non calqués sur le cœur humain, et personne ne tient son cœur dans sa main, et ne le resserre ou le relâche à poing fermé ou ouvert à volonté. » On ne peut mieux indiquer, par cette digression même presque involontaire et où la femme revient et se trahit, que, tout en cédant volontiers de son côté à la tentation et à l’attrait, elle se prévalait aussi à son tour de cet attrait et de cet ascendant aimable, de sa séduction irrésistible et de sa certitude de plaire, pour se faire, à la Cour et dans tous les rangs, nombre d’amis dévoués, inféodés, résolue à tout pour la servir, et qui, le jour et le moment venus, la firent ce que de tout temps elle avait rêvé d’être, afin de pouvoir ensuite donner sa mesure au monde et marquer son rang dans l’histoire.

249. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre II. L’homme »

Je vous en fais juge : sans parler d’autres merveilles sur lesquelles M. d’Hervart m’obligea de jeter la vue. » Ici perce la pointe de gaieté sensuelle ; mais il revient et ajoute avec une grâce charmante : « Si cette jeune divinité qui est venue troubler mon repos y trouve un sujet de se divertir, je ne lui en saurai point mauvais gré. […] Je suppose qu’il allait se promener à Vaux, regardait les cygnes et les beaux parterres, et revenait le soir content d’avoir si bien travaillé. […] Il y revenait à vingt reprises, en lui parlant, en parlant à d’autres. […] Il s’oubliait lui-même, il s’enfonçait si bien dans ses personnages fictifs, qu’il s’intéressait à eux, leur parlait, revenait à eux comme à d’anciens amis, leur donnait une place dans sa vie, s’effaçait devant eux, et mettait au jour de véritables êtres.

250. (1863) Molière et la comédie italienne « Textes et documents » pp. 353-376

La dernière scène du Vecchio geloso revient sur l’aventure dont Pantalon a été la victime, et en tire le dénouement par un moyen des plus singuliers et des plus hardis : « Pasqualina fuggendo da Gratiano il quai la vuole abbracciare, Burattino si pone in mezzo ; Pasqualina racconta come Gratiano gli ha tolto l’honore per forza ; Gratiano si scusa con dir’ d’esser stato tradito e che non puo parlare per all’hora, ma che ne fara vendetta. […] Polipo revient du siège de Nicosie, mais il a oublié Flavia. […] Il lui propose de faire une bonne affaire en achetant la courtisane, qu’il reviendra, avec bénéfice, à Fracassa, et d’éloigner de la sorte celle qui est un danger pour son fils. […] « Tu as acheté ma maîtresse sous couleur qu’elle fût ma sœur, dit-il à son valet, et j’ai acheté ma sœur croyant acheter une maîtresse. » Polipo revient donc à Flavia, qui lui a montré de la tendresse et du dévouement, et qui se trouve être la fille d’un voisin et ami de Polidoro.

251. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Secrétaire intime d’un ministre, il revient décoré et presque célèbre d’une mission heureusement remplie en Orient. […] Secrétaire d’un ministre à vingt-trois ans, il sauve l’Europe, qui n’en a jamais rien su, en disant deux mots à l’oreille d’Ibrahim-Pacha, et il revient de sa campagne d’Egypte, chamarré de croix, illuminé de gloire, pourvu d’un consulat de première classe, en attendant mieux. […] La mesure est légale, légitime même, si l’on veut : M. de la Rivonnière est ruiné, et le revenu qu’il croit à lui n’est que la moitié de la fortune de son fils. […] Il n’est pas coupable, mais il le paraît, ce qui revient à peu près au même.

252. (1761) Apologie de l’étude

Rien autre chose, sinon que la passion de l’étude, ainsi que toutes les autres, a ses instants d’humeur et de dégoût, comme ses moments de plaisir et d’enivrement ; que dans ce combat du plaisir et du dégoût, le plaisir est apparemment le plus fort, puisqu’en décriant les lettres on continue à ‘s’y livrer ; et que les Muses sont pour ceux qu’elles favorisent une maîtresse aimable et capricieuse, dont on se plaint quelquefois, et à laquelle on revient toujours. […] Semblable à un pendule qu’une force étrangère a tiré de son repos, il tend à y revenir sans cesse. […] Il m’est revenu dans l’esprit, après tant de lectures inutiles et fatigantes, qu’il y avait des livres qu’on appelle journaux, destinés à recueillir ce qu’il y a de meilleur dans les autres. […] C’est le propre des malheurs de ramener à la philosophie, comme le joueur qui a tout perdu revient à sa maîtresse ; cette philosophie, qui prétend nous dédommager de tout, m’ouvrait ses bras et me restait pour asile.

253. (1874) Premiers lundis. Tome II « Quinze ans de haute police sous Napoléon. Témoignages historiques, par M. Desmarest, chef de cette partie pendant tout le Consulat et l’Empire »

Georges se hâta de passer à Londres, et trois mois s’étaient à peine écoulés qu’il revenait en Bretagne pour diriger de là cette machine du 3 nivôse. […] Ne manquez pas, Fouché, d’exécuter mon ordre. » Il était minuit quand Fouché revint des Tuileries avec cette commission étrange : on envoya quérir Moreau ; M.  […] Après vingt-quatre heures de délibération, l’envoyé revint et consentit à ce que Napoléon fût informé.

254. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

Après une invocation au Père et à la Trinité, le poëte dit en strophes alcaïques enlacées avec art : « Le labeur du jour est passé218, l’heure du repos revenue ; et le sommeil à son tour détend les corps « harassés. […] » Consacré prêtre en Espagne, revenu en Italie pour se rapprocher de quelques amis, en commerce avec saint Jérôme et Augustin, Paulin passa seize années aux portes de la ville de Noie, dans une petite métairie, près du tombeau de l’ancien évêque saint Félix. […] C’est pour la fête du martyr, dont il occupait la chaire épiscopale, qu’il revint aux goûts poétiques de sa jeunesse, et exprima dans un des mètres d’Horace ces sentiments d’un ordre si nouveau.

255. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre V. Moralistes. — La Bruyère. »

» Si La Bruyère revenait au monde, il serait bien étonné de voir cette religion, dont les grands hommes de son siècle confessaient la beauté et l’excellence, traitée d’infâme, de ridicule, d’absurde. […] Nous avons entendu dire : « Si Bossuet et Pascal revenaient, ils n’écriraient plus comme cela. » C’est nous, prétend-on, qui sommes les écrivains en prose par excellence, et qui sommes bien plus habiles dans l’art d’arranger des mots.

256. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — X. Service de nuit. »

J’avais été envoyé pour faire revenir l’aide de camp du colonel, commandant supérieur des troupes de Saint-Louis. […] Et le colonel, commandant supérieur des troupes m’a chargé de lui dire de me suivre et de revenir en même temps que moi à Saint-Louis ».

257. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Au roi Charles X revient l’honneur d’avoir fait représenter Hernani. […] De me voir revenir. […] Je revenais alors de débuter à Madrid et je retournais à Zamora. […] Mais faites jouer ce rôle-là par un vieillard, soudain ma gaîté s’en va pour ne plus revenir. […] On peut bien l’obscurcir quelquefois, on y revient toujours.

258. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Une anecdote me revient. […] Ils reviennent donc vers le Roi et lui rendent compte du prodige. […] Il revenait d’une promenade, grisé de plein air. […] Revenons aux anciens. […] Revenons à Hippolyte mourant.

259. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Mme de Staël était revenue à Paris dès l’année 95, et elle ne cessa, jusqu’à son exil, d’y faire de fréquents et longs séjours. […] Mais nous reviendrons au long sur les rapports vrais de ces deux contemporains illustres. […] En un chapitre de l’Allemagne, elle y reviendra d’un ton de moralité et comme de reconnaissance qui pénètre, lorsque surtout on rapproche cette page des circonstances secrètes qui l’inspirent. […] On l’en vit revenir apaisée, assagie, pleine sans doute d’impétuosité généreuse jusqu’à son dernier jour, mais fixée à des opinions semi-aristocratiques, qu’elle n’avait, de 95 à 1802, aucunement professées. […] Necker, s’en revenir simplement à Saint-Ouen rue d’accepter en plein la Charte de Louis XVIII.

260. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Il revint une heure plus tard. […] Je revins bientôt avec le fusil. […] Revenons au livre de M.  […] Maxime s’élance et revient atterré au bout d’un quart d’heure. […] Puis il revient.

261. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

J’en reviens, dans cette histoire de la formation intellectuelle et morale de notre ami, à ce qui devait durer et prédominer. […] Ampère revint à Paris une quinzaine environ avant Mme Récamier. […] Sa déclaration était faite, l’aveu lui était échappé : il avait proféré, sans le vouloir, la parole sacrée sur laquelle il ne revint pas. […] Je reviens au succès de notre jeune voyageur à la cour poétique de Weimar, succès rapide et complet, tout à fait justifié dans sa personne. […] Je ne suis pas, vous le savez, grand formaliste, mais le jour de l’an est pour moi une époque que je ne vois pas revenir sans attendrissement.

262. (1904) Zangwill pp. 7-90

Or l’idée moderne, la méthode moderne revient essentiellement à ceci : étant donnée une œuvre, étant donné un texte, comment le connaissons-nous ; commençons par ne point saisir le texte ; surtout gardons-nous bien de porter la main sur le texte ; et d’y jeter les yeux ; cela, c’est la fin ; si jamais on y arrive ; commençons par le commencement, ou plutôt, car il faut être complet, commençons par le commencement du commencement ; le commencement du commencement, c’est, dans l’immense, dans la mouvante, dans l’universelle, dans la totale réalité très exactement le point de connaissance ayant quelque rapport au texte qui est le plus éloigné du texte ; que si même on peut commencer par un point de connaissance totalement étranger au texte, absolument incommunicable, pour de là passer par le chemin le plus long possible au point de connaissance ayant quelque rapport au texte qui est le plus éloigné du texte, alors nous obtenons le couronnement même de la méthode scientifique, nous fabriquons un chef-d’œuvre de l’esprit moderne ; et tant plus le point de départ du commencement du commencement du travail sera éloigné, si possible étranger, tant plus l’acheminement sera venu de loin, et bizarre ; — de tant plus nous serons des scientifiques, des historiens, et des savants modernes. […] J’en ai fait un l’an dernier par la mer et le Rhin, pour revenir par la Champagne. »… Pour revenir est admirable, dans sa docte naïveté. […] « Je revenais par ce chemin au commencement de l’automne, et je me rappelle combien le changement de paysage me frappa. […]   Telle est non point la caricature et la contrefaçon des méthodes historiques modernes, mais leur mode même, leur schème, l’arrière-pensée de ceux qui les ont introduites avant nous, de ceux qui les pratiquent parmi nous ; assistez à une soutenance de thèse historique ; la plupart des reproches que le jury adresse au candidat reviennent à ceci : que le candidat n’a point épuisé toute l’indéfinité, toute l’infinité du détail ; je ne dis pas que les membres du jury l’épuisent dans leurs propres travaux ; mais ce que je dis, si vous assistez à une soutenance de thèse et que vous entendiez bien, que vous interprétiez les critiques du jury, c’est qu’elles reviennent généralement à cela ; il faut avoir épuisé l’infinité du détail pour arriver au sujet ; et dans le sujet même il faut, par multipartition, avoir épuisé une infinité d’infinité du détail ; la manière dont on traite le sujet, quand on est parvenu au sujet, revient en effet à le traiter lui-même comme un chemin, comme un parcours, comme un lieu de passage indéfiniment détaillé, comme un circuit lui-même, à faire en définitive comme s’il n’était pas le sujet, à faire qu’il ne soit pas le sujet. […] On revient toujours aux formules de ce grand penseur, quand on veut se rendre compte des relations de Dieu et de l’univers, de l’individu avec l’infini.

263. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « III »

Le vœu des nations est, en définitive, le seul critérium légitime, celui auquel il faut toujours en revenir. […] Peut-être, après bien des tâtonnements infructueux, reviendra-t-on à nos modestes solutions empiriques.

264. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

En nous représentant ainsi les choses, nous ne faisons que revenir à la conviction naïve du sens commun. […] Revenons maintenant à notre hypothèse, et montrons comment l’affection doit, à un moment déterminé, surgir de l’image. […] Cela revient toujours à dire que ma perception est en dehors de mon corps, et mon affection au contraire dans mon corps. […] Mais cela ne revient-il pas à dire que l’affection possède, dès le début, une certaine détermination extensive ? […] Nous allons revenir, pour simplifier l’exposition, au sens de la vue que nous avions choisi comme exemple.

265. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les poëtes français. Recueil des chefs-d’œuvre de la poésie française »

Hippolyte Babou est celui dont le nom revient le plus souvent, et qui a le plus donné : je lui ai, en ce qui me concerne, une obligation si entière pour la manière indulgente dont il a parlé du poëte en moi, que je pourrais être embarrassé désormais à qualifier et à définir sa critique. […] Cinq ou six chasseurs s’en reviennent un soir d’automne, après une journée de bonne chasse, et se rencontrent : l’un est fermier, l’autre marguillier, l’autre maire, un quatrième magister, se piquant de science et même d’astronomie. […] J’en suis revenu à ce qui fut longtemps mes amours.

266. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVI. De l’éloquence et de la philosophie des Anglais » pp. 324-337

Les orateurs anglais, de même que Cicéron, répètent souvent des idées déjà comprises ; ils reviennent quelquefois aux mouvements, aux effets d’éloquence déjà employés avec succès. En France, on est si jaloux de l’admiration qu’on accorde, que si l’orateur voulait l’obtenir deux fois pour le même sentiment, pour le même bonheur d’expression, l’auditoire lui reprocherait une confiance orgueilleuse, lui refuserait un second aveu de son talent, et reviendrait presque sur le premier. […] L’importance politique de chaque citoyen est telle dans un pays libre, qu’il attache plus de prix à ce qui lui revient du bonheur public, qu’à tous les avantages particuliers qui ne serviraient pas à la force commune.

267. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Camille Desmoulins » pp. 31-44

Camille Desmoulins n’en reviendra pas. […] Mais le talent de Camille Desmoulins, avec le décompte du temps qui l’a déteint, fait grimacer et détruit, du moins en partie, n’est pas, quand on y revient, ce qu’on croyait sans y revenir, et il faut beaucoup en rabattre.

268. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « L’abbé Galiani »

III Et de fait et en réalité, c’est l’Arlequin des Salons de Madame Geoffrin ou de Madame d’Épinay qui revient le plus et domine le plus dans ces lettres, et ce n’est pas moi qui l’y invente et qui veut l’y faire voir ! […] La pensée qu’il pouvait ne jamais revenir à Paris fut la paille de son joyeux acier… Comme l’esprit épistolaire d’un homme est toujours l’esprit de sa conversation qu’il a transporté dans ses lettres, Galiani a transporté son esprit de conversation dans les siennes, et comme la qualité supérieure de cet esprit était la verve, le mouvement, le piétinement fécond sur une idée qui en fait sortir tous les aperçus, il a cette verve qui s’allume à la moindre question ou à la moindre suggestion et qui développe l’idée, mais en la creusant toujours. […] L’aurait-il écrite s’il fût revenu à Paris ?

269. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

L’honneur en revient à M.  […] Mais, à mon sens, vous pouvez vous flatter qu’elle ne reviendra pas de ce coup-là ; pauvre petite femme ! […] Alors vous reviendrez. — Obéir à un morceau de papier ! […] Ensuite, parce que j’étais tourmenté du souvenir de cette première vue, je suis revenu malgré moi à ce point visible, mais incertain. […] Il ne revint à Paris qu’après le coup d’État qu’il ne m’appartient pas de caractériser aujourd’hui.

270. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Aujourd’hui à deux heures, par le plus beau temps, Goethe est revenu de Dornbourg. […] Il revient à Schiller. […] Elle a continué dans la chambre à nourrir sa famille, et, rendue à la liberté, elle est revenue d’elle-même avec ses petits. […] Le nom d’Ottilie revenait souvent sur ses lèvres ; il la pria de s’asseoir auprès de lui et tint longtemps sa main dans les siennes. […] Il revient à Weimar, et il y trouve l’aisance et la puissance dans l’attachement du grand-duc.

271. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

J’en prendrai occasion à mon tour de redire quelque chose et sur Malherbe lui-même10 et sur ses disciples Racan et Maynard, dont les beaux vers lui reviennent à bon droit, car ils ne se seraient pas faits sans lui. […] D’Aix il accompagna quelque temps son prince à Marseille, puis revint avec lui à Aix. […] Ces propos de haute saveur lui revenaient fort ; on trouverait même trace de lui et de ses gaietés dans les poètes provençaux de cette date. […] Après la mort d’un de ses fils, il trouva pourtant le moyen d’aller à Rome pour se distraire et se consoler, de s’y attacher à M. de Noailles, l’ambassadeur, et d’y rester environ deux ans ; mais il fallut revenir et reprendre la vie de province avec les ennuis du métier. […] La pièce vraiment belle de Maynard, celle qui mérite de conserver son nom, est une autre ode de lui : « Alcippe, reviens dans nos bois… » Le thème y est à peu près le même que celui de Racan ; il s’agit d’arracher à la Cour un ami que la fortune y abandonne et qui s’acharne à une ingrate poursuite.

272. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

L’auteur des prétendus mémoires fait dire à la marquise « qu’elle a passé trente ans avec M. de Créqui dans un bonheur sans mélange. » Elle revient en plus d’un endroit, d’un air d’attendrissement, sur « tant d’années » d’un parfait bonheur qu’elle lui a dû. […] Elle compatit aux pauvres gens et aux affligés que frappe cette banqueroute ; elle en donne les détails et les chiffres précis à Senac de Meilhan, son correspondant très cher ; et, voyant la superbe famille de Rohan si humiliée et par cette catastrophe et par d’autres accidents qui bientôt suivirent, elle en revient aux réflexions morales ; elle se félicite au moins de ne tenir à rien, et de ne point prêter à ces revers subits du faste et à ces chutes de l’ambition ; elle se rejette dans la médiocrité, comme disait La Bruyère : Ô obscurité, s’écrie-t-elle avec un sentiment moral qui ferait honneur à toutes les conditions, tu es la sauvegarde du repos, et par conséquent du bonheur ; car qui peut dire ce qu’on serait en voulant des places, des biens, des titres, des rangs au-dessus des autres, où on arrive par l’intrigue, où on se maintient par la bassesse, et dont on sort avec confusion souvent, et toujours avec douleur ? […] Il y avait donc entre eux un abîme de ce côté-là, du côté du rivage de l’Éternité ; mais de ce côté-ci du monde, et dans l’observation de la société, ils pensaient presque en tout de même ; ils avaient la même expérience définitive, le même désabusement, avec cette différence que Mme de Créqui était revenue de tout intérêt actif dans la vie, et que M. de Meilhan était désabusé, mais non détaché ; elle lui en fait quelquefois la guerre. […] Je m’ennuie si fort à Paris, que vous devriez y revenir, ne fut-ce que pour empêcher ma démence. » Mais il ne sera pas indifférent de bien définir, en présence de Mme de Créqui, le confident qu’elle s’est donné dans ses jugements des hommes et des choses. J’ai déjà parlé de M. de Meilhan et ici même69 : je tâcherai d’y revenir sans trop me répéter, et de repasser sur les mêmes traits avec une couleur presque neuve, ou du moins empruntée à d’anciens écrits qui sont comme nouveaux.

273. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Il s’agit d’indiquer que Mme Swetchine, retirée alors dans ses terres, manqua Mme de Staël au passage de cette dernière en Russie (1811), et que lorsqu’elle revint à Pétersbourg, elle ne l’y trouva plus ; voici comment M. de Falloux s’exprime : « Lorsque Mme Swetchine fut ramenée au centre habituelde son existence, elle n’y trouva plus qu’un brillant souvenir. » Il y en a, dit Pascal, qui masquent la nature : ils ne disent point Paris, mais la capitale du royaume ; ils ne disent point Pétersbourg, mais le centre habituel de l’existence. […] Sa conversion n’a été qu’un redressement d’orthodoxie, après un examen historique des plus complets, auquel elle s’était livrée pendant des mois de retraite : elle est revenue de Photius à saint Pierre. […] On y vient, on y revient avec plaisir ; on y cause de tout, on y cause en commun de certains sujets qui intéressent tout le monde, et on le fait avec de légères discordances et dissonances dans lesquelles une maîtresse habile de maison, comme un chef d’orchestre sans archet et sans geste, maintient ou rétablit vite l’harmonie. […] ce n’est pas là un salon ; les quelques jeunes femmes qui y passent, avant de se rendre au bal sous l’aile de maris exemplaires, et qui viennent y recevoir comme une absolution provisoire qui, plus tard, opérera, ne me font pas illusion : c’est un cercle religieux, une succursale de l’église, — donnez-lui le nom que vous voudrez, — un vestibule du Paradis, « une maison de charité à l’usage des gens du monde. » Salon français de tous les temps, d’où me reviennent en souvenir tant d’Ombres riantes, tant de blondes têtes et de fronts graves ou de fronts inspirés, passant tour à tour et mariant ensemble tout ce qui est permis à l’humaine sagesse pour charmer les heures, enjouement, audace, raison et folie, — je ne te reconnais plus ! […] Il semble apparemment plus difficile et plus beau de revenir de près que de loin.

274. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Elle ne reviendra qu’au mois de février. » C’est Mme du Deffand qui parle, et à quelque temps de là elle écrit : « J’ai reçu d’Arles une lettre de l’ldole, qui y est établie. […] Elle était avec sa belle-fille à Spa, vers le temps de la prise de la Bastille ; là se trouvaient aussi les Laval, les Luxembourg, les Montmorency, la fleur de la noblesse, « dansant de tout leur cœur pendant que l’on pillait et bridait leurs châteaux en France. » Ces dames de Boufflers, au lieu de rentrer à Paris, passèrent en Angleterre, et y vivant sur le pied d’émigrées, elles y demeurèrent jusque bien après le mois de juin 1791, après l’arrestation de Louis XVI à Varennes : elles ne revinrent probablement que sous la menace pressante des confiscations. […] Sa belle-fille n’est revenue que depuis trois jours. » « (Août ou septembre). […] 3° Vivant de son revenu. 4° Avant et en 1789, son revenu était, charges déduites, de 41,200 livres ; aujourd’hui net, 28,604 livres.

275. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Mais il se ravisa : « On m’apprit, dit-il, que j’avais tort, le commandement du roi s’y interposant aussi. » Il se mit en route pour revenir, avant d’avoir reçu la lettre et l’injonction du roi datée du 25 novembre 1581. […] A l’occasion de quoi mon intention est, et vous ordonne et enjoins bien expressément que, sans délai ni excuse, reveniez, au plus tôt que la présente vous sera rendue, faire le dû et service de la charge où vous avez été si légitimement appelé. […] Sur quoi, espérant que vous soyez ici demain au plus tard, je vous baise très humblement les mains, etc. » Le maréchal revint et soulagea Montaigne de son fardeau. […] il est bien vrai qu’il n’y est pas revenu. Il faut être un Malesherbes par le cœur pour s’en revenir exprès de Lausanne après le 10 août, sans nécessité, tout exprès pour offrir ses bons offices à Louis XVI et mettre sa propre tête au hasard du couteau.

276. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

Les Anciens avaient Andromaque, Hector, Priam, les malheurs d’Hécube : ils y revenaient sans cesse ; leurs oreilles n’avaient jamais assez d’attente et de silence, leurs yeux n’avaient jamais assez de regards ni de larmes pour ces tragédies funestes. […] Telle est depuis longtemps mon idée sommaire de Marie-Antoinette, et rien de ce que je viens de lire dans les volumes nouveaux ne m’en a fait revenir et n’a réfuté en moi un jugement qui n’a rien d’ailleurs d’une accusation ni d’un reproche. […] je suis reçue à Strasbourg comme si j’étais une enfant aimée, qui revient chez elle. […] Au fond, ce n’est point une méchante femme, c’est plutôt une bonne personne, et l’on m’a dit qu’elle fait beaucoup de bien à de pauvres gens. » Et trois ans après, lors du renvoi de Mme Du Barry, et quand Louis XVI, à son avènement, juge à propos de la faire renfermer quelque temps dans une abbaye pour la mettre hors d’état de commettre quelque indiscrétion, le même mot revient sous la plume de Marie-Antoinette, et avec la nuance précise : « Il paraît que si c’était une vilaine femme, ce n’était pas au fond une femme méchante. » Mais le plus beau mot de Marie-Antoinette au sujet de cette favorite, et qui ne se lit pas dans une lettre, est celui qui courut dans le temps même et qui se trouve partout cité. […] Y voir plus serait trop et pourrait véritablement étonner les contemporains s’ils revenaient au monde ; mais on n’y saurait voir moins sans injustice. — Le terrible moment, le moment de régner arrive ; quoique bien prévu, il la surprit, il l’étonna et la remplit presque d’épouvante.

277. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

En lisant Mme Valmore, ces pensées nous revenaient. […] , Je recommande encore la pièce A mes Enfants, le Présage, et tant de romances rêveuses ou délirantes, qui reviennent, aux heures de mélancolie, comme des chansons de saule. […] Mais Mme Valmore poëte, celle qui perce et qui déchire, c’est à elle qu’on reviendra ; qui l’a lue une fois, la relira souvent. […] Elle ne revint à Paris qu’en 1813, où elle débuta à l’Odéon, le 27 mars, dans le rôle de Claudine de la pièce de Pigault-Lebrun, la Claudine de Florian ; elle avait beaucoup de succès, notamment dans le rôle de Clary du Déserteur, drame de Mercier ; dans le rôle d’Eulalie, de Misanthropie et Repentir : elle faisait verser d’abondantes larmes. […] J’y suis en effet revenu dans l’article sur Jocelyn (voir précédemment, tome I, p. 332).

278. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

pour lui dire adieu, pour lui reprocher sa dureté, pour la voir encore, et partir en la maudissant… Mais Ernest ne part qu’au matin, ivre de bonheur, bénissant sa belle cousine, oubliant une montre qui ne quittera plus cette chambre sacrée, ayant promis, par un inviolable vœu, de ne revenir qu’après un an révolu, et de bien travailler durant ce temps à son progrès dans le monde. […] » Ernest est parfait, mais il n’est pas idéal ; mais, après cette amère et religieuse douleur d’une amie morte pour lui, morte entre ses bras, après cette sanctifiante agonie au sortir de laquelle l’amant serait allé autrefois se jeter dans un cloître et prier éternellement pour l’âme de l’amante, lui, il rentre par degrés dans le monde ; il trouve moyen, avec le temps, d’obéir à l’ordre de celle qui est revenue à l’aimer comme une mère ; il finit par se marier et par être raisonnablement heureux. […] Caliste, qui avait gardé ce nom pour avoir débuté au théâtre dans The fair Penitent, vendue par une mère cupide à un lord, était promptement revenue au repentir, et à une vie aussi relevée par les talents et la grâce qu’irréprochable par la décence. […] Je suis revenu plus tard et avec plus de détail sur madame de Charrière, dans un article à part qu’on peut lire ci-après (dans le présent volume), ainsi que sur mademoiselle Aïssé (voir Derniers Portraits, ou au tome III des Portraits littéraires, édit. de 1864). […] Nous avons été assez heureux depuis pour démontrer positivement le contraire, et de la seule manière dont ces sortes de choses peuvent se démontrer, par l’alibi (voir Derniers Portraits ou, ce qui revient au même, le tome III des Portraits littéraires, édit. de 1864).

279. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

l’humanité vieillie, dégoûtée des agitations stériles, excédée de sa propre civilisation, déserter les villes, revenir à la vie naturelle et employer à en bien jouir toutes les ressources d’esprit, toute la délicatesse et la sensibilité acquises par d’innombrables siècles de culture. […] Nos faunes les plus Convaincus ont des rechutes, reviennent à Paris, se laissent reprendre à l’attrait malfaisant des plaisirs artificiels, des curiosités inutiles, de la vie inquiète. […] La bergerie s’appuie perpendiculairement à cette chambre noire et se prolonge dans la direction du carrefour, terminée par un fournil aux crevasses lierrues… La barrière à claires-voies, qui donne accès du chemin dans la cour, est chargée d’un pavé massif à son extrémité fixe, de telle sorte que le battant, facilement poussé de dehors, revient tout seul à son point de départ par l’effet du contre-poids. […] Puis il part pour le pôle Nord et revient au bout de quelques années ; mais, dans l’intervalle, Hélène, qui a grandi, est devenue une mondaine enragée, une amazone excentrique. […] Dès lors le malheur s’abat sur la ferme ; les récoltes manquent, les bestiaux meurent, et Buré chaque nuit voit revenir le pendu… Il vient enfin supplier Fleuse de le délivrer ; il se traîne au bord de la fosse où le berger vient justement de prendre un loup… Le loup saute par-dessus Buré fou de terreur et qui se croit changé en « garou »… Le malheureux s’adresse à Marin Langevin, un marchand de miel, un gars qui en sait long, et lui promet la main de sa fille s’il « conjure le sort ».

280. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

Ce dernier conseil revenait chaque fois plus pressant, plus impérieux, et la pauvre enfant ne pouvait plus tenir en place où elle était. […] Sans pouvoir me permettre ici d’aborder une question qui est tout entière du ressort de la physiologie et de la science, je dirai seulement que le seul fait d’avoir entendu des voix et de les entendre habituellement, de se figurer que les pensées nées du dedans, et qui reviennent sous cette forme, sont des suggestions extérieures ou supérieures, est un fait désormais bien constaté dans la science, un fait très rare assurément, très exceptionnel, mais qui ne constitue nullement miracle, et qui non plus ne constitue pas nécessairement folie : c’est le fait de l’hallucination proprement dite. […] Son idée fixe se projetait hors d’elle comme une prière ardente et lui revenait en écho : c’était la voix désormais qui lui parlait comme celle d’un être supérieur, d’un être distinct d’elle-même, et que, dans sa simplicité et sa modestie, elle adorait. […] Elle avait à la main, selon l’usage du temps, quand elle ne tenait pas l’étendard ou l’épée, un bâton, et ce bâton lui servait à plusieurs fins, et aussi à jurer : « Par mon martin, disait-elle des bourgeois d’Orléans, je leur ferai mener des vivres. » Ce martin, qui revient sans cesse dans sa bouche chez son historien le mieux informé, c’était son martin-bâton, son jurement habituel. […] » Ils revenaient sans cesse sur cette sotte question ; elle y coupa court en leur disant que l’archange, quand il lui apparaissait, « était en l’habit et la forme d’un très vrai prud’homme », — d’un parfait honnête homme.

281. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Flourens ne s’est attaché dans Fontenelle qu’au grand esprit, nous reviendrons plus en arrière, et nous verrons ce qu’était d’abord tout l’homme. […] Pour quelques traits vraiment jolis et fins qu’on rencontre dans ces lettres, on en trouverait par centaines qui seraient du pur Mascarille ; et par exemple : « L’amour est le revenu de la beauté, et qui voit la beauté sans amour lui retient son revenu d’une manière qui crie vengeance. » Après cet amour qui est proprement le revenu et la rente de la beauté, vient tout un détail de l’acquittement en style de notaire : « Vous savez que, quand on paye, on est bien aise d’en tirer quittance ou de prendre acte comme on a payé. […] Le portrait offert en passant par La Bruyère nous a mené loin, et nous avons à revenir pour dégager du milieu des fadeurs et des formes frivoles l’esprit sérieux et le philosophe.

282. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Jamais les Condorcet en politique, les Saint-Lambert en morale, les Condillac en analyse philosophique, n’ont rencontré un jouteur plus serré et plus démontant ; car notez que, pour les réfuter, il ne dédaigne pas de prendre un peu de leur méthode ; il mêle un peu d’algèbre à son raisonnement, il a des formules pour revenir au ciel, et il se sert des mots exacts avant tout, il les presse et les exprime pour leur faire rendre tout l’esprit qu’ils recèlent et toute la pensée. […] Semblable à une eau qui se perd dans le sable si elle n’est arrêtée par une digue, l’homme n’est fort qu’autant qu’il est retenu. » Se croyant déjà revenu à Lycurgue ou à Moïse, il proposait sérieusement à l’administration de faire faire des éditions châtiées et exemplaires des auteurs célèbres : on extrairait de chaque auteur ce qui est grave, sérieux, élevé, noblement touchant, et on supprimerait le reste : « Tout ce qui serait de l’écrivain social serait conservé, tout ce qui serait de l’homme serait supprimé ; et si je ne pouvais faire le triage, dit-il, je n’hésiterais pas à tout sacrifier. » Telle est la pensée que M. de Bonald énonçait en 1796, qu’il continuera d’énoncer et d’exprimer pendant toute la Restauration, et qu’il voudra réaliser tant bien que mal en 1827, comme président du dernier Comité de censure : peut-on s’étonner de la suite d’après le début ? […] Pour revenir au monde des idées et au ciel métaphysique de Malebranche, M. de Bonald nous fait repasser par la filière des mots et par la mécanique du langage de Condillac. […] Comme dans un siège méthodique, il chasse et repousse l’ennemi le long des tranchées mêmes que celui-ci a pratiquées, et c’est ainsi qu’il revient par une voie étroite à une philosophie élevée. […] Opposé en tout à la tendance de la société moderne, à tout ce qui centralise et mobilise, il comprenait dans un même anathème les grandes capitales, le télégraphe, le crédit et tous ses moyens ; il aurait voulu en revenir à la monnaie de fer de Sparte.

283. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

Lorsqu’elle revient à la Cour en 1643, Mme de Motteville nous décrit les divers personnages en scène, les divers intérêts des cabales ; elle se montre à nous au milieu de ces grandes intrigues comme un simple spectateur placé dans un coin de la meilleure loge et parfaitement désintéressé : Ainsi je ne songeais pour lors qu’à me divertir de tout ce que je voyais, comme d’une belle comédie qui se jouait devant mes yeux, où je n’avais nul intérêt. — Les cabinets des rois, dit-elle encore, sont des théâtres où se jouent continuellement des pièces qui occupent tout le monde ; il y en a qui sont simplement comiques ; il y en a aussi de tragiques dont les plus grands événements sont toujours causés par des bagatelles. […] Tous les anciens amis de la reine sont revenus après une disgrâce plus ou moins longue : chacun d’eux compte sur la même faveur qu’autrefois, et ils ne s’aperçoivent pas d’abord que cette reine, qu’ils avaient laissée opprimée par Richelieu, sans enfants et encore Espagnole de cœur, est devenue mère, toute aux intérêts du jeune roi, et une reine toute française. […] Ce vœu de vie privée revient bien des fois chez elle, et avec un accent de sincérité qui ne se peut méconnaître. […] Daunou, revenu et trop revenu des révolutions, qui disait cela dans l’intimité.

284. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Dans un exemple moindre, mais qui me frappe aussi, madame Desbordes-Valmore, jeune fille, va en Amérique, d’où, après des pertes et d’affreux malheurs, elle revient élégiaque éplorée, tandis que Désaugiers revient de là même, après des malheurs pareils, le plus gai des chansonniers du Caveau. […] Diderot va la voir, en est enchanté, il ne sera heureux que là : il revient en ville, l’été se passe sans qu’il retourne là-bas. […] Quand il revint, il y avait eu le 14 juillet et le 5 octobre. […] Quoi qu’il en soit, lorsqu’on essayait de sonder ses vrais motifs et qu’on lui parlait de revenir à Paris, il demandait toujours si l’abbé de Cournand y était encore. […] Enfin dans d’autres épigrammes suivantes, il se montre tout à fait apaisé, et le nom de Delille ne revient plus qu’en éloges.

285. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

. — Vous êtes loin de compte, répartit le roi, car cette voiture, telle que vous la voyez, me revient à 30 000 francs… Les voleries dans ma maison sont énormes, mais il est impossible de les faire cesser ». — En effet, les grands tirent à eux comme les petits, soit en argent, soit en nature, soit en services. […] Revient-on à se plaire, on se reprend avec autant de vivacité que si c’était la première fois qu’on s’engageât ensemble. […] À Paris, dans l’allée de gauche du Palais-Royal, toutes les après-midi, « la bonne compagnie en fort grande parure se réunit sous les grands arbres » ; le soir, « au sortir de l’Opéra, à huit heures et demie, on y revient, et l’on y reste souvent jusqu’à deux heures du matin ». […] À Monchoix276, chez le comte de Bédée, oncle de Chateaubriand, « on faisait de la musique, on dansait, on chassait, on était en liesse du matin jusqu’au soir, on mangeait son fonds et son revenu ». […] Un d’eux qui revenait de Versailles dans son château parlait à sa femme de tout ce qui l’avait occupé ; chez nous, il lui dit un mot sur ses dessins à l’aquarelle, ou reste silencieux, pensif, à rêver à ce qu’il vient d’entendre au parlement.

286. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Il revint à Avignon à l’âge de vingt ans, avec son frère Gérard ; le pape Jean XXII y régnait au milieu d’une cour corrompue, où le scandale des mœurs était si commun, qu’il n’offensait plus personne. […] Ce séjour fut charmant, mais court ; l’image de Laure, un moment oubliée, le rappelait comme à son insu à Avignon ; il y revint ; en la retrouvant, il retrouva son délire. […] Son génie était dans son amour : dès qu’il s’en séparait, il n’était plus qu’un érudit ; dès qu’il y revenait, il était le plus harmonieux et le plus tendre des poètes. […] Ainsi devait finir cet empire fantastique, s’écria Pétrarque, revenu lui-même de son illusion d’un moment. […] Vers qui regardes-tu en arrière dans ce temps qui ne peut plus revenir ?

287. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

J’attrapai ainsi la fin de novembre, époque à laquelle l’ambassadeur quitta Fontainebleau et revint habiter Paris. […] Il revient au gîte, comme s’il ne l’avait pas quitté. […] Aller, rester, revenir, ce fut l’affaire de douze jours. […] Ils occupèrent ce poste pendant plusieurs lieues, et ne revinrent à Florence qu’après avoir laissé la jeune femme à l’abri de tout péril. […] J’étais revenu à des dépenses raisonnables.” » Lamartine.

288. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Et puis certaines expressions, qui reviennent souvent, et qui semblent si dépaysées dans ce milieu de héros et de dieux, m’ont touché par leur si évidente honnêteté bourgeoise… Sieglinde dit à Siegmund « laisse-moi contempler, cher époux ! […] La tonalité fondamentale s’efface vers le milieu, fait place à la sensible qui forme le sommet du dessin mélodique (la tonique n’y revient que comme note de passage) et ne paraît que lorsque la mélodie descend de la dominante à la sous-dominante pour finir à la médiante. […] Puis, il revient encore une fois seul, mais déjà modifié dans sa tonalité et sa modalité ; la troisième mesure, le sommet de la phrase avec sa sensible si puissamment affirmée, et la chute en majeur sur la dominante ; cependant la sous-dominante est devenue une médiante mineure, et c’est la tonique qui revient terminer, précédée de la sensible réduite en ce moment à un rôle accessoire. La mélodie est à la fois rendue plus étroite par la conclusion sur la tonique, et plus humainement expressive par sa modalité mineure et la répétition à la 4e mesure de la forme mouvementée et inégale de la partie ascendante de la troisième. — Puis les sonorités confuses reviennent, voilant à demi le motif ressorti une quatrième fois de l’abîme mystique. […] Il est remarquable que ce motif ne revienne plus p. 213 ; — et le motif 27 qui rappelle Ortrude.

289. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

Mais, dès qu’on désire se représenter le nombre, et non plus seulement des chiffres ou des mots, force est bien de revenir à une image étendue. […] Mais cela ne revient-il pas à reconnaître que l’idée même du nombre deux, ou plus généralement d’un nombre quelconque, renferme celle d’une juxtaposition dans l’espace ? […] On a vu des animaux revenir presque en ligne droite à leur ancienne demeure, parcourant, sur une longueur qui peut atteindre plusieurs centaines de kilomètres, un chemin qu’ils ne connaissaient pas encore. […] Cela revient à dire que l’espace n’est pas aussi homogène pour l’animal que pour nous, et que les déterminations de l’espace, ou directions, ne revêtent point pour lui une forme purement géométrique. […] Il est vrai que lorsqu’on fait du temps un milieu homogène où les états de conscience paraissent se dérouler, on se le donne par là même tout d’un coup, ce qui revient à dire qu’on le soustrait à la durée.

290. (1893) Alfred de Musset

Stendhal est revenu avec insistance sur ces idées. […] Le poète y est revenu plus d’une fois, et cela lui a toujours porté bonheur. […] La raison est pleinement revenue et le calme est parfait. […] J’aurais dû te l’écrire et ne pas revenir. […] Vous passiez le matin sur le seuil de la porte, la nuit j’y revenais pleurer.

291. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre troisième. La volonté libre »

Nous voilà évidemment revenus à la liberté d’indifférence. […] Au reste, pourvu qu’on ne cesse jamais de revenir ainsi à la réalité et à l’actualité, la considération du possible et de l’impossible peut avoir sa valeur comme considération auxiliaire. […] — On nous répondra que l’éclipse « revient », tandis qu’un acte concret et profond ne revient pas. Mais la même éclipse ne revient pas plus que la même action ; jamais le soleil, ni la terre, ni la lune ne sont aux mêmes points de l’espace dans des conditions absolument identiques. […] A ce point de vue encore, l’indépendance est désirable, puisque le centre de nos désirs est précisément notre moi et qu’ils finissent toujours par revenir à ce centre.

292. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Il en revenait encore de temps en temps à ses regrets et à son projet de ligue philosophique universelle : « Si les véritables gens de lettres étaient unis, ils donneraient des lois à tous les êtres qui veulent penser. » Mais il sentait bien qu’il n’avait pas de prise et qu’il ne l’entraînerait pas. […] Ou, ce qui revient à peu près au même, Duclos y avait le ton trop despotique. […] On est revenu depuis quelque temps de beaucoup de préjugés, mais on s’accoutume trop à regarder comme tels tout ce qui est admis. […] Il avait de la fortune, il jouissait, tant en pensions qu’en rentes, de 30 000 livres de revenu, dit Petitot.

293. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

On lit même dans l’historien littéraire de la Bourgogne, Papillon, une anecdote presque gaillarde que je donne pour ce qu’elle vaut, mais qui concorde pour le fond avec le témoignage de Saumaise : Jeannin (selon un recueil manuscrit cité par Papillon) étant revenu à Bourges pour la seconde fois et étant allé avec ses anciens camarades voir le sieur Cujas incognito, Cujas ne laissa pas de le reconnaître, quelque soin qu’il prît de se déguiser, et, s’étant jeté à son cou, il commença à lui dire : « Est-ce toi, Romorantin ?  […] C’est sur un esprit d’une trempe si inégale que le président Jeannin avait à agir, à opérer avec lenteur, à revenir vingt fois à la charge pour saisir les bons instants. […] Le président Jeannin, envoyé à Madrid sur la fin de l’année 1590, revint en août 1591 avec une réponse précise à cette question jusque-là douteuse. […] Le président revint sans avoir rien gagné, comme on peut croire, sur l’esprit du roi d’Espagne ni de ses conseillers, et il ne réussit pas davantage à convaincre le duc de Mayenne qu’il n’y avait de salut et d’issue désormais qu’en s’entendant tôt ou tard avec Henri IV.

294. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Parti le 17 mai de Versailles, il s’en revient à la fin de septembre sans avoir rencontré ni fait naître d’occasion, sans avoir rien tenté de mémorable. […] L’attaque, même différée d’un jour, coûta cher pourtant : l’ouvrage à cornes fut pris d’abord, puis perdu ; il fallut revenir à la charge le lendemain. […] Le roi, son siège fait et son coup de foudre lancé, revient à temps, cette année 1691, pour entendre la messe le dimanche de Pâques 15 avril à Compïègne, et pour faire ses Pâques le dimanche d’après à Versailles. […] Racine se figure que le soleil n’a jamais éclairé un égal rassemblement de troupes ni un pareil ordre de bataille ; mais, en fait de revues, écoutez ceux qui en reviennent, la dernière est toujours la plus belle.

295. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

Je ne reviendrai pas sur ce qui vient d’être si bien dit, et dit de telle manière, avec tant de pénétration d’analyse, tant de bonheur d’expression et de vigueur d’accent, que l’étude semble faite : j’allais oublier que mon devancier, en me comblant, m’a interdit à son égard l’éloge. […] S’ils sont aimés du public, et si la faveur, si l’estime ou l’admiration les récompense, il importe de plus que cette récompense, sous ses différentes formes, aille bien à eux, leur revienne en une juste proportion et ne reste point en chemin : c’est à cette condition que leur talent vieillissant ne sera point condamné à une production toujours recommençante, et que là aussi, au bout de la carrière, il y aura la dignité d’un certain loisir. […] La poésie, revenons à la poésie ! […] … et revenez avant qu’il soit trop tard… […] Cherchez l’or, cherchez l’or !

296. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV, publiés par MM. L. Dussieux et E. Soulié. » pp. 369-384

Sur le cérémonial de Louis XV, sur les questions de révérences, de tabourets, de pliants, de carreaux, qui reviennent à tous moments, — sur le droit que prétendent avoir les ducs d’avoir à l’église des carreaux, non pas devant le roi, mais derrière ; — sur tout cela, je passe. […] Ce court intervalle ayant obligé ceux qui étaient venus de rester à Paris, la consommation extraordinaire que cette affluence attira dans la ville augmenta considérablement les revenus de Sa Majesté par rapport aux entrées, et lorsque la fête eut été donnée avec toute la magnificence possible et que le roi voulut savoir ce qu’elle lui coûtait, M.  […] Le roi Auguste tira un ducat de sa poche et lui dit ; « Si vous aviez ce ducat, vous le garderiez, et moi, je le donne ; il me revient cinq ou six cents fois dans ma poche. » Mais le véritable intérêt des mémoires du duc de Luynes est moins dans les histoires d’autrefois, qui en relèvent de temps en temps l’apparente monotonie, que dans ces faits mêmes du jour, minutieusement enregistrés, et à travers lesquels il faut savoir lire. […] Vers ce même temps (1739), il est curieux de voit comment le marquis d’Argenson, dans son journal, s’exalte en espérances, d’après les on dit qui transpirent et qui lui reviennent des cabinets ; il se flatte que le cardinal, dont on se moque dans les soupers de La Muette ou de Bagatelle, est à bout de crédit ; que le roi est las de lui, qu’il en est saoul et le déteste ; qu’il n’y a plus qu’un peu de honte qui le retienne encore à la veille de le renvoyer78 ; mais bientôt il s’aperçoit que c’est aller trop vite en besogne ; que M. 

297. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

L’étude sans doute peut y revenir et suppléer à ce qu’on a laissé fuir d’abord ; mais une étude, c’est un bien gros mot, et on ne la fait que rarement. […] Elles sont si bien revenues d’un court moment d’erreur qu’elles s’imaginent, en le lisant, qu’elles n’ont jamais failli ; et, voyant un si habile avocat plaider pour elles, elles s’attendrissent à penser qu’elles sont restées quasi des anges de vertu. » Ne soyons pas nous-même plus rigoriste qu’il ne convient ; un peu d’hypocrisie sociale est chose nécessaire et qui ne messied pas : il en faut même dans l’art ; il en faut, mais, comme dit la chanson, pas trop n’en faut. […] Son mari la quitte et va pour rentrer à son tour dans son appartement ; il revient presque aussitôt, il n’a pu ouvrir, la serrure est brouillée. […] Sans revenir sur des ouvrages si connus, si bien jugés de tous, et dont chacun demanderait une analyse à part, je prendrai pour sujet de quelques-unes de mes remarques la Petite Comtesse, qui est un récit entre les deux, ni trop court, ni trop long, et qui par là même est plus commode.

298. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

M. de Talleyrand, sommé peu après par le pape de revenir à résipiscence sous peine d’excommunication (et il faut convenir qu’il ne l’avait pas volé) se le tint pour dit, et quitta décidément l’Église pour embrasser la vie séculière. […] Dumont, qui fit avec lui le voyage de retour en France, nous a dit combien il était délicieux « dans le petit espace carré d’une voiture. » Revenu à Paris et ne trouvant plus son ami Narbonne dans le ministère, Talleyrand, qui n’en était pas à une liaison près, s’arrangea avec la Gironde, avec Dumouriez, et il retourna de nouveau à Londres, toujours chargé d’une mission, à côté de Chauvelin, ambassadeur, et comme pour le seconder (mai 1792). […] Nous reviendrons prochainement, guidé toujours par sir Henry Bulwer, mais un peu moins indulgent que lui, sur cette vie et ce personnage à triple et quadruple fond. […] Je donne ces textes d’après la traduction, en regrettant que les passages cités ne paraissent nous revenir qu’à travers l’anglais : rien n’eut été plus simple que de réintroduire à ces endroits le texte français original.

299. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Sur la reprise de Bérénice au Théâtre-Français »

Sur la reprise de Bérénice au Théâtre-Français Janvier 1844 Il y avait quelque hardiesse à revenir de nos jours à Bérénice, et cette hardiesse pourtant, à la bien prendre, était de celles qui doivent réussir. […] Il ne faudrait pas que de telles faiblesses, si gracieuses qu’elles semblent par exception, revinssent trop souvent ; elles affecteraient l’œuvre entière d’une teinte trop particulière et qui aurait sa monotonie, sa fadeur. […] Mais indépendamment des circonstances particulières qui favorisèrent le premier succès, et sur lesquelles nous reviendrons, il faut reconnaître que Racine a su tirer d’un sujet si simple une pièce d’un intérêt durable, puisque toutes les fois, dit Voltaire, qu’il s’est rencontré un acteur et une actrice dignes de ces rôles de Titus et de Bérénice, le public a retrouvé les applaudissements et les larmes. […] La reprise d’aujourd’hui a réussi ; on n’est pas tout à fait revenu aux larmes, mais on accorde de vrais applaudissements.

300. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

On reviendra, si je ne me trompe, à ces femmes du xvie  siècle, à ces contemporaines des trois Marguerite, et qui savaient si bien mener de front les affaires, la conversation et les plaisirs : « J’ai souvent entendu des femmes du premier rang parler, disserter avec aisance, avec élégance, des matières les plus graves, de morale, de politique, de physique. » C’est là le témoignage que déjà rendait aux femmes françaises un Allemand tout émerveillé, qui a écrit son itinéraire en latin, et à une date (1616) où l’hôtel Rambouillet ne pouvait avoir encore produit ses résultats253. […] Quand le marquis revient peu après à Silly, la fleur du sentiment avait déjà reçu en elle quelque dommage ; la réflexion avait parlé. […] que cela lui donnait bien le droit de dire, comme plus tard, et revenue des orages, elle l’écrivait dans une lettre à M. de Silly : « N’en déplaise à Mme de…, qui traite l’amour si méthodiquement, chacun y est pour soi, et le fait à sa guise. […] Elle y fît un petit voyage, mais s’en revint au plus vite.

301. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

On a beau vouloir s’endormir sur l’oreiller d’une molle tranquillité, le doute revient plus angoissant que jamais, et quiconque a essayé de se réfugier dans l’indifférence, s’il mérite le nom d’homme, se surprend à murmurer avec Musset : « Je ne puis…, malgré moi l’infini me tourmente. » * *   * C’est pour retrouver la sécurité et l’équilibre perdu que tes esprits s’agitent. […] Quelques-uns se découragent à la première déconvenue, et reviennent, comme à un pis-aller, à la doctrine de l’agnosticisme clérical. […] Les opinions auxquelles les savants tendent à revenir sur la constitution de la matière ne sont pas sans analogie avec les vues profondes des premiers alchimistes. » Une élite se prépare à la tâche. […] Elle y revient en esprit.

302. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Les flots de l’Océan ont leur flux et leur reflux qui se calculent ; le sang dans nos artères et dans nos veines a un va-et-vient qui se mesure par les battements du pouls ; la fièvre comme le besoin de manger ou de dormir, revient à intervalles périodiques ; la danse, la versification, la musique nous plaisent par le retour régulier de certains sons et de certaines cadences ; les éclats de la douleur, comme ceux de la tempête, ont leurs intermittences de paroxysme et de répit ; le fleuve, qui coule intarissable, forme des courbes, qui, à moins d’obstacles entravant son cours, sont infléchies symétriquement tantôt dans un sens et tantôt dans l’autre ; la lumière et le son se propagent par ondulations qui se creusent et se renflent comme les vagues de la mer. […] Mais, s’il est vrai qu’une alternance régulière ramène tour à tour le règne d’états d’esprit et de procédés contraires, du réalisme et de l’idéalisme, de la raison et de l’imagination, de l’analyse et de la synthèse, de l’optimisme et du pessimisme, etc., il semble que la littérature, revenue au pôle qui fut son point de départ après avoir atteint l’autre, devrait se retrouver dans la situation même où elle était quand commençait l’oscillation. […] Il semble, par suite, que l’évolution se résolve en une série de mouvements qui reviennent sur eux-mêmes ; qu’elle soit, dès lors, la négation de tout progrès ; qu’elle aboutisse à ces ricorsi, à ces retours périodiques au même point dont parlait jadis Vico ; qu’elle puisse être figurée par un serpent qui se mord la queue, par un cercle où elle chemine et tourne en repassant incessamment sur la trace de ses propres pas. […] Il existe à la fois dans une société des tendances d’inégale puissance, ou, ce qui revient au même, d’inégale durée : il en est qui agissent pendant des siècles ; il en est qui durent trente ou quarante ans ; il en est qui ne dépassent point une quinzaine d’années ; il en est qui sont restreintes aux limites d’une ou deux saisons.

303. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

C’est la plainte perpétuelle qui revient sous la plume du comte de La Marck dans la Correspondance secrète qu’on vient de publier : La reine, écrivait-il au comte de Mercy-Argenteau (30 décembre 1790), la reine a certainement l’esprit et la fermeté qui peuvent suffire à de grandes choses ; mais il faut avouer, et vous avez pu le remarquer mieux que moi, que, soit dans les affaires, soit même simplement dans la conversation, elle n’apporte pas toujours ce degré d’attention et cette suite qui sont indispensables pour apprendre à fond ce qu’on doit savoir pour prévenir les erreurs et pour assurer le succès. […] Et encore (10 octobre 1791) : « La reine, avec de l’esprit et un courage éprouvé, laisse cependant échapper toutes les occasions qui se présentent de s’emparer des rênes du gouvernement, et d’entourer le roi de gens fidèles, dévoués à la servir et à sauver l’État avec elle et par elle. » En effet, on ne revient pas d’une si longue et si habituelle légèreté en un jour ; ce n’eût pas été trop du génie d’une Catherine de Russie pour lutter contre les dangers si imprévus à celle qui n’avait jamais ouvert un livre d’histoire en sa vie, et qui avait rêvé une royauté de loisir et de village à Trianon : c’est assez que cette frivolité passée n’ait en rien entamé ni abaissé le cœur, et qu’il se soit trouvé dans l’épreuve aussi généreux, aussi fier, aussi royal et aussi pleinement doué qu’il pouvait l’être en sortant des mains de la nature. Je ne discuterai pas, on le pense bien, la ligne de politique à laquelle Marie-Antoinette croyait bon de revenir quand elle était livrée à elle-même. […] Quant aux femmes, Mme de Staël leur a dès longtemps adressé le mot qui peut leur aller le plus au cœur, quand elle a dit, dans la défense qu’elle a donnée de Marie-Antoinette : « Je reviens à vous, femmes immolées toutes dans une mère si tendre, immolées toutes par l’attentat qui serait commis sur la faiblesse… ; c’en est fait de votre empire si la férocité règne. » Marie-Antoinette est mère encore plus que reine en effet.

304. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Le jeune homme ne revint en France que vers 1791 ; il avait près de vingt ans. […] Après un séjour de dix-huit mois à la frontière des Pyrénées, à la division de Saint-Jean-Pied-de-Port, où il fut employé en qualité d’inspecteur général des transports militaires, il se dégagea, revint à Paris, s’y maria avec la nièce de M.  […] Fontanes lui-même, qui revenait avec une simplicité relative au Grand Siècle, Fontanes avait ses scrupules, et n’aurait pas tout permis en matière de citations. […] Et pourtant, ce Chateaubriand, qui semblait alors ne point parler français, revenait et nous ramenait par des hauteurs un peu escarpées et imprévues à la grande et forte langue, et c’était sur ses traces que le goût lui-même devait retrouver bientôt sa vigueur et son originalité.

305. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — I »

Elle a pu se croire une puissance dans le siècle, du moment qu’elle s’en est venue accomplir, vers l’an de grâce 1800, je ne sais que le mission prédestinée, dogmatisant parmi les châteaux et les palais, à la plus grande gloire d’en haut ; et maintenant que la lumière est revenue, qu’on n’a plus que faire de précurseur, et que la vie militante a fait place à la vie privée, c’est peut-être un devoir à ses yeux d’enregistrer publiquement les mérites et indulgences qui lui reviennent de cette pieuse lutte, engagée sous son patronage.

306. (1875) Premiers lundis. Tome III « Lafon-Labatut : Poésies »

Celui-ci avait eu, il paraît, une vie fort errante et orageuse : après avoir un instant brillé à Paris dans la jeunesse dorée du temps, il s’était engagé, avait fait la guerre et couru le monde, puis s’était marié à Messine ; là, un jour, regrettant la patrie et songeant aux moyens d’y revenir, il lui tomba entre les mains un des volumes des Troubadours, dans la préface duquel M.  […] La mort du bon curé le laissa sans ressources ; c’est alors qu’il revint à Paris, rappelé par l’ami de son père.

307. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Lundberg » pp. 169-170

Quand je dis de La Tour qu’il est machiniste, c’est comme je le dis de Vaucanson, et non comme je le dirais de Rubens ; voilà ma pensée pour le moment, sauf à revenir de mon erreur, si c’en est une. […] C’est que celui-ci ne s’est jamais occupé de l’imitation rigoureuse de la nature ; c’est qu’il a l’habitude d’exagérer, d’affaiblir, de corriger son modèle ; c’est qu’il a la tête pleine de règles qui l’assujettissent et qui dirigent son pinceau, sans qu’il s’en apperçoive ; c’est qu’il a toujours altéré les formes d’après ces règles de goût et qu’il continue toujours de les altérer ; c’est qu’il fond, avec les traits qu’il a sous les yeux et qu’il s’efforce en vain de copier rigoureusement, des traits empruntés des antiques qu’il a étudiés, des tableaux qu’il a vus et admirés et de ceux qu’il a faits ; c’est qu’il est savant, c’est qu’il est libre, et qu’il ne peut se réduire à la condition de l’esclave et de l’ignorant ; c’est qu’il a son faire, son tic, sa couleur auxquels il revient sans cesse ; c’est qu’il exécute une caricature en beau, et que le barbouilleur, au contraire, exécute une caricature en laid.

308. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XII. L’homme touffu »

De tous ces hommes il n’en revint qu’un au village. […] La vieille salua le roi et s’en revint chez elle, où elle fit bouillir une plante soporifique puis, après avoir retiré de cette décoction les feuilles qu’y avaient bouilli, elle y délaya de la farine de mil.

309. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Saint-Marc Girardin »

Cet état incohérent et stérilement fécond de la littérature américaine nous est revenu à la mémoire depuis que nous étudions2 l’état humiliant de la littérature française. […] Ainsi, on annonce le Saint Anselme de Rémusat, sur lequel nous reviendrons pour en signaler la portée et le caractère.

310. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

André Chénier est né à Byzance ; Chateaubriand visite les savanes : s’il peut se saluer le père de l’école moderne, le rôdeur Jean-Jacques en est à certains égards le grand-père, et Bernardin de Saint-Pierre l’oncle, et un oncle revenu de l’Inde exprès pour cela. […] Revenue au nid, et encore toute brisée de l’orage, elle trouva la famille plus pauvre Son excellent père cependant était devenu inspecteur des prisons à Douai, et elle aimait à lui être une auxiliaire bienfaisante, dans l’exercice de ses fonctions. […] maintenant reviens et descends encore. » Volontiers aussi notre tendre élégiaque, les mains levées au ciel, se fût écriée en sa naïve démence, avec une autre âme aimante, une autre muse voilée, sœur de la sienne49, et dont l’écho seul m’a, par hasard, apporté la voix : Secrets du cœur, vaste et profond abîme, Qui n’a pitié ne connaît rien de vous ! […] Ma chère Camille, je vous vois tous auprès de ma sœur comme des enfants et des anges qui consolent une sainte, et je suis tranquille sur les bénédictions du Ciel qui attendent une si belle âme ; mais les tortures de la mienne sont inexprimables, plus cent fois depuis que je suis revenue : la voir m’était encore moins terrible. […] Dans des lettres à une amie, Mme Derains, elle revient sur cette misère des logements à trouver, et elle exprime en paroles vivantes le trouble moral et le bouleversement de pensées qui résulte de ces déplacements continuels : « Ma bonne amie, vous me dites des paroles qui résument des volumes que j’ai en moi.

311. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Mais pour rester bon juge de la valeur de cette œuvre distinguée, pour ne rien méconnaître des mérites sérieux qu’on y salua si vivement à sa naissance, pour garder tout respect enfin à une pure impression de notre jeunesse, il y a à revenir aux circonstances mêmes où la pièce s’est produite, voilà plus de vingt ans, et au point de départ qui avait précédé. […] Marie-Joseph Chénier, conseillé par Daunou, revenait, bien qu’un peu tard, aux anciens, et s’initiait aux douleurs d’Électre. […] Revenu pourtant à sa pleine liberté et obéissant à l’aiguillon d’une émulation généreuse, il put, durant les quinze années qui suivirent, attacher avec honneur son nom à des ouvrages étendus et médités : Marie Stuart, le Cid d’Andalousie et le poëme de La Grèce. […] C’est le cas de rappeler les belles stances de Byron à l’Éridan, quand il charge les flots, qu’en naviguant il contemple, d’aller vers Ravenne couler aux pieds de la dame de son amour : « Le flot qui emporte mes larmes ne reviendra plus ; reviendra-t-elle celle que ce flot va rejoindre ?  […] Numéros des 3, 5 et 8 mars 1825 ; on y revint trois fois à la charge, comme dans un combat.

312. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

Et aujourd’hui même que le premier trouble a eu le temps de s’éclaircir et que rien ne voile plus l’étendue du vide, ce n’est pas un jugement régulier que nous viendrons essayer de porter sur celui qui nous manque tellement chaque jour et dont le nom revient en toute occasion à notre pensée. […] Quand on ramène sa pensée à ses premières années et qu’on veut revenir sur les traces que l’on a déjà parcourues, il n’y a rien qui éclaire davantage ces époques flottantes et vagues qu’un amour d’enfant venu avant l’âge des sens. […] Après un court séjour, il y revenait à l’entrée de l’hiver, sous prétexte d’y faire son droit, mais en réalité pour y tenter la fortune littéraire. […] Pourtant cette vie de Rennes, loin de Paris, et malgré tous les dédommagements des amitiés qu’il s’était formées, coûtait à ses goûts ; il ne tarda pas à désirer de nous revenir. […] Ce suicide final qu’on raconte de Lucrèce ne lui semblait peut-être qu’un retour d’accès d’un mal ancien : « L’air d’autorité, écrivait-il, ne suffit pas à déguiser ses terreurs ; voyez, il s’en revient pâle comme Dante ; l’armure déguise mal l’émotion du guerrier. » Il croyait discerner, sous cet athéisme dogmatique, comme sous la foi de Pascal, le démon de la peur.

313. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Ce qui revient à dire qu’il y a ici une caractéristique intellectuelle de l’effort intellectuel. […] Nous aurons à revenir sur ce point. […] Mais cela revient à dire, comme nous l’indiquions au début de cette étude, qu’un acte de mémoire renferme d’ordinaire une part d’effort et une part d’automatisme. […] Les incidents de ce voyage me reviennent à l’esprit dans un ordre quelconque, s’appelant mécaniquement les uns les autres. […] Ce qui revient à dire que, pour contracter l’habitude d’un mouvement complexe Comme celui de la valse, il faut avoir déjà l’habitude des mouvements élémentaires en lesquels la valse se décompose.

314. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Mais, après le piquant, revient le sensible, le vers ému et poétique. […] On se demande si les deux amis qu’il associe à ses destinées en étaient dignes par le talent ; je ne connais rien de Panjas : quant à Olivier de Magny, on a, entre autres Recueils, ses Soupirs, en grande partie composés pendant le séjour de Rome et publiés en 1557 ; ils sont comme le pendant des Regrets de Du Bellay, dont le nom revient presque à chaque page. […] Il était temps que Du Bellay repassât les monts et revînt en France : les derniers mois de son séjour à Rome paraissent lui avoir été tout particulièrement odieux et insupportables. […] Du Bellay revint en France par Urbin, Ferrare, Venise, la Suisse et les Grisons, qu’il a décrits et maudits en passant. […] Le Recueil des Regrets porte un extrait de Privilège daté de Paris le 7 janvier 1557. — Je crois que ce 1557 revient à 1558, d’après la manière encore en usage dans les actes publics de commencer l’année : je pose la question plutôt que je ne la résous.

315. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

Année 1856 6 mai 1856 Je reviens. […] Et nous revenons avec Monselet, tenant dans une main un paquet de rillettes de Tours, enveloppé dans du papier, et dans l’autre un joujou d’enfant, un diable qu’il fait jaillir gaminement de sa boîte, avec le couicoui d’une pratique de polichinelle, chaque fois que nous passons devant une femme. […] Vous savez que je pense comme vous et non comme elle… Tous ces hôtels, c’est bien curieux à suivre dans votre livre… Je me rappelle, quand nous sommes revenus de l’émigration, il y avait un cheval qui tournait une meule dans le théâtre de notre hôtel… Si vous aviez pu recueillir en province la tradition orale, hélas ! […] Et la femme emporte les livres chez son mari, et revient bientôt avec l’argent, — qu’elle va manger avec Asselineau à la campagne. […] Des antipathies et des sympathies à première vue, et vives et braves, et des sourires d’une complicité délicieuse pour ceux qui la comprennent, et des figures longues, comme dans le fond d’une cuiller, pour les raseurs, les jeunes gens à citations, les bêtes ; et mal à l’aise dans le mensonge du monde, disant ce qui lui vient, comme il lui vient, avec une entente singulière de l’esprit d’atelier, avec un tour de mots tintamarresque : — cette gaieté de surface venant d’un fond d’âme mélancolique, où passent des visions de blanc enterrement et reviennent des notes de la marche funèbre de Chopin.

316. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

23 avril Nous revenons de chez Gavarni avec Guys, le dessinateur de l’ Illustrated London . […] Elle va accoucher chez une sage-femme qui la vend à un entrepreneur de maçonnerie qu’elle prend aussitôt en dégoût, et pour vivre, revient apprendre le métier de sage-femme, chez celle qui l’a accouchée. […] Flaubert, une intelligence hantée par de Sade, auquel il revient comme à un mystère et à une turpitude qui l’affriolent, et gourmand de la turpitude et la collectionnant, et heureux, selon son expression, de voir un vidangeur manger de ce qu’il transporte, et s’écriant, toujours à propos de M. de Sade : « C’est la bêtise la plus amusante que j’aie rencontrée !  […] De Cimabué à la Renaissance, les yeux vont de maître en maître en s’éloignant du nez, quittent le caractère du rapprochement byzantin, regagnent les tempes, et finissent par revenir chez le Corrège et chez André del Sarte à la place où les mettaient l’Art et la Beauté antique. […] en le lisant, il me semble lire le grand-père de Henri Heine : des mots du grec reviennent dans l’allemand, et tous deux ont vu aux femmes des yeux de violettes.

317. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1870 » pp. 321-367

Il me revenait aussi dans les yeux un original singulier, un vieil oncle de ma tante, travaillant dans le fond d’une écurie, à confectionner une voiture à trois roues, qui devait aller toute seule. […] » Nous revenions, mon oncle un peu gris, et moitié riant de la drôlerie de la chose, et moitié alarmé de la perspective d’un duel avec son ami le bandagiste : mon oncle n’était pas du tout héroïque. […] J’ai battu le Bois dans la nuit, hachant les herbes et les feuilles à coups de canne, et me sauvant de mon toit, quand il m’apparaissait entre les arbres… puis enfin, très tard, je suis revenu. […] * * * Je n’en revenais pas, je n’en croyais pas mes yeux, mes oreilles… Aujourd’hui tombant d’Italie, inopinément, Edouard Lefebvre de Béhaine est venu nous demander à déjeuner. […] * * * Il me revient ces tristes paroles qui étaient souvent toute notre conversation : — Qu’as-tu ?

318. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

… Individuel comme les plus individuels de ce temps romantique, pour parler comme parlera l’histoire, bien plus près, par sa nature de talent, de Crabbe et de Wordsworth que d’André Chénier, Sainte-Beuve ne semblait pas alors avoir été créé pour faire étude de la muse antique, car c’est à elle qu’il devait revenir un jour, avec une intelligence qui est un hommage. […] Avec cette sensibilité qui ne fut pas toujours en lui une force saine et gouvernée, mais qui est une force puisqu’elle n’a pas péri dans son excès même, Sainte-Beuve, fatigué probablement de l’esprit raffiné des décadences, sybarite blessé par plus que le pli de ces monceaux de roses dans le calice desquelles nous avons écrasé tant de cantharides pour qu’elles pussent mieux nous enivrer, Sainte-Beuve, en un temps donné, devait par sensualité intellectuelle revenir aux suavités vraies, et, de cette plume qui a écrit Volupté, analyser aussi le plaisir divin que nous donne le premier des grands génies chastes. […] « Virgile n’a voulu faire — nous dit-il — ni une Théséide, ni une Thébaïde, ni une Iliade purement grecque, en beau style latin ; il n’a pas voulu purement et simplement faire un poème à la Pharsale, tout latin, en l’honneur de César, où il célébrerait avec plus d’éloquence que de poésie la victoire d’Actium et ce qui a précédé chronologiquement et suivi ; il est trop poète par l’imagination pour revenir aux chroniques métriques d’Ennius et de Nævius, mais il a fait un poème qui est l’union et la fusion savante et vivante de l’une et de l’autre manière, une Odyssée pour les six premiers livres et une Iliade pour les six autres… une Iliade julienne et romaine… » Ainsi, on le voit, le critique revient sans cesse à cette idée de fusion qui calomnie Virgile et qu’il a eue déjà en voulant caractériser son génie, mais il nous est impossible, à nous, d’admettre un tel procédé dans le poète, il nous est impossible de croire à cette ingénieuse, trop ingénieuse fusion des deux poèmes d’Homère en un seul. […] Mais il n’était rien de plus, et quoique cela fût, cela n’était pas le critique, car le critique conclut d’après une idée supérieure à ce qu’il vient de décrire, d’analyser, de disséquer… Et puis, je l’ai dit déjà, le critique est le Stator suprême… S’il revient sur son jugement, ce n’est plus un juge : c’est un pauvre homme qui s’est trompé. […] On peut donc l’être une fois et la flamme bleue ne revenir jamais lécher le morne front abandonné !

319. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Quand il ressentit pour Mme de Longueville cette célèbre passion qui a timbré d’un sourire ineffaçable son nom, à lui, jusque-là sérieux, il avertit le monde philosophique que le livre qu’il publiait alors n’était qu’une glissade, — l’infidélité d’un moment à la Muse sévère de toute sa vie, et que bientôt il reviendrait aux études qui ont fait sa renommée. […] Remuante, impatientante, piquant le Pouvoir comme une guêpe pique le lion aux narines, le Pouvoir la chasse trois fois, et quand elle revient une dernière, elle est soumise. […] c’est toujours la réponse que nous avons faite qui revient : c’est qu’il a l’amour, de bas en haut, du roturier pour la grande dame, ce pauvre bourgeois endiablé ! […] Cousin ne peut en revenir ! […] Serait-ce là une prudente réserve, posée à l’avance, pour revenir sans trop de lâcheté et d’inconséquence à des sujets irrésistibles, plus forts que la volonté et que la pensée ?

320. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Ils y reviennent, à Paris, et l’épreuve tourne au mieux. […] Il va dans quelques réunions anarchistes et en revient totalement découragé par la brutalité et la stupidité des misérables. […] Pour revenir au cas de M. 

321. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

Et, hormis cette prétention dernière qui est tout une Poétique sur laquelle nous allons revenir, tout est vrai dans ce que dit là M.  […] Girard l’archaïste, qui se croit un Athénien en voyage à Paris, parce qu’il est allé à Athènes et en est revenu faire des conférences à l’École normale, les us et coutumes littéraires des Grecs doivent être la vérité catholique dans le sens d’universel. […] Il l’adore tant, que ces mots de sévère et de sévérité reviennent je ne sais combien de fois à toute page de son livre et que jusqu’à l’œil, l’œil physique, en est importuné.

322. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ch. de Barthélémy » pp. 359-372

I Ce livre, qui n’est qu’un extrait d’une chose immense, aura-t-il la puissance de faire revenir à cette chose immense oubliée ? […] Un homme de génie peut traiter le même sujet qu’a immortalisé Molière. » Idée hardie très moderne, sur laquelle Fréron est revenu cent fois. […] On a dit que ce régicide ne le devint que parce qu’on avait tué son père, en supprimant son Année littéraire au nom du roi, rendant ainsi, coup pour coup, à la royauté, le coup qu’il avait reçu d’elle… Crime plus grand que dans un autre, dans le fils d’un homme comme Fréron, qui dérogea si épouvantablement à sa naissance et aux vertus de son père, et à qui on pourrait appliquer le mot grandiose et terrifiant de Chateaubriand, parlant d’un autre fils coupable : « Si son père l’eût su dans sa tombe, il serait revenu lui casser la tête avec son cercueil ! 

323. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Gustave III »

Il ne se soucie que d’aller à Stockholm nous chercher un petit document dans l’intérêt des petites chroniques qu’il prend pour de la grande Histoire, et il est content… d’être revenu. […] Eh bien, c’est dans ce ton qu’il va, qu’il va droit devant lui, comme s’il revenait de… Stockholm ou de Pontoise, ne faisant jaillir sur sa route ni aperçu nouveau, ni opinion nette dont l’esprit du lecteur puisse être reconnaissant au sien, sur ce règne brillant et délabré qui commença si bien et finit si mal, plus semblable à un carrousel ou à une représentation théâtrale qu’au règne d’un roi sérieux qui sent sa fonction jusque dans le plus profond de sa conscience ! […] Une circonstance qu’un historien qui sait la valeur de tout dans une pareille histoire ne peut oublier, c’est qu’à ce bal où il fut tué il parut d’abord à visage découvert, intrépide et incrédule comme César, comme le duc de Guise, comme tous les héros, — ayant dans sa poche aussi l’avertissement qu’il bravait, une lettre écrite par un des conjurés contre sa vie, — et qu’après s’être fait voir ainsi, il rentra chez lui, prit un domino et un masque, et revint pour mourir comme il avait vécu, en costume de fête et masqué !

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