Or la personnalité se déploie en pénétrant dans le mérite, et le cœur se divinise en pénétrant dans l’amour. Le mérite est la forme qui rend l’homme visible au milieu de la gloire, et l’amour est le signe de race qui doit le réunir à Dieu… » Est-ce assez plein, assez carré, assez cubique, pour qui sait comprendre ? […] « Le mérite est l’apport de l’homme dans sa création », dit Saint-Bonnet. C’est l’effort et la douleur, fille de tout effort, qui font ce mérite, achèvement de sa création. […] Sans ce mal de la vie ici-bas, qui est toute la vie, l’homme n’agirait pas : « La liberté, ce pouvoir d’être cause, — dit, avec sa profondeur perpétuelle, Saint-Bonnet, — cette faculté du mérite, exige que l’homme se refasse lui-même.
Il a sur-tout des morceaux dont on ne sauroit trop apprécier le mérite, en faisant attention aux difficultés qu’il avoit à vaincre. […] Clément soutient d’abord qu’un Poëme doit être écrit pour tous les Lecteurs, & que le Poëme didactique ne sauroit avoir ce mérite, attendu que les termes techniques, qu’il faut nécessairement y faire entrer, sont de l’algebre pour les trois quarts & demi des Lecteurs*. […] Il est incontestable que le comble du mérite pour tout Ouvrage, est d’être à la portée de tous nos Lecteurs : il s’en faut cependant bien qu’on puisse dire que cette qualité soit nécessaire, & que sans elle tout Ouvrage soit mauvais. […] Racine a eu le mérite d’écrire en prose avec autant d’élégance que de pureté. […] « On ne sauroit trop répéter qu’un Poëme est fait pour tout le monde, & que son plus grand mérite est d’être lu, entendu, estimé généralement ».
Peut-on douter que les poëtes ne parlent souvent de mauvaise foi sur le mérite de leurs vers ? […] Ce genre de mérite faisoit d’un homme du commun un personnage, et il l’égaloit à ce qu’il y avoit de plus grand et de plus important dans un état. […] Rome tranquille goûtoit, après plusieurs années de troubles et de guerres civiles, les douceurs d’un repos inconnu depuis long-temps, et cela sous le gouvernement d’un prince qui aimoit véritablement le mérite, parce que lui-même il en avoit beaucoup. […] Ainsi les richesses, les honneurs, et les distinctions couroient au-devant du mérite. […] Par la magnificence du prince et par la conduite du ministre, le mérite devint alors un patrimoine.
Encore une fois, tel fut alors le mérite de l’Académie, et nous voulons le reconnaître, car il y a un autre mérite que nous lui aurions souhaité et qui lui manqua… Après cet éclair de bon sens, rare à l’époque où il brilla, et qui lui fit mettre au concours une question historique dont elle discernait très bien la portée, elle retomba bientôt sous la paralysie des préjugés ambiants et l’empire de cette philosophie dont elle repoussait les dernières conséquences, il est vrai, mais dont elle acceptait les premières, comme si la roue de l’inflexible logique, une fois en branle, s’arrêtait ! […] Et voilà ce que nous devions dire, avant même de parler des divers mérites et des travaux provoqués par le programme de l’Académie en 1849. […] C’est un livre dont le mérite vient, avant tout, d’une doctrine que l’auteur n’a pas faite et qui lui communique le principe inépuisable de sa force. […] La critique, qui exigera davantage, sera bien obligée de reconnaître que le Remède au paupérisme a pour tout mérite une consciencieuse vulgarité, et on n’expliquera son succès qu’en disant qu’il est une de ces œuvres qui reposent une Académie lasse de penser, comme madame Grant, d’apathique et de somnolente mémoire, reposait le prince de Talleyrand.
Lorsque presque toutes les industries abaissées frelatent ce qu’elles vendent, voici un petit volume qui mérite d’arrêter le regard qu’il attire, car il a un air que depuis longtemps les livres n’ont plus. […] Poulet-Malassis, connu déjà, du reste, comme éditeur, débute dans l’édition de fantaisie, vaut-il littérairement la distinction qui en est faite et mérite-t-il vraiment cette remise en honneur d’un genre pimpant et hardi, que les vieux routiers de la vulgarité appelleront peut-être une témérité de jeune homme ? […] … L’auteur, — il ne s’est pas nommé, mais tout le monde l’a fait pour lui, parce que le style est une signature que l’on reconnaît toujours, et qui n’est pas comme l’autre à la portée des faussaires, — l’auteur est un de ces esprits qu’on peut repousser ou accepter, adorer ou maudire, mais qui ont du moins le mérite de l’outrance, et pour nous ce mérite doit être compté, même quand il est seul. […] Excepté donc le Premier soleil, La Ville enchantée et quelques fragments des Satires où le rythme et la langue se remettent à jaillir, en plusieurs reprises étincelantes et trop courtes, à travers d’horribles et d’insensés jargons d’atelier, d’estaminet et de coulisses, il n’y a rien pour la Critique que des sujets d’étonnement douloureux et de pitié dans ce volume, dont tout le mérite appartiendra à l’éditeur.
C’est que les personnes très riches sont privilégiées de plus de façons encore qu’il ne paraît à première vue ; c’est que, en même temps que la charité sous sa forme la plus élémentaire, qui est l’aumône en argent, semble devoir être plus facile aux gens qui en ont beaucoup, ceux-ci, à mérite égal — et en vertu de leur richesse même, qui les signale à l’attention et leur permet des largesses d’un chiffre imposant — sont singulièrement plus assurés de la reconnaissance publique que les gens de condition médiocre ou petite, et, ainsi, ne manquent guère de recevoir, dès ici-bas, la récompense de leur bonne volonté. […] Je n’ai pas nié un instant le rare mérite de la dame dont j’examine, comme j’en ai le droit, les actes publics. Et même, ce mérite m’apparaît mieux en y réfléchissant. […] Mathématiquement, il se peut que cinq mille francs, par exemple, soient pour un Gould ou un Vanderbilt ce qu’est un sou pour un ouvrier ou un petit commis ; et vous en conclurez que le roi de l’or n’aura pas plus de mérite à donner ces cinq mille francs que l’homme du peuple à donner un sou.
En exigeant des vers renforcés de pensées ; en préférant, dans les vers, les pensées à tout autre mérite, n’est-ce pas en bannir ce qui en fait l’agrément & la vie, l’imagination ? […] Quoique ces morceaux aient leur mérite, à l’inexactitude près, l’Auteur ne trouvera pas étrange qu’on leur préfere la traduction de M. l’Abbé de la Bleterie, qui a paru depuis, & sur-tout celle de feu M. […] Après avoir osé éclipser quelques rayons de sa gloire, nous nous livrons avec plaisir aux justes éloges qu’il mérite par d’autres Productions. […] On proscriroit sur-tout ces Bureaux d’esprit où l’on anathématise les meilleurs Ouvrages, quoiqu’on ne puisse s’en dissimuler le mérite ; où l’on encense la médiocrité, parce qu’elle est en état de protéger ou de nuire ; où l’on n’admet tant d’adorateurs stupides, que pour en faire des écho, dont la voix ira d’oreille en oreille déifier tous les Membres du tyrannique Sénat, & promulguer ses intrépides Arrêts ; nous aurions la douce joie de voir couler le lait & le miel à côté de l’Hipocrene, de pouvoir cueillir les fruits du sacré Vallon, sans redouter ceux de la Discorde, de dormir sur le Parnasse sans craindre de réveils fâcheux ; nous verrions renaître en un mot l’âge d’or de la Poésie, & le Monde savant retraceroit le modele de cette République, dont M.
C’était un homme d’un rare mérite : il connaissait la philosophie, les mathématiques, la théologie et les belles-lettres, et j’ai rarement vu quelqu’un digne de lui être comparé. […] Durant sa prélature il n’avait rien obtenu malgré sa capacité et ses mérites, uniquement parce qu’il ne fit la cour à personne et qu’il ne sollicita rien. […] Nous voulions que ce dernier pût la présenter ensuite comme sienne, sans craindre de nous enlever le mérite de l’invention. […] Ces réflexions, dit-il, l’avaient déterminé à passer à pieds joints sur les difficultés extrinsèques compensées bien certainement par les mérites personnels du sujet. […] Il déclara qu’il acceptait donc, et qu’il remerciait en même temps les cardinaux de l’opinion qu’ils avaient eue de lui, sans aucun mérite de sa part.
C’est là, certainement, un mérite bien rare parmi les poètes et les romanciers de nos jours. […] À proprement parler, les défauts et les mérites de ce livre n’ont rien de littéraire. […] Il y a, dans Manon Lescaut, un mérite indépendant du style, indépendant de la moralité, le mérite de la mesure. […] C’est là, certes, un enseignement qui mérite d’être médité. […] S’il n’intéresse pas, du moins il a pu être, et c’est un mérite qui n’est pas à dédaigner.
Il compara les plus grands versificateurs à des faiseurs d’acrostiches, & à un charlatan qui fait passer des grains de millet par le trou d’une aiguille, sans avoir d’autre mérite que celui de la difficulté vaincue . […] Les poëtes de tous les siècles & de tous les pays perdoient de leur mérite, si l’on ne se fût empressé d’assurer les prérogatives du Parnasse. […] Ne détruisons point le prestige ; livrons-nous à l’impression délicieuse qui résulte du mérite de la difficulté vaincue. […] Pour rendre supportables les morceaux de versification qu’on présenta dépouillés de la rime, il eût fallu suppléer à ce défaut par un redoublement de force & de chaleur : mais ces exemples étoient froids & sans génie, & la rime ne les eût pas élevés au mérite des vers. […] Il étoit recherché pour son esprit agréable & solide, pour sa conversation brillante, pour ses mœurs douces & ce mérite de caractère qui souvent influe sur la réputation.
Il y a là, en effet, un amour de la justice et de l’art, une élévation, une connaissance, une maîtrise de compétence enfin, qui mérite cette distinction suprême et qui n’étonnera que ceux qui ne connaissent pas Daly. […] Dans l’impossibilité où nous sommes de nous plonger dans le technique et le détail de son mémoire sans rompre le faisceau étroit de nos attributions littéraires, nous parlerons du moins de l’homme, qui mérite si bien une page dans l’histoire de la littérature contemporaine, puisque, par le style, il y entre, et qu’il y confine par les arts. […] Il y a même ici, pour le continuateur du chef-d’œuvre, un mérite absolu qu’il ne partage plus et qui reste exclusivement à lui. […] Or, ce mérite absolu, qui appartient en propre au continuateur du chef-d’œuvre, la critique doit d’autant plus le reconnaître et le signaler dans Daly que c’était le seul des mérites qu’il pouvait avoir sur lequel elle n’avait pas complètement sa sécurité… Pourquoi ne dirions-nous pas ce que nous pensons ?
Celui-ci n’étoit pas sans mérite, & M. […] Un grand mérite de cet illustre Ecrivain, c’est que le goût est chez lui le guide du génie. […] Il a le mérite d’avoir créé les sujets de la plûpart de ses piéces, qu’il n’a puisées que dans son imagination. […] N’y auroit-il pas même quelque justice à me compter, en compensation des beautés qui me manquent, le mérite de l’invention que mon prédécesseur ne s’est point proposé ? […] Gellais, Belleau & d’autres rimeurs qui eurent peut-être plus de réputation, mais qui avoient certainement moins de mérite.
Le mérite de tout traducteur se réduit presque par le défaut de nos jargons modernes à être exacts, précis & fidéle. […] Un grand mérite en lui est la simplicité. […] C’est par ce mérite qu’il plut à la Cour de Louis XIV. […] Nous croyons que ce n’est pas là leur seul mérite. […] Mais plusieurs ont un mérite bien plus important que celui du style & du pur bel esprit.
Comment dès lors construire une théorie qui convienne d’avance à des choses dont le principal mérite sera de sortir du connu et du déjà vu ? […] Je crains cependant qu’elle ne mérite pas tout le bien qu’on a dit d’elle. […] Chaque hommage qui lui vient de l’étranger peut passer pour une consécration nouvelle de son mérite. […] Nous pouvons dire déjà que toute œuvre qui a réussi à atteindre un haut degré dans l’un ou l’autre de ces cinq ordres de beauté mérite par cela seul de ne pas rester confondue dans la foule. […] Un vieux sergent peut avoir plus de mérite qu’un officier novice.
Un poëme, ainsi qu’un tableau, ne sçauroit produire cet effet, s’il n’a pas d’autre mérite que la régularité et l’élegance de l’execution. […] La ressemblance des idées que le poëte tire de son génie, avec les idées que peuvent avoir des hommes qui se trouveroient être dans la même situation où ce poëte place ses personnages, le pathetique des images qu’il a conçûës avant que de prendre la plume ou le pinceau, font donc le plus grand mérite des poëmes, ainsi que le plus grand mérite des tableaux. […] Un homme qui invente mal, qui produit sans jugement, ne mérite pas le nom d’inventeur.
Section 10, du temps où les hommes de génie parviennent au mérite dont ils sont capables Le temps où les génies parviennent au mérite dont ils sont capables, est different. […] Ce passage dont j’ai seulement ramassé quelques traits, mérite d’être lû en entier. […] Mais cet enfant, dès qu’il est parvenu dans l’âge où il faut penser, parler et agir de soi-même, déchoit tout-à-coup de ce mérite précoce.
La raison en est facile à trouver ; c’est que la Postérité ne juge jamais d’un Auteur sur les éloges de ses contemporains & de ses amis ; elle le cite en personne devant son Tribunal, & ses Productions ne peuvent se soutenir à ses yeux que par leur propre mérite. […] Malgré la pureté du langage, qui constitue le mérite de ses Plaidoyers & de ses Lettres, faute de cette chaleur & de cette raison qui donnent la vie aux Ecrits, on ne s’empresse plus de les lire, & son nom seul est resté dans notre souvenir. […] L’aptitude à résoudre un problême, n’est pas non plus capable de soutenir la réputation de Grand Homme, facile à se procurer, quand, avec quelque mérite, on a l’adresse d’intéresser l’amour-propre des autres au succès du sien.
Je n'aurois jamais cru qu'un Homme de votre mérite & si indépendant des petites opinions qu'on ne peut semer que dans les petits esprits, eût pu se déterminer à me faire un crime de me glorifier de son amitié. […] L’utilité publique étant le seul prix que j’y attache, je dois peu m’inquiéter des efforts que font mes Ennemis, pour me ravir le foible mérite qu’elles annoncent. […] Il veut à toute force m’enlever le peu de mérite que les Trois Siecles supposent, & ne me laisser que les haines qu’ils m’ont attirées. […] Il réunit le mérite de Swif, d'Adisson, d'Otwai, de Bolingbrocke. […] Un mérite qui distingue ce Grand Homme de tous les Philosophes ses prédécesseurs, c'est d'avoir eu le courage & l'adresse de déchirer le voile des préjugés religieux.
Qu’on ne m’accuse point pour cela de vouloir rabaisser le mérite de ce poète. […] La plupart des étrangers qui savent le français, sentent-ils le mérite de nos chansons ? On pourrait, ce me semble, abréger de cette manière bien des disputes sur le mérite des anciens. […] En effet, le vrai mérite d’un écrivain est d’avoir un style qui soit à lui ; le mérite au contraire d’un latiniste tel qu’on le suppose, serait d’avoir un style qui ne lui appartînt pas, et qui fût, pour ainsi dire, un centon de vingt styles différents. […] Quand on est condamné à écrire en latin, il y a certainement quelque mérite à imiter de la sorte les bons modèles.
Le duc de Saint-Simon, dans sa juste animadversion pour l’injure que fit aux pairs, aux princes, à la nation entière, à son droit public, à ses mœurs, l’élévation du duc du Maine, fruit d’un double adultère, mais devenu digne d’une haute destinée par les soins de madame de Maintenon ; le duc de Saint-Simon, dis-je, comparant la naissance du duc du Maine avec les honneurs démesurés dont cet enfant fut comblé, se laissa aller au plus cruel et au plus injuste mépris pour madame de Maintenon, à qui le jeune prince devait le mérite précoce et distingué qui avait favorisé son élévation. […] C’est à ce prix qu’était la considération pour elle, cette considération qui, dans le monde, devait lui tenir lieu de la fortune si nécessaire pour en concilier un peu aux gens sans mérite, cette considération qui sans doute ne met pas absolument au-dessus du besoin, mais du moins aide puissamment à en sortir, en fait toujours sortir sans déshonneur, parce qu’elle intéresse l’honneur même d’un grand nombre de nobles amis à préserver de tout avilissement l’objet de leur affection et de leur estime. […] Toutefois, le secret de madame de Maintenon ne réside pas uniquement dans son mérite et dans ses charmes ; il faut aussi reconnaître en elle deux autres principes de conduite qui mirent en valeur tous ses avantages : ce furent deux passions que madame de Maintenon ressentit au plus haut point ; savoir : Un amour vif pour Louis XIV, et un grand respect pour elle-même. […] Le roi lui dit ces paroles qui me paraissent dignes de remarque : « Madame, je vous ai fait attendre longtemps ; mais j’ai été jaloux de vos amis : j’ai voulu avoir seul ce mérite auprès de vous. » Le compliment, dit Auger, était délicat, mais il n’était pas sincère. […] Monmerqué, et qu’il acquiesce à mes, observations, je devrai cette satisfaction à un mérite que je n’ai la dureté de souhaiter à personne, mérite qui ne conviendrait point à des hommes dans l’âge de produire, et ne sied qu’à la vieillesse : c’est la patience.
Comment ose-t-on décider des rangs, apprécier le mérite, quand on est incapable de comparer par soi-même les talens des uns & des autres ? […] En effet, à quoi peuvent servir la science & le mérite, quand la fortune & la protection disposent de tout, conduisent à tout ? […] Indépendamment de son talent supérieur, qui le rendoit indulgent pour les talens des autres, Crébillon eut un mérite qu’on ne sauroit trop admirer. […] Ce suffrage public, dont l’époque est encore récente, seroit d’un prix inestimable, s’il n’étoit accordé qu’au grand mérite. […] Il est plus sûr d’imiter les Anciens, dont le mérite n’est plus douteux.
On sçoit que son principal mérite étoit le jugement & le goût. […] Autant l’une a pour objet de faire sentir toute la force & tout le mérite du texte, autant l’autre tend à l’accommoder à notre goût, & à le tourner beaucoup moins à notre instruction qu’à notre amusement. […] La raison est qu’en rendant les mots, & même le sens principal, on ne rend pas toujours les idées accessoires, qui forment tout l’art & tout le mérite d’un ouvrage. […] En effet, que Racine ou Despréaux & le plus excellent prosateur du siècle passé eussent entrepris, à l’envi l’un de l’autre, de mettre en notre langue Virgile ou Horace, est-il douteux que les deux traductions ne se fussent balancées, & n’eussent un égal dégré de mérite, chacune dans son genre ? […] On a vu un traducteur, homme de mérite, être deux jours entiers à rendre une seule phrase de son original.
Julien réunit ces deux genres de mérite ; mais remarquons que cet avantage, si rare aujourd’hui, l’était beaucoup moins chez les anciens. […] Ceux-ci ne sont pas cependant sans mérite ; mais on est fâché d’en trouver deux consacrés à Constance, prince soupçonneux et lâche, timide et cruel, qui, mêlant la superstition à la fureur, d’un côté protégeait les Ariens et persécutait les catholiques, de l’autre massacrait ses généraux et fit égorger presque toute la famille impériale. […] On peut encore citer un morceau sur ces tyrans de Rome, qui, cruels à force de faiblesse, et craignant tout parce qu’ils n’étaient rien, ne pardonnaient à leurs sujets ni la naissance, ni le mérite ; auprès de qui, dit-il, la vertu était un crime, comme le parricide et la révolte ; prompts à abattre tout ce qui s’élevait, et à détruire tout ce qui était grand. […] Qu’il confie à chacun la place qui convient à son caractère ; les emplois militaires à l’âme forte et au courage mêlé de prudence ; les magistratures, à la justice tempérée par l’humanité ; les premières places de l’empire, à ceux dont le mérite, composé des deux autres, unit la vigueur du caractère aux vertus. […] Faibles et lâches envers leurs bienfaiteurs, ces mêmes hommes sont fiers et ardents avec leurs ennemis ; leur reconnaissance est glacée, leur haine est implacable. » Par le peu que j’ai cité, il est facile de connaître le ton et le mérite de Julien, dans ses éloges ; on doit les estimer par certaines vérités de détail, et des idées philosophiques qui sont de tous les pays et de tous les temps : mais il faut en convenir, le fond intéresse peu.
Il y a quelques années que, passant à Dijon, je fis visite à l’un de ces hommes savants et modestes comme la province en renfermait beaucoup autrefois et comme il y en a quelques-uns encore : cet homme de mérite, qui s’était de tout temps occupé d’histoire, et qui avait publié lui-même des Annales estimées24, avait les in-folio de Mézeray ouverts sur sa table, et, me voyant y jeter les yeux, il me dit : « En province nous avons encore le temps de lire. […] Le cardinal de Richelieu, « appliqué à découvrir, nous dit d’Olivet, tout ce qu’il y avait de mérites cachés dans les galetas de Paris », apprit en même temps le nom, les projets, la maladie du jeune historien, et sur-le-champ lui envoya cinq cents écus d’or (d’autres disent deux cents) dans une bourse ornée de ses armes (1640). […] Mézeray a eu le mérite du moins d’embrasser le programme dans son ensemble, et d’ouvrir hardiment la route, sentant bien à quelle distance était le terme dans l’avenir. […] Le premier volume de son Histoire n’est pour nous que curieux et mérite assez peu qu’on s’y arrête. […] Cependant le mérite sérieux de son histoire ne commence en effet à se faire sentir qu’à dater du moment où il s’appuie sur des chroniqueurs ou historiens de langue nationale : jusque-là il ne faut lui demander que des aperçus et des pages heureuses.
Il paraît aussi avoir été employé dans la comédie de de Pure, comme un moi équivoque également applicable à des bourgeoises ridicules et sans mérite et à des femmes distinguées par le rang et les qualités. Ce fut par la rumeur des précieuses de haut rang ou de mérite considérable, et par la nécessité où se trouva l’auteur de faire une distinction entre les précieuses, que ce mot cessa d’exprimer seul une idée déterminée. […] Chez les Scudéry, on disserte sur Quinault ; et l’on est partage sur son mérite : il est, selon les uns, un bon auteur, selon les autres un mauvais. […] « C’était, à tout prendre, comme l’a dit Boileau, une fille qui avait beaucoup de mérite, et passait pour avoir encore plus d’honneur et de probité que d’esprit. » Un certain mérite est toujours nécessaire à qui veut être à la tête d’un parti ; et, après tout, le ridicule de la préciosité n’était pas ignoble. […] On pouvait aussi se croire eu droit de s’amuser aux dépens de quelqu’un, dans un temps où le mérite des individus n’était pas la propriété de tous comme il l’est de nos jours, et où il est, d’un moment à l’autre, employé à l’utilité générale.
De même, sur le goût, il n’a guère à produire que des généralités incontestables : pourtant il y mêle des pensées des anciens, et c’est ici que le mérite et l’utilité se font sentir. […] On a besoin, pour bien sentir ces mérites un peu usés de Rollin, de se reporter aux critiques qui lui furent adressées dans le temps par quelques-uns de ses collègues de l’Université. […] Mais c’est là précisément qu’était le mérite et le charme. […] Après avoir reconnu ses mérites de facilité, d’enchaînement, de divulgation et d’abondance, nous n’essaierons pas de les faire valoir plus que nous ne les sentons en le relisant. […] Son mérite, c’est Montesquieu lui-même qui va nous le dire.
Mais, dans le même siècle, il y eut un écrivain qui publia des éloges d’un genre tout différent, et qui par là mérite d’être distingué ; c’est Paul Jove : il était Italien et Milanais. […] D’abord, ils ont le mérite d’être très courts ; ils renferment quelquefois en peu de lignes, et d’autres fois en peu de pages, l’idée du caractère, des actions, des ouvrages de celui qu’il loue, ou du moins dont il parle ; car quelquefois il fait le portrait d’hommes plus célèbres que vertueux ; mais il les représente tels qu’ils sont, loue les vertus, admire les talents et déteste les crimes. […] Enfin, ils ont le mérite de présenter une grande variété d’hommes, quelques-uns grands, et presque tous fameux, de tous les pays, de toutes les religions, de tous les rangs et de tous les siècles. […] À la suite de tous ces noms de guerriers ou de princes rassemblés des trois parties du monde, c’est un spectacle curieux de retrouver les noms du Dante, de Pétrarque, de Boccace, de l’Arioste, du cardinal Bibiéna, auteur de la comédie de la Calandre, jouée au Vatican sous Léon X, et du célèbre Machiavel ; sans compter cette foule innombrable de savants, presque tous Grecs ou Italiens, qui dénués, il est vrai, de ce mérite rare du génie, contribuèrent, cependant, par leurs travaux, au rétablissement des lettres, en faisant revivre les langues qui ne s’étaient conservées que chez les chrétiens de Constantinople, et la philosophie ancienne qui, depuis la chute de l’empire, n’avait été cultivée que par les musulmans arabes.
Le modelé en est beau, et cette peinture a le mérite, rare chez ces messieurs, de paraître faite tout d’une haleine et du premier coup. […] Guillemin, qui a certainement du mérite dans l’exécution, dépense trop de talent à soutenir une mauvaise cause ; — la cause de l’esprit en peinture […] Théodore Rousseau unissant à une naïveté, à une originalité au moins égales, un plus grand charme et une plus grande sûreté d’exécution. — En effet, ce sont la naïveté et l’originalité qui constituent le mérite de M. […] Lapierre a fait aussi tableau de Daphnis et Chloé, qui a bien son mérite. […] Delécluze, dont nous ne partageons pas toujours les opinions, mais qui a toujours su sauvegarder ses franchises, et qui sans fanfares ni emphase a eu souvent le mérite de dénicher les talents jeunes et inconnus.
Ce Recueil, tel qu'il est, suffit pour prouver que Sarasin ne mérite point l'oubli où il paroît tombé aujourd'hui. […] C'est aux vrais Littérateurs à s'élever contre la mode, & à venger le mérite oublié. […] Qu'on se rappelle, après cela, que Sarasin étoit l'homme du monde le plus agréable dans la Société, & on aura une idée complette de son mérite.
Un tel Livre étoit nécessaire dans ce siécle, où le mérite des Poëtes Grecs étoit avili, ou ignoré. […] Aucun Poëte ancien ne mérite autant d’être traduit que Virgile, & aucun ne l’a été autant que lui. […] in-12. qui sûrement n’est pas sans mérite. […] Il a un plus grand mérite encore (dit M. […] Les pointes & les jeux de mots font son principal mérite.
Il y a aussi quelques détails qui ont paru minutieux ; mais ils peignent le sentiment & la nature, & ce n’est pas un petit mérite. […] Les Romans de celle-ci sont recommandables par la légéreté, le feu, le style de sentiment, & par l’invention qui est le premier mérite. […] C’est encore le mérite de Fielding, autre romancier anglois, dont nous avons presque tous les ouvrages traduits en françois ; mais il posséde ce talent à un degré bien inférieur à Richardson. […] La traduction françoise que nous en avons pourroit être plus saillante, mais l’original a tant de mérite qu’on ne s’apperçoit pas de la langueur que le traducteur a quelquefois répandu sur son style. […] Leur mérite particulier est d’être propres à être accommodés au théâtre : aussi depuis qu’ils ont paru, il y a eu un débordement d’opéras comiques sur le Parnasse.
Tels sont les mérites généraux qui apparaissent tout d’abord dans un livre où l’on en trouvera beaucoup d’autres plus particuliers et plus profonds. […] Homme d’un grand sens et d’une érudition qu’il respecte trop pour la fouler aux pieds, l’abbé Gratry ne s’exagère pas les proportions de son mérite, parce qu’il n’a pas besoin de les exagérer. […] Pour nous, qui ne sommes pas philosophe et qui ne nous vantons que d’être chrétien, le mérite du Traité de la Connaissance de Dieu est bien au-dessus d’un mérite purement scientifique, et nous l’admirons principalement parce qu’il arrive de toutes parts aux conclusions du bon sens, de la tradition, de l’histoire. […] Voilà, pour nous le mérite pratique, et par conséquent le plus grand, du livre de l’abbé Gratry.
Tout concourut à l’enivrer de l’idée de son mérite. […] Enfin ce même homme, dont le public avoit injustement fait sa divinité, devint, plus injustement encore, sa fable ; car Chapelain n’est pas un auteur sans mérite. […] Cette épître, monument élevé à la gloire de la nation & de son roi, avoit été reçue avec de grands applaudissemens, & devoit l’être, à cause de son propre mérite & celui de l’à-propos. […] D’ailleurs, Despréaux est un garçon d’esprit & de mérite, que j’aime fort ». […] Cotin avoit cependant une espèce de mérite : il sçavoit les langues ; il étoit de l’académie Françoise.
Corneille doit donc être plus facile à traduire que Racine, et, ce qui peut-être semblera paradoxe, Tacite doit l’être plus que Salluste : Salluste dit tout, mais en peu de mots, mérite qu’une traduction a peine à conserver ; Tacite sous-entend beaucoup et fait penser son lecteur, mérite qu’une traduction ne peut faire perdre. […] Si l’on mesurait uniquement le mérite à la difficulté vaincue, souvent il y en aurait moins à créer qu’à traduire. […] Ne serait-il pas infiniment plus avantageux de choisir dans les différents ouvrages de chaque auteur ce qu’ils contiennent de plus excellent, et de ne présenter aux enfants, dans la lecture des anciens, que ce qui mérite davantage d’être retenu ? […] On l’accuse, je le sais, d’avoir peint trop en mal la nature humaine, c’est-à-dire, de l’avoir peut-être trop bien étudiée ; d’être obscur, ce qui signifie seulement qu’il n’a pas écrit pour la multitude ; d’avoir enfin le style trop rapide et trop concis, comme si le plus grand mérite d’un écrivain n’était pas de dire beaucoup en peu de mots. […] Corriger les taches d’un auteur est un mérite dans le critique ordinaire ; c’est un devoir dans le censeur d’une traduction.
Si des orateurs de ce mérite donnaient un tel exemple, on se doute bien qu’il était suivi. […] Entouré de grands hommes, il eut le mérite de les croire. […] Trajan et Henri IV, quand ils commandaient leurs armées, marchaient et vivaient en soldats ; Louis XIV, dans les camps, parut toujours en roi : il mêla la pompe du trône à la fierté imposante des armées ; et déployant une grandeur tranquille, sans jamais se montrer de près à la fortune, son mérite fut d’inspirer à ses généraux l’orgueil de vaincre, et à ses troupes l’orgueil de combattre et de mourir pour lui. […] Ce fut un mérite surtout d’avoir apprécié la morale inflexible et la franchise sévère de Montausier dans une cour où la volupté se mêlait au faste, et où l’excès de la flatterie corrompait la gloire. […] Le mérite de l’un fut de rappeler toujours sa grandeur ; le mérite de l’autre, de faire oublier la sienne.
Le monde remarque encore de lui-même, que ceux qui lui avoient promis quelque chose de meilleur que l’ouvrage dont le mérite a été contesté, ne lui ont pas tenu parole. […] Un homme d’esprit et d’une profession trop sérieuse pour être prévenu contre le mérite de la piece par un succès dont il n’aura point entendu parler, la lit sans préjugé, et il la trouve bonne. […] Si l’on me demande quel temps il faut au public pour bien connoître un ouvrage et pour former son jugement sur le mérite de l’artisan, je répondrai que la durée de ce temps d’incertitude dépend de deux choses.
Vous le prenez, vous le quittez selon qu’il vous convient, et il est de l’intérêt de votre gloire de vous en détacher quelquefois, afin que les honneurs qu’on vous rend ne soient attribués qu’à votre seul mérite. […] C’était lui qui avait fourni les mémoires : Monseigneur, lui disait le rédacteur dans la dédicace, j’ai si peu de part à cette histoire, qu’en vous l’offrant, je ne puis espérer qu’elle me serve ni à me faire un mérite auprès de vous, ni à m’acquitter d’une dette. […] L’éclat d’une maison qui a donné par ses alliances augustes tant de princes à la France, tant de saints à l’Église, tant de souverains à de grands pays, semble encore au-dessous de la gloire d’avoir acquis un si rare mérite par votre propre application. […] Le public, alors tout littéraire, et très occupé de ces sortes de querelles, s’était fait de La Harpe une idée très malicieuse, peu favorable, et qui ne répondait point aux mérites étendus qu’il a déployés depuis. […] III, p. 206) : « Les sous-gouverneurs eurent des métiers différents, aux yeux du duc de Beauvilliers qui les choisit », mais il a dit « des mérites différents. » Il n’a pas dû dire, malgré ses gaietés de style, parlant de la vie débauchée que menait le chevalier de Bouillon (t.
Le mérite dominant de la prose de Voltaire, c’est la clarté. […] Ici, la concision est un des principaux mérites de l’œuvre. […] C’est là le mérite le plus éclatant, le mérite incontesté des Méditations. […] Si cette explication n’a pas le mérite de la vérité, elle a du moins le mérite de la nouveauté. […] Un tel bienfait mérite assurément un témoignage de gratitude.
Que si elles avaient le défaut de faire de l’amour un délire de l’imagination, elles eurent aussi le mérite d’élever les esprits et les âmes au-dessus de l’amour d’instinct, et de préparer cet amour du cœur, ce doux accord des sympathies morales si fécond en délices inconnues à l’incontinence grossière, cet amour qui donne tant d’heureuses années à la vie humaine, appelée seulement à d’heureux moments par l’amour d’instinct. […] « Souvenez-vous, dit-il, de ces cabinets qu’on regarde encore avec tant de vénération, où la vertu était révérée sous le nom de l’incomparable Arthénice, où se rendaient tant de personnes de qualité et de mérite, qui composaient une cour choisie, nombreuse, sans confusion, modeste sans contrainte, savante sans orgueil, polie sans affectation. » La causticité du duc de Saint-Simon ne l’a pas empêché de rendre justice à la maison de Rambouillet. « L’hôtel de Rambouillet », dit-il dans une note sur Dangeau (10 mai 1690), « était dans Paris une espèce d’académie de beaux esprits, de galanterie (galanterie est là pour élégance), de vertu et de science, car toutes ces choses s’accordaient alors merveilleusement et le rendez-vous de tout ce qui était le plus distingué en condition et en mérite, un tribunal avec qui fallait compter et dont sa décision avait un grand poids dans le monde, sur la conduite et sur la réputation des personnes de la cour et du grand monde, au tant pour le moins que sur les ouvrages qui s’y portaient à l’examen37. » 35. […] C’était un homme avec qui il fallait compter, pour qui le roi n’eut toujours des égards infinis et beaucoup de confiance, et monseigneur une déférence totale tant qu’il vécut, et qui bien que peu affligé de sa mort, a conservé toujours pour tout ce qui lui a appartenu, et jusques à ses domestiques, toutes sortes d’égards et d’attentions. » Saint-Simon ajoute à ces graves notions, celle-ci, qui n’est pas sans mérite : « La propreté de M. de Montausier, qui vivait avec une grande splendeur, était redoutable à sa table, où il avait été l’inventeur des grandes cuillers et des grandes fourchettes qu’il mit en usage et à la mode. »
Il nous connaît, il nous a étudiés pendant trente ans, il ne s’illusionne point sur nos goûts intérieurs, sur la puissance de notre amour et sur les possibilités de nos mérites. […] Et c’est là son mérite admirable et unique ! […] Des mérites de ce genre sont-ils trop hauts pour nous ? […] Ce sont là des mérites domestiques, quotidiens, constants et habituels.
Le beau mérite qu’a eu Térence de faire parler ses personnages selon la nature ! […] Ce qu’est le spécieux, Lamotte va nous l’apprendre. « Le vrai mérite, dit-il dans son Discours sur Homère, consiste à reconnaître les défauts partout où ils sont. […] Ce n’est là qu’une sorte de mérite ; il en est un autre plus rare, qui consiste à admirer les beautés partout où elles sont. […] S’il tient à nous persuader que tout le mérite du critique est de voir les défauts partout où ils sont, c’est pour rehausser ce qu’il croit avoir eu de mérite à découvrit ceux d’Homère. […] S’ils ne voulaient pas, par modestie, le devoir à leur mérite, quel scrupule avaient-ils à le devoir au temps ?
La derniere mérite peut-être la préférence, parce que les petites notes qu’on a insérées dans le texte, dispensent du travail d’un commentaire. […] Colbert, Evêque de cette ville, étoit un homme du premier mérite. […] Ce livre ne mérite que très-rarement le reproche que nous lui faisons.
Or ces beautez se rendent bien sensibles aux hommes qui n’ont pas l’intelligence de la mécanique de la peinture, mais ils ne sont point capables pour cela de juger du mérite du peintre. […] Ainsi la réputation du peintre, dont le talent est de réussir dans le clair-obscur ou dans la couleur locale, est bien plus dépendante du suffrage de ses pairs, que la réputation de celui dont le mérite consiste dans l’expression des passions et dans les inventions poëtiques, choses où le public se connoît mieux, qu’il compare par lui-même, et dont il juge par lui-même. […] On voit bien qu’en suivant ce principe je dois reconnoître les personnes du métier pour être les juges ausquels il faut s’en rapporter, quand on veut sçavoir autant qu’il est possible, quel peintre a fait le tableau, mais elles ne sont point pour cela les juges uniques du mérite de ce tableau.
Aucune ne mérite d’être citée. […] A cela près, il mérite la préférence, & il l’auroit eue dans son tems, si Mr. […] Les historiens qui vinrent après n’ont pas le même mérite. […] On connoît le mérite de l’éditeur. […] Ce morceau, plusieurs fois réimprimé, est assez superficiel ; l’éloquence de l’historien en fait tout le mérite.
La supériorité sur tout autre point que le mérite, richesse ou influence, ne peut causer d’embarras ; mais que faire contre la supériorité de mérite ? […] « Trois éléments dans l’État se disputent l’égalité : ce sont la liberté, la richesse et le mérite. […] Elle peut s’entendre du nombre et du mérite. Par le nombre, je comprends l’égalité, l’identité en multitude, en étendue ; par le mérite, l’égalité proportionnelle. […] Le plus sage est de combiner ensemble, et l’égalité suivant le nombre, et l’égalité suivant le mérite.
Il semble que les grands hommes en tout mérite, et qui, selon le sentiment ordinaire, auroient dû être distribuez dans plusieurs siecles, attendissent le pontificat de Jules II pour paroître. […] Les recompenses et la consideration attendent les ouvriers habiles : nous les avons vû même prévenir quelquefois le mérite. […] Ils avoient acquis le mérite, ils étoient formez avant que ces jours heureux commençassent. […] Mais à mesure que les arts sont déchus en Italie, les places et les professions de ces grands hommes ont cessé d’être remplies et d’être exercées par des sujets d’un aussi grand mérite. […] Tous les talens nécessaires dans les armes ont été exercez par des sujets d’un mérite distingué.
Enfin la plupart de ses écrits supposent des institutions toujours contraires à la raison, et des institutions assez puissantes pour donner à la plaisanterie qui les attaque le mérite de la hardiesse. […] On pouvait être un homme de beaucoup de mérite sous l’ancien régime, et cependant se rendre ridicule par une ignorance absolue des usages. […] Un écrivain ne mérite de gloire véritable, que lorsqu’il fait servir l’émotion à quelques grandes vérités morales. […] Le mérite de la difficulté vaincue, et le charme d’un rythme harmonieux, tout sert à relever le double mérite du poète et de l’auteur dramatique. […] On ne veut plus de mérite relatif, on ne met plus d’intérêt même aux difficultés vaincues, lorsqu’elles ne font avancer en rien l’esprit humain.
Il y avait de quoi ramener les cœurs les plus durs à des sentiments de pitié et de sympathie ; décidément, il y avait rachat : les tortures morales et physiques du prisonnier, les épreuves et les mérites de sa famille avaient dépassé et couvraient les fautes. […] Évidemment Mme de Maintenon avait agi sous main : elle se souvenait que le pauvre Scarron avait été l’un des pensionnés de Fouquet ; elle eut du moins ce mérite de n’oublier jamais son passé. […] Comblé au début de toutes les faveurs et porté comme sur les bras de la Fortune, il n’est en rien enivré ni ébloui ; il n’y voit qu’une raison de plus de justifier son précoce avancement par son mérite. […] La considération dont jouissait son père lui ouvrait tous les accès : il sut bientôt se faire compter par son propre mérite. […] Cette parfaite culture à laquelle rien n’avait manqué et qui avait si bien réussi, ce respect absolu pour son père, cette soumission, cette juste égalité de sentiments en tout, ou cette réserve qui était une vertu à son âge, ne laissent pas deviner quelle nature de génie particulière pouvait être en lui, et s’il avait du génie ou seulement un parfait mérite ; car, quand on a tant de bon sens à vingt-cinq ans, aura-t-on du génie à cinquante ?
Nous nous élevions contre une Cabale qui se croyoit triomphante ; nous combattions les usurpations du mauvais goût ; nous réduisions à leur juste valeur des mérites équivoques ; nous vengions le vrai mérite des atteintes de l’ignorance & de l’envie ; nous déclarions, en un mot, la guerre à la Philosophie, à la fausse Littérature, à la vanité, à la prévention, à tous les préjugés dominans ; nous rappellions les esprits à la Religion, à la raison, aux vrais principes, à la justice, à la vérité. […] Passer sous silence un si grand nombre d’Ecrivains, c’eût été déceler l’ignorance d’un Littérateur peu instruit : oublier le mérite des Membres de la Société supprimée, parce qu’elle est dans l’infortune, c’eût été montrer la lâcheté d’un Philosophe, & nous ne connûmes jamais les odieux ménagemens. […] Nous les avons jugés, comme ils l’ont été & le seront par tous les Critiques impartiaux & éclairés ; & si nous ne les avons pas loués autant qu’on eût voulu, c’est qu’aucune considération ne peut nous porter ni à exagérer le mérite, ni à dissimuler les défauts. […] Ils ont semé des bruits artificieux pour nous ôter le* mérite des articles les moins foibles, en les attribuant tantôt à des Auteurs connus & estimables, mais qui ne pensent pas comme nous, & tantôt à des hommes obscurs qui auroient peut-être été bien embarrassés, s’ils eussent été seulement obligés de corriger nos fautes ou les épreuves de l’Ouvrage : rien n’a enfin été épargné pour prévenir & révolter les esprits.
Quoiqu’on ait beaucoup écrit contre lui, on ne s’est pas encore avisé de remonter jusqu'à la source de son mérite & de ses égaremens. […] Pascal étoit misanthrope comme lui ; mais guidé par la Religion, ses pensées ont le mérite de la profondeur & de la sublimité, joint à celui de la raison. […] Vraiment Philosophe à cet égard, il a constamment dédaigné d’employer des armes indignes de ses sentimens, de son mérite, & du Public. […] Ces Lettres, qui forment deux volumes in-12, & dont on vient de donner la sixieme édition, annoncent un Littérateur d’autant plus estimable, qu’il réunit à la sagesse des principes & à la solidité du raisonnement, le mérite d’une érudition très-étendue, & le talent de la mettre en œuvre sans prétention.
Là, sans que mes amis prêchent leurs sentimens, J’arrache quelquefois leurs applaudissemens ; Là, content du succès que le mérite donne, Par d’illustres avis je n’éblouis personne. […] Richelieu, dans ses vastes idées d’ambition, dans son projet de faire triompher la France, & par la gloire des armes & par celle des lettres, étoit trop heureux de voir s’élever un homme du mérite de Corneille. […] Le rival des Olivarès, des Buckingham, étoit bassement jaloux de tout mérite littéraire supérieur au sien. […] Il soutient que le jeu des acteurs fait tout le mérite du Cid, & prophétise que la pièce tombera nécessairement à la mort de Mondori, de La Villiers & de leur troupe.
Songez, mon ami, de quelle importance sont ces places pour des enfans dont communément les parens sont pauvres, qui ont beaucoup dépensé à ces pauvres parens, qui ont travaillé de longues années, et à qui l’on fait une injustice, certes très-criminelle, lorsque c’est la partialité des juges et non le mérite des concurrens qui dispose de ces places. […] Le mérite en effet avait été récompensé. […] Boucher, Dumont, Van Loo et quelques autres défenseurs du mérite se présentèrent les premiers, et les voilà entourés, accueillis, embrassés, applaudis. […] Il faut présenter à l’académie l’occasion de réparer son injustice, aller à Rome, ou mourir. " et voilà, mon ami, comme on décourage, comme on désole le mérite, comme on se déshonore soi-même et son corps ; comme on fait le malheur d’un élève et le malheur d’un autre à qui ses camarades jetteront au nez, sept ans de suite, la honte de sa réception ; et comme il y a quelquefois du sang répandu.
Barbier a le mérite d’avoir flétri les débauches dramatiques de notre temps, et ce mérite ne peut être méconnu sans ingratitude. […] Le seul mérite réel que je reconnaisse dans ce livre c’est le sentiment et la peinture du malheur. […] En épousant le dédain aveugle de la foule, il n’avait plus le mérite de l’espièglerie. […] Le mutuel et silencieux amour de Chatterton et de Kitty Bell n’a pas satisfait tous les désirs de la foule ; mais il a eu du moins le mérite de reposer l’attention haletante, et c’est à ce mérite qu’il faut attribuer une part du succès. […] Vitet ; mais restituer n’est pas créer, et le poète qui ne crée pas ne mérite pas le nom de poète.
Loin qu’on lui doive la louange de l’invention, il ne mérite que le reproche de l’avoir voulu usurper, en supprimant les auteurs qui avoient travaillé avant lui. […] Quoique l’imitation et le choix soient nécessaires au poëte, comme au peintre, le mérite du choix caractérise davantage le poëte, et le mérite de l’imitation caractérise davantage le peintre. […] Que de raisons d’estime ; mais toutes étrangeres au mérite de l’iliade en tant que poëme ! […] On s’imagine d’ordinaire que la fleur de l’esprit et de l’imagination n’y ont point de part, et qu’il n’y a presque d’autre mérite que la connoissance de deux langues. […] La réputation de ces endroits mérite plus particulierement que je justifie mes hardiesses.
Œuvres de jeunesse pour la plupart, autant que nous en pouvons juger, les pièces qu’il publie n’ont pas un mérite d’art assez éminent pour faire oublier toujours l’uniformité ou même le vide du fond. […] Ce n’est donc pas, disons-le franchement, dans les poésies originales qu’est pour nous le mérite de la nouvelle publication de M. […] La traduction des Baisers de Jean Second est précédée d’une notice étendue sur ce poète ; il mérite bien de nous arrêter un peu.
Un jugement prononcé avec tant de légèreté ne mérite pas d’être discuté. […] C’est pourquoi la clairvoyance de Fontanes mérite notre gratitude. […] Claudie ne mérite pas le même éloge. […] C’est à mes yeux un mérite très réel, dont je sais bon gré à M. […] Une femme ainsi faite ne mérite guère d’inspirer une affection profonde.
Il n’a guere plus de mérite que le précédent, comme Littérateur ; mais on fait grand cas de ses Ouvrages de Controverse & de Théologie, dont le plus connu est le Traité de la vérité de la Religion, un des meilleurs qui aient été composés depuis celui d’Abadie. L’Auteur y joint le mérite du style à la justesse & à la solidité des raisonnemens.
Sans vouloir leur attribuer un mérite trop grand, on peut dire que plusieurs approchaient du comique de bon aloi. […] Elle offre une particularité qui mérite d’être signalée. […] La comédie des Visionnaires avait donc au moins le mérite de l’actualité. […] — Fontenelle. — Mérite de ses œuvres. — Sa tragédie d’Aspar (1680) […] Si Pradon eût été un poëte modeste, il eût eu la réputation d’un poëte de mérite.
Les Détracteurs de Despréaux n’osent pas, il est vrai, disconvenir de la beauté de cette Poétique ; mais ils tâchent d’affoiblir le mérite de l’Auteur, en disant qu’elle n’est qu’une imitation de celle d’Horace, & le plus souvent une simple traduction. […] Qu’on lise les Mémoires de sa vie ; on y applaudira à la générosité de ses bienfaits, répandus sur les Littérateurs qu’il se croyoit obligé d’attaquer dans ses Ecrits ; on y apprendra qu’il a été le bienfaiteur de Liniere, qui ne cessoit de déclamer contre lui ; qu’il donna des secours à Cassandre, dont il estimoit peu les talens ; qu’il se réconcilia avec Perrault, en oubliant ses calomnies ; qu’il rendit justice à Boursault, en reconnoissant son mérite qu’il avoit trop méconnu ; qu’il conserva au célebre Patru sa Bibliotheque, en l’achetant plus cher qu’il ne vouloit la vendre, & en lui en laissant la jouissance ; qu’il osa refuser le paiement de la pension que lui faisoit Louis XIV, en disant à ce Prince, qu’il seroit honteux pour lui de la recevoir, tandis que Corneille, qui venoit de perdre la sienne, par la mort de Colbert, se verroit privé de ses bienfaits : ce qui valut à ce dernier un présent de deux cents louis ; qu’il eut un grand nombre d’amis dans les rangs les plus élevés, comme parmi les plus célebres Littérateurs de son temps, & qu’il les conserva toute sa vie. […] Ses autres Pieces n’ont pas, à la vérité, le même mérite ; mais elles n’en prouvent pas moins son talent & sa supériorité dans le genre qui lui étoit particulier. […] Le Philosophe marié est d’un autre genre de mérite : il prouve combien Destouches avoit de ressource dans l’imagination : conduire pendant cinq actes, sans langueur & sans inutilité, un sujet qui paroît capable de fournir tout au plus deux ou trois scènes, ne sauroit être l’Ouvrage que d’un esprit qui connoissoit les secrets du cœur & savoir tout ramener à l’action théatrale.
J’avais trouvé dans quelques-unes de ses productions une métaphysique souvent fausse et toujours inutile : je n’avais été bien frappé que du mérite du style, et j’avoue que la vérité est ce dont je fais le plus de cas dans les ouvrages comme dans les hommes : dans celui-ci ce n’est plus, comme dans les autres livres de J. […] Mais je crois que le mérite de ce roman ne peut être bien senti que par des personnes qui aient aimé avec autant de passion que de tendresse, peut-être même que par des personnes dont le cœur soit actuellement pénétré d’une passion profonde, heureuse ou malheureuse. […] Je ne dirai point, pour diminuer le mérite de cette chaleur, réelle ou prétendue, que J. […] L’ouvrage est un magasin de diamants que peut-être l’auteur aurait pu mieux mettre en œuvre ; mais le grand mérite est d’avoir su les tirer de la mine.
Je voudrais faire équitablement les deux parts, et juger cette personne de mérite en toute liberté, mais avec égards toujours et avec respect. […] Necker, et qui l’accueillit avec un mélange de cordialité et de malice : Je ne sais, Madame, écrivait Mme Necker à l’une de ses amies de Lausanne (novembre 1765), si je vous ai dit que j’ai vu Gibbon ; j’ai été sensible à ce plaisir au-delà de toute expression ; non qu’il me reste aucun sentiment pour un homme qui, je crois, n’en mérite guère, mais ma vanité féminine n’a jamais eu un triomphe plus complet et plus honnête. […] Il fut décidé qu’elle partirait pour Paris, où l’emmenait une femme du monde, Mme de Vermenou, qui, en passant à Genève, l’avait vue et s’était éprise de son mérite. […] Mais y renoncer lui eût trop coûté ; son mérite est d’avoir su concilier ce goût extrême pour l’esprit avec l’intégrité de ses principes dans un si périlleux voisinage. […] Mais, même hors du cercle domestique, Mme Necker mérite d’obtenir dans notre littérature un souvenir et une place plus marqués qu’on ne les lui a généralement accordés jusqu’à cette heure.
Cela pouvoit être ; mais cette critique ne doit pas nuire au mérite de ses Ouvrages, qui sont d’une utilité reconnue. […] Il mérite en cela plus d’indulgence qu’un grand nombre de nos Auteurs, qui montrent plus de prétentions sur cet article, sans avoir fait des études aussi constantes & aussi digérées que les siennes.
Journaliste & Traducteur justement oublié, mais qui ne mérite pas le même sort en qualité d’Historien. […] On peut donc reprocher au Public son indifférence à l’égard d’un mérite historique aussi rare.
Il est non seulement louable de ses bonnes intentions, mais encore très-digne d’estime par l’onction, les lumieres & l’instruction qu’il a su répandre dans ces différentes Productions, qui ont d’ailleurs le mérite d’être assez bien écrites. […] Les Littérateurs peu dévots seront étonnés de la place que nous donnons ici à cet Abbé ; mais ceux qui comprennent & ceux qui prouvent qu’une dévotion sage & éclairée est capable de rendre le mérite littéraire plus intéressant, souscriront volontiers à cette admission.
., mérite une place parmi les Auteurs véritablement utiles à leur Patrie. […] Les Auteurs de ce mérite sont d'autant plus estimables de s'attacher aux objets essentiels de nos premiers besoins, qu'ils sacrifient à l'utilité publique une célébrité qu'on n'accorde guere, dans ce Siecle frivole, qu'à des Auteurs frivoles.
Les père et mère de l’illustre maréchal de Villars étaient gens de mérite et d’esprit. […] M. de La Rochefoucauld en est curieux : Mme de Vins et moi, nous en attrapons ce que nous pouvons. » Mme de Villars avait un premier mérite auprès de Mme de Sévigné, c’était d’admirer beaucoup Mme de Grignan. […] Ces défauts étaient revêtus de plusieurs belles qualités : il était bien fait, il avait les manières agréables et polies, il parlait bien diverses langues ; il avait de l’esprit, du savoir, de la valeur, et tous les dehors du mérite, sans mérite même. » Huit jours avant sa mort, était arrivée la nouvelle du mariage de Mademoiselle, qui s’était fait à Fontainebleau par procuration, le Prince de Conti y représentant le roi d’Espagne. […] Dès les premiers pas que la jeune reine fit en Espagne, elle était donc tombée dans les filets d’une cabale, qui espérait se faire d’elle un point d’appui et de défense près du roi ; et, chose étrange et peu digne de la prudence de Louis XIV, on avait complètement négligé de placer auprès d’elle une personne prudente, une bonne tête pour la guider dans les commencements : « Entre nous, écrivait quelques mois après Mme de Villars à Mme de Coulanges, ce que je ne comprends pas, c’est qu’on ne lui ait pas cherché par mer et par terre, et au poids de l’or, quelque femme d’esprit et de mérite, et de prudence, pour servir à cette princesse de consolation et de conseil. […] Le marquis de Grana, homme de grand mérite, qui connaissait l’Espagne de longue main, et qui y revint alors en qualité d’ambassadeur de l’Empereur, était d’avance tout persuadé de la misère et de l’accablement de la monarchie ; mais, quand il vit les choses de près, il en fut épouvanté : il ne souhaitait plus que repartir au plus vite.
Mais la société, c’est-à-dire, des rapports sans but, des égards sans subordination, un théâtre où l’on appréciait le mérite par les données les plus étrangères à sa véritable valeur ; la société, dis-je, en France, avait créé cette puissance du ridicule que l’homme le plus supérieur n’aurait pu braver. […] Dans un pays où subsistera l’égalité politique, tous les genres de mérite seront admis, et il n’existera point une société exclusive, consacrée uniquement à la perfection de l’esprit de société, et réunissant en elle tout l’ascendant de la fortune et du pouvoir. Or, sans ce tribunal toujours existant, l’esprit des jeunes gens ne peut se former au tact délicat, à la nuance fine et juste, qui seule donne aux écrits, dans le genre léger, cette grâce de convenance et ce mérite de goût tant admiré dans quelques écrivains français, et particulièrement dans les pièces fugitives de Voltaire. […] Il y a des vertus qui vous attachent à votre famille, à vos amis, aux malheureux ; mais dans tous les rapports qui n’ont point pris encore le caractère d’un devoir, l’urbanité des mœurs prépare les affections, rend la conviction plus facile, et conserve à chaque homme le rang que son mérite doit lui obtenir dans le monde. […] Sous la monarchie, l’esprit chevaleresque, la pompe des rangs, la magnificence de la fortune, tout ce qui frappe l’imagination suppléait, à quelques égards, au véritable mérite ; mais, dans une république, les femmes ne sont plus rien, si elles n’en imposent pas par tout ce qui peut caractériser leur élévation naturelle.
Les Places qu'il a remplies semblent avoir trop fait oublier son mérite littéraire. […] Son mérite fut encore relevé par une piété sincere, tendre & solide fruit du bon usage de ses lumieres ; elle fit sa ressource dans sa retraite, & donne un nouveau prix à ses talens.
C’est un mérite sans doute, que de savoir narrer avec esprit, en vers libres & faciles ; mais ce mérite n’est pas suffisant, quand on aspire à la gloire d’un succès solide & durable.
Quoique le peu de Prose & de Vers que nous avons de lui soient totalement oubliés, il ne faut pas croire que cet Auteur fût sans mérite. […] Après le mérite de faire de bons Ouvrages, le plus grand est celui d’encourager ceux qui travaillent avec succès, & de s’attirer leur estime.
De tout ce qu’on peut appeler le théâtre d’alors, il n’est resté qu’une pièce qui mérite d’être lue : c’est la farce de Pathelin. […] Mais il intéressa par un certain mérite d’action. […] Pour juger du mérite d’un génie créateur, il faut le comparer au chaos d’où sont sorties ses créations. […] Ce devait être là le mérite de Racine. […] Le mérite en est à Corneille, qui, en créant l’art, avait créé un public pour le goûter.
L’Historien de l’Académie veut, sans doute, le louer de son assiduité aux Assemblées, mérite peu intéressant pour le Public ; ou peut-être fait-il allusion à la vaste & profonde érudition de M. de Meziriac : en ce cas, il fait plus d’honneur à l’Académie Françoise, qu’elle ne mérite.
L’ordre & l’exactitude sont le mérite de ce livre plusieurs fois réimprimé. […] in-12. 2. vol., mérite les mêmes éloges. […] Corneille le Bruin est généralement estimé, & il mérite de l’être. […] C’est son séjour dans la capitale des Empereurs Ottomans qui mérite, à notre avis, d’occuper le plus la curiosité des lecteurs. […] L’Egypte est une des parties de l’Afrique qui mérite le plus d’être connue.
Sa Cour Sainte ne mérite pas les railleries qu’en a faites le Marquis d’Argens : cet Ouvrage respire la piété, la douceur, une morale pure, & est écrit d’un style supérieur à celui de bien de Ecrivains de son temps. La preuve de son mérite, c’est qu’il a été traduit en Latin, en Italien, en Espagnol, en Portugais, en Allemand, & même en Anglois.
Quiconque lira avec réflexion ses Mémoires historiques & critiques, sur les objets les plus importans du grand Empire des Egyptiens, sera forcé de convenir qu’il a su allier au mérite du savoir, celui d’un style simple, concis, énergique, qualités qui lui donnent un nouveau prix. […] Il existe un autre Ouvrage fait sur le même plan, & portant le même titre : celui-ci, composé par une Société de Gens de Lettre, a eu beaucoup de succès & mérite l’estime dont il jouit.
Ses Sermons,quoique très-estimables, quoique d’un style naturel, oratoire, & assorti aux différens sujets, ne sont pas la partie la plus frappante de son mérite. […] Le volume qu’il a ajouté auxMémoires chronologiques du P. d’Avrigny, son Confrere, a le même mérite.
Si l'imagination est, après le génie, le premier mérite des Gens de Lettres ; Mlle de Scudery a sujet de se plaindre de l'oubli où elle est tombée. Elle a eu non seulement le mérite d'inventer, mais celui d'une érudition qui la place parmi nos Femmes savantes, immédiatement après Madame Dacier.
Vous savez la phrase très commune, mais très vraie : « Quel mérite a-t-on d’aimer ses enfants ? » On a le mérite des âmes bien faites et profondes ; mais de mérite acquis, pénible, arraché aux instincts et tout saignant des cruautés du sacrifice, il n’y en a point, c’est la vérité ! […] Et le mérite est encore là d’être ce qu’on est, c’est-à-dire un des privilégiés du bon Dieu !
Cette grâce, cette expression douce et légère qui embellit en paraissant se cacher, qui donne tant de mérite aux ouvrages et qu’on définit si peu ; ce charme qui est nécessaire à l’écrivain comme au statuaire et au peintre ; qu’Homère et Anacréon eurent parmi les poètes grecs, Apelle et Praxitèle parmi les artistes ; que Virgile eut chez les Romains, et Horace dans ses odes voluptueuses, et qu’on ne trouva presque point ailleurs ; que l’Arioste posséda peut-être plus que le Tasse ; que Michel-Ange ne connut jamais, et qui versa toutes ses faveurs sur Raphaël et le Corrège ; que, sous Louis XIV, La Fontaine presque seul eut dans ses vers (car Racine connut moins la grâce que la beauté) ; dont aucun de nos écrivains en prose ne se douta, excepté Fénelon, et à laquelle nos usages, nos mœurs, notre langue, notre climat même se refusent peut-être, parce qu’ils ne peuvent nous donner, ni cette sensibilité tendre et pure qui la fait naître, ni cet instrument facile et souple qui la peut rendre ; enfin cette grâce, ce don si rare et qu’on ne sent même qu’avec des organes si déliés et si fins, était le mérite dominant des écrits de Xénophon. […] Il n’y a dans tout cet éloge nul mouvement d’orateur ; c’est la marche simple d’un homme vertueux qui parle de la vertu avec ce sentiment doux qu’elle inspire ; en général, c’est là le mérite des anciens ; nous mettons plus d’appareil à tout, et dans nos actions comme dans nos écrits. […] Parmi la foule de ses ouvrages, on a de lui un éloge de Démosthène, qui mérite d’être distingué ; Lucien y est original et piquant comme partout ailleurs ; il ne s’astreint pas à la forme des éloges ; sa devise, comme il le dit lui-même, est de n’imiter personne.
Il ajoute encore un nouveau mérite à ses remarques, celui d’en rapprocher plusieurs citations tirées des meilleurs Poëtes François, vrai moyen de répandre une agréable variété sur les sujets qu’il traite. […] La Vie des Poëtes Latins, qui a suivi celle des Poëtes Grecs, a le même mérite & les mêmes défauts, à cela près que les notices sont plus étendues, parce que les matériaux ont été plus abondans.
Ces Traités auroient eu le mérite de contenir d'excellentes choses, qui sont déplacées dans ses Lettres. […] Le Poëme de la Sagesse, qu'on a faussement attribué au Marquis de la Fare, ne répond point au mérite des autres Productions de M.
Il le déchira dans ses Satires ; mais à la fin il rendit témoignage à ses talens : De tous les Auteurs que j’ai critiqués, écrivoit-il à Brossette son Commentateur, Boursault est, à mon sens, celui qui a le plus de mérite. […] On peut avoir du mérite, sans égaler les Auteurs originaux.
Son seul mérite consiste dans quelques anecdotes sur les anciens Philosophes, qui supposent de l’étude & des recherches aux yeux de ceux qui ignorent que l’Auteur les a presque toutes puisées dans Diogene Laërce & dans les notes de Ménage. […] Il mérite encore des louanges pour son Recueil de différens Traités de Physiques & d’Histoire naturelle.
La fortune ne répondit pas à l’éclat de sa naissance, ni au mérite de son esprit, si on en juge par ces Vers qu’elle adressoit à cette derniere. Ton sort est glorieux, & le mien est fatal : Nos aïeux, autrefois, marchoient d’un pas égal ; Cependant entre nous que je vois de distance, Et combien ton mérite y met de différence !
Si ses Maximes ne sont pas toujours nouvelles, on ne peut leur refuser le mérite d'être énoncées avec netteté, précision, & souvent avec élégance. […] Il ne faut pas oublier que sa Philosophie est toujours d'accord avec la politique & la Religion ; & c'est en cela qu'elle mérite mieux le nom de Philosophie.
Vien La Piscine miraculeuse de Vien est une grande composition qui n’est pas sans mérite. […] Jesus Christ rompant le pain à ses disciples ; St Pierre, à qui Jesus demande, après la pêche, s’il l’aime ; La Musique ; une Résurrection du Lazare sont quatre tableaux du même, dont je ne sens pas le mérite.
Beauzée est une Traduction des Histoires de Salluste, qui réunit le mérite de la fidélité à un style noble, rapide & précis. […] Au reste, s’il faut juger des qualités personnelles de cet Auteur par le nombre & le mérite de ses amis, on ne peut que se former l’idée la plus avantageuse de son caractere.
La Fare ne se sépare guère de Chaulieu, et si on lit encore quelques-uns de ses vers légers, ce n’est guère qu’à la suite de ceux de son ami : il mérite pourtant une considération à part ; il a une physionomie très marquée ; il laisse même à qui l’étudie une impression toute autre que celle que l’on reçoit de la rencontre de Chaulieu. […] Né en 1644 d’une noble famille du Vivarais, fils d’un père homme de mérite et qui avait laissé de bons souvenirs, il entra dans le monde à dix-huit ans (1662), l’année même où Louis XIV, affranchi de la tutelle de Mazarin, préludait à sa royauté sérieuse : « Ma figure, dit-il, qui n’était pas déplaisante, quoique je ne fusse pas du premier ordre des gens bien faits, mes manières, mon humeur et mon esprit qui étaient doux, faisaient un tout qui plaisait à tout le monde, et peu de gens en y entrant ont été mieux reçus. » Mme de Montausier, cette personne de considération, lui témoignait de l’amitié en souvenir de son père, et l’appuyait de son crédit. […] Le monde en parla beaucoup ; on avait dans le principe loué et blâmé en tous sensr, comme c’est l’usage : les uns prenaient parti pour La Fare d’avoir quitté le service pour un si beau motif, les autres lui contestaient ce mérite. […] La Fare rend pourtant cette justice au cardinal de Richelieu « qu’avec cette jalousie qu’il avait de l’autorité royale et de la sienne qu’il en croyait inséparable, il aima et récompensa la vertu partout où elle ne lui fut pas contraire, et employa volontiers les gens de mérite ». […] Il nous a nommé lui-même sa passion favorite et l’a ouvertement célébrée dans des stances à Chaulieu Sur la paresse ; il attribue à cette enchanteresse plus de mérite qu’on ne peut lui en reconnaître quand on sait quelle fut son influence sur sa vie : Pour avoir secoué le joug de quelque vice, Qu’avec peu de raison l’homme s’enorgueillit !
Cette princesse pleine de mérite et d’esprit, l’aînée de Frédéric et sa vraie sœur par la pensée et par l’âme, mariée au prince héréditaire de Bareith, et peu à sa place dans cette petite cour, se mit un jour, pour se désennuyer, à écrire toutes les peines, toutes les persécutions domestiques qu’elle avait éprouvées avant et même depuis son mariage. […] Après les heures qu’elle employait auprès de son estimable gouvernante Mme de Sonsfeld, personne de mérite qu’un coup du ciel lui donna pour remplacer l’abominable Leti, ses meilleurs moments, ses seuls bons moments étaient ceux qu’elle passait avec son frère, et si la raillerie, la satire, le rire aux dépens du prochain les occupaient trop souvent, il faut bien penser que c’était une revanche très permise à des natures supérieures entourées d’êtres grossiers, abjects ou méchants qui les opprimaient. […] Je suis d’opinion que cette qualité ne consiste qu’à résister aux tentations ; comme je n’y suis point exposée, et que je possède l’attribut de n’en point être susceptible, je ne puis tirer vanité d’un mérite inné avec moi. […] Séduit par l’esprit de Voltaire, Frédéric tient bon tant qu’il peut contre les tracas et les zizanies qu’a engendrées son séjour ; il exprime pourtant à ce sujet plus d’une pensée de pur bon sens et de morale pratique, et qui peut servir de leçon aux littérateurs de tous les temps : Après avoir goûté de tout et essayé de tous les caractères, écrit-il à sa sœur (29 décembre 1751), on en revient toujours aux personnes de mérite : Il n’y a que la vertu de solide, mais elle est rare à trouver. […] S’il y avait quelque chose de capable de renverser ma chétive cervelle, ç’aurait été les choses obligeantes que vous y ajoutez… ; mais, ma chère sœur, en faisant un retour sur moi-même, je n’y trouve qu’un pauvre individu composé d’un mélange de bien et de mal ; souvent très mécontent de soi-même, et qui voudrait fort avoir plus de mérite qu’il n’en a ; fait pour vivre en particulier obligé de représenter ; philosophe par inclination, politique par devoir ; enfin, qui est obligé d’être tout ce qu’il n’est pas, et qui n’a d’autre mérite qu’un attachement religieux à ses devoirs.
Personne presque n’a assez de mérite pour jouer ce rôle avec dignité, ni assez de fonds pour remplir le vide du temps, sans ce que le vulgaire appelle des affaires. […] Tout ce qu’il dit de Mme de Staël, de M. de Chateaubriand, du comte de Maistre, de M. de Lamennais et du monde de l’Avenir, de Victor Hugo et de son salon avant et après 1830, des Saint-Simoniens et de leur monde, etc., etc., mérite peu qu’on s’y arrête. […] Beyle eut un mérite rare, incontestable : du sein de la littérature de l’Empire, qui retardait sur les grandes actions et des prodigieux événements contemporains, il sentit qu’une autre littérature devait naître. […] « Le mérite de Manzoni (en 1819) est d’avoir saisi la saveur de l’eau dont le public italien avait soif. » Usons du libre conseil pour la France. […] « Mme Tastu, une femme de mérite plutôt que d’esprit, qui a été poëte un jour. » La voilà bien définie, et telle que je l’ai comprise.
Il est bien entendu qu’en insistant à dessein et par manière d’exemple sur les mérites de Pope, je ne fais à l’ouvrage de M. […] Tous les mérites en effet, tous les caractères distinctifs de ce beau talent, il les a reconnus, et on pourrait même lui emprunter des phrases pour les définir ; mais il ne se comporte pas avec lui comme avec les autres grands poètes qu’il a rencontrés jusque-là, il ne se complaît pas à le replacer dans son milieu ; il le déprime plutôt dans l’ensemble, il le réduit, et quand il est forcé de lui reconnaître une qualité, il ne la met pas dans son plus beau jour. […] Il est donc tout simple qu’en voyant l’Iliade de Pope, Bentley ait dit : « Il ne fallait pas intituler cela Homère. » L’ouvrage de Pope n’en est pas moins un merveilleux travail en soi, et celui qui l’a exécuté mérite qu’on parle de lui, même à cette occasion, avec tous égards et une belle part d’éloges. […] Sa Correspondance ne me paraît pas avoir encore été recueillie et publiée comme elle le mérite. […] Enfin, je ne saurais quitter un semblable ouvrage et un auteur de ce mérite sans dire quelque chose de l’incident académique qui a fait bruit.
Jaloux de la faveur et du crédit, porté en naissant au sein de la fortune, il ne négligea aucun moyen de se pousser et de monter aussi haut qu’il le pourrait : il avait de quoi justifier cette ambition par son mérite et par divers genres de talents. […] À la mort de Louis XIV, le Régent le mit de fait à la tête du Conseil des finances : il eut d’abord la haute main, recourut tant bien que mal à des expédients ou à des palliatifs, eut le mérite de repousser l’idée de banqueroute, mais ne voulut point des États généraux dans le principe et n’en voulut ensuite que lorsqu’il était trop tard, visa sans cesse à être premier ministre, vit tourner la roue et se retira devant la faveur de Law, à la veille des entreprises aventureuses. […] Elles assiègent la fortune à la sape, quand les hommes d’un vrai mérite perdent la leur par des orages ; et s’il arrive que quelques-uns de ces grands seigneurs se fassent une réputation d’application et de bons mots, on les charge d’affaires, et on en fait les premiers personnages du théâtre. […] La vérité, la vraie mesure sur le maréchal de Noailles, je n’ai pas le mérite de la trouver : je la rencontre tout exprimée chez un historien consciencieux, qui a beaucoup lu, beaucoup résumé, et dont le style piquant, un peu recherché, mais incisif, grave son objet. […] Je n’ai pas besoin de dire que cela est léger et injuste ; j’ai rappelé plus haut le mérite de membres éminents de la famille de Noailles dans le xvie siècle.
Chéruel a établi une biographie du duc, la plus exacte et la plus complète qu’on ait jusqu’ici ; il a ensuite examiné la valeur du témoin et la confiance qu’il mérite à titre d’historien. […] Chéruel sur presque tous les points, lorsqu’on a reconnu la justesse de la plupart de ses observations, pourtant rien n’est changé au mérite de Saint-Simon ; il reste ce qu’il est, Saint-Simon après comme devant, le plus prodigieux des peintres de portraits et le roi de toute galerie historique. […] Saint-Simon mérite de se tirer de toutes ces critiques mieux encore que Retz, qui s’en tire pourtant ; il s’est donné plus de peine pour être vrai, il est moins à la merci de son imagination ou, lorsqu’il s’y abandonne, on le voit ; il est plus naïf. […] Chéruel : Saint-Simon, qui n’était à aucun degré militaire, n’a pas su reconnaître ce qui a fait, bien avant Denain, le mérite et la distinction de Villars, ce qu’il avait de hardi dans les conceptions, et aussi d’habile et de prudent au besoin dans les manœuvres. […] Saint-Simon aurait bien eu besoin d’avoir parmi ses amis un bon général de cet esprit et de ce mérite, pour le renseigner ou le redresser sur les faits de guerre.
Malgré toutes les critiques que je me permettrai de lui adresser, il mérite pourtant notre reconnaissance ; je le dis en commençant comme je le répéterai en finissant. […] Du reste, il a de l’esprit, du savoir et du mérite… » Je ne sais pourquoi M. […] Il en résulte qu’aux yeux de Valincour comme de Despréaux, La Bruyère était un homme qui, avec beaucoup de mérite, tâchait un peu trop et s’évertuait en société ; il s’y donnait un peu trop de mouvement pour plaire, pour être agréable. […] Valincour, homme du monde, écrivain amateur, esprit délicat, ne mérite en rien ces sévérités de M. […] Il a attribué et fait semblant d’attribuer uniquement à Leurs Altesses les suffrages que Bussy, par un retour naturel de politesse, a mis uniquement sur le compte de son mérite.
Et, par exemple, je ne vois pas, dans les histoires qu’il a écrites, un mot qu’il n’ait justifié dans sa conduite et dans sa vie : Un prince, disait-il et pensait-il, est le premier serviteur et le premier magistrat de l’État ; il lui doit compte de l’usage qu’il fait des impôts ; il les lève, afin de pouvoir défendre l’État par le moyen des troupes qu’il entretient ; afin de soutenir la dignité dont il est revêtu, de récompenser les services et le mérite, d’établir en quelque sorte un équilibre entre les riches et les obérés, de soulager les malheureux en tout genre et de toute espèce ; afin de mettre de la magnificence en tout ce qui intéresse le corps de l’État en général. […] En racontant l’histoire de ce souverain habile et brave, qui « à la fortune médiocre d’un électeur sut unir le cœur et les mérites d’un grand roi », en nous parlant de ce prince « l’honneur et la gloire de sa maison, le défenseur et le restaurateur de la patrie », plus grand que son cadre, et de qui date sa postérité, on sent que Frédéric a trouvé son idéal et son modèle : ce que le Grand Électeur a été comme simple prince et membre de l’Empire, lui il le sera comme roi. […] Ce premier roi de Prusse, par toute sa vie de vaine pompe et d’apparat, disait, sans le savoir, à sa postérité : « J’ai acquis le titre, et j’en suis fier ; c’est à vous de vous en rendre dignes. » Le père de Frédéric, dont son fils, si maltraité par lui, a si admirablement parlé, et dans un sentiment non pas filial, mais vraiment royal et magnanime, ce père grossier, économe, avare, bourreau des siens et idolâtre de la discipline, cet homme de mérite pourtant, qui « avait une âme laborieuse dans un corps robuste », avait rendu à l’État prussien la solidité que l’enflure et la vanité du premier roi lui avaient fait perdre. […] Cela sent un reste de mauvais goût natif et de grossièreté septentrionale, et l’on a pu dire, avec une juste sévérité, des lettres de Frédéric : « Il y a de fortes et grandes pensées, mais tout à côté il se voit des taches de bière et de tabac sur ces pages de Marc Aurèle. » Frédéric, qui avait du moins le respect des héros, a dit : « Depuis le pieux Énée, depuis les croisades de saint Louis, nous ne voyons dans l’histoire aucun exemple de héros dévots. » Dévots, c’est possible, en prenant le mot dans le sens étroit ; mais religieux, on peut dire que les héros l’ont presque tous été ; et Jean Muller, l’illustre historien, qui appréciait si bien les mérites et les grandes qualités de Frédéric, a eu raison de conclure sur lui en ces mots : « Il ne manquait à Frédéric que le plus haut degré de culture, la religion, qui accomplit l’humanité et humanise toute grandeur18. » Je ne veux plus parler aujourd’hui que de Frédéric historien. […] Il est fermement de l’opinion « qu’une chose ne mérite d’être écrite qu’autant qu’elle mérite d’être retenue ».
Qu'on ajoute à ces différentes especes de mérite, la connoissance de plusieurs Langues vivantes, une application constante à l'étude, & l'on croira sans peine que le titre d'Académicien a été, par rapport à lui, non une vaine décoration accordée au rang & au crédit, mais un hommage rendu au savoir & au mérite.
Ce n’est pas aussi sur leurs déclamations qu’il convient de juger de son mérite. […] Il est certain encore que ses Adversaires n’ont jamais pu lui contester le mérite des talens : il faudroit être bien injuste ou bien aveugle, pour ne pas convenir, après la lecture de ses Ouvrages, que peu d’Auteurs parmi nous ont l’esprit aussi vigoureux, le goût aussi sûr, & le style aussi piquant. […] Si on pardonne ce défaut en faveur des circonstances & des motifs, qui non seulement le justifient, mais en font un mérite, on pourra dire que cet Ecrivain a rendu de vrais services aux Lettres, en frondant avec vigueur les usurpations qui les dégradent.
D’autre part, ceux qui tenoient pour Mellin de Saint-Gelais n’accordoient du mérite qu’à lui seul. […] Toutes les trompettes, réunies pour annoncer le mérite de Ronsard, ne se turent que vers le temps de Louis XIII. […] La ville de Toulouse, pour le remercier d’avoir bien voulu mettre aux jeux floraux, dont il remporta le premier prix, ne jugeant pas la récompense ordinaire proportionnée à tant de mérite, fit faire une Minerve d’argent massif, & d’un prix considérable, qu’elle lui envoya.
C’est cette envie de s’instruire & de se former le goût, qui le fit lier, dès son entrée dans le monde, avec les Sulli, les Châteauneuf, les Chaulieu, & tout ce qu’il y avoit en France de gens aimables & de mérite. […] L’abbé du Jarri, malgré ses pôles brûlans, & ses pôles glacés, l’emporta sur un concurrent de ce mérite. […] « Ses talens, ses malheurs, & ce que j’ai oui dire ici de son caractère, ont banni de mon cœur tout ressentiment, & n’ont laissé mes yeux ouverts qu’à son mérite. » *.
N’est-ce pas reconnoître que le plaisir d’entendre la récitation en impose à notre jugement, que de remettre à prononcer sur le mérite d’un poëme qui nous a plû, en l’entendant réciter, jusques à la lecture que nous en voulons faire, comme on dit, l’oeil sur le papier ? […] Mais les romains comptoient que le plaisir du rithme et de l’harmonie dût suppléer au mérite de la nouveauté qui manquoit à ces vers. […] Le premier mérite du déclamateur, est celui de se toucher lui-même.
Seulement ce n’est pas du mérite intrinsèque du livre de Houssaye que nous voulons parler. […] Mais si nous ne revenons pas sur le mérite, historique ou littéraire, d’un livre qui ne peut plus être loué que par Janin, — et dans l’Artiste, encore ! […] Les hommes qui sentent le mieux le mal, l’inépuisable mal que fait Voltaire, répugnent à le traiter comme il le mérite, ce roi des élégances empestées.
Ce fut donc parce que Cotin se prévaloit un peu trop d’une réputation usurpée, qu’il cabaloit dans les petites Sociétés de son temps, qu’il s’étoit érigé en Président de quelques Bureaux d’esprit, qu’au milieu de ces Sénats ridicules, où il étoit écouté comme un Oracle, il insultoit au vrai mérite, en faveur du sien & de celui de ses amis ; ce fut enfin l’admiration indiscrete de l’Hôtel de Rambouillet, qui fit pleuvoir sur lui les anathêmes de l’Auteur du Lutrin, & de celui des Femmes Savantes. Il en arrivera toujours de même à ces petits Oppresseurs du vrai mérite, & en même temps les Corrupteurs du goût de ceux qui les écoutent.
On y puise des lumieres propres à éclairer l’ignorance, & des sentimens capables de respecter la vertu ; double mérite dont nos Auteurs philosophes sont bien éloignés. Ceux qui ont désapprouvé les louanges que nous donnons à cette Histoire, ne la connoissent pas sans doute, ou s’en sont rapportés, pour son mérite, à des jugemens légers ou partiaux.
Enfin il a le mérite de la double harmonie, soit de celle qui, par le mélange et l’heureux enchaînement des mots, n’est destinée qu’à flatter et à séduire l’oreille ; soit de celle qui saisit l’analogie des nombres avec le caractère des idées, et qui, par la douceur ou la force, la lenteur ou la rapidité des sons, peint à l’oreille en même temps que l’image peint à l’esprit. […] Ce tableau, dont les couleurs ne sont peut-être pas assez vives, a surtout le mérite de la vérité. […] Je passe rapidement sur tous les discours, pour venir à celui qui a, et qui mérite en effet le plus de réputation ; c’est l’éloge funèbre de Turenne, de cet homme si célèbre, si regretté par nos aïeux, et dont nous ne prononçons pas encore le nom sans respect ; qui, dans le siècle le plus fécond en grands hommes, n’eut point de supérieur, et ne compta qu’un rival ; qui fut aussi simple qu’il était grand, aussi estimé pour sa probité que pour ses victoires ; à qui on pardonna ses fautes, parce qu’il n’eut jamais ni l’affectation de ses vertus, ni celle de ses talents ; qui, en servant Louis XIV et la France, eut souvent à combattre le ministre de Louis XIV, et fut haï de Louvois comme admiré de l’Europe ; le seul homme, depuis Henri IV, dont la mort ait été regardée comme une calamité publique par le peuple ; le seul, depuis Du Guesclin, dont la cendre ait été jugée digne d’être mêlée à la cendre des rois, et dont le mausolée attire plus nos regards que celui de beaucoup de souverains dont il est entouré, parce que la renommée suit les vertus et non les rangs, et que l’idée de la gloire est toujours supérieure à celle de la puissance. […] On trouvera ce mérite dans l’oraison funèbre de la feue reine, prononcée à l’Académie française par M. l’abbé de Boismont.
Cet Art veut, sur tout autre, un suprême mérite, a dit la Fontaine. […] l’Abbé Coyer a le mérite de la bonne intention.
Il n’eût pas, à la vérité, acquis autant de gloire que son pere, dont les talens étoient supérieurs aux siens ; mais il se fût garanti du blâme d’avoir préféré le coupable plaisir d’amuser le libertinage & la frivolité, au mérite solide de donner des Productions décentes & utiles. […] Non : les Ouvrages de M. de Crébillon en sont la preuve : Tanzaï, le Sopha, Alcibiade, &c. n’ont pas même le mérite du style.
M. de Montesquieu, qui le remplaça à l'Académie, eût dû s'étendre sur son mérite littéraire, & ne pas se borner à louer les qualités de son ame. […] Ils peuvent se garantir d'un entier naufrage ; mais les débris qu'ils conservent, sont des preuves de leur chute, & non des preuves de leur mérite.
Enfin un architecte, ami de la maison, proposa pour maître un élève de David dont le mérite et la probité lui étaient connus. […] « Il n’y a plus rien sur la terre qui mérite une larme ! […] Peu de temps après, Duqueylar se décida à aller se fixer à Rome, où il exagéra tout à l’aise le mérite et le défaut de ses productions. […] Aussi la coïncidence de ces deux événements mérite-t-elle attention. […] Cette aventure mérite d’être rapportée, car elle peint la vivacité de caractère de Girodet et le laisser-aller qui régnait alors dans les mœurs.
On est dispensé de s’étendre sur le mérite de son Livre, intitulé, les Erreurs de M. de Voltaire. […] Nous savons que M. l’Abbé Nonote n’a point écrit dans des vûes intéressées, & qu’il ne s’est jamais proposé d’autre but que l’utilité publique ; mais ce qui ajoute à son mérite, peut-il excuser les distributeurs des récompenses ecclésiastiques de l’avoir oublié ?
Il faut être d'une extrême indulgence ou peu attentif à observer le mérite d'un Ouvrage, pour assurer, comme l'a fait l'Auteur du Nouveau Dictionnaire historique, que cette Histoire de Louis XIV mérite en général de satisfaire les Gens de goût.
Le mérite n’est pas à penser noblement des choses ; mais à les voir comme elles sont, sans se les affoiblir, ni se les exagérer. […] On voit bien à plus forte raison, que le poëte comique et le pastoral doivent se réduire à une naïveté élégante, et mettre tout leur mérite dans l’exactitude de l’imitation. […] C’est par-là qu’un traducteur peut être excellent ; c’est par-là qu’un lecteur équitable doit juger de son mérite. […] Cet usage a commencé avec les poëtes, et on diroit qu’ils se sont copiés depuis les uns les autres, pour célébrer leur mérite et se couronner de leur propre main. […] Un génie médiocre, formé sur leurs exemples, peut tenir lieu du génie excellent qu’ils ont eu sans autre secours ; et enfin la perfection des ouvrages pourroit être de notre côté, que l’avantage du mérite personnel seroit encore du leur.
Dacier, qui était à peu près de son âge et de trois ans au plus son aîné, avait étudié à Saumur, sous Tanneguy Le Fèvre, dont il avait été l’élève particulier et de prédilection ; il était donc le compagnon d’études de Mlle Le Fèvre, et avait pu de bonne heure apprécier son mérite et sa supériorité. […] Dacier, dans laquelle on lit ces détails et quelques autres plus appuyés111 ; elle est datée de Castres, du 25 septembre 1685, et elle a pour commentaire ce passage du Journal de Dangeau : « 2 octobre. — Le roi eut nouvelle à son lever que toute la ville de Castres s’était convertie. » Cette action signalée des deux époux devenait un mérite auprès de Louis XIV, un titre à ses futurs bienfaits, et, dans la lettre dont je parle, l’honnête homme, qui n’était que de la race des savants, ne se montrait pas insensible à cette idée. […] Pour peindre cette diction homérique dont elle est pénétrée et qui fait l’âme du poème, elle a des paroles qui sont d’un écrivain et des images qui portent sa pensée : « La louange, dit-elle, que ce poète donne à Vulcain, de faire des trépieds qui étaient comme vivants et qui allaient aux assemblées des dieux, il la mérite lui-même : il est véritablement cet ouvrier merveilleux qui anime les choses les plus insensibles ; tout vit dans ses vers. » Comment donc oser le traduire ? […] Charles a tort ; il lit le grec, et ne se met point à la place de ceux qui ne le savent pas ; il était digne de sentir ce mérite utile d’une femme docte et simple. […] Je sais bien que je ne dois pas exiger qu’on ait pour moi la même complaisance qu’on a eue pour de grands hommes, anciens et modernes, qui, dans la même situation où je me trouve, se sont plaints de leur malheur ; mais j’espère que l’humanité seule portera le public à ne pas refuser à ma faiblesse ce qu’on a accordé à leur mérite : jamais on ne s’est plaint dans une plus juste occasion.
La suite vous prouvera que mon cœur est fait pour l’amitié, que je n’en promets pas par-delà ce que j’en veux donner, que je ne suis point susceptible de dégoût sans cause, et que j’ai quelque discernement pour juger du mérite. […] Rien n’est plus glorieux, Monsieur, que de vous être acquis sans soins, sans intrigues, et par la seule force de votre mérite, un protecteur cent fois plus respectable encore par ses vertus que par sa haute naissance. […] Tranquillisez-moi sur cet article : vous en avez un moyen, que mon amitié pour vous mérite et exige que vous employiez : c’est de me promettre de ne pas vous réduire vous-même à des extrémités dont la seule pensée m’effraye, et de vous adresser à moi avant que vos propres ressources soient tout à fait épuisées. […] Je mérite que vous ayez égard aux motifs qui me font toujours agir vis-à-vis de vous. […] « En vérité, le monde n’est pas si corrompu que ces messieurs le prétendent ; la bonté n’est pas rare ; chaque nation offre à celui qui les cherche une infinité d’hommes estimables, portés par leurs principes ou par leur naturel à aimer, à servir ceux qui leur ressemblent ; partout le mérite et l’honneur trouvent de l’appui, des secours, des amis.
Si c’est là l’ordinaire condition des femmes, même spirituelles, le mérite est d’autant plus grand chez celles qui savent s’affranchir des mobiles habituels à leur sexe, sans en rien perdre du côté de la grâce. […] J’en connais qui n’ont pas moins d’esprit et de discrétion que de charme et de beauté ; mais ce sont des singularités que la nature, par dessein ou par caprice, se plaît quelquefois à nous donner… Ces femmes extraordinaires semblent avoir emprunté le mérite des hommes, et peut-être qu’elles font une espèce d’infidélité à leur sexe, de passer ainsi de leur naturelle condition aux vrais avantages de la nôtre. […] Saint-Évremond, pris en faute et un peu honteux sans doute de sa raillerie à faux, s’empresse de réparer, et il écrit à Ninon une lettre où il la loue comme elle le mérite, et où il nous la représente au naturel dans ce moment de transition et de métamorphose. […] S’il est amoureux du mérite que l’on appelle ici distingué, peut-être que votre souhait sera accompli ; car tous les jours on me veut consoler de mes pertes par ce beau mot. […] Pour consoler Ninon de la vieillesse, on lui disait qu’elle était une femme d’un mérite distingué.
Cette édition, qui en est maintenant au vingtième volume, mérite en France notre attention et revendique sa place dans nos bibliothèques. […] Ne voyez en moi qu’un ami sincère, et vous ne vous tromperez jamais ; mais n’exaltez pas des mérites que je n’ai pas, et qui me font rougir de ne les pas avoir. […] Cela revient à ce que je viens de dire, qu’il ne suffit pas d’avoir simplement du mérite, mais qu’il faut encore être en passe de le pouvoir faire éclater. […] J’ai connu quelques-uns de cette famille qui se distinguaient par leur mérite, et qui s’étaient concilié mon estime. […] Elle mérite de nous arrêter encore ; je n’ai fait que l’effleurer cette fois ; je continuerai à la faire connaître par extraits et à y dégager les belles parties, celles surtout qui sont propres à caractériser en lui l’ami sincère.
Mais ces critiques, aujourd’hui faciles, ne doivent point fermer les yeux sur les mérites auxquels les contemporains furent sensibles, et Talma, dans le rôle de Montcassin, jouant en face de Mme Vanhove qui faisait Blanche et qu’il aimait réellement lui-même versait et faisait couler de vrais pleurs : Contarini. […] Dussault qui, dans un très bon article, a rendu justice au mérite des Fables d’Arnault à leur naissance (17 janvier 1813), remarque « que l’auteur semble n’avoir acheté l’avantage de l’originalité qui distingue ses fables qu’aux dépens d’une certaine douceur, d’une certaine aménité, qui forme un des caractères les plus aimables de l’apologue, et qu’on regrette de ne pas trouver dans un certain nombre de ses compositions : cette physionomie nouvelle qu’il a su donner à la fable a parfois quelque chose de passionné, de brusque et même de violent ; quelquefois le ton du nouveau moraliste paraît âpre… ». […] Arnault en a su faire un mérite et une distinction même de son recueil ; il est maître dans la fable serrée et laconique59. […] [NdA] Je tire ce récit non des Souvenirs d’Arnault, mais de sa Vie politique et militaire de Napoléon, publiée en 2 vol. in-folio en 1822 : c’est une histoire en tableaux et faite pour les planches lithographiées ; mais le texte a de l’intérêt et un mérite de rapidité et de concision. […] [NdA] Ce genre de mérite d’Arnault fabuliste est très bien observé et défini dans un chapitre de l’Histoire de la poésie française à l’époque impériale, par Μ.
On lui en a fait un reproche ; on a dit que c’était une exagération, que Descartes n’a pas tant de mérite littéraire, que de son temps personne ne l’avait jamais cité comme un écrivain. […] Il semble plutôt relever en lui des mérites négatifs que des mérites positifs ; il le loue d’avoir évité les témérités en philosophie, en politique, en religion. Je veux croire que c’est un grand mérite de n’avoir pas fait de système métaphysique, de n’avoir inventé ni utopies ni hérésies ; mais il est un grand nombre d’honnêtes gens qui sur ce point ne sont pas plus téméraires que Bossuet. […] Bossuet est la plus grande imagination que nous ayons dans notre littérature, c’est une imagination biblique, homérique, grande, fière, simple, naïve, hardie, ayant toutes les qualités sans un seul défaut, et dans cet écrivain si surprenant, le premier de la France sans aucun doute, et qui n’a peut-être de rival dans toutes les littératures du monde que Platon, vous vous oubliez à nous faire admirer son bon sens, à nous montrer les limites de ses pensées, à lui faire un mérite de ces limites mêmes ! […] Nisard eût été moins préoccupé de défendre dans Bossuet son principe de la discipline, il se serait attaché beaucoup plus à mettre en relief les qualités incomparables de Bossuet que des mérites secondaires et négatifs qui ne peuvent que nous refroidir.
D’ailleurs Heredia se trompe sur la place qu’il mérite dans le petit genre artificiel. […] Ce travailleur âpre et lent mérite d’ailleurs un salaire et je ne songe pas au ramasseur de mégots antiques sans me rappeler une anecdote lue, je crois, dans Quinte-Curce : On vanta à Alexandre un homme très habile : à une distance considérable, cet homme faisait passer par un trou minuscule une lentille. […] Quand, au milieu des admirations, l’adroit spécialiste s’arrêta avec aux lèvres un sourire aimable et triomphant, Alexandre dit tout haut à quelqu’un de sa suite : « Il convient de récompenser cet homme selon ses mérites : vous lui donnerez un boisseau de lentille. » Qui refusera à l’auteur des Trophées le boisseau de lentilles ? […] Coppée a un mérite encore plus grand, c’est la souplesse variée du rythme.
Elle mérite d’être sévèrement caractérisée ; et à moins que dans les retouches — ce qui est peu probable — il ne soit descendu, comme le Saint-Esprit dans les langues de feu, un Guizot entièrement neuf et inconnu aux hommes, la conclusion sera facile à pressentir. […] Si la furie égalitaire de ce temps avait besoin d’une philosophie de l’histoire, elle n’en choisirait pas d’autre que celle d’Emerson, qui ose bien écrire cette phrase, impie au génie individuel de l’homme : « Toute originalité est relative et tout penseur rétrospectif. » Le rang et l’étendue, dit-il ( the rang and extend ), voilà le mérite réel et absolu, et c’est, ajoute-t-il, le mérite de Shakespeare, et non pas l’originalité. Mais nous, et Guizot avec nous, qui maintenons l’originalité profonde et même incomparablement profonde de Shakespeare ; nous qui ne voulons pas qu’il soit seulement une perle dans une coquille d’huître, et qui ne nous sentons aucun respect pour cette huître où elle s’est formée ; nous qui ne croyons pas, comme Emerson, que le mérite inadéquate de Shakespeare ait été d’être à l’unisson de son temps et de son pays, car son pays et son temps n’ont pas dit un mot du succès de ses pièces et n’ont pas classé son génie, — ce qui prouve qu’ils ne le sentaient pas ; — nous disons, nous, que « le biographe de Shakespeare n’est pas Shakespeare », si on entend par là son œuvre.
l’abbé Christophe n’est point un écrivain du mérite consommé de Hurter ou de la sagacité pénétrante de Ranke, mais sur ce dernier il a l’avantage d’être catholique et prêtre, et il faut bien qu’on sache que c’est un avantage. […] l’histoire d’un seul Pape, dans l’histoire de l’Église, a de tels rayonnements en avant et en arrière que ce n’est plus l’histoire d’un siècle ni d’un Pape, mais l’histoire de l’Église universelle et éternelle, concentrée dans la minute d’un siècle ou d’une vie d’homme, comme tout un horizon répercuté et concentré dans une facette de diamant… En intérêt, l’Histoire de la Papauté pendant le xve siècle, par l’abbé Christophe, vaut, avec d’autres événements et des personnalités différentes, son Histoire de la Papauté pendant le xive siècle, et elle a le même mérite d’unité dans la variété qui est le caractère particulier de toutes les histoires détachées de l’histoire générale de l’Église, qui a bien raison de s’appeler catholique, c’est-à-dire universelle ; car si Dieu l’ôtait de ce monde, il s’y ferait un de ces trous, comme dit Shakespeare en parlant des monarchies qui croulent, que rien — quoi qu’on y jette — ne peut plus combler ! […] Le xve siècle, malgré le mérite de plusieurs de ses pontifes, a été infidèle à cette belle loi qu’on pourrait appeler la loi même de la papauté : Quand un pape n’est pas un saint et un grand homme tout à la fois, il est l’un ou l’autre, et c’est avec ses saints que la papauté fait l’intérim de ses grands hommes. […] C’est un livre substantiel, ayant les mérites sur lesquels j’ai insisté, mais qui ne fera pas sur l’opinion, indifférente aux choses religieuses qu’elle ignore, l’effet sympathique qui entraîne à les étudier.
J’ai souvent entendu dire de Hogarth : « C’est l’enterrement du comique. » Je le veux bien ; le mot peut être pris pour spirituel, mais je désire qu’il soit entendu comme éloge ; je tire de cette formule malveillante le symptôme, le diagnostic d’un mérite tout particulier. […] Le mérite spécial de George Cruikshank (je fais abstraction de tous ses autres mérites, finesse d’expression, intelligence du fantastique, etc.) est une abondance inépuisable dans le grotesque. […] Le grand mérite de Goya consiste à créer le monstrueux vraisemblable.
C’est moi qui ai attiré M. l’abbé de Fénelon, sur la réputation de son mérite : quel déplaisir ne m’a-t-il pas attiré ! […] Quant au mérite littéraire de sa correspondance et de celle de madame des Ursins, il est tel qu’on peut l’attendre de deux femmes de cet esprit, nourries au milieu des délicatesses d’un si beau siècle. […] « Le seul art dont j’oserais soupçonner madame de Sévigné, dit madame Necker, c’est d’employer souvent des termes généraux, et, par conséquent, un peu vagues, qu’elle fait rassembler, par la façon dont elle les place, à ces robes flottantes, dont une main habile change la forme à son gré. » La comparaison est ingénieuse ; mais il ne faut pas voir un artifice dans cette manière de madame de Sévigné, non plus que dans celle de mesdames des Ursins et de Maintenon : c’est la manière de l’époque et l’un des mérites inséparables de son style.
Ce jésuite, homme de mérite, prononça, le 25 novembre 1676, une harangue latine, dans laquelle, sans se permettre aucune personnalité, il s’attacha simplement à prouver que les inscriptions des monumens publics devoient être en Latin. […] Le grand mérite de notre langue, & ce mérite a dû lui suffire pour devenir la langue la plus générale de l’Europe, c’est la douceur & la clarté.
Mais après un certain nombre de représentations, le monde comprit que la maniere de traiter la comédie en philosophe moral étoit la meilleure, et laissant parler contre le Misantrope les poëtes jaloux, toujours aussi peu croïables sur les ouvrages de leurs concurrens, que les femmes sur le mérite de leurs rivales en beauté, il en est venu avec un peu de temps à l’admirer. […] Ils peuvent en faire valoir les beaux endroits, en excuser les mauvais, comme ils peuvent aussi extenuer le mérite des plus beaux, soit en disant qu’ils sont pillez, soit en les mettant en paralelle avec les vers d’un autre poëte qui aura traité un sujet semblable. […] Je crois que le temps où le poëme nouveau, qui est un bon ouvrage, se trouve défini en general suivant qu’il mérite de l’être, arrive aujourd’hui, environ deux ans après sa premiere édition.
On ne doit pas s’étonner qu’avec tant de mérite, Madame Dacier se soit attiré l’admiration de tous les grands Littérateurs du siecle dernier. […] ce bizarre enthousiasme les porte à tant d’intrigues, à tant de manéges, à tant de folles déclamations, qui ne trompent tout au plus qu’un moment, que celle-ci mérite une gloire particuliere pour avoir consacré sa plume à la défense des Héros des siecles passés, & vraisemblablement des siecles à venir.
Elles sont tombées, parce qu’elles n’avoient pas le même mérite, & il n’y a qu’un mérite réel qui puisse soutenir un Ouvrage dans tous les temps & dans tous les états.
L’expression est heureuse ; mais ces Messieurs devroient savoir que, si cet Auteur, réprouvé parce qu’il est décent, honnête, raisonnable dans la plupart de ses sentimens, n’a pas mérité d’être célébré par eux, comme tant d’autres, il n’en a pas moins le mérite d’écrire d’une maniere bien supérieure aux Auteurs de la Philosophie du bon sens, du Code de la Nature, du Christianisme dévoilé, & de tant d’autres rapsodies aussi insupportables par l’extravagance des idées, que par la bizarre contexture du style. […] L’Auteur ne se borne pas à faire la satire des ridicules & des vices du Siecle, il présente aussi les moyens de les corriger ; & si ses observations ne sont pas toujours élégantes & vivement exprimées, elles ont du moins le mérite de la justesse, & annoncent un Esprit aussi éclairé, que jaloux du bonheur de ses Concitoyens.
Ce qui fait honneur au jugement de l’Abbé de Villiers, c’est qu’il s’étoit attendu à cette éclipse ; jamais personne n’attacha moins de mérite à ses Productions. […] Sa Prose est assez communément dans le même goût ; mais si elle n’a pas le mérite des tours & de l’expression, elle a quelquefois celui des pensées.
Ce tableau n’est pas sans mérite. […] C’est notre ami Chardin qui institue ces parallèles-là aux dépens de qui il appartiendra, peu lui importe, pourvu que l’œil du public s’exerce et que le mérite soit apprécié.
Le bonheur presque constant qui l’accompagna ne saurait se séparer du mérite réel et des parties de capitaine que Saint-Simon lui-même est bien forcé de lui reconnaître. […] Tantôt ils se flattent de ne rien devoir qu’à leur mérite, à leur vertu, sans rien laisser au hasard ; tantôt ils sont plus fiers de paraître tout devoir au hasard qu’à leurs qualités propres : c’est qu’il semble alors qu’un génie suprême, l’âme même des astres et de l’univers s’occupe d’eux, — change et incline l’ordre général pour eux. […] Réduit à la nécessité de se faire un mérite qui forcât la Fortune en sa faveur, et d’être pour ainsi dire lui-même sa créature, son cœur lui suggéra le seul parti que la raison elle-même lui laissait à prendre, de servir et de surmonter les obstacles, ou de périr. […] Le mérite de Villars et le trait dominant de son tempérament militaire fut de rester jeune de cœur et entier de zèle pendant ces ennuis et ces retardements, qui en eussent usé ou fatigué d’autres ; et il se trouva le plus entreprenant des maréchaux, à cinquante ans, c’est tout simple, et à soixante, ce qui est plus rare, — j’allais dire, et à quatre-vingts —, car il garda jusqu’à l’extrême vieillesse, et quand il prenait Milan en 1734, la vivacité de son feu et de son allure. […] [NdA] On apprendra avec plaisir qu’une nouvelle édition des Mémoires de Villars est en préparation et doit être assez prochainement donnée par un homme de mérite, M.
Il propose de remédier aux excès du théâtre à l’aide d’un censeur d’office ; il souhaiterait ce censeur pour les romans aussi, pour les livres de chevalerie : il est si sérieux en parlant de la sorte, qu’il trace d’après un canevas-modèle le plan d’un roman de chevalerie exemplaire qui aurait les mérites du genre sans les défauts, qui permettrait de personnifier dignement toutes les qualités morales, toutes les vertus, d’introduire dans une trame variée toutes les vicissitudes d’événements, toutes les aventures tragiques ou joyeuses, de décrire toutes les merveilles, y compris celles de la magie, de prendre tous les tons. […] Il faut donc, au risque de le diminuer dans quelques esprits, lui enlever ce mérite du voile et du mystère. […] On a exagéré en divers sens les mérites de Cervantes. […] Est-ce à dire pourtant que Cervantes, en son livre, se soit montré l’égal des plus savants médecins dans le traitement de la monomanie, dans l’observation de ses différentes phases et périodes, de ses prodromes, accès et déclin, et qu’il mérite de prendre rang comme praticien à côté des Pinel, des Esquirol, des Blanche, avec ce mérite, en sus, de les avoir devancés de deux cents ans8 ?
Il est dans ce recueil un nouvel ouvrage qui mérite beaucoup d’estime à plusieurs égards : c’est un petit poème intitulé : Belzunce ou la Peste de Marseille. […] Bernard Jullien Millevoye, poète digne à plusieurs égards de l’attention de la postérité, s’est exercé assez souvent dans la narration poétique, et malheureusement il l’a toujours fait sans le moindre succès ; tellement que si l’on voulait juger de son mérite par ses travaux dans ce genre, on le mettrait avec raison au rang de ceux dont le nom est devenu ridicule.
Son Théatre des Grecs nous a procuré plusieurs autres Théatres étrangers, mais tres-éloignés du mérite du sien. […] le Brun s’étoit proposé ; mais ce n’est point en imitant les titres des Ouvrages de Virgile & d’Ovide, qu’il pouvoit remplir son objet ; c’est en tâchant d’égaler le mérite des Ouvrages mêmes, ce dont il est bien éloigné, malgré sa bonne volonté.
Un tel Livre devoit être accueilli par les esprits éclairés & par les honnêtes gens ; aussi tous les Lecteurs sensés en ont-ils fait cas, & le nombre des Editions qu’il a eu en prouveroit le mérite, quand même la tournure, l’invention & le style ne le rendroient pas intéressant. […] « Les derniers des hommes, M. de Voltaire, sont ceux qui sont les plus dangereux, & les plus dangereux sont ces Ecrivains dont la plume s’efforce de renverser tout à la fois l’ordre de la Religion & celui de la Société ; ces Ecrivains, qui dégradent les Lettres par l’injustice de leur haine, l’amertume de leur style, la licence de leurs déclamations, l’atrocité de leurs calomnies, le renversement de toutes les bienseances ; ces Ecrivains, qui amusent, par leurs bons mots & leurs sarcasmes, la multitude ignorante & légere, & qui osent ridiculiser le mérite & l’honnêteté ; ces Ecrivains, qui veulent être plaisans aux dépens de ce qu’il y a de plus sacré & de plus respectable, qui veulent être crus en dépit du jugement & de la raison, qui veulent être estimés malgré la justice & le bon goût ; ces Ecrivains enfin, que le délire encense, & qui, noircis par la fumée de l’encens même qu’ils ont reçu, sont mis ensuite au rebut, comme ces fausses Divinités que la superstition la plus grossiere ne peut adorer qu’un moment. » GUYS, [Jean-Baptiste] de l’Académie de Caen, né à Marseille en 17..
Une chaîne continuelle de généalogies, de noms de Princes, destinés, par leur peu de mérite, à ne servir qu'à établir les dates de la Chronologie, des portraits de Généraux, de Ministres, tracés d'imagination, sans aucune vraisemblance, l'Esprit de Parti toujours prompt à répandre la louange & le blâme, sans aucun discernement, formoient le tissu principal de leur narration. […] Peut-être a-t-on eu raison de lui reprocher trop de penchant à la critique, trop d'affectation à combattre certaines traditions accréditées par la multitude & le poids des témoignages, trop de facilité à tourner les textes à l'appui de ses idées, trop de complaisance dans les tableaux qu'il trace des abus qui lui déplaisent, trop d'amertume dans les censures ; mais en convenant de quelques-uns de ces défauts, il n'en est pas moins vrai, que si une plus longue carriere lui eût permis d'exécuter l'Ouvrage en entier, il auroit eu la gloire de nous avoir laissé une Histoire aussi estimable par la recherche des faits, leur ordonnance & leur variété, que par le mérite du style, qui est simple, aisé, naturel, & piquant, sans jamais s'éloigner de l'élégance & de la pureté, qui sont le partage d'un excellent Ecrivain.
Malgré cela, Voiture ne mérite pas tout le mépris qu’on paroit en faire aujourd’hui. […] Du moment que la fiere Parque Nous a fait entrer dans la barque Où l’on ne reçoit point les corps, Et la Gloire & la Renommée Ne sont que songe & que fumée, Et ne vont point jusques aux Morts ; Au delà des bords du Cocyte, Il n’est plus parlé de mérite, Ni de vaillance, ni de sang ; L’ombre d’Achille ou de Thersite, La plus grande & la plus petite Vont toutes en un même rang.
Ils étaient faits l’un et l’autre pour apprécier le mérite de Racine. […] Titus serait sifflé s’il agissait ainsi au théâtre, et Rousseau mérite de l’être pour avoir consigné cette opinion dans un livre de philosophie. […] Les deux autres ont le mérite de l’élégance, de la douceur, de l’harmonie et de la grâce, et c’est quelque chose que cela. […] Le mérite d’assembler des syllabes harmonieuses et des fadaises sonores, est assurément très médiocre. […] Cette innovation fut accueillie, en faveur du mérite des fables et de l’acteur qui les récitait.
Il importe assez peu pour la qualité de l’ouvrage que l’auteur en ait pris ici ou là le canevas, qu’il y ait inséré tel ou tel épisode d’emprunt : le mérite n’est pas dans l’invention générale, mais dans la conduite, dans le ménagement de chaque scène et de chaque tableau, dans le détail du propos et du récit, dans l’air aisé et le tour d’enjouement qui unit tout cela. En prose et sous forme de roman, c’est un mérite, une originalité du même genre que celle de La Fontaine. […] Il ne s’agit que de les bien appliquer ; ce qu’il finit par faire : il devient propre à tout, et il mérite en définitive cet éloge que lui donne son ami Fabrice : « Vous avez l’outil universel ». Mais il ne mérite cet éloge que tout à la fin, et cela nous encourage ; nous sentons, en le lisant, que nous pouvons, sans trop d’effort et de présomption, arriver un jour comme lui. […] Il a en aversion les bureaux d’esprit, tels que l’était en son temps le salon de la marquise de Lambert, et, sans parler de sa surdité qui le gêne, il a ses raisons pour cela : On n’y regarde la meilleure comédie ou le roman le plus ingénieux et le plus égayé, remarque-t-il (non sans un petit retour sur lui-même), que comme une faible production qui ne mérite aucune louange ; au lieu que le moindre ouvrage sérieux, une ode, une églogue, un sonnet, y passe pour le plus grand effort de l’esprit humain.
Un Magistrat allait par son mérite à la première dignité, il était homme délié et pratique dans les affaires ; il a fait imprimer un ouvrage moral, qui est rare par le ridicule. […] Bien des gens vont jusques à sentir le mérite d’un manuscrit qu’on leur lit, qui ne peuvent se déclarer en sa faveur, jusques à ce qu’ils aient vu le cours qu’il aura dans le monde par l’impression, ou quel sera son sort parmi les habiles : ils ne hasardent point leurs suffrages, et ils veulent être portés par la foule et entraînés par la multitude. […] qu’il est tel, continue-t-il, que ce n’est pas un livre, ou qui mérite du moins que le monde en parle : Mais l’avez-vous lû ? […] Arsène , du plus haut de son esprit, contemple les hommes, et dans l’éloignement d’où il les voit, il est comme effrayé de leur petitesse : loüé, exalté, et porté jusqu’aux cieux par de certaines gens qui se sont promis de s’admirer réciproquement, il croit avec quelque mérite qu’il a, posséder tout celui qu’on peut avoir, et qu’il n’aura jamais : occupé et rempli de ses sublimes idées, il se donne à peine le loisir de prononcer quelques oracles : élevé par son caractère au-dessus des jugements humains, il abandonne aux âmes communes le mérite d’une vie suivie et uniforme, et il n’est responsable de ses inconstances qu’à ce cercle d’amis qui les idolâtrent ; eux seuls savent juger, savent penser, savent écrire, doivent écrire ; il n’y a point d’autre ouvrage d’esprit si bien reçu dans le monde, et si universellement goûté des honnêtes gens, je ne dis pas qu’il veuille approuver, mais qu’il daigne lire : incapable d’être corrigé par cette peinture qu’il ne lira point. […] La gloire ou le mérite de certains hommes est de bien écrire ; et de quelques autres, c’est de n’écrire point.
Sans ce mérite un poëte ne vaut presque pas la peine d’être lu ; il est sans couleur. […] On sait ces bizarreries, mais on les pardonne à la probité, au bon goût et au vrai mérite. […] Tableau cru, dur, sans mérite, sans effet, peint de réminiscence de plusieurs autres, plagiat. […] Il y a un tableau de Vernet qui semble avoir été fait exprès pour être comparé à celui-ci, et apprécier le mérite des deux artistes. […] Sans imagination on peut trouver ces objets à qui il ne reste plus que le mérite d’être bien ou mal placés, bien ou mal peints.
Amédée Thierry a parfois bénéficié de la gloire de son frère, et nous ne disons point ceci pour rabaisser en quoi que soit son mérite réel, mais pour en faire comprendre mieux la nature. […] Augustin Thierry et sa rayonnante cécité ne doivent plus nous cacher les mérites moins douloureux et moins éclatants de son frère. […] Le néant d’alors du pittoresque en histoire, voilà ce qui fit ressortir énormément les mérites de M. […] Amédée Thierry, amoureux de la civilisation romaine pourrissante, comme un Barbare… qu’il n’est pas pourtant, et faisant je ne sais quel mérite surnaturel à Rome d’avoir été longtemps pour les peuples qui l’ont conquise, ce que cette méprisable Chine a été pour les Tartares, ses vainqueurs, — la maîtresse de ses maîtres. […] Il n’y en a pas moins là matière à discussion, il n’y en a pas moins là une thèse réfléchie élaborée, qui mérite l’examen et qui l’aura.
Cette première fleur de rhétorique une fois fanée, la pureté et la correction du style, avec la fidélité au texte, furent longtemps les seuls mérites que parurent ambitionner les traducteurs et les seuls qu’ils rencontrèrent quelquefois. […] Mais bien que l’énergie et la force caractérisent Tacite, on se tromperait fort de penser qu’elles soient les uniques mérites de son style, et que les autres parties, l’éclat, l’abondance, le nombre, y aient été sacrifiées. […] Burnouf certifie beaucoup mieux que tous nos éloges : c’est assurément bien assez de tant de mérites réunis pour classer cette traduction au premier rang.
La favorite l’a appelée : « Envieuse. » Le Maître a déclaré : « Il est juste que celle-ci, qui est belle, ait la meilleure part. » Il a dit encore : « Il faut que tout le monde vive. » Il a conclu : « Tout travail mérite salaire. » L’esclave laborieuse est partie persuadée par ces paroles. […] Les prostitués les ont appelés : « Envieux. » Et le Maître a répondu : « Leur intelligence a justement mérité à ceux-ci la meilleure part. » Et : « Il faut que tout le monde vive. » Et encore : « Tout travail mérite salaire. » Bien que penser, chanter, sculpter, donner son âme et son esprit aux jeunes gens ne soient que des repos et des joies, le Maître avait raison d’employer le mot travail. […] Je ne fais pas de travail qui mérite salaire.
Mais quelquefois aussi c’est l’hommage que l’admiration rend aux vertus, ou la reconnaissance au génie ; et sous ce point de vue, elle est une des choses les plus grandes qui soient parmi les hommes : d’abord, par son autorité, elle inspire un respect naturel pour celui qui la mérite et qui l’obtient ; par sa justice, elle est la voix des nations qu’on ne peut séduire, des siècles qu’on ne peut corrompre ; par son indépendance, l’autorité toute-puissante ne peut l’obtenir, l’autorité toute-puissante ne peut l’ôter ; par son étendue, elle remplit tous les lieux ; par sa durée, elle embrasse les siècles. […] Dès que le mérite parut, l’envie naquit, et la persécution se montra ; mais au même instant la nature créa la gloire, et lui ordonna de servir de contrepoids au malheur. […] Nous indiquerons le caractère et le mérite ou la bassesse des écrivains qui ont travaillé dans ce genre.
L’Académie actuelle a des origines plus simples, toutes modernes, qu’elle s’est efforcée plus d’une fois de reculer et de recouvrir, comme si elle avait besoin d’une plus ancienne noblesse et plus vraie que celle du talent et du mérite ! […] Ces grandes conversations intérieures, où, tout en y prenant sa petite part, on aime encore mieux se supposer un moment spectateur, sont de ces journées qui laissent la meilleure idée du mérite et même du charme qu’on retrouve toujours dans l’illustre Compagnie. […] Dans une France, même démocratique, comme elle tend de plus en plus à le devenir, l’Académie française mérite de garder son rang et peut avoir son influence utile. […] Des concurrents de mérite répondent à l’appel de l’Académie. […] C’est proprement un prix d’encouragement à un jeune écrivain peu favorisé de la fortune et qui mérite de l’intérêt par son talent.
Du reste, il a de l’esprit, du savoir et du mérite. » Nous reviendrons sur ce jugement de Boileau. […] Le mérite chez eus devance l’âge. […] Fabre, après une analyse complète de ses mérites, conclut à le placer dans le si petit nombre des parfaits modèles de l’art d’écrire, s’il montrait toujours autant de goût qu’il prodigue d’esprit et de talent 152. […] Quoi qu’il en soit, et sans faire injure à nos mérites laborieux, son premier petit in-12 devrait être à demeure sur notre table, à nous tous écrivains modernes, si abondants et si assujettis, pour nous rappeler un peu à l’amour de la sobriété, à la proportion de la pensée au langage. […] Il a peint les autres dans son amas d’invectives, et dans le discours qu’il a prononcé il s’est peint lui-même… Fier de sept éditions que ses Portraits satyriques ont fait faire de son merveilleux ouvrage, il exagère son mérite… » Et le Mercure conclut, en remuant sottement sa propre injure, que tout le monde a jugé du discours qu’il était directement au-dessous de rien.
Ses connaissances profondes dans toutes les parties de la philosophie étaient encore étendues et fortifiées par l’avantage de posséder plusieurs langues, et par l’instruction qu’il avait sur toutes les sciences dignes d’estime ; en sorte que l’on peut dire qu’il n’y a point d’éloges qui ne soient au-dessous de son mérite. » Il mourut jeune. […] Elle est extrêmement dévouée à vos intérêts et parle de vous avec la plus grande estime : elle m’a avoué même qu’elle avait le projet d’aller vous voir à Florence ; ainsi préparez-vous à la recevoir d’une manière digne de son mérite. » Mais Cassandra s’était mariée, comme la Laure de Pétrarque, et avait déjà plusieurs enfants. […] Le premier sentiment donc que je voudrais vous inspirer, c’est celui de la reconnaissance envers Dieu, et de vous ressouvenir sans cesse que ce n’est ni à vos mérites, ni à votre prudence, ni à vos soins que vous devez une si rare faveur, mais à sa bonté seule, dont vous ne pouvez vous montrer reconnaissant que par une vie pieuse, exemplaire et pure ; et vous êtes d’autant plus obligé de vous montrer rigide et scrupuleux observateur de ces devoirs, que vos jeunes années ont donné une attente plus légitime pour les fruits de l’âge mûr. […] Laurent, trompé sur son mérite, l’avait appelé de Ferrare, sa patrie, à Florence. […] Appliquez-vous donc, je vous en conjure, à obtenir, soit par des prières, soit à prix d’argent, tout ce que vous pourrez trouver qui ait quelque mérite : si vous pouvez vous procurer une figure entière, triumphatum est !
Ce qui diminue encore le mérite de la Henriade, comparée aux autres Poëmes, c'est le défaut de merveilleux. […] Pourquoi faut-il, au contraire, que, par une fatalité qui n'établit pas son mérite dans les Esprits clairvoyans, il ne se soit presque jamais attaché qu'à des sujets* traités avant lui ? […] Ce mérite est le moindre de tous ceux qu’exige l’Histoire. […] entre les sentences, les maximes, les tours fins & délicats, les expressions ingénieuses, les beaux sentimens qu’il exprime si énergiquement dans plusieurs endroits de ses Ouvrages, & ce débordement de fiel & de malignité, ce tissu d’indécences, de mensonges, de calomnies, répandues sur tant d’Ecrivains de mérite, Etrangers, Nationaux, Prélats, Militaires, de tous les Ordres & de tous les Etats, qui n’ont eu d’autre tort, à son égard, que de n’avoir pas pensé comme lui, & d’avoir osé l’écrire ! […] De là, ces transports d'estime & ces haines implacables contre tant d'Hommes de Lettres, qui, tour à tour, ont été comblés de ses éloges ou accablés de ses sarcasmes, selon le cas qu'ils ont paru faire de son mérite, ou selon l'opinion du Public sur le leur.
Le risque n’est pas effrayant, lorsqu’il s’agit d’apprécier le mérite des Morts. […] Au reste, M. l’Abbé de Longchamps a enrichi la Littérature Françoise d’une Traduction aussi fidelle qu’élégante, des Poésies de Properce & de Tibulle, dont les critiques séveres de quelques Journalistes n’ont pu affoiblir le mérite dans l’opinion publique.
Vassé Je n’aime pas Vassé ; c’est un vilain ; mais rappellons-nous notre épigraphe, sine ira et studio. soyons justes, et louons ce qui le mérite, sans acception de personne. […] La Minerve de Vassé, la baigneuse d’Allegrain ont supérieurement ce mérite dont je ne pense pas qu’un morceau de sculpture puisse se passer, et dont plusieurs artistes n’ont pas la première idée.
Les deux premiers volumes de La Démocratie en Amérique (1835), qui, d’emblée, obtinrent à leur auteur tous les suffrages non seulement en France, mais dans les deux mondes avaient le mérite de faire très bien connaître la constitution américaine et l’esprit de ce peuple, de cette société neuve, en même temps que d’y joindre de fortes réflexions, de fines remarques à l’adresse des sociétés modernes et de la France en particulier. […] S’il est exact qu’il ait dit encore par une sorte de renchérissement : « Depuis Montesquieu, il n’a rien paru de pareil », il aurait provoqué une comparaison qui ne servirait qu’à éclairer ce qui, au milieu de tous ses mérites, a manqué pourtant à l’auteur. […] On apprend à l’y bien connaître, à ne pas le surfaire (car lui-même, si ambitieux, mais en même temps si modeste, ne se surfaisait pas), et aussi à lui voir dans leur juste degré tous ses mérites de philosophe politique, de citoyen passionné pour le bien, d’ami tendre et d’homme aimable dans l’intimité. […] Ils étaient là, dans ce monde aristocratique et libéral, il y a quelque trente ans, un certain nombre de jeunes gens noblement doués, partisans éclairés des idées nouvelles, retenus par plus d’un anneau à la tradition, exacts et réguliers de mœurs, religieux de pratique ou du moins de doctrine ; nés tout portés, dispensés de percer la foule et de donner du coude à droite ou à gauche, n’ayant, s’ils le voulaient, qu’à sortir des premiers rangs et à faire preuve d’un talent ou d’un mérite quelconque pour être aussitôt acceptés.
Il n’y a de mérite à voir de loin que si l’on n’est pas tout à fait aveugle de près. […] Présenté aujourd’hui par extraits, il a pour nous le mérite d’avoir vu d’avance des choses qui sont en partie arrivées ou qui ont l’air de vouloir se réaliser un jour ou l’autre. […] Sa religion mérite bien qu’on en dise un mot. […] Pour ceux qui y regardent de près et qui tiennent à voir les hommes tels qu’ils ont été, sans se contenter de l’à-peu-près des statues, une petite question se pose et revient toujours, bon gré mal gré, dès qu’on s’occupe de ses œuvres et de ses mérites : Était-il donc aussi ennuyeux à écouter qu’à lire ?
De huit frères qu’ils étaient, aucun n’entra dans le parti de la Ligue6 ; mérite qui appartient peut-être qu’à cette famille, toute nombreuse qu’elle était. […] Ajoutez ici un grand fait qui mérite d’être observé, c’est qu’à la fin du xvie siècle et au commencement du xviie , un besoin général de communications sociales plus intimes et puis variées se faisait sentir dans les classes aisées de la capitale. […] À ces causes s’en joignait une autre encore plus pressante, c’était l’émulation établie entre les sexes par leur mélange dans les sociétés particulières, depuis que Louis XII et Anne de Bretagne avaient relevé les femmes de cette infériorité qui subsiste encore en Angleterre et en Allemagne ; émulation de mérite et de vertu pour les nobles héritières des traditions d’Anne de Bretagne ; émulation de galanterie pour les élèves de l’école de François trop bien soutenue par ses successeurs. […] Peu de gens ignorent le mérite des écrivains qui formèrent la société de Rambouillet dans la première période de son existence.
Le fait qu’il s’en occupe lui paraît suffire à indiquer qu’il les regarde comme doués de mérite ou comme significatifs, et, cette attitude attentive ou admirative une fois prise, il s’attache à résoudre les deux problèmes qu’il envisage à propos de livres et d’artistes : celui du rapport de l’auteur avec son œuvre, et celui du rapport des auteurs avec l’ensemble social dont ils font partie, questions délicates et fécondes que M. Taine a le mérite d’avoir aperçues le premier et qui sont débattues dans ses œuvres les plus considérables, L’Histoire de la littérature anglaise, et La Philosophie de l’art. […] Sarrazinch, quel que soit leur mérite, ne poussent pas à fond l’analyse. […] En termes plus brefs, l’esthopsychologie n’a pas pour but de fixer le mérite des œuvres d’art et des moyens généraux par lesquels elles sont produites ; c’est là la tâche de l’esthétique pure et de la critique littéraire.
A ce premier mérite, elle a joint celui d’un style naturel, élégant, correct, tel qu’il convient à ces sortes d’Ouvrages. […] Il n’attacha jamais aucun mérite à ses Nouvelles Françoises, où l’on reconnoît la même trempe d’esprit & la même touche que dans Zaïde.
On ne voit pas ce qu’auroit pu ajouter au mérite de Racine cette bien heureuse Philosophie, que le bon M. […] Il ignoroit vraisemblablement qu’il faudroit une grande dose de philosophie, pour équivaloir au mérite de ces chef-d’œuvres.
Et quel mérite pour Voltaire de s’en être si parfaitement défendu dans le temps que Montesquieu s’y laissait prendre ! […] C’est leur trait distinctif, mais ce n’est pas tout leur mérite. […] Les premières faveurs de la fortune l’avaient gâté ; les dernières l’améliorent, parce qu’elles sont le juste prix de son mérite. […] Leur volonté n’en a peut-être pas tout le mérite. […] Quelle bonne grâce aurais-je à ne pas compter parmi les mérites de ce livre le bien que j’en ai reçu ?
Pour nous, qui nous contentons de sentir sa force, son mérite, mérite toujours contrarié et traversé de certaines ombres, il nous attire surtout à titre d’écrivain, et nous voudrions par ce côté nous en rendre compte à nous-même en présence de nos lecteurs, sans rien ajouter à l’idée, fort élevée d’ailleurs, qu’on se doit faire de lui, et sans rien exagérer. […] Rohan, qui y admire l’arsenal et qui en dénombre l’artillerie (370 pièces de fonte), ajoute : « Ils n’ont point de canon de batterie : leur raison tient fort du roturier ; car, à ce qu’ils disent, ils ne veulent attaquer personne, mais seulement se défendre. » Venise le saisit vivement par son originalité d’aspect, son arsenal, sa belle police, ses palais, ses tableaux même et ses bizarres magnificences : Pour le faire court, dit-il, si je voulais remarquer tout ce qui en est digne, je craindrais que le papier me manquât : contente-toi donc, ma mémoire, de te ressouvenir qu’ayant vu Venise, tu as vu un des cabinets de merveilles du monde, duquel je suis parti aussi ravi et content tout ensemble de l’avoir vue, que triste d’y avoir demeuré si peu, méritant non trois ou quatre semaines, mais un siècle, pour la considérer à l’égal de ce qu’elle mérite. […] » Car, de même, continue Plutarque, que la poésie d’Antimaque et les peintures de Denys, ces deux enfants de Colophon, avec tout le nerf et la vigueur qu’elles possèdent, donnent l’idée de quelque chose de forcé et de peiné, tandis qu’aux tableaux de Nicomaque et aux vers d’Homère, sans parler des autres mérites de puissance et de grâce, il y a, en outre, je ne sais quel air d’avoir été faits aisément et coulamment : c’est ainsi qu’auprès de la carrière militaire d’Épaminondas et celle d’Agésilas, qui furent pleines de labeur et de luttes ardues, celle de Timoléon, si on la met en regard, ayant, indépendamment du beau, bien du facile, paraît à ceux qui en jugent sainement l’œuvre non pas de la fortune, mais de la vertu heureuse. […] Il est de la race des graves, des contrariés et des moroses, dont le brillant même est rembruni et sombre, qui ont eu plus de mérite que d’occasion et de bonheur, estimés quoique souvent battus, et qui tirent tout le parti possible de causes morcelées et rebelles : il est de la famille, en un mot, des Coligny, des Guillaume d’Orange ; moins Français peut-être qu’étranger de physionomie.
Le métaphysicien ténébreux, tombé de l’Église dans le régicide, monté de la Terreur dans le Directoire, et retombé du Directoire dans le Consulat, ne mérite pas tant d’honneur. […] Le véritable mérite transcendant de cet écrivain ne se révèle qu’au point où commencent les grandes affaires, les grandes négociations, les grandes guerres. […] Ces divisionnaires avaient des mérites égaux, mais divers. […] Toutefois il avait un mérite moral : c’était d’aimer la paix sous un maître qui aimait la guerre, et de le laisser voir. […] Ce beau récit n’a pas le mérite de la nouveauté, car il avait été déjà écrit par des historiens littéraires d’un grand talent, mais dans M.
Il se fit de gros volumes pour et contre l’emploi des deux langues, et là encore la question tendit à se généraliser : on se mit à comparer le latin et le français, à en débattre les mérites respectifs, la capacité et l’illustration448. […] Ceux-ci pourtant avaient leur revanche : après avoir entendu le Siècle de Louis le Grand, La Fontaine rimait sa charmante Epître à Huet, où il faisait hommage de la perfection de son œuvre aux anciens, où il les proclamait ses maîtres, où il disait nettement leur mérite essentiel, le naturel, et le péché mignon des modernes, l’esprit. […] La digression faisait comme suite à un Discours sur la nature de l’Églogue, où Fontenelle discutait très librement sur le mérite de Virgile et de Théocrite.
Il est vrai que du Fresnoy est très-fort sur les regles, & qu’il est peu de ses vers qui ne renferment une leçon ; mais est-ce la multiplicité des préceptes qui constitue le mérite d’un Ouvrage didactique, sur-tout d’un Poëme, & encore plus quand ces préceptes sont entassés les uns sur les autres ? […] Le mérite d’un Ecrivain dépend de l’habileté à réunir les qualités principales qui se trouvent éparses, tantôt dans un modèle, tantôt dans un autre. […] Cette Analyse n’a pas même le mérite du discernement.
Auguste qui, pendant une partie de sa vie, fut le plus vil des meurtriers, et pendant l’autre, le plus politique des princes, eut, comme presque tous les Romains célèbres de ce temps, le mérite de l’éloquence. […] Il parla ensuite de l’application de Claude aux beaux-arts, et de ses étonnants succès, lui qui avait pour tout mérite de s’être mêlé un peu de grammaire, de parler sa langue avec pureté, et d’avoir donné un édit, dont on se moqua, pour ajouter deux lettres à l’alphabet. […] Il peut se faire qu’on n’ait pas loué davantage Galba, qui ne monta sur le trône que pour en être précipité par sa faiblesse ; Othon, qui n’eut que le mérite de finir avec courage une vie efféminée ; Vitellius, qui fut le plus vil des hommes et des princes.
Soulary a deux mérites à mes yeux, deux grands mérites, quoique négatifs : il n’est pas éloquent, et il n’est pas abondant.
Le monde n’a pas besoin d’être éclairé sur le mérite de deux poëmes, comme sur le mérite de deux systêmes de philosophie.
La naïveté & la rapidité d’un dialogue familier, excluent ce mérite, propre à toute autre poésie. […] On peut avoir un parti par son mérite, par la chaleur & le nombre de ses amis, sans être chef de parti. […] On brigue sourdement la faveur ; on mérite & on demande hautement des récompense,. […] La fierté de l’ame sans hauteur est un mérite compatible avec la modestie. […] Mais le grand homme doit réunir des mérites différens.
Le saint- simonisme, sous ce rapport, a eu l’immense mérite de soulever et de poser avec audace les vraies questions, celles qui ressortent de l’examen réel de la société d’à présent, et bien que ses solutions aient été hasardées et mystiques parfois jusqu’à la folie, il a déchiré le voile d’une fausse pudeur et a montré au christianisme attiédi ce qu’on oubliait trop et ce qu’il fallait guérir. — M. […] Il y a du mérite à tout cela.
Le mérite qui distingue éminemment les Sermons de Massillon de tous les autres, est la connoissance du cœur humain qu’ils annoncent ; connoissance aussi délicate, que juste & profonde. […] La partie des Oraisons funebres est la partie la plus foible de son mérite.
Les difficultés sans nombre que vous devez avoir rencontrées dans votre marche, & que vous avez heureusement surmontées, ajoutent un nouveau degré au mérite d'avoir rassemblé, presque sous un seul point de vue, tout ce que l'Histoire, la Politique & la Géographie présentoient d'intéressant & d'essentiel à la connoissance exacte de ce vaste Corps. […] Un Auteur qui ne cherche que le bien, quand il croit l'avoir trouvé, s'inquiete peu de la gloire ; ce qui ne dispense aucun de ses Lecteurs de lui rendre la justice qu'il mérite.
Cette philosophie de la nature a un double mérite que ses plus vifs adversaires ne sauraient lui contester. […] Or, quelle peut être l’autorité d’une pareille méthode quand il s’agit de modifier, sinon de supprimer, le témoignage de la conscience touchant la liberté des actes et le mérite des œuvres ? […] Si la loi du devoir suppose la liberté, la loi du mérite et du démérite qui en est la conséquence, implique la nécessité d’une sanction. […] Donc nécessité d’un Dieu qui juge, et d’une autre vie où justice entière soit faite à tous les agents libres selon leurs mérites. […] Un penseur bien connu, et qui me l’est pas encore autant qu’il mérite de l’être, M.
Il eut à essuyer, dans le cours de sa longue carrière, plus d’une attaque vigoureuse, à commencer par celles des Racine, des Despréaux et des La Bruyère : il s’en tira moyennant prudence, patience, dignité, et par la force d’un vrai mérite. […] À toutes les attaques, en partie justes et fondées, dirigées contre votre tour d’esprit et votre manière, écrivains de tous les temps, à quelque genre que vous apparteniez, vous n’avez qu’une réponse à faire : renouvelez de mérite, fortifiez-vous dans la partie déjà forte de votre talent. […] J’accepte, monsieur, cette nomination, qui me vaut une élection dans les formes, et comme la plus grande joie que j’aurais serait d’être d’un corps dont vous êtes, j’en suis dès que vous m’avez nommé, et cet in petto me plaît plus que la chose même… Vos lettres ne manqueront pas de faire du bruit ; mon nom sera mêlé avec le vôtre ; on dira que vous m’avez jugé digne d’être un jour académicien : n’en est-ce pas plus cent fois que je ne mérite ? […] … » Montesquieu n’avait rien désavoué ; il était rentré par la grande porte du mérite, et du droit du génie, déjà visible à tous et manifeste dans sa personne. […] Elle a vécu jusqu’à soixante ans dans une noble simplicité que je regardais comme la fleur de ses mérites et le plus beau fleuron de leur couronne ; tout d’un coup il lui prit une tranchée de bel esprit : elle ne voulut plus voir que des personnes d’érudition ; elle les brigua, elle les mendia, elle en forma chez elle un bureau, se contentant de la science d’autrui et ne cherchant que la réputation d’une femme d’un mérite à part, et distinguée des personnes de son sexe.
Le prenant donc par le cou pour l’embrasser, j’achevai d’arracher son rabat, et je lui dis : « Vous êtes dans l’erreur, monsieur, comme beaucoup d’autres honnêtes gens ; je suis bien Cervantes, mais non le consolateur des muses, et je ne mérite aucun des noms aimables que Votre Seigneurie veut bien me donner. […] Je ne connais, parmi les morts littéraires, que celle de Moncrif qui soit dans le goût de celle de Cervantes ou qui mérite d’en être rapprochée. […] monsieur, lui dit le ministre, je vous en fais mon compliment ; je vous envie le plaisir de lire Don Quichotte dans l’original. » Je ne sais comment le prit l’homme de lettres politique, mais le mot est piquant, et il mérite d’être joint à tant de témoignages de choix sur Cervantes. […] Toutes les critiques qu’il mérite d’ailleurs, Marie-Joseph Chénier les lui a faites : on lui pardonne volontiers d’avoir abrégé, chez son auteur, les parties poétiques langoureuses ou languissantes ; « mais, par malheur, ce sont souvent les beautés qu’il abrège, c’est le génie qu’il supprime. […] De tous les morceaux de l’ancienne critique, le plus vrai et le plus juste sur les mérites de Don Quichotte est peut-être encore certain article de M. de Feletz. — Aujourd’hui tout cela est dépassé, sinon surpassé.
III Un des mérites du maréchal de Noailles est, du moins, de l’avoir senti et d’avoir averti Louis XV de ce relâchement de tous les ressorts (8 juillet 1743) : « Qu’il me soit permis, Sire, de vous exprimer combien je souffre et je suis touché de voir Votre Majesté, qui mérite d’être aimée et bien servie, l’être si mal. […] Ces soins sont une partie essentielle de ceux de la royauté, et ne sont pas les moins difficiles à remplir ; mais ils ne le seront pas pour Votre Majesté, vu les talents que Dieu lui a donnés pour se faire aimer de ceux dont elle veut l’être, et pour discerner le mérite. » Un peu de flatterie, il en faut ; il faut le passeport au conseil. […] Noailles a le mérite de pousser le comte de Saxe contre lequel Louis XV faisait d’abord quelques objections, se méfiant de lui à cause de sa qualité d’étranger : « Les officiers, Sire, qui se portent vers le grand sont aujourd’hui si rares que, dans l’opinion que j’ai du comte de Saxe, je le regarde aujourd’hui comme un homme précieux pour votre État, qui mériterait des distinctions particulières s’il était né votre sujet ; qui, étant étranger, en mérite encore de plus grandes, afin de l’attacher plus étroitement à Votre Majesté.
Vauvenargues avait sur la noblesse de sang, non pas des préjugés, mais de hautes idées qui la lui faisaient envisager comme une institution qui consacrait le mérite et la vertu des ancêtres et en imposait l’héritage à leurs descendants. […] Pourtant, quand il vit sa santé détruite, ses espérances ruinées par là non moins que par les froideurs d’une Cour insensible au vrai mérite, il sentit que la seule ressource pour un esprit noblement ambitieux, c’était encore de se tourner du côté de « la gloire la moins empruntée et la plus à nous qu’on connaisse ». […] Et c’est alors qu’il y a tout lieu de dire vraiment avec lui : « Les maximes des hommes décèlent leur cœur. » Il n’avait rien publié encore lorsqu’il s’annonça à Voltaire par une lettre écrite de Nancy (avril 1743), dans laquelle il lui soumettait un jugement littéraire sur les mérites comparés de Corneille et de Racine. […] Pense-t-on que tout ce qui est nécessaire n’est d’aucun mérite ? […] Lui qui a tant souffert et si peu réussi, il croit que le plus sûr moyen de faire sa fortune, c’est encore de la mériter ; qu’il n’y a que le mérite réel pour aller directement à la gloire !
Ainsi, à propos du prince de Vaudémont, ancien gouverneur de Milan et homme de mérite, qui a fort réussi à Versailles : Serait-ce un grand malheur, écrit Mme des Ursins, quand vous voudriez par vous-même le connaître à fond, en l’entretenant sur toutes sortes de matières différentes, et lui demandant comment il pense sur les sujets ? […] Est-ce que vous voulez vous priver d’avoir commerce avec une personne d’esprit et de mérite, et qui peut vous entretenir sur toutes sortes de matières ? […] Je n’ai pas oublié, dans le détail que j’ai pris la liberté d’écrire au roi (à Louis XIV), que je ne mangeais que deux vieux œufs par jour ; j’ai cru que cette circonstance l’exciterait à avoir pitié d’une fidèle sujette qui ne mérite, ce me semble, par aucun endroit un pareil mépris. […] La publication des pièces officielles et des dépêches des ambassadeurs de France, pendant la durée de l’influence de Mme des Ursins à Madrid (si cette publication se fait un jour), pourra seule achever de déterminer avec précision toute l’importance et la qualité de son action politique ; nous en savons déjà assez pour porter sur elle une appréciation morale ; et quant à son mérite littéraire, nous osons dire qu’il ne manque à ce qu’on a de Mme des Ursins que des éditeurs moins négligents pour qu’elle devienne un de nos classiques épistolaires. […] [NdA] Je ne voudrais pourtant point paraître rien dire qui infirmât le mérite du maréchal de Berwick ; il avait son flegme si opposé à l’impatience de Mme des Ursins, mais qui, joint à ses autres qualités, opéra le salut de la monarchie espagnole.
Trouvez bon seulement que j’évite par ma retraite une persécution que je mérite si peu. […] Je n’ai jamais pensé là-dessus de deux façons, et M. le docteur Walker a pu vous rendre témoignage que j’ai célébré mille fois votre mérite dans les meilleures compagnies de Londres avec tout le zèle qu’inspirent la vérité et l’amitié. […] Remarquez bien que l’exact Berlinois n’a gardé d’en parler, tandis qu’il s’étend sur les mérites scientifiques et métaphysiques de l’abbé Prevost, et sur un livre soi-disant sérieux dont on ne sait même plus s’il a jamais été achevé. […] Ce supérieur général, grossier, sans naissance, sans mérite, aux manières dures, et qui ne fait nul cas des savants parce qu’il ignore jusqu’aux premiers éléments des sciences, n’est autre peut-être que celui à qui Prévost adressait cette lettre railleuse et à demi menaçante en partant ; je le soupçonne fort d’être le général de la Congrégation de Saint-Maur, dom Alidon en personne.
Villemain, de rendre enfin justice au mérite de Furetière et d’accorder à ses torts le bénéfice d’une prescription de près de trois siècles. […] Cette fidélité rigoureuse de peinture a accrédité le préjugé que tout le mérite du roman de Furetière consistait dans une suite de caricatures et d’allusions personnelles intéressantes pour les seuls contemporains. […] Non, quand même nous ne saurions pas que Vollichon est le procureur Rollet, que Charroselles est Charles Sorel, et la plaideuse Collantine Mme de Cressé, le roman de Furetière n’en serait pas pour cela dépourvu de charme et d’intérêt ; il y resterait, indépendamment du mérite aléatoire de sa caricature, l’observation des mœurs intimes d’une époque importante et curieuse comme toute époque de transition ; il resterait la lutte du vieil esprit frondeur, égoïste et sournois des corporations, avec les mœurs d’une société plus polie et plus cordiale ; il resterait la fusion de l’élément bourgeois et de la noblesse, s’effectuant par l’ambition de l’une et par la corruption de l’autre ; il resterait enfin de précieux enseignements pour l’histoire judiciaire et pour l’histoire littéraire, au moment où, en raison de révolutions inattendues, le métier d’hommes de lettres, le métier d’avocat, allaient monter au premier rang des fonctions sociales. […] « Je diray quand j’en serai persuadé que ce sont deux hommes de mérite (La Fontaine et Benserade) qui ont fait une injustice à un homme d’honneur et d’esprit.
Ma muse, tu le sais, dès longtemps s’est chargée du double emploi de louer le mérite mort, d’humilier l’orgueil vivant. Sa tache généreuse commence ou l’intérêt finit, etc. » Dans un endroit où il parle de la protection que Talbot donnait aux arts : « Bien différent, dit-il, de ces hommes vains qui, usurpant le nom de protecteur qu’ils avilissent, osent sacrifier un homme de mérite à leur orgueil, et répandre la rougeur de la honte sur un front honnête, quand il accordait une grâce, c’était une dette qu’il semblait payer au mérite, à la nation et à l’être qui est la source éternelle de tout bien. […] Nous avons un panégyrique de ce grand homme, en langue russe, qui mérite d’être connu ; il est de M.
On pesait leurs mérites divers ; mais aucun œil encore, si perçant qu’il pût être, ne voyait dans cette génération de héros les malheureux ou les coupables : aucun œil ne voyait celui qui allait expirer à la fleur de l’âge, atteint d’un mal inconnu, celui qui mourrait sous le poignard musulman ou sous le feu ennemi, celui qui opprimerait la liberté, celui qui trahirait sa patrie ; tous paraissaient grands, purs, heureux, pleins d’avenir ! […] Thiers, affirmons hardiment qu’aucune histoire ne mérite à plus juste titre la vogue contemporaine. […] Nous ne le mentionnons ici, que parce que, sur la foi des louanges qu’il a obtenues et qu’il mérite en partie, on pourrait croire qu’il ressemble au livre de M.
L’un des mérites en effet qui nous ont le plus frappé dans cet ouvrage, le meilleur sans contredit de M. […] » Nous lui concéderons son éloquent enthousiasme pour Frédéric, bien que nous doutions un peu qu’à la fin des âges ce nom doive se trouver dans le plus pur froment des mérites de l’humanité. […] C’est que d’Holbach avait une exécrable réputation d’athéisme, tandis que Condillac, abbé, n’ayant jamais écrit contre l’âme ni contre Dieu, était un maître ostensible plus avouable, en même temps que doué de mérites suffisants.
Il n’y manque qu’une chose : l’ordre, et faute de ce mérite, presque négatif, semble-t-il, tout ce qu’ils ont d’excellent et de rare manque son effet et périt en pure perte. […] L’ordre est ce qu’il y a de plus rare dans les opérations de l’esprit : quand l’ordre, la justesse, la force et la véhémence se trouvent réunis, le discours est parfait. » Ceux qui penseraient que le mérite de bien placer chaque pensée est un mérite purement négatif, se tromperaient.
Ce recueil a le mérite négatif d’être moins ignoble que d’autres produits du délicieux pornographe décoré. […] Seulement Régnier ne sait pas cacher, maussade, que l’anecdote ou le michet l’embête et qu’il aimerait mieux se reposer : il ne mérite guère son petit cadeau. […] Mais le marchand a double mérite qui réussit à le vendre.
Cela n’est pourtant pas sans mérite pour une femme ; les trois quarts des artistes de l’académie n’en feraient pas autant. […] Ce n’est pas le talent qui lui a manqué, pour faire la sensation la plus forte dans ce pays-ci, elle en avait de reste, c’est la jeunesse, c’est la beauté, c’est la modestie, c’est la coquetterie ; il fallait s’extasier sur le mérite de nos grands artistes, prendre de leurs leçons, avoir des tétons et des fesses, et les leur abandonner. […] Ses autres portraits sont froids, sans autre mérite que celui de la ressemblance, excepté le mien qui ressemble, où je suis nu jusqu’à la ceinture, et qui, pour la fierté, les chairs, le faire, est fort au-dessus de Roslin et d’aucun portraitiste de l’académie.
Louis Bouilhet ne fût définitivement qu’un écho, — un écho puissant, distinct, sonore, répétant toutes les syllabes qui ont été prononcées, et même les répétant plusieurs fois, ce qui, pour un écho, est un très grand mérite… Mais M. […] Le mérite du Danseur Bathyle et son effet reposent sur une énumération qu’on a vue dans Les Orientales, et qui est maintenant à l’état de procédé : Elle aime, et ce n’est pas le chevalier romain, etc. […] Par exemple, la pièce intitulée Le Lion rappelle le Jean de Paris d’Hégésippe Moreau et est bien moins belle, d’un mérite bien moins insolent.
Leur mérite est évident, leur bonne volonté certaine. […] Mais leur matière est si artistique, si décisivement picturale que les émules de Chéret, hantés de son bonheur décoratif, n’ont pas vu son effort de bon publiciste et n’ont cherché à égaler que son mérite d’art.
Duclos à la Bruyere, soit par la maniere, soit par le fond, il est cependant peu d’Ecrivains parmi nos Littérateurs, & sur-tout nos Littérateurs Philosophes, qui aient su racheter leurs défauts par autant de mérite. […] L’empressement avec lequel on lit ces sortes d’Ouvrages, ne doit pas flatter les Auteurs qui d’ailleurs auroient du mérite.
Si la réputation des Littérateurs estimables dépendoit du caprice & du ressentiment d’un esprit satirique, aucun mérite ne seroit à l’épreuve d’une Epigramme ingénieusement tournée, & les Railleurs deviendroient eux-mêmes la victime des armes qu’ils auroient aiguisées contre leurs ennemis ; mais le vrai talent triomphe toujours de ces injustes attaques. […] Nous n’exhorterons pas cet Auteur à réparer également toutes ses autres injustices : il seroit obligé de réformer ses jugemens sur presque tous les Gens de Lettres de nos jours qui ont eu des succès dans quelque genre ; mais nous l’inviterons à supprimer, pour son honneur, de la Collection de ses Œuvres [s’il en publie jamais une nouvelle édition], les Avis au Lecteur, les Préfaces, les Avertissemens, les Observations préliminaires, les Lettres apologétiques, & généralement toutes les Pieces qui n’ont d’autre but que de louer ses Productions & d’exalter ses talens, qu’on pourroit soupçonner de foiblesse & de médiocrité, par le soin même qu’il prend d’en relever le mérite.
D’être né d’un affranchi, le meilleur des pères, le seul qu’il eût pris, s’il avoit pu s’en choisir un ; d’éviter la société de ses confrères les auteurs, se réduisant à celle de quelques amis intimes & choisis, placés à la tête du gouvernement & de la littérature ; d’avoir pris la suite à la bataille de Philippe, jetté son bouclier, & protesté qu’il ne remanieroit plus les armes ; d’avoir été tribun militaire sans en avoir le mérite ; de s’être emparé de la confiance de Mécène ; de comparer son devancier Lucile à un fleuve qui roule quelques grains précieux d’or parmi beaucoup de boue ; enfin de ne se refuser à aucune raillerie sanglante, & de nommer chacun par son nom. Horace mérite bien moins ce dernier reproche que Lucile regardé comme l’inventeur de la satyre chez les Romains, lui qui, dans les débordemens de sa bile, appelloit ceux qui l’irritoient, voleurs, adultères, assassins, & nommoit toujours les personnages.
On comptoit pour un défaut dans ses vers ce qui en faisoit le mérite. Mais on ne connoissoit pas encore en France en quoi consiste le mérite des vers faits pour être mis en musique.
Mon mérite, enfin, n’est pas grand d’avoir suivi la bonne voie où tout m’engageait : ma famille, mon éducation, ma religion. […] Le comble de la naïveté pour un auteur, l’illusion mortelle et la suprême sottise, sera toujours de compter, pour réussir, sur son mérite seul. […] Je dis plus : c’est ce mérite même qui, à quelques égards, lui a fait tort. […] Ils ont eu le mérite ou la chance de couronner par un coup d’éclat de longues et anciennes tentatives. […] Brunetière mérite le respect d’écrivains plus soigneux qui sont extrêmement loin d’avoir sa forte personnalité et sa griffe puissante.
Son seul mérite alors est celui de la fidélité de la copie. […] Elle admet comme le genre humain les mots de bien et de mal, de vertu et de vice, de mérite et de démérite, de peine et de récompense, mais elle les explique à sa manière. […] La conscience ne lui attribue aucun mérite, et nul ne lui doit ni remercîment ni récompense, car il n’a pensé qu’à lui-même. […] Mais l’erreur mérite un conseil, non une punition. […] Or, nous venons de le voir, la morale de l’intérêt détruit le principe du mérite et du démérite et dans ce monde et partout ailleurs.
Il a voulu réhabiliter ce Poëte, mais il l’a traduit de maniere à n’en montrer que les défauts, sans en faire connoître le mérite. […] Ces Articles prouvent combien cet Ecrivain est capable de joindre le mérite de penser avec justesse, à celui de s’exprimer avec grace, quand il ne cherche pas à sortir de lui-même, & à appliquer ses talens à des sujets qui leur sont étrangers.
Mais on doit lui tenir compte de la richesse de l’invention, de la variété des sujets, & de la solidité de la morale, genre de mérite qui manque à plusieurs Fabulistes de nos jours. […] Nous aimons mieux croire qu’il les devoit à son mérite & à ses manieres, que d’aller chercher dans le fond de son cœur un vice qui déprécieroit tous ses talens.
Son Voyage du Languedoc, pour n’avoir pas la même aménité, l’heureuse aisance, le ton moëlleux de celui de Bachaumont & de Chapelle, n’en a pas moins le mérite de surpasser celui-ci par la correction, la variété, la noblesse, & la Poésie. […] Ce qui acheve de prouver qu’il est un de nos meilleurs Littérateurs, est l’érudition qu’il joint au mérite du style & de la Poésie ; érudition qui n’est point fantastique & mendiée, comme celle de tant d’Ecrivains dont le fond consiste dans quelques Extraits lus sans réflexion, & insétés uniquement pour faire étalage, mais une érudition solide, étendue, choisie, dirigée par le goût, appuyée sur la connoissance de l’Hébreu, du Grec, du Latin, & de plusieurs Langues vivantes.
L’élégant Traducteur de Virgile étoit bien capable de juger du mérite du Poëte qui a le plus approché de ce même Original, dont personne n’a mieux senti ni mieux rendu que lui toutes les beautés. […] Au mérite de la Poésie Latine, le P.
En 1658, ses amis lui conseillèrent de s’approcher de Paris, en faisant venir sa Troupe dans une Ville voisine : C’était le moyen de profiter du crédit que son mérite lui avait acquis auprès de plusieurs personnes de considération, qui s’intéressant à sa gloire, lui avaient promis de l’introduire à la Cour. […] L’estime dont sa Majesté l’honorait augmentait de jour en jour, aussi bien que celle des Courtisans les plus éclairés ; le mérite et les bonnes qualités de Monsieur de Molière faisant de très grands progrès dans tous les esprits. […] Ainsi il se fit remarquer à la Cour pour un homme civil et honnête, ne se prévalant point de son mérite et de son crédit, s’accommodant à l’humeur de ceux avec qui il était obligé de vivre, ayant l’âme belle, libérale ; en un mot, possédant, et exerçant toutes les qualités d’un parfaitement honnête homme.
Quel est celui qui ne prononce au fond de son cœur que le talent pouvait être mieux employé, un pareil ouvrage n’être pas fait, et qu’il y aurait qeulque mérite à le supprimer ? […] -son tableau du cavalier espagnol dont vous faites tant de cas a-t-il le mérite d’un autre cavalier du sallon précédent ? […] Dans une de ces batailles, je me rappelle encore des soldats touchés avec force et délicatesse, quoique ce ne soit pas le mérite ordinaire de ce maître ; là ou ailleurs (car comme je compte sur vous je parcours les choses un peu légèrement), sur le devant un soldat mort, un étendard, un tambour, une terrasse peints avec beaucoup de vigueur.
Et, tous les deux, voici qu’ils font la preuve, à leur tour, que la Diplomatie, dont le plus grand mérite pendant l’action est presque toujours le silence, après l’action, devrait aussi le garder… Talleyrand, qui fut le plus silencieux des diplomates, Talleyrand qui n’écrivait que des billets, ne disait que des mots, et dont toute la puissance ne fut guères que dans des monosyllabes et des airs, avait-il conscience de cela quand il prescrivait de ne publier ses Mémoires que trente ans après sa mort ? […] Mais, malgré son mérite et peut-être à cause de son mérite, le livre était resté aristocratiquement inconnu… Et il en serait de même de la personne de son auteur sans la publication du comte Adhémar d’Antioche, qui a la prétention de le faire connaître.
L’homme de Malherbe devient l’homme de Vaugelas, de Vaugelas dont les mérites si grands sont oubliés, et qu’il nous rappelle. […] Nous, comme d’autres, nous pourrions trouver que la main de ce peseur de mérites ne tient pas toujours la balance assez droite, non par faiblesse, mais parce qu’il met peut-être trop de force dans sa manière de l’empoigner. […] Les groupes qui le composent étant nombreux et surchargés de personnages ; l’auteur n’a pas la possibilité — avec les limites qu’il s’est imposées — de s’arrêter sur chaque figure qui mérite l’étude et le détail.
Je m’imagine que dans ce moment, le père devait approcher de son fils, et lui dire : « Tu vois dans quel pays tu es né, et comme on y honore tout ce qui est grand ; et toi aussi, mérite un jour que ton pays t’honore. » Ainsi, chez les Grecs, de quelque côté qu’on jetât les yeux, on trouvait partout des monuments de la gloire ; les rues, les temples, les galeries, les portiques, tout donnait des leçons aux citoyens. […] Je ferai comme ces peintres qui ne pouvant transporter avec eux un antique pour le faire admirer, en crayonnent rapidement les contours et les principaux traits : presque tout le mérite de la figure échappe, mais on connaît du moins les mouvements et l’attitude. […] Platon, qui ne se mêla jamais des affaires publiques, ne parut point dans Athènes au rang des orateurs ; mais dans cet éloge funèbre, composé en l’honneur des guerriers, il voulut disputer le mérite de l’éloquence à Périclès, comme dans ses autres ouvrages il lutte avec Pythagore pour la philosophie, avec Lycurgue et Solon pour la politique, avec Homère pour l’imagination ; souvent sublime, et presque toujours poète, orateur, philosophe et législateur.
Son mérite fut d’avoir la passion des lettres et des antiquités, comme d’autres ont l’ambition de la fortune ou des grandeurs. […] Là se trouvent toutes les espèces différentes de mérite. Des savants dans les langues, tels qu’Adrien Turnèbe, un des critiques les plus éclairés de son siècle, Guillaume Budé, qu’Érasme nommait le prodige de la France, et dont il eut la faiblesse ou l’orgueil d’être jaloux, qui passait pour écrire en grec à Paris comme on eût écrit à Athènes, et qui, malgré ce tort ou ce mérite, fut ambassadeur, maître des requêtes et prévôt des marchands ; Longueil, aussi éloquent en latin que les Bembe et les Sadolet, et mort à trente-deux ans, comme un voyageur tranquille qui annonce son départ à ses amis ; Robert et Henri Étienne, qui ne se bornaient pas, dans leur commerce, à trafiquer des pensées des hommes, mais qui instruisaient eux-mêmes leur siècle ; Muret exilé de France, et comblé d’honneurs en Italie ; Jules Scaliger, qui, descendu d’une famille de souverain, exerça la médecine, embrassa toutes les sciences, fut naturaliste, physicien, poète et orateur, et soutint plusieurs démêlés avec ce célèbre Cardan, tour à tour philosophe hardi et superstitieux imbécile ; Joseph Scaliger sort fils, qui fut distingué de son père, comme l’érudition l’est du génie ; et ce Ramus, condamne par arrêt du parlement, parce qu’il avait le courage et l’esprit de ne pas penser comme Aristote, et assassiné à la Saint-Barthélemi, parce qu’il était célèbre, et que ses ennemis ou ses rivaux ne l’étaient pas.
L’honnête homme alors n’était pas seulement, en effet, celui qui savait les agréments et les bienséances, mais il y entrait aussi un fonds de mérite sérieux, d’honnêteté réelle qui, sans être la grosse probité bourgeoise toute pure, avait pourtant sa part essentielle jusque sous l’agrément ; le tout était de bien prendre ses mesures et de combiner les doses ; les vrais honnêtes gens n’y manquaient pas. […] C’est, au reste, à la suite de ces deux épistolaires que vient se classer le chevalier et qu’il mérite d’avoir rang dans notre littérature. […] Mais, du temps que j’avois l’honneur de de vous approcher, je m’apercevois que vous saviez toujours distinguer le vrai mérite parmi de certaines choses brillantes qui ne dépendent que de la fortune, et cela me fait espérer que vous ne désapprouverez pas la liberté que je prends de vous écrire. […] Je n’ai pas dissimulé les torts et infime les petits ridicules du chevalier, et j’ai le droit, ce me semble, d’en venir maintenant à ses mérites ; ils sont très-réels, très-fins, et ce m’a été un si sensible plaisir de les découvrir que je voudrais le faire partager. […] Sitôt que tout le monde fut assis : La conversation, dit monsieur le maréchal, a été fort agréable ; mais, à cause de madame, il faut renouveler d’esprit ; elle mérite qu’on n’épargne rien de galant.
Ce héros, messieurs, eut alors la bonté de me dire la pensée qu’il avait de vous rendre arbitres de la capacité, du mérite et des récompenses de tous ces illustres professeurs qu’il appelait, et de vous faire directeurs de ce riche et pompeux prytanée des belles-lettres, dans lequel, par un sentiment digne de l’immortalité, dont il était si amoureux, il voulait placer l’Académie française le plus honorablement du monde, et donner un honnête et doux repos à toutes les personnes de ce genre, qui l’auraient mérité par leurs travaux. […] Au milieu des éloges que mérite M. […] Je n’ai garde de l’attribuer à mon mérite qui est trop mince : elle est due au crédit seul de M. le cardinal d’Estrées et de M. l’abbé son neveu, qui, sans aucun mouvement de ma part, m’ont gagné l’unanimité des suffrages. […] Elle n’aura pas grand-peine à surpasser en mérite celle de Paris, qui n’est maintenant composée, à deux ou trois hommes près, que de gens du plus vulgaire mérite, et qui ne sont grands que dans leur propre imagination.
Les jours où elle n’était pas trop envahie par les duchesses et par les personnes de bel air, Mlle Le Couvreur se plaisait à recevoir ses amis : Ma vanité, disait-elle, ne trouve point que le grand nombre dédommage du mérite réel des personnes ; je ne me soucie point de briller ; j’ai plus de plaisir cent fois à ne rien dire, mais à entendre de bonnes choses, à me trouver dans une société de gens sages et vertueux, qu’à être étourdie de toutes les louanges fades que l’on me prodigue à tort et à travers. […] Propre aux commerces les plus délicats, quoique les délices des savants ; modeste dans ses discours, simple dans ses actions, la supériorité de son mérite se montre, mais il ne la fait jamais sentir… Nous retrouvons ici cette langue excellente et modérée que j’ai déjà essayé de caractériser plus d’une fois, la langue des commencements du xviiie siècle, remarquable surtout par le tour, par la justesse et la netteté, la langue d’après Mme de Maintenon, et que toute femme d’esprit saura désormais écrire, celle des Caylus, des Staal et des Aïssé. […] Difficile à acquérir, mais plus difficile à perdre : telle est la vraie devise de l’amitié, et c’est un mérite que le cœur élevé de Mlle Le Couvreur mettait bien au-dessus des rapides caprices et des flammes passagères. […] Elle a charmé le monde, et vous l’en punissez… Mais ici je ne veux pas trop m’étendre, de peur de paraître toucher à la déclamation, en parlant de celle dont le principal mérite, au théâtre comme dans la vie, a été d’être la vérité, la nature, le contraire de la déclamation même. […] En entendant, l’autre jour, le drame intéressant dans lequel la lutte du talent et du sentiment vrai contre le préjugé et l’orgueil social est si vivement représentée sous son nom, je me disais combien les choses ont changé depuis un siècle, combien la haute société ne mérite plus, à cet égard du moins, les mêmes reproches, et combien elle est peu en reste d’admiration et de procédés délicats envers tout talent supérieur.
Tout ce qui vaut la peine d’être fait mérite et exige d’être bien fait, et rien ne peut être bien fait sans attention. » Ce précepte, il le répète sans cesse, et il en varie les applications à mesure que son élève grandit et est plus en état d’en comprendre toute l’étendue. […] Si vous voulez gagner en particulier les bonnes grâces et l’affection de certaines gens, hommes ou femmes, tâchez de découvrir leur mérite le plus saillant, s’ils en ont, et leur faiblesse dominante, car chacun a la sienne ; puis rendez justice à l’un, et un peu plus que justice à l’autre. […] L’idéal, selon lui, serait d’unir les mérites des deux nations ; mais il semble, dans ce mélange, pencher encore du côté de la France : « J’ai dit plusieurs fois, et je le pense réellement, qu’un Français, qui joint à un fonds de vertu, d’érudition et de bon sens, les manières et la politesse de son pays, a atteint la perfection de la nature humaine. » Il unit assez bien lui-même les avantages des deux nations, avec un trait pourtant qui est bien de sa race. […] Il paraît qu’il réussit mieux en diplomatie, dans ces rôles secondaires où suffit un mérite solide. […] Vous n’avez jamais été, dans aucun genre, ni charlatan, ni dupe de charlatans, et c’est ce que je compte pour un mérite très peu commun, qui contribue à l’ombre de félicité qu’on peut goûter dans cette courte vie.
Le livre est froid et mérite peu d’être relu. […] Il remarque que nulle part il ne se rencontre plus de cordialité, plus de facilité de commerce et d’égalité véritable qu’entre avocats : « Nulle part, dit-il, la réputation, l’âge, le talent, ne font moins sentir leur supériorité et n’exigent moins de déférence que dans cette corporation singulière où les relations sont presque toujours hostiles. » Pourtant, avec tous les mérites solides et fins qu’il allait posséder, et en partie à cause de ces mérites mêmes, il manquait de ce qui procure le succès au barreau ; quand il avait donné les bonnes raisons en bons termes, il ne savait pas se répéter et au besoin en trouver d’autres : Le juge y compte, dit-il malicieusement ; et peut-être l’avocat qui serait le plus disposé à s’en corriger, est-il obligé de reproduire une seconde série des mêmes raisonnements, quand il voit que le tribunal n’a pas écouté la première. […] Villemain, dans son excellent Rapport de 1840, a indiqué les mérites et donné à deviner les lacunes, quand il a dit : L’histoire est toujours à faire ; et tout esprit distingué, en s’aidant lui-même du progrès d’idées qu’il adopte ou qu’il combat, découvre dans les événements racontés par d’autres des leçons et des vues nouvelles. […] Cette affectation singulière, tout à fait petite dans un mérite si réel et si solide, a choqué dès longtemps un critique qui fait de M.
Mais tout cela dit, le tout examiné et débattu, Amyot garde sa place et la gardera ; et il la mérite. Il la mérite, nous dit Montaigne, excellent juge, pour la « naïveté et pureté du langage en quoi il surpasse tous les autres », pour la « constance d’un si long travail », pour la « profondeur de son savoir », ayant pu développer si heureusement un « auteur si épineux et ferré » que Plutarque (car il n’est pas besoin de savoir le grec pour sentir qu’on est porté avec Amyot dans un courant de sens continu, et que, sauf tel ou tel point de détail, il est maître de son sujet et dans l’esprit de l’ensemble). […] Ce sont là les mérites de ce traducteur incomparable, venu à un moment décisif et où il pouvait se permettre ce qui, depuis lors, n’eût plus été également accordé. […] Amyot a pu commettre, dans sa traduction de Plutarque, toutes les fautes et les inexactitudes soit de sens, soit historiques, géographiques, mythologiques, etc., dont on l’a taxé, et que Méziriac disait avoir remarquées jusqu’en « plus de deux mille passages » ; et cependant son mérite d’écrivain n’en est nullement atteint ; car ce mérite est d’un tout autre ordre, et il n’en est pas moins vrai, comme l’a dit Vaugelas, que personne n’a mieux su que lui le génie et le caractère de notre langue, n’a usé de mots et de phrases si naturellement françaises, sans aucun mélange des façons de parler des provinces : Tous les magasins et tous les trésors du vrai langage français, continue Vaugelas avec son enthousiasme du bien parler et du bien dire, sont dans les ouvrages de ce grand homme, et encore aujourd’hui nous n’avons guère de façons de parler nobles et magnifiques qu’il ne nous ait laissées ; et, bien que nous ayons retranché la moitié de ses phrases et de ses mots, nous ne laissons pas de trouver dans l’autre moitié presque toutes les richesses dont nous nous vantons et dont nous faisons parade.
Tel fut son mérite et sa gloire, gloire finie, qui, au lieu de grandir comme la gloire littéraire ira chaque jour diminuant. […] C’est un sceptique, qui sans la politique serait peut-être un athée, un utilitaire de religion, qui met la morale au-dessus de toute religion positive, la morale sans sanction, se payant de ses propres mains ses propres mérites, et se punissant de ces mêmes mains qui n’osent se frapper jamais. […] Tel est le mérite de ces pages de Rivarol, tirées si tard, mais enfin tirées de l’ombre et replacées sous nos yeux, et qui révèlent en cet homme, d’une littérature que sa phénoménale conversation a fait oublier, un autre homme qu’on n’y cherchait passait pour l’histoire et les choses sévères de l’histoire. […] Mais, c’est par ces simplicités toutes puissantes qu’il a toujours quand il pense ou parle en histoire, qu’il mérite le nom glorieux que Burke, critique ce jour-là, lui avait donné. […] C’est de là qu’il jaillit dans sa supériorité absolue, et le mérite de M. de Lescure, c’est de l’avoir vu.
Il a lui-même raconté, dans quelques pages d’une simplicité un peu cherchée (Une anecdote relative à Laplace), l’origine de ses relations avec le grand géomètre et comment, sur un point de mathématiques, il trouva lui-même des solutions dont Laplace, qui les avait obtenues de longue main, voulut lui laisser tout le mérite devant l’Institut. […] Biot a pris tous ses avantages en discutant cette question de publicité pour l’Académie des Sciences l’y remarque des appréciations très exactes et très bien rendues sur les mérites inégaux et divers de Delambre, de Cuvier et de Fourier, à titre de secrétaires perpétuels. […] Le tome Ier des Mémoires scientifiques d’Arago fournit à ceux qui ont le mérite de comprendre ces hautes discussions la preuve de ces velléités de concurrence ou de résistance également réfutées. […] Ce qui est vraiment beau pour un savant et ce qui mérite d’être envié en effet de tous ceux qui ont connu les plaisirs de l’esprit, c’est qu’il se maintint constamment frais et dispos d’intelligence, et qu’il vécut, presque jusqu’à la dernière heure de la vie de la pensée.
Les Allemands sont beaucoup plus indulgents que nous à cet égard ; ils souffrent aussi, souvent même ils applaudissent une certaine quantité d’idées triviales en philosophie, sur la richesse, la bienfaisance, la naissance, le mérite, etc., lieux communs qui refroidiraient en France toute espèce d’intérêt. […] L’on ne peut juger jusqu’à quel point les ménagements employés par Wieland sont politiquement nécessaires ; mais je répéterai59 que, sous le rapport du mérite littéraire, l’on se tromperait en croyant donner plus de piquant aux vérités philosophiques par le mélange des personnages et des aventures qui servent de prétexte aux raisonnements. […] Sans doute je n’ai pu traiter un tel sujet, sans citer beaucoup d’écrivains et beaucoup de livres ; mais c’était à l’appui de mes raisonnements que je présentais ces exemples, et non avec l’intention de juger et de discuter le mérite de chaque auteur, comme on pourrait le faire dans une bibliothèque universelle. […] Les odes de Klopstock, les tragédies de Schiller, les écrits de Wieland, le théâtre de Kotzebue, etc., exigeraient plusieurs chapitres, si l’on voulait approfondir leur mérite littéraire ; mais ce travail, comme je l’ai déjà dit, ne pouvait entrer dans le plan général de mon ouvrage.
Un de nos camarades nommé Vignon, avait fait un travail sur Louise Labé, dans lequel, en sa qualité de Lyonnais et de fervent catholique, il avait surfait beaucoup le mérite et surtout la chasteté de son héroïne. […] Le ministre effectivement dirigeant était lord Bute. — Tant est vrai le mot que m’écrivait l’autre jour dans sa modestie un homme d’un beau nom et d’un vrai mérite, qui vient de donner une bonne édition de l’un des classiques épistolaires du xviie siècle : « Je sens mieux de jour en jour combien il faut savoir de choses pour parler de n’importe quoi sans dire une bêtise !
Scudéry lui reprochait d’avoir imité dans Le Cid un ouvrage du théâtre espagnol ; il ne voyait en lui qu’un traducteur de Guilain de Castro ; il prononçait que Corneille était tout à fait dénué du mérite de l’invention. […] On se persuade qu’on peul suppléer à la nouveauté des assertions ou racheter ce qu’elles oui de suranné parle mérite d’une rédaction plus énergique, et qu’on est plus énergique quand on est plus absolu et plus outré.
Seroit-on bien reçu à dire que personne n’étoit plus capable de remplacer l’Abbé Desfontaines ; que, né avec autant d’esprit que son prédécesseur, il l’a emporté sur lui du côté du talent de la Poésie, & qu’on peut en juger par son Ode sur la Journée de Fontenoy, & par d’autres Pieces connues ; que les Auteurs Grecs & Latins lui étoient aussi familiers que ceux du siecle de Louis XIV ; qu’il a réuni la connoissance de plusieurs Langues étrangeres au mérite de bien écrire dans la sienne ; qu’il s’est montré supérieur dans l’art de faire l’analyse d’un Ouvrage, & sur-tout d’une Piece de Théatre, quand il a voulu s’en donner la peine ? […] A-t-il pu imaginer qu’on adopteroit ses decisions, lorsqu’on l’a vu vingt fois s’efforcer de prouver que ce premier Poëte de notre Nation n’est pas si infaillible qu’on le pense ; que ses Ouvrages ne sont pas exempts de fautes contre la Langue & le goût ; qu’il a avancé des erreurs & des mensonges ; qu’il est injuste dans presque toutes ses critiques, indécent & atroce dans ses diatribes ; que tous ses Opéra sont détestables ; que plusieurs de ses Comédies n’ont d’autre mérite que celui de la versification ; que quelques-unes de ses Tragédies sont médiocres ; que ses Histoires sont remplies de faussetés, ses Satires de calomnies, ses Romans d’impiétés ?
A la facilité de saisir, dans les objets, les rapports les plus éloignés, il réunit le mérite de penser avec noblesse & de peindre avec force. […] Linguet l’a bien senti lui-même par le désaveu glorieux qu’il en a fait, & par les éloges vrais qu’il a donnés depuis à ce grand homme d’Etat, dont la Nation & les Etrangers admirent également la sagesse & la probité ; qui ne doit son élévation qu’à son mérite ; dont tous les pas dans la carriere politique, où il est entré dès l’âge le plus tendre, ont été marqués par des services rendus à la Patrie ; qui, malgré sa grande modestie, jouit de toute sa réputation ; & dont la gloire, appuyée sur l’estime générale de ses contemporains, ne pourra qu’augmenter par la succession des temps.
Bacon210 a été surtout un initiateur, il a eu le mérite de crier bien haut, d’être le héraut d’une ère nouvelle, de donner à la recherche scientifique la dignité et l’espoir d’un brillant avenir. […] Darwin (Erasme) professe la même théorie, en substituant au mot « vibration » l’expression « mouvements sensoriels. » Bien que son système soit plein d’ « hypothèses absurdes », il a eu le mérite de voir que la psychologie est subordonnée aux lois de la vie, et de couper court par là à des questions mal posées et à des problèmes factices. […] Son grand mérite a été d’apercevoir clairement les rapports de la psychologie avec la science de la vie, reconnaissant ainsi une grande vérité, déjà clairement vue par Aristote et exprimée ainsi par saint Thomas d’Aquin : « Impossibile est in uno homine esse plures animas per essentiam différentes, sed una tantum est anima intellectiva quæ vegetativo et sensitivo et intellectivo officiis fungilur. […] Lewes lui attribue un mérite, celui d’avoir rendu service à la physiologie et à la psychologie, même par la hardiesse de ses hypothèses ; et deux défauts, d’avoir complètement négligé en psychologie l’analyse subjective, et d’avoir fondé une phrénologie ou crânioscopie, démentie par les faits et les progrès de la science. […] « Victor Cousin et Théodore Jouffroy sont les chefs de cette école : l’un, brillant rhétoricien totalement dépourvu d’originalité ; l’autre, penseur sincère dont le mérite a été éclipsé par son brillant collègue.
A cela près, cet ouvrage a le mérite qui lui est propre. […] Les Anglois n’eurent point de Michel Cervantes qui corrigeât leurs Romanciers de ces inventions gigantesques ; mais ceux-ci eurent le mérite de se corriger eux-mêmes : ce ne fut, il est vrai, qu’à l’aide du temps qui, à la longue, rectifie le goût quand il ne le corrompt pas. […] Il joint au mérite de la narration celui d’une morale assaisonnée, & d’un style qui dit beaucoup plus qu’il ne semble dire : c’est un de ces écrits qu’on ne doit point lire trop rapidement. […] Le grand mérite de cet ouvrage consiste dans les fines observations de Ricca, & dans les profonds raisonnements d’Usbec. […] Il faut donc supprimer aussi tous ces grands ouvrages destinés par leur suprême mérite à se perpétuer aussi long-temps que les siecles ?
Coppée n’en a pas moins ce grand mérite d’avoir, le premier, introduit dans notre poésie autant de vérité familière, de simplicité pittoresque, de « réalisme » qu’elle peut en admettre. […] Enfin, des Jacobites à Pour la Couronne, il y a un intervalle de douze ans, et il faut un mérite bien solide pour maintenir son rang et retrouver toute son action après une aussi longue retraite. […] François Coppée, Pour la Couronne, représenté à l’Odéon avec un si éclatant succès, a d’abord un mérite.
C’est là un mérite de situation et de circonstance. Ce n’est pas là un mérite de facultés. Elle a cependant un mérite de facultés, Mme Henry Gréville.
Non qu’en beaucoup de points il ne mérite de l’être… Je me hâte de le dire d’abord, pour éviter le cri et le cabre ment de ces esprits qui avalent un homme en bloc et qui prennent toute gloire pour une hostie, dans chaque partie de laquelle il y a un Dieu tout entier. […] Girard n’expliquent pas très bien le génie et les mérites de l’historien et de l’Histoire du Péloponèse, mais je dis simplement qu’elles les expliquent en sens inverse de l’opinion de M. […] Il n’est aveugle que quand il conclut, — que quand il conclut les mérites transcendants et incomparables de Thucydide et de son histoire, des observations qui devraient justement figer sous sa plume sa conclusion.
Il croyait réellement au mérite transcendant de Vauvenargues. […] Ainsi, au fond de ce griffonneur qui envoyait ses essais à Voltaire, le gentilhomme tenait bon comme le chrétien, et c’est ce fond de Vauvenargues — puisque son nom se prononce encore — qui mérite l’étude et l’intérêt de l’histoire. […] Son nom restera dans l’histoire des lettres, car il est dans la correspondance du diable d’homme qui tient son siècle dans sa main, comme Charlemagne tenait son globe ; mais on s’étonnera des mérites que Voltaire a mis sous ce nom.
Il croyait réellement au mérite transcendant de Vauvenargues. […] Ainsi, au fond de ce griffonneur qui envoyait ses essais à Voltaire, le gentilhomme tenait bon comme le chrétien, et c’est ce fond de Vauvenargues, — puisque son nom se prononce encore, — qui mérite l’étude et l’intérêt de l’histoire. […] Son nom restera dans l’histoire des lettres, car il est dans la correspondance du diable d’homme qui tient son siècle dans sa main, comme Charlemagne tenait son globe, mais on s’étonnera des mérites que Voltaire a mis sous ce nom.
* Il n’est pire sot que le sot qui a du mérite, parce qu’il emploie ce mérite soit à se cacher à lui-même sa sottise, soit à s’y obstiner comme au meilleur de son mérite. […] Car quel mérite ont-ils eu à naître, ceux-ci avec les dons de l’esprit, ceux-là au milieu de richesses amassées par leurs pères ? […] On est sensible au plaisir d’aider un homme éminent à arriver où l’appelle son mérite. […] A les en croire, s’ils ont quelque mérite, ils ne le savent que par des amis trop indulgents. […] De son mérite je ne pouvais que bien augurer par le peu de bruit qu’il faisait.
L’artiste, aujourd’hui et depuis de nombreuses années, est, malgré son absence de mérite, un simple enfant gâté. […] Thiers, « cet élan de la supériorité qui ranime les espérances un peu découragées par le mérite trop modéré de tout le reste. […] Il ne faut pas oublier, parmi les mérites de M. […] Elle a cet immense mérite d’être poétique, excitante et noble. […] En tant que simple cheval, en quoi augmentent-elles son mérite ?
Le directeur de l’instruction publique eut à prononcer en dernier ressort sur le mérite d’un pas. […] Je n’ai pas à développer tous les mérites et les perfections que Roederer reconnaît en Louis XII ; il en fait je ne sais quel type accompli, il semble, en vérité, que du moment que Bonaparte, premier consul, ne s’était point tenu dans sa forme première et avait brisé le cadre où il s’était plu d’abord à l’enfermer, Roederer s’était, de regret, rejeté en arrière, et qu’il avait cherché loin des régions historiques brillantes, loin de la sphère de l’admiration et de la gloire, et, comme il dit, « dans l’obscure profondeur d’un gouvernement utile », un héros d’un nouveau genre, pour se consoler et se dédommager de celui qu’il n’avait pu fixer. […] Ces deux sociétés, selon lui, n’avaient cessé de coexister durant tout le xvie siècle : c’était une émulation de mérite et de vertu de la part des nobles héritières, trop éclipsées, d’Anne de Bretagne, c’était une émulation et une enchère de galanterie de la part des folles élèves de l’école de François Ier. […] Roederer, l’hôtel de Rambouillet, ce salon accompli, fondé vers le commencement du xviie siècle, n’était que la reprise tardive des traditions d’Anne de Bretagne, la revanche du mérite, de la vertu et de la politesse sur la licence à laquelle tous les rois depuis François Ier, et Henri IV lui-même, avaient payé tribut. […] Pourtant l’âge venait ; Louis XIV se tempérait à son tour, et une femme sortie du plus pur milieu de la société de Mme de Rambouillet et qui en était moralement l’héritière, une femme accomplie par le ton, la raison ornée, la justesse du langage et le sentiment des convenances, Mme de Maintenon, s’y prenait si bien qu’elle faisait asseoir sur le trône, dans un demi-jour modeste, tous les genres d’esprit et de mérite qui composent la perfection de la société française dans son meilleur temps.
Il avait trouvé dans Ney un protecteur qui l’avait apprécié d’emblée, et l’on peut dire qu’il n’en pouvait rencontrer un à qui son genre de mérite s’appliquât mieux et s’adaptât avec plus d’avantage. […] Je le crois susceptible de devenir un militaire très distingué… » Et le 8 brumaire an xiv (30 octobre 1805), il écrivait de Landsberg, dix jours après la capitulation d’Ulm : « … Je désire vivement m’attacher cet officier qui a un mérite réel, et qui, m’ayant suivi comme volontaire depuis un an, n’a cessé de donner des preuves de talent et de courage. » Ce courage, il en avait fait preuve dans les combats qui avaient précédé la capitulation d’Ulm. […] Berthier, dans ses hautes fonctions et dans son aptitude limitée, flaira de bonne heure en Jomini un talent supérieur, un rival possible auprès de Napoléon ; les missions de confiance que Jomini va remplir au quartier général impérial dans les campagnes de 1806-1807 éveilleront surtout la jalousie du major général, qui ne perdra aucune occasion dès lors de rabaisser, de retarder, s’il était possible, et finalement de décourager, d’ulcérer et d’outrer, jusqu’à le jeter hors des gonds, un étranger de mérite, et de l’ordre de mérite le plus fait pour lui porter ombrage. […] Ney, qui la veille ignorait, comme Napoléon lui-même, qu’il allait y avoir bataille le 8 février, avait envoyé le 7 au soir au quartier général l’aide de camp Fezensac, pour rendre compte à l’Empereur de sa marche et de l’attaque qu’il poussait vivement contre le général prussien Lestocq : « C’est la plus importante mission que j’aie remplie, nous dit M. de Fezensac, et la plus singulière par ses circonstances ; elle mérite donc d’être racontée avec quelques détails.
Je n’irai pas jusqu’à dire avec La Bruyère que « les enfants des dieux se tirent des règles de la nature, que le mérite chez eux devance l’âge et qu’ils sont plus tôt des hommes parfaits que le commun des hommes ne sort de l’enfance ». […] Quel que soit l’éclat de leurs mérites personnels, on ne le distingue jamais nettement de celui qu’ils tirent de leur naissance. […] Il n’était point possible de séparer leur histoire de celle de notre pays, car ils y ont tous été mêlés en vertu même de leur naissance ; mais ils y ont été mêlés à des degrés et avec des mérites fort inégaux. […] Ce qui n’empêche point M. le duc d’Aumale d’attribuer pieusement à ce gouverneur de dix-sept ans tout le mérite des mesures qu’il prend et des rapports qu’il signe. […] Et voyez : la part que le hasard a toujours dans le succès des batailles et qui me semblait tout à l’heure diminuer le mérite des chefs d’armée, rend, au contraire, leur fonction plus tragique et plus solennelle.
Les goûts d’exception et les besoins d’exception seront méconnus et par suite les aptitudes et les mérites d’exception seront dépréciés. […] En dépit du mot si vrai de Schopenhauer : « En morale la bonne volonté est tout, en art, elle n’est rien » on verra la société couronner l’effort laborieux, le mérite médiocre et respectueux du goût général plutôt que l’originalité heureuse, hardie et dédaigneuse du goût moyen, de l’esthétique de tout le monde. La notion étroite de justice égalitaire viciera les évaluations des mérites et des œuvres. […] Le mérite se mesurera à l’effort matériel dépensé. […] À ce compte, un poète qui suera sang et eau pour faire de mauvais vers sera sacré grand poète de préférence à un poète heureusement doué, dont le génie et la facilité diminueront le mérite.
Bourget, le mérite d’y avoir réellement grandi, qu’il l’eût assumée toute, dans cette complexité inextricable et déroutante, qui est à l’ordre rationnel ce que l’ordre de la nature est à notre idée d’harmonie, c’est-à-dire aussi fermée à notre intime pénétration qu’est déconcertant, pour une oreille vulgaire, le faste musical d’une symphonie de Mendelssohn. […] Bourget avec l’intérêt qu’il mérite, aura sans doute observé en cet esprit logique un phénomène très curieux de sujétion idéale, exercée sur ses dispositions raisonnées par des exigences de sensibilité souvent contradictoires. […] On comprendra tout le mérite de M. […] Il faut pareillement lui rendre hommage de ce que les abstractions qu’il a recherchées, et les modalités qu’il a rendues, et les formes qu’il a saisies, aspirent à se maintenir homogéniques, et de graduation précise, et de précise corrélativité, et condescendent aux mérites des choses, à leurs besoins légitimes, comme à leurs caprices. […] Que resserré plus ou moins étroitement entre ces diverses digues mentales, l’esprit soif en mesure d’atteindre à la pensée et de la rendre avec un égal mérite, cela ne se pourrait imaginer.
La duchesse du Maine en était une, et des plus singulières : elle mérite d’être étudiée, elle et son existence princière, dans sa petite cour de Sceaux, où elle nous apparaît comme une des productions extrêmes et les plus bizarres du règne de Louis XIV, du régime monarchique poussé à l’excès. […] Ce M. de Malezieu, qui devint le personnage essentiel de la cour de la duchesse, son oracle en tout genre ; et de qui on parlait à Sceaux comme de Pythagore : « Le maître l’a dit », devait certes avoir plus d’une qualité ; mais il est difficile aujourd’hui de se faire une juste idée de son mérite. […] Il trouva cette coterie à Sceaux, et, à force de mouvement et d’invention, il sut la remplir, durant plus de vingt-cinq ans, de l’idée de son mérite et de sa sublimité. […] Grâce à des mérites si réels et si divers, à Châtenay, à Sceaux, à Saint-Maur, on requérait que le facétieux abbé fût de toutes les fêtes champêtres et bucoliques : Parmi les dieux des bois, surtout n’oubliez pas Celui vêtu de noir qui porte des rabats. […] Elle avait pris à son service, dans l’automne de 1711, à titre de femme de chambre, une personne de mérite qui n’eût été au-dessous d’aucun rang, faite pour être l’égale et la rivale des plus distinguées d’alors par l’esprit, unissant le sérieux à l’enjouement, et d’un cœur qui garda encore de son prix, même lorsqu’il se fut desséché.
Cette fille, d’un mérite extraordinaire comme on l’appelait, était née au Havre en 1607, sous Henri IV ; elle ne mourut qu’en 1701, à l’âge de quatre-vingt-quatorze ans, vers la fin du règne de Louis quatorzième, comme elle disait volontiers. […] Son mérite et ses qualités estimables lui concilièrent jusqu’à la fin une petite cour et des amis, qui ne parlaient d’elle que comme de la première fille du monde et de la merveille du siècle de Louis-le-Grand . […] Quoi qu’il en soit, Mlle de Scudéry mérite qu’on rattache au sien une idée juste. […] Une fille d’un si grand mérite et sans grâce, c’est pourtant désobligeant à peindre, et c’est pénible à montrer ; on aimerait tant à y mettre ce qui lui manque ! […] Un écrivain d’un mérite médiocre, mais qui a recueilli quelques traditions et informations assez justes sur les personnages du Grand Siècle, l’abbé Lambert, avait dit (Histoire littéraire du règne de Louis XIV), en parlant de la vogue prodigieuse qu’eurent en leur temps ces romans de Mlle de Scudéry et pour l’expliquer : Il est vrai que ces romans, si toutefois on peut les appeler de ce nom, ne doivent être regardés que comme des espèces de poèmes épiques et des histoires véritables sous des noms cachés.
Mariée en 1666 au marquis de Lambert, officier de mérite qui devint plus tard lieutenant-général, et dont le père l’avait été, elle entra dans un monde plus conforme à ses instincts élevés, et elle ne garda de son premier entourage que le goût très vif des choses de l’esprit. […] On ne doit aux unes qu’un respect extérieur : « On doit de l’estime et un respect de sentiment au mérite. […] De loin les favoris de la fortune en imposent : « La renommée exagère leur mérite, et la flatterie les déifie. […] C’est le mérite qui doit vous séparer du peuple, et non la dignité ni l’orgueil. » Elle le lui redit en plus d’un endroit. […] La conclusion littéraire sur Mme de Lambert, sur cette personne de mérite, si délicate à la fois et si bien-pensante, et qui fit de ses qualités et de sa fortune un si noble usage, a été donnée dès longtemps par un de ses autres amis que j’ai déjà nommé, le judicieux marquis d’Argenson : Ses ouvrages, écrivait-il, contiennent un cours complet de la morale la plus parfaite à l’usage du monde et du temps présent.
De toutes les langues qu’on peut cultiver, celle de notre patrie mérite toujours la préférence. […] L’auteur a le mérite d’avoir réduit toute la Grammaire en articles courts & en principes clairs & sensibles. […] Tout mérite d’être lu dans ce traité, dit Mr. d’Alembert, jusqu’à l’errata qui contient des réfléxions sur notre ortographe, sur ses bizarreries, ses inconséquences & ses variations. […] Le principal & le seul mérite de ce livre, si ce n’est pas un vice, est d’avoir accumulé une foule d’exemples tirés d’auteurs connus ; mais ces exemples ainsi entassés, fatiguent bien plus le lecteur qu’ils ne l’instruisent. […] Chaque mot y est d’abord suivi de son qualificatif, de la signification latine & même de son étymologie, lorsque celle-ci mérite la peine d’être indiquée.
L’expression même la plus brillante perd de son mérite dès que la recherche s’y laisse apercevoir. […] cette question mérite d’être approfondie. […] La difficulté vaincue est le grand mérite de la poésie, et la principale source du plaisir qu’elle nous cause. […] Mais, dans une langue morte, le mérite de ces deux qualités disparaît en grande partie : on le suppose plutôt qu’on ne le sent3. […] Le style serré, quand il n’est d’ailleurs ni décousu ni obscur, a le premier de tous les mérites, celui de rendre le discours semblable à la marche de l’esprit, et à cette opération rapide par laquelle des intelligences se communiqueraient leurs idées.
Le Parti Philosophique, dont il est un des Sous-Chefs, a mis ses Eloges de plusieurs Membres de l’Académie des Sciences bien au dessus des Eloges de Fontenelle, parce qu’il est d’usage parmi les Philosophes de ne louer que par comparaison & par intérêt : mais les Littérateurs, que l’esprit de parti n’aveugle point, trouvent que les Eloges du Secrétaire actuel ne sont propres qu’à faire mieux sentir le mérite de ceux de son prédécesseur. […] Quels fruits se sont-ils promis de ces personnalités odieuses, qui appuient bien plus mon mépris pour leur Secte, qu’elles ne vengent le mérite des Sectaires que j’ai attaqués ?
Jamais homme ne fit sentir avec plus de dignité l’accord de ces deux mérites. […] Avoir reçu du Ciel une imagination vive & féconde, un jugement aussi exquis que solide ; allier à l’étendue du savoir une profonde sagesse ; aux charmes de l’éloquence l’empire de la vertu ; à l’élévation des dignités un amour aussi éclairé qu’intrépide pour le bien ; avoir ajouté à ces qualités une application infatigable à cultiver ses talens, une modestie sincere, la véritable parure du mérite : tel est le privilége heureux qui distingue ce Grand Homme, à qui les hommages ne peuvent être trop prodigués.
On ne sait, après cela, quel nom donner à l'étrange Divinité qui a inspiré à un de nos plus célebres Poëtes le courage d'avancer, dans ses Ecrits, que le mérite de Rousseau se bornoit à deux ou trois Odes, qui ne sont , dit-il, que des déclamations de Rhétorique ; à autant de Pseaumes au dessous des Cantiques d'Esther & d'Athalie, & à quelques Epigrammes dont le fond n'est jamais de lui. […] Nous pourrions nous dispenser d'ajouter au mérite de Rousseau, l'idée des talens qu'il montra pour le Théatre.
Sans doute il mérite cet éloge, mais dans un autre sens, comme on le verra dans ce livre. […] Admettons cependant qu’Homère a été forcé de les choisir ainsi pour se faire mieux entendre du vulgaire, alors si farouche et si sauvage ; cependant le bonheur même de ces comparaisons, leur mérite incomparable, n’indique pas certainement un esprit adouci et humanisé par la philosophie.
— Oui, mon cher monsieur Rohault, je suis le plus malheureux des hommes, ajouta Molière, et je n’ai que ce que je mérite. […] Pensez-vous faire croire, à voir comme tout roule, Que votre seul mérite attire cette foule ? […] Le mérite du Misanthrope est tout entier dans le dialogue et dans l’inimitable versification. […] Je la considérai comme une personne de qui tout le mérite est dans l’innocence, et qui, par cette raison, n’en conservait plus depuis son infidélité. […] Celle-ci a cité des gens de vertu singulière ; celle-là cite des gens d’un très-rare mérite.
La première lettre qu’il reçut de Paris était d’un homme déjà célèbre lui-même par ses voyages, par des fatigues de tout genre et des périls encourus pour la science : M. de Humboldt, sur ce qu’il avait entendu dire de son mérite et de ses malheurs, lui offrait son amitié. […] Lorsque Richelieu déchaîna contre le grand Corneille une tourbe de ces hommes que le mérite d’autrui rend furieux, les Parisiens sifflèrent à outrance les séides du Cardinal despote (dans tout ceci l’expression est bien violente), et applaudirent le poète. […] Lorsqu’il s’agit d’un savant qui s’est distingué dans les sciences physiologiques ou naturelles, la difficulté est grande, mais elle est plus de nature à être vaincue ; il y a toujours moyen pour le talent ingénieux et habile (nous en avons des preuves) de trouver des expressions qui traduisent le genre de mérite du mort et donnent à tous quelque idée de ses travaux. […] Condorcet le premier sentit qu’il était temps d’exposer les vrais titres des hommes éminents dont l’Académie des sciences s’était honorée ; mais, malgré le mérite de quelques-uns de ses éloges, il ne sut point offrir de parfaits modèles de ce genre nouveau.
Précédemment, pour les publications partielles qui s’en étaient faites, on n’y avait puisé que dans tel ou tel esprit, Mme de Genlis dans un sens, Lémontey dans un autre ; or, ce qui caractérise le journal de Dangeau, ce qui en fait le cachet et le mérite, c’est précisément qu’il n’y a pas tel ou tel esprit, ni même d’esprit du tout : il y a ce qu’il voit, enregistré jour par jour, et mis bout à bout. […] Dangeau avait de la littérature ; il rimait en homme du monde, faisait des impromptus au moment où on le croyait tout occupé ailleurs, et gagnait des gageures par des tours de force d’esprit : ce sont là des mérites bien minces de loin, mais qui sont comptés de près ; et lorsque l’on voit dans la notice des éditeurs tous ses talents divers, un peu à la guerre, un peu dans la diplomatie, sa manière de s’acquitter de bien des emplois avec convenance, ses assiduités surtout, ses complaisances bien placées, sa sûreté de commerce et son secret, on n’est pas étonné de sa longue faveur, et on est obligé de convenir qu’il la méritait ou la justifiait. […] Écoutons là-dessus Duclos qui, dans son enfance, fut admis à cette pension de Saint-Lazare parmi les surnuméraires, car on en admettait pour plus d’émulation : Cette pension, très célèbre autrefois, dit-il en ses fragments de mémoires, mérite que j’en parle. […] Chapelain lui procura un jeune homme de mérite, nommé Falaiseau, qui l’accompagna également dans son ambassade près des princes de l’Empire (octobre 1672).
Un jour, dans le Rapport d’un haut dignitaire, savant du premier mérite plus peut-être qu’homme de goût21, il avait été parlé avec un souverain dédain de la classe des journalistes, et comme n’étant, pour la plupart, que « de frivoles élèves d’Aristophane et de Pétrone. » M. […] J’avais écrit sur Tocqueville dans le Moniteur et en le faisant j’avais eu en vue deux choses : témoigner d’abord, dans le journal même du Gouvernement, de mon respect et de mon estime pour un adversaire de haut mérite ; et, en second lieu, à la veille d’une grande solennité littéraire, au moment où l’on allait peut-être essayer de nous donner un faux Tocqueville, j’avais tenu a en présenter un vrai et à prendre, autant que je le pouvais, la mesure de l’homme, avant qu’il passât à l’état de demi-dieu ou de pur génie par le fait de l’apothéose académique. […] Rigault (j’y reviendrai un jour avec l’attention qu’il mérite) n’est pas seulement, par goût et par vocation, un littérateur, c’est un universitaire, une fleur d’université ; mais il en est et il en tient jusqu’au bout des ongles ; il en a le tempérament et les prétentions. […] Mais cette époque si féconde, ce régime tant regretté, quand y aurait-il pris le rang qu’il mérite sans doute et qu’il aurait pu ambitionner ?
Je n’ai pas assez étudié les nombreuses notices consacrées, depuis le XVIIe siècle et durant tout le XVIIIe, aux membres de l’ancienne Académie de Peinture et de Sculpture31, pour prétendre en mesurer le mérite et en indiquer la valeur précise ; mais ce qui me paraît vrai et certain, c’est que dans ce genre de notices dont les artistes, peintres, sculpteurs, graveurs, etc., font les frais, il n’y avait en France aucune de ces suites mémorables comme celle que Fontenelle avait donnée sur la vie et les mœurs des Savants, et qui établissent un genre littéraire nouveau. […] Raoul-Rochette avait beaucoup de mérite réel, beaucoup de savoir et plus solide qu’on ne l’a pensé (quelques légèretés à ses débuts, des fatuités lui avaient fait tort, il avait bien réparé cela depuis). […] On ne pouvait lui demander comme à un Quatremère de Quincy de marquer plus expressément les degrés de mérite de chaque artiste dans son ordre ; il était lui-même trop artiste et trop intéressé dans un art voisin, trop collatéral en quelque sorte pour cela ; il ne pouvait guère juger ses pareils et ses confrères que de côté et comme de profil : il était en train de le faire avec bien de l’esprit et de la grâce. […] Ravaisson, si ingénieux, si original, si profondément philosophe en toutes ses vues ; Berlioz, artiste et penseur élevé, mais solitaire et un peu sombre ; Beulé, l’heureux Beulé, que la Victoire de Phidias a pris dès le début sous son aile, et qui obtient, à heure fixe et comme à point nommé, tout ce qu’il mérite, le choix est déjà fait.
La difficulté et le péril aiguisèrent sa verve ; il fut ironique et piquant dans sa propre cause : il fit un joli feuilleton, le seul qui mérite qu’on s’en souvienne. […] Qu’on allègue tant qu’on le voudra ses convictions : il fut mal avec les meilleurs de son siècle, il se prononça contre les hommes qui avaient le plus de distinction et de mérite en son temps, et s’acquit leur mésestime : c’est toujours une mauvaise marque pour un critique. […] Un jeune homme de mérite, pauvre, cherchait du travail dans les journaux ; il s’adressa à Mercier qui dirigeait alors les Annales patriotiques et littéraires (1795), et dont le langage philanthropique lui avait inspiré confiance : « Je lui communiquai, nous dit le jeune homme, quelques morceaux que j’avais écrits : il parut enchanté de ma manière ; il y trouva tout réuni, force de style, imagination, philosophie. […] L’Almanach des Gourmands, qui a succédé (1862), rapporta à son auteur un si grand nombre de cadeaux, bourriches, pâtés, etc., qu’il lui devint indispensable d’appeler autour de lui un jury dégustateur, composé d’hommes experts, « pour l’aider, disait-il, à se prononcer sur le mérite de ces envois. » Il faut voir comme il en parle.
Le discours ne fut guère qu’un lieu commun, un peu approprié au sujet ; mais la réponse y fut toute propre et mérite d’être retenue. […] Il affecta, dans un discours tout rempli de Racine et des mérites du nouvel académicien, de ne souffler mot de Despréaux, le premier auteur pourtant du choix de M. de Valincour, et qui l’avait demandé au roi. […] Il est vrai qu’ayant moins de cordes à l’âme, il avait à cela moins de peine et moins de mérite. […] Vuillart, qui adressait une prière à Dieu par les mérites de saint Denis, ne manqua pas sans doute de demander pour cette année-là un petit été de grâce en faveur de son ami Despréaux.
D’où il arrive que, lorsqu’il considère l’avènement de cet esprit, il n’y voit point, comme fait le public, la naissance d’un genre particulier, ayant son domaine, mais ayant ses limites, ayant ses mérites, mais ayant ses défauts. […] Il ne montre pas ce qui lui manque ; il ne l’oppose pas à celle des siècles qui précèdent ou qui suivent ; il la met sur le trône, prosterne devant elle le dix-huitième siècle, et pour toute définition nous dit : « Adorez. » Et cependant tout ne mérite pas d’y être adoré. […] Ce n’est pas, comme vous pouvez juger, que je veuille ôter à votre générosité tous les avantages qu’elle mérite : car je sais fort bien que, si vous en aviez besoin, elle vous ferait surmonter toutes ces choses pour ne manquer jamais à aucun devoir ; mais je vous avoue que je ne suis guère plus persuadée de l’amitié que vous avez pour vos amis, que je ne la suis de votre hardiesse. […] Ce manuscrit nous représente Coligny comme très-bien fait, sans avoir pourtant une tournure fort élégante, spirituel et ambitieux, mais d’un mérite au-dessous de son ambition.
Le mérite et l’intérêt de la plupart de ses plaisanteries tiennent à l’existence des préjugés dont il se moque. Tous les ouvrages qui tirent un mérite quelconque des circonstances du moment, ne conservent point une gloire inaltérable. […] La régularité de la versification donne une sorte de plaisir auquel la prose ne peut atteindre ; c’est une sensation physique qui dispose à l’attendrissement ou à l’enthousiasme ; c’est une difficulté vaincue dont les connaisseurs jugent le mérite, et qui cause même aux ignorants une jouissance qu’ils ne peuvent analyser.
Ce fut avec une incroyable passion que la société polie s’appliqua à débrouiller, à perfectionner la langue : tous nos précieux et nos précieuses, marquis, magistrats, prélats, femmes, disputent sur le sens, le mérite, l’orthographe des mots. […] Là est le principe de ces bizarres proscriptions auxquelles Vaugelas eut le mérite de s’opposer : on voulait bannir face, parce qu’on disait face de grand Turc, et poitrine, à cause de poitrine de veau. […] Si l’on parcourt la liste des quarante membres298 qui composèrent la Compagnie à l’origine, on verra aisément que tous ne sont pas des écrivains, et que la primitive Académie est peut-être moins une institution destinée à honorer le mérite littéraire qu’une sélection de gens d’esprit, amateurs de bonne langue et de bons ouvrages.
Comme il sait que c’est la première loi du style, d’être à l’unisson du sujet, rien ne lui inspire plus de dégoût que des idées communes exprimées avec recherche, et parées du vain coloris de la versification : une prose médiocre et naturelle lui paraît préférable à la poésie qui au mérite de l’harmonie ne joint point celui des choses : c’est parce qu’il est sensible aux beautés d’image, qu’il n’en veut que de neuves et de frappantes ; encore leur préfère-t-il les beautés de sentiment, et surtout celles qui ont l’avantage d’exprimer d’une manière noble et touchante des vérités utiles aux hommes. […] Les deux causes d’erreur dont nous avons parlé jusqu’ici, le défaut de sensibilité d’une part, et de l’autre trop peu d’attention à démêler les principes de notre plaisir, sont la source éternelle de la dispute tant de fois renouvelée sur le mérite des anciens. […] Si ces lumières peuvent diminuer nos plaisirs, elles flattent en même temps notre vanité ; on s’applaudit d’être devenu difficile, on croit avoir acquis par là un degré de mérite.
Il sera le premier parmi les historiens français qui aura parlé du Pape Grégoire VII avec le respect et l’admiration qu’il mérite ; car ce pontife en a inspiré, des respects et des admirations, qu’il ne mérite pas, et que nous repoussons, nous ! […] Ainsi, pour nous, le premier mérite de cette histoire, qui en a plusieurs, c’est d’être une histoire humaine, politique et vraie, de cet illustre calomnié, de Grégoire VII, que Macaulay n’aurait pas pu compter parmi ses décapités de l’Histoire, car un pareil homme ne se décapite pas !
Or, si la chronique a son mérite et parfois son charme, elle est toujours inférieure à l’histoire. […] Comme l’histoire ne s’improvise pas et qu’elle appartient à tout le monde, autant que l’eau et la lumière, l’honneur de l’historien est de puiser à des sources pures, et son mérite, de se servir, avec intelligence, de tout ce qu’il y a puisé. C’est le mérite de Moret.
En reportant tout le mérite de la Trêve de Dieu sur le clergé du xie siècle, — qui en a, certes ! […] III Ces contradictions, qui pullulent dans ce livre, diminuent beaucoup le mérite réel et la portée d’un ouvrage excellent en quelques-unes de ses parties. […] Assurément tout cela mérite d’être compté et apprécié par le critique, mais ne constitue pas néanmoins au livre d’Ernest Semichon l’immobile place que les livres vrais en histoire prennent de force dans les travaux d’une époque et ne perdent plus.
Cette publication, en effet, ajoutera-t-elle beaucoup aux mérites reconnus et à la renommée d’Alexis de Tocqueville ? […] C’est là un mérite négatif. […] Les meilleures lettres qu’on ait de lui ne peuvent valoir, par le détail de l’observation (son seul mérite réel), les livres qu’elles rappellent par leur langage raisonnable, tranquille et d’une pâle élégance, quand il est le mieux réussi.
Flourens est le fils de Buffon et s’il mérite de porter le nom de Buffonet que Buffon donnait à son fils ! Puis encore un Examen de la phrénologie, très court, comme il convient, le mépris ayant une expression brève quand il n’est pas silencieux, et le mépris étant tout ce que mérite cette doctrine, qui n’est plus qu’une amusette de salon depuis que Broussais, ce tribun médical, n’est plus là pour la défendre de sa voix âpre. […] IV Encore une fois, voilà le vrai mérite de M.
… Annoncées depuis longtemps par quelques personnes qui l’avaient connu et aimé, ces œuvres disent mieux que l’amitié — et leur voix portera plus loin — les mérites exquis de ce poète qui, s’il eût vécu, aurait été grand. […] Sainte-Beuve, qui, dans sa notice, n’a guères que répété les faits de la publication autobiographique de Guérin, a le mérite d’une glace qui réfléchit une autre glace ; mais comme l’étamage de la seconde n’est pas supérieur à celui de la première, c’en est évidemment une de trop ! […] Ce ne sont pas les grands artistes par la délicatesse et par la beauté pure de l’idéal, bien plus difficile à comprendre… Assurément cet idéal, que Guérin souffrait tant de ne pouvoir saisir comme il le voyait, pour l’emprisonner dans la forme vive et diaphane d’une langue digne de le contenir, cet idéal rayonne, comme un ciel lointain, à travers les paysages qu’il nous a peints ; mais il n’y rayonne que pour ceux qui savent l’y voir ; tandis que pour le plus grand nombre, que la réalité visible attire, ce qui constituera le grand mérite de ces paysages, c’est leur vie, c’est la vérité d’impression de ces aperçus, transposés de la vision plastique dans la vision littéraire… et qui nous effacent presque du coup les paysagistes les plus vantés : Bernardin de Saint-Pierre, Chateaubriand, madame Sand, dont la seule qualité qui n’ait pas bougé dans des œuvres déjà passées est d’être une paysagiste !
Seulement, pourquoi, dans ces premiers volumes dont je dirai tout à l’heure les mérites, cherche-t-on vainement la notice biographique et critique annoncée sur la couverture, et qui, naturellement, devrait se trouver à la tête du premier volume ? […] Taine, en rendant justice aux nombreux et immenses mérites du poète dans La Fontaine, n’aurait-il pas dû insister davantage sur la qualité prédominante du génie qu’on pourrait appeler nonpareil, comme la nonpareille des Florides, et qui le fait unique dans la littérature française, — et, que dis-je ? […] Tel est, selon moi, le plus grand mérite, — la plus grande originalité d’un homme qui en avait plusieurs à son service, quand une seule suffît bien souvent au talent ou même au génie !
Ce fut son mérite, et cela devint intellectuellement son honneur, de montrer, par une suite d’ouvrages, qu’après la rupture d’une collaboration éclatante, il n’était pas, du coup, entièrement brisé, — qu’il était par lui-même, — qu’il existait, — qu’il avait enfin une individualité littéraire, et que, pour la délicatesse des sentiments et l’adoucissement des touches amollies, la plus femme des deux n’était pas la femme. […] Certes, quel que soit le succès du nouveau roman de l’auteur de Mariana et de Mademoiselle de la Seiglière, on ne trouve vraiment dans son œuvre, quand on l’examine sans parti pris, rien qui lui mérite plus d’estime qu’on n’en a jamais eu pour lui. […] Jules Sandeau a trop de mérite et de connaissance de lui-même pour vouloir de cet éloge-là… On a ajouté, en comparant ses personnages à ceux de La Comédie humaine, que les personnages de Balzac marchaient la tête en bas, comme si on les voyait dans un plafond de glace.
La pensée de notre jeune et savant collaborateur consistait à rechercher dans les anciennes épopées françaises, non pas seulement les imaginations plus ou moins gracieuses des conteurs et des poètes, non pas le mérite et l’agrément littéraire de leurs romans, mais les croyances diverses des populations, les récits historiques altérés, les invasions mythologiques qui avaient laissé des traces. […] C’est ce genre de mérite que M.
C’est le sort de toutes les maisons ouvertes par des personnages distingués, de recevoir parmi les gens de mérite, des esprits subalternes, mais obséquieux. […] L’estime de Montausier pour lui persuade qu’il n’était pas sans mérite.
] de l’Académie des Inscriptions & Belles-Lettres, né à Dijon en 1726 ; Littérateur infiniment plus versé dans l’Histoire des anciens Peuples, & dans la connoissance des bons Auteurs Grecs & Latins, que nos Philosophes, qui n’ont cherché à répandre du ridicule sur l’érudition & sur ceux qui la cultivent, que par la manie générale de proscrire tous les genres de mérite qu’ils n’ont pas. […] Larcher mérite d’être compté pour le vingt-cinquieme ; jamais aucun Adorateur de Vénus ne lui a dressé un Monument si laborieux, & qui annonce autant de connoissances.
Dupe, ou, pour dire un mot moins dur, victime du génie de Cooper, Ferry a cru qu’on pouvait reprendre la création achevée d’un immense artiste, et il ne s’est pas aperçu que dans Fenimore Cooper le véritable personnage, le vrai héros des poèmes que nous avons sous les yeux, c’est l’Amérique elle-même, la mer, la plaine, le ciel, la terre, la poussière enfin de ce pays qui n’a pas fait son peuple et qui est émietté par lui… Il n’a pas vu qu’en ôtant Bas-de-Cuir lui-même des romans de Fenimore, — cette figure que Balzac, qui avait le sens de la critique autant que le sens de l’invention, a trop grandie en la comparant à la figure épique de Gurth dans Ivanhoe et qui n’est guères que le reflet du colossal Robinson de Daniel de Foe, — il n’a pas vu qu’il n’y avait plus dans les récits du grand américain qu’une magnifique interprétation de la nature, que l’individualisation, audacieuse et réussie, de tout un hémisphère, mais que là justement étaient le mérite, la profondeur, l’incomparable originalité d’une œuvre qui n’a d’analogue dans aucune littérature. […] C’est la seule chose des deux volumes de Gabriel Ferry qui mérite l’éloge de la Critique, et ses regrets.
Ferme l’oreille à des discours dangereux ; tu mérites sans doute l’hommage qu’on va te rendre, achève de le mériter en le dédaignant ; aujourd’hui la vérité te loue, demain la flatterie t’attend ; de tous côtés l’orgueil te tend des pièges et te poursuit ; l’esclavage en silence te trompe et te flatte ; iras-tu encore permettre à un orateur de te corrompre avec art ? […] Pour suivre notre plan, nous allons tâcher de les faire connaître, indiquant rapidement et le nom des écrivains et le caractère des ouvrages ; c’est une branche de littérature qui mérite son coin dans l’histoire philosophique des hommes.
On a si bien compris le mérite et le démérite que les jugements qu’on porte sont assez souvent l’inverse exactement du jugement correct. […] Il est entendu que le mérite se mesure à la difficulté et à la tentation. […] Il est heureux de se trouver plus de « mérite » que celui qui arrive sans peine au premier rang. Et sans doute il a un « mérite » de persévérance et de volonté, seulement c’est un autre mérite que le mérite intellectuel, et d’ailleurs on ne sait pas si l’autre élève n’en est pas également doué, tant qu’une épreuve décisive ne s’est point offerte. La grande excuse de l’idée que l’effort produit le mérite est dans la misérable condition de l’humanité.
Rarement elle s’attachait, comme Longin dans quelques excellents chapitres, comme Denys d’Halicarnasse dans quelques insipides traités, à faire ressortir le mérite d’un ouvrage ou le caractère d’un écrivain. […] Le mérite de toutes les autres c’est d’exprimer celle-ci. […] Tâchons de joindre ensemble ces deux mérites. […] Pourquoi, remplies de travaux originaux d’un incontestable mérite, ne s’occupent-elles pas davantage des travaux étrangers à la rédaction ? […] À notre grande surprise, nous avons trouvé des disciples de Descartes, hommes d’ailleurs du plus grand mérite, qui croient encore, comme le maître, au machinisme des bêtes.
J’entens par orgueil, une haute opinion de son propre mérite et de sa supériorité sur les autres. J’entens par vanité, l’envie d’occuper les hommes de soi et de ses talens, et la préférence de cette opinion étrangere à la réalité même du mérite. […] L’unité sévere de tems et de lieu, n’ajoûte que ce même mérite aux évenemens qu’on a l’art d’y reduire. […] Ce plaisir mérite bien qu’on passe quelque chose à l’auteur sur les préparations qui lui sont nécessaires. […] Quel dommage que tout ce mérite soit perdu pour le théatre !
L’autre espece de public, qui par son petit nombre à peine en mérite le nom, ne cherche dans les contestations littéraires que l’éclaircissement de la vérité. […] Si un homme pouvoit se surprendre à n’avoir que cette sorte de mérite, il en rougiroit plûtôt que d’en être vain. […] Ainsi il n’est pauvre que de ce qu’il a rejetté ; mais ceux qui sentent le mérite du choix, ne l’en trouvent que plus riche. […] Je veux bien avoir tort où je l’ai, comme je suis bien aise d’être approuvé où je le mérite. […] Boivin, dont la profonde érudition mérite tant d’égards, et dont je respecte encore plus la probité que la science.
Le grand mérite d’un écrivain est de connaître le pouvoir d’un mot mis à sa place. […] Ils n’ont que ce mérite-là : ils ne sont point faits pour le théâtre ; ils ne causent pas assez d’émotion. […] Il me semble même qu’on ne donne pas assez au mérite de l’invention dans la poésie dramatique. […] Lui-même cependant répète en vingt endroits, qu’une mauvaise pièce peut faire pleurer par le mérite de quelques situations. […] Ce récit jouit d’une grande réputation, et la mérite à plusieurs égards ; il expose bien le fait : le fait est étonnant, miraculeux, satisfaisant pour l’assemblée.
Un avancement lent n’était pourtant pas interdit encore au mérite obscur : un officier de fortune pouvait, à force de valeur, et sur la fia de sa vie, aspirer à la place de major ou de lieutenant colonel, et devenir le mentor en titre du colonel étourdi, non moins impatient de conseil qu’incapable de commandement. […] Sans avoir eu beaucoup à se louer de plusieurs de ses compagnons, M. de Dampmartin n’en parle pourtant jamais qu’avec un ton d’urbanité et de modération qui fait honneur à son esprit ; et c’est même le principal mérite de son livre.
L’impression première est que M. de Goncourt n’obtint pas la gloire égale à son mérite. […] Mais le mérite fut de si bien choisir, et le secret du mélange, le brevet de la combinaison appartient à Goncourt.
Le mérite de cet Ouvrage ne se borne point à celui des recherches ; il offre une infinité de vûes utiles aux Administrateurs des Etats. […] On sait que l’auguste Successeur de ce Prince, également jaloux de récompenser le mérite & les services rendus à l’Etat, continue à Mlle d’Eon la pension de douze mille livres, &c….
Celui qui enseigne, comme le dit Quintilien, ne sçauroit communiquer à son disciple le talent de produire et l’art d’inventer, qui font le plus grand mérite des peintres et des orateurs. […] Il semble qu’ils eussent perdu la moitié de leur mérite en repassant les Alpes.
Elle se fait jour à travers ces ruines et ces ténèbres ; et, quand on l’étudie comme elle le mérite, elle apparaît, dans les bornes où elle se renferme, comme le code du bon sens et du bon goût. […] Mais je crois rehausser encore le mérite de ces maîtres respectés, en disant qu’ils n’ont fait que renouer et continuer la tradition d’Aristote. […] En date, la Poétique est le premier monument ; et en mérite, elle est un des plus importants de la critique telle que nous la pratiquons. […] Par quels mérites se relèvera-t-il donc à nos yeux ? Ces mérites, les voici ; et s’ils sont moins élevés que nous ne l’eussions désiré, ils le sont bien assez encore pour justifier toute la gloire du péripatétisme.
Il sera, je crois, toujours raisonnable de penser qu’un écrivain ne mérite pas qu’on le récompense de bien écrire… si l’on ne récompense pas un maçon de bien maçonner. […] Un régime démocratique pouvait seul mépriser ou ignorer de telles évidences ; lui seul aussi pouvait s’arroger de décider du mérite (!) […] Maintenant si la couronne (et sa liste civile) est une aumône… il n’y a plus besoin de nous parler du mérite. Le mérite littéraire n’a rien à voir avec la vie. […] Je sais bien que 5 000 francs et un peu de gloire, sont très tentants et c’est pourquoi d’autant plus il faudrait chasser de notre horizon ces sirènes grossières et par trop ensorcelantes… Enfin il ne faut cesser de répéter au public que ni les prix, ni les honneurs ne sont un gage de mérite.
Depuis lors, le fils du général Friant, dans une pensée de piété domestique, a publié une Vie militaire fort exacte de son glorieux père, auprès duquel il a servi lui-même durant des années, et il nous est maintenant permis de nous faire une idée précise du genre de mérite et d’héroïsme de ce modèle des divisionnaires. […] Championnet demanda au général en chef Jourdan le nom de cet officier précieux et désira l’avoir avec lui pour commander son avant-garde ; et quand peu de temps après Friant passa général, il lui apprit sa nomination en ces termes tout empreints de la camaraderie républicaine : Le représentant du peuple Gillet vient de rendre justice à ton mérite ; il t’a nommé général de brigade. […] Ceux qui ont servi sous le général Friant, questionnés sur ses mérites et qualités, nous ont donné de lui une idée que le colonel Michel, un d’entre eux, a résumée heureusement dans ce vivant portrait : Le général Friant, par son bon naturel, son excellent cœur, ses sentiments généreux, l’humanité qui le dominait, aimait ses soldats, les soignait comme ses propres enfants, vivant de leur vie, se mêlant avec eux, tout en conservant sa dignité ; il en était chéri et estimé au point que pas un d’eux n’eût balancé à sacrifier sa vie pour sauver celui qu’ils appelaient : Notre bon, notre brave père. — (Tombant mortellement blessé près de lui à la Moskowa, un voltigeur lui disait : « Mon général, voilà quatorze ans que je suis sous vos ordres ; votre main, et je meurs content
Le biographe fait tout d’abord à son héros un mérite de ne s’être point anobli, de ne s’être point fait appeler M. […] Sabbatier fait ressortir, et avec raison, le mérite de ce choix réfléchi chez un jeune homme qui n’avait pas, comme les autres membres de ce groupe, une carrière déjà faite, mais qui hasardait ainsi tout son avenir. […] Sabbatier parle de Ginguené en de très-bons termes que nous ne contesterons pas ; Ginguené était un littérateur de grand mérite, plus instruit que La Harpe, bonne plume, bon critique, mais non point d’un goût exquis, comme M.