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2148. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Elle n’était pas extérieure, simplement voulue et officielle ; elle venait du fond même. […] Quand vint la fin, il repassa sa vie et se trouva on ne sait quel tort envers Gay ; ce tort était bien léger sans doute, puisque Gay ne le soupçonnait pas. Addison le pria de venir auprès de son lit, et lui demanda pardon. […] De riches fantaisies orientales viennent s’y dérouler sans petillement d’étincelles comme dans Voltaire, mais sous une sereine et abondante lumière qui fait ondoyer les plis réguliers de leur pourpre et de leur or. […] Les sentiments grands et simples viennent d’eux-mêmes se lier à ces nobles images, et leur harmonie mesurée compose un spectacle unique, digne de ravir le cœur d’un honnête homme par sa gravité et par sa douceur.

2149. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

L’individu est tout, la race n’est rien ; la mémoire lui manque ; elle ne sait ni d’où elle vient ni où elle va ; elle n’a pas d’hier, et, n’ayant point d’hier, elle ne sait pas si elle aura un demain. […] Ainsi vous serez, quel que soit votre sujet, si après une chose vous en faites venir une autre, avec le mouvement facile, et tour à tour paisible ou précipité de la nature. […] Quand on a été jugé soi-même, souvent par le premier venu, qui ne connaissait ni les personnages, ni les événements, ni les questions sur lesquelles il prononçait en maître, on ressent autant de honte que de dégoût à devenir, un juge pareil. […] C’est une passion que le regret de la patrie, et qui devient violente quand la distance, la nouveauté des lieux, des craintes fondées sur la possibilité du retour viennent l’irriter encore. […] Tout ce qui était venu des armées du Rhin montrait peu de penchant pour l’expédition d’Égypte ; au contraire les officiers originaires de l’armée d’Italie, quoique fort tristes de se voir si loin de la France, étaient favorables à cette expédition, parce qu’elle était l’œuvre de leur général en chef.

2150. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

C’est des nuages que viennent les teintes sans nombre, les colorations infinies du ciel : sans le prisme de la nuée, que serait un coucher un lever de soleil ? […] Ce qui est certain, c’est que, pour l’écrivain par exemple, telle ou telle époque de sa vie vient se suspendre tout entière à tel ou tel ouvrage qu’il composait pendant cette époque. […] Toute notre jeunesse vient souvent se grouper autour d’une image de femme, sans cesse présente à nos événements d’alors. […] Si donc il vient à le transporter en pays inconnu, à lui parler uniquement de ce qu’il ignore, la besogne se simplifie : le lecteur ne saura, ne verra, n’entendra que ce qui lui sera dit et montré ; n’associera que les idées voulues par l’écrivain : rien ne viendra à rencontre des effets ménagés ; il sera en quelque sorte au pouvoir de l’écrivain. […] Elle se leva au milieu de la nuit, comme une blanche vestale qui vient pleurer sur le cercueil d’une compagne.

2151. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

de Shakespeare ne vint qu’après un essai d’opéra au théâtre de la cour. […] Son talent, nous venons d’en parler et nous en parlerons encore. […] Je doute fort qu’aucun vieillard de ce temps-ci se baise la main avec cet enthousiasme pour avoir touché au vitchoura de Gœthe, — de Gœthe à qui je viens, moi, de retourner, pour voir ce qu’il y a dessous, le grand et solennel manteau dans lequel on le drape, et, ma foi ! […] Les mots suprêmes viennent aux lèvres, les larmes déjà sont aux yeux. […] annonça la venue au monde sublunaire en 1749 de notre âge fortuné.

2152. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Sa mère l’en abreuve, alors qu’il vient au jour... […] Augier lui lit une comédie en vers qu’il vient d’écrire, la Ciguë. […] Il semble que Fromentin soit venu en Afrique chercher la lumière moins pour la peindre que pour la comprendre, en obtenir l’intelligence et en créer l’idée. […] me dit-elle ; il fallait en venir là. […] Il y a là un égoïsme de la génération qui s’en va, et cet égoïsme appelle nécessairement un égoïsme de la génération qui vient.

2153. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre II. Les sensations totales de la vue, de l’odorat, du goût, du toucher et leurs éléments » pp. 189-236

Au commencement de la gamme est le rouge ; viennent ensuite l’orangé et les divers jaunes, puis le vert, les divers bleus, l’indigo, enfin le violet77, et chacun de ces tons passe par des intermédiaires dans le ton précédent et dans le ton suivant. — Voilà une infinité de sensations distinctes et reliées par des intermédiaires. […] Ce qui arrive en plusieurs cas ; d’abord lorsque tous les rayons du spectre, rassemblés de nouveau par un autre prisme, viennent frapper le même point de la rétine et excitent ainsi le maximum, le minimum et tous les degrés de chaque sensation élémentaire ; ensuite lorsque, deux rayons ayant été choisis dans le spectre, l’inégalité des trois sensations élémentaires excitées par le premier est compensée par l’inégalité en sens contraire des trois sensations élémentaires excitées par le second. […] Toutes conclusions que l’expérience vient confirmer. […] Les différents degrés du noir ou du manque de sensation viennent donc compliquer les couleurs déjà construites. […] La sensation d’odeur proprement dite y est compliquée d’une autre qui cesse, s’accroît ou se renverse selon l’état de l’estomac ; la même odeur, celle d’un plat de viande fumante, est agréable pendant la faim et désagréable pendant une indigestion ; probablement, dans ce cas, il y a d’autres nerfs profonds du canal alimentaire qui entrent aussi en action ; la sensation totale est composée d’une sensation du nerf olfactif et de plusieurs sensations adjointes. — On peut enfin diviser en deux les odeurs fraîches ou suffocantes, c’est-à-dire, d’un côté, celles des sels volatils, de l’eau de Cologne, du goudron, du tan, et, de l’autre côté, celles du renfermé, celle d’une pâtisserie, d’une manufacture de coton, d’un magasin de laine ; visiblement ici, à la sensation d’odeur proprement dite s’ajoute une sensation de bien-être et de malaise qui vient des voies respiratoires et qui a pour canaux des nerfs de contact et de douleur. — Je pense aussi que dans plusieurs cas, par exemple lorsqu’on respire de l’alcool, une faible sensation de chaleur vient compliquer la sensation d’odeur proprement dite. — Restent les pures sensations d’odeur, agréables ou désagréables par elles-mêmes, celles de la violette et de l’assa fœtida par exemple ; il y en a un nombre infini desquelles on ne peut rien dire, sinon qu’elles sont agréables ou désagréables ; par elles-mêmes, elles résistent à l’analyse, et pour les désigner nous sommes obligés, de nommer le corps qui les produit.

2154. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre troisième. La connaissance de l’esprit — Chapitre premier. La connaissance de l’esprit » pp. 199-245

Une autre illusion métaphysique vient compléter son être et achever son isolement. […] Avant 1848, elle avait des entretiens avec Louis-Philippe et lui faisait des rapports sur le Casino, la Chaumière, le Ranelagh et les hôpitaux. « J’étais, dit-elle, commissaire rapporteur de Sa Majesté, et le roi me donnait de grandes sommes. » Plus tard, quand elle fut dans son logement de la rue Poissonnière, l’Empereur vint l’écouter derrière une cloison, et la fit enfermer. […] Ainsi se sont formés le démon de Socrate et le génie familier du Tasse. — D’ordinaire, au bout d’un temps, l’hallucination sensorielle vient compléter l’hallucination psychique. […] Si alors un fragment étranger ou une série étrangère vient s’intercaler dans la place vide, le patient se méprendra sur lui-même. — Nous venons de voir les conditions principales de cette transposition. […] Il suffit que les trois images viennent chevaucher l’une sur l’autre, pour que les deux refoulements s’opèrent dans le sens indiqué ; le mécanisme qui les situe joue pour les aligner aussitôt que la loi d’évocation mutuelle les éveille ensemble.

2155. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre premier. Les caractères généraux et les idées générales. » pp. 249-295

« Mais bientôt l’esprit, grandissant, commença à généraliser, et nim en vint à signifier toute chose mangeable ; il y ajoutait, selon l’occasion, tantôt le mot bon, tantôt le mot mauvais, qu’il avait appris en même temps, et disait ainsi : nim bon et nim mauvais. […] Les physiciens et les chimistes viennent avec leurs balances, leurs thermomètres, leurs machines électriques, leurs instruments d’optique, leurs cornues, leurs réactifs, et, entre leurs mains, les cinq ou six mailles qui composaient mon idée se multiplient jusqu’à former un vaste réseau. […] Telles que nous les fournissait l’expérience vulgaire, elles étaient le plus souvent trop larges ou trop étroites ; l’expérience scientifique vient les resserrer ou les étendre, pour ajuster leurs dimensions corrigées aux dimensions réelles des objets […] La planète décrirait une ellipse parfaite, si la proximité variable des autres corps planétaires ne venait pas altérer la régularité de sa courbe. […] C’est ainsi que le mathématicien prépare d’avance des moules que le physicien viendra plus tard remplir. — Trois conditions sont requises pour que ces moules aient chance de convenir aux choses.

2156. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre (2e partie) » pp. 5-80

Nous n’avons plus de Bacchus, et d’ailleurs notre petite symposie le rejette expressément ; mais nous avons une Minerve bien meilleure que celle des anciens ; invitons-la à prendre le thé avec nous : elle est affable et n’aime pas le bruit ; j’espère qu’elle viendra. […] « Lorsque mon cœur oppressé me demande du repos, la lecture vient à mon secours. […] Le vieux Timée, de Locres, ne disait-il pas déjà, sûrement d’après son maître Pythagore, que nos vices viennent bien moins de nous-mêmes que de nos pères et des éléments qui nous constituent ? […] Il sait combien la tête du requin ou du cachalot lui fournira de barriques d’huile ; son épingle déliée pique sur le carton des musées l’élégant papillon qu’il a saisi au vol sur le sommet du mont Blanc ou du Chimboraço ; il empaille le crocodile, il embaume le colibri ; à son ordre le serpent à sonnettes vient mourir dans la liqueur conservatrice qui doit le montrer intact aux yeux d’une longue suite d’observateurs. […] C’est au milieu de cette solitude et de cette espèce de vide formé autour de lui qu’il vit seul avec sa femelle et ses petits, qui lui font connaître la voix de l’homme ; sans eux il n’en connaîtrait que les gémissements… Un signal lugubre est donné ; un ministre abject de la justice vient frapper à sa porte et l’avertir qu’on a besoin de lui.

2157. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

C’était en moi un mélange extraordinaire, jusqu’alors inconnu, de plaisir et de douleur, lorsque je venais à penser que dans un moment cet homme admirable allait nous quitter pour toujours ; on nous voyait tous tantôt sourire, tantôt fondre en larmes. […] Socrate part de là pour exposer la partie fondamentale de son système philosophique, tout spiritualiste et tout divin, système qui a scandalisé de tout temps les partisans de l’axiome matérialiste : Tout vient à l’esprit par les sens. […] Tout le temps que j’ai été ici, il m’est venu voir souvent et il s’est entretenu avec moi ; c’était le meilleur des hommes, et maintenant comme il me pleure de bon cœur ! […] Il disait aussi : Je ne suis pas venu abolir l’ancienne loi, mais l’accomplir. […] Les grandes pensées viennent des grandes âmes ; celle de J.

2158. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

Il serait, je le sais, peu conforme à la vérité d’en dire autant de celui de l’Académie Nationale de Musique, et cependant, il vient d’accueillir favorablement Sigurd, fait qui mérite bien une mention. […] Il est venu jeter le trouble dans le cœur d’une jeune fille, et parce que celle-ci, avant de s’abandonner, veut savoir à qui elle se donne, il lui tourne le dos pour retourner jouir tranquillement de sa divinité ! […] d’où viens-tu ?  […] VIENNE 29 Mai Opéra : Lohengrin (M.  […] VIENNE 5 Juin Opéra : Le Rheingold (M. 

2159. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Et, en effet, Edgar Poe appartient à la famille de ces esprits chez qui les sensations, les manières de voir et presque la manière de souffrir, tout, enfin, est marqué au coin de cette originalité effrayante qui ne vient ni de la hauteur, ni de la profondeur, ni de l’expression inattendue du génie, mais qui semble venir plutôt d’une différence spécifique dans la nature même de la pensée. […] « Il y a si longtemps qu’on ne vous a vu, — dit-il à Poe ; — et comment pouvais-je deviner que vous vous mettriez en route par un froid pareil, pour venir me rendre visite ? […] Ainsi, dans Hoffmann, une corde de harpe qui casse, un reflet vert dans les yeux bleus d’une jeune fille, mille détails, sans raison d’être, comme ceux que nous venons d’analyser, nous troublent, nous pénètrent, et nous captivent encore longtemps après nous avoir pénétré. […] Le Scarabée d’or, le Double assassinat dans la rue Morgue, la Lettre volée, dont Balzac, par parenthèse, aurait fait un bien autre chef-d’œuvre, si l’idée lui en était venue, sont d’audacieuses applications du calcul des probabilités inconnues jusqu’ici en littérature. […] Elle vient d’une grande chose : de la foi qui lui montre l’enfer à l’œil nud et de l’indignité sentie, qui lui dit qu’il y peut tomber, tandis que la peur d’Edgar Poe est la peur de l’enfant ou du lâche d’esprit, fasciné par ce que la mort, qui garde le secret de l’autre monde, quand la religion ne nous le dit pas, a d’inconnu, de ténébreux, de froid.

2160. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

L’idée de communiquer ce rêve et l’émotion qui en résulte à ses semblables, ne vient qu’en seconde ligne. […] Wagner sur la portée sociale de l’Art. — D’où viennent les erreurs de Tolstoï. […] Thomas, Halévy, Liszt, aux noms desquels bien d’autres sont venus s’ajouter depuis : César Franck, Bizet, Joh.  […] Ce sont des acheminements ; un autre viendra qui parachèvera. […] Gœthe disait que tel artiste venu dix ans plus tôt serait autre que s’il était venu dix ans plus tard.

2161. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Si l’art est l’homme ajouté à la nature, on est, quand on prétend faire à la nature un enfant, mal venu à se reconnaître impuissant. […] Quand on parle du mouvement symboliste, le nom de Mallarmé vient d’abord à l’esprit. […] On peut d’ailleurs sourire un peu du mot aise : d’un malaise à réaliser vient cette aise à songer. […] Il se soucia moins, dans ses études techniques, de déterminer le Poète à venir que de dégager, Idée platonicienne, le Poète éternel. […] Les remarques auxquelles, dans une page de voyage, Victor Hugo s’amuse sur la forme des lettres, viennent d’une source analogue.

2162. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

Le langage métaphorique est incompatible avec une pensée nette et sûre d’elle-même ; car alors, la pensée suscitant un signe pour s’exprimer d’une manière adéquate, le signe qui répond à son appel ne vient pas sans des idées différentes qui se confondent avec elle et troublent sa limpidité par un mélange hétérogène [ch. […] D’où peut venir un pareil privilège ? […] L’expérimentation peut ici venir en aide à l’observation. […] La comparaison et l’examen, la recherche du probable et du vrai, viendront à leur heure, si les germes déposés dans l’esprit par ses premiers efforts ne sont pas ensuite étouffés par la paresse ou la peur. […] Du latin up-up-a est venu le français huppe, (oiseau).

2163. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

La Révolution vint déranger ses plans de retraite profonde et retarder l’heure désirée. […] On m’a dit que vous veniez d’être nommé membre du Sénat conservateur dans notre nouvelle Constitution. […] A cela je réponds que Celui qui nourrit les oiseaux saura bien aussi venir à mon aide. » Il refuse tout désormais, il échappe à tous les honneurs qui voudraient lui pleuvoir sur la tête ; il ne veut pas plus du prix décennal que de tout le reste, bien décidé, dit-il, à n’être rien, à ne recevoir rien, à ne s’embarrasser de rien, que d’achever paisiblement sa carrière « dans la douce indépendance de son âme et dans le plaisir de commercer jusqu’à la fin avec les chastes Muses. » Un tel sentiment pleinement embrassé et franchement pratiqué est certes des plus beaux ; mais qu’on n’aille pas dire avec M. de Sèze, son successeur à l’Académie, que Ducis par ses refus réitérés s’exposait « à des périls de tout genre. » M. de Sèze qui s’y connaissait pourtant, en fait de périls, exagère ici fort gratuitement et par esprit de parti. […] Ducis, qui n’avait pas pu venir dîner, est arrivé… Il n’apercevait d’abord que moi, et il s’avançait vers moi pour m’embrasser, mais reconnaissant successivement M.  […] Jouy est venu déjeuner à la maison… Nous sommes allés à peu près à midi chez M. 

2164. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Appendice. »

L’indignation leur vient ensuite avec la réflexion ; car il leur faut beaucoup de temps avant de comprendre toute la perfidie des Anciens (voyez le commencement de mon chapitre iv). […] Il m’offrit de me conduire lui-même au séminaire d’Issy ; et en effet, un mercredi d’été, il vint me prendre, chez ma mère rue Montparnasse, en compagnie de son frère (actuellement professeur à l’université de Liège), et nous nous acheminâmes à travers la plaine de Montrouge jusqu’à Issy. […] Pour vous, mon cher Monsieur, vous avez un avantage de plus, vous êtes venu habiter parmi nous ; vous avez été de Paris ; vous êtes aujourd’hui de Berlin : demain, je l’espère bien, vous nous reviendrez et vous serez de Paris. […] Sans doute, un peu plus tard et quand on en vint au théâtre, il y eut un effort direct d’importation de Shakspeare. […] Mais encore, dans leur pensée, cette importation de Shakspeare ne venait là que comme machine de guerre et pour battre en brèche la muraille classique.

2165. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

C’est sans doute d’une pareille chevelure dorée, ensoleillée et lumineuse qu’était coiffé le fils de la muse Calliope, quand cet excellent musicien déménageait les arbres tout venus par un procédé élégant et économique dont il n’a malheureusement pas légué le secret à nos jardiniers actuels. […] Et la plus tendre et consolante justice ne lui est pas refusée, car, chassé de la vie et forcé de se réfugier hors de la vie, il goûte la mort la plus délicieuse dans les bras de la vierge qu’il aime, et qui, non attendue, vient le surprendre et s’enfermer avec lui dans l’air de sa chambre close, qu’un subtil poison a rendu enivrant et meurtrier. […] Cette prédilection me vient-elle de ce que, moi aussi, j’éprouve, plus qu’au milieu d’une carrière si aventureuse et parfois douloureuse, comme un regain d’adolescence dans cet été comme de la Saint-Martin où j’entre quelque peu fourbu, mais si plein de bonne volonté ! […] Georges Courteline Du temps que j’étais écolier, cancre invétéré de rhétorique en ce petit collège de Meaux que déjà le poète Jacques Madeleine émerveillait de ses sonnets, si on était venu me dire qu’un jour je présenterais au public un livre de Catulle Mendès, j’eusse haussé les épaules et répondu « vous me faites rire », sans l’ombre d’une hésitation. […] C’était cent fois mon avis ; et tout Paris, déjà, le partageait avec moi, saluant en ce dernier venu le triomphe du premier arrivé.

2166. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Mais l’idiome se forme par les tentatives de quelques clercs pour communiquer à la foule dans la langue vulgaire ce qu’ils ont appris d’idées générales dans la langue savante, et par cet instinct de l’art à venir qui se révèle dans la vaine rhétorique et les grossiers latinismes de quelques écrivains. […] C’est cette raison par laquelle nous ressemblons le plus aux autres hommes, gouvernant en maîtresse souveraine l’imagination et les sens, par lesquels nous en différons le plus, et d’où nous viennent ces singularités qui sont si antipathiques à l’esprit français. […] C’est ce spectacle que nous offrent tous nos chefs-d’œuvre ; il ne s’y voit autre chose qu’une raison supérieure rendue assez forte, par l’amour de la vérité, pour dominer l’imagination et les sens, et pour tirer d’admirables secours d’où lui viennent d’ordinaire les plus grands dangers. […] Il y règne une certaine emphase naturelle, qui vient moins de la corruption du goût que d’une manière de voir les choses, pareille à ce qu’on dit de certains animaux, lesquels n’obéissent si aisément à l’homme que parce qu’ils le voient plus grand qu’il n’est. […] A qui n’en vient-il pas dans l’esprit par cette porte de la mémoire, toujours ouverte à tout ce qui est imitation et mode ?

2167. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

Né à Chinon en 1 483, d’un père qui y tenait une hôtellerie après avoir fait ses premières études dans l’abbaye des Bénédictins de Seuillé ou plutôt, comme il le dit, après avoir passé quelques années de sa jeunesse, comme les petits enfants du pays « à boire manger et dormir, à manger, dormir et boire, à dormir, boire et manger », il était venu faire son noviciat au couvent de Fontenay-le-Comte. […] Ce qui le prouve, c’est la vivacité de son désappointement quand Rabelais tourna le dos à la Réforme, et en vint, comme dit Henri Estienne, jusqu’à jeter des pierres dans le jardin des réformés. […] Le hardi épicurien s’abritait prudemment sous le manteau d’un cardinal mais les zélés du parlement et de la Sorbonne pouvaient venir encore l’y inquiéter, et lui aliéner par des dénonciations la faveur du prélat. […] « Je suys, dit-il au prologue du livre IV, moyennant un peu de pentagruelisme, sain et desgourt (dégourdi), prest à boire, si voulez. » Et au prologue du premier livre : « A la composition de ce livre seigneurial, je ne perdis ni employai onc ni plus aultre temps que celui qui estoit establi à prendre ma réfection corporelle, sçavoir, en buvant et mangeant. » Il n’écrivait pas seulement après boire, mais pendant boire ; et, dans sa réfection corporelle, boire vient avant manger. […] Elle est adressée à Pierre Amy, au sujet des vexations dont tous venaient d’être l’objet.

2168. (1899) Esthétique de la langue française « La métaphore  »

Ayant à nommer l’oiseau appelé roitelet, l’idée de petit roi est celle qui vient à l’esprit de l’homme : grec, il dit [mot en caractères grecs] ; latin, regaliolus 139 ; allemand, zaunkœnig (roi des haies)140 ; anglais, kinglet ; suédois, kungsfagel (l’oiseau roi) ; espagnol, reyezuelo ; italien, reattino ; hollandais, koningje ; flamand, kuningsken ; polonais, krolik 141. […] Son nom français vient du vieux mot bele, du latin bella ; la belette, cela veut dire la petite belle . […] De l’ancien français bele, cloche, mot venu lui-même du bas-allemand par la forme latine bella. […] Venu lui-même du verbe qui disait le chant du coq : Cucurrire solet Gallus, Gallina gracillat. […] Et du même béryl vient aussi bésicles, anciennement bericles (Beryenlus) !

2169. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

Dans la seconde, la seule qui soit venue jusqu’à nous, Prométhée est puni par les dieux, jaloux des services qu’il a rendus à l’espèce humaine. […] On démêle en même temps les motifs secrets qui, dans chaque individu, modifient son dévouement ; les craintes, les soupçons, les calculs particuliers, qui viennent croiser l’impulsion universelle. […] Les fureurs de ce prince ne viennent que des cruautés de sa maîtresse. […] Il n’y a personne, je le pense, qui, laissant errer ses regards sur un horizon sans bornes, ou se promenant sur les rives de la mer que viennent battre les vagues, ou levant les yeux vers le firmament parsemé d’étoiles, n’ait éprouvé une sorte d’émotion qu’il lui était impossible d’analyser ou de définir. […] Mais lorsque l’amour, au contraire, est, comme dans la poésie allemande, un rayon de la lumière divine qui vient échauffer et purifier le cœur, il a tout à la fois quelque chose de plus calme et de plus fort : dès qu’il paraît, on sent qu’il domine tout ce qui l’entoure.

2170. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Quand, au début de sa vie littéraire, Sainte-Beuve, grand poète à la manière moderne, écrivait les Rayons jaunes dans cette inspiration singulière, morbide et profonde, qui produisit les Poésies de Joseph Delorme, aurait-on pu prévoir qu’un jour viendrait où le même homme publierait le livre calme, lumineux et pur, sur Virgile, que nous devons à cette plume infatigablement féconde ? […] Venu après Villemain, et supérieur dans son Étude sur Virgile à ce qu’est Villemain dans son Étude sur Pindare, Sainte-Beuve retourna bientôt à la Critique, pour laquelle il n’était pas fait, car il faut à cette Critique les facultés qu’il n’a pas, la solidité, la profondeur, l’impartialité et la justice. […] Composée surtout de notes ajoutées à des notes, son Œuvre critique me fait l’effet d’un interminable obélisque de notes sur notules et de notules, sur notes, sur la pointe duquel il y aura toujours de la place pour d’autres notulettes qui viendront… Sûr de rien et curieux de tout, comment voulez-vous qu’un homme puisse être jamais un critique, — un juge intellectuel de ce qui fait la beauté ou la laideur des œuvres humaines ? […] Oui, des lettres dans lesquelles une grande célébrité, par exemple, dira comme la première venue : « Je prie Mme Feray de m’apporter mes bottines », mais c’est palpitant et c’est exquis ! […] Troubat, qui vend le nom de Sainte-Beuve sous toutes les formes parce qu’il ne peut pas vendre son cadavre (cela viendra peut-être sous la prochaine Commune !)

2171. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Ce fut même ce prince, sujet de la Porte, qui vint rassurer, ou épouvanter Constantinople, et montrer à Sélim, comme un dernier secours, les seuls vaisseaux ottomans échappés à la ruine commune. […] … « Il a levé la tête, ce puissant qui te porte si grande haine ; il a tenu conseil pour notre ruine, et contre nous ont machiné ceux qui assistaient à ce conseil : Venez, ont-ils dit ; et, sur la mer houleuse, faisons un grand lac de leur sang ; détruisons cette race et le nom du Christ avec elle ; et, partageant leurs dépouilles, rassasions nos yeux de leur mort. « De l’Asie et de la merveilleuse Égypte sont venus des Arabes, des Africains légers, et ceux que la Grèce leur a mal associés, guerriers à la fière encolure, d’une grande force et en nombre infini. […] Puissent quelques parcelles en venir jusqu’à moi, enlever mon âme hors d’elle-même, et la confondre avec toi, céleste amour ! […] La science partout éveillait l’émulation, et pouvait parfois tromperie talent sur le moment venu d’oser en poésie, et sur l’audace permise à notre langue.

2172. (1927) Des romantiques à nous

La belle France, la belle Grèce qui viennent au-devant l’une de l’autre ! […] Mais, sans être un savant en folklorisme, je sais fort bien d’où ils viennent. […] Le moment vint où ceux et celles qui s’en délectaient encore n’osaient plus l’avouer. […] On n’a guère la curiosité de les y chercher, tant ce qu’il crée de son fond est de même venue, de même famille. […] C’est la vingtième fois qu’ils viennent à la même occasion.

2173. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Désormais, jusqu’à l’avènement d’une nouvelle religion, si elle doit venir, les sentiments moraux n’existent plus au cœur de l’homme sous forme religieuse. […] Les essais de construction morale et religieuse dont je parle viendront plus tard, et peut-être trop tard ; ils n’existent pas, ou sont très faibles, dans les penseurs à qui ce volume est consacré. […] Le mot est gros, mais il vient aux lèvres à chaque instant, quoi qu’on fasse. […] Il est bien temps qu’un esprit nouveau vienne, qui n’a point encore soufflé. […] Cent fois le : « Comment en suis-je venu là ? 

2174. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

La froideur relative de ses livres vient un peu de là. […] Les doutes viennent plus tard. […] Un peu d’indulgence vient plus tard, quelquefois. […] Il disait : « Quand je soutenais cela, j’étais dans la thèse ; maintenant je suis dans l’antithèse et la synthèse viendra plus tard. […] Non seulement les hommes, pour en venir à eux, doivent être égaux, mais ils le sont.

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