Tous ensemble, en quelque degré de sa confiance qu’il vous ait reçus, environnez ce tombeau ; versez des larmes avec des prières ; et, admirant dans un si grand prince une amitié si commode et un commerce si doux, conservez le souvenir d’un héros dont la bonté avait égalé le courage.
Ce sont là les beaux jours de l’empire germanique, dont de grands écrivains invoquent encore le souvenir avec enthousiasme.
Souvenez-vous seulement que toutes ces figures, tous ces groupes insignifians prouvent évidemment que la poétique des ruines est encore à faire.
Le prince de Conti, qui tenait les états de Languedoc à Béziers, se souvint de Molière, qu’il avait vu au collège ; il lui donna une protection distinguée.
À ces œuvres principales, il faudrait ajouter ces innombrables pièces auxquelles on a donné le nom commun de Théâtre du Boulevard, où l’extravagance le dispute souvent à l’horreur, et dont les scènes hideuses attiraient chaque soir une foule avide et palpitante : Trente ans ou la vie d’un joueur, Richard d’Arlington, Térésa, Dix ans de la vie d’une femme, Victorine, La Cure et l’Archevêché, La Tour de Nesle, La Nonne sanglante, La Vénitienne, Ango, Les Sept Infants de Lara, La Dame de Saint-Tropez, Les Nuits de la Seine 161… Combien d’autres dont la trace est restée dans les mémoires comme le souvenir d’un cauchemar, tristes débauches du talent, honteuses orgies de l’art dégradé, dont on pourrait dire ce que disait Tertullien des spectacles romains : « Tragediæ scelerum et libidinum actrices, cruentæ et lascivæ. » (De spect.) […] On se souvient du roman de M. […] Qui ne se souvient de ces morts sinistres auxquelles chaque matin les journaux donnaient une publicité contagieuse ? […] Alors, s’il m’en souvient, il y avait dans les esprits d’autres préoccupations que celles de la richesse et du bien-vivre.
Ce seul souvenir est pour eux une seconde jeunesse ; enfin tout avertit les poëtes de se tourner du côté de l’amour qui, dès qu’il est bien peint, leur est un garant presque assuré de tous les suffrages. […] Le poëte se tire ordinairement d’affaire, en faisant faire à un acteur par un autre, tous les récits dont il a besoin, tantôt avec la précaution d’instruire un personnage qui n’est pas au fait, tantôt en lui rappellant ce qu’il peut avoir oublié, quelquefois même en lui disant qu’il s’en souvient, comme si c’étoit une raison de le lui redire. […] L’honneur, la vérité, le sang des malheureux, rien ne lui a été sacré auprès de son ambition ; et tremblant encore au souvenir du dieu qu’il blasphême, il voudroit, en renversant son temple, et à force d’attentats, se délivrer, s’il étoit possible, de ses remords.
Il n’a conservé dans sa mémoire que des souvenirs agréables, et, à force de sagesse, il est parvenu à se mettre à l’abri des sensations pénibles. […] Ou encore, aux maximes qu’il extrayait des livres, aux faits que lui procuraient les savants, il ajoutait ses propres observations sur le monde, sur la vie, sur les hommes : observations singulièrement lucides, pénétrantes, aiguës, dirigées par un parti pris de malveillance, mais avec une exceptionnelle perspicacité, et exprimées sur un ton d’humour âpre qui les incruste dans le souvenir, en un style qui n’a rien de commun avec le jargon abstrait qu’affectionnent les philosophes. […] Voyez plutôt le roman anglais, depuis les romans de Richardson jusqu’à ceux de George Eliot, et repassez dans votre souvenir le répertoire du Théâtre-Français depuis Polyeucte, qui est un cas de conscience, jusqu’à Daniel Rochat, qui est un autre cas de conscience. […] Car elles y ont pénétré assez profondément et les moyens de contrôle ne manquent pas : on peut s’en assurer dans les salons où l’on aime à causer morale ou métaphysique en prenant le thé ; on peut s’en assurer en consultant ses propres souvenirs, en cherchant dans sa mémoire les livres qu’on a le plus lus à vingt ans, ce qu’on demandait à ces livres, l’impression qu’ils vous ont laissée, la hâte, la violence et l’irrévérence avec lesquelles on s’est un jour, après une de ces lectures, délivré du lest de ses croyances d’enfant ; on peut surtout s’en assurer, hélas !
Prenez-le pour ce qu’il vaut, c’est-à-dire pour fort peu de chose, mais attachez-y, je vous prie, le souvenir de mes sentiments bien dévoués. » « E.
pour tout souvenir de leur existence, il ne reste que ce monceau de pierres écroulées sur la colline, que les plantes sauvages, les ronces et les orties recouvrent indifféremment de leur feuillage !
C’était la plus belle et la plus pittoresque population de tout âge et de tout sexe qu’il fût possible d’imaginer pour un poète et de reproduire pour un peintre : la taille élevée, les membres dispos, les fières attitudes, les costumes sauvages des hommes ; les profils purs, les yeux d’un bleu noir, les cheveux dorés, les épingles d’argent semblables à des poignards, les corsets pourpres, les tuniques lourdes, les sandales nouées sur les jambes nues des femmes ; les groupes formés naturellement, çà et là, le long des murs, par les captifs, les épouses ou les fiancées demi libres, s’entretenant, les joues rouges de passion ou pâles de pitié, avec leurs maris ou leurs amants, à travers les gros grillages de fer des lucarnes des cachots, ouvrant sur les cours ; les hommes assis et pensifs sur la poussière, le coude sur leurs genoux, la tête dans leur main ; les jeunes filles se tressant mutuellement leurs cheveux de bronze avec quelques tiges de fleurs de leurs montagnes, apportées par leurs aïeules la veille du dimanche, les regards chargés des images de la patrie, des arrière-pensées de la vengeance, des invocations ardentes à la liberté de la montagne ; les enfants à la mamelle allaités en plein soleil de lait amer mêlé de larmes ; toute cette scène, que nous avons contemplée souvent nous-même alors, laissait dans le souvenir, dans l’œil et dans l’imagination un pittoresque de nature humaine qui ne s’efface plus.
Le souvenir, le culte même des peuples consacrent leurs noms à l’immortalité ; et vous, loin de décerner des honneurs au conservateur d’un si grand peuple, au vengeur de tant de forfaits, vous souffririez qu’on le traîne au supplice !
Le souvenir de la plupart de ses pensées et de ses intentions, même les plus vives, périt à chaque instant en lui.
Ces mots, on s’en souvient, sont dans la première scène du second acte.
Dimanche 17 avril Aujourd’hui je ne sais pourquoi, je suis hanté par le souvenir de ma nourrice, cette Lorraine aux cheveux et aux sourcils noirs, chez laquelle il y avait bien certainement du sang espagnol, et qui m’adorait avec une sorte de frénésie.
Je suis malade, vraiment malade ; la vieillesse m’accable de tous côtés : l’ouïe me manque, ma vue s’éteint, je n’ai plus de jambes, je ne saurais plus monter ou descendre qu’appuyé sur le bras d’autrui ; enfin je ne suis plus rien de ce que j’étais, et, pour comble de misère, il me reste un malheureux souvenir de ce que j’ai été. » Racine mourant aussi, Racine, son élève autant que son ami, désira le voir pendant sa dernière maladie ; Boileau se traîna au lit de mort du poète d’Athalie.
Quand le titan console ses souffrances par le souvenir attendri de ce qu’il a fait pour les hommes, quand il rappelle la misérable condition de ces pauvres êtres « qui avaient des yeux et ne voyaient pas, des oreilles et n’entendaient pas », — comme il les a trouvés blottis au fond d’obscures cavernes, incapables de marquer le cours des saisons, ignorans de tout métier, de tout raisonnement, jouets de la confusion et du hasard, — comme il leur a révélé l’usage des nombres et de l’écriture, l’art d’observer le lever et le coucher des étoiles, de bâtir des maisons, de dresser les animaux, de guérir les maladies, de naviguer sur la mer, de pratiquer les différens modes de divination, — quand enfin, sous l’angoisse de son supplice, en face de l’odieux ministre de Jupiter, il prédit la chute de son tyran, le triomphe de la justice et sa propre apothéose, — n’est-ce pas l’histoire même du progrès, attesté par les laborieuses conquêtes de l’esprit sur la nature, sanctifié et couronné par le dévoûment des meilleurs à la cause du genre humain ?
L’intervention des idées morales sur la scène efface, avec toute la gaieté du drame comique, toute sa poésie, et je me souviens d’avoir entendu M. de Schlegel dire, avec une familiarité de langage dont le sel n’excuse point l’irrévérence, que grâce à cette parfaite symétrie du mal et du bien, du faux et du vrai, de l’absurde et du raisonnable dans les comédies de Molière, chacune d’elles présentait à son œil édifié cet aspect régulier et satisfaisant qui caractérise une pincette.
Cette coalition de l’Allemagne contre la Russie était un suicide, puisque l’Allemagne allait ainsi anéantir le seul appui indépendant qu’elle pouvait espérer de retrouver un jour contre l’omnipotence de son oppresseur Napoléon ; mais il était si fort des souvenirs d’Austerlitz, d’Iéna, de Wagram, qu’il pouvait tout commander à l’Allemagne, même le suicide.
Il avait dépouillé son sacerdoce comme un souvenir importun et comme un habit gênant.
Le pape alors, en poussant des soupirs que lui causait peut-être le souvenir de ses malheurs passés, prononça ces paroles : Benvenuto, je crois ce que tu me dis, et t’absous de ce péché et de tous ceux que tu peux avoir commis, m’eusses-tu pris la valeur d’une de mes trois couronnes. — Très-Saint-Père, lui répondis-je, je n’ai pas pris autre chose, et cela ne vaut pas cent cinquante ducats, qui, joints à pareille somme que j’obtins de la monnaie de Pérouse, me servirent pour aller porter du secours à mon vieux et malheureux père. — Ton père était un fort honnête homme, reprit le pape, et tu lui ressembles !
Le médiocre, en ce genre, ne portant point de profit, nulle trace n’en demeure, impressionnant le champ du souvenir.
Se rappeler un mouvement fait avec le bras, c’est sentir, à un faible degré, la répétition de ces états internes qui accompagnent le mouvement ; c’est un commencement d’excitation de tous ces nerfs dont une excitation plus forte a été éprouvée durant le mouvement. » Le souvenir est donc un commencement d’excitation nerveuse.
Mais aussitôt que Charis lui annonce la visite de la déesse, Héphestos se souvient des bras maternels qu’elle lui ouvrit sous les flots, quand il tomba de l’Olympe, et des soins qu’elle prit de son enfance rebutée. — « Certes, elle peut tout sur moi, la Déesse vénérable qui est entrée ici.
L’une des médailles frappées pour perpétuer le souvenir de cet acte mémorable, l’écrasement, pour un siècle, de la libre pensée religieuse en France, représente « la Religion plantant une croix sur des ruines, pour marquer, ajoute Weiss, le triomphe de la vérité sur l’erreur, avec cette légende ; Religio victrix ».
En revanche, il l’était peu de sa mère, fille pourtant du célèbre sculpteur Dubois, mais qui paraît avoir été une personne assez insignifiante, étroite de cœur et d’esprit ; elle ne lui avait guère laissé de tendres souvenirs.
Je ne demanderais au Ciel que d’avoir fait comme le moins éminent de ces historiens pour être assuré d’avoir bien fait et de laisser après moi un souvenir de mon éphémère existence.
Il avait ce qu’on peut appeler la faculté mélodramatique, et il s’en est servi quelquefois contre ses souvenirs de chefs-d’œuvre.