Les curieux de telle littérature seront suffisamment mis en goût par l’inquiétante et prestigieuse Introduction de Maurice Maeterlinck, et ils ne regretteront pas, à la lecture de sa version, de ne savoir déchiffrer le texte. […] Bérenger que je trouvé maladroitement mise en action. […] Ces jeunes gens, une fois en possession d’un corps de doctrine présentable, avec la sérénité de mathématiciens, le mettent dûment en pratique. […] Il se met au courant. […] Il s’agit de préférer à son être son idée, de mettre la pensée devant la force et le renoncement devant la joie de vivre.
On y peut voir au long les bulles que Rabelais eut l’habileté d’obtenir du Saint-Siège pendant un de ses voyages de Rome à la suite du cardinal Du Bellay, et par lesquelles il se mit prudemment en règle du côté de ses ennemis de France. […] On met Gargantua en présence du jeune Eudémon, enfant de douze ans, qui s’adresse à lui avec bonne grâce, avec politesse, avec une noble pudeur qui ne nuit pas à l’aisance. […] Pendant ce repas du matin, à propos de chaque mets, l’entretien roule sur la vertu, propriété et nature des objets, des viandes, poissons, herbes ou racines. […] Il raconte qu’un jour le duc d’Orléans, régent, au sortir de l’Opéra, causant avec lui, s’était mis à lui faire un grand éloge de Rabelais : « Je le pris pour un prince de mauvaise compagnie, dit-il, qui avait le goût gâté. […] Ce n’est pas que je mette Rabelais à côté d’Horace… Rabelais, quand il est bon, est le premier des bons bouffons : il ne faut pas qu’il y ait deux hommes de ce métier dans une nation, mais il faut qu’il y en ait un.
Ce sont des formes, sous lesquelles l’esprit groupe des intuitions particulières offrant entre elles des analogies, des formes par l’entremise desquelles l’esprit met en relation, selon des rapports variés de conjonction ou d’opposition, les intuitions particulières, afin de bâtir la trame de la pensée. […] Il suit de là qu’aux yeux du spectateur mis au fait de la prétention du personnage, tous les actes de celui-ci font apparaître, au moyen d’une, intuition directe, la contradiction qu’il porte en lui, le défaut d’équilibre et d’harmonie dont son énergie est atteinte et qui la rend boiteuse. […] Des hommes sont morts d’un coup d’épée parce qu’un maladroit leur avait froissé l’orteil, qui, délivrés du joug de la coutume, n’eussent point songé à mettre en péril la vie même de leur offenseur. […] Quelques passages des Mémoires d’outre-tombe mettent en scène cette prétention de l’écrivain avec des traits qui font sourire. […] Cette faute de critique et cette préférence mettent au service d’une faculté relativement médiocre tout le pouvoir d’effort attentif et conscient, dont la faculté maîtresse se voit privée.
Il faut l’avouer, les exemples que l’on avait mis en scène n’étaient propres à illustrer qu’un cas particulier des effets de la faculté bovaryque, tandis qu’ils repoussaient dans l’ombre tous les cas où le pouvoir de se concevoir autre emporte avec lui le pouvoir de s’égaler au modèle, d’acquérir par le moyen d’un phénomène d’aimantation des qualités nouvelles. […] L’œuvre nouvelle qu’il met au monde procède du mode des germinations et des floraisons naturelles. […] Avec son habituel souci de réforme et de redressement il mettra les hommes en garde contre les excès et les déviations du Bovarysme, et s’efforcera de régler le cours de ce pouvoir, d’en réduire l’activité à ses modalités normales. […] Cette coutume morale différente viendrait ici comme une branchie de poisson mise à la place d’un poumon de mammifère, elle ne correspondrait à aucune des nécessités de l’organisme auquel on voudrait l’appliquer, et par ce défaut de coïncidence, y causerait un désordre mortel. […] Celui-ci, qui ne possède encore aucun plan organique, aura tout avantage à se concevoir autre qu’il n’est, à mettre à profit les expériences des autres groupes déjà constitués, car il abrège, par cet expédient, la lente période de formation par laquelle ces groupes ont dû passer avant de parvenir à l’état organique, il s’épargne mille vains essais ; du premier coup, il use d’un système qui déjà a prouvé son efficacité à faire vivre des hommes en société.
Si l’on examine quelle est l’activité commune et constante des créatures mises sur pied par M. […] S’il met en scène des personnages que leur manque de culture rend incapables d’observations minutieuses, dont les yeux rudimentaires ne savent point voir ; il intervient, décrit en personne, sensation par sensation, les tableaux que ces obtus spectateurs contemplent, et marque ensuite en réaliste exact le peu d’intérêt qu’éveille chez eux ce spectacle inaperçu. […] Il se mit à l’aise dans En Ménage et eut recours aux artistes. […] Folantin, dans A Vau l’eau, ou le passage suivant de A Rebours, qui est un exemple parfait du paralogisme pessimiste, consistant à ôter d’un ensemble toute bonne qualité, et à le déclarer ensuite mauvais : « Il ne put s’empêcher de s’intéresser au sort de ces marmots et de croire que mieux eut valu pour eux que leur mère n’eût pas mis bas. […] Mais, par contre, personne plus que lui n’aura plus d’audace à se mettre au-dessus du goût public, à aller droit à ce qui est excellent.
C’est une attention de tous les instants, à mettre si bien toutes les circonstances à leur place, qu’elles soient nécessaires où on les met, et que d’ailleurs elles s’éclaircissent et s’embellissent toutes réciproquement ; à tout arranger pour les effets qu’on a en vue, sans laisser apercevoir de dessein ; de manière enfin que le spectateur suive toujours une action et ne sente jamais un ouvrage : autrement l’illusion cesse, et on ne voit plus que le poète au lieu des personnages. […] Cela est si vrai que, dans les drames même, on met en récit ce qui serait peu vraisemblable en spectacle. […] Selon le même Aristote, il faut dresser tout le plan de son sujet, le mettre par écrit le plus exactement qu’on le peut, et le faire passer tout entier sous ses yeux ; car en voyant ainsi nous-mêmes très clairement toutes ses parties, comme si nous étions mêlés dans l’action, nous trouverons bien sûrement ce qui sied, et nous remarquerons jusqu’aux moindres défauts et jusqu’aux moindres contrariétés qui pourraient nous être échappées. Il veut encore qu’en composant on imite les gestes et l’action de ceux qu’on fait parler ; car, de deux hommes qui seront d’un égal génie, celui qui se mettra dans la passion sera toujours plus persuasif : et une preuve de cela, c’est que celui qui est véritablement agité, agite de même ceux qui l’écoutent ; celui qui est en colère, ne manque jamais d’exciter les mêmes mouvements dans le cœur des spectateurs. […] Une des meilleures règles pour bien former un plan, c’est de diviser l’action principale en cinq parties bien distinctes, qui fassent autant de tableaux différents qui ne se confondent pas les uns dans les autres, et qui mettent une espèce d’unité dans chaque acte.
Le clergé et la noblesse d’Auvergne se sont mis à guerroyer contre le livre, la noblesse surtout ; car on se rappelle qu’elle ne fait pas une très-belle figure dans les Grands-Jours. […] On sent, en lisant ces paroles unies et en s’approchant de près du personnage, combien il y avait peu, dans la religion toute réelle et pratique de ce temps-là, de cette poésie que nous y avons mise après coup pour accommoder l’idée à notre goût d’aujourd’hui et pour nous reprendre à la croyance par l’imagination. […] J’y trouve assez de goût pour croire que je ne m’ennuierai point de la vie que je fais… » Mais, après cette sorte d’étape et ce premier temps de repos, Rancé se relève et se met en marche pour une pénitence infatigable et presque impitoyable, à l’envisager humainement : « Je vous assure, Monsieur, écrit-il à l’abbé Favier (24 janvier 1670), que depuis que l’on veut être entièrement à Dieu et dans la séparation des hommes, la vie n’est plus bonne que pour être détruite ; et nous ne devons nous considérer que tanquam oves occisionis. » A côté de ces austères et presque sanglantes paroles, on ne peut qu’être d’autant plus sensible aux témoignages constants de cette affection toujours grave, toujours réservée, mais de plus en plus profonde avec les années, qu’il accorde au digne vieillard, son ancien maître ; les jours où, au lieu de lui dire Monsieur, il s’échappe jusqu’au très-cher Monsieur, ce sont les jours d’effusion et d’attendrissement. […] Le peu de religieux qui y restaient vivaient avec scandale : « D’y en mettre de réformés, lui écrivait Rancé, cela n’est plus possible ; les réformes sont tellement décriées, et en partie par la mauvaise conduite des religieux, qu’on ne veut plus souffrir qu’on les introduise dans les lieux où il n’y en a point. […] C’est bien là véritablement celui qui a le droit de se rendre avec sincérité ce témoignage : « Ce que je puis vous dire, Monsieur, c’est qu’il y a longtemps que les hommes parlent de moi comme il leur plaît ; cependant ils ne sont pas venus à bout de changer la couleur d’un seul de mes cheveux. » L’abbé Nicaise, toujours aux aguets et le nez au vent, met bien des fois la patience du saint à l’épreuve et agace en quelque sorte sa curiosité.
Fortoul, jeune, atteint, j’imagine, un moment par le romantisme, s’était bientôt retourné contre, et avait emprunté à un système, qu’il jugeait plus large et plus fécond, des principes qui ne valent pourtant que pour ce qu’on y met de particulier et de correctif perpétuel dans l’application. […] Dans une Introduction, l’auteur raconte somment, en un château assez voisin de Paris, chez le duc de…, qui, par ambition, s’est fait partisan très avancé des idées nouvelles, une société nombreuse, composée de militaires, de députés, d’artistes, de journalistes, se met à discuter un soir le grand sujet à la mode, à savoir si la source du progrès est dans la vie publique et sociale, ou s’il la faut chercher au foyer domestique. […] Lors même qu’on y lève le voile pour enseigner, il ne faut pas mettre l’enseigne. […] On peut se mettre au-dessus de son siècle par la morale ; mais par le goût à ce point-là, c’est impossible. […] « Les hautes montagnes, a-t-on dit, consternent aisément celui qui habite au pied, ou du moins elles le modèrent et le calment ; elles mettent l’homme à la raison. » Simiane reste dans la raison, ainsi que dans le bonheur ; lorsque Rousseau, déjà célèbre, les visite encore, il emporte de leur dernier embrassement une de ces fraîches et à la fois solennelles images, qui, en présence de Thérèse et de tant d’illusions flétries, sauvaient l’idéal dans son cœur.
De l’Opéra et de la Foire, le souci de la mise en scène, des accessoires exacts et pittoresques, gagne la Comédie Française : les princesses grecques quittent leurs paniers, les héros romains rejettent leurs perruques. […] Il est impossible que les unités continuent à tyranniser notre théâtre : la mise en scène, la structure des pièces, la curiosité physique des spectateurs réclament des cadres moins étroits. […] Une petite bourgeoise qui demeure sur le quai, au coin du Pont-Neuf, se met à sa fenêtre au soleil couchant : « On eût dit, écrit-elle à une amie, que le roi du jour, descendu de son char derrière ces hauteurs, avait laissé suspendu au-dessus d’elles son manteau de couleur rouge et orangée. […] Il a mis toutes ces notions en vers réfléchis, exacts, ingénieux, froids, il a su par ses épithètes et ses périphrases prévenir en nous toute velléité de sensation, et nous retenir aux idées sans jamais atteindre la nature. […] Et ce bel esprit qui n’a jamais su faire que des inventaires ou des catalogues, à sa mort mit la France en deuil : ses funérailles furent une apothéose, et l’on croyait enterrer avec lui la poésie !
Cette fois la physique expérimentale a été plus fidèle aux principes que la Physique Mathématique ; les théoriciens en auraient fait bon marché afin de mettre en concordance leurs autres vues générales ; mais l’expérience s’est obstinée à le confirmer. […] Si, après avoir réglé les montres par le procédé optique, on voulait vérifier le réglage à l’aide de ces nouveaux signaux, on constaterait des divergences qui mettraient en évidence la translation commune des deux stations. […] C’est ce qu’on a appelé la pression Maxwell-Bartholdi ; elle est très petite et on a eu bien du mal à la mettre en évidence avec les radiomètres les plus sensibles ; mais il suffit qu’elle existe. […] Ces molécules, étant électrisées, ne peuvent se déplacer sans ébranler l’éther ; pour les mettre en mouvement, il faut triompher d’une double inertie, de celle de la molécule elle-même et de celle de l’éther. […] La scène changea lorsque Curie s’avisa de mettre le radium dans un calorimètre ; alors on vit que la quantité de chaleur incessamment créée était très notable.
Que l’on se place au point de vue de l’intellectualisme tenant la vie pour un moyen dont la connaissance est le but, ou que l’on se place au point de vue de l’illusion vitale tenant la connaissance pour un moyen, dont la vie heureuse est le but, ce que l’on se proposait de mettre ici en évidence, c’est, d’une part, que selon la rigueur du principe bovaryque, chacune de ces conceptions, qui tend à envahir tout le champ du réel, ne reçoit elle-même sa réalité que des limites que lui inflige la conception contraire ; c’est, d’autre part, que dans l’une et l’autre hypothèse, toute l’activité dépensée dans le monde a pour principe unique l’utilité humaine sous l’un ou l’autre de ses deux aspects, qu’il lui faut en sorte toujours supposer pour but de satisfaire une utilité de connaissanceou de satisfaire une utilité vitale. […] Que nos idées se modifient et se transforment touchant la nature et le siège de la substance vivante, que des perspectives diverses apparaissent, que des états divers du savoir humain se succèdent sur ce point extrême, ces métamorphoses du spectacle qu’il nous est ainsi donné de contempler ne sont point de nature à mettre en péril l’intégrité de notre faculté de connaissance elle-même. […] Afin de mettre encore en lumière le rôle prépondérant de l’utilité humaine en tant qu’elle confère la puissance aux vérités propres à constituer le réel, il convient de faire remarquer que ces vérités ne survivent pas à leur utilité. […] Remy de Gourmont a mis en scène avec un art concret et une clarté parfaite dans son beau livre, la Culture des Idées, ce travail d’association et de dissociation. […] Dans une étude précédente sur la Nature des Vérités3, ces exemples ont été d’ailleurs mis à contribution pour illustrer des développements parallèles à Ceux que l’on vient d’exposer ici.
Il faut qu’elle résiste à tout ce qu’il plaît aux gens de mettre dessus. […] Pourtant on peut mettre son ambition plus haut. […] Il met sur la tête de son Prince un diadème de crimes, une tiare de vices, une auréole de turpitudes, et vous invite à adorer son monstre, de l’air dont on attend un vengeur. […] Machiavel, ce metteur en scène des attentats princiers, ce domestique des Médicis et des Borgia, avait dans sa jeunesse été mis à la torture pour avoir admiré Brutus et Cassius. […] Nul ne peut prévoir la quantité de lumière qui se dégagera de la mise en communication du peuple avec les génies.
Swift ou Lucien, voulant mettre les hommes au-dessous des animaux, ne s’y seraient pas mieux pris. […] Nous avons déjà vu quelques exemples de ce tour vif et animé, qui met d’abord le personnage en scène. […] Ou il fallait ne pas mettre de moralité du tout, ou bien il fallait laisser là Mouflar, et dire que, souvent d’un malheur qui nous a causé bien du chagrin, il est résulté des avantages inappréciables et imprévus. […] Ce n’était pas un poète comme La Fontaine qui pouvait oublier de mettre une musette dans le coffre-fort du berger. […] La naïveté de son caractère, la simplicité de son âme, son goût pour la retraite le mettent vite à la place de ceux qui forment des vœux pour le séjour de la campagne, pour la médiocrité, pour la solitude.
On se dit qu’on en aura toujours bien pour huit jours du Lamartine, de ce poète oublié et dépassé par MM. les Parnassiens, qui se donnent des airs presque méprisants avec lui ; — de ce spiritualiste qui ne peut plus convenir à d’augustes descendants de singes, qui se vantent, comme des Tufières, de leur race ; — de ce sentimental enfin qui eut la faiblesse d’avoir une âme, quand la poésie actuelle, cette rimeuse à vide, a pour force de n’en mettre nulle part. […] Sa gloire, à laquelle de petits ouvriers d’un jour se sont mis présentement à travailler pour qu’il restât sur eux un peu de la limaille d’or de cette gloire, qu’ils frottent pour la faire reluire, comme si elle en avait besoin ! […] Sa gloire, c’est son œuvre, l’œuvre spéciale à laquelle nul autre que lui ne mit la main et ne pouvait l’y mettre, l’œuvre pour laquelle il n’y a ni aide, ni collaborateur, ni amis comme pour faire une République, et qui était un peu plus difficile à faire qu’une République ! […] Il dit bien quelque part que Lamartine est Virgile, Cicéron et Washington tout à la fois ; mais, comme les Muets qui étouffent leur homme entre deux portes de bronze, le Virgile n’est mis là que pour être étouffé entre Cicéron et Washington. — pour M. de Lacretelle, deux portes d’or !
Selon ces fiers esprits, qui, comme Niobé, ont l’orgueil de leur progéniture, même avant de l’avoir mise au monde, la Critique est toujours une œuvre stérile pour le moins, lorsque ce n’est pis encore : une envieuse occupation d’impuissant. […] Or, quelles que soient les sévérités contre les œuvres, le dictame à mettre sur l’amour-propre d’un homme est toujours souverain quand le miel en est composé avec les fleurs de l’espérance et quand la Critique a le droit de dire : Son esprit vaut mieux que ses livres, et voilà pourquoi il peut et même il doit faire mieux. […] La seule différence qu’il y ait entre l’imitateur et le modèle, c’est que Monselet a l’amour de la nature, que Gautier met presque un singulier orgueil à ne point avoir. […] Mais à part les vers qui s’y sont mis, comme dirait Rivarol, ce poème n’est, au fond, qu’un petit roman d’observation pénétrante et raffinée, d’un détail très pur et d’une émouvante simplicité. […] Monselet a mis, je le sais, de la pitié dans sa notice ; mais on ne gagne pas les œuvres de miséricorde avec l’Histoire.
Nous croyons beaucoup à ces hommes qui ont mis la main sur leurs facultés et qui les ont forcées à se taire longtemps. […] Ayant vécu en province longtemps, il y a trouvé plus en relief qu’à Paris, où il existe aussi, mais moins complet, un genre de femmes oublié par Balzac, qu’il s’est mis à peindre avec un détail infini, dans une étude consommée. […] Elle fume, elle met des gilets d’homme, et finit par vouloir être enlevée et faire son petit voyage d’Italie, tout comme une autre… Malheureusement, ici, le faux héros du roman auquel elle s’est donnée, s’écroule. […] Elle emprunte, en effet, elle dépense, elle prend à usure, elle abuse de la procuration que la confiance de Bovary a mise entre ses mains, et lorsque tout est mangé, dévoré, englouti, qu’il n’y a plus de ressources, que les meubles de l’officier de santé sont saisis, elle se glisse furtivement chez le pharmacien, y avale de l’arsenic à poignées et meurt ; heureusement, faut-il dire, car si elle ne s’empoisonnait pas ce jour-là, un autre jour elle aurait peut-être empoisonné son mari, comme madame Lafarge. […] La lumière se met à papilloter sur toutes ces nervures inutiles, sur tous ces linéaments rendus perceptibles et heurtants par le relief trop marqué du dessin, comme elle papillote intersectée par les angles des pierres précieuses et nous éblouit.
On le vit bien, le jour où il se fit mettre en prison. […] Mettez M. […] Mettez M. […] Mettons trois cents si vous voulez : cela ferait un dixième. […] Il met toujours de l’amour dans sa vertu.
. — Vers l’âge de quinze ans, l’abbé de Pons s’aperçut que sa taille se déformait ; il se mit entre les mains d’un chirurgien malhabile qui le tortura ; la difformité ne fit qu’augmenter et fut irréparable. […] La Motte était le point de réunion de l’assemblée, et personne n’y était plus propre que lui, par le ton de politesse qu’il mettait dans la discussion. […] Dans son jugement de Rhadamiste, qui parut en brochure, le critique, après avoir reconnu qu’il y a dans la pièce des traits hardis, heureux, et des situations intéressantes, se met à la suivre scène par scène et à démontrer les invraisemblancesk, les incohérences du sujet, l’action peu liée, les caractères peu soutenus ; il n’en laisse à peu près rien subsister : Enfin, dit-il, je n’ai pas d’idée d’avoir jamais lu une tragédie plus embarrassée, plus fausse, et moins intelligible ; j’ai l’avantage de pouvoir dire ici tout ce que je pense, sans crainte de faire tort à l’auteurl ; car, ou je m’égare dans le jugement que j’expose, et en ce cas le public le vengera de moi, ou le public déférera à mes remarques, et en ce cas même il en rejaillira beaucoup de gloire à M. de Crébillon : on estimera à la vérité un peu moins sa pièce, mais il paraîtra d’autant plus grand, qu’il aura mieux trouvé l’art de fasciner les esprits, en leur cachant les défauts de sa tragédie à force de splendeur et de magnificence. […] [1re éd.] se met à suivre scène par scène et à démontrer les invraisemblances l.
Aujourd’hui que le Globe est placé plus qu’il ne l’a jamais été depuis la révolution de Juillet sur un terrain solide et nettement dessiné ; aujourd’hui que sa nouvelle position en politique, en économie, en philosophie, en art et en religion, devient de plus en plus appréciable et notoire ; aujourd’hui enfin, pour tout dire, que le Globe est le journal reconnu et avoué de la doctrine saint-simonienne ; nous, qui ne l’avons abandonné dans aucune de ses phases, nous qui avons assisté et contribué à sa naissance il y a sept ans, coopéré à ses divers travaux depuis lors, qui avons provoqué et produit plus particulièrement ses transformations récentes ; nous qui avons suivi toujours, et, dans quelques-unes des dernières circonstances, dirigé sa marche ; qui, sciemment et dans la plénitude de notre loyauté, l’avons poussé et mis là où il est présentement, nous croyons bon, utile, honorable de nous expliquer une première et dernière fois par devant le public, sur les variations successives du journal auquel notre nom est demeuré attaché ; de rendre un compte sincère des idées et des sentiments qui nous ont amené où nous sommes ; et de montrer la raison secrète, la logique véritable de ce qui a pu sembler pur hasard et inconsistance dans les destinées d’une feuille que le pays a toujours trouvée dans des voies d’honneur et de conviction. […] Par des extraits de voyages, par des traductions et des analyses d’ouvrages étrangers, par des études de toute espèce sur le passé, le Globe cherchait à mettre sous la main de ses lecteurs les principaux éléments des questions ; à leur représenter les travaux antérieurs et l’état de la science contemporaine sur chaque point de controverse ; à leur apporter et à leur distribuer en ordre les matériaux les plus complets pour les solutions les plus larges et les plus conciliantes. […] Nous interrogeâmes de plus près la doctrine ; et à mesure que nous la connûmes davantage, nos doutes et nos objections sur sa vérité essentielle et sa mise en pratique s’évanouirent successivement. […] Il a mis six ans à parcourir l’intervalle que le génie de Saint-Simon voulait, il y a six ans, lui faire franchir du jour au lendemain.
Lorsqu’on lui parlait, il se sentait étourdi comme si plusieurs personnes lui parlaient à la fois… Il ne reconnaissait ni le goût ni l’odeur des mets, et ne distinguait pas les objets au toucher, les yeux fermés. […] « Je ne pouvais plus, dit-il, m’orienter en la quittant, ou du moins il me fallait faire un long et pénible effort pour me retrouver. — Souvent il lui est arrivé de se trouver à une courte distance de sa demeure et de ne pouvoir reconnaître son chemin qu’après de longs efforts de réflexion ; deux ou trois fois, il s’assit sur la route, désespérant de retrouver sa maison, et se mit à pleurer à chaudes larmes. » Un autre malade130 écrit : « J’avais horreur d’aller à Divonne, pays nouveau pour moi. Il fallut qu’un de mes amis s’offrît pour m’accompagner ; sans cela, je ne serais pas parti, et pourtant, à cause de mon hyperesthésie de l’ouïe, je prévoyais l’état affreux où me mettrait le bruit du siège à Paris. […] Les lunettes les plus foncées ne me suffisaient plus ; je les mis doubles, et finalement j’eus l’idée de noircir mes lunettes avec du noir de charbon… Constamment il m’a semblé que mes jambes n’étaient plus à moi ; il en était à peu près de même de mes bras ; quant à ma tête, elle me semblait ne pas exister… Il me semblait que j’agissais par une impulsion étrangère à moi-même, automatiquement.
Mais Raphaël voit un moment le pere éternel peint par Michel-Ange : frappé par la noblesse de l’idée de ce puissant génie, que nous pouvons appeller le Corneille de la peinture ; il la saisit, et il se rend capable en un jour de mettre dans les figures qu’il fait pour représenter le pere éternel le caractere de grandeur, de fierté et de divinité qu’il venoit d’admirer dans l’ouvrage de son concurrent. […] Sa tête n’est que la tête d’un homme : Raphaël l’a traitée dans le goût des têtes que les peintres font pour les christs, et l’on n’y trouve d’autre difference que celle qu’il faut mettre, suivant les loix de l’art, entre deux têtes, dont l’une est destinée à représenter le pere, et l’autre à représenter le fils. […] Un jeune homme qui a du génie, découvre dans ces ouvrages des beautez et des graces, dont il avoit déja une idée confuse, mises dans toute la perfection dont elles sont susceptibles. […] Cent mille beautez médiocres mises ensemble ne valent pas, ne pesent pas, pour ainsi dire, un de ces traits qu’il faut bien que les modernes, mêmes ceux qui font des églogues, loüent dans les poësies bucoliques de Virgile.
je veux me mettre aussi de la partie ! […] Un libraire aujourd’hui peut tout ; Il vous baptise ou débaptise, L’enseigne luit, l’affiche est mise. […] Et puis, il avait, pour lui mettre son manteau sur les épaules et de la ouate autour du cœur, les deux belles mains dévouées de celle qui fut un jour digne de les poser, ses belles mains, dans la main couvre-empire de Louis XIV ! […] Les yeux sur le Crucifix s’en sont détournés et se sont mis, de leurs beaux orbes démesurés, à regarder le passé, — cette fumée partie, — ce vide béant qui se moque de nous !
C’est Léon Gozlan qui disait, je crois, avec cet éclair et cette pointe de diamant qu’il mettait en ses moindres mots : « La beauté de la femme, c’est d’être un ornement. […] Or, encore, si vous ne mettez pas dans votre roman les facultés surabondantes nécessaires à une création, vous avez interverti l’ordre des œuvres, et, au lieu de ce monde inventé et organisé d’un roman dans lequel Walter Scott, par exemple, aurait fait tenir jusqu’à l’Histoire, vous n’avez qu’une histoire, qui n’a peut-être pas la réalité pure de l’Histoire, et c’est dans les formes énergiques, mais étroites, maigres et décharnées de cette histoire, que vous étranglez le roman ! […] Or, y en a-t-il, dans le livre de Ranc, comme les romanciers ont l’habitude d’en mettre dans les romans, qui ne sont, après tout, que l’histoire possible ? […] L’auteur du Roman d’une conspiration n’a pas tiré de la foule de tous les conspirateurs qui mettent leur vie au jeu, et bravement l’y laissent, ce Goujet, et surtout ce Rochereuil, qu’il fallait marquer d’un signe à part, — comme ce Redgauntlet, par exemple, qui est aussi un conspirateur, et que le génie de Walter Scott a marqué, pour que l’imagination le revoie toujours dans ses rêves, de ce fer à cheval sur le front, signe du malheur de toute une race, qui perd toutes les causes pour lesquelles elle combat, sans que jamais son courage faiblisse sous le poids de cette sombre et désespérante fatalité !
De fait, notre volonté n’est mise en jeu que si nous nous estimons plus grand que nature. […] Non que l’auteur ait entièrement échoué, mais sa puissance n’est pas là où il a mis son effort. […] Acceptera-t-il de se mettre à l’école du devoir ? […] Mets ta main sur mon front et me bénis. […] Il avait mis dans sa foi toute son âme ; il devait y mettre bientôt tout le travail d’une pensée qui se développait rapidement.
Or, il semble dans la nature des choses que, tout immortelle, toute légitime qu’elle soit, une telle renommée doive, un jour ou l’autre, perdre tant soit peu, non pas en estime, non pas en reconnaissance, mais en vogue, en enthousiasme auprès de la postérité ; bien plus, il semble désirable que l’instant arrive, et qu’il arrive au plus tôt, où, la victoire étant décidée et le libre usage de la raison à jamais reconquis, on se mette, sans plus craindre d’être harcelé et distrait, à marcher dans les voies nouvelles plus loin que ses devanciers, et si loin que, tout en les voyant encore et les saluant toujours du regard, on ne les voie plus qu’à distance et dans le passé, environnés d’une consécration à la fois plus auguste et plus calme. […] Après sa retraite forcée, il se mit à enseigner la géographie dont il avait appris quelque chose à Cirey, et à rédiger ces souvenirs qu’on nous donne. […] Le tout mis en ordre et publié sur les manuscrits autographes par M***.
M. de Ségur, revenant de la guerre d’Amérique, débarque à Brest, et se met en route pour Paris. […] pour le partage de la Pologne, l’impératrice n’en a pas l’honneur ; car je puis dire qu’il est mon ouvrage. » Et il se mit là-dessus à raconter comment lui était venue un matin cette heureuse idée de s’agrandir sans perdre de sang ni d’argent, comment il l’avait communiquée à Catherine, qui en fut frappée ainsi que d’un trait de lumière, et plus tard à son frère qui l’embrassa en le remerciant, et qu’aussitôt après cette officieuse confidence les négociations avaient commencé. […] M. de Ségur le mettait adroitement sur son sujet favori, qui était l’origine et les causes du schisme grec, et l’entendant patiemment discourir pendant des heures entières sur les conciles œcuméniques, faisait chaque jour de nouveaux progrès dans sa confiance.
Quand il avait une fois commencé, il s’arrêtait difficilement, et aucun de ses auditeurs n’était tenté de mettre le signet. » Or, comme à chaque séance du Conseil, M. le maréchal de Ségur soumettait à la délibération l’affaire de Hollande et sollicitait une décision prompte, l’archevêque, s’emparant adroitement de la parole, trouvait moyen d’interpeller M. de Malesherbes sur quelque événement passé, analogue aux circonstances présentes ; et celui-ci, selon son usage, commençait à raconter. Vainement les maréchaux de Ségur et de Castries voulaient mettre fin à l’épisode. […] Espérons qu’il sera bientôt en état de le poursuivre, et qu’échappé à une maladie qui menaçait de le ravir aux lettres et aux libertés publiques, il trouvera encore de longs jours pour se souvenir et pour raconter, Il est du petit nombre de ces hommes qu’on aime toujours à entendre sur les personnages et sur les choses d’autrefois ; et, pour lui appliquer à lui-même ce qu’il a dit de M. de Malesherbes, quand il cause avec son lecteur, personne n’est tenté de mettre le signet.