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393. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Il l’aborda de préférence par le genre des pastorales et des nouvelles, et lui emprunta Galatée (1783), qu’il traita avec liberté d’ailleurs, et qu’il accommoda selon le goût du temps, en y donnant une teinte plus récente de Gessner : « J’ai tâché, écrivait-il à ce dernier, d’habiller la Galatée de Michel Cervantes comme vous habillez vos Chloés : je lui ai fait chanter les chansons que vous m’avez apprises, et j’ai orné son chapeau de fleurs volées à vos bergères. » Ce roman pastoral, mêlé de tendres romances, réussit beaucoup : toutes les jeunes femmes, tous les amoureux en raffolèrent ; les sévères critiques eux-mêmes furent fléchis : « C’est un jeune homme d’un esprit heureux et naturel, écrivait La Harpe parlant de l’auteur de Galatée, et qui aura toujours des succès s’il ne sort pas du genre où son talent l’appelle. » Il est vrai que, peu de temps auparavant, le chevalier de Florian avait adressé au même M. de La Harpe des vers d’enthousiasme, au sortir de la représentation de Philoctète : Je ne sais pas le grec mais mon âme est sensible ; Et, pour juger tes vers, il suffit de mon cœur ! […] Florian, pour réussir dans le monde et saisir la veine du moment, avait eu à choisir dans ses propres goûts ; il y avait en lui un coin de pastoureau et de troubadour langoureux, qu’il s’était plu à développer exclusivement, plume en main : sa réalité, plus mêlée et plus vive, valait mieux que cet idéal-là. […] C’était, m’a raconté un témoin fidèle, une sorte d’enivrement, de bonheur mêlé d’un charme attendri, une gaieté quelquefois forcée et pourtant toujours vive.

394. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

Elle nous y parle du jeu, qui se mêlait très bien, assure-t-elle, à la causerie, et qui, tout follement engagé qu’il était, n’était point acharné alors comme aujourd’hui, et ne laissait perdre ni un récit amusant ni un bon mot. […] Comme la société pourtant et le cœur aiment les contrastes, il se mêlera, à cet amour avoué de la gloire et des exploits, des airs de rêverie et de romance. […] Sa parole, plus forte et plus drue quand elle causait que quand elle écrivait, rappelait parfois le tempérament de certaines femmes de Molière, bien qu’il s’y mêlât plus d’un trait de la langue de Marivaux.

395. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

Chlewaski qui lui avait demandé ce que c’était que le livre des Voyages d’Anténor, Courier répond que c’est une sotte imitation d’Anacharsis, c’est-à-dire d’un ouvrage médiocrement écrit et médiocrement savant, soit dit entre nous : Je crois, ajoute-t-il, que tous les livres de ce genre, moitié histoire et moitié roman, où les mœurs modernes se trouvent mêlées avec les anciennes, font tort aux unes et aux autres, donnent de tout des idées fausses, et choquent également le goût et l’érudition. […] S’il avait voulu dire simplement qu’il y a bien du hasard à la guerre, que les réputations y sont souvent surfaites ou usurpées, que l’exécution des plans les mieux combinés dépend de mille accidents et de mille instruments qui peuvent les déjouer et les trahir, et que, dans l’art individuel du peintre et du poète, avec toutes les difficultés qui s’y mêlent, il n’entre point de telles chances, il n’y aurait qu’à lui donner raison, et il n’aurait rien dit de bien neuf. […] La passion, pour la première fois, se mêla avec suite dans sa vue pratique des choses ; son humeur d’ailleurs le rendait tout propre à l’opposition.

396. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Les Italiens modernes eux-mêmes, quand ils s’en mêlent, lui paraissent entendre le faste mieux que les Français : Ce que nous appelons le plus communément en France, dit-il, faire une grande figure, avoir une bonne maison, c’est tenir une grande table. […] Ses jugements, ses impressions sur Michel-Ange et la chapelle Sixtine, sur Raphaël et les Chambres du Vatican, sont de l’homme de goût que la nature a doué avant tout d’organes délicats, et qui ne mêle à son sentiment direct rien d’étranger ni de littéraire. […] Ces jeunes Bourguignons de qualité ont leur carrosse, font bonne chère, jouent gros jeu et se mêlent aux mœurs du pays.

397. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Si le spectacle des troubles et des émotions civiles où elle a été mêlée a semblé servir quelquefois à la fortifier et à l’élever même, un tel spectacle la contriste encore plus, et l’égarerait à coup sûr en se prolongeant : c’est surtout à l’heure où ces troubles s’apaisent et où ils sont encore à l’état de récent et de vif souvenir, que la littérature peut heureusement s’en inspirer pour jouir du calme rétabli, du sentiment de la civilisation reconquise, pour y porter un zèle ému, une ardeur trop longtemps contrainte et retardée, pour y signaler et pour y produire à quelque degré l’effet d’une renaissance. […] Il faut donc reconnaître, comme plus probable, que l’abbé Barthélemy était lié à Mme de Choiseul par un sentiment tendre, profond et pur, et qui, mêlé d’une nuance touchante, tenait avant tout de l’amitié29. […] On vit avec un plaisir mêlé de surprise combien notre abbé le rendait intéressant aux femmes et aux gens du monde qui l’écoutaient, par les grâces de son style, par la finesse de sa critique, et par ses principes justes et lumineux. — Les femmes mêmes, lit-on dans les Mémoires de Bachaumont, ont été enchantées de cette lecture.

398. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre deuxième. Rapports du plaisir et de la douleur à la représentation et à l’appétition »

Les différences qualitatives du plaisir et de la douleur tiennent donc aux perceptions qui s’y mêlent. Aussi, « à parler rigoureusement, la douleur ne se rattache à aucun lieu, et la localisation ne concerne que la perception. » Ajoutons qu’à la perception se mêlent des souvenirs, des idées, des images qui, pour leur part, contribuent à diversifier les émotions. […] La conséquence de ce qui précède, c’est que l’activité fondamentale, la « volonté » primitive, d’où naissent les peines et les plaisirs, est une activité mêlée de passivité, où l’élément agréable lié à l’action efficace est continuellement contrarié et contrebalancé par un élément pénible, à savoir le sentiment d’usure et de manque, qui accompagne la passivité et la résistance subie.

399. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

Que cet artiste ironique hoche du nez, quand je me mêlerai du technique de son métier ; à la bonne heure ; mais s’il me contredit, quand il s’agira de l’idéal de son art, il pourroit bien me donner ma revange. […] Avec le tems, par une marche lente et pusillanime, par un long et pénible tâtonnement, par une notion sourde, secrette, d’analogie, acquise par une infinité d’observations successives dont la mémoire s’éteint et dont l’effet reste, la réforme s’est étendue à de moindres parties, de celles-cy à de moindres encore, et de ces dernières aux plus petites, à l’ongle, à la paupière, aux cils, aux cheveux, effaçant sans relâche et avec une circonspection étonante les altérations et difformités de nature viciée, ou dans son origine, ou par les nécessités de sa condition, s’éloignant sans cesse du portrait, de la ligne fausse, pour s’élever au vrai modèle idéal de la beauté, à la ligne vraie ; ligne vraie, modèle idéal de beauté qui n’exista nulle part que dans la tête des Agasias, des Raphaëls, des poussins, des Pugets, des Pigals, des Falconnets ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie dont les artistes subalternes ne puisent que des notions incorrectes, plus ou moins approchées que dans l’antique ou dans leurs ouvrages ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie que ces grands maîtres ne peuvent inspirer à leurs élèves aussi rigoureusement qu’ils la conçoivent ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie au-dessus de laquelle ils peuvent s’élancer en se jouant, pour produire le chimérique, le sphinx, le centaure, l’hippogriphe, le faune, et toutes les natures mêlées ; au-dessous de laquelle ils peuvent descendre pour produire les différents portraits de la vie, la charge, le monstre, le grotesque, selon la dose de mensonge qu’exige leur composition et l’effet qu’ils ont à produire, en sorte que c’est presque une question vuide de sens que de chercher jusqu’où il faut se tenir approché ou éloigné du modèle idéal de la beauté, de la ligne vraie ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie non traditionelle qui s’évanouit presque avec l’homme de génie, qui forme pendant un tems l’esprit, le caractère, le goût des ouvrages d’un peuple, d’un siècle, d’une école ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie dont l’homme de génie aura la notion la plus correcte selon le climat, le gouvernement, les loix, les circonstances qui l’auront vu naître ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie qui se corrompt, qui se perd et qui ne se retrouveroit peut-être parfaitement chez un peuple que par le retour à l’état de Barbarie ; car c’est la seule condition où les hommes convaincus de leur ignorance puissent se résoudre à la lenteur du tâtonnement ; les autres restent médiocres précisément parce qu’ils naissent, pour ainsi dire, scavants. […] Quelques conséquences que vous tirerez bien de là sans que je m’en mêle, c’est l’impossibilité confirmée par l’expérience de tous les tems et de tous les peuples, que les beaux-arts aient chez un même peuple, plusieurs beaux siècles ; c’est que ces principes s’étendent également à l’éloquence, à la poésie et peut-être aux langues.

400. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

En obéissant à sa nature, qui était un superbe et fécond tempérament littéraire, Macaulay aurait multiplié des œuvres semblables à ces Essais qu’on a eu raison de mettre à part des autres, gâtés par la politique qui s’y mêle. […] L’historien, le protestant, l’Anglais, ces trois vivants préjugés, qui ont mêlé tant de fois, en Macaulay, leur triple personnalité intéressée et turbulente à l’impersonnalité du critique, apparaissent encore dans cet article sur Southey, que M.  […] Drapée de comparaisons merveilleuses et qui sont bien plus que des images, car ce sont presque des tableaux, cette critique savante, éclatante, artiste, ornée sans être surchargée, orientale d’éclat, comme un châle de Cachemire semé d’arabesques, a le bon sens aussi, qui mêle sa solidité aux splendeurs de sa trame… Je ne sais pas de quelle race descend Macaulay, mais il a ce bon sens normand qui vainquit à Hastings, et qui s’est coulé, pour les calmer, dans les veines saxonnes de la sanguine Angleterre.

401. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Marsolleau, Louis (1864-1935) »

Eugène Ledrain Nature étrange où les dons les plus divers se mêlent et se confondent, M. 

402. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 338-339

Voici quelques phrases de cet Auteur, prises au hasard dans ses Œuvres mêlées.

403. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Sa chasse merveilleuse enchantait la forêt ; elle se mêlait à toutes ses rumeurs. […] » dis, et mêle son doux nom au vin pur, pour que je boive ce nom adoré. […] L’affaire se termine par un troc à l’amiable mêlé de louanges et d’injures. […] Nul doute qu’il y ait mêlé un grain de magie et de sacrilège. […] Enlacés, confondus, ils se joignaient par les lèvres et mêlaient leurs rêves.

404. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1870 » pp. 3-176

Un pauvre logis qui sent la misère, la sainteté, l’humidité, la maladie, et dont toute la joie est le bondissement mêlé au jappement d’un chien, de la race des chiens de conducteur de diligence, baptisé Paturot par le curé. […] La défense est ici sur une proportion gigantesque, et digne de ce faubourg d’émeute, de ce faubourg Saint-Antoine qui semble avoir mêlé le génie militaire au génie de la guerre des rues. […] Là, c’est un encombrement, une mêlée, une confusion de gens de toutes sortes, que trouent, à tout moment, des gardes nationaux, la crosse en l’air, et criant : « Vive la Commune !  […] Ils sont morts aussi, les arbres… Des coupes de bouleaux s’étendent devant moi, et font, avec leurs troncs blancs, comme des coins de cimetière… Sur la route abandonnée, les semelles de vieux souliers se mêlent, dans la boue, aux branchages desséchés. […] Chez tous, il y a un frisson douloureux, mêlé à une curiosité avide des pâleurs, des taches de sang, des souffrances contenues et mangées par ces mutilés, qui se savent regardés, et font effort pour être à la hauteur du spectacle.

405. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

elle s’y mêle et s’y combine dans des proportions si justes et si discrètes, que la poésie en devient plus vraie et la vérité plus poétique ; car c’est là le trait distinctif du talent de M.  […] La décadence (ce mot devrait-il jamais se mêler à ces noms ?) […] Cela est bientôt dit ; par malheur, quand vous aurez prouvé que quiconque se mêle encore de penser, de parler et d’écrire, est un idéologue, on vous répondra : Tant mieux pour l’idéologie ! […] Il représente, il retrace tout ce que la société spirituelle et polie mêla de sécurités trompeuses, d’entraînements dangereux, de coupables tolérances aux événements qui précédèrent et suivirent 1830. […] Cette manière sobre dans le sarcasme, laissant les faits et les personnages se ridiculiser par eux-mêmes sans que l’auteur ait l’air de s’en mêler, n’a rien de la raillerie opulente et expansive de M. 

406. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Le Barillier, Berthe-Corinne (1868-1927) »

Il y est allé au théâtre, au cirque, sur la place publique, dans les tavernes et les bains, et s’est mêlé à l’existence familière des patriciens, des poètes, des comédiens, des esclaves, des rhéteurs et des courtisanes.

407. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVII. Le Retour du Christ. Appel aux femmes ! »

Ceux-là seuls, en effet, ont le droit de prier tout haut, parmi les peuples, qui ne mêlent pas d’erreurs à leur prière, et tel n’est point le cas ici. […] En grâce, Mesdames, ne vous mêlez pas de convertir. »  Mais femme qui fait des livres n’entend à rien, et tous les curés du monde y perdraient leur latin et la sagesse de leurs conseils.

408. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Mathilde de Toscane »

» Et aussitôt il commence, pour ne plus l’interrompre, cette magnifique histoire d’Hildebrand, qui fut pape même avant d’être pape, dit-il quelque part avec une merveilleuse étendue d’expression, tant les hommes virent de bonne heure sur le front prédestiné de ce moine, soit dans la paix du cloître, soit dans l’orage des affaires où il fut mêlé, la place naturelle de la tiare. […] Une foi ardente et profonde se mêlait en lui à l’instinct du pouvoir.

409. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire de la Révolution »

Ils buvaient, le glaive en main, et l’éclat sinistre du fer se mêlait à celui des cristaux. […] Un grand cri royaliste, auquel la personne de cette reine, si belle encore, mêlait peut-être de l’amour, tonne et vibre.

410. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme au XVIIIe siècle » pp. 309-323

Ils mêlaient leur personnalité ardente et jeune aux récits qu’ils faisaient, et qu’ils ne voulaient pas impersonnels. […] Ainsi formées, secrètes et profondes, impénétrables et invulnérables, elles apportent dans la galanterie, dans la vengeance, dans le plaisir, dans la haine, un cœur de sang-froid, un esprit toujours présent, un ton de liberté, un cynisme de grande dame, mêlé d’une hautaine élégance, une sorte de légèreté implacable.

411. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Oscar de Vallée » pp. 275-289

Ils furent comme la semaille des dents de ce nouveau dragon de Cadmus… Il y eut, dans des camps d’opinions différentes : Suleau, Loustalot, Camille Desmoulins, Mallet-Dupan, Rivarol, Champcenetz, Mirabeau lui-même qui s’en mêla, et Mirabeau Tonneau, son frère, et, parmi eux, le plus noblement désintéressé des partis qui souillaient tout alors, le plus pur, le plus probe et le plus sublimement énergique, André Chénier, qui mourut pour l’avoir été… Tels furent les premiers clairons de cette légion de trompettes qui sonnèrent la diane de la Révolution, et qui continueront, je le crains bien, de sonner l’anarchie, jusqu’à la trompette, qui les fera taire enfin, du jugement dernier ! […] Au xixe  siècle, Chateaubriand, Lamennais, Bonald et Louis Veuillot, qu’il faut nommer après eux, eurent du christianisme dans leur génie, et le Christianisme tient tant de place dans les choses humaines qu’il est impossible à des hommes qui se mêlent aux choses de ce monde de s’en passer sans se diminuer, quand ils sont les combattants de tous les jours dans la bataille des idées, en attendant celle des hommes !

412. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Créqui »

L’éditeur, qui brouillait en lui les temps comme il brouillait les sexes, a pu mêler à ces Souvenirs, recueillis dans des chiffonnières dont il avait volé ou emprunté la clef, les langages et les passions d’une autre époque. […] Si cette femme d’aperçu, et qui savait si nettement styler sa pensée, avait cru jamais que juger les hommes c’était donner le sacre de la confiance à ces grands enfants qui se permettent la fatuité ou se prendre pour eux de compassion intellectuelle, nous n’aurions jamais retrouvé ce volume de lettres, savoureux et sain, où la rigueur de la raison et la brusquerie de la vérité se mêlent délicieusement la svelte légèreté du tour et au charme calmant d’une religieuse tristesse.

413. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « G.-A. Lawrence »

De grands défauts s’y mêlent et les ternissent, des défauts que n’avait pas Byron et qui étonnent d’autant plus dans Lawrence, qu’ils l’abaissent également dans son talent et dans son dandysme, lui qui est de la même race que ses types et que ses héros ! […] aussi bien dans les peintures que sait oser une imagination si sauvagement amoureuse de l’énergie que dans la conception des autres personnages de ce roman, de si grande proportion humaine, et qui mêlent leur destinée à celle de Guy Livingstone.

414. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice de Guérin »

Pour lui, pour Maurice de Guérin, — et celui qui écrit ces lignes a été profondément mêlé à sa vie, — l’émotion désintéressée que donne le génie et la perfection de son langage étaient bien au-dessus de tous les profits, toujours grossiers et vains, de la renommée ! […] Chateaubriand est le Poussin du paysage ; pourquoi mêle-t-il des ambitions étrangères à son magnifique talent de peintre des choses naturelles ?

415. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « G.-A. Lawrence » pp. 353-366

De grands défauts s’y mêlent et les ternissent, des défauts que n’avait pas Byron et qui étonnent d’autant plus dans M.  […] aussi bien dans les peintures que sait oser une imagination si sauvagement amoureuse de l’énergie que dans la conception des autres personnages de ce roman, de si grande proportion humaine, et qui mêlent leur destinée à celle de Guy Livingstone.

416. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

Et sans doute, il nous est difficile d’empêcher que la conscience se mêle à la science, lorsque l’objet que nous proposons à notre étude scientifique est justement une idée morale. […] — Justement parce qu’ils sont pressants, et parce qu’on ne peut les résoudre sans mêler des « jugements d’ordre pratique avec des jugements d’ordre théorique, des préférences morales avec des constatations, nous risquons, en nous y attaquant aussitôt de perdre de vue la distinction du réel et du désirable.

417. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIX. Panégyriques ou éloges composés par l’empereur Julien. »

Enfin, ceux de Julien ont été beaucoup plus éloignés que les autres, du ton de la bassesse : souvent aux éloges il mêle des vérités utiles ; et telle est la malheureuse faiblesse de l’orgueil et du pouvoir, que pour instruire les hommes puissants, il faut les louer, et qu’on est presque toujours forcé d’étayer chaque vérité d’un mensonge. […] Qu’il confie à chacun la place qui convient à son caractère ; les emplois militaires à l’âme forte et au courage mêlé de prudence ; les magistratures, à la justice tempérée par l’humanité ; les premières places de l’empire, à ceux dont le mérite, composé des deux autres, unit la vigueur du caractère aux vertus.

418. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXIV. Siècles de barbarie. Renaissance des lettres. Éloges composés en latin moderne, dans le seizième et le dix-septième siècles. »

De grandes passions se mêlèrent à un zèle sacré. […] Il n’en est pas de même, quand, chez un peuple, l’esprit d’imitation et un goût puisé chez les modèles, succèdent tout à coup et presque sans degrés à la barbarie : alors les écrivains n’ont ni la vigueur originale et brute dont ce goût d’imitation les éloigne, ni les beautés solides et vraies auxquelles ils n’ont pas eu le temps d’atteindre, et qui sont presque toujours le résultat de la philosophie et des passions mêlées ensemble.

419. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

Loin d’avoir abandonné le monde, l’enthousiasme, l’ardeur de l’âme, autrefois dispersés sur les intérêts nombreux de la vie publique et souvent corrompus par les mauvaises passions qui s’y mêlent, s’étaient épurés, et brillaient d’une flamme plus vive dans le foyer caché du sanctuaire. […] On ne peut donc en douter : à cette race sans nom, et ce peuple multiple et mêlé qui s’étend si loin du nord au sud de l’Amérique, appartient déjà le meilleur des enthousiasmes patriotiques, celui qui tient à la liberté comme au sol, et qui a respiré l’amour des lois avec l’air natal.

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