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820. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le roi René »

Mais une conscience, même doublée de science, ne suffisait pas pour écrire l’histoire de cet homme, qui fut un si beau et si héroïque jeune homme, de ce brillant roi de batailles et de pas d’armes qui avait du François Ier avant François Ier, et dont l’Histoire, qui l’a trop bonhomisé, ne se souvient que comme d’un « roi d’intérieur » et d’un vieillard occupé de frivolités littéraires et de bric-à-brac artistique. […] Seulement, le Roi René est trop exclusivement pour elle un bon vieux poète baguenaudant avec toutes les curiosités artistiques de son temps, s’endormant dans le radotage d’une petite Capoue littéraire. […] J’ai désigné plus haut les livres publiés sur le roi René, auquel on revient par la pente du bibelot, de la vignette, du manuscrit illustré, de la peinture et des œuvres poétiques, ce qui, du reste, est bien la pente d’un temps d’art prétentieux, de trissotinisme et d’amusettes littéraires comme le nôtre.

821. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes et la société au temps d’Auguste » pp. 293-307

Il tient par mariage à cette Revue, et le népotisme littéraire paraît très simple aux benêts qui s’indignent le plus contre le népotisme papal… Jamais, je crois, Blaze de Bury n’aurait été vu à cette vitrine de la Revue des Deux-Mondes s’il en avait été réduit à son mérite personnel. […] Il n’est que ce que j’ai dit qu’il était : — un dilettante et un dandy littéraires. […] Voici peut-être ce qui s’est passé… Le dilettante littéraire rassasié, dégoûté de cette vieille histoire romaine racontée par des copistes et des professeurs, et de l’éternelle sensation théâtrale qu’elle nous cause, a voulu se donner un petit quart d’heure de plaisir en la descendant, sans cérémonie, de son socle, et en la racontant comme il la voyait dans les vaporeux souvenirs de ses lectures, dans les raisonnements et quelquefois les rayonnements de son cerveau ; car c’est là surtout qu’il l’a vue.

822. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

I Puisqu’il n’y a pas de livres nouveaux, et que l’anémie littéraire continue, il faut bien se replier vers les réimpressions… En voici une toute récente d’un livre publié en 1870 par les deux Goncourt, et que celui qui reste des deux frères a remanié avec l’ambition d’atteindre aux qualités les plus solides de l’historien, après en avoir eu les plus brillantes… Et il faut lui savoir gré de ce noble effort ! […] C’est elle qui a conduit, en peu de temps, à ce système bête et grossier qu’on appelle, en ce moment, « le Naturalisme », et qui passera dans le rire et dans le mépris, comme tous les systèmes littéraires. […] Certainement, MM. de Goncourt sont infiniment au-dessus de ceux-là qui se réclament d’eux, à cette heure, comme de leurs initiateurs et de leurs chefs littéraires.

823. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVIII. Lacordaire »

Lacordaire vient d’entrer à l’Académie, la Critique littéraire doit se trouver heureuse d’avoir un livre du nouvel académicien à examiner. […] Pour ma part, il m’est impossible d’admettre comme un livre, dans le sens véritablement littéraire du mot, les Conférences de Notre-Dame, improvisées, on nous l’a dit assez, en insistant sur ce mérite, et si remaniées depuis, à main et à tête reposées, en vue de la publication. […] Les titres littéraires du P. 

824. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Raymond Brucker. Les Docteurs du jour devant la Famille » pp. 149-165

III Ce livre des Docteurs du jour domine de beaucoup la littérature, et c’est même ce qui en expliquerait les défauts littéraires, car il en a, que la Critique est en droit d’y relever. […] » — Raymond Brucker, qui n’a jamais bénéficié de rien, et pour lequel l’Église, dont il fut le serviteur fidèle et héroïque jusqu’au dernier moment, n’a rien fait, et qu’elle a laissé mourir de faim ou à peu près ; Raymond Brucker, dont les grands hommes littéraires du temps où il fut littéraire comme eux, avec autant de talent qu’eux, diraient peut-être, s’ils vivaient encore : « Je ne connais pas cet homme-là », comme saint Pierre l’a dit de Jésus-Christ, aura-t-il, à propos de ses Docteurs du jour, ce bonheur d’outre-tombe, qui ne sera un bonheur que pour nous qui l’avons aimé, de quelques rumeurs flatteuses autour de son tombeau ?

825. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Christophe »

Si le sang littéraire s’épuise en nous, qu’au moins les dernières gouttes en soient pures et que l’érudition les fortifie ! […] Il n’y a plus là ni d’auteur, ni de personnalité littéraire : il y a l’homme de l’idée et le serviteur de l’Église et de la Vérité. […] Dans l’ordre littéraire et historique, il doit se passer présentement le même phénomène que dans l’ordre de l’action et de la charité, où les Sociétés de Saint-Vincent-de-Paul et de Saint-François-Régis ont fait plus de bien que n’en auraient fait des Œuvres exclusivement ecclésiastiques.

826. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

Des bégueules littéraires, des vierges sages, nous savons pourquoi, ont pu reprocher à Dargaud la vivacité de ses couleurs quand il a écrit l’histoire. […] Car après le jugement sur la philosophie de l’écrivain il y a le jugement sur son œuvre, et c’est une loi de l’esprit humain que les chefs-d’œuvre littéraires diminuent d’autant de beautés qu’il s’y trouve de vérités méconnues. […] Seulement, cela dit, nous n’entendons ne parler que d’effets d’art et de résultats littéraires quand nous reprochons à Dargaud de n’être pas, dans la réflexion de son esprit, le catholique qu’il est dans la spontanéité de ses sentiments.

827. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Achille du Clésieux »

Mais quant à ce qu’on appelle un succès littéraire, — un violent retentissement de publicité, — j’en suis moins sûr que d’un succès intime, avec l’abaissement universel de nos esprits et de nos mœurs. […] C’est l’accent du cœur qui le met à part des poètes d’un temps où l’âme se retire de toutes choses devant la sensation et la matière envahissantes… Naturellement, un pareil poète doit être plus ou moins méconnu à une époque vide et pédante où lord Byron lui-même paraît affecté, Lamartine vague, et Alfred de Musset négligé ; car c’est là l’opinion qui commence à courir parmi ceux qui se croient les forts de la littérature actuelle, parmi les poètes matérialistes et réalistes de notre décadence littéraire. […] Je constate seulement que cette langue n’est plus dans la préoccupation littéraire, et que s’il y a un contemporain qui la rappelle encore, mais en la faisant vibrer plus fort que Racine, c’est Lamartine, le souverain des poètes français du xixe  siècle, et peut-être de tous les temps.

828. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Prosper Mérimée. » pp. 323-336

Le bon moment pour naître, l’étonnant fanatisme, cela allait jusque-là, d’un critique célèbre, sans enthousiasme, mais, au contraire, habituellement difficile et hargneux, l’influence de la Revue des Deux-Mondes, aussi réelle alors qu’elle est nulle maintenant, tout, jusqu’à la rareté de ses publications, — rareté qui tenait même à la nature de son talent, — facilita la fortune littéraire de M.  […] Dans la vie littéraire (il ne peut être question ici que de celle-là), il lui donna encore de ces petits procédés sans bonne foi, qu’on pourrait appeler les coquetteries de la publicité. […] Athée, comme on l’était au xvie  siècle et comme l’était Stendhal, son maître, il affecte la scélératesse dans le ton et ne serait pas fâché, j’en suis sûr, de passer pour un petit Borgia littéraire.

829. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Les pages qui suivent ne sont pas de critique, mais d’analyse psychologique ou littéraire. […] En cherchant bien, on grossirait la valise littéraire de M.  […] Il aime le nouveau, en art, comme dans la vie, et jamais il ne recula devant l’aveu de ses goûts littéraires, les plus hardis, les plus scandaleux pour l’ignorance ou pour la jalousie. […] Randon avait été l’une des voix de l’anarchisme littéraire, au temps où de futurs académiciens démolissaient (très peu) la Société au moyen de phrases élégantes et de sarcasmes spirituels. […] En même temps qu’ils continuaient une période littéraire, ils en ouvraient une autre, fraternellement avec Gustave Flaubert.

830. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Comme 1789, je le répète, créa notre patrie politique, 1830 a créé notre patrie littéraire. […] Victor Hugo sera successivement le Mirabeau, le Vergniaud de la Révolution littéraire ; il deviendra enfin le Danton de l’Ode et le Napoléon de l’Épopée. […] Considérez toute cette vie littéraire. […] Il est assez étonnant qu’il ait eu beaucoup d’estime littéraire pour Charles Baudelaire. […] Eh bien, ne serait-il pas logique qu’un phénomène analogue se produisît dans l’ordre littéraire, que deux littératures, ennemies hélas !

831. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

Le reste, c’est ces trois unités si agaçantes qui ont injecté toute la critique de nos trois siècles littéraires comme un poison. […] Les esprits, à cette époque, ne sont évidemment pas tournés du côté des spéculations de la critique littéraire. […] Cependant, j’aime bien les époques de grande critique, qui sont en même temps des époques de grande création littéraire. […] L’immense majorité des plagiats littéraires sont involontaires. […] C’était le morceau qu’attendaient les habitués, qu’ils accueillaient avec un mouvement de curiosité, qui décidait de la réussite ou de la chute de l’ouvrage, selon qu’il était jugé bon ou mauvais, et qui était mis, le lendemain, dans les journaux littéraires et dans les revues littéraires du temps.

832. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Il aimait sa maison, et aussi, vu du dehors et de haut, le mouvement de l’existence littéraire. […] Les conditions utiles à une fortune politique le deviennent à une fortune littéraire. […] L’usage des dédicaces — les honneurs du pied littéraires — en marquent une survivance ou une conscience. […] Il lui eût suffi que tout son public littéraire tînt, le mardi, dans son salon. […] Tout écrit littéraire implique l’espoir d’un rayonnement dans l’espace et d’un rayonnement dans la durée.

833. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

— « Je suis un homme, disait-il, je puis avoir un jour autre chose que l’illustration littéraire : ajouter au titre de grand écrivain celui de grand citoyen, est une ambition qui peut tenter aussi ! […] … lui qui aspirait secrètement à la gloire littéraire ! […] Mon frère n’avait encore donné aucune preuve de talent littéraire, et il avait sa fortune à faire ; il était donc rationnel de désirer pour lui un état moins problématique que celui de littérateur ! […] Il ne se plaignit pas toutefois dans ce réduit, où il trouvait la liberté et portait de belles espérances que ses premières déceptions littéraires ne purent éteindre. […] … » ……………………………………………………………………………………………… « Je t’envoie deux nouveaux ouvrages ; ils sont encore fort mauvais et fort peu littéraires surtout !

834. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Ç’a été un peu comme ça, tout le long de ma carrière littéraire, mais dans ce moment-ci vraiment la malchance a pris des proportions grandioses, une intensité suicidante. […] Ce ne sont plus des femmes, ce sont des morceaux littéraires. […] Vendredi 22 juillet Un détail sur le goût littéraire de Gambetta. […] À ce récit, et au plaisir littéraire que Daudet y mettait, Gambetta le contempla, un moment, avec un regard tout plein d’une immense commisération, et qui semblait lui dire, qu’il était condamné à rester toujours le Petit Chose. […] Mais je passe toute la journée à relire sa maladie et sa mort, écrites, jour par jour, heure par heure, et cette relecture me décide à donner le morceau tout entier, dans le troisième volume de notre Journal, en dépit de la pudeur de convention commandée à la douleur, du cant littéraire infligé au désespoir : c’est vraiment une trop éloquente et une trop réelle monographie de la souffrance humaine.

835. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

C’était évidemment là que l’Italie littéraire et poétique devait éclore, car l’esprit humain cherche par instinct les terres libres pour dérober, comme l’aigle, ses œufs à la tyrannie. De plus, il y avait dans le sang toscan, écoulement du vieux sang étrusque, une sève non encore épuisée de génie littéraire et de génie artistique. […] C’est là le sujet de la violente objurgation que nous adressent, depuis quelques mois, les nombreux journaux littéraires de l’Italie. […] Nous savons bien que nous choquons, en parlant ainsi, toute une école littéraire récente (en France comme en Italie) ; cette école s’acharne sur le poème du Dante sans parvenir à le comprendre, comme les mangeurs d’opium, en Orient, s’acharnent à regarder le firmament pour y découvrir Dieu. […] » Voltaire parlait des aménités littéraires de son temps ; qu’aurait-il dit de celle-là ?

836. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Des esprits dont l’admiration s’est gauchie à se trop presser d’admirer ont avancé que ce livre marqua le genre d’Audin comme historien, de même que son Essai sur le Romantique révéla sa forme littéraire ; et rien n’est plus faux d’une double fausseté. […] On sent là-dedans, il est vrai, un tempérament littéraire ; mais, encore une fois, s’il a vie, il n’est pas en possession de son organisation tout entière. […] Vitet, et il n’était pas, comme ces messieurs, de la coterie du Globe, de ce conseil des Dix littéraire qui faisait et défaisait les réputations. […] Travail de fourmi littéraire, cela est fin, charmant, remué, inépuisable ; mais ce genre de talent, qui décompose une existence, ne la recompose jamais, tandis qu’Audin en dresse la synthèse sur les analyses et les atomes de l’érudition et de la recherche. […] Les formes littéraires sont épuisées.

837. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

La traduction de l’Iliade par Mme Dacier, publiée en 1711, amena une des guerres littéraires les plus vives et les plus curieuses qu’on ait vues, et comme il s’en produit quelquefois en France quand les esprits sont reposés et qu’on n’a rien de mieux à faire. […] Cependant celui-ci se décida à faire imprimer cette Iliade versifiée et réduite à douze chants ; elle parut pour la nouvelle année de 1714 avec un Discours sur Homère, où il déclarait tous ses sentiments ; et c’est alors, à ce moment de la paix d’Utrecht, la ville et la Cour étant de loisir, que la guerre littéraire éclata. […] Il accordait à l’Académie française la gloire un peu exagérée d’avoir la première institué la discussion littéraire dans ces termes philosophiques, et d’avoir conclu de l’admiration mal fondée que l’on avait eue pour les vieux philosophes, qu’il fallait examiner de plus près celle que l’on avait encore pour les anciens poètes : « L’ouverture de cette dispute, disait-il un peu magnifiquement, a achevé de rendre à l’esprit humain toute sa dignité, en l’affranchissant aussi sur les belles-lettres du joug ridicule de la prévention. » C’était par là que Terrasson croyait qu’il nous appartenait de devenir littérairement supérieurs aux Latins, lesquels, supérieurs de fait aux Grecs, n’avaient jamais osé en secouer le joug. […] [NdA] On lit ce mémoire dans la Bibliothèque française ou Histoire littéraire de la France (1735), t. 

838. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

Satisfait d’avoir fait preuve de savoir et d’esprit dans ce tournoi tout littéraire, et d’avoir obtenu un grand succès auprès des mondains, Bailly paraît avoir tenu médiocrement, dans la suite, à son opinion scientifique ; et lorsqu’il publia en 1787 le Traité de l’astronomie indienne et orientale, comme supplément à sa précédente Histoire, il se trouva que son peuple primitif y figurait très peu, et qu’il ne se distinguait plus guère des Indiens, des ancêtres et auteurs de ceux d’aujourd’hui. […] Bailly était certes le moins charlatan des hommes, mais c’était le plus littéraire des savants. […] Je considérais que j’avais joui jusqu’alors d’une réputation littéraire qui m’avait coûté des années à acquérir, et que, placé dans un jour et dans un éclat que je n’avais point cherché, j’allais la perdre en un moment. […] Mais ce n’est point cette dernière partie de la vie de Bailly qui nous appelle et que nous étudions : je me suis borné à donner quelque idée de son caractère, et à y faire saillir une veine littéraire et d’imagination jusqu’ici moins en vue qu’il ne convenait.

839. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

J’ai, en tout ceci, plus particulièrement en vue les Grecs, qui furent la grande source originale et le premier modèle du beau littéraire dont les Latins ne sont que la seconde épreuve, fort belle encore, mais retouchée. […] Jullien d’un air tout à fait pénétré et plein de commisération à notre égard11, rien n’est assurément plus fâcheux dans la critique littéraire que ce parti pris d’admiration, qui nous fait louer, même contre notre sentiment, les œuvres consacrées par l’enthousiasme ou la vénération des siècles. […] Études littéraires et morales sur Homère ; première partie, l’Illiade, par M.  […] Matthew Arnold, précédemment cité dans le courant de cet article, est le fils du célèbre docteur, et s’est placé lui-même au premier rang parmi les critiques littéraires de son pays.

840. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

En remontant à quelques années en arrière, je rencontre sur Corneille quelques ouvrages littéraires qu’il n’est que juste de rappeler quand on parle de lui : Et d’abord le Corneille et son temps de M.  […] C’est plaisir et soulagement, je l’avoue, au milieu des surcroîts et des surcharges de l’érudition contemporaine dont on profite tout en se sentant accablé parfois, de rencontrer un esprit, supérieur, habitué à généraliser et à simplifier, qui prend les choses littéraires par le côté principal et qui les offre comme il les voit, sans diminution, sans exagération non plus ni engouement, qui en sait ce qu’il faut en savoir, qui en ignore ce qui n’est bien souvent qu’inutile et incommode, et qui vous conduit vers le fruit d’une saine lecture par la large voie du bon sens. […] Revenant aux jugements littéraires et aux études remarquables, de date plus ou moins ancienne, mais qui ont également paru dans ces derniers temps, je trouve dans le volume intitulé : Poètes du siècle de Louis XIV, par M.  […] Corneille et son temps, étude littéraire par M. 

841. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

Joachim Du Bellay le savait bien, lui qui dans son Illustration et Défense de la Langue, où il proposait en 1549 tant d’innovations littéraires, n’a pas voulu les compliquer de l’emploi de l’orthographe nouvelle de Louis Meigret qu’il approuvait en principe, mais qu’il savait trop dure à accepter des récalcitrants. […] Pourquoi donc ne l’introduirait-on pas dans la nouvelle édition du Dictionnaire, tout en indiquant qu’il ne saurait s’employer justement que dans un sens un peu technique, dans un sens administratif, plutôt que dans la langue littéraire ? […] Quoiqu’il semble appartenir tout entier à la langue économique et financière (ce qui est déjà quelque chose), il peut trouver son emploi heureux dans la langue littéraire. […] Sans doute il a raison et mille fois raison ; mais depuis quand a-t-il suffi dans les choses humaines, et même dans les choses littéraires, d’avoir cent mille fois raison ?

842. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Les mémoires et rapports dans lesquels il a consigné les résultats de son enquête et de son administration, publiés depuis plus de soixante ans, ne sont pas sans offrir un certain côté littéraire ; administration à part, ils sont agréables de diction et élégants. […] Suard, en publiant en 1803 toute cette partie littéraire et morale du Voyage de Malouet, avait probablement la pensée de faire opposition, — une opposition de salon et très mitigée, — au succès d’Atala : mais que peut un dessin juste et fin en regard d’une éclatante et passionnée peinture ? Il en fut de cette sage et pure esquisse de Malouet, en présence du météore littéraire de Chateaubriand, comme il en avait été en politique de ses opinions modérées à côté des foudres de Mirabeau. […] Une anecdote, racontée dans le Voyage à la Guyane, soulève une petite question littéraire.

843. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

L’année 1789 arrive, et nous apporte les institutions nécessaires au développement de cette éloquence : et c’est un des faits considérables de l’histoire littéraire du temps. […] Mais, séparée des faits de l’histoire, saisie seulement dans ses formes littéraires, l’éloquence révolutionnaire perd singulièrement de sa valeur. […] Et enfin, ils le répètent moins bien : le malheur de l’éloquence révolutionnaire est que sa puissante expansion coïncide avec une période d’affaiblissement littéraire. […] En un mot, elle n’est pas du tout l’équivalent littéraire des caractères et des faits de la Révolution.

844. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

Mais, dans le livre, je ne fais pas de polémique ; je m’efforce d’être ceci qu’on ne trouve plus nulle part : un critique littéraire. […] Voici, assez curieux et assez original, un roman de critique littéraire. […] D’après l’abbé Delfour, le critique est surtout un « informateur littéraire », un reporter spécial, qui, pour nous dispenser du voyage, va voir ce qui se passe dans les livres. […] » Et chez le fils de l’immortel mort depuis peu et oublié depuis longtemps, il salue le « digne héritier d’une grande dynastie littéraire ».

845. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — III. (Suite et fin.) » pp. 128-145

Tout ce qu’on appelle variétés littéraires était rare, en effet, chez lui ; il se permettait peu les distractions. […] Si j’osais traduire cette impression dans une langue toute littéraire et pour des littérateurs, je dirais : Zumalacárregui, c’est son André Chénier : Il est des temps, disait-il (28 juin 1835), où avec de médiocres facultés on peut devenir rapidement fameux ; nous sommes, au contraire, une de ces époques où tout conspire contre le développement des grands caractères, et où le travail des sociétés n’amène à la surface que des natures dégradées. […] Vous avez fait de moi une espèce de partisan politique et littéraire, faisant la guerre en conscience pour le compte de ses opinions qui se trouvent celles du grand nombre, sans prendre ni recevoir de mot d’ordre d’aucune autorité organisée ; ennemi du pouvoir, sans engagement avec l’opposition légale, ni même avec les affiliations populaires. […] Par là, du moins, toutes guerres cessées, toutes animosités éteintes, il mérite des regrets de ceux même qu’il a combattus, et une place fort distinguée dans l’histoire littéraire.

846. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Bailly intitulé Lumen, avec ce sous-titre Féerie chatoyante, tout entier dans la nouvelle manière et, pour cela même, devenu date en cette évolution littéraire. […] Mon Dieu, il y aura toujours des poètes, mais je ne crois pas qu’ils ajoutent beaucoup à notre gloire littéraire. […] L’influence du barde n’a pas été d’ailleurs uniquement littéraire ; elle a été aussi nettement sociale, dans un sens national et humain que la politique donne rarement à ce mot. […] — … Que dites-vous des différents groupes littéraires ? […] La Prose — j’entends la prose « écrite », la prose littéraire — c’est précisément ce vers sans rime ni mesure classique dont vous me parlez.

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