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2543. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Ossian fils de Fingal I Vers l’année 1762, un phénomène littéraire étrange apparut comme une comète dans le monde ; les imaginations en furent ébranlées, ainsi qu’elles avaient pu l’être à l’apparition des poëmes homériques en Grèce ; l’histoire en fut éclairée, les traditions, jusque-là verbales, se renouèrent, et la poésie servit de témoin aux récits des plus antiques légendes.

2544. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Cependant, pour indispensable que soit aujourd’hui cette intervention de la machinerie dans l’art, nous ne pouvons nous empêcher, wagnéristes, de l’être complètement ; nous rêvons un moment où le triple objet de l’œuvre wagnérienne sera réalisé : l’œuvre idéale, qu’il a prodigieusement ébauchée et qui sera pure de toute machinerie décorative, une psychologie et un roman complets ; le théâtre idéal, non celui de Bayreuth (seul possible, aujourd’hui), mais le théâtre adorablement réaliste de notre imagination ; enfin, le public idéal, capable de recréer cette œuvre, sans nul besoin de trucs électriques ou musicaux, par seule lecture, par seule volonté.

2545. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

À bas l’imagination.

2546. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Instinct, raison, perception, conception, mémoire, imagination, sentiment, volonté, etc., etc., tout cela ne peut être que des groupes conventionnels de correspondances.

2547. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Parmi ceux-ci, les montres, ces petits chefs-d’œuvre de l’art industriel avec les délicates imaginations de leur riche décor, sont parmi les bibelots que j’aime le mieux.

2548. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Quant à moi, j’ose en toute confiance remonter en imagination des milliers de mille générations dans la suite des temps écoulés, et je vois dans un animal rayé comme un Zèbre, mais peut-être d’une organisation très différente sous d’autres rapports, le parent commun du Zèbre, du Couagga, de l’Âne, de l’Hémione et de nos races diverses de Chevaux domestiques, que du reste ces dernières descendent d’une ou de plusieurs souches sauvages92.

2549. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

Pour peindre les hommes dans un ouvrage d’imagination, il faut les connaître ; faits comme ils sont, on ne doit pas se flatter de les deviner, tant pis du moins pour qui les devine : le commerce du monde est donc absolument nécessaire à cette portion des gens de lettres.

2550. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Brunetière lui-même, le chantre attitré de Bossuet, est contraint à cet aveu : « … De n’avoir point senti ce qu’il y avait de force ou de vertu morale dans le protestantisme, d’avoir sacrifié, si je puis ainsi dire, au rêve d’une unité toute extérieure, purement apparente et décorative, la plus substantielle des réalités, voilà ce que l’on ne saurait trop reprocher à Louis XIV…88 » Alors que les protestants, poursuivis l’épée dans les reins, s’enfuient par toutes les frontières, pour échapper au sort commun, Louis XIV écrit en Hollande et en Angleterre « qu’il n’y à point de persécution, que les protestants émigrent par caprice d’une imagination blessée 89. » La Maintenon spécule sur les terrains que les persécutés étaient contraints, pour s’enfuir plus vite, de vendre à vil prix.

2551. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre IV. De la pluralité des temps »

Ici encore la théorie de la Relativité prend au premier abord un aspect paradoxal, qui frappe l’imagination.

2552. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « Remarques finales. Mécanique et mystique »

C’est un appel constant au sens par l’intermédiaire de l’imagination.

2553. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Les sourcils écartés, clairsemés, un peu irréguliers à leur naissance, mais non sans douceur, indiquaient dans leur courbe une imagination qui ne se rabaisse. […] Plus sûr qu’il est que nul autre de la provenance de ses originalités, il tente d’ériger une personnalité en trompe-l’œil, au premier abord et pour les yeux ignorants, personnalité bien tranchée et à vous arrêter — c’est bien tel et non tel autre comédien qui parcourt emphatiquement une menue scène. — Chez l’artiste de premier ordre, au contraire, quelle que soit sa force de production ou sa franchise d’exécution, la certitude existe que ce moi profond, dont il est déjà doué et dont il n’a nul besoin de se pourvoir, est un vaste champ d’expériences, champ sans limites, où certes il trouvera longtemps à inventorier, et à glaner ; il sait que toute transposition de son âme amènera sans qu’il y tâche un autre décor d’imagination, et que son originalité se renouvellera de sources vraies, d’autant plus vraies qu’il ne fera qu’en éclaircir le flot, sans en être entièrement le créateur. […] Des notations d’abord d’objets et, relatifs à ces objets, des mots étranges, des noms propres bizarres qui ont frappé la jeune imagination, le grossissement de la nature, le rapport que l’enfant fait de tout, arc-en-ciel, fleur ou mer, à ce qui le touche le plus immédiatement, et puis les livres et les images, leurs fastes, et leur sentimentalité, et l’instinct éveillé chez l’enfant, un petit monde visionnaire qui se lève en lui et que détruit la parole bienveillante et ennuyeuse de la sollicitude des parents. […] Et dans Vie (qu’il faut comprendre « rêveries »), une deuxième épreuve du même sujet, du dernier poème d’enfance, l’éveil de l’imagination par les textes : les dépassant, s’exaltant, les devinant, le cerveau de l’enfant invente des vies, des drames, il sort de sa personnalité étroite, suscite des personnages ; un brahmane, créé par lui, lui explique les proverbes ; les pensées se pressent ; il existe pour lui des minutes radieuses et multiples d’intuitions géniales. « Un envol de pigeons écarlates tonne autour de ma pensée. » Le roman de jeunesse, et la satiété d’avoir trop vite deviné la vie, et de s’être répandu en romans mentaux, et un peu de dégoût : « je suis réellement d’outre-tombe et pas de commissions. » Les Villes font partie du défilé des féeries qu’a voulu Rimbaud : luxe de mirages, paysages de rêve.

2554. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

C’est un de ces êtres hybrides, moitié surnaturel et moitié humain, qui nous intéresse à peine, tant il répugne à notre imagination. […] Une émotion délicieuse lui piquait les yeux ; car malgré ses quarante ans passés, la vie politique si desséchante, il gardait encore, par un bénéfice de nature, beaucoup d’imagination, cette sensibilité de surface qui trompe sur le fond vrai d’un caractère. […] Parlant une langue si riche que l’anglais et l’allemand réunis fournissent à peine les mots-racines, imagination colorée, les poètes anonymes de l’époque antérieure au christianisme chantent les voyages lointains et fabuleux, l’âpre mêlée où les coups s’échangent et enfin la première des épopées chevaleresques, dont le héros Béowulf n’est surpassé en générosité et en hardiesse ni par Lancelot ni par Roland. […] alors, vous applaudiriez tous aux plates et serviles créations de l’élève incapable, suivant naïvement les errements de ses anciens, sans originalité, sans recherche du vrai, sacrifiant aux conventions, ne voyant pas la nature avec ses yeux, mais avec son imagination, comme l’ont vue les autres.

2555. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Mais quoique ce soit un poète, chez nous, qui ait eu ce pouvoir, quoique ce doive être un autre poète aussi, Boileau, qui, pour la seconde moitié du siècle, achèvera et confirmera l’œuvre de Malherbe, il ne faudrait pas conclure, de cette espèce de préséance et de priorité de la poésie sur la prose, qui se rencontre également à des époques tout autrement primitives, que le caractère poétique, un caractère d’imagination et de fantaisie, dominera et s’imprimera à l’ensemble de la littérature.

2556. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Est-ce l’esprit, l’imagination, la critique, l’art de composer, le talent de peindre ?

2557. (1925) La fin de l’art

Le Code bride l’imagination des magistrats ; aussi, dans ces documents, ne l’évoquent-ils qu’à la fin, quand ils ont épuisé leur provision d’histoire, de littérature ou de philosophie.

2558. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XI : Distribution géographique »

Comme on le voit, pour accepter l’hypothèse des nuages cosmiques, issue de l’imagination inventive de M. 

2559. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Et quand on songe que Gœthe, cet arrangeur, avait derrière lui, pour s’en inspirer, cette ribambelle et cette ribaudaille de démons : lago, Lovelace, Tartufe, don Juan, Valmont, le Satan de Milton et celui de Byron dans la Vision du Jugement, tous les dandies de la terre, Voltaire dans Candide et Talleyrand pendant quatre-vingts ans d’existence, on est tout étonné que Gœthe, ce tondeur sur tous les œufs pour en rapporter quelque chose, n’ait pas tondu sur ces œufs-là, qui sont des œufs d’autruche, et ne nous ait pas donné mieux que son grand diable, déhanché et maigre, qui ne paraît à l’imagination éveillée, pour peu qu’elle ait une conception juste du diable, qu’un Crispin, — un Crispin de l’Enfer, écrasé par ce nom de Méphistophélès que le polisson ose porter !

2560. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

À leur tour les parnassiens, imbus des doctrines positivistes en faveur vers 1859, combattent les romantiques pour les mêmes principes. « Vos Orientales et vos Guzla, disent-ils, sont des créations instantanées de votre imagination folle.

2561. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

J’avais beau essayer de faire comprendre à cet infortuné jeune homme que toutes les imaginations d’Hegel étaient relatives, trop impatient, rebuté par la complexité des phénomènes, éperdu à cause de l’intuition intellectuelle que Hegel prétendait lui fourrer dans l’esprit, il se raccrocha éperdument à une seule proposition. […] Il pourra observer aussi le souffreteux dont les sens fatigués ne s’émeuvent qu’aux imaginations d’ordure et de sang et celui qui, haïssant son corps, s’est confiné dans la Thébaïde d’un rêve de Dieu.

2562. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

97 La Fontaine sait tous les termes spéciaux, tout le détail le voit et le fait voir, nomme les frelons demandeurs, et les abeilles « leurs parties. » C’est par cette précision et cette minutie que des oeuvres d’imagination deviennent des documents d’histoire. « On traduit la cause » devant une certaine guêpe ; les témoins viennent, reviennent, sont entendus ; la cause est remise à huitaine, et jusqu’à plus ample informé.

2563. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Mais déjà, sans doute, quand il écrivait cette dernière phrase, une idée encore plus hardie s’élaborait dans l’esprit de Léon XIII, et déjà son active imagination voyait s’ouvrir les perspectives de l’Encyclique du 20 juin 1894 sur l’Unité catholique : Pendant que notre esprit s’attache à ces pensées, — de réconciliation des Églises orientales avec l’Église latine, — et que notre cœur en appelle de tous ses vœux la réalisation, nous voyons là-bas, dans le lointain de l’avenir, se dérouler un nouvel ordre de choses, et nous ne connaissons rien de plus doux que la contemplation des immenses bienfaits qui en seraient le résultat naturel.

2564. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Vous avez l’imagination fastueuse, avec quelque chose, parfois, d’un peu concerté. […] Vraiment cela est sinistre, cela rappelle les imaginations d’Edgar Poe… Mais je découvre tout à coup que ce bruit vient des globes de lumière électrique.

2565. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

On doit, au contraire, comme nous le verrons bientôt, donner libre carrière à son imagination ; c’est l’idée qui est le principe de tout raisonnement et de toute invention, c’est à elle que revient toute espèce d’initiative. […] Nous pouvons suivre notre sentiment et notre idée, donner carrière à notre imagination, pourvu que toutes nos idées ne soient que des prétextes à instituer des expériences nouvelles qui puissent nous fournir des faits probants ou inattendus et féconds. […] Mais, quelles que soient les variétés de phénomènes infinis que nous concevions sur la terre, en nous plaçant par la pensée dans toutes les conditions cosmiques que notre imagination peut enfanter, nous sommes toujours obligés d’admettre que tout cela se passera d’après les lois de la physique, de la chimie et de la physiologie, qui existent à notre insu de toute éternité, et que dans tout ce qui arriverait il n’y aurait rien de créé ni en force ni en matière : qu’il y aurait seulement production de rapports différents et par suite création d’êtres et de phénomènes nouveaux. […] On peut fixer exactement les deux termes extrêmes de la nutrition, mais si l’on veut ensuite interpréter l’intermédiaire qui les sépare, on se trouve dans un inconnu dont l’imagination crée la plus grande partie, et d’autant plus facilement que les chiffres se prêtent souvent merveilleusement à la démonstration des hypothèses les plus diverses.

2566. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

Platner remarquait déjà que son aveugle était, à cet égard, bien plus expert que nous, et cela est vrai de tous les aveugles ; chez quelques-uns, la perfection du toucher a dépassé toute imagination.

2567. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

La verve comique y manquait, c’était de l’imagination plus que du ridicule ; le Français ne l’aime pas.

2568. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

On trouve, en les considérant dans leur entier, bien des inconséquences et de fausses voies, mais aussi des sillons lumineux, des saillies franches, des traces sincères : moins honorables que les précédents, ils sont plus intéressants et touchants ; l’imagination les aime ; je les vois surtout romanesques et poétiques.

2569. (1928) Les droits de l’écrivain dans la société contemporaine

Autrement dit, leur désenchantement ne vient pas de ce que l’acteur est un homme vulgaire (il l’est ou ne l’est pas), mais de ce qu’elles l’ont auparavant défiguré en imagination.

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