Funck Brentano, qui devrait croire à la philosophie puisqu’il la professe, le sophiste n’existe point en soi… Le sophiste, c’est toujours un philosophe dépravé qui déprave une philosophie antérieure, qui abuse de cette philosophie, qui en fausse le principe, les idées, le langage, et cela est vrai si la philosophie est elle-même une vérité.
Elle a eu de grands poètes, de grands artistes, des hommes politiques à la manière de Machiavel, comme furent Talleyrand et Fouché, des observateurs scientifiques de la force de Cuvier et de Geoffroy Saint-Hilaire, et par-dessus tout elle a eu Napoléon, un homme taillé comme un diamant de plusieurs côtés différents, et par tous jetant le feu et la lumière, — Napoléon, l’homme le plus étonnant dans le fait qui ait peut-être jamais existé ; — mais de métaphysicien égal à ces esprits supérieurs dans sa spécialité transcendante, il faut le dire, pour apprendre aux philosophes à être modestes, le xixe siècle et la langue française n’en ont point encore.
l’accent tout puissant d’amertume et d’ironie de l’Ajax poétique qui s’appelle lord Byron ; mais il n’en a pas moins l’accent du désespoir de la vie, sans lequel nulle grande poésie ne peut exister, dans ce monde où l’idéal entrevu nous fuit de toutes parts !
Sans Chénier, qui lui souffla sa flamme et qui fut sa Muse secrète, il n’existerait pas.
Les paperasses poétiques du vieux reître, qu’il emportait, comme Camoëns son poème, non à la nage, dans les mers furieuses, mais à travers le feu des guerres et des partis, s’étaient finalement englouties dans la terre la plus prosaïque qui ait jamais existé, à Genève, dans le cabinet de la famille qui a donné le jour à Tronchin.
Pour les âmes passionnées, il n’existe dans la nature que de grandes masses ; tout ce qui est fin disparaît ; mais lui, toujours tranquille, et à la distance qu’il fallait de tout, avait le loisir d’observer les nuances, et de les peindre.
Le Palais-Royal n’existait pas encore, on était en train de le bâtir pour Richelieu. […] » voilà bien un mot de vieillard, — et une nouvelle touche de tragi-comédie. — Aux yeux de Rodrigue, il n’existe qu’une maîtresse au monde, et qu’une femme sous le ciel ! […] Y en eut-il jamais un plus beau depuis que le théâtre existe ? […] Devons-nous donc nous étonner, après cela, qu’un petit bourgeois sans fortune, un petit avocat du barreau de Rouen, se sentant poète et ayant besoin de loisirs pour composer et écrire de belles œuvres, acceptât d’être domestique lui aussi, ou attaché à la maison, du ministre tout-puissant dont les libéralités, quoique fort minces et achetées si cher, mais surtout la protection, c’est-à-dire le désarmement, lui paraissaient indispensables pour pouvoir continuer à écrire et à exister ? […] Tout cela aujourd’hui n’existe plus pour nous.
De doctes religieuses enseignaient dans les couvents ce qu’avaient décidé les cours d’amour : à savoir que le véritable amour ne saurait exister entre les époux. […] Je ne l’ai vue nulle part, et je ne sais si elle existe encore. […] La première édition de l’Iliade, publiée à Florence par le Grec Chalcondyle, est de l’année 1488, par conséquent près de deux siècles après que l’Allighieri avait cessé d’exister. […] Dante charge Farinata de dire au père de Guido que celui-ci existe encore. […] Ce qu’il y a de bizarre, c’est que ce préjugé contre l’intervention directe des femmes dans l’enseignement et dans la politique n’existe nulle part ailleurs que chez nous, qui nous croyons de bonne foi le peuple le plus chevaleresque du monde.
Dans une de ses poésies écrites loin de Milly, Lamartine avait parlé par erreur d’un lierre qui tapissait le mur de la maison ; il n’en existait point : par une inspiration délicate, sa mère planta le lierre absent et fit du mensonge une vérité. […] Avant d’assigner aux œuvres leur place dans l’histoire du développement des idées ou des formes littéraires, il n’est peut-être pas superflu de s’assurer que ces œuvres « existent », d’en expliquer et d’en démontrer, s’il se peut, l’excellence ; et ainsi le bon professeur de rhétorique prépare modestement les voies au critique transcendant. […] Tout chante, tout m’instruit Que l’abîme est comblé par ta magnificence… Ainsi, dans le Rig-Véda : «De sa splendeur, il remplit l’air… De cette même clarté, Dieu purifiant et protecteur, tu couvres la terre, tu inondes le ciel, l’air immense, faisant les jours et les nuits, et contemplant tout ce qui existe… » Dans l’Hymne du soir : Il me semblait, mon Dieu, que mon âme oppressée Devant l’immensité s’agrandissait en moi, Et sur les vents, les flots ou les feux élancée, De pensée en pensée Allait se perdre en toi. […] Maintenir un Dieu personnel, afin d’échapper à l’obscurité du panthéisme et aux difficultés qu’on trouve à fonder sur le panthéisme une morale ; mais ne point séparer l’existence de Dieu de celle du monde, afin d’éviter que ce Dieu ne se rétrécisse en une personne humaine ; par suite, regarder le monde comme co-éternel à Dieu, concevoir la création comme continue et toujours actuelle, car elle est pour nous la condition même de l’existence de Dieu ; considérer enfin l’univers et la vie à tous ses degrés, depuis la vie inorganique jusqu’à la pensée humaine, comme un système de signes de plus en plus clairs et conscients et comme la parole même de l’Être divin : parole balbutiante et ignorante chez les créatures inférieures, mais qui, chez l’homme, commence à savoir ce qu’elle dit… À quoi il faut ajouter ce corollaire : — Si Dieu n’existe qu’à la condition d’agir, de créer, en retour les choses n’existent qu’en tant qu’elles signifient Dieu et dans la mesure où elles le signifient ; autrement dit, elles n’existent qu’en tant qu’elles sont pensées par l’homme, puis qu’elles n’ont de sens que dans son cerveau.
Faut-il un si effroyable appareil de tonnerre et d’éclairs pour punir des crimes qui n’existent point ? […] Rien de tout cela n’existe plus à la scène. […] Alceste est la création la plus étonnante de Molière, car il n’existait pas à la cour du grand roi. […] Si elle n’existait pas, et au degré inouï auquel Molière a cru la devoir pousser, il n’y aurait plus de pièce. […] Une idée n’y existe qu’à la condition d’être revêtue d’une forme dramatique.
Sans doute, il a été commis beaucoup d’injustices, essuyé beaucoup de malheurs durant ces soixante-dix-huit années ; mais ce sont encore celles, depuis le siècle des Antonins, oit il a été le moins difficile et le moins périlleux d’exister. […] lui disait-on ; le sommeil reviendrait peut-être, et cela du moins repose. » — « Les pensées, répondait-il, viennent alors en foule, le mieux encore est de se lever, de se mettre à paperasser ; c’est encore la meilleure manière d’exister 129. […] Il y a une disposition sentimentale qui nous fait compatiraux infortunes des autres hommes et nous empêche au moins de leur nuire sans intérêt pour nous-mêmes ; cette disposition n’existait point dans Saint-Just ; cette fibre était déjà paralysée chez lui à vingt-six ans. On ne trouve dans ses écrits aucune trace de sensibilité ; ils en sont plus dépourvus encore que ceux même de Robespierre, auxquels ils sont très-supérieurs sous les autres rapports ; car, si l’on veut être sincère, il faut avouer aussi que Saint-Just n’était point sans talent, et qu’il apercevait quelquefois, avec une précision assez forte, sinon l’ensemble de l’organisation sociale, du moins quelques-unes des relations qui existent entre les éléments dont elle se compose.
Il existe à la cour dans ce moment-ci une grande préoccupation de Marie-Antoinette. […] Il y a bien le rationalisme, le scepticisme, mais le matérialisme pur, cela n’existait plus, il y a quelques années… Et dernièrement, lors du prix de 20 000 francs et de la discussion au sujet de Mme Sand, n’a-t-il pas dit que le mariage était une institution condamnée, que ça n’aurait bientôt plus lieu… « Oh ! […] « Et puis, il a une chose à son compte, dont je lui sais le plus grand gré et que j’estime beaucoup en lui, c’est que toutes les fois qu’il a parlé du moyen âge, il a rendu justice à l’élément germain qui existe incontestablement dans notre race. […] …” Il ne comprenait rien à la réalité, elle n’existait pas pour lui… Il avait des mots superbes.
Dans Notre-Dame de Paris, nous retrouvons en pleine maturité toutes les qualités littéraires qui n’existaient qu’en germe dans les trois ouvrages précédents. […] Éthel, Ordener, Marie, d’Auverney, Pepita, ont disparu sans retour, et fait place à des figures habilement dessinées, j’en conviens, mais dont le modèle n’existe nulle part. […] Un tel acteur, si toutefois un tel acteur a jamais existé, est indigne d’occuper la poésie. […] Avant Shakespeare et Rabelais, le grotesque n’existait qu’à l’état d’ébauche ; et ce qui le prouve victorieusement, c’est la mesquinerie des œuvres que nous a laissées Aristophane. […] Dans la première moitié du xviie siècle, le caractère de Didier n’existait pas et ne pouvait exister.
Ô oui, ce qu’il existe de tenue dans la taverne de l’Envol ! […] V., au sortir d’un restaurant imaginaire, au bras d’une Compagne qui n’a jamais existé et suppliante en pleurs — arrestations suivies de la comparution (du même tonneau) devant des commissaires de police (ejusdem farinæ) qui relâchent l’être de raison susindiqué, à cause de… son beau talent. […] Car s’il existe une antithèse, c’est bien entre ces deux noms : Marceline Desbordes-Valmore, Charles Baudelaire, Rimbaud, sous les formes différentes, percevait déjà à merveille la même âme douloureuse et comme une parenté dans ces deux génies si dissemblables à première vue. […] À mi-chemin — ou à peu près, — de notre voyage, nous fûmes obligés de nous arrêter à une sorte de tourniquet et de payer un droit de péage qui n’existe plus. […] Blanc sur blanc, comme chez Whistler et quelques autres peintres, si modernes, qu’ils semblent n’exister que dans l’avenir !
Les deux classes existent, dressées, aujourd’hui comme hier, en face l’une de l’autre. […] Ces idées n’existent pas pour moi. […] Sait-on combien affirmèrent catégoriquement que cette fenêtre n’existe pas ? […] Enfin, le grand principe est qu’il n’existe chez l’homme, comme le dit Lucas-Championnière, aucune égalité devant la douleur. […] La sensation élémentaire de la vie, la simple conscience d’exister, ne devrait-elle pas être la base de tout plaisir ?
Le nommer, s’il existe, semblerait une flatterie ; mieux vaut laisser à la voix publique le soin de le reconnaître et de le désigner. […] La preuve que cette loi du progrès continu n’existe pas pour les lettres, c’est que celles-ci changent de voie, et que le pis pour elles serait de s’attacher à une méthode toujours la même. […] Elle existe, nous la constatons en tâchant de l’expliquer. […] X. indépendamment du nom qu’on a pu lui donner, existe comme ont existé Louis XI ou Cromwell. […] Dans La Joie fait peur, la même préoccupation n’existe pas.
Il analysait sa pensée et vérifiait que le mot, pour dire ce qu’il voulait dire, existait. […] Il est un de ces rares esprits pour lesquels le monde extérieur n’existe à peu près pas. […] Voici le ciel, la terre et tous les éléments ; il n’existe rien qui ne soit composé de ces éléments. […] À présent, même si la voix qui a couru les mers mentait et si Pan vit encore, c’est exactement comme si Pan n’existait plus. […] On le chercherait en vain : c’est qu’il n’existe pas.
Et le monde ouvrier aussi, (à part), qui se tient, qui existe, le système ouvrier, le langage ouvrier ; et aussi le monde paysan, (à part), qui se tient, qui existe, le système paysan, le langage paysan. […] Qui se tient, qui existe. […] On déclara qu’il n’existait pas, que c’était un nom forgé. […] Trouver un nom qui existe, tout le monde peut en faire autant. Trouver un nom qui n’existe pas, ça c’est le fin jeu.
Elles ont fait ainsi la fortune de ces genres qu’on appelle « communs », dont le caractère est de n’exister qu’autant qu’il existe un public pour les y encourager. […] — Parce que l’on croyait alors qu’il existe une relation nécessaire entre la perfection des œuvres et l’observation des règles ou des lois des genres dont elles relèvent. […] Il n’existe qu’une édition de ses Œuvres complètes, en deux volumes in-4º, Paris, 1837. […] Il existe des Œuvres de Fontenelle une édition moderne, sous la date de 1817. […] On n’a de Dancourt que son théâtre, dont il n’existe aucune édition « critique », ni même complète.
Et d’abord il est bon de savoir que depuis la rivalité dramatique qui s’était introduite dès 1830 entre De Vigny et Hugo, rivalité qui n’exista jamais que dans l’esprit du premier, la prétention de De Vigny était d’avoir eu son développement unique, indépendant, isolé même, en dehors de tous les autres poëtes de sa génération, et cette prétention à une lignée à part et à une originalité sans pareille, il l’avait fait accepter par Planche qui, déjà brouillé avec Victor Hugo, avait dans un article de la Revue des Deux Mondes caressé en ce sens la susceptibilité du chantre d’Éloa. […] Il me restait encore un de ces livres, je ne pouvais le mieux placer que dans vos mains ; j’aurais voulu y joindre Éloa, mais elle n’existe plus, même chez moi.
Et cependant elle existe encore ; elle existe parce qu’elle aime, parce qu’elle est mère.
Baudelaire, on savait qu’il existait quelque part, dans les entrailles fécondes de cette ville qui contiennent tant de germes pour l’avenir, un poète original, un esprit bien trempé, trop poète ou trop artiste selon quelques-uns, mais dont les qualités vivaces et surabondantes devaient faire diversion à l’ennui et à la médiocrité générale. […] En littérature, en art, tout ce qui existe a sa loi ; je suis à cet égard fataliste comme un Bédouin.
Ne cherchons pas, et contentons-nous, en dépouillant ces deux définitions hostiles de ce qu’elles ont de niais, d’en faire jaillir deux grandes vérités, savoir : qu’il n’y a réellement pas de romantisme, mais bien une littérature du dix-neuvième siècle ; et en second lieu, qu’il n’existe dans ce siècle, comme dans tous, que de bons et de mauvais ouvrages, et même, si vous le voulez, infiniment plus de mauvais que de bons. […] Certes, il existe en ce moment plusieurs autres poètes qui cultivent avec un juste succès les quatre genres que nous venons de citer ; mais ceux d’entre eux qui ont le plus de droit aux hommages seront les premiers à sanctionner les nôtres ; certes, nous avons des écrivains distingués qui traitent encore des genres si admirablement traités par nos grands maîtres, mais, on ne saurait trop le répéter, ce ne sont pas ces écrivains qui peuvent caractériser l’époque actuelle.
Mais ces trois dénominations, qui ont été inventées au dix-neuvième siècle, ont ceci d’utile qu’elles étiquettent d’une façon relativement précise, mais enfin assez précise, trois genres littéraires, ou plutôt trois mentalités littéraires qui ont toujours existé depuis le commencement de la littérature telle que nous la connaissons. […] Donc la définition est mauvaise ; mais enfin elle existe, elle est usitée et La Fontaine y répond encore.
Elle se croit la divinité même, la seule divinité qui puisse exister pour les hommes de ce moment sublime ! […] Le talent n’existe pas sans la passion, et la passion, qui lui donne son élan, lui donne son entraînement aussi… Or, le mâle et simple auteur des Origines de la France contemporaine n’a voulu entraîner personne.
… Je sais bien que les Réalistes, dont Flaubert est la main droite, disent que le grand mérite de Flaubert est de faire vulgaire, puisque la vulgarité existe. […] Demandez-vous, en effet, ce qu’il est, cet enragé descripteur, qui ne cesse jamais d’exister en dehors de cette description incessante ?
Il y a plus de vingt ans que j’ai l’honneur de la connaître et que j’ai affaire à elle ; que, dans mes études de Port-Royal, j’ai occasion de la rencontrer à chaque instant, de me dire et de me redire en quoi elle diffère par le caractère et le tour d’esprit de sa sœur la mère Angélique, la grande réformatrice du monastère ; que j’ai l’habitude de recourir à ses lettres, à celles dont il existe à la Bibliothèque impériale et à l’Arsenal des recueils manuscrits, pour y chercher la suite et le détail des relations qu’entretenaient avec le dedans de Port-Royal les amis du dehors, les ci-devant belles dames plus ou moins retirées du monde, telles que Mme de Sablé, le ci-devant frondeur M. de Sévigné, oncle de la spirituelle marquise.