La caractéristique des époques dites classiques (surtout au siècle de Louis XIV), c’est qu’on y craignait le trivial encore plus qu’on n’y aimait le réel ; or il faut aimer le réel assez pour le transfigurer et le dégager du trivial.
Or, comme, dans l’infini des temps écoulés, toutes les rencontres possibles entre les astres d’un même amas stellaire ont dû se réaliser, il en résulte qu’il ne peut plus y en avoir aucune à craindre, et que fort probablement toutes les orbites des étoiles de notre système sont assez exactement concentriques, comme les orbites des planètes de notre système solaire.
Même lorsqu’il rattache ces états au moi qui les subit, le philosophe anglais tient à établir encore des distinctions tranchées : « Le conflit a lieu… entre moi qui désire un plaisir et moi qui crains les remords 35. » De son côté, M.
Il est haï, mais on le craint. […] Or, le gouvernement conservateur craignait et empêchait leur importation autant que possible, se rendant bien compte de l’effet funeste de cette propagande.
Je ne crains pas de dire qu’il a enfoncé plus avant que Térence, dans certains caractères. […] ne craignez-vous pas avec cette belle peinture, d’envoyer votre théatin à la comédie, ne fût-ce que pour voir comment les comédiens et les comédiennes mettent tout en feu.
Tout ce que je crains, c’est qu’elle ne faiblisse, car il y a des jours où je suis d’une mollesse qui me fait peur ; enfin, je crois avoir compris une chose, une grande chose, c’est que le bonheur pour les gens de notre race est dans l’idée et pas ailleurs… Il y a maintenant un si grand intervalle entre moi et le reste du monde que je m’étonne parfois d’entendre dire les choses les plus naturelles et les plus simples. […] « Il croit en lui plus qu’aux autres, mais au hasard plus qu’à lui-même ; les femmes l’aiment, car il les courtise ; les hommes lui sont dévoués, car il les sert ; on le craint parce qu’il se venge ; on lui fait place parce qu’il bouscule ; on va au-devant de lui parce qu’il attire. » Jules, lui, « vit dans la sobriété et dans la chasteté, rêvant l’amour, la volupté et l’orgie. […] C’est précisément cette liberté qui eût fait défaut à Flaubert dans un sujet égyptien, où il craignait d’être débordé par l’inépuisable documentation. […] Il craignait les dieux et souhaitait mourir dans sa patrie. » Ainsi Mathô n’est pas, par lui-même, un être plus compliqué que Tristan avant le philtre.
Il faut craindre le mien. […] Mais craignons qu’une discipline lui manque, car la superstition, la mystagogie, la sorcellerie apparaissent aussitôt, et des places désignées pour être des lieux de perfectionnement par la prière deviennent des lieux de sabbat. » Comme l’intelligence de M. […] Je crains qu’il y ait dans ce mot une convention artificielle et scolaire qu’on se transmet sans trop y regarder. […] Il craint, dit-il, qu’on ne recherche sa fille pour son argent.
On dit couramment d’un historien qu’il « manque de critique » lorsqu’il ne sent point la nécessité de distinguer entre les documents, qu’il ne se méfie jamais des attributions traditionnelles, et qu’il accepte, comme s’il craignait d’en perdre un seul, tous les renseignements, anciens et modernes, bons et mauvais, d’où qu’ils viennent91. […] Ce qui doit persuader ceux qui ne seraient pas sensibles à d’autres considérations de travailler honnêtement en histoire, c’est que le temps est passé, ou peu s’en faut, où l’on pouvait, sans avoir à craindre des désagréments, travailler mal. […] C’est le principe des tables de concordance de Bacon ; il est à craindre qu’il ne donne pas plus de résultats. — Le vice de tous ces procédés est d’opérer sur des notions abstraites, en partie arbitraires, parfois même sur des rapprochements de mots, sans connaître l’ensemble des conditions où se sont produits les faits.
— Mais c’est ce que je crains !
Taine qui, dans son admiration pour le psychologue, qu’il ne craignait pas d’égaler d’autre part à Shakespeare et à Saint-Simon, n’ait cependant formulé des réserves quand il en est venu à juger sa politique : « En politique », dit-il, « Balzac n’a fait qu’un roman… » J’imagine qu’un lecteur de 1902, et qui n’aurait jamais ouvert la Comédie humaine, en aborde l’étude après avoir constaté cet accord des critiques d’il y a cinquante ou vingt-cinq ans sur les prétendues fantaisies sociologiques de son auteur. […] Je crains bien qu’ici, mon cher ami, vous et tous ceux qui reprochent aux traditionalistes de ne pas aimer la « démocratie », vous ne cédiez à un préjugé, d’autant plus inconscient qu’il a des apparences de générosité, contre ces classes laborieuses auxquelles, pour ma part, je refuse le droit de gouverner l’Etat, parce qu’elles y sont incompétentes. […] Bainville ajoute fort justement : « Nous avons voulu tranquilliser ceux de nos amis qui craignent que l’abandon du mot démocratie fasse tort à notre cause. […] Nous croyons que de cette restauration, au sens latin du mot, des énergies françaises, une oligarchie recrutée et vivante sortirait tout naturellement, — puisque vous semblez craindre que le terme d’aristocratie ne fasse équivoque. — Nous croyons que cette oligarchie, le « patriciat » d’Auguste Comte, à la fois fixée par l’hérédité et renouvelée sans cesse, comme l’oligarchie anglaise, par l’accession des supériorités et la rentrée des cadets dans le rang, serait l’organe de sagesse et de fierté nationales dont le pays a tant besoin.
Je crains d’avoir quelquefois introduit entre ces opinions une cohésion factice, qui leur donne peut-être une signification plus doctrinaire, plus absolue que celles qu’elles ont en réalité. […] Il avait démontré que le présent seul existe, que, par conséquent, il est absurde de craindre l’avenir, la mort surtout : cela ne l’empêcha pas de s’enfuir devant le choléra, qu’il eut la bonne fortune d’éviter. […] On entendrait la grande voix de l’abbé Taconet s’écrier, en montrant le crucifix à Claude Larcher tout près à retourner à sa Colette : « Croyez-moi, personne n’en dira plus que celui-là sur la souffrance et sur les passions, et vous ne trouverez pas le remède ailleurs. » Et ce serait là le triomphe complet, définitif du moraliste sur le psychologue, qui n’aurait plus qu’à disparaître dans la contrition de ses erreurs… Mais ce ne serait aussi qu’une impression fugitive : bientôt, je le crains, comme Hubert Liauran aimant encore sa Thérèse qu’il méprise, on se laisserait reprendre par le charme de ces pécheresses trop belles pour être sauvées, par les subtilités de l’auteur trop spécieuses, trop profondes même quelquefois pour qu’on puisse les écarter.
. — Il ne craignait pas pour lui-même cette bataille. — Il ne faisait point cas — de l’inimitié du ver, — de son labeur, ni de sa valeur. » Et cependant il était triste et allait contre sa volonté, car « sa destinée était proche. » Il vit une caverne, « un enfoncement sous la terre — près de la vague de l’Océan, — près du clapotement de l’eau, — qui au dedans était pleine — d’ornements en relief et de bracelets. — Il s’assit sur le promontoire, — le roi rude à la guerre, — et dit adieu — aux compagnons de son foyer » ; car, quoique vieux, il voulait s’exposer pour eux, « être le gardien de son peuple. » Il cria, et le dragon vint jetant du feu ; la lame ne mordit point sur son corps, et le roi fut enveloppé dans la flamme.
Âge triste et morne, amusé par des divertissements extérieurs, opprimé par une misère plate, qui souffre et craint sans consolation ni espérance, situé entre l’esprit ancien dont il n’a plus la foi vivante, et l’esprit moderne dont il n’a pas la science active.
Il est à craindre qu’un poète ne puisse juger un autre poète avec une équité constante.
Et le mardi, comme on craignait une syncope, toute la cour, médecins et gentilshommes étaient aux écoutes dans l’antichambre.
20 avril Ce voyage que nous craignions, que nous avons fait par conscience, par dévouement à la littérature (Madame Gervaisais), c’est singulier !
vous êtes d’une famille qui ne craint pas d’entrer dans la chambre d’un pestiféré !
Nous concevons qu’on pourrait dire : — Il y a dans des changements trop fréquents de décoration quelque chose qui embrouille et fatigue le spectateur, et qui produit sur son attention l’effet de l’éblouissement ; il peut aussi se faire que des translations multipliées d’un lieu à un autre lieu, d’un temps à un autre temps, exigent des contre-expositions qui le refroidissent ; il faut craindre encore de laisser dans le milieu d’une action des lacunes qui empêchent les parties du drame d’adhérer étroitement entre elles, et qui en outre déconcertent le spectateur parce qu’il ne se rend pas compte de ce qu’il peut y avoir dans ces vides… — Mais ce sont là précisément les difficultés de l’art.
Dans toutes les passions, il saisit, avec une prédilection marquée, ce qu’elles renferment d’abaissant et de dégradant ; il y fait des stations les plus longues par préméditation ; il ajoute, surajoute et craint toujours que ce ne soit incomplet.
Richepin n’a pas craint d’appeler un Saint-Simon paysan), La Moussière et Le Tourbier, par M. […] Quand éclata, il y a quelques années, la tourmente naturaliste, on put craindre un instant pour la fragile clientèle de ce romancier.
Sans cette excitation constante qui est donnée par l’aiguillon de l’inconnu, sans cette soif scientifique toujours renaissante, il serait à craindre que le savant ne se systématisât dans ce qu’il a d’acquis ou de connu. […] Les uns ne veulent pas admettre que le cerveau soit l’organe de l’intelligence, parce qu’ils craignent d’être engagés par cette concession dans des doctrines matérialistes, les autres au contraire se hâtent de placer arbitrairement l’intelligence dans une cellule nerveuse ronde ou fusiforme pour qu’on ne les taxe pas de spiritualisme.
Ne craignez rien, je serai court. […] Cependant je ne crains pas d’affirmer que les deux genres qui se prêtent le plus au développement des grandes individualités, ce sont la guerre et la philosophie. […] Voilà une erreur que nous n’avons pas à craindre.
Aussi l’auteur ne craint-il pas d’avancer que son histoire du Nord est plus étendue, plus complette, que toutes, celles qui ont été écrites, & que c’est la seule qui offre l’ensemble de cette partie de l’Europe.
En France, il ne sera célèbre qu’après sa mort, quand on pourra admirer les livres étonnants qu’il enfanta et qu’on ne craindra plus de donner un prestige dangereux à cet ennemi de « l’Ordre ».
Il est à lui seul une réponse à ceux qui craignent comme à ceux qui espèrent peut-être de voir la France disparaître.
Attiré par tout ce qui se fane et disparaît, Rodenbach craint la lumière, le mouvement, la vie. […] Pollux La terre entière exulte et baise tes pieds nus Avec la bouche en feu de ses foules ardentes ; Laisse apaiser enfin tes angoisses grondantes, Renais : l’heure est unique et je me sens au cœur Tant de force assurée et de pouvoir vainqueur Qu’il n’est rien pour nous deux, au monde, que je craigne, Je tiens le sort en main : je suis maître et je règne !
Cet usage s’est conservé en Flandre, en Holande, et dans le Nord : on fait l’essai, c’est-à-dire, qu’avant que de vous présenter le vase, on en boit un peu, pour vous marquer que vous pouvez en boire sans rien craindre. […] Notre il dans ces façons de parler répond au res des latins : (…), la chose avoit été proche de la crainte : c’est-à-dire, il y avoit eu sujet de craindre. (…).