En tenant compte de la distance, d’après la parallaxe adoptée pour cette étoile, il résulte des données précédentes que l’éclat absolu de α du Centaure est double de celui du Soleil (dans le rapport de 23 à 10). Wollaston a trouvé que la lumière de Sirius est, pour nous, 20 000 millions de fois plus faible que celle du Soleil : son éclat réel, absolu, serait donc 63 fois plus grand que celui du Soleil, si, comme on le croit, la parallaxe de Sirius doit être réduite à 0″, 230. […] Les étoiles, par leur changement de place relativement à la Terre, servent à motiver les pas que notre système planétaire lui-même fait en s’avançant dans l’espace absolu.
Dans Tristan et Isolde, l’indétermination historique est presque absolue ; il en est de même dans Parsifal, en dépit des considérations données par Wagner sur l’architecture du temple du Gral et le costume des chevaliers. […] C’est un chef-d’œuvre au sens absolu du mot, car la beauté de l’idée poétique s’unit à une perfection déformes et à une simplicité mélodique inusitées dans l’œuvre de Wagner. » Cet ouvrage, en résumé, est curieux comme l’expression, très fine et très sûre, de la façon dont l’œuvre de Wagner apparaît à l’élite de notre public musical français contemporain. […] Il dépense des millions tous les ans en achats de tableaux et de sculptures et en créations et dotations de musées, et toujours on nous ressasse les oreilles de l’influence sur le goût et sur la culture du peuple que ces choses doivent exercer ; il n’en est rien cependant, — « lorsque l’art allemand se releva de sa profonde décadence à la fin du siècle passé, il n’y avait point de musées ; aujourd’hui que chaque ville en possède, la peinture allemande tombe dans la plus absolue inanité… Pourquoi du reste l’état n’achète-t-il pas des romans, et ne commande-t-il pas des valses ?
Tout art est déformateur et toute science est déformatrice, puisque l’art tend à rendre le particulier tellement particulier qu’il devienne incomparable, et puisque la science tend à rendre la règle tellement universelle qu’elle se confonde avec l’absolu. […] Si l’on n’admet pas, comme jadis, l’autorité absolue de l’usage, du bel usage, on n’a pour guide que son propre goût ; mais on aurait plus de chances de le faire prévaloir, à écrire en beau style quelques livres de forte littérature qu’à recueillir des anecdotes philologiques. […] Prévoir n’a plus un sens absolu pour le peuple ; mais nous-mêmes ne disons-nous pas, sans rougir, prédire l’avenir ?
Victor Hugo ¡atteint, au plus bas de sa profondeur, en concevant parfois des âmes géminées, partagées en deux moitiés distinctes et généralement contradictoires, par une absolue Assure, Marie Tudor, reine, est irritée contre son amant, puis se remet à l’aimer, puis commande qu’on le tue, puis le gracie. […] Lazarus, dans sa monographie sur l’Esprit et le langage, montrent que nos mots sont abstraits et absolus Le mot « arbre » ne représente aucun arbre particulier, qui pourrait être de telle grandeur et de telle disposition, mais bien un vague ensemble de masse globulaire verte placée au haut d’un grand tronc gris-brun. […] Il ne s’occupe, pas plus de voir la chose nulle sous le mot peu précis que la chose mesquine sous le mot énorme, la chose complexe sous le mot simple, la chose indéfinie sous le mot absolu, les choses vraies enfin sans désignations répétées et sans images appendues, sous les mots9.
Certes, la part de la détermination absolue est grande dans l’univers ; c’est justement pourquoi une physique mathématique est possible. […] Vous aurez fait une nouvelle répartition de l’espace et du temps, aussi légitime que la première, puisque le bloc solide a seul une réalité absolue. […] La « formalité d’avoir lieu » est simplement l’indication que l’observateur, dans son voyage d’exploration, a passé dans le futur absolu de l’événement en question, et elle est sans grande importance 49 ».
Donc rien d’absolu, rien d’à priori dans cette notion : un simple fait associé à un autre fait. […] L’expérience démontre, ainsi que le remarquent Stuart Mill et Littré, qu’il règne une telle constance, un tel ordre dans la succession de certains phénomènes moraux, qu’il est possible d’en prévoir le retour, sinon avec l’absolue certitude qui s’attache aux prévisions de l’ordre scientifique, du moins avec une très-grande probabilité. […] Aussi tout ce qu’elle fait est plein et achevé28. » Qui ne reconnaît à ce tableau les heureux moments de sa vie où il s’est senti en pleine possession de lui-même, maître incontesté, sinon absolu, dans son empire ?
L’habitude d’une domination absolue au logis avait rendu sa physionomie dure et désagréable. […] En parlant de ma personne comme je le fais, je n’y mets pas d’orgueil absolu. […] « Pour le caractère sentimental, tout se réduit, dans la théorie, à un esprit inquiet de spéculation qui penche à l’absolu dans toutes les perceptions ; et, dans la pratique, à un rigorisme moral s’opiniâtrant après l’absolu dans tous les actes de la volonté. […] Toute notion qu’elle présente est une grandeur absolue, de même que toutes les décisions qu’elle arrête ; et tel est aussi l’idéaliste digne de ce nom, dans son savoir et dans ses actes. […] Il ne se contente que des vues philosophiques qui ramènent tout savoir relatif à un savoir absolu, et qui affermit dans l’esprit humain, toute expérience en la basant sur le nécessaire.
Certes ils n’ont pas tort, si cette insouciance qui les dégoûte indique un manque absolu d’idéal, une pensée confinée tout entière dans la durée d’une existence terrestre, un cœur et un esprit absorbés par la seule matière. […] Mais il faut toujours qu’il y ait appel à un tribunal ultérieur, et le mépris absolu d’un auteur pour toute la postérité ressemble fort à un non-sens. […] Le désintéressement absolu de l’artiste, de l’écrivain et du savant lui-même n’existe pas, puisqu’ils sont hommes. […] Reconnaissons d’ailleurs que ce que nous appelons beauté absolue n’est jamais qu’une relation un peu moins inconstante, un peu moins passagère, de certains chefs-d’œuvre avec l’idée que nous avons du beau. […] Un semblable regret implique une idée naïve et pauvre de l’exacte prédétermination des talents, qui n’est guère plus satisfaisante pour l’esprit que celle de leur indétermination absolue.
Cas de conscience, querelles de ménage, légers dissentiments domestiques, voilà les ressources qui restent à cet esprit d’indépendance absolue. […] Les nuances repoussent l’esprit absolu, et celui qui a l’habitude de les observer et d’en tenir compte évite d’ordinaire les systèmes, de crainte d’aller plus loin ou moins loin que la vérité. […] Elles s’allient fort bien, il est vrai, avec la philosophie positive, mais elles supporteraient tout aussi bien l’idéalisme le plus absolu. […] Je n’aurai point la fatuité de donner l’explication qui m’est apparue au milieu des émotions de la lecture comme l’absolue vérité. […] Mais cet accord absolu n’existe pas pour Shakespeare.
Et c’est là un exemple de son penchant pour les propositions antithétiques, car au même moment il esquissait Jésus de Nazareth, le drame du Dieu qui meurt pour expier la fauta des hommes ; de même que plus tard nous voyons Tristan, la mort par amour, le pousser à créer les Vainqueurs, le renoncement absolu à l’amour. — Mais quant à tout le reste, ce n’est au fond qu’une condensation, qu’une dramatisation de vieux mythes ; un effort qu’on aurait certes tort de déprécier, surtout puisqu’il a fourni un cadre si précieux à la tragédie ultérieure. […] Nous le voyons, par exemple, jeter sur le papier — quand on le lui demande — des thèmes musicaux qui n’acquièrent leur plein développement qu’un quart de siècle plus tard, lorsque les circonstances lui permettent de faire la partition. — Je crois que pour Wagner le poème était — pour ainsi dire — une chose bien plus fortuite que la musique ; celle-ci, au contraire, était nécessaire, elle ne pouvait être autrement, elle répondait à un ordre de vérité plus vague dans un certain sens et pour lequel la fable dramatique pouvait en conséquence varier, mais de vérité plus profonde dans sa généralité, plus certaine, plus absolue. […] Houston Stewart Chamberlain, dans son article sur la traduction de la Walküre, a expliqué quelles raisons absolues interdisent à tout Wagnérien une pareille tentative. […] Wagner m’est complètement indifférente ; ce qui est plus sérieux, c’est que grâce à son absolue incapacité de comprendre une seule pensée de Wagner, de juger un seul de ses actes, il a fait du maître un portrait qui n’est que la plus monstrueuse caricature, et qui cependant repose sur des faits généralement exacts.
Quoi qu’il en soit, l’acte gratuit dans sa forme idéale serait un pont de l’ambition minuscule à la liberté, du relatif à l’absolu. […] Et Breton d’ajouter : « Le rationalisme absolu qui reste de mode ne permet de considérer que les faits relevant étroitement de notre expérience. […] Avenues insensibles d’une cité creusée au centre même de la terre, son ciel ignorant du chaud et du froid, l’ombre de ses arcades, de ses cheminées, en nous donnant le mépris des apparences, des phénomènes, déjà, nous rendaient plus dignes du rêve absolu où un Kant put sentir son esprit s’amplifier en plein vertige nouménalcc. […] La force absolue de la poésie purifiera les hommes, tous les hommes.
Nous tiendrons pour suspectes toute logique tranchante, toute doctrine trop absolue, parce que la contradiction n’est jamais une pierre de touche infaillible du vrai, et que l’abstraction est un filet trop étroit entre les mailles duquel la réalité s’écoule et fuit de toutes parts. […] Notre domaine est le relatif et non l’absolu. […] La liberté absolue de l’inspiration, si elle était possible, aboutirait en fin de compte à la barbarie et à l’anarchie littéraire. […] Était-ce beau, cette lutte héroïque du penseur pour la conquête de la vérité absolue ; et comme elle nous semblait auguste, cette petite chambre du quartier Latin, où, sous les rayons de la lampe austère, dans le silence de la nuit, au milieu de la grande ville muette qui dormait ignorante de telles angoisses, se déroulait cette grande tragédie du Doute moderne !
C’est ainsi que dans la démonstration de la première vérité, qui est l’existence de Dieu, avec les attributs principaux qui en achèvent l’idée, Charron, au lieu de s’appuyer sur le sens commun, sur le sentiment général humain si d’accord avec cette croyance, insiste bien plutôt d’abord sur les difficultés et les impossibilités de concevoir dans sa grandeur propre cette idée infinie ; il dit avant Pascal, et en termes encore plus formels, qu’il y a une sorte de négation absolue non seulement du Dieu-Providence, mais de la cause première, qui ne se peut loger « que dans une âme extrêmement forte et hardie » ; il est vrai qu’il ajoute aussitôt : en une âme « forcenée et maniaque ». […] Il a le malheur, pour un chrétien et pour un homme né depuis l’Évangile, de croire à des étages différents d’esprits, à des séparations presque absolues entre le vulgaire ou le commun des hommes pour lequel il n’a que du mépris et du dédain, les esprits moyens et médiocres qui flottent un peu au-dessus sans pouvoir assez s’en détacher, et les sages qui jouissent de la douceur suprême dans un inviolable et inaccessible retranchement.
M. de Malezieu allait être l’oracle absolu, le Pythagore de Sceaux et l’arbitre des volontés de la duchesse du Maine. […] Chez lui le manque absolu de transition est souvent un calcul de l’art.
Jean-Bon Saint-André, porté et véritablement bombardé à la Convention par un parti longtemps combattu et qui avait comme enlevé sa nomination de vive force en demandant et en obligeant de faire l’élection à haute voix, y arrivait plein d’idées absolues, de rêves de progrès et d’amélioration immédiate. […] Il s’attache à y faire une distinction continuelle entre l’instruction et l’éducation, ajournant l’une et la dépréciant même, tandis qu’il insiste sur la nécessité absolue et la priorité naturelle de l’autre.
Il ne se hâte donc point de conclure ; et ce qui l’intéresse si fort, ce qui est son histoire, celle de ses semblables, le secret de son existence et de la leur, et de toute sa destinée, il se résigne à ne le conjecturer que modestement, sans rien affirmer d’absolu aux autres, sans rien s’affirmer à lui-même. […] Il n’est ni pour la grande Église catholique hiérarchique, ni pour l’émancipation absolue et l’Église libre universelle, de même qu’en politique il n’était ni pour la forme monarchique ou aristocratique pure, ni pour la liberté démocratique et le suffrage universel.
Au reste, notre xixe siècle a présenté sur cette question de l’orthographe, et comme dans un miroir abrégé, le spectacle des dispositions diverses qui l’ont animé en d’autres matières plus sérieuses : il a eu des exemples d’audace et de radicalisme absolu, témoin M. […] Je dois pourtant faire observer, afin de mitiger ce que ces assertions paraîtraient à quelques-uns renfermer de trop absolu, que M.
Il résultait de cette séparation presque absolue, entre les études philosophiques et les occupations de l’homme d’état, que les écrivains grecs cédaient davantage à leur imagination, et que les écrivains latins prenaient pour règle de leurs pensées la réalité des choses humaines. […] Cher les Lacédémoniens, c’était le mépris de la douleur physique ; chez les Athéniens, la distinction des talents ; chez les Romains, la puissance de l’âme sur elle-même ; chez les Français, l’éclat de la valeur ; et telle était l’importance qu’un Romain mettait à l’exercice d’un empire absolu sur tout son être, que, seul avec lui-même, le stoïcien s’avouait à peine les affections qu’il lui était ordonné de surmonter.
L’analyse, c’est la révolution, la négation de la loi unique et absolue. […] Car la vie n’est pas l’unité absolue ni la multiplicité, c’est la multiplicité dans l’unité, ou plutôt la multiplicité se résolvant en unité 154.
Évidemment, on ne peut accepter ni la doctrine qui soutient l’immutabilité absolue de la morale, à laquelle les faits donnent le plus éclatant démenti, ni la doctrine de sa mobilité absolue qui n’est pas moins contredite par l’expérience.
Tant qu’on a considéré le Beau littéraire comme un absolu, ou, plus exactement peut-être, tant qu’on n’a pas tenté l’analyse du Beau littéraire, la critique a pu demeurer ce qu’elle avait été à ses débuts, ce qu’on la voit dans les « Examens » de Corneille et de ses contemporains, dans le « Spectator » d’Addison, dans la « Dramaturgie de Hambourg » de Lessing : une discussion conduite en vue de rechercher si l’œuvre étudiée s’éloigne ou se rapproche d’un certain type d’œuvre admis comme type idéal ; si elle respecte ou viole certaines règles, tirées de l’examen des chefs-d’œuvre antiques et acceptées par une convention d’ailleurs tout arbitraire ; ou même, simplement, si elle plaît ou déplaît, soit au critique lui-même, soit à un groupe de personnes qu’il croit représenter, et qu’il appelle suivant les époques les « bons esprits » les « lettrés », le « public ». […] Des écrivains, comme Villemain d’abord, puis comme Sainte-Beuve, ne se contentèrent plus de proclamer leur jugement sur les œuvres et sur les hommes, mais cherchèrent à les expliquer et s’appliquèrent à déterminer, non plus leur valeur absolue, mais leur « sens historique ». — À mesure qu’il avance dans sa carrière d’écrivain, Sainte-Beuve tend à rapprocher davantage la critique de l’histoire : ses études, dont le recueil constitue un document si précieux pour l’histoire des lettres modernes, s’écartent de plus en plus du point de vue essentiellement esthétique de ses devanciers et de ses contemporains ; ses appréciations s’entourent de notes sur les ascendants de l’auteur, qu’il examine, sur sa famille, sa ville, sa province, sa race ; puis sur son enfance, sur l’éducation qu’il a reçue, sur les influences qu’il a subies ; puis il recherche quelles ont pu être ses opinions sur les matières les plus importantes : quelles étaient ses croyances religieuses ?
Pour réparer son échec de Pologne, il prend le parti de s’attacher entièrement aux jeunes princes de Vendôme, et s’insinue si bien par son esprit, qu’il devient le maître absolu de leurs affaires, l’intendant et l’arbitre de leurs plaisirs. […] Louis XIV, avec son principe de monarchie absolue asiatique, y est jugé sans illusion ; les diverses fautes de sa politique sont marquées avec un rare bon sens.
Dès cette époque, dans des Observations sur les maîtrises, sur les règlements, les privilèges et les prohibitions qui intéressent les progrès de l’industrie (1801), il se prononçait pour une liberté sage, non absolue ; il admettait quelques restrictions, sans rien d’exclusif, et il faisait preuve de connaissances pratiques et positives. […] Droz, je l’ai indiqué déjà, répugnait à ces manières de voir absolues et qui tranchent ; même lorsqu’il se fut soumis et rangé à une religion toute pratique et précise, il aimait encore à n’en pas définir trop strictement l’esprit.
Sa cécité presque absolue le mettait dans l’impossibilité de lire et d’écrire : il n’en suivait pas moins tous les mouvements de l’assemblée, maintenait l’ordre avec fermeté, et, connaissant la place de chaque membre dont il distinguait merveilleusement le son de voix, il ne commettait jamais la moindre erreur en accordant ou refusant la parole. […] Scepticisme absolu ou miracle, il n’y a plus d’autre moyen d’en sortir.
Racine, racontait celui-ci, s’entretenait un jour avec La Fontaine sur la puissance absolue des rois. […] Racine lui voulait donner de cette puissance absolue et indéfinie.
En soutenant qu’il n’y a pas de discipline absolue dans les beaux-arts, ou du moins que cette discipline ne se compose que de quelques principes très-généraux qui se plient à d’innombrables applications, veux-je dire que tout est également beau, que toutes les époques littéraires se valent, ou encore que toutes les beautés passent à leur tour, qu’elles ne charment que pendant un temps ou doivent céder la place à des beautés nouvelles, également mobiles, également périssables ? […] La proportion de la raison et de l’imagination dans les œuvres d’art ne peut être fixée d’une manière absolue.
Ainsi la criminalité s’évade hors de la science absolue. […] Reste la vérité mathématique, la seule qui se présente comme un absolu. […] Pour que la vérité mathématique eût une valeur absolue, il faudrait que cette valeur absolue fût le caractère et des axiomes qui sont le point de départ de toute déduction mathématique et de la loi suivant laquelle est faite cette déduction. […] Tout de même, nous concevions la vérité mathématique comme un absolu, et la voici relative à « notre » science ! […] Mais il nous semblait qu’avec les simples, rudes et peut-être insignifiantes vérités mathématiques, nous touchions à un peu d’absolu.