Tel auteur, comme Corneille, nous montre sous mille faces le triomphe de l’énergie et les sentiments de fierté qu’une volonté ferme donne à une âme virile. […] Ils visent avant tout à modifier les volontés, à déterminer des résolutions et des actes.
La faiblesse de Monsieur avait bien des degrés et des étages, nous dit-il, et il nous les fait mesurer et compter un à un : Il y avait très loin chez lui de la velléité à la volonté, de la volonté à la résolution, de la résolution au choix des moyens, du choix des moyens à l’application.
Son ancien désir se réveilla donc en lui et devint une volonté. […] On était dans la Semaine sainte de l’année 1109 ; un de ceux qui le servaient lui ayant parlé de sa mort comme prochaine et comme du départ d’un convié que rappelait à lui le Seigneur vers ce temps de la fête de Pâques, il répondit : « Si telle est sa volonté, j’obéirai de bon cœur, mais s’il aimait mieux me laisser encore parmi vous un tant soit peu de temps, assez du moins jusqu’à ce que j’aie résolu une question qui m’occupe sur l’origine de l’âme, j’en serais reconnaissant, d’autant plus que je ne sais si, moi mort, un autre pourra la résoudre. » Touchante faiblesse d’un saint qui avait un coin de philosophe !
C’est à elle que Louis XIV dut les principales qualités de son âme ; cette droiture, ennemie de la dissimulation, et qui ne sut presque jamais s’abaisser à un déguisement ; cet amour de la gloire qui, en élevant ses sentiments, lui donnait de la dignité à ses propres yeux, et lui faisait toujours sentir le besoin de s’estimer ; cette application qui, dans sa jeunesse même, fut toujours prête à immoler le plaisir au travail ; cette volonté qui savait donner une impulsion forte à toutes les volontés, et qui entraînait tout ; cette dignité du commandement qui, sans qu’on sache trop pourquoi, met tant de distance entre un homme et un homme, et au lieu d’une obéissance raisonnée, produit une obéissance d’instinct, vingt fois plus forte que celle de réflexion ; ce désir de supériorité qu’il étendait de lui à sa nation, parce qu’il regardait sa nation comme partie de lui-même, et qui le portait à tout perfectionner ; le goût des arts et des lettres, parce que les lettres et les arts servaient, pour ainsi dire, de décoration à tout cet édifice de grandeur ; enfin, la constance et la fermeté intrépide dans le malheur, qui, ne pouvant diriger les événements, en triomphait du moins, et prouva à l’Europe qu’il avait dans son âme une partie de la grandeur qu’on avait cru jusqu’alors n’être qu’autour de lui.
L’esprit est ainsi conduit à découvrir des liaisons secrètes ou des contrastes imprévus entre les choses : quelquefois, par sa volonté même de les associer, il crée entre elles le rapport de sympathie ou d’antipathie.
Il semble qu’on ait affaire à une matière malléable, presque fluide, capable de s’allonger ou de se restreindre à volonté.
Il fit à sa vocation les plus grands sacrifices, et il fallut la ténacité extrême de sa volonté pour continuer les études de son choix, malgré la situation extérieurement défavorable où sont placées des études capitales, il est vrai, par leurs résultats philosophiques, mais qui n’ont presque point d’application professionnelle.
Par la volonté de marbre, il est une statue grecque ; mais la pensée lui donne, avec le mouvement, la polychromie souriante de la vie.
Elle est même, en un sens, essentiellement conservatrice, puisqu’elle considère les faits sociaux comme des choses dont la nature, si souple et si malléable qu’elle soit, n’est pourtant pas modifiable à volonté.
« Le soir de Wagram, a le droit de dire un Bonaparte, j’étais si fatigué que je suis tombé de sommeil, que j’ai dormi couché tout de mon long dans un sillon : j’étais la semence d’une admirable moisson de dévouements, de belles volontés, d’un lyrisme jusqu’alors inconnu… » En vérité, la vie morale embrasse plus de choses que cet homme savant et vénérable n’en reproduisait en lui.
Rien ne peut sauver la misérable créature que la grâce, la grâce gratuite, pure faveur de Dieu, que Dieu n’accorde qu’à un petit nombre et qu’il distribue non d’après les efforts et les œuvres des hommes, mais d’après le choix arbitraire de son absolue et seule volonté. […] La Chambre des communes demande à l’assemblée des théologiens « si les assemblées locales 399, provinciales et nationales sont de droit divin et instituées par la volonté et le commandement de J. […] Si les appels portés des anciens d’une congrégation aux assemblées provinciales, départementales et nationales sont de droit divin et par la volonté et le commandement de J. […] Si le pouvoir des assemblées en de tels appels est de droit divin et par la volonté et le commandement de J. […] Leur volonté, tendue par une foi fervente, tout employée à la vie politique et pratique, invente l’émigration, supporte l’exil, repousse les Indiens, fertilise le désert, érige la morale rigide en loi civile, institue et arme l’Église, et sur la Bible fonde l’État407.
Là, l’esprit politique des anglais amis une organisation, une volonté d’être et de se conserver respectable à tous les hommes qui ont cette notion de l’ordre avec laquelle on recommencera le monde, quand les révolutions l’auront perdu. […] L’épaisseur, si profonde pour les volontés inconséquentes et qui l’est si peu pour les esprits logiques, d’une soumission, de l’obéissance. […] C’est la résolution de faire ce dernier pas qui coûte plus que le premier, c’est l’humble et ferme volonté de se soumettre et de se réconcilier en se soumettant.
Je ne sais pourquoi quelques-uns de ses personnages et de ses tableaux m’apparaissent comme un artifice de réalité, et me semblent créés par la volonté violente d’un esprit tout plein d’une formule, au lieu de jaillir naturellement du contact de la nature, du pur et simple sentiment de vie dans l’être du romancier. […] On sent à travers toute l’œuvre de Zola qu’il a moins vécu lui-même que conçu la volonté de décrire la vie. Je veux dire que la vibration personnelle, passionnée, instinctive, ne s’y fait pas assez souvent sentir et que, par contre, la volonté de l’artiste y occupe trop de place.
Il vient à Paris, de bonne heure, non point, comme les talents vigoureux, avec le dessein d’être ceci ou cela, mais avec la volonté d’être quelque chose. […] Ils donnent ici la volonté, et là l’esprit de soumission. […] Elle est une volonté qui doit tenir compte des coutumes. […] — En histoire est-il fataliste, ou croit-il à l’action de la volonté individuelle sur le cours des destinées ? […] L’histoire est le domaine et la matière de la volonté de quelques-uns.
Tout lecteur peut être pour lui, à sa volonté, un malicieux Samson Carrasco ou même un rustre Yangois. […] L’habitude de l’analyse à outrance et de l’observation intime, en éclairant les abîmes de sa conscience, paralyse les forces de sa volonté. […] Ils la créent par leur volonté et leur labeur pratique. […] Maintenant, l’individu peut la diriger à son gré comme un bon ouvrier dirige son outil, d’une volonté ferme, froide et sûre d’elle-même. […] Rarement on a mieux exprimé de quelle façon la soumission à la volonté de Dieu doit être comprise par le chrétien.
Celui qui se nourrit incessamment de démonstrations est capable de croire, de vouloir, et de persévérer dans sa croyance et dans sa volonté ; il ne tourne pas à tout événement et à toute passion, comme cet être changeant et maniable qu’on appelle un poëte ; il demeure assis dans des principes fixes. […] Pourtant je ne murmure pas contre la main ou la volonté du ciel, et je ne rabats rien de mon courage ou de mon espérance ; debout et ferme je vogue droit en avant. […] Les croyances et les volontés, dissoutes par la tolérance universelle et par les mille chocs contraires des idées multipliées, ont engendré le style exact et fin, instrument de conversation et de plaisir, et chassé le style poétique et rude, arme de guerre et d’enthousiasme. […] Quel plaisir aurais-je retiré d’une obéissance ainsi payée, si la volonté et la raison (la raison aussi est choix), inutiles et vaines, toutes deux dépouillées de liberté, toutes deux rendues passives, eussent servi la nécessité et non pas moi ? […] Le commandement efficace et serein du Messie laisse sa trace dans le cœur qui l’écoute, et l’on se sent plus de vigueur et plus de santé morale à l’aspect de cette grande œuvre de la sagesse et de la volonté.
Mais, malgré sa volonté de déposer dans son œuvre ses émotions brûlantes, la poétesse se rend compte qu’elle ne nous laisse, hélas ! […] Ce désir, cette volonté d’immigration n’est sans doute pas éteint dans les races du Nord, qui ont peut-être besoin pour se développer totalement d’un chaud contact. […] Dans le recueil suivant : Horizons, en même temps qu’elle précisera encore davantage sa volonté de partir vers l’inconnu, la poétesse exprimera avec plus de sagesse, plus de retenue, plus de sérénité, ses états de sensibilité. […] Marie Dauguet a appliqué la formule des synesthésies, indiquée par Huysmans : elle l’a appliquée avec volonté, et avec toute l’adresse d’une femme. […] Nietzsche n’est pas sentimental, il ne pleure pas sur des Paradis perdus, mais il n’est pas pessimiste, non plus, il sait que l’homme est une lente conquête de l’homme et que la morale est, elle aussi, une acquisition, une attitude pour poursuivre et l’indice d’une volonté.
Ma volonté aussi y a été pour quelque chose. […] Dur voyage et qui demande une volonté acharnée. […] Pas de volonté en elle, ni, dans son mari, auprès d’elle. Une volonté pour la séduire, Rodolphe ; une volonté pour la dépouiller, Lheureux. […] Cependant, est-ce que la volonté n’était pas l’élément capital des entreprises ?
Comme Louis XIV, il a créé un climat, avec plus de volonté et moins de bonheur, le climat d’une littérature surveillée et contrôlée. […] Cette volonté de décor, cette tension d’un dedans vers un dehors, ont réussi. […] Elle y parvint par un effort de volonté qui la vieillit vite. […] Par volonté, réflexion, application et bon sens elle avait réussi, à peu de chose près, à devenir Parisienne, et à tenir, dans l’hôtel du banquier, près du contrôleur général, un salon fameux, le plus sérieux, le plus fréquenté par les gens de lettres. […] Elle l’éclaire en y montrant la présence et la volonté de Dieu.
Voilà la volonté. […] Où il n’y a rien, la volonté perd ses droits. […] Il faut lutter contre la volonté du sujet qui se révolte et résiste plus souvent qu’il ne cède. […] Dans les deux cas, c’est la volonté qui, anémiée, atténuée, impuissante, n’a pas rempli sa fonction. […] Cette personne morale ne subsiste, elle n’a été créée que par la domination de la volonté sur l’instinct.
L’égoïsme est ce qui ressemble le moins aux ressources qu’on trouve en soi, telles que je les conçois ; l’égoïsme est un caractère qu’on ne peut ni conseiller, ni détruire ; c’est une affection dont l’objet n’étant jamais ni absent, ni infidèle, peut, sous ce rapport, valoir quelques jouissances, mais cause de vives inquiétudes, absorbe, comme la passion pour un autre, sans faire éprouver l’espèce de jouissance toujours attachée au dévouement de soi : d’ailleurs, la personnalité, soit qu’on la considère comme un bien ou comme un mal, est une disposition de l’âme absolument indépendante de sa volonté.
Nous avons de tout temps emprunté des mots aux divers peuples du monde, mais le français possédait alors une volonté d’assimilation qu’il a négligée en grande partie.
Enfin le cliché véritable, comme je l’ai expliqué antérieurement, se reconnaît à ceci : l’image qu’il détient en est à mi-chemin de l’abstraction au moment où, déjà fanée, cette image n’est pas encore assez nulle pour passer inaperçue et se ranger parmi les signes qui n’ont de vie et de mouvement qu’à la volonté de l’intelligence.
C’est cette volonté d’aller contre les choses qui crée l’individualisme duquel on voudrait que nous fussions dupes. […] Point d’esprit, de décision, de volonté. […] À l’homme, la vie donc crée ce but, lui impose une manière d’être qui ne soit pas la volonté de son milieu. […] Une réforme qu’on impose de la seule volonté des pouvoirs et sans autre fondement que le rouage administratif reste lettre morte. […] La majeure partie des textes votés par nos représentants ne fait qu’amender des édictions premières auxquelles la volonté générale s’oppose.
Le roi et ses fils, au lieu de maintenir leur droit par les armes, se retirèrent et laissèrent l’émeute parisienne violer outrageusement la volonté de la nation. […] Il n’y a pas un exemple de plus complète trahison d’un État par son souverain, en prenant le mot trahison pour désigner l’acte du mandataire qui substitue sa volonté à celle du mandant. […] Notre société devient trop exclusivement une association de faibles ; une telle société se défend mal ; il lui est difficile de réaliser ce qui est le grand criterium du droit et de la volonté qu’a une réunion d’hommes de vivre ensemble et de se garantir mutuellement, je veux dire une puissante force armée. […] La volonté actuelle de la nation, le plébiscite, même sérieusement pratiqué, ne suffit pas. L’essentiel n’est pas que telle volonté particulière de la majorité se fasse ; l’essentiel est que la raison générale de là nation triomphe.
C’est bien le reploiement de l’être sur lui-même, mais avec une volonté de s’améliorer. […] Pour la Prusse, comme pour l’Empire, la volonté de puissance est la première vertu de l’État, ou mieux, c’est l’État même. « L’État », écrivait Treitschke, « est la puissance qui a le droit et le pouvoir de faire prévaloir par les armes sa volonté contre toute volonté étrangère… L’État est puissance. […] Il n’implique pas la volonté. […] À qui son travail peut-il appartenir, sinon au travailleur, comme ses bras, ses yeux, son corps, comme sa volonté ?