Il a peint sur place et d’après’nature les jeunes France ; il les a pris sur le vif, il les a tirés à bout portant et a épuisé en trois ou quatre tableaux la physiologie du genre. […] D’autres seront épris de la beauté du monde Et du rayonnement de la lumière blonde ; Ils resteront des mois assis devant des fleurs, Tâchant de s’imprégner de leurs vives couleurs ; Un air de tête heureux, une forme de jambe, Un reflet qui miroite, une flamme qui flambe, Il ne leur faut pas plus pour les faire contents. […] Ce n’est pas ce que la plupart y cherchent qui me frappe surtout, quoique l’idée première cependant soit aussi juste que vive. […] Est-il amoureux, par exemple, souffre-t-il : au lieu de se plaindre, de gémir, de se répandre en larmes et en sanglots, de presser et de tordre son cœur au su et vu de tous, ce qui lui paraît peu digne, — car il ne sied pas, selon lui, que le poète geigne en public, — il se contient, il a recours à quelque image comme à un voile, il met à son sentiment nu une enveloppe transparente et figurée ; il dira : LE POT DE FLEURS Parfois un enfant trouve une petite graine, Et tout d’abord, charmé de ses vives couleurs, Pour la planter, il prend un pot de porcelaine Orné de dragons bleus et de bizarres fleurs.
Capefigue à l’occasion de certains passages de son Histoire d’Europe sous l’Empire, Jomini a résumé en termes élégants et dignes la substance des précédents opuscules (février 1841) ; mais les curieux et ceux qui aiment les traits pris sur le vif ne sont point dispensés de les lire. […] On avait leurs entretiens, on avait ses propres souvenirs ; on avait ce je ne sais quoi que rien ne supplée et ne remplace : la tradition toute vive. […] En toute rencontre, il s’est montré l’adversaire déclaré et convaincu du despotisme maritime qu’exerçait alors l’Angleterre, et si ses vœux qui percent à travers ses récits sont en général pour une liberté raisonnable et pour la stabilité de l’Europe, ils ne sont pas moins vifs et constants pour ce qu’il appelle « l’équilibre maritime et le libre parcours des mers. » En ce sens, la politique de Jomini a pu être qualifiée antianglaise. […] Malgré son âge et ses infirmités, il suivait avec une vive attention tous les faits contemporains.
Lamartine, lui, était poëte encore plus qu’amant : sa blessure d’amour une fois fermée, sa source vive de poésie a continué de jaillir par plus d’endroits de sa poitrine, et plus abondante. […] La jeunesse emportée et d’humeur indiscrète Est la meilleure encor ; sous un souffle jaloux Elle aime à rassembler tout ce qui flotte en nous De vif et d’immortel ; dans l’ombre ou la tempête Elle attise, en marchant, son brasier sur sa tête : L’encens monte et jaillit ! […] Tes feux intérieurs sont calmés, tu reposes ; Mais ton cœur reste ouvert au vif esprit des choses. […] La brochure politique, ou plutôt philosophique, qu’il a publiée sur l’état présent de la société, indépendamment de ce vif désir du bien qui respire à chaque ligne, révèle en lui un coup d’œil bien ferme et bien serein au milieu des ruines récentes d’où tant de vaincus et de vainqueurs ne se sont pas relevés.
Tout ce que la parole invente de tendresse, Ce que disent les yeux et leur vive caresse, La voix, le sourire et les pleurs, De ce divin langage et des mots qu’il t’adresse N’égaleraient pas les douceurs. […] Mais que pour cette fois ce soit une belle âme, Tendre et douce à l’amour, et légère à guider, Qui de jeunes baisers rafraîchisse ma flamme, Me couvre de son aile et me sache garder ; Qui des rayons de feu que lance ma paupière Réfléchisse en ses pleurs la tremblante clarté, Et, sans orage au ciel, sans trop vive lumière, Se lève sur le soir de mon rapide été ! […] C’est court, net, vif, cursif, mêlé d’allusions promptes et frappantes, d’élans tendres et modérés. […] La Terreur est touchée en quelques grands traits : Bonaparte et le Consulat éblouissent en passant ; on voit sous quels rayons, sous quels romanesques prestiges ces souvenirs historiques se sont reflétés et nuancés dans une adolescence si vive où toutes les parties non sévères se hâtaient d’éclore.
Les Trois Quartiers, votre plus vive nouveauté comique, ne rentrent-ils pas dans ce goût-là ? […] Tout cela se suit, s’enchâsse, tout cela brille et remue à merveille, diamants ou verroteries, mais bien portés par une femme vive et mouvante : on y est pris. […] Janin, a semblé depuis quel-temps déclarer une guerre si vive à ce genre de comédie, que c’est pour elle encore un succès. […] Entre le roué spirituel, impudent, et la favorite, dont Mlle Mante représente parfaitement l’ambition assez robuste et peu ébranlable, le feu de riposte est vif, serré, nourri ; ils se rivent chacun leur clou, comme on dit, avec une prestesse et une justesse qui fait oublier l’ignoble du fond.
Mais ces éloges qui, à les serrer de près, ont leur entière justesse, n’offrent rien qui se grave assez au vif et qui caractérise assez distinctement l’auteur. […] La plus vive tentative qu’il se permit hors du cercle où nous le connaissons, est une petite comédie en un acte et en prose, représentée à l’Odéon le 16 mars 1826 : Racine ou la troisième Représentation des Plaideurs. […] Cette indifférence philosophique que Descartes réclamait comme première condition à la recherche de la vérité, il la réalise dans la pratique de la littérature ; et comme en même temps il a l’humeur vive et curieuse, la plume facile et prompte, une telle disposition neutre l’a conduit très-loin. […] Magnin : son enthousiasme, tout vif qu’il était, vint assez tard et se tempéra de ses autres qualités, de façon à moins craindre le retour.
D’autres fois, la vue d’un danger, les caprices d’un cheval fougueux que son mari se plaisait à monter ; lui causaient de si vives terreurs qu’elle en perdait connaissance… » Toutes ces recherches et ces inventions de sensibilité étaient peine perdue. […] Elle reçoit ce sacrifice comme une personne qui va recevoir sa communion. » Le mot est vif, il est sanglant, venant d’un ami intime ; mais il marque quelle était alors la disposition mystico-mondaine de la sainte future, ce que j’appelle l’amalgame, et le trait s’accorde bien avec les révélations que nous devons à M. […] En voyant cette étrangère, belle encore et fort élégante, descendre de voiture, d’un air si sûr de son fait, pour demander les objets de fantaisie qu’elle inventait, les marchands se sentaient saisis d’une bienveillance inexprimable et d’un désir si vif de la contenter qu’il fallait bien qu’on parvînt à s’entendre… Grâce à ce manège, elle parvint à exciter dans le commerce une émulation si furieuse en l’honneur de Valérie, que pour huit jours au moins tout fut à la Valérie. » On est aux regrets d’apprendre de telles choses, si piquantes qu’elles soient. […] Malgré tout, c’est chez lui désormais, et nulle part ailleurs, qu’il faut apprendre à connaître la vie religieuse de Mme de Krüdner ; journaux manuscrits, correspondance intime, entretiens de vive voix avec les principaux personnages survivants, il a tout recherché et rassemblé avec zèle, et, dans la riche matière qu’il déroule à nos yeux, on ne pourrait se plaindre, par endroits, que du trop d’abondance.
Cela entraine des conséquences graves : d’abord un dédain profond des classes subalternes, un parti pris d’écarter ce qui peut rappeler les vulgarités de la vie domestique ou populaire ; puis, entre les privilégiés admis sur un terrain de choix, un code très sévère de bienséances : peu parler de soi ; épargner l’amour-propre d’autrui ; flatter ou ménager les travers des gens en leur présence, ce qui n’interdit pas — au contraire — de les railler en leur absence ; beaucoup de tact et de circonspection ; adoucir les angles de son caractère ; mettre une sourdine aux émotions trop vives, aux convictions trop fortes ; laisser entendre ce qu’on ne peut pas dire tout haut ; s’habituer ainsi à une fine analyse des sentiments, à une psychologie déliée qui permet de reconnaître à un froncement de sourcils, à un regard, à une inflexion de voix les plus subtils mouvements du cœur. […] Elle n’ébranle pas l’âme de secousses trop vives ; elle ne la force pas à sauter brusquement d’un ordre de sentiments à un autre. […] Parlerai-je de l’éloquence religieuse énervée par la crainte de hasarder un mot vif ou un reproche blessant ; du sentiment de la nature entravé dans son expansion et peu à peu étouffé, parce qu’on daignait à peine entrevoir la campagne par les vitres d’un château et qu’il était de mauvais ton de nommer par leur nom veaux, vaches, couvée et villageois aussi ? […] On n’en pourrait certes pas dire autant du salon de Mme de Staël en son château de Coppet ; il était de teinte plus vive.
Madame de Maintenon, témoin de la scène qui se passa entre eux, en parle ainsi à madame de Saint-Géran dans une lettre du 4 mai : « Le roi eut hier une conversation fort vive avec madame de Montespan. […] Elle devait être féconde en jouissances nouvelles cette amitié vive qui, par une conversation animée, sans chicane et sans contrainte, multipliait sans cesse et variait à l’infini ses épanchements vers l’objet aimé, les lui offrait toujours avec intérêt et toujours à propos, provoquait les siens, lui communiquait une vie nouvelle, une existence inconnue, créait en lui un autre homme, avec des facultés jusque-là ignorées de lui-même, l’introduisait dans ce pays nouveau dont parle madame de Sévigné, où avec d’autres yeux il voyait d’autres choses et d’autres hommes, l’introduisait dans son propre cœur où il n’était jamais descendu, l’apprenait à s’étudier et à se connaître, lui donnait une conscience pénétrée du besoin de sa propre estime, une conscience qui lui rendit bon témoignage de lui et de son amie. […] Le roi vit pour la première fois une taille parfaite, les plus beaux bras et le plus beau cou du monde… La vive rougeur de madame de Maintenon rendait en cet instant sa figure éblouissante ». […] En se défendant par l’intérêt de l’honneur, auquel le roi pouvait opposer la promesse du secret, elle l’aurait rebuté ; en se défendant par la religion, par un devoir et par un intérêt commun ; en se défendant par un devoir qu’elle représentait comme pénible à son cœur, et comme assez contraire à son inclination pour laisser au roi l’espérance d’en obtenir l’oubli dans un moment propice, elle parvenait à la solution habile de cette grande difficulté de renvoyer le roi toujours affligé, jamais désespéré ; en prolongeant son désir, elle en faisait une passion vive et profonde.
Il a découvert sous ces traits obscurs quelque chose qui ressemble à de la beauté ; il a frappé sur cet esprit engourdi et il en a fait sortir de vives étincelles ; bref, le chevalier est amoureux, autant qu’il peut l’être, et le voilà qui se jette aux pieds de la délaissée en lui proposant d’être… sa maîtresse. […] Mais, si l’élan de la métamorphose est vif, soudain, bien senti, le bruit qu’elle fait est, selon nous, singulièrement faux et criard. […] Augier, de la verve comique, de l’esprit, de vives boutades, une belle humeur dont le nez nous déplaît parce qu’il est trop rouge, mais qui a parfois de larges éclats et de francs entrains. Le succès, nous le répétons, a été très vif, très bruyant, presque général.
Alors le masque tombe, l’accent gascon s’efface, le notaire s’évanouit ; et, du nuage que laisse sa disparition, sort un Rodin germanique aux cent yeux, aux cent bras, espion d’une police universelle, représentant d’une société, au capital de cinq milliards, ayant pour but l’achat ou la destruction de toutes les forces vives de la France, armée de glaives et de stylets dont la pointe est partout et dont la poignée n’est nulle part. […] Ce vif esprit, qui a imprimé les traces si profondes dans l’observation directe et vivante, trébuche dès qu’il aborde la philosophie ou la pensée pure. Son jugement chancelle et sa vue s’égare ; il prend des lieux communs pour des découvertes, des paradoxes obscurs pour des vérités éblouissantes, des rêves incohérents pour des idées vives. […] L’observation est poussée à vif, mais elle s’arrête juste au point où elle pourrait faire une lésion morale.
Il l’a comme sauvé au milieu des orages politiques de la vie active, à travers les luttes les plus vives qui aient mis un homme d’État en contradiction apparente avec son passé, tant il a laissé à tous, même à ses adversaires, le sentiment de sa droiture, de son haut désintéressement et de sa parfaite sincérité d’homme de bien ! […] On a de lui la Relation de son voyage en Amérique, dont quelques parties ont été imprimées : c’est un vif, amusant et spirituel récit, tout à fait dans le genre d’esprit d’alors, dans le genre français et léger. […] Après avoir dégagé la question des ambiguïtés et des arguties dont quelques orateurs l’avaient enveloppée, il arrivait au fond, il entrait dans le vif, et, acceptant le défi dans toute son étendue, il opposait doctrine à doctrine ; à celle de la Sainte-Alliance, qui met le droit tout entier du côté de la royauté, il opposa celle qui le met du côté de la justice toujours, et souvent du côté des peuples : Hé quoi ! […] Qu’il y a loin de ces nobles et vives dissertations, et des perspectives encourageantes qu’elles ouvraient, au tableau trop fidèle et hideux que traçait, cinq ans après, le même homme, chef du gouvernement, au lendemain de l’attentat de Fieschi, quand, refoulant les sentiments d’une philanthropie trop prolongée, et demandant aux Chambres des lois répressives énergiques, il disait : Et notre théâtre, messieurs !
Peut-on avoir le courage, à travers un tel pamphlet, de remarquer un certain mouvement de talent, quelque chose de vif, de rapide, de cursif, et de propre à enlever alors ceux qui ne réfléchissaient pas ? […] M. de Lally, au milieu de la nuit du 4 août, et tandis que les privilèges croulent de toutes parts, y est pris sur le fait avec son élan de sentimentalité royaliste et son exclamation de Vive le Roi ! vive Louis XVI, restaurateur de la Liberté française ! […] L’oncle friand… Mais ceci devient par trop vif.
Quand j’ai parlé de Mirabeau il y a quelques semaines, j’ai annoncé, en finissant, qu’une publication se préparait qui devait jeter la plus vive lumière sur le Mirabeau historique et définitif et sur son rôle durant la Révolution. […] M. de La Marck, à ce dîner, eut un mérite : il se sentit aussitôt un vif attrait pour Mirabeau, un attrait non pas fugitif et de simple curiosité, mais réel et qui devait aboutir à l’amitié la plus solide et la plus sérieuse. […] En le lisant, on éprouve à tout instant le sentiment vif de la beauté et de la grandeur de l’idée politique, cette beauté sévère, judicieuse, vivante pourtant, et qui aspire à se réaliser en pratique et en action. […] Il pouvait entrer quelquefois du calcul dans ces vives sorties de Mirabeau à l’Assemblée ; car enfin il lui fallait de temps en temps réparer et retremper sa popularité, son grand instrument.
L’écriture, l’orthographe, la danse, à dessiner, à peindre, à travailler de l’aiguille, elle apprit tout, nous dit Conrart, et elle devinait d’elle-même ce qu’on ne lui enseignait pas : Comme elle avait dès lors une imagination prodigieuse, une mémoire excellente, un jugement exquis, une humeur vive et naturellement portée à savoir tout ce qu’elle voyait faire de curieux et tout ce qu’elle entendait dire de louable, elle apprit d’elle-même les choses qui dépendent de l’agriculture, du jardinage, du ménage, de la campagne, de la cuisine ; les causes et les effets des maladies, la composition d’une infinité de remèdes, de parfums, d’eaux de senteur, et de distillations utiles ou galantes pour la nécessité ou pour le plaisir. […] Pour le teint, elle ne l’a pas de la dernière blancheur ; il a toutefois un si bel éclat qu’on peut dire qu’elle l’a beau ; mais ce que Sapho a de souverainement agréable, c’est qu’elle a les yeux si beaux, si vifs, si amoureux et si pleins d’esprit, qu’on ne peut ni en soutenir l’éclat ni en détacher ses regards… Ce qui fait leur plus grand éclat, c’est que jamais il n’y a eu une opposition plus grande que celle du blanc et du noir de ses yeux. […] Ce costume de mascarade était d’emprunt : ce qui lui était essentiel et propre, c’était la façon d’observer et de peindre le monde d’alentour, de saisir au passage les gens de sa connaissance, et de les introduire tout vifs dans ses romans, en les faisant converser avec esprit et finesse. […] Cousin y a réussi sans peine, mais comme on n’avait pas eu l’idée ni la patience de le vérifier à ce degré avant lui, on s’assure que Mlle de Scudéry qui faisait flèche de tout bois, avait reçu de l’hôtel de Condé des documents que, moyennant un déguisement léger, elle introduisit au long dans son livre ; la bataille de Rocroi, celle de Lens, le siège de Dunkerque sous le nom de siège de Cumes, y sont décrits avec toutes leurs particularités ; elle imprima ses notes et pièces toutes vives : cela flattait les Condés, et cela lui épargnait à elle-même des frais d’invention, cela faisait de la copie pour l’imprimeur, sorte de considération qu’il ne faut jamais oublier quand on parle de Mlle de Scudéry.
Mariée en 1666 au marquis de Lambert, officier de mérite qui devint plus tard lieutenant-général, et dont le père l’avait été, elle entra dans un monde plus conforme à ses instincts élevés, et elle ne garda de son premier entourage que le goût très vif des choses de l’esprit. […] Pour nous, qui sommes moins susceptibles, et que ces nouveautés d’il y a cent ans effleurent à peine et certainement ne scandalisent plus, nous reconnaîtrons que son style est tout rempli de mots très heureux, d’une acception nette et vive. […] Elle se méfie de la partie sensible : « Rien n’est plus opposé au bonheur qu’une imagination délicate, vive et trop allumée. » Les vertus d’éclat ne sont point le partage des femmes : elle paraît en souffrir un peu en le remarquant, ainsi que du « néant, dit-elle, où les hommes ont voulu nous réduire ». […] Elle a dit d’excellentes choses sur cette modération et cette tempérance des âmes saines, — de ces choses qui ne peuvent avoir été trouvées que par une âme vive qui a en partie triomphé d’elle-même.
Il y reçut l’impression parisienne du moment, qui était très vive, non seulement celle de la banque et de la finance, mais celle de la bourgeoisie élevée et de tout ce qui avait le sentiment pacifique et civil. […] Dans toute cette suite rapide de déterminations et d’actes si décisifs, on voit à chaque instant Marmont agir sous l’impression de sentiments vifs et sincères, qu’il ne croit pas avoir besoin de justifier. […] Pendant les journées qui suivirent, Marmont était des plus vifs à défendre les intérêts de l’armée, le maintien des couleurs nationales qui représentaient pour lui tout un ordre de sentiments patriotiques et modernes. […] Tel, on le voit, tel vivait le duc de Raguse pendant la seconde moitié de la Restauration, oubliant peu à peu ses disgrâces, très aimé de ses amis, absous et plus qu’absous de tous ceux qui rapprochaient, et qui lisaient à nu dans cette nature vive, mobile, sincère, intelligente, bien française, un peu glorieuse, mais pleine de générosité et même de candeur (le mot est d’un bon juge, et je le reproduis) ; piquant d’ailleurs de parole, pénétrant dans ses jugements, parlant des hommes avec moquerie ou enthousiasme, des choses avec intérêt, avec feu et imagination, parfaitement séduisant en un mot, comme quelqu’un qui n’est pas toujours froidement raisonnable.
Il se lia avec Madame, cette charmante princesse, dont il apprécia les qualités, et dont il a tracé un vif portrait qu’a cité le président Hénault. […] Race si vive et si fine, si spirituelle, si gâtée de débauche à l’origine et toute pétrie de délices, elle mériterait bien une petite histoire à part : Histoire de la branche des Conti. […] Mme de Sévigné le peignait ainsi à sa fille quand il avait près de soixante ans : « L’archevêque (d’Aix) a de grandes pensées ; mais plus il est vif, plus il faut s’approcher de lui comme des chevaux qui ruent, et surtout ne rien garder sur votre cœur. » Le prince de Conti lui-même, un jour qu’il s’agissait d’emporter de vive force une grâce auprès du cardinal Mazarin et que Cosnac s’en chargeait, lui disait tout bas au départ : « Mais je vous défends les moulinets. » Il appelait ainsi les gestes de l’abbé et ses emportements.
Seule, elle montrera sur le vif cette santé de l’esprit : l’humeur. […] Ils montrent une femme, une femme du xviiie siècle aimant la vie, l’amusement, la distraction, ainsi que l’aime, ainsi que l’a toujours aimée la jeunesse de la beauté, une femme un peu vive, un peu folâtre, un peu moqueuse, un peu étourdie, mais une femme honnête, mais une femme pure, qui n’a jamais eu, selon l’expression du prince de Ligne, « qu’une coquetterie de Reine pour plaire à tout le monde ». […] Mais les livres, les lettres, la bibliothèque et le cabinet noir du passé, ne seront point encore assez pour cet historien : s’il veut saisir son siècle sur le vif et le peindre tout chaud, il sera nécessaire qu’il pousse au-delà du papier imprimé ou écrit. […] Même ces souveraines de l’amour que nous avions tenté de faire revivre, ne m’apparaissaient pas assez pénétrées dans l’intimité et le vif de leur féminilité particulière, de leur manière d’être, de leurs gestes, de leurs habitudes de corps, de leur parole, du son de leur voix… pas assez peintes, en un mot, ainsi qu’elles auraient pu l’être par des contemporains.
La parole parlée est une parole vive ; la parole écrite est une parole morte. Dieu ne se communique aux hommes que par la parole vive. […] Elle n’a rien de ce qui constitue la parole parlée, c’est-à-dire la parole vive. […] Bossuet eut la vaste intelligence qu’il fallait pour une telle composition : on ne sait s’il lui manqua le sentiment du génie allégorique, cette flamme de l’inspiration, qui est la parole vive, la révélation directe ; et il est plus sûr de dire qu’il fut revêtu d’un autre ministère.
Dubois de rendre compte dans le Globe du recueil des Odes et Ballades ; je l’avais fait avec des réserves, mais dans un assez vif sentiment de sympathie et de haute estime. […] Une vive intimité s’ensuivit.
Gerfaut, pourtant, aspire à des dimensions plus imposantes : la description, la dissertation, y ont plus de part ; mais tout cela si varié, si vif, si bien pris sur le fait, que d’ordinaire on y a peu de regret, nulle impatience. […] En l’attendant à ses prochaines œuvres, qui auront à satisfaire une curiosité à bon droit exigeante, nous conclurons en redisant dans notre satisfaction toute vive : lisez Gerfaut, lisez surtout la Femme de quarante ans.
La favorite l’a appelée : « Envieuse. » Le Maître a déclaré : « Il est juste que celle-ci, qui est belle, ait la meilleure part. » Il a dit encore : « Il faut que tout le monde vive. » Il a conclu : « Tout travail mérite salaire. » L’esclave laborieuse est partie persuadée par ces paroles. […] Les prostitués les ont appelés : « Envieux. » Et le Maître a répondu : « Leur intelligence a justement mérité à ceux-ci la meilleure part. » Et : « Il faut que tout le monde vive. » Et encore : « Tout travail mérite salaire. » Bien que penser, chanter, sculpter, donner son âme et son esprit aux jeunes gens ne soient que des repos et des joies, le Maître avait raison d’employer le mot travail.
Il avoit connu les passions comme les autres hommes, & les avoit même eues plus vives. […] Il crut se trouver alors au milieu d’un repas délicieux, dans l’ivresse de la joie la plus vive, parmi des convives qui ne le plaisantoient que pour le faire briller & contribuer au plaisir de la fête.
Par hasard il arriva ce jour-là que ce fut son gendre qui lui apporta des aliments, et le bonhomme touché lui en témoigna sa gratitude d’une manière si vive, si pénétrée qu’elle suspendit les occupations et fixa l’attention de toute la famille. […] Je vous défie de me nier que cette figure ne vous regarde, et ne vive.
Un livre de voyage est tenu maintenant d’être, plus que tout autre livre, marqué au coin d’une personnalité très vive. […] Après Barthélemy, Choiseul-Gouffier et Chateaubriand, il aborde les augustes ruines de la Grèce et leur récrépissage moderne avec l’irrévérencieuse plaisanterie d’un enfant de Paris (pour ne pas dire un autre mot), et, comme ce gros obèse intellectuel d’allemand qui sautait par la fenêtre pour se faire vif, il saute, lui, en pleine ironie, — tenant infiniment, sans doute, à nous montrer qu’il sait, quand il le faut, s’éponger de sa science et s’alléger du pédantisme de ses études et de ses fonctions !