/ 2455
1420. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Gabrille d’Estrées et Henri IV »

Il est bien évident que la sympathie presque amoureuse de cet écrivain pour les deux célèbres maîtresses de Louis XV n’avait pas été la fascination de la qualité de maîtresse en titre de roi sur un royaliste à fond de train, mais un goût personnel, très vif, tenant à son idiosyncrasie à lui, Capefigue, mais la séduction momentanée de deux charmantes créatures entre toutes, sans aucune conséquence pour plus tard !

1421. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Jules Levallois » pp. 191-201

C’était toujours vif et spirituel, ce qu’il écrivait, délié et nerveux dans le bon sens du mot, presque aigu, mais n’allant pas jusqu’à la pointe, n’ayant jamais ce défaut du pointu que les esprits aigus ne savent pas toujours éviter.

1422. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Topffer »

Sainte-Beuve, dans une de ces préfaces comme il sait les écrire et qui précède l’édition, caractérise Topffer comme un écrivain « accentué, qui a du mordant et du vif ».

1423. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Leopardi »

Quel nom pour faire rêver les imaginations vives à distance !

1424. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Proudhon et Couture »

Attiré, entraîné par le besoin chaque jour plus vif des améliorations matérielles, l’esprit public, perdu de sensations, se détacherait-il des travaux purement intellectuels pour appliquer son effort aux choses de la science utile et de l’industrie ?

1425. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — II »

Elle leur passe les hardiesses essentielles et ne leur demande que des concessions d’attitude, dont s’agace peut-être un Parisien vif, irrespectueux, provocant, mais qui ne coûtent rien ni aux races du Nord, ni à moi.‌

1426. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VII. D’Isocrate et de ses éloges. »

D’abord, un des principaux mérites d’Isocrate, était l’harmonie ; on sait combien les Grecs y étaient sensibles ; nés avec une prodigieuse délicatesse d’organes, leur âme s’ouvrait par tous les sens à des impressions vives et rapides ; la mélodie des sons excitait chez eux le même enthousiasme que la vue de la beauté ; la musique faisait partie de leurs institutions politiques et morales ; le courage même et la vertu s’inspiraient par les sons.

1427. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IX. »

Là où le génie sortait, en se dégageant, comme une flamme plus vive d’un milieu tout spirituel, la foule même étincelait.

1428. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Disons toutefois, à propos de paysage, que nous avons une vive reconnaissance, aussi bien que Gérard de Nerval, pour les esprits si rares qui savent rendre la tentation de la nature (ha ! […] Mais le peuple qui a l’imagination vive, qui crée les mots, qui n’écoute rien, qui n’entend pas ces lamentations enfantines sur la prétendue décadence du goût, lamentations absolument les mêmes de temps immémorial, le peuple bafoue les régenteurs de la langue et l’enrichit d’expressions pittoresques, tandis que le lamentateur s’abandonne à des plaintes que le vent emporte. […] Si je vous adresse cette lettre, madame, c’est pour la vive curiosité pleine de bonne foi que vous avez montrée pour une doctrine qui prend corps de jour en jour et qui a ses représentants dans tous les arts. […] On répète encore cette vieille plaisanterie : Vive le laid ! […] Champfleury, cette vieille plaisanterie : Vive le laid !

1429. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Je ne nie pas qu’un roman bien échafaudé, bien construit, ait un grand charme pour moi, mais je dois dire que quelquefois un simple croquis pris sur le vif m’a causé plus de plaisir qu’un tableau longtemps travaillé dans l’atelier. […] Et si elle avait un instant prévu la possibilité d’une rencontre avec M. l’Hérée, c’était avec un sentiment si vif de ses rancunes et de ses droits, qu’elle n’en avait pas éprouvé la moindre émotion pour elle-même. […] Un autre enfant fut enterré vif par son beau-frère, sous les yeux de sa propre sœur et de toute la peuplade en marche. […] La honte, la formidable honte de cette révolte en présence de l’ennemi, ces cris de : « Vive la paix !  […] Le poteau de guerre où agonise un malheureux visage pale écorché ou brillé vif, vous secoue de moindre horreur que la guillotine où passèrent un André Chénier et une Mme Élisabeth.

1430. (1883) Le roman naturaliste

Daudet quelques légères et vives esquisses des Femmes d’artistes ou de ses Contes du lundi. […] Flaubert a soulevé la plus vive et la plus ardente mêlée de discussions autour de Madame Bovary. […] Un peintre, s’il est capable de reproduire au vif quelque intérieur parisien ou normand, ne saurait s’attarder longtemps à représenter sur la toile des intérieurs étrusques ou carthaginois. […] On y vit enfin, pour la première fois, un écrivain livrant au public sa propre histoire, et sinon « sa tante et sa belle-mère toutes vives » — la formule est de M.  […] C’est encore ainsi que la vive curiosité de M. 

1431. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Dire ce qu’on pense est un plaisir coûteux mais trop vif pour que j’y renonce jamais. […] Il sert dans les dragons et, à cela près qu’il est un peu vif, c’est le meilleur fils du monde. […] Le goût des devinettes est très vif chez les paysans et particulièrement en Gascogne, et la sphinx pyrénéenne trouva bientôt son Œdipe : c’était un jeune villageois. […] Un œil vif et noir éclaire son mâle visage olivâtre. […] C’est par l’examen des livres qu’il pénètre dans le vif des mœurs, des idées et des sentiments.

1432. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

La fleur est vive de ta bouche, Nos mains s’étreignent, nos cœurs s’unissent, Tout l’air est ivre, et ta voix est douce ; Mes roses saignent entre tes lys. […] D’avoir bu à cette source génératrice une conscience harmonieuse de l’univers physique et moral, l’artiste s’est assimilé un surcroît de forces vives qu’il dilatera en beauté. […] Nous saisissons sur le vif la raison pour laquelle Fort s’est si bien assimilé les mœurs des simples, des villageois, des marins, des pâtres, des petites amoureuses47. […] Et la passion vive mange les mots, supprime les pronoms, les articles, tandis que, répétant au contraire de-ci de-là, sans cesse, l’expression significative, sans s’inquiéter de la rime ni même de l’assonance, elle martelle le rythme ou le distend, au mieux de l’imprévu lyrique ». […] Il s’agit donc là de critique expérimentale et d’enseignement pris sur le vif.

1433. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Enfin, continuons d’espérer en la raison, et croyez à ma vive amitié. […] Vive, vive la République ! Et vive cette tour unique, Orgueil de notre nation ! […] Le ciel est rose, d’un rose vif, derrière la Madeleine. […] Elle a présenté à nos yeux de vives et brillantes images de paix et de fraternité humaine.

1434. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

De même pour la comédie italienne qu’il avait eu occasion d’étudier sur le vif à Paris même. […] Elles causent encore une émotion vive lorsqu’on les lit. […] Le sujet mythologique de cette toile est d’un coloris vif et chaud, d’un dessin pur et correct. […] Ce vif succès décida l’établissement de la troupe de Molière à Paris16. […] Ce malheureux Benserade, qu’il parodia tout vif de la sorte, en savait quelque chose.

1435. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Toutes les images qui ont passé devant ce miroir de son imagination vive et tendre s’y sont fixées comme, dans un courant limpide, les rameaux, les fleurs, les colombes du bord. […] « Là où le pin élancé et le peuplier à l’écorce blanche aiment à entrelacer leur ombre propice sous leurs rameaux, là où la source vive et murmurante s’efforce de creuser un lit oblique à ses eaux légèrement agitées sur sa pente. […] L’eau vive, qui dans nos villes s’efforce de briser dans sa rapidité ses conduits de plomb, est-elle plus limpide que celle qui tremble et murmure ici entre ses rives inclinées ?

1436. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

Les sensations sont donc moins vives. […] « Approchez des pays du Midi, vous croirez vous éloigner de la morale même ; des passions plus vives multiplieront les crimes ; chacun cherchera à prendre sur les autres tous les avantages qui peuvent favoriser ces mêmes passions. […] De temps en temps, il voit juste, comme dans cette allusion à la France : « S’il y avait dans le monde une nation qui eût une humeur sociable, une ouverture de cœur, une joie dans la vie, un goût, une facilité à communiquer ses pensées ; qui fût vive, agréable, enjouée, quelquefois imprudente, souvent indiscrète, et qui eût avec cela du courage, de la générosité, de la franchise, un certain point d’honneur, il ne faudrait point chercher à gêner par des lois ses manières, pour ne point gêner ses vertus.

1437. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

La religion a été, dans la société du xviie  siècle, la source vive de la parole publique ; et, comme le faisait très bien remarquer M.  […] Il a l’âme tendre, au contraire, la sensibilité vive : dans quelques écrits somme dans les Méditations et les Élévations, dans quelques lettres, il s’est livré, et l’on a pu voir de quelle ardeur il aimait et son Dieu, et les hommes, et quelques-uns parmi les hommes. […] Le style reste terne et pâteux, parfois négligé et inexact : moins vif, moins spirituel, moins coloré ou brûlant que l’idée.

1438. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Autant la langue y est vive, claire, le tour franc et rapide, autant, dans les ouvrages de morale et de théologie, les expressions sont languissantes et obscures, les tours équivoques et traînants. […] Toutes les pensées sont attachées au présent ou plutôt y a-t-il autre chose que des impressions si vives et si multipliées que les esprits n’ont ni la liberté ni le temps de la réflexion ? […] Il avait les trois qualités nécessaires à l’historien de la féodalité la curiosité qui le fit voyager en tous lieux pour savoir, les matériaux historiques n’étant pas alors des actes écrits, mais des hommes dispersés, et des témoignages qu’il fallait aller chercher par les grands chemins ; la mémoire qui retenait tous ces témoignages ; enfin une imagination à la fois exacte et vive, qui les éclaircissait et les animait.

1439. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

Une comédie merveilleuse de finesse, de verve, de fraîche et vive et naturelle gaité, les Maîtres Chanteurs de Nuremberg. […] Mais le Maître, la créant, n’a point voulu faire un drame ; il s’est délassé, en la composition de ce poème si vif, en ce merveilleux contre-point variant à l’infini deux thèmes opposés ; et son œuvre, aussi, est un délassement, le plus adorable délice aux oreilles, comme aux yeux. […] La mouche au coin de l’œil, un reste de baiser sur les lèvres, elle riait de toutes ses dents vives, la gorge libre et les cheveux au vent.

1440. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

Cependant, en faveur de la pureté éminemment classique de son style et du naturel exquis avec lequel y sont tracés les divers caractères qui lui impriment la vie, nous le prierons au moins de vouloir bien mitiger son arrêt, et de comprendre ce chef-d’œuvre sous la dénomination de classico-romantique, en lui souhaitant pour sa propre gloire d’en produire un pareil. » VI Je reprends : Mon impression personnelle ne fut ni moins vive ni moins ravissante que celle du traducteur, la première fois que le poème dramatique de Sacountala tomba sous mes yeux. […] Douchmanta , la contemplant avec le plus vif plaisir. […] Ma curiosité n’est pas moins vive que la tienne, je t’assure ; voyons, il faut nous éclaircir.

1441. (1856) Cours familier de littérature. II « XIe entretien. Job lu dans le désert » pp. 329-408

Car, en quelque climat que l’homme marche ou vive, Au but de ses désirs, pensé, voulu, rêvé, Depuis qu’on est parti qui donc est arrivé ? […] … Demandez-lui s’il pense, immergé dans l’eau vive, Ce qu’il pensait naguère accroupi sur la rive ! […] mais qui sont toi, Évidences d’esprit qui parlent sans paroles, Qui ne te taillent pas dans le bloc des idoles, Mais qui font luire, au fond de nos obscurités, Ta substance elle-même en trois vives clartés.

1442. (1914) Boulevard et coulisses

Paris avait une certaine sensibilité particulière qu’on ne trouvait que chez lui, une façon de voir les choses, de concevoir la vie, de juger qui était sa marque ; il avait un ton plus délicat et plus vif qu’ailleurs, une élégance plus fine. […] Cette vive pénétration de toutes les idées qui est chez vous si visible, qui donne à vos allures d’étudiants tant de hardiesse, et que vos maîtres entretiennent avec un éclat incomparable, est un phénomène que nous ne connaissions pas. […] Je vous ai parlé tout à l’heure de la hardiesse de votre esprit et de votre vive sensibilité à toutes les passions d’alentour.

1443. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

Rien n’est plus propre à nous confondre, à nous rendre prudents et modestes, que de songer que non seulement Tannhaüser, mais le Barbier lui-même, ce chef-d’œuvre étincelant d’esprit, éclatant de gaieté et de lumière, rencontra d’abord la plus vive hostilité. […] Quand un succès (ce qui arrive souvent) est aussi éphémère que vif, il ressemble à ces légères pâtisseries soufflées qui montent, montent sur le feu, puis s’abattent soudain. […] Nous nous figurons assez mal aujourd’hui le très vif intérêt, d’espèce un peu malsaine ou, tout au moins, maligne, avec lequel les hommes de la fin du dix-septième siècle lisaient les Caractères de La Bruyère, si pleins d’allusions personnelles et de traits satiriques. […] Si Mellin de Saint-Gelais, dont la gloire fut longue et vive, conserve quelque notoriété nominale, il la doit uniquement à Ronsard et au souvenir de leur célèbre inimitié littéraire. […] Je conçois à la rigueur un style qui, sans images vives et neuves, serait encore assez beau, parce que les images sont une lumière coloriée, plutôt agréable que nécessaire, la lumière blanche pouvant presque toujours suffire ; je ne conçois pas de bon style sans harmonie.

1444. (1910) Propos littéraires. Cinquième série

Elle distingua, successivement, deux ou trois jeunes gens amis de son frère et eut vive peine de n’être pas très vivement distinguée par eux. […] L’auteur a une très vive sensibilité, qu’il ne cache point, en quoi il a raison, et qu’il n’étale pas, en quoi il a plus raison, encore. […] Et, sur quelques-uns, il y a des renseignements pris sur le vif qui ne manquent pas d’intérêt. […] Il est une suite de satires vives, courtes et promptes — bonne manière — contre les choses que M. de Gourmont n’aime pas. […] Non, pour moi, Choderlos, fin, avisé, froid, de tête très ferme, de regard net et d’œil vif, est né intrigant.

1445. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

Ils appartiennent bien plutôt à des temps de vie molle et d’une excitation morale à la fois vive et oisive, quand les âmes sont jetées hors de leur repos et dépourvues de toute occupation forte et obligée. […] Au contraire, Nicuola revint à Erte toujours plus éprise, et apprit avec la plus vive douleur la nouvelle inclination de son amant. […] Quoi de plus vrai que l’amour de Roméo et de Juliette, cet amour si jeune, si vif, si irréfléchi, plein à la fois de passion physique et de tendresse morale, abandonné sans mesure et pourtant sans grossièreté, parce que les délicatesses du cœur s’unissent partout à l’emportement des sens ! […] En général, le défaut de cette pièce est de ne pas exciter de sympathie bien vive pour aucun des personnages. […] Aucun n’a été tenté de renouveler une entreprise si chère, et dont le mauvais succès a découragé les plus vifs aspirants.

/ 2455