Le sentiment du réel devient plus vif et plus précis ; les pensées sont plus sérieuses, les mots se remplissent, la déclamation s’évapore. […] Le besoin ou la passion du gain détournera donc l’homme de lettres de composer des ouvrages solides mais sérieux, que cinq cents personnes comprennent et achètent, et qui n’en sont pas moins quelquefois le flambeau où toute une époque emprunte de proche en proche sa lumière.
La question serait résolue, si nous ne rencontrions ici en faveur de la thèse de Bonald une opinion assez répandue chez les théoriciens de l’art littéraire ; elle mérite de nous arrêter, car elle constitue une objection sérieuse à la théorie que nous venons d’exposer. […] A mesure que se fait la coordination du langage et de la pensée, l’enfant cherche toujours ses mots quand il porte un jugement nouveau, mais il les trouve de plus en plus facilement ; d’autre part, quand il parle pour parler, les mots éveillent des pensées de plus en plus riches, nettes et cohérentes ; et, à la longue, l’accord de la parole et de la pensée devient si étroit que l’enfant devenu un adolescent ne peut plus guère trouver une pensée sans la bien exprimer, ni se rappeler des mots sans y attacher un sens plein et sérieux.
Et comme il faut toujours que La Fontaine sourie : Choses réelles, quoique étranges… Il redevient sérieux immédiatement : Tant que l’enfance durerait, Cette fille du Ciel en nous ne paraîtrait Qu’une tendre et faible lumière ; L’organe étant plus fort, la raison percerait Les ténèbres de la matière, Qui toujours envelopperait L’autre âme imparfaite et grossière. […] Un charretier implore Jupiter, et Jupiter lui répond qu’il veut qu’on se remue ; il veut d’abord que l’on travaille, et ensuite il récompense le travail s’il lui plaît, mais avant tout : « Aide-toi, le ciel t’aidera. » De même — car c’est encore l’éloge du travail à un certain égard — la charmante fable de le Lièvre et la Tortue, qui veut dire, non pas précisément qu’il faut travailler continuellement et comme d’arrache-pied, mais qu’il faut organiser son travail d’une façon sérieuse et méthodique : Rien ne sert de courir, il faut partir à point.
Ils viennent d’affirmer devant nous, tout en se battant, leur internationalisme et leur pacifisme ; mais tout de même les événements sont de grands maîtres, et, pour échapper au joug intolérable du kaiser, ces révolutionnaires soldats ont dû consentir de sérieuses retouches à leur conception de la vie. […] Cet essai de morale sérieux, émouvant, c’est un bel arbre français.
La maréchale de Villars, qui y assistait, demanda quel était ce jeune homme qui voulait faire tomber la pièce ; on lui dit que c’était l’auteur : elle le voulut connaître ; il lui fut présenté, et il l’aima bientôt d’une passion vive et sérieuse.
Ce sentiment contradictoire entre lui et nous, qui affecte le ton général de l’ouvrage et perce en mille détails, n’est pas fondamental pourtant, puisqu’il n’empêche pas sa raison de rencontrer aux endroits capitaux la nôtre ; mais nous en avertissons expressément, parce que des lecteurs peu attentifs pourraient prendre le change et repousser à première vue, sur quelques mots blessants, un livre où il y a beaucoup à gagner pour toutes les classes d’esprits sérieux et sincères.
Quand je vois les chutes, les déviations, les démences ou les abjections qui ont lieu chez tant d’hommes distingués après l’âge de quarante ans, je me dis : C’est la jeunesse encore qui, malgré ses fougues et ses promptitudes, est sérieuse et sensée ; c’est la seconde partie de la vie qui se fait égarée ou légère.
de pareils récits et les turpitudes mêmes où ils font passer ont un sens sérieux : la nécessité et la légitimité de 89 sont au bout, comme une conséquence irrécusable.
France n’a souhaité que votre divertissement et qu’il a rédigé avec bonne grâce et humour un roman-feuilleton, une sauce appétissante d’un plat peu sérieux.
Aux générations frivoles de l’Empire, éprises de gaudrioles et de flonflons, succédait une génération sérieuse, triste et concentrée ; Mallarmé commentait Wagner, éveillait un frisson nouveau.
Ce n’est pas mal, évidemment, mais cela n’a rien à voir avec la lyre et la prose même de Courteline paraît encore trop sérieuse à la foule qui s’en détourne pour les outrances du café-concert et les déshabillés galants du music-hall.
Appel sur le champ de la part de l’abbé au parlement : l’affaire alloit devenir sérieuse ; mais les professeurs royaux, engagés d’honneur à ne pas laisser condamner le plus zèlé défenseur de leur opinion, allèrent en corps à l’audience, représentèrent avec éloquence à la cour l’injustice des procédés de la Sorbonne.
Elle consiste dans une refléxion sérieuse sur les ouvrages des grands maîtres, suivie d’observations sur ce qu’il convient d’imiter, et sur ce qu’il faudroit tâcher de surpasser.
M. de Gourmont a été, sinon le plus sérieux, du moins le plus acharné de nos contradicteurs.
La France, la France légère, la France aux chansons, était repoussée vers le sérieux du mépris par ce gouvernement cynique qui s’appelle la Régence comme par une dérision de l’histoire.
Nous sommes bien loin ici du sérieux qu’il fallait à l’auteur quand il réclamait pour la gravité méconnue du cardinal de Bernis.
Sa serrurerie avec Gamain n’est qu’une amusette, mais la Chasse est la chose sérieuse, la passion vraie et dévorante de sa vie.
Je sais ce que c’est que la poésie de Byron ou de Crabbe, par exemple, mais je ne sais pas, ou plutôt je sais trop ce que c’est que la poésie antique, — la poésie orientale, — la poésie indienne, obtenues à l’aide du procédé moderne par des hommes qui ne sont ni des Anciens, ni des Orientaux, ni des Indiens, et qui jouent littérairement d’une façon plus ou moins sérieuse, c’est-à-dire plus ou moins comique, la scène de M.
Dans une société aussi légère que la nôtre l’était autrefois, et qui est devenue philanthropique et humanitaire, l’ennui, un ennui sérieux, distribué sur toute la ligne, avec ampleur, est peut-être une chose excellente pour faire les affaires d’un homme, et M.
La forme du livre est facile, et elle serait agréable si l’auteur, qui sait sourire, se permettait de sourire, et n’empalait pas son esprit sur le piquet du sérieux.
À cette heure, nul ne s’avise de jouer ; tous colorent d’un aspect sérieux même leurs soins les plus frivoles.
Ce serait presque inutile de lire les contemporains, si l’on n’avait l’espoir de découvrir une fois par aventure un candidat sérieux à l’immortalité. […] Les mathématiques et l’astronomie avaient seules réalisé des conquêtes sérieuses. […] Ne m’adressant ni aux uns, ni aux autres, je recommande les morceaux les plus gais, qui me paraissent aussi les plus sérieux. […] Les quatre volumes complets intéresseront surtout les lettrés, étudiants et amateurs sérieux. […] Il ne refuse pas à Louis XIV des qualités sérieuses, une certaine grandeur, une brillante période au début.
Verhaeren a donné une Hélène de Sparte plus sérieuse. […] Le sérieux de son fils l’inquiète. […] J’ai même toujours eu contre lui des objections sérieuses. […] Du reste, soyez sûrs qu’il ne se laisse entraîner que par la plus sérieuse conviction. […] Tâchons de garder notre sérieux.
Notez bien que le poète est sérieux et, dans son intention, ne blasphème pas. […] Et quand il assure que c’est une chose ineffable de se sentir immensité, quel homme sérieux peut retenir un sourire ? […] Nous ne pouvons pas répondre de faire le nôtre avec le même sérieux. […] Ce nom pourrait être un sérieux péril. […] Ce qui serait pour une autre jeune fille une préoccupation frivole, est l’intérêt sérieux, presque religieux de sa vie.
Nous voyons déjà que le genre en question n’a dans le mode sérieux qu’une seule espèce, qui est celle de l’Iliade ; et dans le badin, deux espèces très diverses, celle du roman épique et celle de l’épopée satirique. […] Ce sublime est la plaisanterie philosophique, mise en fiction : autant l’épopée sérieuse tend à rehausser les faits, à exciter l’admiration, autant ces épopées comiques tendent à déjouer l’enthousiasme, à exalter le ridicule. […] L’épopée sérieuse et l’épopée comique contrastent l’une avec l’autre par le ton uniforme qui les distingue. […] De cette grotte la troupe scélérate descend par une fente dans l’Enfer, et pour ne plus entendre le son du cor, elle s’enfoncé au bourbier du Cocyte, d’où je ne conseille pas aux poètes sérieux de les retirer jamais. […] L’épopée badine a des licences que n’a pas l’épopée sérieuse.
Ce qui frappait d’abord dans Victor Hugo, c’était le front vraiment monumental qui couronnait comme un fronton de marbre blanc son visage d’une placidité sérieuse. […] Il est vrai qu’on n’a pas la même estime pour vous que pour un âne sérieux mettant dix ans à faire une croûte unique. […] Au milieu d’une occupation toute différente ou d’un entretien sérieux, une bouche invisible vous souffle à l’oreille le mot qui vous manquait, et l’ode en suspens depuis plusieurs mois est achevée. […] Ce qu’il détestait le plus, c’étaient les ennuyeux solennels, les tartufes-prud’hommes, les ânes sérieux, comme il les appelait. […] Cette explication suffit, et l’action continue sa marche. » Ce qui faisait la force de Bouchardy, c’était son sérieux profond, sa conviction inébranlable.