Émile Zola2 [Notes biographiques] On élevait aux empereurs romains des autels de leur vivant ; de son vivant, Louis XIV voyait se dresser sur la place des Victoires sa statue équestre, aux quatre pieds de laquelle le maréchal de la Feuillade entretenait des lampes et des cassolettes. […] alors, je ne m’étonne plus s’il a la constance et l’énergie des vieux Romains, la grâce sémillante des Français, le goût sobre et délicat des Attiques. […] Alphonse Daudet qui parle ; un long feu d’artifice où les fusées et les chandelles romaines partent bruyamment sans interruption ; à peine quelques-unes sont-elles obscurcies par la fumée.
Goethe, alors âgé de quarante-cinq ans, avait déjà donné Gœtz de Berlichingen (1773), Werther (1 774), Iphigénie en Tauride (1786), Egmont (1778-1788), le Tasse (1787-1790), écrit les Élégies romaines (1788-1795), Reinecke Fuchs, et rédigé la plus grande partie des Années d’apprentissage (1777-1794). […] Ne craignez point de chercher trop bas vos personnages ; faites-nous des laboureurs grands comme des rois, et, s’il se peut, des Français du xixe siècle austères comme des Romains de Corneille : ce ne sera pas dégrader l’art, ce sera réhabiliter la vie ! […] Maudire d’abord la vie pour l’exalter ensuite, rabaisser la condition humaine au-dessous de celle des bêtes après avoir porté l’homme jusqu’aux nues, souffler le premier sur les rêves qu’il a pris le plus de plaisir à évoquer, ne parler que d’idéal et railler l’idéal, saluer avec enthousiasme l’aurore de la liberté et se plaindre avec amertume que déjà le nouveau soleil incendie l’Allemagne de ses rayons, unir Spinosa à la Bible, admirer l’éducation protestante presque au même moment où il regrette le dogme catholique, se faire à quarante ans imitateur de Catulle en attendant qu’il se transporte à soixante dans le paradis de Mahomet, et, soit qu’il parle le langage d’un prophète ou celui d’un railleur, soit qu’il renverse ou qu’il édifie, soit qu’il se spiritualise jusqu’à n’avoir presque plus rien de saisissable ou qu’il s’abandonne à l’attrait du monde extérieur avec cette franchise et cette plénitude de sensualité qui est le caractère des Élégies romaines, porter partout le même ton de sincérité apparente, être animé partout de la même chaleur, revêtir les sujets les plus divers de couleurs également vives et également vraies, tel est son rôle, telles sont ses contradictions ordinaires.
C’est ainsi qu’après Marius, Sylla, Antoine et les proscriptions sanguinaires des triumvirs dans l’île du Reno, auprès de Modène, Rome livra jusqu’à Cicéron au poignard des délateurs, et qu’Horace, Virgile, Ovide, Tibulle et une foule d’autres hommes de génie se hâtèrent autour du trône d’Auguste, pour qu’il n’y eût point de vide dans la gloire romaine, point d’interrègne dans la famille de Romulus.
Leurs serments ordinaires sont: par le nom de Dieu, par les esprits des prophètes, par les esprits ou le génie des morts, comme les Romains faisaient par le génie des vivants.
C’étaient des Rituels romains, et des livres d’histoire et de mathématiques ; les premiers pris apparemment au sac d’Ormus, et les autres ramassés du pillage de la maison de l’ambassadeur de Holstein, il y a soixante et dix à quatre-vingts ans, où Olearius, qui en était le secrétaire, avait une bibliothèque d’excellents livres27.
Comme ces belles patriciennes de la décadence romaine, qui, pour l’assouvissement de leur fine chair, de cette blanche argile vivante habituée, cependant, à des caresses plus délicates, recherchaient avec furie la brutale étreinte des Barbares, nous nous sommes abandonnés dans les bras du géant ; nous acceptâmes d’être terrassés, d’être meurtris par les rudes sonorités de l’Or du Rhin, jusqu’au jour où nous avons compris que c’étaient nos propres défaites que célébraient toutes ces sonneries et tous ces tonnerres, que c’était le triomphe grandissant d’une autre race.
Lucien Bonaparte avait quelque chose de romain de la vieille république dans le caractère et dans l’attitude.
Sont-ce les Romains, sont-ce les Grecs, sont-ce les Égyptiens, qui ont pris pour « guides fondamentaux » l’inspiration divine et le mystère ?
Certes, on avait raison de ne pas vouloir s’en tenir aux Grecs et aux Romains, d’autant qu’ils n’avaient pas représenté à la scène tous les sentiments humains, bien qu’ils n’y fussent pas étrangers dans la vie réelle.
C’était une excellente arme aux mains de M. le commissaire du roi que Mlle Rachel ; son talent tout antique, plein de froide majesté, de sobre passion et de sourde ironie, remarquable par une diction irréprochable bien plutôt que par des accents du cœur, devait reproduire d’une manière satisfaisante les types grecs et romains de la littérature du xviie siècle, poétiques figures qui semblent moins empruntées à la nature vivante qu’à l’atelier du statuaire ; mais aussi ce talent monocorde devait échouer lorsqu’elle essayerait de représenter les créations pittoresques, excentriques ou passionnées du xixe siècle.
C’est l’amour précieux, l’amour à la façon de Mlle de Scudéry, qui baptisait, elle aussi, ses romans de noms romains ou grecs. […] Jules Lemaître répète, sous les formes les plus ingénieuses, le mot profond du vieux fonctionnaire romain : “Qu’est-ce ce que la vérité78 ?
Le Passé vivant, la Flambée, Romaine Mirmault sont des jeux d’esprits assez mornes où des créatures que l’on ne saurait prendre au sérieux affectent des attitudes concertées : ouvrages littéraires s’il en fut — dans le pire sens du mot. […] Adorateur fervent de la beauté antique, des statues grecques, des paysages siciliens, de la campagne romaine, du miracle français aussi, il a traduit sa brûlante émotion en termes qui la contiennent pudiquement, — où le sentiment personnel se voile avec discrétion.
Plus la société romaine devint démocratique, plus les anciennes familles sénatoriales et consulaires fortifièrent leur influence, et plus aussi elles devinrent exclusives et tranchèrent sur le reste de la nation. […] c’est là le type de la beauté chevaline, ce petit cheval maigre, osseux, nerveux, dont les Romains se moquèrent la première fois qu’ils aperçurent les cavaliers numides, et auquel de tout temps les hommes, dupes des formes majestueuses et pompeuses, préférèrent les chevaux aux encolures massives et à la croupe charnue ?
Les écrivains des civilisations antiques pouvaient écrire pour tous, car tous, grâce à l’esclavage, tous se réduisaient à quelques privilégiés qui avaient des loisirs, — et alors pourtant les écrivains n’enseignaient pas, ils étaient les expression concentrées des croyances ou des préférences ambiantes, les secrétaires de leurs lecteurs6, lesquels ne dépassaient pas les étroites limites d’une ville et ne permettaient pas davantage aux écrivains de les dépasser, accusant un Tite Live de patavinisme pour n’accommoder pas strictement son style à la mode romaine. — Mais écrire de la littérature pour tous, aujourd’hui : que veut-on dire par là ? […] Les personnages ne sont particulièrement ni Juifs, ni Grecs, ni Romains, et leur titre de roi, de confident, de prêtre, de guerrier, n’est qu’une étiquette ; mais les passions sont humaines et gardent toute la vérité humaine. […] Mais leur catholicisme, outre que les prêtres catholiques et romains lui sont plutôt encore hostiles qu’indifférents, a tous les caractères d’un retour très profond vers les Origines : il se pourrait que ces Catholiques eussent entendu la grande parole de Gœthe. — M. […] Baudelaire est un sensuel condamné au mysticisme, étranger à toute explication scientifique et, perdu sur les flots du vice moderne, les considérant avec un regard sévère de prêtre latin, — sans doute de mauvais prêtre, d’autant plus sévère, — latin et traditionnel par son haut goût de moraliste, par la logique de sa pensée en plein rêve, latin et romain par la force carrée de son génie bref, — non pas court, — très sûr, riche, sombre, par sa poétique même et surtout par sa rhétorique, par l’incisive concision de son style.
Cette fête est marquée dans le Martyrologe romain au 16 de mars. […] On lui tenait compte très largement d’avoir professé dans plusieurs articles le catholicisme le plus romain et insulté M. […] Péladan lui-même, « saturnien vénusé », et une enfant trouvée élevée par un prêtre romain, la merveilleuse Izel, en qui la nature atteint les finesses de la statuaire florentine.
En regard de l’empire romain, force brutale et sauvage, le poète a placé l’être le plus faible en apparence, la jeune fille chrétienne. […] À partir de 1898, Maeterlinck, un instant incertain entre Ruysbroeck et Marc Aurèle, opte délibérément pour l’empereur romain et, à ce compte, délaisse l’inspiration mystique pour un rationalisme agnostique. […] Le mouvement crée la beauté dynamique, de quoi est fait l’art gothique et contemporain, par opposition à l’art statique ou harmonieux des Grecs et des Romains. […] En croyant imiter les Grecs et les Romains, « il ne faisait que transporter dans les lettres cette pratique hardie, juste et rigoureuse de construire, qui était française avant lui ».
La sévère rigueur de ce moment qui passe Aux erreurs d’un pinceau ne fait aucune grâce ; Avec elle il n’est point de retour à tenter, Et tout au premier coup se doit exécuter, etc… A cette belle chaleur de Molière pour la fresque, pour la grande et dramatique peinture, pour celle-là même qui agit sur les masses prosternées dans les chapelles romaines, qui n’aimerait reconnaître la sympathie naturelle au poëte du drame, au poëte de la multitude, à l’exécuteur soudain, véhément, de tant d’œuvres impérieuses aussi et pressantes ?
« Saunderson, le mathématicien aveugle, dit Abercrombie60, pouvait distinguer avec la main, dans une série de médailles romaines, celles qui étaient vraies et celles qui étaient fausses. » — « On fait mention, dit Bayle61, d’un organiste aveugle qui était fort habile dans son métier et discernait fort bien toute sorte de monnaies et de couleurs.
On a trouvé à Plombières, dans le béton sur lequel les Romains avaient bâti, des aiguilles de granit que depuis dix-huit cents ans l’infiltration des eaux y avaient formées. — M.
Alors nous avions une vigne, aux environs de Nîmes, où nous allions manger des salades de romaine, des fruits… Ah, quand on allait là, c’étaient des joies de vacances… Eh bien, je m’attarde quelquefois à vouloir retrouver ce bruit, dont j’ai eu la sensation, la première fois, que j’ai ouvert cette porte. » Mardi 26 juin On cause collège, et de la férocité des pensums d’autrefois.
Parlant de la société future, je disais que les gens les plus intelligents ne peuvent concevoir les formes d’une société future, et que dans l’antiquité, il n’y aurait pas eu une cervelle capable de prophétiser la société du moyen âge, cette société à basiliques ténébreuses, au lieu de temples pleins de lumière, cette société aux danses des morts, remplaçant les théories des fêtes d’Adonis, cette société, avec sa constitution, ses vêtements, son moral si différent de l’autre, cette société, ou même les belles et classiques formes de la femme grecque ou romaine, semblent devenues des formes embryonnaires, telles que nous les voyons retracées par le pinceau de Cranach, dans des académies de femmes du temps.
Oui, quand on lit, parmi les œuvres burlesques et mystiques de Matorel philosophique comme celle-ci : « On apercevait les hangars éclaires à l’électricité et pareils à du machines de guerre romaines.
Voici, quand il s’en tient au mot à mot de Juvénal : Ce qui fit la beauté des Romaines antiques, C’étaient leurs humbles toits, leurs vertus domestiques, Leurs doigts que l’âpre laine avait faits noirs et durs, Leurs courts sommeils, leur calme, Annibal près des murs Et leurs maris debout sur la porte Colline. […] La morale des stoïciens a pu tenir dans le Manuel d’Épictète, et toutes les bibliothèques des philosophes, au jugement du plus grand orateur romain, ne valaient pas le répertoire minuscule, mais sacré, des lois des douze tables : vingt volumes de lyrisme épais, amplifié, diffluent, « expansif », peuvent être moins pleins que le fasciculet de romances d’un vrai poète.
Ils ont vu enfin l’épuisement des races actuelles et l’invasion barbare menaçante au-dessus de nos têtes, aussi fatale à présent que fut celle où s’effondra l’empire romain au ive siècle de l’ère chrétienne. […] Là où l’écrivain romain ne marche que contraint par la force des choses et avec la résignation sombre du sage, le croyant hindou s’élance avec l’enthousiasme du mystique, comme à l’accomplissement de ses plus chères espérances. […] « Je déteste la tyrannie moderne, écrit-il en 1846, parce qu’elle me paraît bête, faible et timide d’elle-même ; mais j’ai un culte profond pour la tyrannie antique, que je regarde comme la plus belle manifestation de l’homme qui ait été275. » Uniquement frappé par les côtés grandioses des anciens despotismes, il admirait, plein de respect, les Césars sanguinaires de la décadence romaine, et précisément pour leur amour du sang.
La musique nous rend donc, par des moyens moins coupables et plus conformes à la fin divine que nous devons poursuivre, le même service que la satiété des plaisirs rendit aux âmes romaines. […] Les souvenirs et les vestiges romains que vous rencontrez à Cologne n’y semblent exister que pour confirmer le triomphe de ce christianisme poétique. […] Que viennent faire là les souvenirs d’Agrippine et de la colonie militaire romaine ?
En ce temps-là, Lyon n’avait pas de faculté de médecine, mais elle avait trois vastes hôpitaux : l’Hôtel-Dieu, la Charité et l’Antiquaille… — ce dernier ainsi nommé parce qu’il occupait dans la partie où se dressait la ville romaine, l’antique Lugdunum, l’emplacement même où la tradition situe la prison de saint Pothin, l’évêque martyr. […] dirais-je en substituant au vitaï du texte ce mot de virtus que les Romains, ces soldats-nés, chargeaient d’un tel sens !